30/10/2017

Et me revoilà ! Bon j'essaie de tenir mon quota mental de un chapitre par mois, et donc je suis plutôt contente d'avoir tenu pendant deux mois consécutifs. Ok, je le fais à la fin mais l'idée est là. Et oui c'est bidon mais ça me donne du courage, chut. Je suis aussi plutôt contente du rendu de ce chapitre, et de ce qu'il s'y passe. Je remercie encore mes lecteurs, parce que même si ça a l'air bidon, c'est clairement grâce à eux que j'écris encore. Donc merci :3

Réponse aux reviews :

Lerugamine : Oui c'est un miracle ! Même moi je finis par ne plus y croire :') Pour le mariage c'est quand tu veux bb

Aurore Heart : Franchement oui, Eve s'est pas mal débrouillée. Bon après ils n'ont pas encore les résultats, mais ce qui est clair c'est que Karma a niqué tout le monde. Faudra comparer parce qu'il ne faut pas oublier que Joshua et Eve ont des exams aménagés et qu'ils peuvent pas vraiment être comptés dans les notes d'Anglais et Jap.

J'avais envie de pas seulement montrer Terasaka comme un con. Je le vois comme quelqu'un qui est très maladroit et qui a marre qu'on le voit comme quelqu'un de con. Donc il admet pas ses erreurs et reste très bourrin, donc qui paraît con x) Mais pas méchant en soit. Du coup j'avais envie de le montrer. Bon dieu je te fais une dissert pour que dalle x)

J'adore la physique chimie aussi ! Après je suis pas excellente, c'est là qu'est le problème. Mon prof demande un niveau ouf, mais je risque d'en avoir besoin pour mes études de toute façon donc bon x) On est 6 terminales S, et on doit être genre 25, divisés en deux classe. La notre est à 10 élèves, autant te dire qu'on est moins que les spé maths et que le prof s'en donne en coeur joie.

Courage à toi aussi et bon dieu je t'ai pondu un pavé XD

Kaliska : Oh merkiiiii q_q Ca me fait tellement plaisir d'entendre ça malgré mes retards etc !

Comme j'expliquais au-dessus, ça me plaisait pas de laisser Terasaka comme juste le mec con de service. Bon il a quand même enrhumé la moitié de la classe mais ça c'était pas prévu :)

Merki, et Eve n'est pas à la fin de son évolution. J'espère que ce sera toujours cohérent mais j'essaie d'avancer sur ça aussi UwU

Eve le fera regretter. Sûrement. Quoique Karma a toujours le dessus x) Et pour le mariage, je crois que cette petite est désespérée, et vu comment ça avance avec Karma... Merki pour la review en tout cas ;)


Chapitre 32 – Leçon Cinématographique

Toujours pour la plupart enrhumés à cause du plan d'assassinat de Terasaka —qui était d'ailleurs ironiquement un des seuls à être en parfaire santé—, les élèves attendaient toujours avec impatience les résultats du dernier examen de leur scolarité à Kunugigaoka.
Le froid de Décembre se voulait mordant et faisait souffrir tous les malades de la classe, qui se hâtaient de resserrer leurs écharpes dès que la brise glacée s'infiltrait dans leur cou.

— Il fait un froid ! râla Rio en recroquevillant ses mains au fond de ses poches.
— J'avoue que le froid est tombé vite, même moi je m'y attendais pas ! acquiesça Eve.

Une légère brume entourait la montagne où se trouvait leur bâtiment. L'humidité rendait le froid encore plus violent qu'il ne l'était. Les élèves accéléraient leur cadence pour aller s'abriter entre les murs de leur classe, pourtant aussi isolants que du papier à cigarette.

Eve se bénie de s'être levée un peu plus tôt et d'avoir eu le temps de se préparer un thermos de thé chaud. Elle sortit la bouteille isotherme de son sac et se frotta les mains avant d'ouvrir cette dernière. Elle fit profiter le contenu de cette dernière à Rio qui se délecta de la boisson typiquement britannique.

Une tête bleue et une rouge passèrent le pas de la porte et s'approchèrent du groupe de jeunes filles.

— Eh, ça vous dirait une sortie ciné ? proposa Karma de but en blanc.

Plutôt étonnée d'abord de cette initiative, les jeunes filles hochèrent la tête :
— Carrément, on a bien le droit de se reposer, soupira Eve en repensant au cauchemar des examens.
— J'suis d'accord, mais on irait voir quoi ? demanda Rio.
— Ça dépend de vous, fit Karma.
— On inviterait qui ? questionna Nagisa, qui se décida enfin à parler.
— Nous, déjà. Et Kayano. Et ceux qui veulent, ajouta Rio avec un grand sourire.

Elle se mit debout sur une chaise et cria à qui voulait bien l'entendre que mercredi, c'est-à-dire le lendemain, la classe organisait une sortie cinéma. Karma soupira discrètement, mais au final, ça ne ferait de mal à personne de s'organiser une petite pause. Finalement, bien plus que leur petit groupe serait présent. Il était décidé qu'ils iraient voir le dernier film de super héros : ça ne faisait pas peur, ce serait sûrement drôle et ça convenait au plus grand nombre.

— On invite Koro-sensei ? demanda Kayano qui était arrivée entre temps.
— Je pense qu'on peut y aller seuls, déclara Rio. Pour une fois on aura autre chose à penser que l'assassinat, les cours… Juste une sortie normale.
— Ça me va, soutint Eve.
— Idem pour moi, accepta Karma.
— Je vous suis, fit Nagisa.

La sortie était donc décidée, ainsi que l'heure de la séance.

La journée commença avec le cours de langues, qu'Eve n'appréciait pas plus que ça car elle était laissée seule avec ses cours de japonais pendant que les autres travaillaient l'anglais. Elle devait recopier les kanjis, les reconnaître, connaître toutes leurs prononciations selon l'utilisation… Bref, il y avait plus passionnant. Elle avait beau adorer Bitch-sensei, elle n'avait jamais vraiment cours avec elle. Parfois, quand elle leur avait donné une compréhension écrite —la dernière en date était sur la notice d'utilisation de la pilule du lendemain et l'autre sur un échange de texto présageant une rupture— elle venait voir comment se débrouillait la petite anglaise.

La matinée terminée, il ne restait que quelques heures avant de la journée. Tout se passa bien lentement, mais Koro-sensei arrivait à faire des cours attractifs qui réduisaient cette impression.

…xX*Xx…

Après encore une matinée de cours, les élèves s'étaient rejoints devant le cinéma. Finalement, ils étaient plutôt nombreux : on pouvait voir les deux délégués, Okuda, Sugino, Kanzaki, les deux meilleurs tireurs et Hara. Plus bien sûr le petit groupe organisateur de la sortie.

— J'ai ramené du popcorn pour tout le monde ! s'écria-t-elle avec un sourire.
— Y'a pas à dire tu gères, félicita Eve en attrapant un petit sachet.
— Je savais pas pour faire les goûts du coup j'ai ramené du sel et un sachet de sucre, continua-t-elle.
— J'aimerais t'avoir en mère, fit Kanzaki en attrapant un sachet également.

Chacun avait un petit sachet qu'il cacha, bien que le vigile s'en ficha éperdument. Ils allèrent s'installer tranquillement ils étaient en avance. Eve remarqua ensuite en revenant des toilettes qu'Itona était arrivé un peu après eux.

— Tu es venu ? s'étonna-t-elle.
— Oui, j'avais envie de voir ce film mais les autres étaient occupés, expliqua-t-il toujours d'un air absent.
— Oh, d'acc, on est un peu plus bas, montra Eve qui redescendait vers leurs places.

Eve était assise entre Rio —bien évidemment— et Karma. Elle fit paraître de ne pas en avoir quelque chose à faire, mais ça l'avait étonnée. Ils s'étaient positionnés sur l'allée du milieu, qui était bien plus large, plutôt comme un couloir qui permettait le passage entre les différents étages. Pendant les bandes annonces, elle entendit la discussion entre Karma et Nagisa.

— Ouais, c'était pour aller voir le premier Sonic Ninja, se rappela Nagisa.
— De quoi ? s'incrusta Eve.
— Qu'on est devenus amis, répondit Karma. T'écoutes les conversations des autres toi ?
— Vous êtes pas très discret aussi, se défendit Eve.

Les bandes annonces commencèrent, faisant taire la plupart des spectateurs. Eve tentait comme les autres élèves de grignoter le plus silencieusement possible ses popcorns, et se retenait de ne pas tout dévorer, histoire de ne pas tout terminer avant le début du film.

Enfin, le film débuta. Rien de très novateur, mais c'était plaisant à regarder. Eve était un public facile, et à part peut-être Fuwa et Hazama qui auraient pu être des critiques sévères, le reste de la classe appréciait le film. Durant ce temps, Eve explosa si fort de rire qu'elle reçut un coup de coude de son amie. Puisque ça ne suffisait pas, le reste de la salle lui intima de se taire. Pourtant, c'est Rio qui rit aux éclats à la blague suivante et qui reçut un coude de coude —vengeance ?— de la petite Anglaise.

— Vous êtes plus possible, je vous emmène plus au ciné, râla Karma.
— Si on a même plus le droit de rire, chuchota Eve, gloussant.

Eve se surprit quelques instants à observer le profil de son voisin. Détaillant les reflets du film sur ses pupilles dorées, descendant jusqu'à l'arrête de son nez, prolongeant sur ses lèvres, son petit menton puis jusqu'à sa gorge où une légère pomme d'Adam commençait à saillir. Bordel ! pensa-t-elle en fixant l'écran à nouveau. C'était foutrement cliché comme comportement ! Elle se mit en tête de continuer à regarder le film, en priant qu'il n'avait rien remarqué.

Après presque deux heures, le générique de fin déroulait à l'écran et certains élèves de la classe commençaient à se lever. En voyant ça, Eve grogna un gros :
— Mais vous êtes sérieux ? Y'a toujours une scène après le générique dans ce genre de films ! Je paie pas ma place pour voir quatre-vingt dix-neuf pourcents du film !

Les élèves se rassirent, un peu vexés d'être engueulés comme des gamins. Cependant Karma se tourna vers l'Anglaise avec un regard approbateur qu'elle aurait volontiers interprété par « épouse-moi ».

Alors que la foule ignare se dirigeait vers les sorties, il ne restait que le groupe de la classe, plus trois ou quatre personnes. D'un coup les portes situées juste derrière la rangée centrale s'ouvrirent pour laisser entrer un petit groupe de personnes. Des hommes, de corpulence normale, mais dont les visages étaient cachés par des capuches et des lunettes de Soleil pénétrèrent en marchant. Karma donna un coup de coude dans les côtes d'Eve, qui ne mit pas longtemps avant de trouver ces individus plus que louches. À l'instant où cette dernière voulait prévenir Karasuma ou Koro-sensei, un des hommes pointa son arme vers elle.

— TU LÂCHES TON PORTABLE !

Cette fois les nouveaux arrivants se mirent à courir en dégainant leurs armes.

Glacée jusqu'à la moelle, Eve cessa soudainement de respirer. Elle pensait qu'avec le temps, elle s'habituerait à la mort. À la croiser, à l'entrevoir. Pourtant, cet homme avait un flingue planté droit devant elle. Merde quoi, elle pouvait crever à la seconde où cet homme le décidait ! Son souffle toujours bloqué, elle resta tout simplement pétrifiée.

— T'ENTENDS ? LÂCHE TON PORTABLE GAMINE ! cria une nouvelle fois l'homme qui la braquait.

Elle sentit la main de Karma —tellement chaude contre sa peau moite et gelée— attraper le téléphone et le mettre à hauteur de vue des terroristes.

— Vous voyez ? Je vais le lâcher, calmement, prononça Karma d'un air calme mais toujours un sourire scotché à ses lèvres.

L'Anglaise tourna ses iris vert sapin vers celles du jeune homme : comment faisait-il pour rester aussi calme… ? Ceci dit, Nagisa paraissait lui aussi analyser la situation avec un sang-froid déconcertant. Encore une fois, la brunette se sentit inutile. Cette fois, c'est la main de son amie qu'elle sentit. Elle serrait la sienne avec une telle intensité qu'Eve reprit peu à peu pied sur Terre elle n'était pas seule. Ils avaient éclaté la bulle de peur dans laquelle elle se trouvait. Lentement, Eve reprit son souffle et entreprit de calmer le rythme effréné de son cœur. Paniquée, elle ne serait d'aucune utilité.

— NE BOUGEZ PAS ! cria le même homme. VOUS ÊTES NOS OTAGES MAINTENANT !

Les ennemis s'étaient placés de façon à être positionnés aux quatre coins de la salle. Le chef de l'opération lui, s'était avancé juste devant les sièges du groupe. Nagisa était le plus proche et paraissait encore parfaitement calme.

D'un coup, un des terroristes se tourna vers un de ses acolytes situé dans le fond de la salle. Enfin, vers celui qu'il y aurait dû avoir. En effet, à la place de ce dernier se tenait un autre homme. À l'instant même où l'assaillant s'en rendit compte, une balle fusa pour se loger dans son torse. Il s'écrasa aux pieds des adolescents.

Ces derniers manquèrent d'étouffer un cri lors de la chute de l'homme. Quelle idée de s'être assis dans l'allée centrale ! Il gémissait tandis que son sang recouvrait la moquette terne et rêche de la salle. Les adolescents, immobiles laissaient le liquide poisseux s'étendre sous leurs semelles. Après tout, leurs regards n'étaient pas dirigés vers leurs pieds : l'autre terroriste s'écrasait vers un siège, touché à l'épaule.

Ils étaient cinq. N'en restait plus que deux.
L'instinct des apprentis assassins se raviva en comprenant qu'il serait sûrement avisé de se cacher derrière des sièges avant de servir d'otages. Les deux ennemis restants étaient situés plus loin que les trois précédents : il était évident qu'on les protégeait.

Eve se tourna vers leur sauveur. Salle de cinéma oblige, seules quelques légères lumières s'étaient rallumées à la fin du film, mais leurs faibles lueurs éclairaient tout de même le visage de l'inconnu. Son souffle se bloqua de nouveau. Oh. L'Inconnu.

— Je le connais, murmura Eve, presque inaudible.

PAN.
Autre détonation, du camp adverse cette fois. Leur sauveur se coucha avant. Il était habitué, c'était indéniable. Un autre coup de feu siffla et atteignit le quatrième homme, qui s'écroula en criant. N'en restait plus qu'un.

Aucun des élèves ne voulait rien tenter ils n'étaient pas à même de réagir. C'était trop dangereux pour eux, d'autant plus que leur protecteur se débrouillait très bien par lui-même. Il fallait juste éviter d'être pris en otage par le dernier homme. Ce dernier avait l'air d'avoir entendu les pensées des élèves car ce dernier se rapprocha des élèves anciennement situés au premier rang de l'étage du milieu. Il gardait l'homme en joue et se préparer à tirer dès l'instant où le Sauveur se relèverait.

Que ferait Nagisa ? pensa Eve, en entendant le dernier assaillant se rapprocher d'eux, immuablement. Quatre mètres. Accroupie, elle ne vit que son sac à travers l'interstice des sièges, entre ouvert et la crosse de son pistolet anti-Koro. Rapidement et avec maladresse, elle le sortit de son sac en le montrant à ses voisins. Trois mètres. Il suffirait de distraire son attention, et espérer de pas se faire toucher… Deux mètres.

Nagisa le premier tira vers le dernier homme qui se retourna instantanément. Il allait les buter. Il fallait faire quelque chose. Le cerveau à deux doigts de l'explosion, les élèves cherchaient une idée. Eve tira une nouvelle fois juste au hasard pour dévier son attention. L'homme l'ignora et tendit son bras entre les sièges. Un mètre.

Nagisa vit les prunelles de l'homme le jauger. Le doigt sur la gâchette, se rapprochant inexorablement de l'instant fatal il crut bien à sa dernière heure.

PAN.
Retenant une nouvelle fois un cri, Eve vit le coup être porté. Nagisa porta sa main à la poitrine. Il se surprit à ne rien sentir, et remarqua que le sang qu'il avait sur la main n'était pas le sien. Le dernier terroriste était tombé.

Les élèves se relevèrent, doucement. Les autres quittèrent leur position accroupie une fois sûrs du danger passé. Le groupe de Karma repassa au-dessus des sièges pour revenir à l'allée où ils étaient situés avant l'accident. Toujours sur leurs gardes, ils avaient essayé d'éviter du regard les corps étalés.

And then, there were none*… pensa Eve, ailleurs, en fixant pourtant l'individu à ses pieds.

— C'est bon Black Panther, j'aurais pas besoin de toi, prononça l'homme à l'arrière du cinéma. Fin.

Les élèves se retournèrent comme les trois autres spectateurs restés initialement pour regarder la scène après-film. C'était fini. Le sauveur était debout, toujours son arme à la main. Il avait en main un portable, tout ce qu'il y a de plus banal et pianotait dessus avec nonchalance. Il sembla appeler un autre contact.

— Vous pouvez ramener le reste, les suspects sont arrêtés. Ceci dit, y'en a qui sont pas tout à fait hors-service, expliqua-t-il tout en voyant des hommes remuer. Ramenez des ambulances. Aucune victime, même du côté des autres témoins. Prévenez Karasuma. Je pense qu'il voudra parler aux gamins. Fin de rapport.

Il descendit les escaliers, flegmatique et s'approchait de ses adversaires, toujours couchés au sol. Soudain, le bras d'un homme se leva. L'Inconnu se préparait visiblement à cette riposte et frappa simplement le blessé de son pied, faisant chuter l'arme qu'il avait en main.

— Je t'épargne et tu essaies de me tuer ? demanda-t-il doucement. Tu as de la chance qu'il y ait des gamins ici, je ne t'aurais pas donné de seconde chance sinon.

Même Karma ne rigolait pas. Et pourtant tout le monde savait qu'il se trimballait toujours avec son nécessaire de torture, qu'il aurait bien pu utiliser dans le cas présent. Des hommes en costume s'infiltrèrent dans la salle et firent sortir les spectateurs vers la sortie de secours, à l'abri des regards.

— Personne n'est blessé ? demanda l'un.
— Non, répondit Kayano en tremblant.

Le groupe se suivait en une masse compacte, comme pour ne plus laisser d'angle mort. Leur instinct d'apprenti assassin reprenait le dessus. Même s'ils avaient eu peur, ils étaient frustrés au fond. Ils n'avaient rien pu faire. Qui étaient ces gens, d'ailleurs ?

Dans son champ de vision, Eve aperçut leur sauveur. Ils étaient à présent en pleine rue, comme s'il ne s'était rien passé. Le cinéma du quartier n'était pas très grand, et situé dans un endroit plutôt tranquille. L'inconnu avançait sans se soucier des élèves à présent.

— Attendez ! cria-t-elle.

Il se retourna.
L'inconnu était de nouveau devant elle. Il n'avait pas changé : toujours les mêmes cheveux noirs, les yeux occidentaux et étrangement, une chemise blanche identique à celle qu'il portait lors de leur première rencontre.

— Vous nous suiviez depuis longtemps, non ?

Bien sûr qu'ils les suivaient. Il était là lors de la sortie sur l'île, pendant la semaine où ils avaient ouvert un restaurant... Et probablement à d'autres occasions où il s'était fait plus discret. Il était d'ailleurs curieux qu'elle soit la seule à l'avoir remarqué. Peut-être que c'était grâce à ce contact direct qu'elle avait eu pendant la traversée de la salle de fête de l'hôtel, sur l'île. Il avait pris des risques cette fois-là.

— Bravo Sherlock, répondit-il, sarcastique.

C'était sa voix. Le timbre plutôt grave, pas désagréable, audible. Sans la musique, les cris et les pas de danse en fond sonore, elle avait une dimension très posée. Cependant, il avait cette intonation moqueuse qu'il avait cachée lors de leur première rencontre.
Eve se retint de répondre à la pique de l'homme.

— Qui êtes-vous ? demanda Eve, tentant de répondre calmement.
— Je ne vais pas me fatiguer à répondre, vous allez bientôt voir quelqu'un qui connait mon identité. Et puis, sache que je ne vous veux aucun mal. Tu en as la preuve, non ? expliqua toujours d'une voix calme le jeune homme.

C'était vrai. Elle en avait la preuve aujourd'hui et à d'autres reprises.
Il t'a sauvé de mecs pas net lors de la mission contre Takaoka, souffla une petite voix dans la tête de l'Anglaise. Si effectivement il cherchait à tuer seulement Koro-sensei, il aurait pu la laisser se débrouiller seule avec les pervers de l'île d'Okaido. Et il aurait pu l'utiliser comme otage. Sauf s'il savait que Koro-sensei était dans sa forme de défense ultime. Auquel cas, il préférerait que la mission se déroule correctement afin de retenter sa chance.
Les méninges de la collégienne tournaient à plein régime se mordant peu gracieusement les lèvres et fronçant les sourcils, elle était en proie à des idées contraires.

L'inconnu, lui, semblait s'en amuser. Voir cette petite chose tenter de deviner son identité était divertissant.

— Votre amie est pas très futée, se moqua encore le jeune homme.

Grincement de dents chez Eve. Il se foutait clairement d'elle, et elle avait horreur de ça. C'était très sûrement un assassin, il fallait qu'elle garde son calme : ces gens-là étaient imprévisibles après tout.

— On était au courant, mais elle a ses qualités, répondit Karma, s'amusant des remarques de l'inconnu. On pourrait peut-être avoir seulement votre nom ? On est persuadés que vous ne nous voulez pas de mal et vous semblez connaître Karasuma-sensei.
— On peut rien vous faire, de toute façon, ajouta Rio.
— Bien sûr que vous ne pouvez rien me faire ! ricana l'homme. Les femmes alors…

Rio et Eve serrèrent la mâchoire en même temps. De quel droit se permettait-il de telles remarques ? Sans déconner, il mériterait une raclée de sa mère.

— Et ma réponse ? réclama Karma, sans gêne.
— Isaac.

Sur ces mots, il fit volte-face et laissa les agents du Gouvernement entourer les enfants. Ces derniers les grondèrent d'avoir échappé à leur surveillance, d'autant plus après avoir évité une attaque terroriste.

…xX*Xx…

— Karasuma, qui étaient ces gens ? demanda Rio, un poil énervée.

La blondinette n'était pas en colère contre leur professeur, mais il fallait admettre qu'ils avaient tous eu plutôt peur. Et puis, ils venaient tout juste de signer un compromis avec le ministère de la défense pour justement éviter d'être blessé ou pris en otage. Alors pourquoi une telle attaque avait eu lieu ?

— Eh bien… commença Karasuma. Je tiens d'abord à m'excuser. Le Ministère de la défense avait des informations sur des groupes terroristes… Mais le danger n'a pas été pris au sérieux, et ces menaces ne m'ont pas été transmises.
— Voyons Karasuma ! se moqua une voix. Tous les assassins du monde sont au courant et vous pensiez échapper à ça ? Je te pensais bien moins naïf !

Tous se retournèrent pour voir réapparaître Isaac, toujours cet air lassé mais hautain collé au visage. Rio et Eve le jugèrent, mais il fit semblant de ne pas les voir, ce qui fit bouillonner l'Anglaise.

— C'est Karasuma-san pour toi, Isaac, corrigea l'ex-militaire en appuyant sur la particule de politesse. Et puisque c'était si prévisible, pourquoi tu as fait deux morts alors que ça t'est interdit ?

Cette fois, un rictus étira les lèvres de l'associé de Karasuma. Il le fit disparaître pour afficher un simple visage désolé avant de déclarer :
— Leurs vies étaient en danger, Karasuma. J'ai préféré l'efficacité à la propreté, on ne peut pas me le reprocher il me semble. Et puis, il me semblait que tu devais mentir à ces gamins à propos de leurs morts ?
— Ces enfants sont assez grands pour leur dire la vérité et établir une relation tout en transparence, expliqua le professeur. Eh bien, puisque ce jour est arrivé, je vous présente Isaac. Il est chargé de votre sécurité, comme vous avez pu le constater. J'imagine que c'est la première fois que vous le rencontrez, mais pourtant il nous suivait très souvent. Peut-être même plus que ce qu'il dit.

Eve et Isaac se toisèrent. Ce dernier n'avait visiblement pas mentionné sa rencontre avec l'européenne à ses supérieurs. Sûrement par l'ennui de faire des rapports sur la situation, songea Eve. Il y avait même une probabilité qu'il ait aidé d'autres élèves sans que ces derniers ne le sachent. Cependant, elle pouvait savoir qu'actuellement, c'était son vrai visage. Celui qu'il avait prétendu être n'était qu'un masque, et elle y avait aveuglément cru. Néanmoins, une pointe de fierté l'envahit : elle avait senti que quelque chose n'allait pas sur l'île et était restée prudente.

— Tu ne comptes pas leur expliquer qui étaient ces gens ? rappela Isaac.

Une nouvelle fois, Karasuma manqua de soupirer. Ce petit con égocentrique venait lui compliquer son travail et briser la confiance de ces enfants, et ça, c'était quelque chose qui l'agaçait énormément. Mais il garda son calme, d'apparence du moins.

— Nous ne savons pas grand-chose de ces gens, entama-t-il. Il y a plusieurs théories à ce sujet. Il est possible que ce soit des anarchistes qui veulent vous empêcher de tuer le poulpe, des sources peuvent laisser penser qu'il s'agit d'une sorte de secte qui pourrait prendre Koro-sensei comme l'incarnation du jugement divin —il clos ses yeux une fraction de seconde, comme si l'idée lui paraissait invraisemblable— et ensuite, plus probable dans le cas d'aujourd'hui, juste un groupe qui voulait vous utiliser en otage pour gagner l'équivalent de la prime.

L'information mit du temps à être acceptée. Même avec cette nouvelle clause ajoutée au contrat, ils étaient en danger. Finalement, comme l'avait dit Isaac, en un sens c'était prévisible. Faire en sorte qu'aucune information ne s'échappe était impossible. Il faudrait maintenant expliquer ça au reste de la classe. Puisque les deux délégués étaient présents, ils décidèrent de s'en charger.

— Une dernière chose, continua l'ex-militaire. Maintenant que les terroristes ont agi, il y a un risque important de récidive. Isaac sera donc présent à l'école, et dans le secteur qui lui sera donné hors des cours. Je vous prierais également d'informer Koro-sensei de chacune de vos sorties, pour que nous puissions intervenir dans les plus brefs délais s'il y a une urgence. Je suis sincèrement désolé de vous imposer un tel mode de vie. Vous pouvez partir.

Les élèves partirent donc, un goût amer de leur sortie en bouche. Il fallait être encore plus prudent à présent.

Toujours —beaucoup trop— intriguée par son sauveur, Eve attendit un peu à la sortie du bâtiment où ils avaient été amenés, le temps que le ministère de la défense fut averti de la situation et qu'il la juge assez sûre. Rio avait voulu rester avec elle, mais l'horloge tournait et elle se devait de rentrer rapidement avant que ces parents ne s'inquiètent. Les parents d'Eve, eux rentreraient probablement à la même heure qu'elle, et lui faisait confiance. Isaac finit par pousser la porte de la sortie, et remarqua instantanément la gamine.

— Plaît-il ?
— C'est juste de la curiosité, entama l'adolescente. Vous étiez assassin avant ?

Eve examina la moindre lueur qui défilait dans les pupilles chocolat de l'homme. Le moindre signe qui indiquerait un mensonge, ou au contraire la vérité. Elle ne pourrait jamais en être sûre elle le sentait excellent acteur. Il garda son masque, et sourit malicieusement :

— Ce n'est pas le genre de choses que l'on demande impunément… Le ministère de la Défense ne connait même pas toutes les informations me concernant.

Cette fois, il pencha la tête et ses yeux prirent une teinte horriblement sombre. Il s'approcha de telle sorte que personne ne puisse entendre les mots qu'il allait prononcer. Eve resta statique, submergée par cette aura. Il susurra doucereusement :
— Je pourrais te dire bien des choses à mon sujet, mais il me faudrait t'éliminer sur le champ ensuite… Ce n'est pas ce que nous voulons, n'est-ce-pas ?

Il se redressa, enfila un masque rassurant et sourit. Eve lui trouva une ressemblance avec le directeur. La même façon de faire. Ce même foutu rictus de façade, alors qu'à peine quelques secondes plus tôt, son visage était diablement effrayant.

— Fais attention en rentrant ! lança-t-il, rieur, en partant dans la direction opposée.

Eve reprit à peine son souffle.


*And then, there were none : Dans les Dix Petits Nègres d'Agatha Christie, c'est ainsi que se termine la comptine. Livre plutôt connu, la référence est venue à Eve. C'est également le titre Américain (UK : Ten Little Niggers). Pour les non anglophones, ça veut dire « Puis, il n'en resta plus » (avec le contexte, of course).


Au mois prochain logiquement~