Aiolia

Simba.

Juste ce nom et je capitule.

Parce que c'est Milo qui me le demande. Parce qu'il sait trop bien ce que signifie la défaite. Lui qui a tant perdu au gré des guerres.

Lui qui me fixe de ses yeux blancs.

Il ne me voit pas mais pourtant, il me regarde malgré tout. Et je peux voir à quel point son séjour en captivité lui a coûté.

Leur a coûté.

Jamais je n'aurais cru devoir soutenir Kanon, entre tous ! Ce grand orgueilleux, j'aurais cru qu'il aurait préféré crever que de s'abaisser à accepter l'aide d'autrui.

Pourtant, lors de notre fuite, je me retrouve à le surveiller du coin de l'œil. Camus s'occupe de Milo. Nos compagnons paraissent presque fragiles, malades. Ils ont perdu de leur masse musculaire lors de leur captivité. Lorsque nous laissons la ville en flamme dans notre dos, nous courrons épaule contre épaule. Je ne sais pas s'il se rend compte que je le colle pour veiller à ce qu'il suive le rythme et à ce qu'il ne s'étale pas. Aux regards en biais qu'il me jette par moment, je devine qu'il n'est pas complètement dupe. La plupart du temps, ses yeux restent fixés entre les omoplates de Milo.

Ce dernier doit avoir retrouvé un peu de sa vue car il garde le rythme et évite les obstacles sans que Camus n'aie à les lui signaler.

Nous progressons vite, les premiers arbres nous entourent et nous masquent bientôt à la vue d'éventuels poursuivants. À cette distance, je ne peux plus entendre les cris de souffrance de ces gens, ces hommes, ces femmes et ces enfants que nous laissons derrière nous.

Ça ne change rien. Nous les avons abandonnés.

J'essaie de ne pas laisser la culpabilité me manger. Ce n'est pas une réussite… Devant moi, je remarque que Milo trébuche soudain, se reprend avant de se manger un arbre en pleine face avant que Camus ne puisse le rattraper.

Outch ! Ça doit piquer, ça !

— Merde !

Kanon le rejoint en deux bonds, il doit avoir retrouvé un second souffle. Il écarte les mains du français qui veut relever son amant. Je vois les yeux de Camus s'étrécirent mais Milo agite un bras entre le Verseau et le Gémeau.

— Je vais bien… Je crois. Je vais juste voir double… Ah ben non, en fait !

Je les rejoins. Si le Scorpion essaie de plaisanter, c'est que ça doit aller.

En théorie.

Je m'agenouille entre nos compagnons et grimace devant la bosse qui commence à gonfler sur son front et les égratignures sur son visage. Au moins, il ne s'est pas cassé le nez, à première vue. Kanon laisse échapper un soupir explosif :

— Ta tête, ça va ? demande-t-il avant de nous jeter un regard presque hésitant. C'est son cosmos. Il l'utilise pour se diriger mais…

— J'ai pris un coup sur la tête, gemini. Je ne suis pas devenu incapable de m'exprimer pour autant.

Milo essaie de se redresser. Une grimace lui échappe.

— Pas ce soir, mes chéris, j'ai la migraine. Il va falloir me guider, j'ai perdu prise sur mon GPS intérieur.

Je ne comprends pas tout… (Sérieux, c'est quoi un GPS ? Un truc de civil ?) Je vais laisser les deux autres gérer notre blondinet. Moi, je vais m'occuper du reste.

Je me redresse et me tourne vers la ville. Je ne la vois pas d'ici. Mais entre les branches, le ciel nocturne a pris une teinte orangée. J'essaie de ne pas y penser et me concentre plutôt sur des bruits de poursuite. Je n'entends rien.

Certes, cela veut soit dire que personne ne nous poursuit, soit qu'il ou elle se montre suffisamment compétent pour ne pas attirer mon attention. J'essaie de m'imaginer un moment les trolls essayant de se faufiler discrètement entre les arbres et… Non. Ça ne colle pas.

Je reviens à mes compagnons. Ils sont épuisés. Moi-même, je ne cracherais pas sur un moment de repos. Mais je ne me sentirai pas tranquille tant que nous n'aurons pas mis suffisamment de distance entre nous et cette ville et ses Maîtres cauchemardesques.

Même si je me doute que peu importe les kilomètres avalés, je continuerai d'entendre les cris d'horreur et d'agonie des mourants.

Milo se relève, soutenu par ses… hum… comment dire, je ne sais plus trop où se situe leur équilibre à ces trois-là. Bref, ses soupirants relèvent le Scorpion. Je les pousse à avancer et nous reprenons notre chemin. À plusieurs reprises, nous traversons des cours d'eau, histoire de perturber un peu notre piste. En même temps, je me creuse le cerveau pour me rappeler la région. Si je ne me trompe pas, il y a un refuge de passeur non loin. J'imagine qu'à présent, la rébellion n'est plus… elle n'aura plus besoin de cet endroit.


Saharu-chan : Merci de tes reviews. Je suis ravie et flattée que ma narration te plaise. X^^X Je croise les doigts. Milo est heureux de retrouver son Camus mais Kanon est devenu une partie indispensable de son équation. Je vois que tu as noté le "notre"... moi aussi. Pour être franche, je n'ai qu'une très vague idée de comment tout ça va se terminer. ^^

Et Aiolia continue de garder la tête froide. La situation n'est pas évidente pour lui non plus, il va falloir le réconforter et l'encourager le pauvre. ^^

Hemere : Chouette ! Une de tes reviews. Deux même ! =)
On ne pouvait pas demander à Milo d'agir comme si de rien n'était. C'est un chevalier, certes mais il reste humains et ce qu'il a subi a laissé des traces aussi bien chez lui que chez Kanon. Ils vont devoir se réapprendre tous les quatre.
J'espère que tu es contente d'avoir un nouveau chapitre. Bon, c'est Aiolia. Milo devrait être aux commandes du prochain chapitre mais je ne sais pas trop comment ça va se goupiller. Il va peut-être falloir attendre un peu, du coup.

Merci pour vos reviews !