24/03/2018
YO TOUT L'MONDE C'EST DIAMLY ! On se retrouve aujourd'hui pour le chapitre 35 qui est prêt depuis des lustres mais que je voulais pas poster trop tôt parce que le chapitre 36 est pas prêt trololol. J'espère que vous allez bien, parce que moi ça va même si j'ai bac blanc toute la semaine prochaine et que je suis absolument pas prête (I'm looking at you Physique-Chimie and Maths). Mais sinon, je suis amoureuse mweheheheh. Du coup j'ai envie de faire profiter tous les gens autour de moi de ma bonne humeur~
Réponse aux reviews :
Lerugamine : Heureuse que ça te plaise toujours ^^
Melodychichi : Hehe merciiii !
Kaliska : Haha, j'adore toujours tes commentaires sur Isaac x) Eve est pas manuelle je crois, et quand tu dois coudre un tissu un peu "dur", ça peut arriver de se piquer. Après je couds plus assez pour l'affirmer mais ça m'est déjà arrivé perso x) Elle ne veut pas participer au théâtre parce qu'elle est bcp trop préoccupée par son plan et Koro-sensei... Et sinon, oui en temps normal elle aurait fait sa tsundere en mode "Non, moi sur la scène ? Jamaiiiiiis !" mais elle aurait adoré. Et j'adore cette idée de brassard nazi. Après tout, les japonais ont une image plutôt différente des nazis. Bien sûr ils savent que c'est mal, mais c'est pas eux qui vont vraiment hurler au scandale je crois. Bref. Ômondieu x) Eve a déjà fait sa crise d'ado je crois.
Et Eve déprime pas vraiment, simplement elle est vraiment très perturbée...
Alors j'ai pas trop regardé les JO ! J'ai vu quelques épreuves, dont le patinage ^^
Merci encore pour tes reviews géniales ! :D
Aurore Heart : Oui il l'aide x) Même si c'est clair que c'est pas le mec à qui il faut faire le plus confiance. T'es pas la seule à avoir l'impression qu'elle a fait un pacte avec le diable :') Merci pour la review !
J'espère que vous allez aimer ce chapitre, parce que moi j'ai adoré l'écrire ^^
Précédemment : Eve a accepté d'être aidée par Isaac, à la condition qu'elle lui fournisse les informations qu'elle pourrait trouver. Eve ne participe pas à la pièce (à part pour les costumes), qu'elle ne va même pas voir car elle s'entraîne avec Monsieur Mégalo. Elle s'isole de plus en plus de la classe, car elle tente de sauver Koro-sensei en cherchant des informations via Ritsu.
Chapitre 35 — Leçon théâtrale
Après son entraînement avec Isaac, Eve était repartie aussi rapidement que possible vers le bâtiment A, où se tenait la pièce de théâtre. En chemin, elle reçut un message de Rio lui disant de rester à leur bâtiment : il y avait encore du travail là-bas. La brunette s'exécuta, et entra dans la salle de classe qui était encore silencieuse.
Elle prit le temps d'examiner cette salle, endroit auquel elle ne prêtait plus attention par habitude, mais qui avait pourtant un charme. Un mélange de craie et de boiserie humide embaumait, mais également une certaine odeur indéfinissable. Un quelque chose qui mêlait une pointe d'insecticide, de caoutchouc, d'une certaine douceur plutôt naturelle et d'un tas d'autres choses beaucoup ténues pour être reconnaissables.
L'élève tenta d'organiser tout ce qui allait être ramenés en plusieurs catégories : loué, à garder/ramener et à jeter. Avant qu'elle n'ait le temps de jeter un œil à la liste faite par les délégués, des bruits de courses atteignirent ses tympans. Sa classe revenait, d'une discrétion qu'on pourrait associer à celle d'un troupeau d'hippopotames en rut.
— Eve ! Mais qu'est-ce que tu fais là ? demanda Maehara en ouvrant la porte, encore hilare pour une raison inconnue.
— J'avais du travail, mentit-elle sans une once de scrupule. Ça s'est bien passé je suppose ?
Il fut suivi de Kimura —ou Justice, comme préféraient l'appeler la majorité de la classe—, puis de Sugino.
— Tu aurais vu leurs têtes ! s'exclama Kimura, le plus rapide à la course. On les a complètement dégoûté je crois.
— C'était le but, s'amusa Eve, ravie d'avoir emmerdé le reste du collège.
Le reste de la classe arriva au compte-goutte en plusieurs vagues, selon ceux qui avaient couru, trottiné, ou suivi la masse puis avait ralenti. Ils s'activèrent tous à organiser les costumes, le peu de meubles, les papiers, etc. Rio était toujours en costume de policière, et Eve surprit Okajima à être particulièrement contemplatif à l'allure de cette dernière. L'Anglaise décida de pousser Rio à retrouver son uniforme, soulageant le métabolisme d'Okajima chez qui la tenue éveillait des sensations nouvelles. La brunette devait admettre qu'il était tout à fait naturel de trouver son amie attirante dans un accoutrement pareil.
BOUM.
Des fracas de bois qui se brisent et retombent dans un bruit sourds, accompagnés d'une légère secousse réveillèrent l'anglaise de sa torpeur méditative. Les bruits provenaient de la réserve, où tous les élèves accoururent.
Une jeune fille était debout, dominant Koro-sensei et Nagisa de son perchoir. De longs cheveux d'un vert familier ondulaient sur le dos frêle de l'inconnue. Mais plus effrayant, des tentacules de la même couleur imitaient les mouvements de ceux de Koro-sensei.
Eve mit quelques secondes pour reconnaître une Kayano, pourtant si différente, jauger la classe d'un rictus hautain.
— Kaede ?! s'exclama Okuda.
— Je ne m'appelle pas Kayano Kaede et je suis la sœur d'Aguri Yukimura, t'as toujours pas pigé ? grogna-t-elle à l'attention de Koro-sensei.
Le poulpe jaune baissa la tête, silencieux. La jeune fille claqua la langue, insatisfaite de cette réaction. Elle bouillonnait de rage. Sa mâchoire se crispa et elle serra les poings.
— Je reviendrais vous tuer, Koro-sensei. Vous n'êtes qu'un meurtrier qui ne mérite pas de vivre, siffla Kayano. Demain. Je vous tiendrais au courant.
Elle partit à l'aide de sauts incroyablement hauts, chose impossible pour un humain ordinaire. Un silence pesa. Était-ce seulement Kayano ? C'était à ne plus rien comprendre. Nagisa, toujours à terre, se releva aidé de Karma.
— Koro-sensei, Nagisa, que s'est-il passé ? demanda calmement, mais fortement Meg.
— C'est… Kayano. Elle a des tentacules, balbutia Nagisa. Elle a tenté de tuer Koro-sensei. Elle a dit que c'était un meurtrier. Je ne comprends pas bien non plus. Mais, Yukimura… C'était notre professeure, non ?
Koro-sensei restait toujours aussi silencieux. Yukimura. Eve se souvint de la pièce abandonnée tout au fond de leur bâtiment, dont Koro-sensei leur avait ensuite interdit l'accès.
— Je l'ai déjà vue quelque part… pensa à voix haute Mimura. Voilà.
Il montra la photo d'une jeune fille aux cheveux noirs ondulés. En y regardant bien, on pouvait effectivement voir une ressemblance avec Kayano. Mimura expliqua qu'il s'agissait d'une actrice du nom d'Haruna Mase. Les pièces du puzzle commençaient lentement à s'assembler, une à une.
— Elle vous a appelé meurtrier, commenta Fuwa, enquêtrice comme à son habitude.
— Racontez-nous, s'il-vous-plait, ajouta Isogai.
— J'aurais aimé ne pas vous le dire… murmura Koro-sensei. Je vous raconterais. Mais avant tout, Kayano fait partie intégrante de cette classe. Il faut que nous la sauvions.
Des acquiescements se firent. Et Koro-sensei se traîna en direction de leur bâtiment. De toute façon, Kayano tirerait les ficelles : le poulpe aurait beau la chercher, elle se cacherait.
— Nous avons encore cours de littérature japonaise.
Les élèves ne surent pas tout de suite quoi faire : ils apprenaient qu'une de leurs camarades possédait une arme aussi dangereuse que puissante, qu'elle avait joué la comédie depuis le début de l'année et qu'elle était la sœur de leur ancienne professeure. Et qu'en plus de ça, elle accusait Koro-sensei de l'avoir assassinée.
Ils n'étaient pas tout à fait d'humeur, ni en position d'attaquer des bouquins tordus et la construction des haïkus. Le professeur s'en rendit compte lorsqu'il se retourna pour examiner ses élèves.
— Moi non plus, je n'ai pas envie, souffla le poulpe. J'imagine qu'avec ce que vous venez d'entendre, vous avez des soupçons sur moi, n'est-ce-pas ?
Certains détournèrent le regard : ils avaient une relation de confiance depuis un moment maintenant. Mais cette révélation était assez marquante pour ébranler ces certitudes pourtant si ardemment acquises.
— Si Kayano nous mentait depuis le début, commença Itona d'un air monotone, mais plus impliqué que d'habitude, il est possible qu'elle mente là aussi. Elle veut peut-être que nous ayons des doutes sur vous. Il est également possible qu'elle dise la vérité. Après tout, vous avez presque détruit la Lune et il est possible que vous recommenciez en Mars sur la Terre. Alors je pense que nous devrions attendre avant de tirer une conclusion.
— J'aurais pas dit mieux, fit Karma, lui aussi beaucoup plus calme qu'habituellement.
Lentement, les élèves retournèrent à l'intérieur de la classe pour échapper au froid prenant qui gagnait la montagne, la couvrant d'un léger gel. La salle n'était pas beaucoup plus chaude, mais ils étaient au moins à l'abri du vent. Cette dernière fut envahie de conversations plus mouvementées les unes que les autres.
Eve réfléchit quelques secondes —miracle auquel certains ne croyaient pas— en se remémorant les mots de Kayano. Elle avait parlé d'un combat. Demain. Sûrement après les cours. Il lui faudrait probablement un temps de préparation.
— Comment elle a attaqué Koro ? demanda Rio, soucieuse.
— Il y avait une fosse sous la réserve, avec au fond des balles anti-Koro. Elle était au-dessus. Tout était prévu depuis longtemps, résuma Nagisa, qui avait repris contenance.
Dans ses yeux brillaient une lueur d'inquiétude, mais mélangée avec autre chose. Un semblant du regard qu'il possédait lorsqu'il était sérieux. Un quelque chose de ce qu'il faisait de lui une personne capable de beaucoup plus que ceux de sa classe. Talent dont il n'avait pas réellement conscience lui-même.
Un plan. Elle aurait donc sûrement un plan le lendemain également, réalisa Eve. Donc elle attaquerait sûrement le soir. Ça collait.
Elle sentit soudain un regard peser sur elle. Au loin, elle vit Isaac la fixer à travers une fenêtre de la classe avec une intensité presque inquiétante. La brunette vérifia que personne ne faisait vraiment attention à elle, avant de tenter de s'en aller.
— Tu vas où ? demanda Rio.
— Aux toilettes, mentit Eve, pour la seconde fois de la journée.
— On a tous besoin d'un jardin secret. Je suis au courant Eve. Mais tu es souvent absente en ce moment. Et tu as le regard.
— ''Le'' regard ? De quoi tu parles ? fit Eve, réellement perdue cette fois.
— Ne te fous pas de moi. Tu ne t'en rends peut-être pas compte, mais tu es suspecte. Que tu ne t'occupes pas du théâtre parce que tu t'en fiche, très bien. Même si c'est déjà suspect vu ta tendance naturelle à vouloir monter sur les planches. (Eve tenta de parler) Ne me coupe pas, gronda-t-elle. Mais tu n'y assistes pas non plus. Tu jettes des regards inquiets partout. Tu t'isoles beaucoup trop. Et tu as ce regard, Eve. Le même que quand tu caches des choses. Crois-moi, j'ai l'habitude de le voir avec tous tes secrets à la noix. Alors maintenant, tu vas me dire ce que tu fais tout de suite.
Estomaquée, Eve ne put réfléchir à une parade correctement. Elle se pensait tellement naturelle et oubliait une seconde qu'il y avait peut-être des gens qui s'inquiétaient pour sa petite personne. Même si dans le cas présent, ça l'emmerdait plus qu'autre chose. L'Anglaise savait pertinemment que si elle insistait, il y avait des chances pour que cette petite conversation prenne des tournures bien plus violentes et dramatiques.
Eve adorait Rio. Sûrement bien plus que cette dernière s'en doutait d'ailleurs, mais quelque chose lui empêchait de lui avouer qu'elle ne voulait pas, non, qu'elle ne pouvait pas tuer Koro-sensei. Même si elle avait fait quelques allusions, elle n'avait jamais dit haut et fort qu'elle ne comptait pas le tuer. Son entraînement d'assassin, c'était pour suivre le groupe et que c'était toujours utile. Sa participation était vaine. Dans l'assassinat matinal, elle visait à côté, et qu'importe, elle tirait mal de toute façon.
Elle ne voulait pas tuer Koro-sensei parce qu'elle n'en avait pas envie, pas le cran, pas la force. Elle ne pouvait pas se considérer en tueuse, en meurtrière. Pas envers un être qui l'avait autant aidée. Elle s'en voudrait éternellement.
Mais si Rio ne comprenait pas ?
Pouvait-elle réellement lui dire qu'elle s'entraînait durement avec l'Homme insupportable qu'était Isaac ? Qui les jugeait ? Que c'était un marché tordu ? Que Ritsu suivait des ordres pourtant prohibés par Koro-sensei et le gouvernement ? Qu'elle mettait presque en jeu l'existence de la classe E ? Voire même du monde en essayant de sauver le monstre qui voulait vraisemblablement anéantir toute l'espèce humaine en Mars ?
C'est à cet instant qu'Eve réalisa la situation délicate dans laquelle elle se trouvait. Qu'elle avait pris des décisions beaucoup trop hâtives. Sans plan de secours. Elle sentit alors le poids qu'elle portait, bien trop lourd pour être supporté seul.
— Eve ?
Merde. Une réponse. Il lui fallait une réponse. Un choix.
Elle ne pouvait pas lui mentir. Ni lui dire la vérité. Elle ne le pouvait pas.
L'Européenne sentit quelque chose vibrer dans sa poche. Eve jaugea sa poche, puis Rio, de nouveau sa poche, puis encore Rio. Les vibrations ne cessaient pas.
— Eve, fit la blonde dans un ton lourd de reproches.
La brune attrapa son portable, lut brièvement le nom du contact et décrocha.
— Maman ? …Oui. Ok. … J'arrive pas de soucis.
Rio fronça les sourcils. Pas encore. Ses yeux se plissèrent sous la frustration, celle d'être encore prise pour une idiote. Comme si tout un collège et ses parents ne la prenaient pas pour une imbécile, il fallait y ajouter son amie. Cette dernière rangea son portable, l'air désolé.
Non, elle n'allait pas faire ça.
— Ma mère veut que je rentre. Faut que j'appelle impérativement ma grand-mère, il est arrivé un truc à mon papi.
— Eh bien, rentre, répondit Rio, la voix blanche.
— Désolée.
Eve tourna le dos à la blonde, qui était restée statique. C'était donc ça. Ce sentiment affreux qui lui nouait la gorge, l'impression désagréable de se sentir horriblement seul, la colère qui la brûlait et qu'aucun mot n'aurait pu apaiser à cet instant. Rio sentit une lame incandescente et gelée la traverser. Un magma corrosif qui coulait dans chacune de ses artères, veines, capillaires. La trahison. Elle savait qu'elle lui mentait. Eve était parfaitement au courant que Rio avait conscience de son mensonge éhonté.
Mais elle avait fui. Lâchement, son amie avait fui.
Rio voulu retourner dans la salle de classe, mais fit demi-tour lorsqu'elle sentit son visage devenir humide. Foutue sensibilité.
— Rio ? demanda une voix que n'importe qui aurait reconnue être celle d'un certain rouquin arrogant. Tu sais où est l'autre arriérée ?
— Fous-moi la paix et ne me parle pas d'elle, Karma… prononça Rio, grinçante.
Le rouquin perçut les trémolos dans la voix, bien plus aigüe que d'habitude. Forcée. Comme si parler était un supplice.
— Rio.. ?
— Dégage ! grogna-t-elle en serrant les poings, sans s'être retournée.
Mal à l'aise et décontenancé, Karma obéit. Il ne savait jamais quoi faire dans ce genre de situation, et se retrouver face à une Rio énervée était la dernière chose qu'il souhaitait voir tant qu'il voulait vivre. Fermant la porte de la salle de classe, il laissa Rio dans la pénombre d'une fin d'après-midi d'Hiver.
…xX*Xx…
Essoufflée, Eve arriva au point de rendez-vous fixé une demi-heure plus tôt. Comme pour témoigner du froid plus pesant qui s'installait, l'herbe commençait à se couvrir d'une légère pellicule scintillante. Ignorant les frissonnements de son corps qui se remettait de sa course, l'Anglaise tentait de déverrouiller son portable à l'aide de ses doigts gelés.
— Visiblement, le moment que tu redoutais est arrivé plus tôt que prévu.
Toujours le mot pour rassurer, Isaac arriva avec une aisance toujours trop accentuée pour être naturelle. Eve grimaça. Elle savait qu'elle n'était pas faible. Elle était clairement au-dessus de la moyenne. Tout juste au-dessus de celle de sa classe. Mais l'adolescente l'avait clairement sentit : elle était bien loin de Kayano. Que ce soit au niveau de la force brute, vitesse, réflexes, tout. Elle était inférieure, et de loin.
— Je ne vois même pas pourquoi tu voulais me voir, grommela Eve. Je galère à sortir en toute discrétion, et tu le sais.
— Pourquoi penses-tu que je t'ai appelée ? répondit Isaac sur un ton toujours aussi condescendant. Je ne vais pas non plus te mâcher tout le travail.
— Ça n'empêche que je ne vais rien pouvoir faire pour demain ! s'exclama la brunette. Tu l'as vue ? Si oui, tu as dû te rendre compte de la différence de force entre elle et nous. Je suis sûre que même toi tu aurais des doutes sur tes chances de victoire.
Isaac exprima une espèce de moue sceptique, rassurant Eve sur ses hypothèses. Oui, même un assassin chevronné aurait des doutes face à Kayano. Les tentacules lui conféraient une force inestimable sur bien des niveaux. Et si même le Dieu de la Mort avait du mal avec elle —quoiqu'Eve ne connaissait pas assez ses capacités pour en faire une analyse assez précise—, comment une anglaise en dernière année de collège pouvait-elle la battre ?
— Encore ici, tu te trompes. Tout ce que tu veux, c'est l'empêcher de tuer Koro-sensei. Je ne te demande évidemment pas de te battre contre elle, parce que comme tu l'as si bien souligné, tu n'as aucune chance, expliqua-t-il comme s'il parlait à un enfant.
Eve prit son mal en patience, supportant la manie insupportable d'Isaac à traiter des gens comme de la sous-merde inférieure à sa majestueuse personne. Tant qu'il était utile, elle pourrait faire cet effort qui lui en coûtait en orgueil.
— Alors explique-moi donc, grogna Eve.
— Ce que tu veux, c'est l'empêcher de tuer Koro-sensei. Il te suffit de trouver un moyen de faire en sorte qu'elle n'arrive pas à son but, et d'éviter un maximum le combat.
— Comment ? demanda la gamine.
— Demain, ils se combattront. Il suffit d'éviter ce combat. Et vu l'attitude de Kayano, elle ne tiendra pas bien longtemps avec ses tentacules. Si le combat n'a pas lieu demain soir, il y a des chances qu'il n'ait jamais lieu.
Eve tenta de comprendre le sens sous-jacent de l'explication. Il voulait laisser Kayano mourir. Ses yeux restèrent écarquillés quelques secondes, incertaine d'avoir véritablement compris. Isaac lui suggérait-il de laisser mourir une camarade afin de réussir son objectif ?
— T'es malade, cracha Eve. Jamais je pourrais faire ça.
— C'est bien gentil les beaux discours, les idéaux. Mais sois réaliste. Tu n'as pas trente-six solutions. La solution la plus sûre c'est celle-là. Empêcher Koro-sensei de se rendre au rendez-vous, et empêcher Kayano de le retrouver.
— ''La plus sûre'', répéta Eve. Il en existe donc d'autres.
— Fais travailler ton cerveau doux Jésus ! s'agaça Isaac.
L'expression fit sourire Eve : ce n'était pas souvent qu'elle l'entendait, car elle était difficilement traduisible en japonais. Mais Isaac parlait un anglais plus que correct, facilitant la communication.
— Ou sinon, il faudrait pouvoir lui enlever les tentacules. C'était possible avec Itona. Il avait fallu le calmer, mais on l'avait fait, songea à voix haute l'Anglaise.
— Tu as vu comme moi sa rage de sang, coupa Isaac. Ça me semble très difficilement réalisable.
— Il me faudrait quelque chose pour l'immobiliser. Du genre, anesthésiants.
— Ça ne calmerait pas sa rage, remarqua Isaac, lassé.
Nouveau silence. Eve pensait, ignorant toujours les signaux corporels lui indiquant qu'elle n'était pas assez couverte pour la température qui régnait. Sa fierté lui criait qu'en tant qu'Anglaise, elle se devait de bien résister au froid. Ce qui n'était pas le cas actuellement.
Pour le cas de Kayano, Koro-sensei tenterait sûrement la même approche. Il voudrait sauver son élève, quoi qu'il en coûte. Trouver les mots pour calmer Kayano serait sans doute bien trop compliqué, mais c'était à tenter. Elle avait une journée pour se préparer, mais pour quoi faire ? Elle ne pouvait pas la battre physiquement, et la battre mentalement serait impensable compte tenu de la fureur de la jeune fille.
— Tu auras tes anesthésiants, si c'est ce que tu veux, soupira Isaac. Maintenant, rentre. Tu vas chopper la crève.
Eve leva les sourcils : depuis quand cet égocentrique de première faisait-il attention à la vermine qui l'entourait ? L'adolescente ne releva pas, et se contenta d'un « à demain » aussi froid que la température environnante avant de repartir vers son quartier.
Elle avait oublié les consignes qui stipulaient une obligation de prévenir de ses moindres mouvements, mais puisque Isaac était au courant, officieusement c'était comme si elle les respectait. La nuit était déjà bien tombée. Les lampadaires commençaient à remplacer le Soleil avec leurs rayons blafards. Cette lumière artificielle agressa les rétines émeraude de la gamine, qui se contenta de fixer le sol. Observant sa propre ombre et slalomant entre les déjections canines, elle ne parvenait pas à se convaincre que tout se passerait bien.
Elle espérait que son plan fonctionnerait, elle priait de tout son cœur qu'elle arriverait à sauver ce poulpe aussi pédagogue que pervers. Même si Eve aurait probablement le monde entier contre elle. Léger sourire. Oui, elle se mettait les gouvernements du monde entier à dos. Un léger frisson traversa ses vertèbres pour finir sa course dans sa nuque, délivrant des sueurs froides à l'adolescente. Merde. Qui aurait cru qu'une gamine pleurnicharde aurait des idéaux pareils ?
— Eve ?
La dénommée releva la tête, subissant violemment la puissance des luminaires en pleine face, pour découvrir celui qui l'avait apostrophée. Détaillant sa silhouette en contre-jour, elle reconnut finalement Joshua. C'est vrai qu'il n'y avait pas grand monde qui prononçait son prénom correctement dans ce pays.
— Qu'est-ce-que tu fais là ? demanda-t-elle
— Je sors des cours du soir, donnés spécialement par Asano. Il prend ça vraiment à cœur depuis que vous nous avez battus. Félicitations d'ailleurs.
Étonnée par ces compliments, Eve le gratifia d'un ''merci'' un peu léger. Des cours du soir ? Elle sortit sa montre de sous son manteau, vérifia la position des aiguilles pour se rendre compte qu'il était un bon dix-neuf heures trente.
— Bonne soirée, salua poliment Eve. J'ai du travail.
— Asano a arrêté de vous harceler, mais ça ne veut pas dire qu'il ne s'intéresse plus à votre classe. Il dit qu'il y a encore des choses étranges. Ce collège est vraiment bizarre, ça change d'Oxford.
— Tu n'imagines pas à quel point, soupira-t-elle.
— Bonne soirée, Eve, termina Joshua en continuant sa route.
La petite Anglaise put enfin retourner au foyer familial, où elle se réchauffa en se roulant dans sa grosse couette. Cachée comme dans un cocon, la jeune fille se rappela de toutes les choses qu'elle avait à faire. D'un coup, elle sortit de sa carapace pour attraper son portable. Aucune notification. Elle le déverrouilla et tapota sur un dossier secret. Cette fois, des petits dossiers étaient annotés d'un point rouge, signe de leur nouveauté.
— Ritsu ?
La petite androïde apparut sur l'écran du téléphone, envoyant ses cheveux roses chatouiller les applications.
— Oui Eve, j'ai trouvé quelques informations. Mais c'est compliqué, où que j'aille je n'ai vraiment pas grand-chose. De plus, certaines sont cryptées, et d'autres situées dans le Deep Web. J'ai bien failli me faire hacker.
— Tu t'es faite repérée ? s'étouffa Eve.
— J'avais utilisé une adresse IP qui me localisait au Pérou, à l'aide d'un ordinateur d'accès libre. On ne peut pas remonter à moi.
Eve ne comprit pas tout à fait comment c'était possible, mais elle faisait confiance à Ritsu pour ça. En tant qu'Intelligence Artificielle, elle possédait des capacités d'adaptation et d'apprentissage impressionnantes. Si on lui avait laissé l'année pour tuer Koro-sensei, comme le plan initial le prévoyait, elle l'aurait eu.
— J'ai également réussi à trouver quelques informations qui ne concernent certes pas Koro-sensei, mais des potentiels assaillants. Deep Web encore, expliqua le robot en ouvrant le dossier associé.
Deep Web. Seconde fois qu'elle le mentionnait. Eve le connaissait de réputation comme un endroit très peu recommandable, et repère de toutes les pires immondices humaines.
— Mais… Tu n'as pas eu de problèmes ? demanda Eve, cette fois inquiète.
— J'ai failli, admit Ritsu. Mes programmes ne sont pas faits pour ce genre de missions. Mais j'ai réussi à m'en sortir en imitant le codage d'un certain 707. Assez connu dans le milieu apparemment.
Eve lu le dossier en diagonale : ça ressemblait à une espèce de secte, genre de blog malsain qui voulait vous vider le cerveau. Ça parlait de vénérer Koro-sensei tel un Dieu. Comment ce genre d'information avaient-elles pu fuiter ? Puis Eve se rappela que le poulpe était loin d'être particulièrement discret. Un autre dossier était sur l'attaque du cinéma. Le groupe semblait bien plus petit. Sûrement les morts des attaquants qui avaient dissuadé le reste du groupe.
— Rien sur Koro-sensei ?
— Pas grand-chose. J'essaie de comprendre la nature de ses tentacules. Il dit avoir été créé sur Terre, donc il doit bien y avoir des informations qui y sont liées. J'ai commencé à chercher dans des pays où des expériences sur les Hommes seraient le plus susceptibles d'être effectuées, mais je n'ai rien trouvé qui concorde suffisamment.
Maintenant qu'elle y faisait attention, Eve remarqua que les pixels au niveau des joues de la fille étaient rosés. Son animation était irrégulière, saccadée par moments. Ritsu était probablement encore en train de continuer ses recherches à l'instant où elles parlaient.
— Hm… Si tu peux, essaie de chercher du côté de Yukimura Aguri. Elle a l'air d'être très importante dans toute cette affaire. Ne te surcharge pas trop, Ritsu. Et merci beaucoup de ton aide.
— Mais de rien, fit Ritsu, se rhabillant d'une tenue noire —sûrement destinée à ses recherches illégales. Je te laisse, bonne soirée.
Eve répondit à quelques messages d'Aura —qui avait un petit ami, apparemment adorable— et descendit manger, avant de se recoucher, l'estomac noué. Tout avançait lentement, et la jeune Britannique pourrait peut-être avoir toutes les pièces en main.
Tout ce qu'elle avait à faire, c'était d'éviter que Kayano tue Koro-sensei le lendemain.
To be continued~
