Écrit d'après un fanart adorable que m'a envoyé quelqu'un que je ne citerai pas et qui m'a donné plein de feels.
Geralt avait affronté pas mal de monstres, des affreux et repoussants comme des plus banals. Ils étaient effrayants, tous autant qu'ils étaient, mais le Sorceleur n'était pas sûr de ressentir exactement de l'effroi en les voyant. Il était habitué, depuis le temps… et on lui avait toujours appris, depuis petit, à leur face et à les occire sans trembler. Quand il regardait ces monstres, il pensait davantage à la meilleure façon de les réduire en pièces qu'à la manière atroce dont ils pouvaient le faire mourir. En fait, il était presque « blasé ».
Ce qu'il n'avait jamais appris à encaisser, par contre, c'était la terreur qu'on pouvait ressentir en voyant quelqu'un qu'on aimait sur le point de se faire mettre en charpie. Des personnes qui se souciaient de lui, il n'y en avait pas eu beaucoup et il n'avait pas vraiment eu l'occasion de les voir en danger face à des monstres ou des fléaux naturels. Que Jaskier se retrouve donc à deux doigts d'y passer, lacéré par les griffes mortelles d'une goule et déchiré par ses dents acérées, avait failli le faire mourir de peur.
Même après, alors que son ami allait finalement à peu près bien, étendu dans le lit moelleux d'une grande maison d'hôtes, Geralt n'arrivait pas à freiner les battements désordonnés de son cœur. Il n'arrêtait pas de penser à ce qu'il se serait passé si Jaskier était mort. Ou plutôt, il n'arrêtait pas de penser que, c'était sûr, le barde allait trépasser à cause de ses terribles blessures et qu'il ne s'en remettrait jamais. C'était une peur terrible, irrationnelle, qu'il n'arrivait pas à contrôler malgré son entrainement de Sorceleur.
« Nous sommes entiers, lança la voix douce et compatissante de Jaskier au-dessus de lui. »
Le Sorceleur ne répondit pas. Il demeura résolument allongé contre la poitrine de son ami, son regard d'ambre perdu dans le vague. Il sentait bien l'une des mains de Jaskier sur son bras, l'autre s'aventurer dans ses cheveux blancs, mais il ne parvenait pas à bouger la tête. Il était bien trop angoissé, alors il se concentrait sur le tissu un peu rugueux, sous sa tête, des bandages blancs enserrant le torse blessé de son ami. Il se focalisait aussi sur les battements de son cœur, qui résonnaient dans ses oreilles comme une musique. Il avait eu tellement peur de les entendre cesser pour toujours. Il était encore tellement angoissé à l'idée qu'ils s'arrêtent d'un coup, même si Jaskier allait à peu près bien et pouvait supporter sans problème le poids de sa tête sur sa poitrine lacérée.
Geralt entendit un petit bruit de bouche émaner de Jaskier, comme s'il s'apprenait à reprendre la parole, mais le barde se ravisa. Il devait comprendre que ce n'était pas le moment de dire quoi que ce soit et qu'il fallait juste qu'il laisse le Sorceleur s'en remettre. Alors, il ne bougea pas. Geralt ferma un instant les yeux, rompu de fatigue, mais il ne voulait pas s'endormir, alors il les rouvrit. Qui savait ce qui pouvait arriver à Jaskier pendant son sommeil ? Il préférait encore suivre les battements de son cœur.
Ça tombait bien, il était à l'endroit parfait pour ça. En plus, les bras du barde étaient des plus confortables et ils étaient si apaisants… Sans s'en rendre compte, alors que l'angoisse et le stress diminuaient lentement, Geralt s'endormit pour de bon. Il lutta bien un peu, instinctivement, mais son besoin de repos était le plus fort.
« Geralt, je te promets que j'irai toujours bien quand tu te réveilleras, lança la voix lointaine de Jaskier pendant qu'il sombrait. »
Avec ça, le cœur du Sorceleur se calma complètement. Son ami ne pouvait pas lui mentir. Et quand il se trouvait contre lui, il oubliait (presque) toutes ses peurs. Parce qu'il avait l'impression que quelqu'un veillait sur lui… et il ne pouvait rien lui arriver d'angoissant, ou de douloureux, ou de tragique, quand Jaskier veillait sur lui, n'est-ce pas ?
