J'aurais aimé poster ce chapitre plus tôt, mais il est plus long que ce que j'avais prévus aussi... J'espère que vous avez passé un joyeux Noël. Que vous avez pu profiter de jolis moments avec vos proches et que vous n'avez pas trop abusé du chocolat xD (personnellement je suis en pleine crise de foie à l'heure où je poste ce chapitre haha). Et pour ceux d'entre vous qui passent des fêtes difficiles, mes pensées vous accompagnent. J'espère que ce chapitre vous plaira :)
Bonne lecture !
Ju: Merci pour tes reviews ! Et ne t'en fais pas, j'ai fais exprès de paumer tout le monde ^^ Tu n'es pas la seule ! Bravo pour le demi point aussi, je valide xD
20 décembre
Jeudi vingt décembre. Aomine traîne dans la cuisine, profitant de commencer les cours plus tard pour bien déjeuner. D'autant qu'il a mal dormi, alors ça tombe plutôt bien. Grâce à l'entrainement intensif, il a vite sombré pour rejoindre Morphée, mais il a fait des rêves étranges, à la limite du cauchemar. Il n'en a pas de souvenirs précis, seulement cette impression tenace de malaise qui le trouble depuis qu'il a émergé. La veille, trop éreinté physiquement et mentalement, encore indécis sur ce qu'il devait ou non éprouver d'avoir reçu un magazine de charme de son idole préférée, il ne l'avait pas ouvert. En revanche ce matin, avant de descendre se sustenter et s'éveiller à grand renfort d'un saladier de café, il a cueilli la pomme interdite. Il a succombé à la curiosité, commis le péché d'impureté, se risquant à décevoir saint Taïga. À force d'essayer de comprendre pourquoi Kagami lui avait offert ce magazine, il en avait conclu que c'était une sorte de punition, une vengeance sournoise et démoniaque. Il s'était donc presque attendu à tomber le visage tantôt moqueur, tantôt réprobateur du rouquin, en lieu et place de celui du mannequin, doux et enjôleur. Mais à son grand désarroi, il avait trouvé la revue intacte. Ruinant une fois de plus ses pronostics et ses théories. Et comme il l'avait prédit, gâchant son plaisir … Impossible pour lui désormais de ne pas associer ces photos, et par extension, toutes celles de Maï-chan à son rival. Feuilletant mollement les pages, Daïki s'était même surpris à imaginer le Tigre prendre son pied avec ceux qu'il lui avait prêté. Non vraiment, Kagami lui retourne la tête. Au point qu'il avait rangé le fascicule dans sa planque dédiée, sans même l'inaugurer, ne voulant prendre le risque d'avoir la mauvaise personne en tête lors de l'apothéose.
En terminant son deuxième café, il se dit que ce n'est pas un drame. Qu'après la compétition il aura plus l'esprit à la détente, et qu'il sera plus réceptif aux seins de Mai-chan. Oui voilà, il n'a juste pas la tête à ça. Toute son énergie focalisée sur le tournois. La Winter cup d'abord, histoire de mettre une bonne branlée à son rival, avant de s'en offrir une en compagnie de sa déesse adorée, bien méritée. Rassuré et revigoré par cette perspective, Aomine termine son repas en vitesse, pressé de découvrir le casier du jour. Le plus gros de tous.
De retour dans sa chambre, l'enthousiasme tout juste retrouvé, il se sent tout à coup fébrile. Il ne saurait dire pourquoi, mais de plus en plus, les cadeaux le bouleversent. Chacun à leur façon. Et il craint que la taille de celui-ci soit proportionnelle à ce que son contenue va déclencher émotionnellement chez lui. D'un autre côté, il meurt d'envie de savoir. Ce petit jeu quotidien et silencieux entre lui et Kagami le galvanise complétement, autant qu'il le déstabilise. Chaque jour il joue, tente de résister, et chaque jour il perd, avec une étrangère satisfaction. Malgré l'appréhension, il cède une fois de plus. Il ouvre le tiroir. Difficilement vu son poids. Mais il y parvient finalement et révèle une forme énigmatique emmitouflée de papier bulle. Le cœur battant d'excitation désormais familière, il le défait soigneusement. Au fur et à mesure que les couches de protections disparaissent, le présent apparait. Encore une fois son instinct ne le trompait pas… C'est un choc. D'un autre genre que celui de la veille, mais un choc tout de même. L'émotion le prend sans prévenir et cette fois il ne peut retenir ses larmes. Lentes, silencieuses, elles dévalent ses joues tandis qu'il admire le plus terrifiant, hideux, et monstrueux des monstres qu'il n'a jamais vus. Le Jabberwocky, d'après sa petite plaque nominative.
Depuis quelques temps maintenant, Daïki collectionne les monstres en tout genre. Un moyen qu'il avait trouvé pour les apprivoiser, les rendre moins terribles. Une façon aussi de se rappeler qu'il n'avait rien à voir avec eux. Et quand bien même il se trompait sur ce point, il avait fini par tous leur trouver quelque chose de cool, à ces bestioles. C'était donc devenue moins dramatique de faire partie des leurs. Parfois il se sentait proche d'eux, pouvait les comprendre. En effet, la plupart des membres de sa tribus n'avait pas choisit d'être bizarres, anormaux, ou phénoménaux. En fait, d'après lui les êtres qu'on qualifie de monstres ne sont que de pauvres créatures incomprises. Effrayantes seulement parce qu'inconnues et différentes. Dans l'imaginaire collectif toutes les figurines qu'il possède à leur effigie, sont de simples bêtes féroces et sanguinaires, parfaites pour les rôles d'antagonistes et de méchants dans les histoires. Sauf qu'en observant de leur point de vue, Aomine s'était rendu compte que ces monstres avaient de bonnes raisons d'être en colère et de vouloir bouffer tout le monde…
En essuyant ses dernières larmes, il s'avance près de sa bibliothèque, où trônent déjà quelques-uns de ces monstres. Il décale légèrement King Kong, le rapprochant de Godzilla, change son Alien de place avec sa panthère des enfers, pousse la créature tout droit sortie de final fantasy il ne sait plus combien, et déplace Asuna, trouvée la semaine dernière dans le tiroir treize, sur une autre étagère pour pouvoir placer le nouveau membre de la fratrie. Il s'éloigne d'un pas pour admirer le rendue, modifie deux trois détails, puis satisfait, il sourit.
Ce cadeau fait encore mouche. Plein cœur cette fois. C'est dingue… Depuis quand exactement ce mec est il capable de lire en lui aussi facilement ? Au fur et à mesure qu'il se découvre à travers les offrandes de Kagami, il a l'impression de se redécouvrir, de se reconnaître. Lui Aomine Daïki. Pas le basketteur. Pas le gars paumé qui avait trouvé le moyen de faire une dépression à quatorze piges... mais lui l'adolescent râleur, flemmard mais passionné, aux multiples centres d'intérêts et contre toute attente bien entouré. Un gars qu'il avait perdu de vue depuis un bail, et qu'il réapprend à connaître ces derniers jours. À bien y réfléchir, le mec qu'il est naturellement au contact du tigre, comme si sa simple présence le poussait à se révéler vraiment.
C'est vrai qu'il a du talent, mais il n'a pas celui de Tetsu pour se rendre invisible. Pourtant c'est parfois la sensation qu'il a. Comme si personne ne le connaissait vraiment. Ni ses parents, ni ses plus proches amis, à part peut-être Satsu... Il faut dire qu'il n'est pas du genre à s'ouvrir ou s'épancher facilement, c'est vrai… mais c'est une impression ténue et tenace qui ne le quitte jamais, squattant là au fond de ses tripes. Il a pleinement conscience aujourd'hui que cette fausse idée est un peu responsable de sa descente aux enfers. L'enfermant dans une spirale de solitude, de non-dits et de perceptions falsifiées, déformées par ses craintes les plus profondes. Un peu comme la jalousie maladive pousse un partenaire à véritablement aller voir ailleurs. C'est sa peur irrationnelle d'être seul qui avait fini par le couper du monde. Et c'est encore difficile de lutter contre. Avec des jours plus noirs que d'autres, où les vieux mécanismes s'enclenchent automatiquement s'il n'y prend pas garde.
Toutefois, malgré sa tendance au renferment et au rejet, Kagami semble le percevoir, avec une facilité, une acuité et une précision effrayante. Délicieusement déroutante. Il a le sentiment aussi étrange que satisfaisant, presque réconfortant, que Kagami le voit. Et c'est bien ça qui le touche… plus que l'attention, le clin d'œil subtil à leur victoire sur les Jabberwocks, unis sous le même maillot. Ça le remue tellement de ne plus se sentir si seul, abandonné, égaré, qu'il n'a pu retenir ses larmes face à l'hideux monstre. Cette certitude d'être compris, entendu, vu et accepté par quelqu'un est un cadeau inespéré et inestimable. Par quelqu'un qu'il estime en retour de surcroits. Bordel… il va falloir qu'il arrête de chialer tous les deux tiroirs et demi parce qu'il va finir sec comme un vieux pruneau avant Noël si ça continu !
Côte à côte, ils marchent sans but, dégustant leurs glaces en silence. Curieux de gouter le parfum choisi par Kagami, Aomine lance une attaque furtive et trempe sa cuillère dans le pot de son voisin. Ce dernier soupir, exaspéré mais visiblement peu étonné de son comportement. Par vengeance, il se contente de lui piquer une cuillère à son tour. De bonne grâce, particulièrement de bonne humeur ce jour-là, il le laisse faire. Prenant même le temps d'observer sa réaction, pour savoir s'il approuve son propre choix de mélange. La moue approbatrice du tigre le fait sourire. Il aime. Quelques mètres plus loin, du coin de l'œil, quelque chose dans la vitrine d'une boutique attire son attention. Il s'arrête pour l'observer, suçant sa cuillère pensif. Admirant les figurines qu'il imagine déjà compléter sa collection. Remarquant sa soudaine absence à ses côtés, Kagami s'arrête et le rejoint devant le magasin.
- « Yurk ! Dégueu… Qui voudrait d'un truc pareil chez lui ? »
- La remarque lui arrache un sourire triste. Mais il répond, sincère : « Visiblement, il n'y a que les monstres pour en accepter d'autres... »
- « Toi ? Tu aimerais ? »
Il sent plus qu'il ne voit le regard étonné de Kagami scruter son visage. Et cette fois son rictus s'élargie, amusé de sa réaction.
- « Les monstres sont incompris Bakagami, ils n'ont jamais demandé à l'être. Pas plus que les Dieux. Les exceptions ont toujours effrayé le commun des mortels. »
- « Ouais mais il y a de quoi Aho ! Il a une tronche à faire des cauchemars celui-là ! »
Cette fois il ricane, passe son bras autour des épaules de son rival, le défis du regard comme souvent, et avec son sourire d'effronté lui demande narquois :
- « Bin alors Baka… j'croyais que t'avais pas peur des monstres ? » Voyant les joues de sa proie se teinter subtilement de rouge il ajoute moqueur : « J'croyais même qu'ils t'excitaient… »
- « Pfff ça n'a rien à voir ! » Rugit le fauve en se dégageant de son emprise.
Un rire franc lui échappe. Trop facile… Mais Aomine bouscule gentiment son compagnon de l'épaule pour le dérider, préférant rectifier le tir avant qu'il ne change d'avis pour le basket qu'ils ont normalement prévu de faire ce soir, quand la chaleur écrasante de l'été sera retombée. Kagami grogne un peu mais il voit bien le coin de ses lèvres s'étirer quand il y porte une nouvelle cuillère de glace presque entièrement fondue. Gagné…
Aujourd'hui le stress monte d'un cran. Kagami n'écoute rien du cours et pense à la réaction d'Aomine face au contenu de la case vingt, en mâchonnant son stylo. Sans le savoir, il se replonge dans le même souvenir que le destinataire de son présent. Il a mis un soin particulier à ranger chacun d'eux, même ceux dont il n'était pas l'émetteur, seulement le facteur. Mais celui d'aujourd'hui a une saveur particulière pour lui. Et lui noue un peu plus l'estomac d'inquiétude. Parce que c'était précisément ce jour-là, devant cette vitrine un brun lugubre, que l'idée avait commencé à germer en lui. Qu'il avait pour la première fois, appréhender la profondeur de la faille d'Aomine. Perçu l'envergure de ses blessures. Un gouffre effrayant qu'il avait immédiatement eu envie de combler. Faisant naitre en lui le besoin presque vital, de montrer à Daïki comment lui le voyait. Parce que même s'il savait grâce aux dires de Kuroko que l'As de la génération des miracles avait été très touché par ce qui leur était arrivé, il a tendance à facilement l'oublier lorsqu'il le voit comme ça… Arrogant, souriant… juste, heureux espère-t-il. Sauf qu'il est bien placé pour savoir comment cacher certaines choses. Ces trucs encombrants qui font peur et mal à la fois. Ouais, il en est sûr, c'est depuis ce jour là qu'il a tant à cœur de lui rappeler qu'il est loin d'être une bête atroce et cauchemardesque méritant châtiment. Enfin… en dehors d'un terrain de basket évidemment. Là oui, il mérite de faire parti de l'élite des monstres les plus dangereux, terribles et effrayants ! Et encore… se dit-il rêveur, plongeant dans d'autres recoins secrets de sa mémoire. C'est sur un parquet, à la lumière crue des néons d'un gymnase, dans l'intense concentration et l'effort pur qu'il l'avait toujours trouvé le plus éblouissant.
Et voilà pour le 20. J'espère qu'ils vous aura un peu éclairé sur le pourquoi du comment ^^
Celui là aurait été impossible à trouver, je vous l'accorde.
Par contre les prochains... Peut-être ! ;)
À très vite pour la suite !
