On rattrape le retard petit à petit ^^ . Il me semble que ce chapitre est le plus long de tous jusqu'ici. Et je dois dire qu'il me tient particulièrement à cœur. J'espère qu'il vous plaira.
Bonne lecture :) !
10 Décembre
Daïki se fait réveiller en trombe par son père. Comme souvent, il s'est rendormi après que son réveil ait sonné. Misère… Il se prépare à la hâte pour vite échapper aux remontrances paternelles. À force, il connaît le monologue de désespoir de son père par cœur : « Qu'ai je fais pour avoir un fils pareil, pas foutu de se lever à l'heure, irresponsable, ne gardera jamais un boulot s'il est toujours en retard et bla bla bla ! » La journée commence bien. Il est d'une humeur de chien et quand il sort de son immeuble, ça ne fait qu'empirer. Il se décompose en réalisant que dans la précipitation il a oublié d'ouvrir le tiroir du jour. La petite case numéro dix qu'il avait vaillamment résisté d'ouvrir la veille, au prix de précieuses heures de sommeil tourmentés. Il faut dire qu'il avait noté un phénomène récurrent, et certainement volontaire de la part de son ou ses père Noël mystère. En effet ces derniers jours, les petits trésors qu'il avait découvert dans son calendrier lui rappelaient ses amis, et avaient même été offerts par eux, il en est certain. Donc en toute logique… s'il y en avait vraiment une à tout cela, aujourd'hui il devrait trouver un objet lié à son rival. Kagami portant le numéro dix sur son maillot de basket, le présent d'aujourd'hui devait forcément venir de lui. Si tant est que le tigre ait participé… Et c'est bien ça qui le met le plus en rogne ce matin. Outre le fait que c'est lundi, un lundi matin post week-end de rêve (malgré son début de rhume heureusement endigué). Pour une fois, il est d'accord avec son père : irrécupérable... Sur le trajet du lycée, il enfouit son nez dans son écharpe et soupire de frustration contre lui-même. S'il avait moins eu la flemme de se lever, à l'heure qu'il est, il saurait ce que Bakagami lui a offert. Maintenant, ça va l'obséder toute la foutue journée !
Foutue journée au cours de laquelle la loi des séries se vérifie, juste au cas où il n'y croyait pas déjà. Après avoir loupé le réveil, sa rame de métro était tombée en panne, ce qui lui avait valu un énième retard et donc, une heure de colle supplémentaire dans sa collection. Sans compter sa sale note au test rendu par le prof de maths et l'annonce de la liste interminable des devoirs qu'il aurait à faire pendant les vacances, en plus de l'exposé d'histoire. Liste qui donnait tout de suite moins envie d'y être ! Aomine ne sait pas tellement si c'est cette accumulation de mésaventures ou bien la perspective de ce qui l'attend chez lui dans son calendrier de l'avent qui rend cette journée atrocement longue, mais il lui semble que le temps aujourd'hui s'écoule vraiment différemment. Vraiment plus lentement ! Il a néanmoins profité de sa retenue pour rêvasser au petit tiroir de bois numéro dix, le visualisant, se rappelant sa taille, sa couleur, imaginant ce qu'il pouvait contenir. Il croit se souvenir exactement où il est : en haut à gauche, sur la troisième branche de l'arbre magique, il n'aura donc pas à le chercher trop longuement.
Lorsque le glas de sa délivrance retentit enfin, il se précipite sur le chemin de chez lui à toute vitesse, impatient de découvrir son petit cadeau. C'est à peine s'il salue ses parents à son arrivé, tandis qu'il se dépêtre rageusement dans son manteau le retenant inexplicablement prisonnier. Il envoie valser ses précieuses baskets et monte à l'étage, enjambant les marches deux à deux. Il bondit sur le palier et entre dans sa chambre en coup de vent, se plaquant contre la porte pour la fermer et reprendre son souffle, avisant l'immense sapin de bois sur son bureau. Enfin ! En s'approchant, il voit le numéro dix juste là où il se le figurait. Sur un petit rectangle où est peint la flamme d'une des bougies décorant l'arbre. Doucement, fébrilement, presque religieusement il tire sur le petit bouton faisant office de poignée pour révéler son trésor journalier. Aomine reste interdit, quelque peu surpris par ce qu'il découvre. Au fond du tiroir, une clé USB rouge, accompagnée d'un petit mot : « listen to me ». Un sourire lui échappe et son cœur fait une chambardée en constatant que son raisonnement était juste.
Il saisit donc l'objet d'une main et allume son enceinte de l'autre. Il branche sa trouvaille sur sa barre de son, sélectionne le mode qui convient, monte un peu le volume et prend la petite télécommande. D'un coup d'œil, il vérifie que la porte est fermée et s'installe joyeusement sur son lit, pour écouter le mystérieux présent dans les meilleures conditions possibles.
Confortablement calé dans ses oreillers, à distance, il lance la lecture. Les premières notes retentissent dans sa chambre, tout autour de lui, et Daïki se fige. Retenant son souffle. Cette musique… il la reconnaît instantanément. Exactement comme la première fois qu'il l'a entendu, elle le happe, l'emportant loin, très loin au fond de lui, et hors de son corps à la fois. Sa respiration s'accélère à l'écoute des chœurs, il sent le sien cogner durement ses côtes, répondant avec ardeur aux premières notes de la batterie du morceau. Lorsque la voix du chanteur s'élève, puissante, déchirante, il déglutit, la gorge nouée. Cette chanson le trouble intensément, le remue profondément. Chaque paroles résonnent en lui, trouvant un écho dans les profondeurs de son âme; avec la même justesse et la même puissance que la toute première fois qu'il l'a écoutée, si ce n'est plus… Daïki passe un bras sur son visage, remet le morceau depuis le début une fois qu'il se termine, et se laisse aller à ses souvenirs, emporté par la voix d'Oliver Sykes, chanteur de Bring me the horizon.
What doesn't kill you
Makes you wish you were dead
Got a hole in my soul growing deeper and deeper
And I can't take
One more moment of this silence
The loneliness is haunting me
And the weight of the world's getting harder to hold up
Sa décente aux enfers, son talent qui explose, le coupant du reste du monde, du commun des mortels, monstre…
It comes in waves, I close my eyes
Hold my breath and let it bury me
I'm not OK and it's not alright
Won't you drag the lake and bring me home again
Who will fix me now?
Dive in when I'm down?
Save me from myself
Don't let me drown
Who will make me fight?
Drag me out alive?
Save me from myself
Don't let me drown
La solitude, l'abandon de ses adversaires, les uns après les autres, de ses coéquipiers, des amis devenus rivaux, dépression…
What doesn't destroy you
Leaves you broken instead
Got a hole in my soul growing deeper and deeper
And I can't take
One more moment of this silence
The loneliness is haunting me
And the weight of the worlds getting harder to hold up
L'entrée fracassante de Kagami dans sa vie, la naissance d'un espoir, la déception, le doute, la victoire, encore …
It comes in waves, I close my eyes
Hold my breath and let it bury me
I'm not OK and it's not alright
Won't you drag the lake and bring me home again
Who will fix me now?
Dive in when I'm down?
Save me from myself
Don't let me drown
Who will make me fight?
Drag me out alive?
Save me from myself
Don't let me drown
Sa défaite cuisante, le ramenant de force à une réalité à laquelle il n'osait plus croire, cruelle remise en question, délivrance …
'Cause you know that I can't do this on my own
'Cause you know that I can't do this on my own
'Cause you know that I can't do this on my own
Leurs one on one, la prise de conscience de tout ce mal infligé, aux autres, à lui-même, le chemin de la rédemption, du pardon…
Who will fix me now?
Who will fix me now?
Who will fix me now?
Dive in when I'm down?
Save me from myself
Don't let me drown
Ce jour-là…
Enjoué, excité, il arrive au point de rendez-vous et trouve Bakagami en train de lacer ses chaussures, assis sur un banc. Dos à lui le tigre ne le voit pas et son casque fixé aux oreilles, comme souvent, il ne l'entend pas. D'humeur joueuse, la panthère se rapproche furtivement et dans un geste assuré, arrache les écouteurs sacrés à leur propriétaire. Tout en commençant sa fuite au pas de course, il place le casque sur ses oreilles, dans le but de le faire encore plus enrager. Mais ce qu'il entend le stop net. Kagami, déjà élancé à sa poursuite, manque de lui rentrer dedans lorsqu'il pile sans prévenir, sous le choc. Il ne connaît pas le groupe. Il ne connaît pas la chanson. Il ne comprend pas les paroles. Et pourtant… la musique est un langage universel, s'affranchissant des langues et des frontières, comprises de tous les cœurs à l'écoute. Aomine n'est pas très doué en anglais, mais la voix du chanteur le percute, transperce sa carapace aussi facilement et brutalement qu'une tornade s'engouffre où bon lui semble pour tout dévaster. Les mots qu'il scande avec tant de ferveur et de désespoir se répercutent en lui pour venir toucher les cordes de son âme, les faire vibrer. Il ne capte pas assez de mots pour saisir toute la subtilité des paroles, mais il en comprend le sens. Assez pour en être bouleversé.
La musique a ce pouvoir extraordinaire de vous emmener ailleurs. En quelques secondes, Daïki part si loin qu'il remarque à peine que Kagami l'observe. D'abord furax pour son vol éhonté, puis souriant face à son désarroi, semblant deviner l'expérience qu'il vit en cet instant. Sans le lâcher du regard, le tigre sort son téléphone de sa poche et lui fait comprendre dans un geste qu'il va remettre la chanson du début et l'invite d'un mouvement de tête à s'asseoir sur un des bancs autour du terrain. Ce qu'il fait sans réfléchir, avide de se perdre dans le morceau. Il se laisse embarquer, entièrement, envoûté, possédé par la mélodie. Comme si le chanteur venait le prendre par la main pour le faire monter sur scène, exposant son cœur meurtri à la vue de tous sous les projecteurs pour le réchauffer, exhibant ses peurs les plus profondes, les criant avec force pour les repousser, appelant ses affreux démons pour les exorciser, à la lumière du jour les brûler. Là sur ce banc, aux côtés de Taïga, il vit un des moments les plus gênant qui soit. Il lui semble que son rival peut voir tout ce que cette chanson fait remonter à la surface , qu'il n'a ni la force, ni l'envie de contenir. Mais loin de se moquer de sa soudaine faiblesse, Kagami lui adresse un sourire chaleureux, et bien qu'il ne l'ait jamais croisé auparavant dans les rubis flamboyants, il jurerait y voir briller de la tendresse. Sans qu'il n'ait à le demander, Kagami appuie une nouvelle fois sur le petit triangle, et avant de prendre son ballon pour aller s'échauffer, il lui tend son portable, lui laissant le loisir de l'écouter encore. Autant de fois qu'il le voudra.
Comme Kagami l'avait fait ce jour-là, toujours étendue sur son lit, un mélange de sentiments contraires lui brûlants les yeux, il remet la chanson du début. Il ne sait pas combien de fois. Assez pour en connaître chaque variation, chaque note, sans jamais s'en lasser. Le jour de cette indescriptible découverte, la première chose qu'il avait faite en rentrant chez lui : chercher les paroles pour les traduire. Le sens qu'il avait cru percevoir dans son écoute s'était alors confirmé, augmentant son trouble et son adoration. Il avait réécouté la chanson avec les paroles sous les yeux, s'en était imprégné, les avait bu sans modération pour apaiser son être. Laissant les mots panser les maux. Autre pouvoir mystique que possède la musique…
Daïki revit ce moment particulièrement intime à travers elle. Il s'était senti terriblement vulnérable, mis à nu, incapable de cacher son émotion. Et Taïga était resté à ses côtés, silencieux, respectant sa transe, l'accompagnant dans son voyage sur le chemin de la guérison. Le soutenant aussi d'une certaine façon, tandis qu'il vivait un petit cataclysme intérieur, pendant qu'il affrontait ses noirs démons. C'est parce que Kagami avait été là, parce que c'est lui qui le lui avait fait découvrir, un peu malgré lui c'est vrai… Mais surtout, surtout parce les paroles lui avaient immédiatement fait penser à lui : son sauveur...
Pour toutes ces raisons, il ne peut écouter Drown sans songer au tigre. Elle les lie, d'une façon qu'il n'est pas certain de totalement saisir, d'un lien invisible mais si solide qu'il l'a sorti des ténèbres, tiré de son enfer. Il aime intensément cette chanson, pour ce qu'elle est, les émotions qu'elle lui procure et tout ce qu'elle représente. En la lui offrant, de plein gré cette fois, Kagami lui offre quelque chose d'inestimable. Une promesse. Daïki est intimement persuadé que Taïga comprend. Qu'il sait que pour lui, cette chanson l'évoque, raconte un peu son histoire, leur histoire. Et tout en sachant cela, son rival lui promet de rester. De ne pas le laisser se noyer. De le sauver de lui-même. Comme il l'avait déjà fait sans le vouloir, sans peut-être même s'en apercevoir. Avec cette piste audio d'exactement trois minutes et quarante-deux secondes, Kagami lui offre tellement plus qu'un interlude musical…
À cette pensée, c'est l'évidence qui le frappe. Il se redresse sur son lit le cœur accélérant encore un peu plus sa course et observe le calendrier de l'avent trônant fièrement dans la pièce. Et soudain, il n'y a plus de mystère. Plus aucun doute possible. Si ses amis ont pu jouer les lutins quelques jours, son père Noël anonyme, ça ne peut être que lui : Kagami…
Alors ? J'imagine que ce chapitre va en faire jubiler certaines... xD
Hâte de lire vos théories.
Et sinon, je sais qu'elle ne sera pas aux gouts de tous mais je vous conseille vraiment d'aller écouter cette chanson. Ne serait ce que pour comprendre un peu Daïki dans ce chapitre introspectif ^^ .
À plus tard pour la suite:) !
