Encore une fois, comme chaque jour de cette semaine, Harry se jeta au cou de Severus et prit ses lèvres avec possession. Généralement, Severus prenait Harry durement, avec ce besoin vital qui les animaient tous deux et ils finissaient l'heure à somnoler tranquillement sur le canapé, blottis dans les bras de l'autre. Severus fut tenté de se laisser porter comme il l'avait fait les jours précédents. Mais au fond, il savait que cela avait assez duré. Bien que cet accueil matinal était loin de lui déplaire, il sentait que ses sentiments pour le jeune homme avaient encore évolué bien que contre son grès et il avait besoin de mettre les choses au clair avec Harry. Il ignorait ce que Harry ressentait, bien qu'il se doutait que son attraction n'était due qu'à la potion à laquelle ils étaient tous les deux soumis. Mais il voulait en être sûr, pour clarifier la situation. Severus détestait cet entre-deux flou et incertain, il avait besoin d'une réponse concrète.
Avec douceur mais fermeté, il prit Harry par les hanches et le repoussa. Un regard blessé et confus scintilla dans les émeraudes du Gryffondor.
«Non Harry. Cette fois-ci, je crois que nous devrions parler, affirma-t-il sur un ton froid.»
Une certaine inquiétude monta en Harry quand il vit le visage neutre et sévère de Severus. Le terrible et insensible professeur de Potions était de retour, ce masque froid et distant que Harry méprisait si bien. Cependant, ce n'est pas de la haine qu'il ressentit à sa vision, plutôt une déception amère portée par une pointe de chagrin. Durant la semaine passée, Harry avait put apercevoir le potionniste lâcher prise. Il l'avait contemplé alors que les brumes du plaisir enivraient peu à peu son âme. Il avait admiré l'envie, le désir, la passion, le plaisir, le besoin, caresser le visage d'ordinaire si stoïque de son professeur. Et cela provoquait en Harry une certaine fierté ainsi qu'une sorte de fascination obsessionnelle.
Il aimait de façon inconditionnelle quand son austère professeur se laissait aller à être lui-même. Et il ne voulait pas perdre ce privilège. Il voulait connaître l'homme et la moindre de ses failles. Quand enivré par le plaisir il lui déclarait vouloir tout de lui, ce n'était pas seulement dans l'euphorie du moment. Il voulait réellement découvrir Severus dans son entièreté.
Harry s'interrogea sur les sentiments qui le liaient à son professeur de Potions. Il était conscient que son attraction pour lui n'était pas seulement physique et que la potion ne faisait pas tout. Mais dans ce cas, pouvait-on appeler cela de l'amour? Harry n'en était pas certain. Il ressentait tellement de choses à la fois, créant un ensemble si complexe et indescriptible. La nature de ce qu'il éprouvait semblait être bien trop vaste et nuancée pour être réduite à un mot vide de sens. Harry ne savait pas exactement ce qui le poussait vers son professeur, mais c'était là, et c'était tout ce qui comptait pour lui faire comprendre qu'il ne voulait pas perdre l'homme qu'il découvrait doucement.
Severus tourna le dos à Harry et ferma les yeux avec une douleur que le Gryffondor ne put voir. Il lui avait fallu un certain contrôle sur lui-même pour parvenir à repousser le jeune homme. Et le vide qui accompagnait ce geste était insupportable. Severus pestait intérieurement contre sa propre faiblesse.
C'est avec raideur qu'il alla s'installer dans son fauteuil, tentant de mettre de la distance entre Harry et lui-même. Le regard de Harry oscilla entre Severus et son propre fauteuil. Finalement, il céda à son impulsion et vint se planter devant Severus. Après une légère hésitation, il finit par se mettre à genoux devant le sorcier et posa sa tête sur ses jambes, la joue appuyée contre le tissu de son pantalon noir. Severus se crispa légèrement, mais s'abstint de tout commentaire.
«Potter, que sommes-nous en train de faire? Demanda-t-il avec un ton acide.»
Le fait qu'il avait ôté sa virginité à un gosse et de façon pour le moins brutale revenait avec violence à l'esprit de Severus. Et avec lui, son dégoût pour lui-même.
«Je ne sais pas. Je crois qu'on a cédé et qu'on exerce ce qu'on appelle communément le sexe. Pourquoi, que crois-tu que nous faisions Severus?
- Alors c'est ainsi Potter? On tire son coup et on retourne jouir de sa gloire éternelle, n'est-ce pas?»
Severus ne savait pas bien pourquoi ce constat le rendait si amère. Après tout, ce n'était pas comme s'il s'était attendu à une autre réaction.
Le ton de reproche qu'il employa irrita Harry.
«Parce que ce n'est pas ce que tu fais, toi? Tu baises le Survivant et tu retournes te prosterner au pied de ton vénéré Maître.
- Potter-
- Et puis arrête avec tes Potter. Tu m'appelles bien Harry quand tu prends ton pied, alors pourquoi pas quand tu me parles? S'énerva-t-il.»
Harry avait l'impression de n'être qu'un corps sur lequel prendre son plaisir pour Severus et cela l'irritait au plus au point.
«Je ne suis pas une putain Severus.
- Ce n'est pas ce dont tu donnes l'impression quand tu te jettes sur moi chaque fois que tu atterris dans cette pièce, répliqua-t-il avec une amertume douloureuse.»
Severus savait que ces mots étaient injustes. Il savait qu'il blessait le jeune homme en crachant son venin et il détestait le pincement au coeur que provoquait ce constat. Mais il ne pouvait s'empêcher d'être autrement. C'était un réflexe de défense dont il ne maîtrisait pas les tenants et aboutissants. Severus se détestait.
Harry releva vivement la tête et s'apprêtait à répliquer quand il aperçut le visage de Severus. Il était déformé par ce qui s'apparentait à de la douleur, un fugace instant avant que leurs yeux ne se rencontrent. Et Harry comprit. Il compris qu'encore une fois, Severus se cachait sous sa carapace de sarcasmes pour se protéger de toute douleur potentielle. Et la réalisation lui porta un tel coup au coeur qu'il ressentit une profonde compassion pour Severus.
Sous le coup de l'émotion, Harry se releva et tendit sa main pour effleurer la joue du sorcier au visage fermé. Son empathie était si forte à cet instant qu'il murmura, comme pour tenter de le réconforter:
«Je t'aime Severus.»
La bouche de l'espion tressauta en un tic nerveux alors que la phrase le transperçait comme un coup de poignard. Et voilà que le gosse pensait l'aimer et développait une obsession déplacée à son égard. Les seules personnes à avoir jamais aimé Severus avaient bien souvent mal finies. Et en voilà une de plus qu'il allait briser parce qu'elle avait eu le malheur de s'attacher à lui. Severus détruirait Harry. Il le savait. On ne restait pas intact après avoir aimé un monstre tel que lui.
«Ne parlez pas de choses dont vous ignorez tout, Potter, cracha-t-il avec dégoût.
- Tu as raison, concéda-t-il avec un ton doux. Je ne sais probablement pas ce qu'est l'amour. Mais je sais que je tiens à toi. Suffisamment pour souhaiter que tu cesse de te faire du mal à toi-même. Je ne connais rien de toi et des éléments de ta vie qui te poussent à être ainsi. Mais sache que les sentiments ne sont pas une faiblesse. Et que tu peux être toi en ma présence.
- Et qu'est-ce qu'être moi, selon vous Potter? Railla-t-il.
- Je ne sais pas, à toi de me le dire. Tout ce que je sais, c'est que ce n'est pas le professeur insensible au visage fermé.»
Harry encadra le visage de Severus de ses mains et caressa doucement ses joues de ses pouces. Il apposa son front contre celui du potionniste avec un soupir.
«Tu as le droit d'être humain Severus.»
Le concerné ferma les yeux pour s'isoler de l'environnement présent. Les paroles de Harry le touchaient plus qu'il ne le laissait entendre et cela l'agaçait profondément. Parce que quelque part, il n'aspirait qu'à croire le jeune homme. Mais il ne pouvait pas. Il ne le méritait pas. Et Harry finirait par se briser sous son toucher, tôt ou tard.
«Je ne peux pas Harry, finit-il par souffler dans un murmure.
- Pourquoi ça Severus?»
Severus rouvrit ses paupières et plongea dans deux lacs de jade apaisants. Son regard étaient si calme, si dénué de jugement, qu'à cet instant, Severus eut envie de le croire. Croire qu'il y avait encore un espoir.
«Parce que je te détruirais, lâcha-t-il dans un souffle, si bas, que si Harry n'était pas si proche il ne l'aurait probablement pas perçu.»
Un sourire triste fleurit sur les lèvres du jeune sorcier.
«Penses-tu réellement pouvoir me briser plus que ce que la vie ne le fait déjà?»
Une lueur de peine s'alluma dans les yeux émeraudes. Et celle-ci était insupportable à soutenir pour Severus. C'est pourquoi il enfouit une main autoritaire dans la chevelure de Harry et écrasa leurs lèvres ensemble avec besoin, rapprochant sa chaleur de la sienne. Severus voulait croire que l'amour, ou quelque soit l'étrange sentiment qui les liait, était capable de chasser le malheur. Il voulait croire que la chaleur de leur union repousserait le dense voile des ténèbres. Mais la vie n'était pas un conte de fées. Et il n'y avait pas de destin lumineux qui les attendait au bout du sinueux chemin de leur vie encombrée par les embûches d'une guerre meurtrière. Alors Severus embrassait pour oublier. Il se noyait dans la douceur des lèvres de son Gryffondor pour enterrer la cruauté du monde.
C'est qu'il avance notre snarry... :)
