Il avait fallu une semaine complète à Osiris pour désamorcer les sécurités placées autour des informations sur le Citrus Mortifero, même en ayant connaissance de chacune d'elle. Visiblement, Dumbledore attachait une importance démesurée à sa création citronnée...
Osiris avait finalement récupéré un parchemin -d'une taille assez désolante au vu des efforts requis pour l'obtenir- et Harry et lui étaient actuellement penchés dessus sur la table de la salle à manger. On pouvait y lire de la fine écriture du vieux sorcier:
«Citrus Mortifero, premier poison à base de citron.
Le Citrus Mortifero est, comme son nom l'indique, un poison à base de citron. Bien sûr, l'acidité de l'agrume étant tout de même nocive seulement à forte dose, il n'est pas classé dans les poisons les plus puissants. Toutefois, il faut se méfier des apparences car correctement préparé, il peut tout de même être mortel. Une fois diffusé dans le sang à l'aide d'une injection, le sel et l'acide prennent environ 1 mois pour dessécher le corps du consommateur avant qu'il ne soit entièrement rongé par l'acide. C'est pourquoi, il ne faut pas jouer avec la nourriture mes enfants!!
Ingrédients:
- 100 citrons pressés et leurs zestes
- 10 cuillères à soupe de sel
- 1 sachet de graines de pavot
- 1 tasse de bave de crapaud
- 1 larme d'hippogriffe
Dans un chaudron en étain, verser les graines de pavot ainsi que la bave de crapaud et faire chauffer à feu moyen. Attendre d'avoir une couleur vert d'eau et une consistance fluide pour y ajouter le jus de citron ainsi que les zestes. Faire mijoter à feu doux pendant une demi-heure. Quand vous obtenez une couleur vert émeraude, ajoutez le sel et remuer 20 fois dans le sens inverse des aiguilles d'une montre. Laisser la potion sur le feu pendant une heure. Retirer ensuite le chaudron du feu pour faire reposer 24h. Ajouter la larme d'hippogriffe et mettre en bouteille.»
Harry lut par morceau le parchemin sous ses yeux. Son esprit était sans cesse distrait par sa récente entrevue avec Severus. Il était indécis quant à ce qu'il souhaitait avec l'homme. Il était évident qu'il ne voulait pas retrouver son austère professeur aux remarques cinglantes et masque froid. Toutefois, il s'interrogeait sur ses attentes vis à vis de lui.
«Harry? Harry?»
Osiris posa sa main sur l'épaule du jeune homme pour attirer son attention. Harry revint à l'instant présent et secoua la tête pour s'éclaircir les idées. Il offrit un sourire désolé à Osiris qui ne put le voir.
«Excuse-moi j'étais perdu dans mes pensées... expliqua-t-il penaud. Tu disais donc?
- Je disais qu'il faudrait que nous puissions évaluer depuis quand le poison était dans son corps à sa mort, afin d'être certain que c'est bel et bien la cause de son décès... Mais peu importe, décréta-t-il en balayant ses paroles d'un revers de main, à quoi pensais-tu donc?
- Je pensais à Severus, avoua-t-il un peu coupable d'avoir été si peu attentif lors d'un point si crucial.
- Severus? Demanda-t-il en relevant l'utilisation du prénom du sorcier.
- Oui... Je n'arrive pas à cerner les sentiments que je ressens à son égard.»
Osiris l'observa un instant. C'était étrange de discuter de cela avec Harry. La conversation lui semblait... déplacée.
«Peut-être serions-nous mieux installés dans la chambre pour continuer cette discussion...
- Tu as raison, acquiesça-t-il.»
Les deux sorciers se replièrent dans leur chambre, en prenant garde de bien ranger le parchemin sur le Citrus Mortifero.
Osiris s'allongea sur son lit, deux mains posées sous son oreiller pour soutenir sa tête, les jambes croisées avec nonchalance. Le regard de Harry oscillait entre son propre lit et celui d'Osiris. Finalement, il céda à son instinct, lui dictant qu'il avait besoin de soutien et d'un ancrage concret à l'instant présent pour mettre de l'ordre dans ses pensées et s'installa donc aux côtés d'Osiris, sa tête appuyée contre son torse. Osiris fut un instant déstabilisé par ce contact. Il sentit monter en lui une bouffée d'affection inappropriée pour le jeune homme. Son premier réflexe aurait été de le rejeter. Mais il savait que Harry avait besoin de lui en cet instant et c'est ce qui le poussa à ne rien faire, malgré l'illégitimité qui l'étreignait. Osiris jeta un regard au Gryffondor blotti contre lui. C'en était presque douloureux. Avec prudence et hésitation, le bras d'Osiris vint entourer le corps de Harry d'une éteinte rassurante. Une de ses mains trouva sa place au creux de son dos tandis que l'autre massait son crâne avec une tendresse bien trop naturelle.
Harry soupira contre son torse tandis que ses doigts s'enroulaient nerveusement autour des capes d'Osiris:
«Je ne sais plus où j'en suis Osiris. Je ne sais pas ce que je ressens pour lui.
- Qu'est ce qui te perturbes? Demanda-t-il d'une voix calme.
- Je- Je ne sais pas. On- Tu sais... L'attraction physique...
- Vous avez donc eu des relations sexuelles, constata-t-il avec un ton plat. Est-ce ce qui te dérange?
- Non! Bien sûr que non! C'est vraiment libérateur et- Hum. Oui enfin bref... Ce qui me pose question ce sont les sentiments que j'ai développé à son égard. Je veux dire, je ne sais pas si tu connais Severus mais il porte toujours ce masque froid et cinglant. Il se cache sous des montagnes de sarcasmes et de mauvaise-foi parce qu'au fond, il a juste peur d'être blessé. Mais pourquoi? Je veux découvrir cet homme. Mais cela va au-delà. Je veux- je ne sais pas ce que je veux, mais la tristesse que j'aperçois parfois dans son regard m'est insupportable. J'aimerais la comprendre et pouvoir la faire disparaître. Je veux qu'il soit heureux. Et libre. Et qu'il arrête de se faire du mal à lui-même. Je veux qu'il y ait quelqu'un pour l'aimer et le rassurer. Je veux qu'il arrête de se sentir attaqué en permanence. Je veux qu'il puisse baisser ses défenses en ma présence. Je veux qu'il puisse se sentir apaisé en ma présence. Je veux sa confiance. Je veux ses sourires et ses rires, aussi rares soient-ils! Je veux son bonheur, sa joie, ses moqueries, tout! Je veux tout de lui.»
Harry marqua une pause, essoufflé par sa longue tirade.
«Mais je sais bien que ce n'est qu'un souhait égoïste et impossible. Je n'ai pas la prétention d'être la personne qu'il lui faut. Mais j'aimerais au moins essayer...»
Harry s'arrêta, jouant pensivement avec les pans de la cape de son ami.
«Tu dois me prendre pour un fou, non? En réalité, je ne sais même pas si tu peux me comprendre. Peut-être n'as-tu jamais ressenti cela pour quelqu'un alors...
- Je comprends parfaitement Harry, affirma-t-il avec une sincérité douloureuse.»
Harry n'avait pas idée à quel point.
«C'est vrai? Toi aussi tu ressens ça pour quelqu'un?
- Il se pourrait...
- Oh? Qui est-ce? Interrogea-t-il curieux.»
La question serra la poitrine d'Osiris avec amertume.
«Personne. Mes sentiments n'ont pas d'importance, déclara-t-il avec un sourire triste que Harry ne put percevoir. Nous sommes ici pour parler de toi.
- Soit... J'espère pour toi que cette personne te retourne le sentiment alors. Je te souhaite d'être heureux Osiris..., vraiment.
- Moi aussi Harry, c'est tout ce que je te souhaite, une vie heureuse.»
Harry modifia légèrement sa position et vint se loger dans le creux du cou d'Osiris, respirant son odeur comme un réconfort. Osiris s'autorisa à poser sa joue au sommet du crâne du plus jeune, tentant de ne pas trop s'attacher à celui qu'il tenait dans ses bras. Au fond, il savait que c'était déjà trop tard. Leur conversation le lui montrait bien assez.
«Tu sais, reprit Harry, je lui ai dit que je l'aimais ce matin.»
Une douleur aiguë compressa la poitrine d'Osiris à cette déclaration. Douleur illégitime, il le savait parfaitement.
«Mais je ne sais pas si c'était vrai. C'est sorti comme ça, sous le coup de l'émotion.
- L'amour n'est-il pas une émotion?
- C'est en sentiment, c'est vrai... Tu penses que je l'aime?
- Je ne peux pas savoir à ta place, se força-t-il à répondre avec douceur. Ce qui est certain c'est que c'est une personne qui compte beaucoup pour toi. Toutefois, elle semble compter différemment, c'est peut-être que cela signifie quelque chose.
- C'est vrai, certaines personnes ont une grande importance pour moi. Ron... Hermione... Toi... Mais avec lui ce n'est pas pareil. C'est... indescriptible.»
Osiris tenta de ne pas compresser l'épaule du jeune homme sous la douleur qui devenait de plus en plus oppressante. Toutefois, c'est d'une voix parfaitement calme qu'il déclara:
«Je pense que tu devrais cesser de te prendre la tête et profiter des choses comme elles viennent. Tu auras les réponses à tes interrogations en temps voulu, en attendant, savoure les moments comme ils te viennent. Et... Ne laisse pas tomber Rogue.»
Cette phrase était plus difficile à prononcer que ce qu'il ne pensait. Osiris fut soudainement pris de nausées. Harry comptait sur lui et tout ce qu'il faisait c'était ramener son point de vue subjectif sans parvenir à conseiller le jeune homme justement. Il avait l'impression insoutenable de trahir la confiance que Harry lui accordait.
«Tu as raison Osiris, merci.
- Ce n'est rien Harry, ce n'est rien, conclut-il en massant son dos avec bienveillance.»
Pour le bien de Harry, Osiris devait occulter ses propres sentiments. Ils n'apporteraient rien de bon, il en était parfaitement conscient. Il devait ignorer son affection plus que déplacée pour le jeune sorcier, afin d'être à ses côtés quand Harry aurait besoin de lui,. Il serait son guide et appui, prêt à le soutenir dans la moindre épreuve. Mais pour préserver l'équilibre du Gryffondor, il devait faire abstraction de son attachement extrême pour lui. Après tout, c'était tout ce qu'il lui souhaitait: une vie heureuse.
