Disclaimer : Harry Potter et son univers ne m'appartiennent pas, je ne gagne aucun argent à publier cette traduction, laquelle m'appartient, par contre. Les passages en italiques sont une emphase sur certains mots, ou la pensée d'un personnage, le contexte vous aidera.

Ceci est une traduction de la fanfiction de Lomonaaeren, « Beggar to beggar cried», ( s/12564609/1/Beggar-to-Beggar-Cried ). Je n'ai pas encore son autorisation pour publier ma version française, je la retirerai si elle me le demande.

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Harry sort le mince petit livre noir de son sac une fois qu'il est seul, les rideaux bien fermés autour de son lit dans le dortoir des garçons de Gryffondor, et le contemple.

Il sentait quelque chose d'étrange, irrégulièrement, depuis des mois, principalement autour de Ginny, mais aussi juste dans l'école. C'est pour ça que cela lui a pris autant de temps pour le trouver. D'un côté, il voulait traquer cette étrangeté. De l'autre, il y avait une voix qui parlait dans les murs, et cette affaire d'Héritier de Serpentard, et bien qu'il sache que la voix dans les murs doit être un serpent, personne n'a trouvé de moyen de l'arrêter ou de la faire taire. Harry a prévenu le professeur Dumbledore, et c'est tout ce qu'il peut faire. Il a des ordres stricts, il ne doit parler à personne des Horcruxes, ou de la raison pour laquelle il est un Fourchelangue. Il n'aurait même montré à personne qu'il en était un s'il avait pu penser à une autre façon de sauver Justin.

Harry soupire et ferme les yeux. Il a déjà discuté avec le professeur Dumbledore à ce sujet, et le professeur Dumbledore a dit qu'il ne devait pas être désolé. Il est dommage que les gens sachent, mais aucun d'entre eux n'aurait de soupçons.

Et c'est le plus important.

Harry passe sa main le long du dos du livre puis hoche la tête. Oui, il s'en dégage la même impression qu'il perçoit de sa cicatrice quand il fait nuit et que tout est calme et qu'il pose la main sur sa tête et se concentre très fort. Le journal est un Horcruxe.

Ce qui est bizarre, c'est que Harry ne sait pas pourquoi quiconque transformerait un livre en Horcruxe. Il peut comprendre pourquoi quelqu'un comme lui, qui peut aller et venir et parler et fuir, pourrait être utile. Mais un livre serait juste posé sur une étagère quelque part, et pourrait ne pas être ouvert pendant des années. A quoi pensait Voldemort ?

Puis Harry secoue la tête. Parfois, il pense comme ça. Le professeur Dumbledore dit que c'est naturel. Harry a seulement douze ans, et n'a pas l'habitude de ces choses-là. Il est peut-être différent des autres gens, mais il est beaucoup comme eux, aussi. Harry continuera à oublier qu'il est un Horcruxe accidentel, et que Voldemort aimait probablement ceux qui ne bougeaient pas de leur propre chef. Ce qui veut dire qu'ils seront toujours là où il les a mis lorsqu'il viendra les chercher.

Entre-temps, il y a un Horcruxe à déchiffrer.

Il semblait plus probable que vous communiqueriez avec un libre en écrivant dedans. Harry ouvre le journal et récupère une plume. Les pages sont parfaitement lisses et vierges, mais cela ne le surprend pas. Le Horcruxe veut sans doute piéger quelqu'un, pour devenir plus fort. Le professeur Dumbledore l'a averti de ce danger.

Harry hésite. Ne devrait-il pas apporter ce Horcruxe au professeur Dumbledore ? Il sait que le professeur les rassemble tous, lentement. Il ne va pas les détruire, pour le moment, parce que Voldemort est toujours un esprit et ils ne savent pas quel effet cela aurait sur lui. Cela pourrait peut-être même lui permettre de revenir d'une autre façon, une façon qui n'est pas sous le contrôle de Dumbledore.

Mais Harry secoue la tête. Il veut parler à celui-là, juste pour voir comment il est, ce qu'il dira.

Et... il est peut-être comme les autres gens, mais il n'est pas exactement le même. Il veut parler à quelqu'un comme lui, pour une fois. C'est probablement la seule chance qu'il aura jamais de le faire. Le professeur Dumbledore a découvert qu'une bague importante est un Horcruxe, mais ce n'est pas comme si une bague pouvait vous répondre.

Ce sera juste une fois. Puis il apportera le journal au professeur Dumbledore comme il est censé le faire.

Bonjour, écrit-il sur la première page du livre, et observe l'encre disparaître.

Il y a un petit soubresaut dans la magie du livre. Harry sourit jusqu'à ce qu'il commence à se demander si cela signifie que le livre peut le sentir lui aussi. Il se mord la lèvre. Il ne veut pas ça. Le livre pourrait essayer de le tuer. Est-ce qu'un Horcruxe peut être jaloux d'un autre Horcruxe ?

Bonjour, est apparu sur la page du livre pendant qu'il débattait avec lui-même. Harry regarde le mot, hésite, puis griffonne imprudemment :

Mon nom est Harry Potter. Et vous ?

Les mots semblent prendre plus de temps pour disparaître cette fois, et Harry laisse échapper un soupir étouffé. C'est comme si le livre avait été posé sur sa poitrine.

D'accord, c'est un petit livre, et il n'est sans doute pas si lourd. Mais Harry serait prêt à parier qu'il pourrait être plus lourd s'il en avait envie.

Mon nom est Tom Jedusor, et c'est mon journal.

Harry ferme à moitié les yeux. Il a raison. Le professeur Dumbledore lui a dit une fois que c'était l'ancien nom de Voldemort, et que c'est tout à fait acceptable d'appeler Voldemort par ce nom, parce qu'il détestera ça, et qu'énerver Voldemort est acceptable.

Il devrait fermer le livre et l'apporter au directeur sur l'instant.

Mais c'est quand même le seul Horcruxe qui sera jamais capable de lui répondre, alors Harry écrit.

Ça fait quoi, d'être un Horcruxe ?

C'est dans son imagination, il le sait, mais le journal semble trembler puis s'immobiliser entre ses mains. Ce n'est pas dans son imagination que la magie du journal s'élève de nouveau. Harry reste assis, l'observant. Il se demande quel genre de défenses a cet Horcruxe. Le professeur Dumbledore avait dû être très précautionneux en récupérant la bague Horcruxe. Est-ce que ce livre peut se refermer d'un claquement sur ses doigts et lui infliger une coupure avec son papier qui le ferait saigner à mort ou un truc du genre ?

Ça fait sourire Harry. Il n'a pas peur de la mort. S'il meurt, alors le Horcruxe mourra aussi, et ses parents seront vengés. Et le professeur Dumbledore lui a dit qu'il verrait ses parents dans l'au-delà. Après des années à regarder leurs visages dans des albums photos —sept ans, depuis que le professeur Dumbledore l'a emmené de chez les Dursley—, Harry est prêt à les voir en personne.

Où as-tu appris ce mot ?

Harry lève un peu les yeux au ciel. Il suppose qu'il aurait dû savoir que Voldemort mentirait et nierait, mais c'est un peu fatiguant.

Je le connais depuis que j'ai cinq ans. Moi aussi, je suis un Horcruxe. Ton toi plus vieux m'a fait la nuit où il a essayé de me vaincre quand j'étais bébé. Le professeur Dumbledore ne sait toujours pas ce qui s'est passé, pas vraiment, mais apparemment son âme était tellement instable d'avoir créé plusieurs Hocruxes qu'un petit bout s'est détaché et s'est attaché à moi. Donc c'est ce que je suis, c'est ce que tu es, et nous devons tous les deux mourir pour se débarrasser de Voldemort. Je veux juste savoir ce que ça fait, d'être toi. Je sais ce que c'est que d'être moi.

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Tom n'avait pas ressenti de peur depuis si longtemps qu'il lui faut un temps infini pour comprendre ce qu'est ce vent d'hiver qui l'a envahi. Les souvenirs sur lesquels il s'appesantit dans son journal n'incluent certes jamais ceux sur l'hiver.

Il contrôle son impulsion de surgir du journal et d'essayer de drainer Harry Potter de son énergie vitale. Il n'a plus assez de magie d'avoir tenté de le faire avec la petite Ginny. À la place, il essaye de tendre des sens atrophiés par des années d'inactivité sur une étagère du Manoir Malfoy. Il essaye de sentir le pouvoir du sorcier qui écrit dans le journal, plutôt que de simplement sentir qu'il est un sorcier.

La magie chante à ses oreilles, surprenamment facile à ressentir. Une heure plutôt, Tom aurait balayé cela, catégorisant ce fait comme un signe de la force de Harry Potter. Avec tout ce que Ginny a déblatéré à son sujet, il devait forcément l'être.

Mais il y a un arrière-goût de ténèbres dans cette magie qui fait frissonner Tom et s'affaisser contre le souvenir d'un bureau de Métamorphose. Oui, c'est une magie comme la sienne.

La sienne, celle du journal, pas une magie comme celle de Lord Voldemort. C'est difficile pour Tom de penser à lui-même comme étant la même personne que son créateur, après une séparation si longue.

Le garçon ne ment pas.

Des révélations explosent dans son esprit comme des feux d'artifice alors que Tom laisse le souvenir se dissoudre et qu'il reste debout dans l'obscurité. Dumbledore sait. Son créateur est si instable qu'il peut créer des Horcruxes accidentellement. Il y a d'autres objets comme Tom, alors qu'il a toujours pensé qu'il serait le seul. Oui, de temps à autres, son créateur avait songé à en faire plusieurs, mais cela avait toujours semblé si évidemment stupide que Tom avait écarté cette idée comme un fantasme puéril.

Il devait forcément y avoir un moyen d'arrêter ça. Il devait forcément y avoir un moyen de survivre. Il n'était peut-être pas Voldemort, mais il est Tom Jedusor, qui avait trouvé une issue de secours à tous ses problèmes à Poudlard.

C'est ennuyant, d'être un livre, finit-il par répondre, lorsqu'il réalise que le garçon reste là, assis, le journal sur les genoux, plutôt que de le fermer. Je ne peux communiquer avec personne, sauf quand les gens écrivent dans le journal. Et le monde ici est composé de mes souvenirs, que j'ai vu et revu ces cinquante dernières années. Ça fait quoi d'être toi ?

Oh, c'est être un garçon. Tu as été un garçon aussi, alors tu sais probablement ce que c'est.

Je ne voulais pas dire ça, Harry, révèle Tom, et il se demande s'il peut projeter de l'assurance et des émotions apaisantes à travers les mots. Normalement, il ne s'embêterait pas à essayer, se reposant simplement sur les défenses passives du livre pour prendre celui qui écrit au piège, mais c'est différent avec un autre Horcruxe. Tu sais ce que tu es. Tu sais que tu dois mourir. Ça fait quoi, de vivre en sachant que tu dois mourir ?

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Harry cligne des yeux, et se demande un instant pourquoi Voldemort poserait cette question. Puis il hausse les épaules. Ça n'a pas vraiment d'importance. Voldemort ne peut rien faire. Même s'il avait contrôlé quelqu'un pour ouvrir la Chambre des Secrets, c'est Harry qui a le journal, maintenant, et il l'emmènera à Dumbledore juste après avoir fini cette conversation.

C'est dur, parfois. Mais je sais que je verrai mes parents quand je mourrai. Tu les as tués la nuit où tu as fait de moi un Horcruxe.

Et voir deux personnes que tu n'as jamais connues est suffisant pour toi ? C'est une raison suffisante pour mourir ?

Je ne peux pas vivre. Nous ne pouvons pas vivre, écrit Harry en soulignant le mot aussi fort qu'il le peut, se demandant si cela fera tomber une pluie d'encre sur la tête de Voldemort. Nous le garderions en vie.

Mais pourquoi je devrais m'en soucier ? Pourquoi ne devrais-je pas vouloir vivre aussi fort que je le veux et aussi intensément que je le peux ? Il y a une longue pause, mais Voldemort se remet à écrire avant que Harry ne puisse répliquer. Pourquoi ne veux-tu pas vivre aussi fort et aussi intensément que tu le peux ?

Harry ne dit rien. Il connait les raisons, mais il se sentirait stupide de les écrire. Voldemort les tournerait juste en dérision.

Parmi ces raisons, il y a Dumbledore venant à la maison des Dursley quand Harry avait cinq ans, le prenant à part, et lui expliquant, tranquillement, l'histoire de la magie et de la mort de ses parents pour la première fois. Il avait eu plus de mal à lui faire comprendre le principe des Horcruxes. Harry n'avait que cinq ans, après tout. Et il ne pense pas être un génie, ou quoi que ce soit d'autre. Hermione aurait compris tout de suite.

Mais après que Dumbledore lui ait parlé du Horcruxe, c'était cohérent. Harry avait une légère énergie négative tout autour de lui. Il fallait que les gens soient vraiment déterminés pour passer au travers. C'est pour cela qu'il a aussi peu d'amis, seuls l'extrême détermination de Ron et Hermione leur avait permis de la traverser. Et c'est pour ça que les Dursley le haïssaient.

C'est pour ça qu'il doit mourir. Ce n'est pas juste, mais c'est comme ça.

Harry ?

Harry ferme le livre et le glisse sous son oreiller. Il ne sait pas qui l'a abandonné en premier lieu, mais il veut pas qu'il aille ailleurs.

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Tom ne sait pas ce qui s'est passé, mais il a l'impression qu'un long temps s'écoule avant que Harry n'écrive de nouveau. Il s'est de nouveau habitué au rythme du jour et de la nuit, depuis que Ginny a commencé à écrire dans le journal. Il peut, s'il se concentre assez fort, se sentir porté ici et là de temps en temps, puis posé sur un bureau ou sur quelque chose de mou qui ressemble au fond d'un sac.

C'est enrageant de savoir que Harry traite le journal sans aucune dignité. Le seul réconfort vient du fait qu'il n'a pas encore apporté livre à Dumbledore. Tom sait qu'il serait juste enfermé dans un bureau ou un secrétaire jusqu'à sa destruction.

Tom attend jusqu'à ce qu'il pense que Harry ne répondra jamais, puis il étend sa magie aussi loin qu'il le peut à l'extérieur du livre. Ce qui fait trembler et se tordre son monde intérieur en noir et blanc, au bord de la rupture. Tom n'en est pas sûr, parce qu'il n'a jamais repoussé ses limites aussi loin auparavant, mais il pense que ça pourrait le tuer et le faire se vider de son sang, son encre sur les pages.

Par chance, il n'a pas besoin de s'étendre aussi loin qu'il n'en aurait eu besoin avec quelqu'un d'autre. Harry lui est trop semblable. Tom attrape la faible magie Noire qui émane de son corps et de son aura et se hisse dans les rêves de Harry.

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- Bonjour Harry.

Harry se retourne lentement. Il semble être dans son lit du dortoir des garçons de Gryffondor, mais il sait que ce n'est pas vrai. C'est trop sombre et calme, et un bel adolescent est penché sur lui, ses yeux noirs brillant presque.

Harry n'a pas peur, cependant. Il ne pense pas que Tom peut le contrôler. Il ne peut pas lui faire de mal. Et s'il le tue…

Il ne tue qu'un Horcruxe. Une partie de Voldemort.

- Bonjour, répond Harry en s'asseyant.

Tom le détaille lentement. Il porte des robes de Serpentard, et il est plus grand que Harry ne le sera jamais. Harry met ses mains sur ses genoux, l'observant aussi. Malgré tous ses efforts, il ne sentait aucune magie distincte d'un autre Horcruxe. Peut-être parce qu'ils sont si proches l'un de l'autre dans ce rêve.

- Tu es si petit, fait remarquer Tom, l'air choqué.

- Oui, les Dursley m'ont affamé avant que le Professeur Dumbledore m'emmène vivre à Poudlard, acquiesce Harry.

Tom s'assied sur une chaise qui surgit de nulle part, et agite sa baguette pour allumer un feu qui apparait, pareil, de nulle part. Harry le regard d'un œil critique. Jusqu'à présent, il n'est pas vraiment effrayant ou diabolique.

- Ils ont fait ça, et tu peux encore défendre les Moldus ?

- Je ne pense pas beaucoup aux Moldus.

Ce qui est vrai. Harry se souvient encore des Dursley, mais plus comme issus d'un rêve ou un cauchemar, maintenant.

- Je pense au fait de mourir pour défendre tous les gens du monde sorcier contre toi, poursuit-il.

- Sûrement, tu peux voir que je ne suis pas Voldemort.

- Tu n'es pas comme lui l'an dernier, non.

- L'an dernier ?

- Quand je l'ai vaincu et qu'il a fait le Horcruxe, il est devenu un spectre. Il possédait un des professeurs l'an dernier pour s'infiltrer dans l'école et voler la Pierre Philosophale.

Tom marque un temps d'arrêt.

- Pourquoi la Pierre Philosophale se trouvait là ?

- Le Professeur Dumbledore la cachait dans Poudlard pour y attirer Voldemort.

Tom se penche en avant, et parle d'une voix douce, rapide, et convaincante :

- Harry, tu devrais être capable de voir ce qui se passe vraiment, là. Dumbledore a fait des erreurs. Il t'a dit que tu es obligé de mourir, mais tu n'es pas obligé ! Il a monté un plan pour attirer… mon plus vieux moi, ici et il l'a fait dans une école pleine d'enfants, où n'importe qui aurait pu être blessé. Il m'a fait retourner à l'orphelinat où je vivais chaque été, même si je lui répétais encore et encore que je préférerais rester à faire des travaux d'entretien à Poudlard. C'est lui l'ennemi, pas mon moi plus âgé.

Harry soupire juste. Il suppose que ça lui donne l'air stupide, mais il ne peut même pas suivre tous les arguments de Tom.

- Non, il n'est pas un ennemi. Ça veut juste dire qu'il ne veut pas que moi ou toi ou n'importe quel autre Horcruxe puisse blesser des gens. Il ne veut pas que Voldemort leur fasse du mal, non plus.

- Pourquoi toi tu leur ferais du mal ?

- Le Horcruxe en moi empoisonne les gens. Il les retourne contre moi. C'est pour ça que les Dursley m'ont fait dormir dans un placard et ne me nourrissaient pas assez. Et c'est pour ça que beaucoup de gens ont décrété que j'étais diabolique à la minute où ils ont découvert que j'étais un Fourchelangue.

Tom reste muet, excepté pour la façon dont il serre les poings, avant de déclarer :

- Pourquoi tu serais… c'est la chose la plus ridicule que je n'ai jamais entendue.

- Vraiment ? fait Harry en levant les yeux vers lui. Les Horcruxes empoisonnent vraiment les gens. Le Professeur Dumbledore en a trouvé un protégé par une puissante malédiction. Et tu appelais et tu contrôlais quelqu'un, pas vrai ? Lui faisant ouvrir la Chambre des Secrets ? Ce qui veut dire que tu empoisonnais son esprit et son âme.

- De bien grands mots pour un petit garçon, chuchote Tom.

- Horcruxe.

Tom le regarde fixement, inclinant lentement son visage sur le côté, comme s'il cherchait à préserver l'équilibre d'un livre qu'il porterait sur sa tête.

- Tu le penses vraiment, n'est-ce pas ? articule-t-il. Tu penses que tu es diabolique. Un garçon, pas un Horcruxe.

Harry rehausse ses pieds et s'allonge sur le lit. C'est bizarrement confortable. Il suppose que c'est parce qu'il n'a pas à s'inquiéter que Tom soit blessé ou corrompu par la magie qu'il porte en lui.

- Le Professeur Dumbledore m'a dit que je ne suis pas le même enfant que mes parents ont aimé, pas vraiment. Ma maman est morte pour moi avant que le Horcruxe ne soit créé. Tu —je veux dire, le toi Voldemort— a tué ma maman avec le Sort de Mort avant que tu —je veux dire, le toi Voldemort— ne tourne ta baguette vers moi. Puis le Horcruxe a été créé. Donc, avant ça, j'étais innocent. Maintenant, je ne le suis plus. Le garçon pour qui ma maman est morte n'est plus vraiment en vie.

Tom pâlit, pour une raison inconnue. Harry se demande si cela le dérange, de l'entendre parler de mort. Harry ne sait pas pourquoi. Son esprit a travaillé sur l'énigme de la Chambre des Secrets, et il est quasiment sûr que Tom a été créé lorsque Voldemort a tué Mimi Geignarde. Il a donc la mort en lui depuis le début.

Harry peut voir pourquoi il pourrait avoir peur de mourir, et ne pas vouloir mourir, mais il ne devrait pas en être si choqué.

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Dumbledore l'en a convaincu. J'ai affaire à un fanatique.

Cependant Tom refuse d'abandonner. D'un, il n'a pas ça en lui. Il continuera à se battre pour survivre jusqu'à ce que quelqu'un réussisse vraiment à le détruire.

De deux, il pense que cette volonté innée de survie pourrait être en Harry, aussi, que ce soit la sienne ou celle du Horcruxe.

De trois…

- Si tu crois vraiment ça, pourquoi ne m'as-tu pas encore donné à Dumbledore ?

Harry tressaille. Il devait se poser la même question. Tom bondit sur cette faiblesse aussi vite que possible.

- Tu penses que je suis diabolique. Tu penses que tu es diabolique. Ce qui est ridicule, au passage.

Il scanne le garçon du regard de la tête au pied. À part la cicatrice du Sort de Mort sur son front, il n'y a aucun signe extérieur de la présence du Horcruxe. Il porte une cravate de Gryffondor, ses cheveux sont ébouriffés et son visage rougi par le sommeil. Il ne pourrait pas avoir l'air plus innocent même s'il essayait.

- Pourquoi ne pas me livrer à Dumbledore pour qu'il puisse détruit cette horreur en nous ? D'ailleurs, pourquoi es-tu toujours en vie ?

Harry hésite de nouveau. Tom se penche en avant et ose un pari. Il tend la main et attrape celle du garçon. S'il croit ces inepties à propos du Horcruxe étant diabolique et empoisonnant les autres, alors il ne sera pas habitué à être touché. Il est plus difficile d'ignorer ou écarter quelqu'un qui vous touche, également.

Tom n'est pas préparé à la montée de plaisir et de compassion qui se déverse en lui comme un torrent, le laissant bouche bée alors qu'il halète. Harry devient écarlate et récupère précipitamment sa main. Tom le fixe du regard et oublie les arguments qu'il allait présenter.

Est-ce que ça fait ça, quand un Horcruxe touche un Horcruxe ? Ce n'est pas comme si j'avais jamais été près d'un autre avant aujourd'hui pour le savoir.

- Qu'est-ce que tu as fait ? chuchote Harry.

Sa voix est aussi forte qu'un cri dans la pièce emplie de ténèbres et de silence que Tom suppose être un dortoir partagé par quatre autres Gryffondors, vu le nombre de lits. Le feu flamboie un instant avant de redescendre.

Ce qui ne fait que confirmer la chose, pour Tom. La magie de Harry résonne avec la sienne, son souffle devient plus rapide et court. Le torrent de sensation s'est interrompu à l'instant où Harry a retiré sa main, mais il s'en souvient. C'est la première sensation physique qu'il a ressentie depuis son entrée dans le journal.

- Ce n'est pas moi, affirme Tom aussi calmement qu'il le peut. C'est nous lorsqu'on se touche. As-tu déjà touché un autre Horcruxe auparavant ?

- Non, répond Harry en levant la tête, les yeux brillant pour une fois de révolte face à son destin. Mais j'ai touché le journal, et je n'ai ressenti de tel.

- Le journal n'est qu'une enveloppe extérieure pour mon essence, pas l'essence en elle-même, explique brièvement Tom.

Il a la bouche sèche d'excitation, et il peut sentir ça, aussi. Il peut sentir la chaleur du feu. Il peut tout sentir comme s'il s'était échappé du journal, comme s'il avait déjà récupéré un corps.

Merlin. Il ne peut pas tuer Harry, et il ne peut pas laisser son lui plus vieux le tuer. Et s'il ne sentait plus jamais ça ?

Il se lève et s'avance d'un pas vers Harry. Lequel le regarde simplement d'un air suspicieux. Il ne cède pas un centimètre lorsque Tom s'assied sur le lit, et Tom s'en réjouit lorsqu'il reprend la main du Gryffondor.

Harry halète et ferme les yeux. Une rougeur s'étale lentement sur ses joues. Tom baisse sa tête et attire Harry près de lui, enroulant un bras autour de lui. Son corps est maintenant comme une bougie de plaisir et de joie et d'acceptation.

C'était quand, la dernière fois où j'ai été aussi heureux ?

- Ça ne se produit que parce que nous sommes tous les deux diaboliques, marmonne Harry presque inaudiblement, lorsque Tom se décide à lui prêter de nouveau attention. Le Horcruxe repousse la plupart des gens normaux et leur fait ressentir de la haine envers moi. Donc, c'est logique que ce soit agréable avec un autre Horcruxe, une autre chose qui peut...

Tom ricane, l'interrompant. Il enlace Harry plus étroitement, l'attire sur ses genoux, et chuchote dans son oreille, se réjouissant même du frôlement d'air sur le pavillon du garçon :

- Harry, pourquoi es-tu toujours en vie ? Quelle justification t'a donné Dumbledore ?

- Tu devrais l'appeler Professeur Dumbledore, élude le Gryffondor en luttant pour garder les yeux ouverts.

- Je le ferai si ça fait plaisir, accepte Tom avec complaisance en glissant sa main dans les cheveux de Harry.

Il grogne alors que la chevelure effleure ses doigts, alors qu'il sent l'existence plate, ordinaire, bénie du scalp du garçon sous ses doigts, alors que la joie se rapproche doucement de quelque chose qui ressemble plus à du bonheur.

- Qu'est-ce que le Professeur Dumbledore a dit quand tu lui as demandé ?

Harry le regarde, bouche bée. Tom frissonne et se repose sur les oreillers que le Gryffondor occupait au début. Harry, par la force des choses, suit le mouvement, jusqu'à ce qu'ils soient allongés face à face, leurs lèvres à peine séparées par l'épaisseur d'une plume.

- Dis-moi, demande Tom. S'il te plaît.

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Harry ne comprend pas. Il ne croit pas que quelqu'un l'ait touché comme ça depuis ses parents, et il ne peut pas vraiment se souvenir d'eux. C'est plus agréable que les câlins de Hermione, plus agréable que Ron lui tapant dans le dos après un match de Quidditch, plus agréable que voler.

Il n'aurait jamais pensé dire ça.

Il frissonne et parvient à reprendre un peu le contrôle de lui-même.

- Il dit... Il m'emmène dans toute la Grande-Bretagne, tu sais, pour que je puisse voir le monde sorcier et les gens que je vais sauver en mourant. Il m'a présenté aux gobelins et aux centaures, et il a dit... que Voldemort allait tous les tuer.

Il veut ne pas continuer à haleter comme ça, mais la main de Tom monte et descend paresseusement sur sa poitrine, laissant comme des traînée de feu dans son sillage.

- Je rencontre les gens et leurs enfants, poursuit le Gryffondor. Je vais au Chemin de Traverse. Je vis à Poudlard depuis sept ans. Je sais... j'adore cet endroit. C'est ma maison.

- Pareil.

La voix de Tom est si douce que Harry sursaute. Dumbledore ne lui a jamais dit que Voldemort pensait à Poudlard comme à sa maison. Comme Harry.

Il écarte cette idée, cependant, parce que ce n'est pas Voldemort. Tom est différent.

- Et il ne veut pas essayer de me tuer et toi et les autres, continue-t-il, jusqu'à ce qu'il trouve un moyen de les détruire tous en même temps. Il pense que peut-être que le Voldemort-toi le sentirait s'il commençait à nous tuer trop tôt.

- Il n'y a pas grand-chose qui peut faire du mal à un Horcruxe, en effet.

Tom se tait et serre Harry contre lui, contre sa poitrine. Harry ne résiste pas. Il ne sait pas quoi faire, pas quoi dire. Ce qu'il a dit à Tom est vrai, que se toucher n'est agréable que parce que c'est l'inverse de ce que les gens ressentent normalement en présence d'un Horcruxe.

- Et dis-moi, le relance Tom après suffisamment de temps pour que Harry ait perdu le compte, veux-tu mourir ?

- Je sais que je suis obligé.

- Ce n'est pas ce que j'ai demandé. Veux-tu mourir ?

- La part de moi qui ne veut pas n'a aucune importance. Parce que cette partie, c'est le Horcruxe, et tant qu'il est en vie, l'assassin de mes parents est en vie.

- Toujours pas ce que j'ai demandé, murmure Tom en retirant ses bras, retirant suffisamment de cette délicieuse chaleur pour que Harry ouvre la bouche de regret.

Puis il referme la bouche. Comment peut-il regretter quelque chose qu'il a depuis... quoi ? Une heure tout au plus ? Tom lui lève le menton, les doigts fermement placé sur le pouls de sa carotide, et lui sourit :

- Veux-tu mourir ?

Harry ouvre la bouche, et Tom continue, la voix douce comme de la soie, comme Dumbledore lui avait dit que la voix de Voldemort le ferait :

- Il y a forcément une part de toi qui n'est pas juste le Horcruxe. Autrement, pourquoi est-ce que le Professeur Dumbledore s'embarrasserait à discuter de ses plans avec toi ? Pourquoi t'emmènerait-il rendre visite à des gens en présumant que tu te soucierais d'eux ? Trouve cette part de toi. Veux-tu mourir ?

Harry frissonne. Des cauchemars prennent vie dans sa tête, des cauchemars qu'il fait depuis des années.

De mourir et ne pas rencontrer ses parents. De dériver dans les ténèbres pour toujours. De découvrir que tout ça était pour rien. De se réveiller et découvrir qu'il est toujours chez les Dursley, et qu'être un sorcier et un Horcruxe et quelqu'un de formidable qui meurt pour vaincre le mal était un rêve.

- Je ne pense pas que tu le veuilles, constate Tom dans un souffle en le regardant droit dans les yeux.

- Mais quel bien ça me fait de vouloir vivre ? explose Harry après avoir détourné les yeux, faisant sortir les mots qu'il avait combattu dans ses rêves et ses désirs tant de fois. Je ne peux pas. Parce que Voldemort reste en vie. Et je ne veux pas qu'il vive, lui.

- Et si tu te souciais moins de la possibilité qu'il vive et davantage de la possibilité que toi tu vives ?

- Mais c'est égoïste. Le Professeur Dumbledore a dit...

- Est-ce que c'est égoïste pour les enfants et les familles qu'il t'a montrés de vouloir vivre ? De vouloir sentir le soleil sur ton visage et goûter un chocolat chaud sur ta langue ? Pourquoi t'a-t-il présenté toutes ces familles et tous ces enfants, si c'est si égoïste de vouloir vivre ?

Harry porte la main à son front, à sa cicatrice. Il a besoin de sentir la source de sa différence avec les autres gens et de se concentrer sur la magie diabolique. S'il ne le fait pas, il ne sait pas, il ne sait pas ce qu'il...

Mais Tom attrape ses doigts et les embrasse. Harry le fixe juste, bouche bée. C'est tellement à des lieues de ce qu'il penserait qui lui arriverait.

- Nous sommes différents, oui, convient Tom avec une sombre intensité en attirant le garçon plus près. Nous sommes des Horcruxes, oui. C'est différent. Mais ce n'est pas une raison pour que nous mourions juste parce que le Professeur Dumbledore l'a décrété. Ou parce que Voldemort l'a décrété. Son plan pour moi était que je reste dans un livre pour le reste de ma vie. Un livre, frissonne-t-il et sa voix devient plus grave. Ça aurait facilement pu me rendre fou. Je n'ai aucune importance pour lui, sauf en tant que moyen de prolonger sa vie. Si je retrouve un corps, comme j'essaye de le faire, il me traquera, s'opposera à moi, me tuera s'il le peut. Pourquoi devrions-nous rester sous le contrôle de l'un ou de l'autre ? Pourquoi ne pourrions-nous pas partir et les laisser se détruire mutuellement si c'est ce qu'ils veulent ?

Harry n'a jamais entendu d'argument aussi convaincant. Peut-être qu'il n'est convaincant que parce que c'est un autre Horcruxe qui le présente, peut-être parce qu'il est lui-même diabolique, peut-être parce qu'il a plus de rancœur contre Dumbledore qu'il ne le pensait. Cependant, il secoue la tête et essaye de garder les pieds sur terre.

- Mais Voldemort veut régner sur le monde. Comment est-ce que je sais que tu ne feras pas ça si...

- Lui veut régner sur le monde, l'interrompt Tom. Veux-tu savoir pourquoi il m'a fait ?

- Pour échapper à la mort.

- Dans la mesure où je suis lui, mon désir est de vivre. De survivre. J'ai fait ouvrir la Chambre des Secrets à Ginny, oui. Mais ce qui m'importe le plus, c'est de vivre. Si le Professeur Dumbledore a trouvé un moyen de détruire les Horcruxes, alors je dois y échapper. J'irai aussi loin que je le peux, une fois que j'aurai un corps, et vivre comme ça.

Harry inspire brusquement. Alors c'était bien Ginny. Il s'était posé la question. Parfois, la façon dont elle le regardait fixement était perturbant, pas du tout la façon dont quiconque devrait regarder un Horcruxe.

- Mais tu pourrais y aller tout seul. Tu n'as pas besoin de moi.

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Ça marche. Oh, mon Dieu, ça marche.

Tom agrippe Harry si fort que c'est comme si leurs magies fusionnaient, se glissaient l'une dans l'autre, comme des pages se superposant. Tom ferme les yeux et parle aussi honnêtement qu'il le peut, de la même honnêteté qui lui a fait livrer le nom de Ginny à l'instant.

- Je pense que nous devrions partir ensemble. Je n'ai jamais touché quelqu'un d'autre comme ça et ressenti ça, tu sais. Je ne savais pas que je savais comment être heureux jusqu'à aujourd'hui. Et je pourrais l'oublier si tu ne viens pas avec moi. Tu veux être bon ? Tu veux changer le monde ? Viens avec moi. Rappelle-moi ce qu'est le bonheur.

- Le Professeur Dumbledore a dit que Voldemort n'était jamais heureux.

- Peut-être qu'il ne l'est pas. Je ne sais pas, avoue Tom en forçant leurs regards à se rencontrer. Je suis heureux, là, maintenant.

C'est le parfait appât, parfait parce qu'est parfaitement et complètement vrai. Tom sait qu'il n'aura jamais ça avec quelqu'un d'autre. Même s'il trouve un autre Horcruxe, il n'y a aucune garantie qu'il lui parlerait. Ou le ferait se sentir comme Harry le fait. Tous les autres seraient probablement des morceaux d'un Voldemort plus vieux, celui qui veut régner sur le monde et a oublié ce que la survie veut dire.

- Et je suis... je peux te faire te sentir comme ça ? articule le Gryffondor.

Tom caresse la joue de Harry du dos de la main, et écoute leurs halètements jumeaux.

- Exactement. Tu es le seul qui peut me rappeler ce que c'est. Tu peux empêcher un autre Voldemort de parcourir le monde.

- Ça ne change rien à propos de celui qui a tué mes parents.

Tom sourit seulement et penche la tête.

- Dumbledore a compris plein de choses, n'est-ce pas ? Il peut trouver un moyen de vaincre mon moi plus vieux. S'il est un spectre en ce moment, ça devrait être plus facile que jamais de le piéger. Peut-être même que c'était ce qu'il essayait de faire l'an dernier avec la Pierre Philosophale, concède-t-il généreusement, parce qu'il peut se permettre la générosité, avec Harry qui est en train de fondre dans ses bras. Mais nous ne sommes pas obligés d'en faire partie.

Le Gryffondor tremble, les yeux fermement clos.

- J'ai toujours pensé que j'allais mourir, avoue-t-il.

C'est le moment pour Tom de battre en retraite. Il a planté la graine. Maintenant, il ne peut qu'espérer qu'elle fleurisse. Chastement, il embrasse la joue du plus jeune, bien que la flamme de plaisir, aussi forte qu'un Cruciatus mais dans le sens opposé, fait qu'il n'est pas véritablement chaste.

- Je sais. Penses-y. Habitue-toi à, peut-être, vivre.

Il se retire du rêve, se fond de nouveau dans le journal, et ajoute :

- Mais souviens-toi toujours que c'est ton choix. Je ne suis toujours qu'un livre.

C'est une agonie de retourner dans le livre, de se souvenir de ce qui lui manquait. Mais au moins, il peut invoquer le souvenir et le jouer devant lui, sans s'épuiser en le faisant, parce qu'il a puisé la magie d'un autre Horcruxe.

Lorsqu'il a terminé, il s'allonge sur un lit qu'il a conjuré et ferme les yeux.

Il a été fait pour survivre. Mais il avait oublié ce qu'était vraiment la vie.

Même si Harry, d'une façon ou d'une autre, surmonte la tentation et décide de mourir et de donner le journal à Dumbledore, Tom se cramponnera au souvenir de la vie alors qu'il ira vers sa mort.