Bonjour, voici le deuxième chapitre de cette histoire, centré cette fois-ci sur Izaya. J'espère qu'il vous plaira ! Je vous souhaite une bonne lecture...
2. Izaya Orihara
« Ha ha, ne vous en faites pas. Je sais ce que je fais. »
D'une voix mielleuse, Izaya regarda son client avec un léger sourire. Ce dernier semblait terriblement nerveux. En même temps, il tenait un discours confus, ce qui faisait croire à Izaya que son histoire n'était pas très nette. Il prétendait vouloir retrouver sa soeur perdue, mais il s'embrouillait à la moindre question que le brun lui posait. L'informateur était donc sûr qu'il ne cherchait pas du tout sa soeur. Il ressemblait plus à un stalker qu'autre chose. Ça amusait beaucoup Izaya d'ailleurs. De toute façon, ce n'était pas son problème ce que les clients faisaient des informations qu'il leur donnait. A vrai dire, il adorait même quand ils lui mentaient. C'était plus drôle comme ça.
« B...Bien, je vous fais confiance.
— Vous pouvez.
— Mer...Merci. Quand... est-ce que je peux espérer a...avoir vos résultats... ?
— D'ici un jour ou deux, répondit Izaya. Je vous tiendrai au courant.
— Très bien. J'a...J'attends votre coup de fil do...donc. »
Izaya acquiesça. L'homme finit par se lever et partit d'une démarche gauche. Non, c'était sûr, toute cette nervosité démontrait bien qu'il ne recherchait pas sa soeur. Ou alors, ce n'était clairement pas pour de tendres retrouvailles. Izaya avait hâte de voir la suite. Il se demandait jusqu'où l'homme serait capable d'aller une fois qu'il aurait obtenu les informations voulues. Aurait-il les tripes nécessaires pour faire du mal à quelqu'un d'autre ? Izaya n'en était pas sûr. Mais, dans tous les cas, il espérait que le résultat serait divertissant. Parce qu'il en avait bien besoin.
Avec des gestes maîtrisés, il fit tourner son fauteuil roulant pour s'éloigner de son bureau. Avec le temps, il arrivait à se déplacer sans trop de peine avec. Ce n'était pas aussi compliqué qu'il ne l'avait cru au départ. Il devait juste faire attention à plus de détails qu'auparavant... Mais il avait su s'adapter. Il n'eut donc aucun mal à manoeuvrer son fauteuil pour faire face à la grande baie vitrée.
La journée touchait à sa fin. Le ciel s'assombrissait déjà. Yokohama était un bel endroit pour vivre, même si ce n'était pas Tokyo... Izaya frémit légèrement en repensant à son ancienne ville. Il était content de ne plus habiter à Shinjuku. Son ancien appartement ne lui manquait pas du tout. De toute façon, il n'était pas sûr que son fauteuil roulant aurait pu entrer dans l'ascenseur. Non, il avait voulu repartir à zéro ici. Il avait acheté cette petite maison, il y avait seulement un mois. Elle lui avait plu directement, avec ses grandes baies vitrées qui illuminaient tout le salon. L'avantage, également, c'était qu'il avait pu entièrement s'installer au rez-de-chaussée, il n'avait jamais besoin de monter. L'étage n'en était pas pour autant inoccupé. En effet, Kine y avait posé ses affaires.
Kine. Le seul lien qu'Izaya gardait encore avec son passé. La seule personne, également, à s'être réellement soucié du brun. Quand Kine l'avait amené à l'hôpital, il était resté tout le temps qu'avaient duré les différentes opérations. Et lorsqu'Izaya s'était réveillé, à moitié sonné par la morphine, il était là également. Il l'avait ensuite suivi dans tous ses déplacements, l'aidant quand il ne pouvait pas encore utiliser ses bras.
Les deux bras cassés et les jambes bloquées par le coup qu'il avait reçu à la colonne vertébrale... Jamais Izaya n'avait eu aussi dur de toute sa vie. Cette immobilité contrainte l'avait rendu fou. Il avait alors forcé sur ses bras pour les obliger à guérir plus vite. Aujourd'hui, il le payait puisque ses bras ne s'étaient pas remis tout à fait correctement. Il lui arrivait d'avoir encore quelques tremblements dans ses mains après la fin de la journée. Mais ça n'avait pas vraiment d'importance pour Izaya. Tout ce qui comptait, c'était qu'il puisse les utiliser pour ne pas se sentir prisonnier de son propre corps.
Etre pratiquement paralysé avait été difficile à accepter, d'autant plus qu'Izaya n'avait jamais pu avoir l'esprit tranquille. Il savait que beaucoup de gens lui en voulaient et pourraient, donc, profiter de sa vulnérabilité pour lui faire du mal. C'était pour ça, qu'au cours de ces deux dernières années, il avait changé régulièrement d'endroit, louant chambre d'hôtel sur chambre d'hôtel. Il aurait pu continuer longtemps comme ça, mais il avait senti qu'il avait besoin de se poser un peu. Après tout ce temps, il espérait également que plus personne ne le cherchait. Malgré tout, il n'était jamais totalement tranquille. Il craignait surtout qu'une personne en particulier ne vienne le retrouver pour finir le travail...
Mais en dehors de ses préoccupations, il se sentait bien ici. Il avait déjà commencé à se faire une nouvelle clientèle. Il n'avait d'ailleurs pas changé ses habitudes, foutant toujours un peu la merde partout autour de lui. C'était presque plus fort que lui. Il aimait manipuler les gens et observer leur réaction. Ce n'était pas quelque chose qui finirait par partir un jour, ça. De toute façon, il ne tenait pas spécialement à ce que ça change. Il appréciait sa vie actuelle. Et ce qui s'était passé à Ikebukuro n'avait pas été vain. Izaya avait appris de ses erreurs. Il était toujours resté trop loin de ses humains, pour se protéger. Mais, il comprenait à présent qu'il avait eu tort. Il savait maintenant qu'il devait plus s'investir, plus prendre de risques. Il était donc prêt à aimer ses humains de bien plus près désormais...
Des pas se firent alors entendre dans les escaliers, interrompant le fil de ses pensées. Il ne se retourna cependant pas, sachant pertinemment qu'il s'agissait de Kine.
« Ton client stupide est enfin parti ? demande-t-il sur un ton posé.
— Oui.
— Tu sais qu'il n'est pas net, n'est-ce pas ? A ta place, je me méfierais.
— Ne t'en fais pas, je maitrise la situation.
— Bien. Au fait, demain, je pense que tu n'as encore rien de prévu dans la matinée, n'est-ce pas ?
— Exact. Pourquoi ?
— J'ai pris rendez-vous chez un médecin. On ira tous les deux.
— Quoi ? siffla presque Izaya tout en plissant les yeux.
— Tu m'as toujours dit que ça ne servait à rien de te soigner puisque l'on bougeait sans cesse, mais ce n'est plus le cas maintenant. A présent que l'on a cette maison, tu pourrais en profiter pour faire ta rééducation.
— Ça ne sert à rien. J'ai la colonne vertébrale abîmée. Je ne peux plus marcher. Ce n'est pas dramatique, je l'ai accepté.
— Ne raconte pas n'importe quoi, soupira Kine. Dois-je te rappeler que j'étais là quand le médecin t'a annoncé les conséquences de tes blessures ? Il a dit que tu avais eu de la chance et que, normalement, avec de la rééducation, tu pourrais remarcher.
— Les médecins se trompent tout le temps. Je ne vois pas l'intérêt d'espérer quoi que ce soit.
— Peu importe ce que tu diras, tu iras au rendez-vous. Et ce n'est pas négociable. »
Izaya fixa Kine un moment, avant de forcer un sourire désagréable sur son visage. C'était pareil à chaque fois qu'ils bougeaient d'endroit. Kine insistait toujours pour qu'il aille voir un médecin. Izaya savait qu'il pouvait être franchement désagréable avec le temps, alors il décida de ne pas trop discuter là-dessus. D'autant plus qu'il commençait à fatiguer et qu'il savait pertinemment que Kine ne changerait pas d'avis.
« Bien, comme tu veux. » finit-il par lâcher.
Si ça permettait à Izaya d'avoir enfin la paix avec cette histoire de rééducation, pourquoi pas ? Il ne comprenait même pas pourquoi Kine insistait à ce point. Ce dernier devrait n'en avoir rien à faire. Tout comme il aurait dû partir depuis longtemps maintenant. Izaya n'était pas sûr de savoir pourquoi il était encore là. Peut-être que Kine s'inquiétait pour lui. Ou pire, il avait pitié de sa nouvelle situation. Sans doute que c'était pour ça qu'il insistait pour qu'il fasse de la rééducation, pour qu'il puisse partir l'esprit tranquille.
Pourtant, Izaya ne se plaignait jamais de son infirmité. C'est vrai que c'était moins pratique pour certaines choses, mais il s'y était habitué. Après tout, il n'y avait pas que lui sur terre qui était handicapé. Si les autres savaient s'en sortir, pourquoi pas lui ?
Se détournant de Kine, il fit alors rouler son fauteuil jusqu'à sa chambre. Il n'avait pas faim et il n'avait pas envie de supporter l'autre homme encore longtemps. Demain serait juste une mauvaise journée à passer. Il avait connu pire. Avec des petits gestes bien précis, il passa de son fauteuil à son lit. Ce n'était jamais une opération facile, bien que ce fût plus difficile encore dans l'autre sens.
Enfin couché sur le matelas, il gémit légèrement d'inconfort. Ses jambes lui faisaient mal. En toute franchise, il aurait sans doute préféré être totalement paralysé du bas et ne plus du tout pouvoir bouger, mais ce n'était pas le cas. Il arrivait encore à déplacer un peu ses jambes, il pouvait même tenir debout, mais pas longtemps. La douleur devenait vite trop forte. La douleur... Elle faisait partie de son quotidien à présent. Il sentait que son corps tout entier était fatigué, usé. Il avait du mal à se remettre de ses blessures. Pourtant, ça faisait déjà deux ans...
Izaya frissonna, tout en repoussant les souvenirs désagréables qui lui revenaient à l'esprit. Ne pas y penser, ne pas y penser... Rabattant sa couverture sur lui, il ferma les yeux, tout en essayant de se vider complètement la tête. Il avait besoin de repos. C'était tout... juste un peu de repos...
Le lendemain, ce fut donc de mauvaise grâce qu'il suivit Kine jusqu'au cabinet médical. Au plus ils approchaient, au plus Izaya se sentait nerveux. Il avait bien essayé de se défiler, inventant une quelconque excuse, mais Kine avait vu clair dans son jeu. L'informateur ne voulait pas y aller, il se sentait stupide d'avoir cédé aussi facilement la veille ! Il ne tenait pas à faire face à la gravité de son état. Il voulait juste continuer, comme si de rien n'était. Pourquoi Kine refusait-il de comprendre ça ? Il ne se sentait pas prêt à voir un médecin, à parler de ses blessures...
Pourtant, bien malgré lui, il se retrouva, une demi-heure plus tard, face au docteur qui allait s'occupait de son cas. Ce dernier avait un peu d'embonpoint. Izaya trouva ça tout de suite suspect. Un médecin sérieux se devait d'avoir une santé irréprochable.
« Bon, j'ai bien lu le dossier médical que vous m'avez envoyé... »
Izaya envoya un regard de reproche à Kine.
« ... et je dois avouer que je suis un peu surpris. Toutes les données remontent à deux ans, quand vous vous êtes fait hospitaliser juste après votre accident. Vous n'avez pas vu un spécialiste entre-temps ?
— Non, répondit Izaya sans même chercher à mentir.
— Pourquoi donc ?
— J'étais trop occupé. »
Le médecin lui lança un long regard, clairement sceptique. Mais Izaya s'en moquait. Il voulait juste que ça se finisse au plus vite.
« Je vois... Bon, d'après vos anciennes radios, ce n'est pas sans espoir. Je vais regarder ça de plus près. »
Il quitta la chaise de son bureau et s'approcha de lui. Il lui demanda alors s'il pouvait se lever. De mauvaise grâce, Izaya acquiesça. Il dut mettre tout son poids sur ses bras, ce qui fut assez douloureux, pour se mettre debout. Ses jambes avaient du mal à le supporter. Elles se mirent aussitôt à trembler. Le médecin lui demanda alors de faire quelques pas, mais à peine Izaya eut-il avancé son pied droit qu'il sentit une douleur fulgurante lui transpercer la colonne vertébrale. Il se rassit aussitôt, incapable de rester debout plus longtemps.
Le médecin ne dit rien. Il se contenta d'examiner ensuite sa colonne et ses jambes. Au bout d'un moment – qui sembla interminable aux yeux d'Izaya – il retourna s'asseoir derrière son bureau.
« Comment vous vous êtes fait ça au juste ? demanda-t-il alors.
— En quoi est-ce important ?
— Répondez, s'il vous plaît. »
Izaya se retint de se tourner vers Kine, il ne voulait pas paraitre suspect. Mais tout son corps était devenu froid alors que des images s'imposèrent à lui. Il se força à prendre sur lui le plus possible. Hors de question de montrer une quelconque faiblesse.
« J'ai eu un grave accident de voiture.
— Vous étiez responsable ?
— ... Oui. »
Le médecin acquiesça alors qu'Izaya se rendit compte qu'il peinait à respirer correctement.
« Ecoutez, je vais être franc avec vous. Vos blessures se sont bien remises. Avec des séances de rééducation, vous pouvez espérer remarcher presque normalement. Par contre, je ne suis pas sûr que vous arriviez un jour à recourir ou à sauter. Votre colonne vertébrale a subi de sérieux dégâts, mais ça aurait pu être bien pire. »
Izaya resta silencieux. La même réponse que tous les autres que Kine l'avait forcé à voir. La rééducation, ils n'avaient tous que ce mot-là à la bouche. Mais que faisaient-ils de la douleur ? Elle était bien trop forte que pour être ignorée !
« Et en ce qui concerne les fortes douleurs qu'il ressent ? demanda alors Kine, comme s'il lisait dans ses pensées. Izaya pense que ça l'empêche de faire les exercices de rééducation. »
Ce dernier tiqua. Non, il ne le pensait pas, il le savait ! Ça se voyait que ce n'était pas Kine qui souffrait à chaque fois qu'il bougeait ne fût-ce qu'un peu les jambes !
« Je pense que les douleurs sont psychosomatiques. C'est pourquoi, en plus d'un spécialiste, je vais vous donner l'adresse d'un psychiatre. Ce sont des choses qui arrivent fréquemment. »
Psychosomatique ?! Izaya dut faire un grand effort pour ne montrer aucune émotion. C'était n'importe quoi. Ses douleurs n'étaient pas du tout de l'ordre du psychologique, elles étaient bien réelles ! Il le sentait dans son corps ! Il n'imaginait rien du tout !
« Vous pensez que ça fera l'affaire ? questionna Kine.
— Oui bien sûr, c'est...
— Vous pourriez arrêter de parler de moi comme si je n'étais pas là ? coupa soudainement Izaya. Ecoutez, je sais très bien ce que je ressens, d'accord ? Je n'ai aucun problème mental. Ces douleurs sont physiques !
— Elles sont physiques, oui, reprit le médecin sur un ton très calme. Mais elles sont contrôlées par votre cerveau. Vous avez eu un grave accident dont vous êtes responsable. Il est tout à fait possible que vous ayez développé un traumatisme qui cause vos douleurs. Je pense qu'il est important pour vous de travailler là-dessus. »
Un traumatisme ? Il en avait d'autres des comme ça ? Il n'était absolument pas traumatisé ! Tout ceci était franchement ridicule. Agacé, il écouta à peine la suite de la conversation. Et lorsqu'ils repartirent enfin, Izaya était clairement de mauvaise humeur. Tout ça n'avait servi à rien. Pire, maintenant, il avait mal partout. Ses jambes bien sûr, mais ses bras aussi le faisaient souffrir. Kine sembla le remarquer puisqu'il décida de pousser son fauteuil, sans rien lui demander. Le trajet du retour se fit dans un silence glacial. Mais, une fois à la maison, Kine se posa devant lui, sans lui donner une occasion de s'éloigner.
« Il m'a donné deux adresses, je veux qu'on les appelle dès aujourd'hui. Il est plus que temps que tu te soignes enfin.
— Non. J'ai bien voulu te suivre aujourd'hui, mais ça s'arrête là. Ce médecin n'y connait rien. Je ne veux pas faire de rééducation et encore moins aller voir un psychiatre. Il n'a rien compris du tout.
— Moi, je pense qu'au contraire, il a tout compris.
— Laisse-moi. A cause de tes conneries, je suis crevé maintenant. Je vais devoir me reposer, avant de pouvoir reprendre le boulot.
— Donc, tu estimes que tu n'as aucun problème avec ce qui t'est arrivé ?
— Evidemment.
— Donc, ça ne te pose pas de souci que l'on en parle, n'est-ce pas ? Ou encore que l'on mentionne Shizuo Heiwajima ?
— T... Tais-toi... »
Izaya se sentit trembler en entendant ce nom. Il refusait d'avoir ce genre de conversation. Kine, lui, ne dit rien, se contentant de le regarder fixement. Izaya décida alors de s'éloigner et retourna dans sa chambre. Tout son corps le faisait atrocement souffrir. Une fois qu'il fut couché, il respira profondément, essayant de vider son esprit, mais rien à faire. Les mots de Kine résonnaient encore et encore dans sa tête. Il frissonna. Shizuo... Shizu-chan... Rien que de penser à lui, ça le mettait dans un état déplorable...
Dire qu'il s'était longtemps vanté d'être le seul à n'avoir jamais eu peur de lui... Il ne pouvait plus en dire autant à présent. Bien sûr, Izaya savait qu'il avait joué avec le feu en poussant Shizuo sans cesse à bout, mais jamais il ne se serait attendu à un tel retour de flamme. Tout s'était embrouillé dans sa tête ce soir-là. Il haïssait tellement l'ancien barman qu'il se devait de faire quelque chose. Il avait décidé que leur lutte avait assez duré. Il voulait y mettre fin. Et pour ça, seules deux possibilités s'offraient à lui: soit il tuait Shizuo, soit c'était ce dernier qui mettait fin à sa vie en montrant clairement à tout le monde qu'il n'était qu'une bête. Dans les deux cas, Izaya gagnait. Il avait, bien sûr, d'abord essayé de détruire une bonne fois pour toutes ce monstre répugnant, mais il avait échoué. Il ne restait alors que la dernière solution. Izaya était prêt à mourir ce soir-là. Parce qu'une fois mort, tout le monde verrait à quel point Shizuo était un monstre. Qui pourrait continuer à le voir comme un humain après ça ? Qui pourrait continuer à le côtoyer, à être ami avec lui après l'avoir vu tuer quelqu'un à main nue ? C'était ce qu'Izaya avait pensé à l'époque en tout cas, mais il s'était trompé.
Il s'était trompé sur ce qui allait arriver, trompé sur Shizuo. Il avait eu tout faux du début à la fin. Il n'était pas mort. Shizuo et lui avaient tous les deux survécu à cette nuit horrible. Et ça, ce n'était clairement pas prévu. Izaya avait perdu. Il le reconnaissait, mais ça n'en rendait pas moins l'humiliation plus facile à supporter. Il n'était pas ce Dieu tout-puissant qui régnait sur la ville. Shizuo l'avait remis brutalement à sa place... Izaya aurait aimé pouvoir lui en vouloir et le détester encore plus après ça, mais il n'y arrivait pas. Parce que bien qu'il ne l'aimât toujours pas, Izaya était forcé de reconnaitre ses torts...
Shizuo n'était pas un monstre, il était un humain. Avec plein de défauts, mais un humain quand même. Il se laissait guider par ses émotions, il était sincère avec lui-même. Mais ce n'était pas la seule chose sur laquelle Izaya avait ouvert les yeux. Parce qu'il y avait tout de même bien un monstre dans l'histoire. Et ce monstre, c'était lui-même. Cette double constatation était trop difficile à gérer pour Izaya. En fait, il n'arrivait tout simplement pas à vivre avec. Parce que reconnaitre qu'il s'était trompé à ce point était bien trop difficile pour lui. Alors, la plupart du temps, il tâchait juste de ne pas y penser.
Ne pas y penser. C'était devenu son leitmotiv ces derniers temps. C'était lâche, donc ça lui ressemblait bien. Il ne voulait pas faire face à ses responsabilités. Il ne voulait pas penser à Shizuo... Après tout ce qui s'était passé, Izaya se sentait horriblement mal rien que de repenser à l'homme aux cheveux blonds. Une terrible angoisse se logea dans le creux de sa poitrine alors que l'image de Shizu-chan se dessina dans sa tête. Il revoyait parfaitement son visage déformé par la colère, prêt à le tuer. Et s'il apprenait que le brun était toujours en vie ? Izaya n'avait aucun mal à le voir débarquer jusqu'ici pour finir le travail. Les choses étaient allées trop loin entre eux désormais. Shizuo avait sûrement dû fêter sa victoire. Et maintenant... Il était probablement en paix à Ikebukuro. Peut-être même qu'il ne pensait plus du tout à lui. Et c'était sans doute mieux comme ça. Au moins, il ne songerait pas à venir le chercher ici.
Izaya siffla alors d'inconfort, tout en tentant de chercher une meilleure position pour soulager ses jambes. Cette blessure... Il savait qu'il l'avait méritée. C'était sa punition pour avoir perdu contre Shizuo, alors il l'acceptait. Et ce serait une bonne chose si Kine pouvait en faire de même...
Agacé par ses pensées, Izaya finit par tirer l'un de ses ordinateurs portables sur le lit et continua de faire ses recherches pour son client. Se plonger dans le boulot, il ne connaissait rien de mieux pour ne plus réfléchir à son passé. Cela le tint occupé toute la journée. Il ne s'arrêta même pas pour manger. Quand il travaillait autant, il avait l'impression que rien n'avait changé, qu'il était toujours le Izaya d'autrefois, sûr de lui et redoutable. Et cette sensation lui plaisait beaucoup, parce qu'il aimait se prouver qu'il pouvait encore être une menace pour les autres, malgré son état physique.
Le lendemain, il put donc donner toutes les informations à son client par téléphone. Ce dernier sembla plus que ravi.
« M...Merci infiniment ! Je v...vais enfin pouvoir la revoir ! »
Puis, il se mit à rire bizarrement, balbutia des choses incompréhensives, avant de raccrocher. Izaya retint un ricanement. Celui-là n'avait clairement pas toute sa tête...
Les jours passèrent ensuite tranquillement. Kine ne parla plus d'aller voir un psychiatre, mais il insistait encore pour la rééducation. Inlassablement, Izaya trouvait toujours de bonnes excuses pour ne pas le faire. Il était d'ailleurs en train de lui débiter un très beau mensonge à ce sujet, lorsque son regard fut absorbé par une image diffusée à la télévision. C'était une photo de son client. Curieux et délaissant Kine, il augmenta le son.
« ... Un terrible drame qui s'est produit cette après-midi. Pour une raison encore inconnue, il est entré dans la maison de la jeune victime avant d'abuser d'elle sexuellement. Malheureusement, il ne s'est pas arrêté là puisqu'il l'a poignardée à de nombreuses reprises, avant d'appeler les secours. La jeune fille a succombé à ses blessures dans l'ambulance... »
La présentatrice fut coupée dans son élan lorsque Kine éteignit la télévision. Izaya se tourna alors vers lui et croisa son regard glacial.
« Alors, demanda-t-il, ça t'amuse de voir ce que tu as causé ?
— Ce n'est pas moi qui l'ai tué, se défendit Izaya. Je ne l'ai même pas suggéré à ce type.
— Non, mais tu savais pertinemment qu'il n'était pas net et qu'il lui ferait du mal, n'est-ce pas ?
— Peut-être, ricana Izaya. Et alors ? Je ne suis pas responsable de ce que mes clients font avec mes informations. J'avoue que j'étais tout de même curieux. Mais je ne pensais pas qu'il irait jusque-là. Il avait les caractéristiques du harceleur, mais de là à tuer... C'est intéressant...
— Tu t'écoutes parler parfois ? soupira Kine tout en passant une main sur son visage. Quand comprendras-tu, Izaya, qu'on ne joue pas avec la vie des gens comme ça ?
— Je ne joue pas...
— Ah non ? Tu crois que je ne sais pas que tu continues en plus d'aller sur les forums parlant de suicide ? Tu continues tes jeux malsains, t'amusant de la détresse des autres...
— Je ne vois pas ce que ça peut te faire.
— Tu veux que ça se finisse comme à Ikebukuro ? demanda Kine. C'est ça que tu cherches en détruisant tout autour de toi ? »
Izaya resta un moment silencieux, avant de détourner les yeux.
« C'est plus fort que moi, avoua-t-il. J'ai besoin de ça. Mais je sais aussi que ça finira mal. La prochaine fois, je n'aurai sûrement pas autant de chance. Il est probable que je finisse par me faire tuer.
— Et c'est tout ce que ça t'inspire ? Tu n'as pas envie de changer ?
— Les êtres humains sont incapables de changer. Ils pensent tous pouvoir le faire, mais c'est faux. »
Kine secoua la tête, renonçant visiblement à parler avec lui. Izaya n'ajouta rien non plus. Il ne s'attendait pas à ce que Kine comprenne de toute façon. Izaya ne connaissait que cette méthode-là pour communiquer avec les autres. La manipulation était presque innée chez lui. Et mettre le chaos partout où il passait, c'était... c'était réconfortant. Il aimait ça, provoquer la colère des autres, les mettre dans tous leurs états. Et il ne pouvait s'empêcher de continuer à le faire, même après s'être fait clouer dans un fauteuil roulant par sa "victime" préférée.
« Kine... Tu ne devrais pas t'en faire pour moi, tu sais. D'ailleurs, tu ne devrais même pas rester ici. Tu as sûrement mieux à faire ailleurs non ?
— Ha, comme si tu étais capable de t'occuper de toi-même sans faire n'importe quoi. Jamais vu quelqu'un de si auto-destructeur, grommela-t-il.
— Peut-être, mais tu pourrais faire autre chose de ta vie que de me surveiller. Et si tu restes par pitié, je t'assure que ce n'est pas nécessaire. Maintenant que mes bras fonctionnent à nouveau, je peux tout faire tout seul.
— Toi, tu es juste en train d'essayer de te débarrasser de moi. Mais ça ne marchera pas. Je peux continuer mes affaires de détective privé sans que ta présence me dérange. Et je n'ai pas besoin d'autres choses. »
Izaya se contenta de sourire, l'air indifférent, mais intérieurement, il n'en menait pas aussi large. A vrai dire, il était partagé entre deux sentiments. D'un côté, il aurait aimé que Kine s'en aille – au moins, il aurait enfin la paix en ce qui concerne ses traitements – mais, d'un autre côté, il était bien content de ne pas être seul. Et si Kine n'était pas là, Izaya n'était pas sûr de ce qu'il ferait. Il serait encore capable de manipuler n'importe qui pour avoir un peu de compagnie.
« En parlant de mes affaires de détective privé, reprit le plus âgé, j'ai eu des nouvelles de Shiki. »
En entendant ce nom, Izaya se tendit quelque peu. Il n'avait pas peur du Yakuza, mais tout ce qui lui rappelait Ikebukuro le mettait facilement sur les nerfs.
« Et ? demanda l'informateur.
— Il semblait vouloir que je reprenne du service. »
Kine rigola doucement. Cela faisait des années qu'il avait quitté le groupe. Il était toujours resté ferme sur ses positions, pourtant ça ne les empêchait pas de lui demander régulièrement de revenir.
« Mais cette fois-ci, reprit-il, je pense que ce n'était qu'une excuse. Il m'a également demandé si je savais où tu étais. »
Le coeur d'Izaya s'emballa immédiatement. Paniqué, il lui fallut quelques secondes pour arriver à contrôler sa voix.
« ... Qu'est-ce que tu lui as répondu ?
— Que je ne savais pas où tu étais. Que je ne t'avais plus vu depuis que je t'avais emmené à l'hôpital.
— Je vois, murmura Izaya. Mais pourquoi voulait-il savoir ça ? Et pourquoi maintenant ?
— Je ne sais pas. Sans doute s'attendait-il à ce que tu reviennes de toi-même. Et puis, il lui a sûrement fallu un moment pour trouver mon nouveau numéro. En tout cas, il m'a dit qu'Ikebukuro était bien plus calme maintenant.
— Je ne veux pas le savoir, répondit aussitôt l'informateur.
— Vraiment ? Ça ne t'intéresse pas non plus d'apprendre que Shizuo se fait beaucoup moins remarquer qu'avant ? Il parait qu'il maitrise très bien ses crises de colère à présent.
— Je... Je m'en fiche... »
La gorge sèche, Izaya éloigna son fauteuil et alla retrouver sa place préférée: juste devant la grande baie vitrée. Il observait le jardin, calme et paisible. Il aurait préféré n'avoir jamais entendu les phrases que venait de prononcer Kine. Shiki qui le cherchait... Et s'il venait à le retrouver ? Non... Non, ça ne pouvait pas arriver... Si l'on apprenait qu'il était encore en vie... Les battements de son coeur ne cessaient de s'accélérer. Mais si Shizuo se maitrisait réellement mieux, peut-être qu'il s'en ficherait qu'Izaya soit encore en vie... Peut-être...
Izaya ne supportait pas cette angoisse qui montait en lui. Mais ce n'était, pourtant, pas le seul sentiment qui l'accablait en ce moment même. Visiblement, Shizuo allait bien. Bien sûr, c'était prévisible. Sans la nuisance que représentait Izaya, il devait vivre la vie qu'il avait toujours souhaitée. Cependant, Izaya ne pouvait s'empêcher de se sentir mal à cette pensée. Même s'il n'aimait pas le blond, il avait toujours reconnu qu'il occupait une place importante dans sa vie. Mais Shizuo, lui, l'avait jeté loin de lui, sans aucune peine. Et maintenant, il avait une existence paisible où il ne devait même plus penser à lui. Si facilement oublié... Izaya en serra presque les poings de rage. Shizuo avait eu le beau rôle et il s'en sortait bien ! Il avait tout le loisir de repartir de l'avant ! Izaya, lui, était coincé dans cette foutue chaise ! Jamais il ne pourrait oublier Shizuo. Les douleurs qu'il ressentait quotidiennement étaient là pour lui rappeler le blond en permanence.
Izaya le détestait pour ça. Et même s'il avait reconnu ses torts et l'humanité du blond, il ne pouvait l'aimer comme les autres humains, même s'il essayait. Parce que c'était bien trop douloureux. Shizuo l'avait brisé et il ne s'en souciait même pas... C'était la triste vérité. Izaya avait sûrement été le seul des deux à prendre leur rivalité autant à coeur. Il avait aimé entretenir cette haine qu'ils partageaient. Mais Shizuo, lui, n'en avait rien eu à faire de tout ça. Tout ce qu'il avait toujours voulu, c'était qu'Izaya disparaisse purement et simplement. Et maintenant que c'était chose faite, Shizuo l'avait sûrement retiré de son cerveau. C'était une bonne chose en soi, puisqu'au moins, Shizuo ne le cherchait pas mais... mais cette pensée fit tout de même du mal à Izaya. C'était bien pour ça qu'il essayait le plus possible de ne pas réfléchir à tout ça, cependant Kine semblait prendre un malin plaisir à lui rappeler en permanence le blond, comme pour confirmer les dires du médecin.
Ils avaient tous les deux torts pourtant. Izaya avait peut-être peur de Shizuo maintenant, mais il n'en était pas pour autant traumatisé. Il... Il n'était pas si faible que ça... C'était lui qui avait cherché le combat... Il avait prévu que Shizuo s'en prenne à lui ce soir-là, alors... il ne pouvait pas... être traumatisé de ce qui s'était passé ensuite...
Soupirant, il baissa les yeux et remarqua que ses mains tremblaient. Se persuadant que ce n'était dû qu'à la fatigue, il essaya de se ressaisir. Il ne devait pas laisser les paroles de Kine l'atteindre autant. Il décida alors de retourner sur son ordinateur et chercha des informations sur son client. Il lut rapidement les différents articles qu'il trouva. Visiblement, la victime était son ex petite-amie qui l'avait quitté un peu trop brusquement, humiliant son futur assassin en partant avec l'un de ses amis. Apparemment, le client d'Izaya avait continué à la suivre – la police avait trouvé un tas de photos d'elle chez lui – essayant de la récupérer. Mais il avait fini par perdre sa trace, ce qui expliquait pourquoi il avait fait appel à Izaya.
Ce dernier s'amusa un moment à lire les commentaires en dessous de chaque article. C'était consternant de bêtise la plupart du temps. Certains lecteurs affirmaient presque que c'était elle la responsable, qu'elle n'aurait pas dû l'humilier de la sorte. Izaya souriait à chaque fois qu'il lisait un tel commentaire. Ce que les gens pouvaient être stupides. Particulièrement sur le net où ils osaient dire franchement ce qu'ils pensaient, sous le couvert d'un anonymat somme toute très relatif. Izaya passa une bonne partie de son après-midi à ça, essayant de comprendre ce qui avait poussé cet homme à commettre ce crime. Visiblement, il n'y avait aucun antécédent. Ce serait sûrement classé comme crime passionnel. Intéressant.
Le soir venu, il alla se glisser dans son lit avec plaisir. La journée n'avait pas été facile. Et c'était dans des jours comme celui-ci qu'il se rendait compte qu'il était encore trop faible psychologiquement. Il fallait absolument qu'il trouve une solution pour s'en remettre, pour que tout redevienne comme avant. Il ne retournerait jamais à Ikebukuro, mais il avait tout de même envie de passer au-dessus de la peur qu'il ressentait envers Shizuo. Il en avait plus qu'assez de sursauter à chaque fois qu'il voyait quelqu'un aux cheveux blonds ou portant un costume de barman au détour d'une rue. Quand ça arrivait, il avait toujours l'impression que son coeur allait sortir de sa poitrine...
Malheureusement, la nuit ne fut pas de tout repos. A peine eut-il fermé les yeux qu'il fut emporté dans un horrible cauchemar. Il voyait la jeune fille assassinée crier et pleurer. Elle l'accusait de l'avoir tué. Izaya tentait de se défendre, mais elle continuait, criant de plus en plus fort. Izaya s'enfuit alors, courant le plus vite possible. Au loin, il entendait la voix de Kine lui dire qu'il était responsable, qu'il venait de tuer quelqu'un. Il courait encore plus, voulant échapper à tous ces reproches qu'il ne comprenait pas. Il n'avait pas tué cette fille ! Mais alors, pourquoi ses mains étaient-elles pleines de sang ? Il se mit à trembler en voyant tout ce rouge. Qu'avait-il fait ?! Mais il ne put y réfléchir plus longtemps. Il sentit rapidement une main agripper son manteau. C'était son client qui essayait d'arrêter sa course, tout en le remerciant chaleureusement d'avoir tué cette catin pour lui.
Le coeur d'Izaya battait comme jamais. Il avait envie de vomir. Mais qu'est-ce qu'ils racontaient tous ? Il n'avait tué personne ! Il repoussa alors l'homme et reprit sa course. Il devait s'enfuir, mettre le plus de kilomètres possible entre eux et lui. Il arriva alors sur une avenue qui lui sembla affreusement reconnaissable. Sauf qu'il y avait des panneaux de signalisation partout. Izaya eut du mal à courir au milieu de tous ces "Stop", mais il ne pouvait pas s'arrêter. Soudain, une voix raisonna derrière lui, horrible et effrayante.
« I-za-yaaa ! »
La terreur. C'était tout ce qu'il ressentait. Il refusait de se retourner pour voir l'homme qui l'avait pris en chasse. Il essaya de continuer à courir, mais ses jambes devinrent de plus en plus lourdes et douloureuses, jusqu'à ce qu'il n'arrive tout simplement plus à avancer. Une horrible douleur lui parcourut la colonne vertébrale, alors qu'il tomba en avant. S'étalant sur le sol, il entendit clairement le souffle rapide de son poursuivant juste derrière lui. Angoissé, il tourna la tête et aperçut Shizuo. Son haut était déchiré par endroits et l'un de ses bras semblait être cassé, mais il s'en moquait. Ses yeux marrons fixaient Izaya avec une lueur horrible. L'informateur avait l'impression de n'être qu'une vulgaire proie face à un terrible prédateur.
« Tu l'as tuée, grogna le blond. Tu as tué cette fille. Tes mains dégoûtantes en sont la preuve.
— ... Non... c'est faux...
— Tais-toi ! Tu ne sais dire que des mensonges de toute façon ! Mais c'est bientôt fini. Tu ne feras plus de mal à personne maintenant. »
Ce fut à ce moment-là qu'Izaya remarqua le distributeur automatique derrière Shizuo. Non... Il ne voulait pas mourir... Ce n'était pas possible, c'était un malentendu. Il n'avait tué personne ! Il voulait s'expliquer avec Shizuo, mais aucun mot ne sortit de sa bouche.
« Qu'est-ce qu'il y a, puce de merde ?! Tu ressens enfin quelque chose face à la mort ?! »
Izaya essaya de s'éloigner, mais la douleur de ses jambes était bien trop forte. Shizuo ricana alors, se moquant clairement de lui. Il leva ensuite le distributeur sans peine et l'abattit sur lui sans aucune hésitation. Comme au ralenti, Izaya vit l'appareil s'approcher de lui. Il entendit alors un horrible cri. Il lui fallut quelques secondes pour se rendre compte que ce cri venait de sa propre bouche. Il se réveilla alors en sursaut, se retrouvant dans une position assise des plus inconfortables.
Son coeur martelait sa poitrine à plein régime alors que ses mains tremblaient comme jamais. Il se sentait nauséeux, mais il était incapable de faire le moindre mouvement... Il entendit ensuite la porte de sa chambre s'ouvrir et tourna rapidement la tête, effrayé à l'idée de voir l'ombre de Shizuo se dessiner devant ses yeux. Mais ce n'était que Kine. Ce dernier s'approcha rapidement de lui et s'assit à ses côtés.
« Tout va bien ? Je t'ai entendu crier...
— Oui, je... Ce n'est rien. Un bête cauchemar... »
Kine le regarda fixement. Izaya savait bien ce qu'il se retenait de dire – qu'il avait raison sur le traumatisme du brun – mais il eut la délicatesse de ne pas le mentionner.
« Ça va aller ? se contenta-t-il de demander.
— Oui... Retourne te coucher, je ne voulais pas te déranger. »
Kine acquiesça et finit par partir, sentant bien que l'informateur voulait surtout être seul. Ce dernier se recoucha alors lentement, grimaçant de douleur. Il détestait ce qu'il était devenu. Son corps ne valait plus rien, mais son esprit n'était pas mieux. Il devait vraiment réussir à se calmer. Il y avait très peu de chances que quiconque vienne jusqu'ici pour lui faire du mal de toute façon...
Mais quand est-ce que tout ça allait enfin s'arrêter ? Izaya voulait juste reprendre une vie normale, comme avant du moins. Sans tous ces cauchemars. Sans cette peur irrationnelle qui lui donnait l'impression de n'être qu'un faible. Il fallait qu'il arrive à aller de l'avant, à oublier tout ça. Cependant, il ne se sentait pas prêt. Pas prêt à faire vraiment face à tout ça.
Peut-être que s'il enfouissait tout ça bien au fond de lui, il arriverait à faire comme si de rien n'était. Peut-être qu'il pourrait presque croire lui-même en cet accident de voiture qui l'aurait blessé. C'était une vérité qui lui plaisait bien. Il suffisait sûrement de peu pour qu'elle ne devienne sa vérité. Tout oublier, s'inventer un quelconque passé, se forcer à y croire. Izaya savait que c'était possible. Bien sûr, il n'y croirait pas réellement, mais ça suffirait sûrement à faire illusion. Il ne voulait juste ne plus penser à Shizuo...
Tout ce qu'il voulait, c'était partir sur de nouvelles bases. Et en ça, il se rendait compte qu'il avait fait le bon choix en quittant Ikebukuro. Cet endroit l'avait étouffé. C'était presque comme un boulet qu'il devait trainer à ses pieds. Mais il en était libre à présent. Libre de ce quartier qui l'avait rendu presque dingue, libre de cet ancien barman qui voulait sa mort... Alors, il espérait sincèrement qu'avec un peu de temps et un bon conditionnement mental, il arriverait enfin à les oublier tous les deux...
Comme toujours, merci de me lire ! En espérant que cette histoire vous plait toujours, je vous retrouve dimanche prochain pour le chapitre 3.
A suivre: Un ami en commun
