09/12/2016

Pourquoi on ne m'a jamais dit que j'ai choisi la mauvaise filière ? Sans rire, je sais pas ce que je fous. J'ai plus le temps de rien, et surtout de vous écrire q_q
MAIS JE SUIS DE RETOUR, AH !

Les réponses aux reviews ont été envoyées par PM ;)

Mon dieu j'ai jamais fait une intro si courte.
Bon chapitre mes petits parapluies verts !


Chapitre 29 – Leçon de calme

Le matin, Eve savait qu'elle n'aurait pas l'opportunité de rejoindre son bâtiment tout de suite. Aussi avait-elle pris son temps pour arriver au collège. Elle avait laissé de côté l'inconnu du restaurant elle savait où elle l'avait vu. Maintenant qu'elle connaissait ce détail, elle était persuadée qu'elle le reverrait.

Au moment où elle allait s'asseoir sur un banc, elle entendit les hauts parleurs émettre un : « Eve Bell et Joshua Morrison sont demandés dans le bureau du proviseur. »
Tout le monde devait connaître le nom d'Eve, à force d'être appelée pour tout et pour rien.

Tous les collégiens paraissaient étonnés : pourquoi leur collège appelait deux élèves ? Pourquoi ces deux élèves n'étaient même pas japonais ? La plupart connaissaient Eve de nom, cette anglaise qui avait été dégagée de la classe D de son propre chef. Car oui, quelqu'un qui allait volontairement dans la classe E, ce n'était pas courant. Dans le bâtiment principal, elle était même un exemple de stupidité aberrant. L'Anglaise n'était pas vraiment au courant de cette réputation, et ses camarades qui l'étaient n'avaient pas cru indispensable d'en parler.

Eve se dirigeait donc vers le bureau de Gakuhô Asano. Elle songea à lui demander un abonnement où un siège personnel, vu le nombre de fois où elle était appelée dans son bureau. Jamais dans sa scolarité elle n'avait été appelée dans le bureau du Directeur avant cette année elle s'était plutôt rattrapée depuis.

Elle arriva en même temps que Joshua.
Comme à son habitude, il était tiré à quatre épingles, avec l'air bien décidé de battre Eve à plate coutures. Il était presque intimidant, en fait. L'adolescente ne baissa pourtant pas le regard. Elle n'allait —elle ne voulait PAS— lui laisser le plaisir de se sentir supérieur.
En réalité, il n'y avait aucune raison à ce que ce soit le cas.

— Entrez, fit une voix après que Joshua ait toqué sans avoir adressé une seule parole à l'intention d'Eve.

Ils pénétrèrent dans la pièce, toujours en silence. Comme s'ils étaient déjà en compétition, ils attendaient devant le bureau, debout, maintenant cette ambiance presque oppressante. Eve tourna la tête pour croiser momentanément le regard indifférent de Joshua.

— Vous vous doutez de la raison de votre présence, n'est-ce-pas ? demanda le directeur en anglais, assis, les mains croisées devant lui.
— Oui, répondirent-ils en chœur.
— À la demande sensée de Mrs Bell, j'ai organisé des examens blancs pour vous deux. Ils seront assez différents de ceux que tu as déjà pu faire, Eve. Ces examens seront également plus durs que ceux que vous aurez en même temps que les autres élèves du collège. Vous avez une semaine pour réviser les matières données ci-dessous. Joshua, tu avais préparé ta venue ici selon ton dossier. Tu as eu un programme sensiblement similaire au nôtre, n'est-ce-pas ?
— C'est exact, répondit-il d'une voix presque pompeuse. (Eve haussa les sourcils en levant les yeux au ciel) J'ai survolé ce qui est demandé en histoire, mais je ne suis pas sûr que je pourrais être interrogé…

Bien sûr.
Les seules matières où Eve aurait pu avoir une note supérieure étaient le japonais et l'histoire. Elle était certaine que Joshua avait préparé sa venue au Japon bien plus sérieusement qu'elle, et surtout qu'il trouverait un stratagème pour obtenir un sujet plus ''adapté''.

Le Directeur l'avait sûrement deviné.
Il voulait faire gagner la classe A. Il serait sûrement donc plus enclin à lui accepter une telle faveur. Eve était en sérieux désavantage. Mais elle avait l'expérience.
Oui, c'était même la seule chose sur laquelle elle pourrait compter. Joshua était bien meilleur qu'elle pour les études, et il aurait en plus le soutient du directeur. Il fallait qu'elle trouve quelque chose pour renverser la situation à son avantage… Mais ils étaient deux contre elle actuellement.

Elle était mal barrée.

On toqua à la porte. Peut-être que le sauveur d'Eve serait de l'autre côté. Peut-être que la personne était Karasuma-sensei, peut-être même Koro-sensei déguisé. Ou alors quelqu'un qu'elle ne connaissait pas mais qui l'aiderait d'une façon ou d'une autre. Non, Irina-sensei qui viendrait jouer de ses charmes, même si le Directeur resterait sûrement de marbre. Eve était un peu désespérée actuellement.

Asano-fils entra dans la pièce.

Tuez-moi.
Maintenant.

C'était fini.
Les deux Asano, Joshua. Tout était contre elle.

Eve tenta d'attirer le regard d'Asano vers elle, les yeux plein de pitié et de désespoir. Ils criaient des signaux de demande d'aide. Pitié aide-moiiiiii !
Les deux améthystes la fixèrent sans aucune émotion.

— J'ai vu les sujets des examens blancs, fit Gakushû comme s'il était tout à fait normal qu'il soit au courant et en ignorant les derniers signaux qu'envoyaient les yeux d'Eve.
— Ils sont déjà terminés ? Me voilà surpris. Mais pourquoi n'es-tu pas en cours ? demanda le Directeur d'un ton froid non-dissimulé.
— Pour vous voir au sujet de ces sujets. Ils sont bien trop différents des nôtres. Si ces deux élèves sont comptés dans le classement général, il faut que leurs sujets soient aussi similaires à ceux que nous aurons. Pour ce qui est du sujet d'Anglais, il est bien trop simple. Même la classe E pourrait le faire sans mal.
— Je te demande pardon ? cracha Eve en tentant de rester calme.
— Pour ce qui est du japonais, il ressemble trop à ce que nous avons. Il est infaisable. La sociologie est trop centrée sur l'histoire japonaise, même la partie sur la seconde guerre mondiale. Pour les mathématiques et les sciences, c'est juste une traduction de nos examens, je n'ai rien à dire.
— Je te remercie pour tes remarques, j'en tiendrais peut-être compte. Tu peux t'en aller, répondit Asano-père.

Une seconde.

— Il me semble pourtant qu'en tant que délégué général des élèves, j'ai un mot à dire au sujet des examens, répliqua sèchement Gakushû.

Non, c'était impossible.

— Je réfléchirais en effet à tes remarques, Asano.

Asano Gakushû… l'aidait ?
L'information avait été lente à comprendre. Mais… non, c'était impossible.

— Il est inutile de donner un sujet qu'ils ne pourront faire. Il faudrait évaluer leurs connaissances.
— Joshua ferait exprès de moins bien réussir les tests pour avoir un sujet pour facile, contre-attaqua Eve.
— Ne m'abaisse pas à ton niveau, tu veux ? grogna Joshua.
— Il suffit, fit taire le Directeur.

Il y eut un échange de regard. Joshua mitraillait du regard Asano-fils. Eve s'était inconsciemment décalée du côté du rouquin, seule personne qui pourrait l'aider actuellement.

— J'ai évalué leurs compétences, argumenta le père. Vois-tu, je connais parfaitement leurs connaissances. J'ai fait passer un test à Joshua avant de l'accepter dans ce collège. Je pense que le potentiel qu'il a montré est assez représentatif, puisqu'il voulait intégrer Kugunigaoka, expliqua-t-il en regardant Eve.

Bon, c'était déjà ça.
Au moins, il connaissait exactement les capacités de tout le monde.
Mais il était toujours du côté de Joshua. Et Asano voulait faire gagner la classe A. Alors pourquoi faire un tel tapage pour des sujets ? Si Eve en avait de plus compliqués, c'était bénéfique pour lui. C'était complètement contradictoire.
Et vu le visage du Directeur, qui paraissait impassible pour n'importe qui qui n'avait pas l'habitude de le voir incompréhensif, lui non plus ne devait pas saisir la raison de toute cette argumentation.

— Je tiendrais compte de tes remarques. Je ferais des sujets aussi adaptés que possible. Il faut néanmoins savoir que ce que tu as vu n'étaient que les examens blancs.
— Je verrais bien si vous en tiendrez compte, de toute façon, conclut Asano-fils en désignant le mètre soixante de stress qu'était Eve actuellement.

Gakushû quitta la pièce, et Eve se surprit presque à être déçue de son départ. Il avait été étrange mais d'une certaine façon il l'avait aidée, alors… Tant mieux pour elle.

— Les examens blancs sont dans une semaine. Voici le planning de révision. Un nouveau plus adapté aux nouveaux sujets vous sera transmis sous peu. Bonne chance.
— Merci, répondirent les deux élèves en même temps.

Eve et Joshua sortirent de la pièce, et soupirèrent en chœur. La jeune fille se tourna vers lui, le regard moqueur. Tiens donc, lui non plus n'était pas resté indifférent à cette rencontre. Tant mieux, Eve aurait été vexée autrement.
Pendant quelques secondes, l'Anglaise put voir dans le regard de Joshua un mélange entre le stress, l'incompréhension… et un « Mais pourquoi je suis venu dans ce collège de taré ?! ». Et encore, lui ne voyait que la face émergée de l'iceberg. Puis, tout disparut derrière le masque hautain que le garçon portait habituellement.

Il partit sans un mot, sûrement un peu honteux d'avoir laissé entrevoir son mal-être.
Eve retourna sur « sa montagne », elle arriverait en retard, alors elle prenait son temps. Elle parcourut en même temps ce qui serait potentiellement évalué. Sans rire. Une feuille A4 était couverte recto-verso, avec écrit en police 6 tout le programme. C'était une grosse blague. Pas étonnant que même Joshua avait l'impression d'être tombé en enfer.

— En retard ? demanda Koro-sensei.
— Convoquée, rectifia Eve.
— Naturellement, répondit le poulpe en étirant son sourire. Pourras-tu m'expliquer pourquoi à la fin des cours ?
— Vous n'avez pas été prévenu ? s'étonna l'élève… Oh le fourbe, marmonna-t-elle.
— Visiblement pas. Va rejoindre ta place, tu devrais réussir à suivre.

En rejoignant sa place, elle reconnut les cours traduits. Bien que Koro-sensei tenait à ce qu'elle écrive en Japonais tout ce qu'elle comprenait dans ses cahiers, car c'était plus simple lorsque les examens eux-mêmes étaient en japonais et pour apprendre. Ça aussi, Eve devait être plus expérimentée. Joshua allait passer une longue, très longue semaine.

...xX*Xx…

— Donc, tu as un examen blanc ? Dans une semaine ? interrogea Rio.
— Ouaip. Je vais souffrir, c'est moi qui te le dit. Et encore, ça aurait pu être pire.
— Comment ça ?
— Ben, contre toute attente, Asano-fils m'a aidée, expliqua Eve.
— Attends. Le fils du directeur t'a aidée contre ce dernier ? J'ai cru comprendre que c'était tendu entre eux, mais il veut faire gagner la classe A. Pourquoi il t'aiderait alors qu'il a le pigeon qu'il lui faut pour se battre plus ou moins à la loyale avec toi ? (Eve manqua d'éclater de rire) Non, sérieux, c'est pas normal.
— Je sais. C'est bien ça qui pue un peu. Venant d'Asano, tout est possible. Ça pourrait être une tentative de manipulation ou le début d'un plan tordu.
— Sois prudente. Asano est le mal incarné. Il ne fait rien sans raison, conseilla Rio.
— Merci Captain Obvious, soupira Eve en s'étalant sur sa table.

Elle allait devoir travailler comme une dingue, elle en avait bien conscience.
Elle savait également qu'elle allait pouvoir compter sur Koro-sensei. Dès lors qu'elle lui avait expliqué qu'elle n'avait qu'une semaine pour pouvoir réviser ses examens blancs, il avait commencé à lui faire un programme express.

Une semaine… C'était court, très court.

Si Eve devait réviser à fond certaines matières, elle pouvait d'abord penser aux mathématiques, à l'histoire et en dernier le japonais. Elle pourrait demander aux trois as de la classe l'aider, après tout, leurs examens à eux était dans plus longtemps.

À la fin de la journée, Eve s'enfuit comme une voleuse.
Il fallait qu'elle rentre chez elle au plus, vite, révise au plus vite… Elle arriva à la gare et prit le premier métro qu'elle vit pour rentrer chez elle. Le bus aurait été légèrement plus rapide, mais il lui fallait attendre dix minutes. Elle irait donc plus vite avec le métro.

L'étudiante monta dans le transport de justesse, et se cala dans un coin. Elle relisait la liste de chose qu'elle devrait faire en rentrant quand des voix plus fortes s'élevèrent dans la rame. D'abord, elle feint de ne rien entendre. C'était peut-être des gens qui se disputaient. Mais lorsqu'elle leva les yeux, elle vit un groupe de délinquant autour d'une seule jeune fille.
Cette dernière devait avoir à peu près son âge, et serrait les poings en baissant la tête. Elle était sûrement terrifiée.

Les racailles étaient bien plus âgés qu'elle. Plus forts sûrement. Et mince, si Karma avait été là… Eve secoua la tête. Elle pouvait très bien se débrouiller seule. De toute façon, elle n'avait pas réellement le choix. Sa conscience ne pouvait pas abandonner la jeune fille.

Elle s'approcha doucement des délinquants.

— Alors, tu fais la sourde oreille… ? Répond quand on te parle !
— Fous-lui la paix ! cria Eve.

Le groupe se tourna vers elle, l'œil mauvais.
Elle n'aurait pas dû faire ça. C'est complètement stupide. Elle aurait pu les prendre par surprise, réfléchir… Le stress grimpa en elle. Ils la regardaient. Oh, non, non. Ils avaient l'air armés. Ils l'étaient probablement. Ils empestaient la cigarette. Quelle horreur. Ils allaient faire quelque chose.

REAGIS.

Le premier s'approcha d'Eve. Il se baissa à sa hauteur, pour prononcer presque doucement :
— Tu as un problème ? Oh les gars, elle vient de Kugunigaoka ! Une petite intello vient nous emmerder hahaha !

S'ils savaient… pensa amèrement Eve.

La jeune fille était toujours tête baissée et continuait de serrer les poings ses jointures étaient devenues blanches. Elle tremblait presque.

— Et alors ? Foutez-lui la paix, répéta-t-elle.

Merde. Eve aussi tremblait. Ils étaient plus nombreux. Bien plus qu'elle. Elle était seule. Les gens de la rame ne feraient rien. Ils ignoraient tous le conflit. Quels lâches.
Elle avait déjà entendu l'histoire d'un viol dans un métro, quelque part dans le monde, et que les passagers avaient laissé faire ; Eve n'y avait pas vraiment cru. Maintenant elle en avait la preuve. Les gens faisaient semblant de ne rien voir. Alors que pourtant, s'ils s'y mettaient tous, ils pourraient aider !

— T'as peur, gamine ?

Oui. Elle crevait de peur. Personne ne l'aiderait. Si seulement elle avait attendu les autres…

— Peur de quoi ? De devenir aussi conne que toi ? Un peu, ouais, répliqua-t-elle en se surprenant.

D'habitude, Eve n'avait pas de répartie aussi cinglante.
Et l'Anglaise se maudit : elle n'avait quasiment jamais de répartie. La seule fois où il aurait préférable de se taire, elle répondait au tac à tac. Son cerveau était suicidaire, pas moyen.

— T'as dit quoi ? s'enragea-t-il en sortant un couteau.

Quelque chose dans le regard du cas social qu'était le délinquant raviva quelque chose chez Eve. Elle avait déjà vu cette lueur. Les yeux de la racaille étaient aussi expressifs que ceux d'un macaque, mais pendant une seconde elle avait reconnu une expression.
Nagisa. Le Dieu de la Mort.
C'était ça. Ce même regard.

Une blague.
Ce mec était une blague.
Le Dieu de la Mort était bien plus effrayant.
Pourquoi avait-elle peur déjà ?

Ils étaient dans un lieu public. Il ne la tuerait pas, il y avait bien trop de témoins. Au pire, il la blesserait. Les urgences arriveraient assez vite pour la soigner. Qu'avait-elle à craindre ? Elle s'en sortirait dans tous les cas.

Elle réprima presque un sourire.
Malgré tout, Eve gardait le sillage que la peur avait tracé dans son esprit. Mais l'adrénaline lui servirait à autre chose. Doucement, elle essaya de reprendre le contrôle sur son corps et son cerveau qui fonctionnait à toute allure.
Garde. Ton. Calme.

Un coup de pied dans le ventre. Ce n'était pas puissant. Mais suffisamment rapide et inattendu pour faire tanguer le délinquant vers l'arrière. Elle fit une rapide clé de bras en attrapant le bras du lycéen rebelle et en retournant celui-ci. Il lâcha le couteau de lui-même.
Vive le self-defense et les cours de Karasuma-sensei.

Le métro s'arrêta, les portes s'ouvrirent.
Les japonais tentèrent d'entrer mais tombèrent face à une scène peu orthodoxe. Cette fois, d'autres lycéens voulurent entrer dont certains qui semblaient appartenir à un club d'arts martiaux.

Les autres délinquants avaient dégainé leur petit couteau. Ridicule. Leur garde était trop ouverte. Ils étaient trop énervés, trop sûrs d'eux.

— Sortez d'ici ou nous appelons la police ! menaça un des lycéen-gardien-de-la-paix.
— Ouais… on se casse, grogna celui avait tenté d'attaquer d'Eve en se relevant nerveusement.

Les rebelles étaient enfin sortis. Quelle sortie clichée !

La pression était redescendue. En soupirant, la collégienne attrapa son sac et s'essuya le front. Ensuite, elle s'empressa d'aller voir la jeune fille, qui n'avait d'ailleurs pas bougé d'un iota.

— Ils sont partis, ça va aller, rassura l'Anglaise.
— … pas la peine… marmonna la jeune fille.

Ses longs cheveux noirs cachaient presque son visage. Ce qu'ils étaient longs !

— Quoi ?
— C'était pas la peine. J'aurais pu me débrouiller seule, répéta la fille.
— C'est pas l'impression que ça m'a donné, rétorqua Eve, un poil vexée.

D'un coup, la fille aux longs cheveux noirs leva la tête.
Ses yeux.
Eve comprit.
Ce n'était pas de la peur qu'elle cachait. C'était une soif de sang. Soif de meurtre. Elle reconnaissait ce regard. Un regard glaçant. Mais quel étonnement de le trouver chez une fille de cet âge ! Le pire n'était presque pas le regard, mais la couleur de ses yeux. Ils étaient violets. L'iris d'un violet profond où semblaient danser des volutes pourpres, rouges… Elle n'était pas normale.
Elle la glaçait d'un regard.

Cette fille était flippante.

« Prochain arrêt : Le Grand Parc »

Eve descendait à l'arrêt juste après.
Mais cette fille, aussi effrayante qu'elle le paraissait l'intriguait.

Le métro s'arrêtait.

Elle avait ce même regard que les tueurs qu'elle avait pu rencontrer. La même lueur qui était apparue un instant dans les yeux inexpressifs du gros délinquant. Et ça, elle en avait vu en une année. Pourquoi une gamine de son âge avait-elle de tels yeux ? Eve avait l'impression de se faire des films, et pourtant, son instinct lui hurlait que cette fille était un assassin. Ou quelque chose de très similaire. Elle avait vu la Mort. La Mort laissait une marque dans le regard de ceux qui l'avaient vue. Presque toujours. C'était la conclusion à laquelle elle était arrivée.

— C'est quoi ton problème ? demanda Eve, en tentant de garder contenance.

Cette fois, il redémarrait.

— J'ai pas besoin d'une gamine comme toi pour me sauver la mise.
— Tu pourrais au moins me remercier, grogna Eve, piquée dans son orgueil.
— Quoi ? Tu veux de la reconnaissance ? Tu veux une médaille ? Un cookie ? se moqua la brune.
— T'as un grain, sérieux, siffla Eve.
— Tu n'imagines pas à quel point, ricana l'inconnue.

Le métro ralentissait une nouvelle fois.
Eve tourna les talons, bien décidée à se casser aussi rapidement que possible de ce métro. Sans rire, c'était quoi cette comédie ? Les racailles ? La tueuse ingrate ? Cette journée était clairement pourrie.

Lorsque les portes s'ouvrirent, Eve jeta un dernier regard à la dérobée vers l'adolescente qu'elle pensait avoir sauvée. Après tout, elle ne la reverrait sans doute jamais. Cette dernière leva les yeux de son portable, remarqua qu'Eve la regardait et lui lança un rictus provocateur.

La garce !

Enragée, Eve sortit de la rame en fonçant droit chez elle. Plus jamais elle voulait revoir cette cinglée.

De : Rio la blondasse bombasse
À: Moi
T'es partie vite, ça va comme tu veux ?

De : Moi
À : Rio la blondasse bombasse
Rappelle-moi de ne plus jamais prendre le métro.

De : Rio la blondasse bombasse
À : Moi
T'es sûre que ça va ?

De : Moi
À : Rio la blondasse bombasse
Je t'expliquerais. Comme d'hab.

De : Rio la blondasse bombasse
À : Moi
Si c'est parce que comme d'hab t'as une vie de merde, alors ça va.

De : Moi
À : Rio la blondasse bombasse
Tu as tout compris.

De : Rio la blondasse bombasse
À : Moi
Je sais. Bonnes révisions surtout :*

Ah oui, ses révisions.
Une journée pourrie jusqu'à la moelle.
Sans aucun doute.

…xX*Xx…

Eve n'était plus qu'à deux jours de ses examens. Koro-sensei l'avait fait énormément réviser. L'Anglaise n'avait recroisé ni Asano, ni Joshua. Elle se demanda si c'est délibéré, puis décida finalement de faire comme si cela n'importait pas.

La tête pleine de chiffres qui se mélangeaient, Eve voulait juste des vacances. La paix.

— Tu en es où de tes révisions ? demanda Karma, détendu, une briquette de lait à la fraise dans la main.

Dieu que c'est viril.

— J'avance bien. Même si j'ai envie de me purifier les yeux au nitrate d'argent dès que je vois des chiffres… soupira-t-elle. Faut vraiment être un élu pour aimer les math.
— Tu as devant toi un de ces fameux élu… s'inclina Karma en souriant narquoisement.
— Ou faut être complètement taré. Je pense que c'est plus ça chez toi, se moqua-t-elle.
— Mais que c'est drôle, qu'est-ce qu'on se marre…
— Oh ça va hein ! Si on peut plus rire !
— Du coup, tu n'as pas besoin de l'aide d'un élu, n'est-ce-pas ?

Elle avait Koro-sensei.
Même si ce dernier était parti en Russie pour aller chercher Dieu-sait-quoi… Mais ! Il avait laissé un livre d'exercice en tout genre. Mais il n'y avait pas de solutions, trop simple sinon. Mais, il y avait beaucoup de conseils. Ça dépendrait. De toute façon, Rio n'était pas non plus mauvaise en math.

— Il se pourrait que ton cerveau complètement étrange puisse m'être utile si je suis bloquée devant un exercice un peu épineux, récita-t-elle en feignant la prétention.
— Mais c'est que ça devient hautaine maintenant ! Si ton cerveau d'écureuil est bloqué au pire demande au génie des math, proposa-t-il. Franchement, j'ai tellement envie de voir la tronche d'Asano dégoûté parce que tu auras battu l'autre anglais.

Ah. C'était juste pour ça.
Rien d'étonnant. Merde, c'était quoi cette réaction d'adolescente de roman d'amour à deux balles ? Puis pourquoi elle pensait à une adolescente de roman d'amour, d'abord ? Elle était une écolière débordée à cause des devoirs et d'un assassinat auquel elle prenait vraiment part seulement si elle était sûre qu'il ne marcherait pas.

— C'est quoi ce regard ? Tu… réfléchis ? s'étonna Karma, en mettant une main devant sa bouche, comme si cet acte relevait du miracle.
— Ouais, profite ça arrive pas souvent.

Il y eut un silence. Les gens de la classe étaient sortis pour profiter d'un quelconque évènement dehors. Mais Eve avait préféré rester à l'intérieur pour réviser. Elle devait réviser. Sinon elle se ramasserait à coup sûrs.

— Des nouvelles de Matt ?

Eve releva la tête, les yeux ronds.
C'était quoi cette question complètement inopinée et carrément personnelle ? En plus d'être complètement irrationnelle.

— Je… Pourquoi cette question ? balbutia-t-elle.
— Comme ça. T'as l'air bizarre et plus perturbée que d'habitude. Et vu que je suis pas qu'un égoïste prétentieux, je pose la question.
— Mais… Je suis juste fatiguée. Enfin, rien de bien spécial.
— Rio m'a dit que c'était ton anniversaire l'autre jour. C'était bizarre que tu n'aies rien dit. Une autre histoire ?
— En effet.
— Tu n'as pas répondu, au fait, rappela-t-il.
— C'est vrai : et non, je n'ai pas eu de nouvelles de lui. De toute façon je peux encore le faire chanter, déclara Eve calmement.
— J'avais oublié ce détail, sourit Karma.

Puis ce fut le silence.
Eve avait redonné sa totale attention à son livre d'exercices de mathématiques, et Karma finissait sa briquette en la regardant. L'Anglaise était assez dérangée. Elle n'aimait pas qu'on la regarde travailler. Encore plus lorsque la matière en question contenait énormément de chiffres, et qu'un cinglé avait cru bon d'ajouter des lettres pour augmenter le niveau de complexité de la chose.

— Bon Dieu tu mets quatre mille ans à faire un exercice, tu m'étonnes que tes moyennes volaient pas haut.
— Facile à dire, Mr Parfait n°2 ! grogna Eve en se concentrant plus sur tous ces chiffres.
— Tu ressors ce vieux surnom ? En plus j'ai le droit qu'au numéro deux, je suis vexé, minauda-t-il.
— Va jouer ailleurs…

Mais non. Voir Eve exaspérée était encore plus amusant. Alors comme un gamin à qui on aurait donné un nouveau jouet, Karma restait pour titiller la patience de l'Anglaise qui comme il le savait, n'était pas connue pour son sang-froid.

— Pourquoi c'est Asano le numéro un ? Tu le préfères à moi ?
— Lui au moins me laisse bosser tranquille. En plus c'est toi qui disait que c'était lui Mr Parfait.
— J'ai dit ça ? s'étonna sincèrement Karma.
— Tu l'as dit. Va pas t'étonner après que j'imagine des trucs entre vous quand tu dis ça. Surtout que votre relation est assez spéciale, continua Eve.
— Arrête avec ça, c'est gênant sérieux.
— Ohhh, tu n'aimes donc pas que je parle d'Asano-kun ? remarqua l'Anglaise, qui avait complètement délaissé les math.
— C'est juste que c'est lourd tes sous-entendus bizarres. T'es vraiment une perverse, lâcha-t-il.
— T'as qu'à pas faire des phrases aussi tordues aussi, j'y peux rien.
— Mais tu le préfères à moi, tenta une nouvelle fois le rouquin.
— Fous-moi un peu la paix, Karma…

Mr Parfait n°2 avait bien remarqué que la question l'embêtait. Elle n'arrêtait pas de l'éluder. Et si on faisait bien attention, on pouvait presque la voir de mordre nerveusement les joues. Et se tripoter les cheveux. Oui, elle était gênée. Karma jubilait. Il se foutait bien de connaître la raison, tant qu'il pouvait embêter une de ses victimes préférée.

— Pourquoi ça te gêêêêne ? Tu peux me le dire, hein ! Je sais garder les secrets, jura-t-il, une main sur le cœur.
— J'aimerais vraiment travailler. Sérieusement, si tu ne veux pas m'aider, laisse-moi. J'ai les examens blancs qui arrivent et je suis pas un génie, moi.

Cette fois, Karma fit la moue, déçu. Elle avait à peine réagit à sa provocation. Elle était vraiment motivée ? C'était quoi ça ? D'habitude, elle bossait, mais pas autant. Elle avait encore un nouveau problème ? Ça ne serait pas étonnant d'un côté. Avec la chance qu'elle avait.

— Pourquoi tu veux autant bosser ?
— Tu en as beaucoup des questions idiotes comme ça ? Et pourquoi t'es aussi loquace aujourd'hui ?

Excellente question. Il était juste d'humeur. Il s'ennuyait. Karma détestait s'ennuyer. Pourquoi avait-elle besoin d'une raison ? Il avait juste envie de s'amuser un peu.

— Tu n'as pas répondu.
— J'ai pas envie de foirer ces examens, même blancs ils sont importants. Franchement, t'aimerais perdre contre Asano, toi ? Oups, pardon, c'est déjà arrivé il me semble ?
— Que c'est spirituel, fit Karma sans sourire. J'ai appris de mes erreurs, oui. Je suis humain Eve, pas un élu des math. J'ai besoin de bosser moi aussi. Tu as cru que les réponses me tombaient du Dieu des mathématiques ?
— Oui.
— Non.
— Vraiment ? Je suis déçue, fit-elle en essayant de se replonger dans son exercice, toujours non-terminé.
— Ravi d'avoir pu t'apprendre quelque chose, alors. Ah, au fait tu as fait une erreur à la seconde équation. Deux fois trois ça fait six et pas cinq.

Eve piqua un fard monumental.
Oh non, c'était pire que honteux là. C'était niveau primaire. Primaire.

— Ok. J'étais pas concentrée là, bafouilla-t-elle en corrigeant la faute aussi rapidement que possible.
— Un jour, il faudra vraiment que tu arrêtes d'être de mauvaise foi. Je ne doute pas du fait que tu saches que deux fois trois font six, avant que tu ne me répondes que tu le savais pertinemment. Mais ose demander de l'aide et n'essaie pas de prouver que tu y arrives seule si c'est pour te ramasser après.
— Tu parles comme un vieux, observa Eve.
— Tu penses comme une gamine.
— Pas tout le temps.
— Bien trop souvent, répliqua-t-il.

Une nouvelle bataille visuelle.
Il l'agaçait. Mais en même temps, Eve était contente que quelqu'un lui tienne compagnie, même si on l'empêchait de travailler. Elle avait bien besoin d'une pause.
Les iris dorés de Karma essayaient de déchiffrer tout ce qui passait par la tête d'Eve ce qui n'était pas très compliqué car tout le monde lisait en elle comme dans un livre ouvert.
Ce qui était étonnant, en revanche, c'était pourquoi il avait l'air de s'inquiéter. L'Anglaise n'ignorait pas que Karma n'était pas un monstre, mais c'était étrange tout de même.

— Je ne pense pas toujours comme une gamine, rétorqua Eve.
— Montre-le plus, alors. Et si t'as besoin d'aide…
— J'appellerais mon grand sauveur, oui, oui, se moqua-t-elle.
— Ou Rio. Elle a l'air stupide, quoique, moins que toi quand même. Mais bref, elle t'aiderait aussi très bien.

Elle savait que la blondinette qui lui servait d'acolyte était intelligente. Mais peut-être qu'elle avait plus l'habitude de l'entendre dire des énormités en sa compagnie, ce qui brisait un peu le mythe.

Karma sortit profiter des autres, laissant Eve seule avec son exercice de math.


A suivre !