Dans les bras d'un autre

Chapitre 14


I'm not afraid of anything

I just need to know that I can breathe

- Avril Lavigne


De toutes les choses dont il avait besoin en ce moment, son père n'en faisait pas partie.

Sasuke poussa un soupir monumental avant de lancer ses bras sur son visage pour se cacher la vue, ce qui était plutôt enfantin puisque son père était assis à côté de lui, de quelle façon allait-il pouvoir se tirer de cette situation ?

- Sasuke, dit Fugaku Uchiwa, de sa voix grave et vibrante.

Un nouveau soupir.

- Ai-je raison d'assumer que tu as eu une soirée difficile ?

- Qu'est-ce que ça peut te faire, grommela Sasuke.

- Je te le demande, déclara le paternel.

Il n'avait aucune envie de vivre ce moment. Poussant un troisième soupir, Sasuke finit par se redresser, en prenant soin d'éviter le regard pesant et perçant de son père.

Ce dernier, un homme grand et intimidant de par ses yeux noirs d'encre, surmontés de sourcils épais, sa mâchoire forte et son visage austère aux traits durs, avait les mêmes cheveux noirs corbeaux que son fils. Ils lui arrivaient au cou. Ses épaules larges, étaient en ce moment drapés d'un costume chic et propre qui lui donnait l'allure d'un homme d'affaires occupé.

Quelle surprise, songea Sasuke en sautant du lit, de l'autre côté de là où son père semblait monter la garde.

Il dut cependant se donner un instant pour récupérer, lorsque la manœuvre le laissa étourdi et dangereusement vacillant. Il dut même prendre appui sur son lit comme un idiot ayant trop bu. Une petite voix dans sa tête lui rappela que c'était exactement ce qu'il était. Fugaku se retourna avec un sourcil levé. Il ouvrit la bouche mais Sasuke leva une main dans sa direction. Il n'avait pas besoin du jugement de son père trop parfait.

- Non, ça va, claqua-t-il.

Il se dirigea vers sa penderie, remerciant le ciel d'être au moins vêtu d'un tee-shirt. Il n'arrivait pas à se souvenir de comment il avait trouvé son lit la veille, et plus il essayait, plus ce martèlement dans son crâne s'intensifiait, alors il préférait laisser cette tâche à plus tard.

Sasuke trouva un pantalon et l'enfila gauchement, luttant contre les étourdissements qui ne le lâchaient pas. Ignorant totalement son père, il se rendit à la salle de bain. Il s'aspergea le visage d'eau froide et, pendant une seconde, eut une drôle de sensation en fixant le comptoir. Sans savoir pourquoi, le visage de Naruto bondit à sa mémoire. Il crut sentir son odeur et il imagina, pour une raison obscure, le toucher de sa peau sur la sienne. Ce fut une sorte de vision… comme un déjà-vu, mais dont il ne comprenait pas la provenance.

Est-ce que Naruto l'avait ramené ici hier soir ?

Sasuke se brossa les dents rapidement puis retourna à sa chambre. Là, il trouva son père, malgré le fait qu'il avait espéré qu'il n'y serait plus.

- …qu'est-ce que tu fais ici ?

Fugaku se leva et se tint au milieu de sa chambre. Sasuke, ne supportant pas son regard désapprobateur, détourna les yeux.

- Ai-je besoin d'une raison pour m'enquérir de l'état de mon fils ?

- Pourquoi… chuchota-t-il, inspirant profondément. …es-tu ici ?

- J'ai téléphoné plusieurs fois, Sasuke, et tu ne retournes jamais mes appels. Hier soir, lorsque tu as décroché…

- J'ai quoi ? s'étonna Sasuke en relevant la tête.

Fugaku fit un pas vers lui.

- Tu as décroché, mais tu semblais occupé. Il y avait plusieurs voix, de la musique.

Sasuke ne se souvenait pas de ça, mais il se passa une main sur le front en soupirant une énième fois, encaissant le choc et l'humiliation. Son père avait dû appeler pendant qu'il était complètement bourré.

- Papa, je suis désolé, j'étais…

- Saoul ? suggéra Fugaku d'une voix claquante en le fixant durement du regard. Oui, je m'en suis rendu compte, figure-toi.

Tout dans la dégaine de son père prouvait qu'il s'apprêtait à lui faire un sermon, ou à le traîner davantage dans la boue. Comme s'il n'avait pas déjà payé le prix de ses excès de la veille. Sasuke se sentait encore étourdi et malade. Il se sentait plus faible que jamais et il n'avait pas la force de se battre avec son père.

- T'es obligé de prendre cet air-là ? Franchement, c'est pas un crime de rendre visite à des amis et de s'amuser un peu. Je suis comme tout le monde, tu sais ?

- Mais tu ne t'es visiblement pas amusé, mon garçon, insista Fugaku.

Sasuke n'eut pas le temps de bouger lorsque son père s'approcha et lui tourna, avec une douceur inattendue, le visage.

- J'ai appelé Itachi après n'avoir rien obtenu de ta part, et il m'a appris qu'il avait envoyé un ami pour te récupérer. Il a dit que tu t'étais blessé.

Sasuke fut pris de court par le geste presque tendre de son père, le genre de gestes normalement posés par sa mère. Pendant une brève seconde, il sentit son cœur se serrer douloureusement, puis il reprit ses esprits et dégagea la main de son père de la sienne.

- Ça va, j'vais bien !

- Tu devrais faire examiner ça par un médecin, indiqua son père, toujours de ce même ton de voix sévère.

- C'est pas la peine.

- C'est vrai, ce qu'on raconte ? s'intéressa soudain Fugaku.

Sasuke s'était décalé, fuyant le regard insistant et infernal de l'avocat.

- Ça dépend de ce qu'on raconte…

Fugaku se tourna pour le suivre des yeux.

- C'est terminé avec la petite Haruno ?

Sasuke eut deux chocs : le premier, c'était de découvrir qu'il avait, d'une façon ou d'une autre, rompu avec Sakura. Le second, c'était que son père était au courant.

Il était même surpris que son père sache qu'il avait une petite amie. Il avait commencé à fréquenter Sakura peu après le… décès de sa mère. A peu près à la même période, il avait coupé les ponts avec son père. Alors ça voulait dire que son père s'était renseigné sur son compte ? Il parlait sûrement à Itachi. Et Itachi lui racontait toute sa vie.

Sasuke ne savait pas s'il se sentait frustré et en colère que son père se mette le nez dans sa vie ou alors s'il en était heureux. Heureux que cet homme qui avait toujours été trop réservé avec sa propre famille ne s'inquiète sur son compte…

N'exagère pas, Sasuke, se dit-il pour lui-même. Se renseigner sur ses affaires privées ne veut pas dire s'inquiéter.

- Qui t'a dit ça ?

Fugaku avait les mains plongées dans les poches de son long manteau noir.

- Itachi m'en a glissé quelques mots.

Et Itachi avait dû le découvrir sur Insta ou par quelqu'un d'autre. Merde. Trois fois merde. Sakura avait rompu avec lui ? Et il avait oublié ? Ou alors était-ce lui ? Il ne savait pas ce qui était pire : se faire jeter par sa petite amie et n'en garder aucun souvenir ou le contraire. Le premier scénario le faisait passer pour un imbécile et le deuxième pour un salaud.

Que s'était-il passé hier soir ? Il fallait qu'il en ait le cœur net.

Sasuke se pencha vers la pile de vêtements et son sac qui traînaient par terre près du mur. Il farfouilla et trouva rapidement son téléphone.

- Sasuke, appela son père derrière lui. Si je suis ici, c'est parce que nous devons parler. Je…

Sasuke pivota et lui fit face.

- Ça ne peut pas attendre ? scanda-t-il.

Fugaku parut étrangement ébranlé. Troublé. Voilà une expression qu'il n'avait pas vu sur son visage depuis très longtemps. C'était à peine si son père avait versé des larmes lorsque sa mère avait…

- Non, Sasuke, répéta Fugaku plus fermement. Ça ne peut pas.

- Eh bien moi j'ai autre chose à faire ! Il y a les exam' de fin de trimestre et mon boulot et…

- Et si nous dînions ensemble, l'interrompit son père. Samedi prochain. Avec ton frère.

Sasuke se tut et regarda son père. Fugaku semblait s'être adouci, mais à peine.

Un dîner. Fugaku, Itachi et Sasuke autour d'une table, pour la première fois depuis des siècles. La dernière fois que c'était arrivé, Itachi était parti en claquant la porte, après une grosse engueulade sur son avenir. Il avait 17 ans, Sasuke en avait 10 ans. Itachi avait définitivement quitté la maison peu de temps après cette dispute, et avait été recruté dans l'équipe de Konoha, devenant rapidement une super star du hockey.

La dernière fois, sa mère était en vie.

Ce n'était pas une bonne idée. Il se disait qu'il y avait peu de chances que Fugaku et Itachi se disputent cette fois, parce qu'ils avaient tous deux bien mûri et la question de l'avenir d'Itachi n'était plus un sujet chaud. L'eau avait coulé sous les ponts.

Non, Sasuke avait peur d'être le centre d'attention de son père et pas pour les bonnes raisons. Il n'avait pas envie de l'entendre lui répéter que ses choix étaient les mauvais, qu'il était sa plus grande déception, qu'il était l'enfant raté, le potentiel gâché, le fils indigne… Pas envie de se faire rabâcher les oreilles à propos de ses études, de son boulot à temps partiel que son père trouvait dégradant et humiliant, et c'était sans même tâter le terrain sur son appartement. Sasuke voyait la déception, le jugement silencieux et la désapprobation dans les yeux de son père tandis qu'il regardait tout autour.

Mais il souhaitait encore plus que son père parte maintenant, et la seule façon de le renvoyer d'où il était venu, c'était encore d'accepter cette fichue invitation à dîner.

- OK, grommela-t-il. Ouais, ok. Pas de problème.

- Tu seras là ? insista Fugaku.

- Ouais, lâcha Sasuke. Oui, se reprit-il. Je serai là, père.

Enfin, songea Sasuke. Fugaku parut satisfait de sa réponse.

- Bien. Je ferai envoyer une voiture.

- Bon sang ! C'est pas la peine. Je… Itachi pourra très bien m'emmener.

Fugaku le toisa.

- Tu es sûr ?

- Certain.

- Très bien, répéta Fugaku.

Et là, comble de surprise, le patriarche s'approcha et, choquant Sasuke jusqu'au creux de ses os, entoura son fils de ses bras et l'étreignit. Certes, ce fut une accolade gauche et presque froide, mais son père ne l'avait pas pris dans ses bras depuis qu'il était haut comme trois pommes. Fugaku n'était pas un homme qui exprimait beaucoup ses sentiments.

Rigide, Sasuke ne sut comment réagir. D'un côté, il était agacé et énervé par cette visite impromptue, mais de l'autre, et surtout en sentant la proximité de son père, qui ne lui parut ni intransigeante ni menaçante, il se sentit fondre. Un élan de tristesse le saisit à la gorge et il dut combattre les larmes qui s'accumulèrent soudainement.

Pour la première fois depuis la mort de sa mère, Sasuke crut retrouver son père. Et non ce bloc de glace qu'il avait été.

Fugaku se retira et Sasuke pencha aussitôt la tête, gêné et loin d'être prêt à laisser son père remarquer ses larmes.

- Ça m'a fait plaisir de te voir, marmonna Fugaku puis il reprit une voix dure et impassible. Hum. Tâche de faire vérifier ton front. Allez, bonne journée.

Sasuke ne put bouger tandis que son père s'éloigna et disparut dans le couloir. Il aurait dû l'accompagner à la sortie, mais il était figé.

Ce ne fut que quelques minutes plus tard qu'il réagit enfin, lorsque son portable s'illumina dans sa main.

Merde, il avait des dizaines de textos ! La plupart venait de Karin, envoyés hier soir et durant la nuit :

(00 :46) T'es en vie ?

(1 :01) Sasuke ?

(1 :02) Je veux juste m'assurer que tu vas bien. Réponds stp !

(2 :15) Bon j'imagine que t'es en train de ronfler chez toi, du moins je l'espère ! Réponds dès que tu le peux c'est un ordre

Son cœur se serra en voyant, noir sur blanc, un message de Naruto Uzumaki :

(7 :07) J'espère que tu vas bien, je t'ai laissé des cachets sur la table de la cuisine. Je te conseille un grand verre d'eau et une sieste avec, si tu peux te le permettre bien sûr. Bonne journée !

Sasuke dut se rendre à son lit pour se laisser tomber, ses jambes ne le soutenant plus.

L'attention de Naruto était attendrissante et une douce chaleur se répandit dans sa poitrine à la pensée du grand blond qui l'avait déposé dans son lit et qui avait pensé à lui sortir des comprimés, qui avait anticipé le fait qu'il aurait la gueule de bois au matin. Il rougit même à imaginer ses bras le portant… Avait-il été inconscient ? Ou à moitié endormi ? Définitivement trop bourré pour en avoir gardé de doux souvenirs. Qu'est-ce que t'es con, Sasuke !

Donc, Naruto était visiblement celui qui l'avait ramené chez lui, d'où sa vague sensation de l'avoir vu ici hier. Mais comment ?

Un autre message provenait d'Itachi.

(8 :13) Hey, comment tu te sens ? Ton amie a dit que tu t'étais blessé hier soir. Appelle-moi rapidement.

Sasuke tapa une réponse à Karin avant d'appeler Itachi.

(10 :30) Je vais bien, t'inquiète pas.

Itachi laissa sonner trois fois avant de répondre.

- Sasuke, enfin ! s'exclama-t-il dans le combiné.

- Salut Itachi.

- Woow, on dirait qu'une tonne de briques t'est tombé dessus.

- J'en ai l'impression aussi…

- Il semblerait que tu n'aies pas eu autant de plaisir que tu croyais ! s'esclaffa Itachi.

- Bon. J'ai compris, j'ai été stupide. Mais je me suis amusé.

- Vraiment ? Bon, c'est au moins ça. Mais qu'est-ce qui t'est arrivé ?

- Je…

Sasuke se concentra une seconde, ignorant les élancements martyrisant qui martelaient son crâne comme un marteau piqueur. Plus rapidement qu'il l'aurait cru, ses souvenirs lui revinrent, ou du moins en partie.

- Je me suis relevé dans le lit et j'ai perdu équilibre et après je me suis cassé la gueule sur une table de chevet.

Itachi rit davantage, le salaud, se moquant ouvertement de son petit frère. Sasuke leva les yeux au ciel.

- Mais attends, demanda soudain Itachi. Comment ça, le lit ? Quel lit ?

Ce fut à ce moment-là que Sasuke frappa un mur. Bien vite, et bien malgré lui, d'autres souvenirs surgirent, refaisant surface après avoir passé la nuit dans un océan noir et sombre et tumultueux. Il revit Kurama, son corps lourd pressé sur le sien, dans le lit, mais aussi contre le mur du couloir, au milieu des invités. Il se remémora le contact de ses lèvres, sa bouche chaude et sensuelle, ses baisers qui l'avaient étourdi.

- Euh…

- Bon écoute, j'arrive à l'aréna pour mon entraînement matinal. Je te rappelle, d'accord ?

Sauvé.

- Itachi ? s'exclama Sasuke.

- Ouais ?

- Tu sais que papa… En fait, il était chez moi, quand je me suis réveillé.

Il entendit Itachi soupirer.

- Je sais, il m'a appelé.

- Alors tu sais pour samedi prochain ?

- Ouais. Faut que j'y aille, mais t'en fais pas, ce sera juste un dîner et… Je crois que ça nous fera du bien, à tous les trois.

- Peut-être…

- T'en fais pas, p'tit frère, s'enquit Itachi. Et rappelle-moi si tu as besoin de quoique ce soit.

- OK.

Sur ce, les deux frères mirent fin à l'appel.

Sasuke resta un instant immobile, les pensées en émoi, le cœur qui battait fort lorsqu'il laissait ses pensées aller vers Naruto… pourtant, il avait embrassé Kurama.

Son cerveau plus lent ce matin qu'il ne l'était d'ordinaire, Sasuke réalisa brusquement pourquoi les rumeurs disaient que Sakura et lui, c'était du passé. Il se rappela ce qui s'était passé quelques instants avant qu'il se cogne la tête. Sakura était entrée et avait tout vu. Lui, couché sur le lit sous Kurama, les jambes largement écartées et en plein baiser passionné. Son frère. Le frère de Sakura.

Comment avait-il pu être si insensible, si stupide ?

Sasuke soupira. Il se rendit à la cuisine et vit les comprimés laissés par Naruto. Suivant ses conseils, il se versa un verre d'eau et avala le tout en se disant que ce n'était pas juste une sieste dont il avait désespérément besoin.

Il avait vraiment tout faux…


- Je suis vraiment soulagée de voir que tu vas bien, souffla Karin.

Sasuke leva la tête, tout en continuant de frotter la table avec un linge. Il avait son tablier noué autour de sa taille et portait petit bandana noué sur son front qui retenait ses cheveux, et cachait du même coup son cocard qui ferait sûrement frémir son patron ainsi que les clients du café.

Karin, rayonnante, leva un sourire vers lui tandis qu'il nettoyait sa table.

- Je suis loin d'aller bien, marmonna-t-il.

- D'accord, t'as trop bu et tu t'es pété la gueule, mais en gros… tu tiens debout, et t'es en un morceau, sourit Karin.

Sasuke ne put s'empêcher le rictus qui étira ses lèvres, lorsqu'il plongea dans les yeux rieurs de son amie.

- Assieds-toi une minute, insista la jeune fille.

Sasuke jeta un œil vers le comptoir, où Juugo semblait gérer les deux clients qui attendaient. Son patron n'était nulle part en vue et à part un vieil homme qui mangeait un croissant contre la fenêtre, et Karin, il n'y avait personne d'autre. Kimimaro balayait le plancher près de l'entrée, il avait la vue directe sur Sasuke, mais il ne dirait rien au boss si Sasuke s'asseyait cinq minutes avec Karin. Il était plutôt cool, Kimimaro.

Il se laissa tomber face à Karin.

- Chéri, t'es tout pâle.

- Qu'est-ce que tu veux que j'y fasse.

- Raconte-moi, murmura Karin en se penchant vers lui. Que s'est-il passé hier ?

Sasuke baissa les yeux, sortant son téléphone de sa poche pour l'allumer, mais soupira en n'y voyant aucune réponse de Sakura.

- J'ai fait l'imbécile et… maintenant Sakura refuse de me répondre.

- C'est vrai alors ? Tu as vraiment couché avec son frère ?

Les yeux noirs de Sasuke remontèrent vivement vers la jeune femme devant lui.

- Quoi ? Non, pas… On n'a pas couché ensemble.

Ils n'avaient pas couché ensemble, non ? paniqua Sasuke intérieurement. Il le saurait, n'est-ce pas ? Il était encore habillé, quand Sakura les avait surpris.

- Mais vous vous êtes embrassés.

- O-Ouais, mais… Karin, je ne sais pas pourquoi j'ai…

- Il te plaît ?

Du rouge lui monta aux joues.

- Ah bien ! En voilà, des couleurs ! J'ai visé dans le mile.

- Karin, gronda Sasuke. J'étais complètement bourré, je ne sais pas ce qui m'a pris.

- Et maintenant que tu es sobre, que ressens-tu pour ce gars-là ?

- Pour l'instant, je me sens stupide et coupable et j'ai vraiment besoin que Sakura…

Sasuke s'interrompit lorsqu'une silhouette se planta devant eux. Pendant une petite seconde, il crut que c'était son patron venu le sermonner, mais Sasuke sentit son sang ne faire qu'un tour lorsqu'il reconnut Sai. Le mec de Naruto.

Ses prochaines paroles moururent dans sa gorge devenue toute sèche, et il fixa le jeune homme, qui lui retourna son regard avec un sourire méga faux. Un frisson fit dresser les poils sur son corps. Sasuke ravala sa salive.

- Bonjour, s'enthousiasma Sai sur un ton joyeux et poli. Comment vas-tu, Sasuke ?

- Euh…

Il échangea un regard curieux avec Karin lorsqu'il parvint à détourner les yeux de ceux, hypnotisant, de Sai.

- Bien.

- Nous venons prendre un café avant le match de Naruto.

Sur cette annonce de Sai, Sasuke vit Naruto apparaître, arrivant vers eux avec deux cafés. Sai, quant à lui, avait en main un sachet contenant sans doute un beignet.

Sasuke croisa le regard bleuté de Naruto et sentit son souffle se perdre complètement. Il se sentit également encore plus stupide et horrible. Il avait sûrement l'air d'un mec à deux doigts de la dépression, ses cheveux en désordre sous ce foulard à la Cendrillon, qui dégageait son visage pâle et cerné. Il avait les lèvres sèches et il ne s'était jamais senti si vulnérable et fragile, autant intérieurement qu'extérieurement et… Naruto ? Naruto était étincelant comme un véritable soleil. Et il détestait que cet homme qui lui plaisait ne le voit dans cet état si pathétique.

Naruto était si grand et si beau, drapé dans ce long manteau, sous lequel il devinait son corps bâti et sculpté dans le marbre. Solide et fort et magnifique. Merde. Sasuke sentit de nouvelles larmes monter à ses yeux et s'il devait les échapper, ce serait le moment le plus humiliant de sa vie.

- Hey, Sasuke, s'exclama Naruto. Tu… tu vas mieux ? Tu as reçu le message que je t'ai envoyé ?

Sasuke se leva brusquement, manquant de se prendre les pieds dans les pattes de la table. Il se rattrapa de justesse et pencha la tête en passant devant eux.

- Je… je dois retourner au boulot, hum. A-A plus Karin. Naruto, salua-t-il faiblement avant de s'éloigner au pas de course.

- Ça va, Sasuke ? s'étonna Juugo lorsqu'il revint derrière le comptoir.

Il se planta devant prêt à servir les clients, mais soudain, la vague de tristesse qui l'assaillit fut plus forte que les précédentes et il crut se noyer. Il dévisagea le client qui s'approchait, incertain, puis, ne pouvant supporter cette pression plus longtemps, Sasuke se retourna. Il dénoua son tablier avec des doigts malhabiles, essuya sa joue furieusement et s'enfuit dans les cuisines au pas de course, ignorant son ami Juugo qui appela son nom.

Au fond de la salle à manger, Naruto n'avait pas manqué une seconde de cette scène. Ses yeux bleus virent le jeune brun disparaître à l'arrière du comptoir.

- Naruto, tu m'écoutes ? Naruto ?

Le blond secoua la tête et retourna son attention vers Sai, assis face à lui, ses doigts pâles enroulés autour du café. Naruto se perdit un moment dans ses pensées, revoyant le moment comme s'il ne pouvait cesser de le revivre chaque instant qui passait.

Des doigts pâles et longs, comme ceux-là, mais tellement différents. Des doigts timides, doux, qui s'étaient accrochés à son tee-shirt pendant que Naruto embrassait sa bouche…

- Hm, fit-il. Ouais, quoi ?

- Je disais que Sasuke semblait…

- Quoi ? tonna Naruto, soudain bien réceptif.

Sai le toisa, surpris. Calculateur.

- Sasuke est quoi ?

- Mal en point.

Naruto s'adoucit instantanément, et ressentit une vague tristesse. Une sorte de douleur.

- Ouais… Il ne va pas bien ces derniers temps.

- Tu ne devrais pas t'en faire avec ça. Tu as déjà assez de pression sur tes épaules, avec ta carrière, les matchs, l'entraînement.

Naruto fusilla Sai du regard.

- Qu'est-ce que tu veux dire ? Quoi, c'est mal de compatir avec quelqu'un qui vit un deuil ?

- Non, répondit Sai. Mais Sasuke n'est pas de ton âge, il a des amis et il a sa vie et tu ne devrais pas t'investir autant. Tu as la tienne. Nous… nous avons notre vie, tenta Sai plus tendrement.

Naruto se sentit plus calme, même si une partie de lui ne pouvait mettre Sasuke de côté dans sa tête. Il continua d'observer Sai.

- Je sais…

Il tendit la main et Sai y mit la sienne. Mais ses doigts étaient froids, et la maigre chaleur déposée sur sa peau à cause de la tasse de café ne semblait pas suffisante pour réchauffer Naruto. Il aurait voulu se laisser aller à cet instant, ce petit moment en tête à tête avec son amoureux, Dieu savait que le temps passé avec lui s'était fait rare dernièrement. Sai lui manquait terriblement, mais il était incapable de se donner entièrement. Incapable d'oublier Sasuke et son visage triste et ses si beaux yeux remplis de larmes et sa bouche tendre sur la sienne et son corps si près de ses bras… Il avait eu envie de l'entourer, de le prendre, le couver, le protéger.

Il en avait toujours envie. Férocement.

- Est-ce qu'on se voit ce soir ? demanda Sai.

- Hm ?

Naruto reposa son regard sur lui, réalisant malgré lui sa fâcheuse manie de laisser son regard diverger vers le comptoir du restaurant, là où Sasuke avait disparu quelques instants plus tôt.

- Après ta partie, tu vas rentrer à la maison ?

Incertain par cette question, Naruto demeura une courte seconde silencieux.

- Tu as envie que je rentre ?

- Je crois qu'il est grand temps que toi et moi reprenions notre vie d'avant. On dînait ensemble, on passait nos soirées ensemble… Ça me manque, tu sais ? Mon petit ami me manque.

Cette déclaration ne le laissa certes pas indifférent. Sai lui sourit et Naruto finit par sourire lui aussi.

Il ne pouvait pas avoir Sasuke. C'était impossible. Il aimait Sai.

Il tendit les mains à nouveau et Sai les enserra dans les siennes. Il aimait Sai, il était amoureux de son petit ami et il était, effectivement, grand temps qu'il fasse de l'ordre dans son cœur.


A suivre...


Hey ! Désolée pour mon retard, mais j'espère quand même que vous avez apprécié cette suite ! :) L'inspiration est revenue, enfin, fallait pas désespérer... ^^

Bisous et à bientôt,

Tch0upi