Tout d'abord... Je ne vais pas trop m'étaler sur mon retard plus qu'évident... (désolée, malheureusement, j'ai une vie et un boulot qui prennent du temps ^^")
J'espère néanmoins que ce chapitre, qui est plutôt long, vous plaira :)
Demain, c'est mon anniversaire... donc si vous pouviez laisser un petit commentaire au passage, ça ferait ma journée :D :D :D
Bonne lecture !
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Le soleil était levé, éclairant timidement l'infirmerie qui lui était déjà aussi familière que son dortoir. Recovery Girl était affairée sur son bandage, silencieuse, les sourcils froncés. Elle n'avait pas été particulièrement bavarde depuis le réveil d'Izuku, lui expliquant juste que Todoroki l'avait déposé ici la veille, inconscient.
Elle s'était empressée de le soigner, utilisant son Alter au mieux sans pour autant lui saper toute son énergie. Ca avait cependant suffit pour qu'il ne se réveille pas avant aujourd'hui, quand les premiers rayons du soleil avaient pénétré la pièce.
Vu l'heure, il s'était habillé, prenant soin de ne pas trop bouger son bras en enfilant son T-shirt. Recovery Girl était arrivée alors qu'il essayait de se lever pour aller aux toilettes. A part lui demander comment il se sentait et le faire s'asseoir sur un tabouret pour lui permettre de refaire son bandage, elle n'avait rien dit.
Malgré les questions qui lui trottaient dans la tête, Izuku n'avait pas osé entamer la conversation. L'héroïne semblait chagrinée, ses petits yeux tristes sous ses paupières plissées par les années, ses fines lèvres —presque inexistantes— incurvées vers le bas.
— Voi-là, dit-elle en finissant d'ajuster la bande. Il faudra venir le changer tous les jours. Évite de le mouiller un maximum.
Elle tapota doucement son poignet, les lèvres pincées :
— J'ai fait mon possible mais au vu de la gravité de la brûlure, je n'ai pas pu te guérir complètement.
Elle lui offrit un petit sourire ; une excuse muette.
— Tu vas garder une cicatrice mais ça ne devrait pas te poser de problèmes de motricité… C'est encore tôt pour le dire mais certains nerfs pourraient bien être endommagés. Ca entrainerait une perte de sensation potentielle. Il faudra attendre quelques jours pour en être sûrs, malheureusement.
— Merci. Fit-il, souriant lui aussi. C'est déjà fantastique que je ne sente presque plus rien sans anti-douleur.
Il jeta un oeil à son bras, soigneusement pansé, avant de poser la main sur son épaule gauche. Les brûlures, il connaissait ça. Celle de son omoplate avait été douloureuse pendant des semaines, l'empêchant de bouger comme il le voulait et le forçant à dormir sur son côté droit. Sa mère l'avait enduite d'un baume cicatrisant tous les soirs, s'appliquant à lui faire le moins mal possible —le positionnement de ladite brûlure l'empêchant de la soigner lui-même.
Son geste n'échappa pas à Recovery Girl.
— Cette cicatrice que tu as à l'omoplate, d'où est-ce qu'elle vient ?
— Hm…
Izuku se mordit la lèvre, ses doigts se crispant dans le tissu de son T-shirt. Il n'avait vraiment pas envie d'en parler mais c'était nécessaire. Il devait se montrer sincère un minimum.
Ca ne voulait pas dire qu'il devait entrer dans les détails.
— Quelqu'un m'a- Hm… Quelqu'un m'a brûlé en utilisant son Alter. C'était il y a longtemps.
— Quelqu'un, répéta-t-elle, sourcils froncés de nouveau. Un parent ou- ?
— O-Oh ! Non, non, du tout !
Il soupira, posant ses poings sur ses genoux, la gorge serrée. L'odeur fantôme de la chair brûlée se rappela à lui, encore plus réelle après les événements de la veille.
Izuku évita le regard de l'héroïne, préférant se concentrer sur l'une des épaules menues de celle-ci.
— Un… (il réfléchit un instant avant de continuer) un ancien camarade de classe avec qui j'ai eu un désagrément. Ça ne s'est pas reproduit.
Un reniflement mécontent échappa à l'infirmière. Elle alla chercher son porte-document sur le bureau, à petits pas et s'aidant de sa canne en forme de seringue pour rester stable. Il la vit noter rapidement quelques mots sur une des pages du fond, avant qu'elle ne se tourne de nouveau vers lui.
— Est-ce que ce camarade a un nom ? Fit-elle, les rides sur son front s'accentuant davantage.
Il secoua la tête, un sourire contrit aux lèvres alors que son premier « vrai » mensonge les franchissait :
— Comme je l'ai dit, c'était il y a longtemps. Je ne l'ai plus vu depuis des années… Je ne m'en souviens pas.
Elle le regarda fixement, clairement pas dupe. Ne sachant pas quoi faire d'autre, il se força à continuer de sourire, se grattant l'arrière de la nuque. Soupirant, Recovery Girl griffonna encore un instant sur ses documents. Dès qu'elle eut détourné le regard, Izuku laissa ses épaules retomber, ainsi que son sourire crispé.
Il ne voulait pas vraiment mentir. Cependant, il ne voulait pas non plus causer de problèmes à Kacchan. Mentionner son nom lors de cette discussion pourrait avoir des répercussions négatives graves, même si les faits s'étaient déroulés des années plus tôt. Izuku ne voulait pas prendre ce risque. Malgré tout ce qui s'était passé entre eux, ça n'avait rien à voir avec la future carrière de Kacchan. Il avait tout pour être un héros fantastique : sa force, son Alter, sa détermination et aussi son aptitude à toujours sortir vainqueur de n'importe quelle situation.
De plus, il ne l'avait blessé de cette façon qu'une seule et unique fois.
La porte coulissante donnant sur le couloir s'ouvrit, laissant entrer Eraserhead. Ce dernier les salua tous les deux avant de s'avancer vers Izuku, les traits tendus. Après un regard du professeur, Recovery Girl s'éclipsa en décrétant qu'il pouvait quitter l'infirmerie dès à présent.
Il y eut un moment de flottement où ni Izuku, ni Aizawa ne dirent un mot. Ce dernier tira l'un des tabourets disponibles pour s'asseoir face à lui, les bras tendus et les mains sur les cuisses. Il s'inclina légèrement, surprenant Izuku au passage.
— Je suis désolé pour ce qui s'est produit hier. Dit-il, sérieux. Je n'aurais pas dû vous laisser sans surveillance. Todoroki a une maîtrise excellente de son Alter en temps normal mais au vu de son attitude envers toi, j'aurais dû me méfier davantage.
Ne sachant pas où se mettre, Izuku agita les mains devant lui.
— C- C'est rien ! C'est pas grave ! Je vais bien. Recovery Girl m'a soigné et je ne sens plus rien !
Pour le prouver, il leva son bras blessé et tapota l'endroit de la brûlure.
Mauvaise idée ! Pensa-t-il en retenant un gémissement de douleur.
Aizawa s'était redressé entre-temps, ne manquant pas la manière dont Izuku serra les dents et ses yeux menaçant de se fermer.
Le même sourire que celui qu'il avait offert à Recovery Girl étira les lèvres d'Izuku alors qu'il ramenait ses poings entre ses cuisses, la tête rentrée dans les épaules.
Toujours aussi sérieux, le professeur continua :
— Todoroki a reçu pour consigne de ne pas se joindre à ton entraînement de cet après-midi. Et selon ce que tu décideras, nous essayerons de trouver une alternative pour les suivants. T'entraîner sans un partenaire pourrait nuire à la qualité de ton apprentissage mais il serait compréhensible qu'au vu des… circonstances, tu refuses de continuer les cours pratiques avec lui.
— Les circonstances ? … Mais c'était un accident ?
Aizawa ancra son regard sombre dans le sien, un sourcil haussé légèrement.
— Je faisais aussi référence à son Ascendance Givre…
Izuku le regarda sans comprendre où il voulait en venir, la bouche entrouverte. Il savait que le héros attendait une réponse mais ignorait laquelle. Qu'il lui fasse cette proposition parce que Todoroki l'avait blessé —même si ce n'était pas voulu— était logique. Mais pourquoi voudrait-il changer de partenaire, uniquement parce que Todoroki était en partie d'Ascendance Givre ? Lui aussi était à U.A pour apprendre le métier de héros.
— Ca ne me pose aucun problème. Dit-il, haussant les épaules avec un sourire assuré. L'important, ce n'est pas l'origine d'un Alter. C'est l'utilisation qu'on en fait.
A ces mots, Aizawa jeta un regard appuyé à son bandage.
Izuku se gratta la joue, conscient que ses propos pouvaient sembler contradictoires. Il posa ensuite délicatement la main sur la zone visée, se rappelant par la même occasion le regard lointain de Todoroki au moment où il l'avait blessé, puis l'horreur sur son visage quand il avait réalisé ce qui venait de se passer. Non, Todoroki ne l'avait pas brûlé volontairement. Du moins, pas à ce point-là.
En plus, il l'avait porté jusqu'à l'infirmerie tout de suite après. Ca voulait dire que malgré son aversion à son égard, Todoroki avait voulu le faire soigner rapidement. Une personne qui lui voudrait du mal, ou se moquant bien de ce qui arriverait, n'aurait pas fait ça. Elle l'aurait abandonné là, le laissant se réveiller désorienté et seul…
— Il ne l'a pas fait exprès. Bien sûr, j'ai eu un peu peur sur le moment, mais ce n'était pas à cause de son Ascendance.
Aizawa le jaugea attentivement, analysant chacune de ses réactions pour voir si il mentait ou pas. Izuku relâcha ses muscles, voulant paraître le plus détendu possible, pour lui prouver qu'il était sincère.
— … C'est aussi ce qu'il m'a dit mais je voulais entendre ta version, dit-il finalement, se redressant pour croiser les bras sur son torse. Si tu es certain de ta décision, je lui dirai de revenir pour le cours de demain. Je serai présent pour monitorer vos sessions, à l'avenir. Aujourd'hui, je vais te montrer les bases du combat rapproché.
Un courant électrique parcourut l'échine d'Izuku, faisant bondir son coeur dans sa poitrine au passage. Il se redressa d'un coup, des étoiles dans les yeux. Ses lèvres s'étirèrent en un sourire douloureusement large, faisant se soulever à peine le coin de celles d'Aizawa.
Le héros consulta l'horloge murale avant de se tourner vers lui, une étincelle nouvelle dans le regard.
— Mais d'abord… tu es en retard pour ton cours théorique.
Izuku bondit de son tabouret pour attraper ses chaussures.
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Les cours du matin se passèrent sans trop de difficultés, bien que la brûlure sur son bras droit, toujours sensible, lui ait posé quelques soucis pendant sa prise de note. L'élasticité de sa peau était toujours diminuée, malgré les soins de Recovery Girl. Plier ou déplier son bras trop rapidement lui provoquait une sensation d'étirement désagréable, comme si la chair atteinte allait finir par se déchirer s'il était trop brusque.
Aizawa avait dû remarquer ses grimaces à peine dissimulées car il avait donné le cours théorique plus lentement que d'ordinaire. Il n'avait fait aucune remarque, cependant. Izuku lui était reconnaissant pour les nombreuses pauses qu'il avait prises pour se mettre des gouttes dans les yeux —beaucoup trop souvent pour que ça ne soit pas fait exprès.
A la fin de la leçon, il lui avait demandé de le rejoindre à cet étage, devant le même ascenseur qu'auparavant plutôt qu'au gymnase Gamma, après le déjeuner. C'était donc là qu'il se tenait à présent, triturant le bord de son T-shirt noir en regardant distraitement par la fenêtre.
Le ciel était couvert, des nuages gris s'amoncelant lentement depuis le matin. N'ayant pas pris de gilet ni de parapluie avec lui, Izuku croisa les doigts pour qu'il ne se mette pas à pleuvoir avant qu'il ne soit rentré aux dortoirs.
Des bruits de pas attirèrent son attention vers le bout du couloir. Aizawa, cheveux en bataille et d'énormes cernes sous les yeux, arrivait d'une démarche trainante. Il bailla longuement avant de marmonner quelques mots qu'Izuku n'entendit pas de là où il était.
— J'ai parlé avec Todoroki, déclara-t-il une fois à son niveau.
Il appuya sur le bouton d'appel de l'ascenseur après avoir pris soin de passer sa carte électronique dans le lecteur. Le bruit du mécanisme de traction de la cabine remplit le silence qui suivit. Glissant un rapide coup d'oeil vers Izuku, il continua :
— Il n'avait pas l'air très convaincu quand je lui ai dit que tu voulais continuer les entraînements avec lui. Si tu le croises avant la séance de demain, ça ne serait pas plus mal que tu lui dises toi-même. Il devrait être… réceptif.
Vu le talent de Todoroki pour éviter Izuku, ça risquait d'être compliqué. Néanmoins, Izuku se sentait un peu soulagé d'entendre que s'il entamait de nouveau le dialogue, ça se passerait mieux que les fois précédentes.
— J'essayerai de lui parler.
— Si nécessaire, sa chambre est au troisième étage. Ajouta Aizawa en entrant dans la cabine qui venait de s'ouvrir.
Il pressa le bouton de l'étage. Contrairement à la dernière fois, il ne choisit pas le « -2 » mais le « -1 ». Après un léger sursaut, la cabine se mit à descendre. Aizawa s'appuya contre le mur, papillonnant des yeux plusieurs fois comme s'il luttait pour ne pas s'endormir, bercé par le bruit de l'ascenseur.
Une fois arrivés à destination, les portes s'ouvrirent sur un couloir en béton lisse. Un détecteur de mouvement sur le mur opposé déclencha les lumières du plafonnier, révélant quatre portes se faisant face de part et d'autre. Une cinquième se trouvait sous le détecteur. Chacune d'elles était numérotée de « 01 » à « 05 » par de grands chiffres noirs, de gauche à droite.
Aizawa les conduisit sans hésitation devant la porte 02 et passa une nouvelle fois son badge dans un lecteur intégré à la poignée. Un instant plus tard, le bruit sourd du verrou retentit par trois fois.
Izuku sentit un frisson lui parcourir l'échine. Qu'est-ce qui pouvait bien se trouver dans cette pièce pour que la sécurité soit renforcée à ce point ?
La porte s'ouvrit sur une pièce déjà éclairée mais ce ne fut pas ce qu'elle contenait qui fit écarquiller les yeux d'Izuku.
Tout ce qui se trouvait au-delà du seuil était baigné d'une faible lumière jaunâtre, l'air ambiant rempli de particules de poussières suspendues dans le vide, immobiles. La scène ressemblait à une photo en sépia ; un instant passé figé dans le temps. Aucun son ne provenait de la pièce, renforçant l'impression de faire face à une simple image.
Un tremblement se propagea dans tout le corps d'Izuku alors qu'il se mordait les lèvres pour retenir le cri d'excitation qui menaçait de lui échapper.
Une salle astrale !
Aizawa, le détailla de la tête aux pieds, les bras croisés sur le torse. Quand il vit son expression extatique et la manière dont il s'agitait sur place, le professeur soupira. Il n'ajouta rien avant de pénétrer dans la salle, traversant le voile invisible alors qu'il franchissait l'encadrement de la porte.
Izuku le regarda disparaître sous ses yeux, son corps tout entier s'évanouissant sans laisser de trace une fois le seuil passé. Dans la pièce, il n'y avait aucune trace de lui pourtant Izuku savait qu'il s'y trouvait bien. Bien qu'il n'ait jamais vu une vraie salle astrale —en dehors des films—, il ne se posa pas de question. Après avoir pris une grande inspiration saccadée, il suivit son professeur.
Il ne savait pas à quoi s'attendre en passant du monde réel au plan astral. La sensation de s'extirper d'une susbtance collante le surprit. Comme si il devait arracher le reste de son corps, toujours de l'autre côté, d'une mélasse qui ralentissait ses mouvements. Ses oreilles émirent un léger 'pop' en traversant le portail, de la même manière qu'après un baillement en trop haute altitude.
Alors que la dernière partie de son corps se défaisait de l'attraction du monde réel, la différence de vitesse dans ses mouvements déséquilibra Izuku. Il partit en avant comme si une personne invisible l'avait retenu en arrière jusque-là et qu'elle l'avait soudainement lâché sans prévenir. Se rattrapant de justesse, il se redressa sous le regard peu impressionné d'Aizawa.
— C'est la différence de temporalité, je suppose ? Dit-il pour se justifier, se grattant l'arrière de la nuque avec un sourire embarrassé.
— Il faudra t'y habituer, soupira Aizawa, confirmant son intuition.
D'après ses recherches, le temps s'écoulait particulièrement plus rapidement dans une salle astrale. A peu près deux fois plus vite qu'à l'extérieur.
Les médias soupçonnaient la présence de tels équipements à U.A mais les faits n'avaient jamais été confirmés. Certaines choses devaient rester confidentielles, après tout.
Alors qu'il essuyait distraitement ses paumes sur son short de basket pour sécher la condensation qu'y avait laissé sa bouteille d'eau fraîche, Izuku observa les alentours. Plus petite que le gymnase Gamma, la salle astrale n'en restait pas moins très spacieuse pour autant. Les murs de béton nus montaient assez haut pour qu'Izuku puisse grandir de cinq fois sa taille actuelle, et le sol recouvert de tatamis offrait suffisamment de place pour s'entraîner à plusieurs sans se marcher sur les pieds.
— Tu sembles avoir compris la nature de cette salle d'entraînement donc je ne vais pas m'étaler sur ce point. Dit Aizawa, s'adossant contre le mur le plus proche.
Ne voulant pas se montrer impoli, Izuku ne dit rien en le voyant bailler pour la énième fois depuis ce matin. Est-ce que le héros était toujours aussi fatigué ? Ou bien avait-il dû effectuer ses fonctions héroïques ces derniers jours, en plus de s'occuper d'Izuku ?
Si Aizawa avait formé un lien AS, ce n'était pas une information qu'il avait partagée avec le public mais vu l'état de fatigue du professeur, Izuku aurait eu tendance à penser que non. Les choses pouvaient être plus compliquées que ça, cependant.
En tout cas, si il avait eu son âme soeur à proximité, il ne devrait pas avoir l'air aussi éreinté. Une simple recharge d'Anima aurait fait l'affaire pour remédier à son état de fatigue.
— Todoroki ne fait pas partie de la séance d'aujourd'hui-
Il se laissa glisser le long du mur jusqu'à se laisser tomber sur un banc avant de continuer.
— Mais tu n'as pas de temps à perdre. D'ici trois semaines à peine, l'année scolaire va commencer et tu vas devoir tenir la cadence un minimum. Certains de tes camarades ne te feront pas de cadeau..
J'ai bien un nom qui me vient en tête…
— On va donc utiliser un Echo en guise de partenaire.
— Un… Echo ?
Izuku inclina la tête de côté avant de croiser les bras, un doigt recourbé sur ses lèvres. Même en cherchant bien, ça ne lui disait rien.
D'un coup de tête, Aizawa indiqua le plafond. Plissant légèrement les yeux à cause de la lumière des plafonniers, Izuku suivit son mouvement. Au centre de celui-ci s'étendait une rune juste assez grande pour qu'Izuku puisse distinguer une forme de sablier.
— Une rune du Souvenir ? Fit-il, réflechissant à ce qu'il savait de ce type de rune. Elles ne servent pas qu'à visualiser des événements qui se sont produits à proximité ?
Aizawa acquiesça, affalé pesamment contre le mur.
— En partie…
Il sortit son flacon de sérum physiologique et en ajouta deux gouttes dans chaque oeil avant de poursuivre, clignant rapidement des yeux :
— La rune enregistre tout ce qui se passe dans la pièce mais on s'en sert plutôt pour son autre usage principal : elle permet de créer une Ombre —un Echo, comme tu préfères. Vois ça un peu comme l'IA dans un jeu vidéo. Elle utilise les techniques de combat de toutes les personnes qui se sont entraînées dans cette pièce jusqu'à aujourd'hui.
— C'est trop cool !
Une IA capable d'allier les compétences de tous ceux qu'elle a pu observer ?! Pas étonnant que U.A utilise ce genre de choses ; c'était ultra pratique. Est-ce qu'il pourrait s'entraîner ici plus souvent pour varier le style de ses opposants ? Comment est-ce que cet Echo était contrôlé ?
La voix trainante d'Aizawa l'interrompit dans ses réflexions, stoppant ses marmonnements par la même occasion.
— Les ados… où est-ce que vous allez chercher toute cette énergie ?
Se massant la tempe, le professeur soupira longuement.
Ça ne sonne pas comme un compliment...
— Même si les possibilités qu'offrent un Echo sont très intéressantes, ce n'est pas une solution viable à long terme pour ton entraînement. L'Echo a besoin d'un ancrage, de quelqu'un qui le contrôle pour qu'il sache quoi faire. Cette même personne sert aussi de batterie. L'Echo se nourrit de ton Anima pour fonctionner.
— Alors-
— On verra ça plus tard, l'interrompit Aizawa, lui faisant signe de s'éloigner un peu. D'abord, on va commencer par les bases, histoire de te donner une chance…
Izuku pinça les lèvres, les joues gonflées malgré lui. Il haussa un sourcil en direction d'Aizawa.
Ca n'a lui a jamais posé problème quand je me faisais laminer par Todoroki…
L'expression de regret que le professeur avait affiché ce matin en lui présentant ses excuses lui revint en mémoire, le faisant aussitôt se détendre. Peut-être avait-il décidé de lui montrer quoi faire pour que la situation de la veille ait moins de chances de se reproduire à l'avenir.
Qu'importe, apprendre c'était toujours apprendre, quelle qu'en soit la raison.
— On va commencer par ta posture… Mets-toi en place.
— OUI !
Izuku prit sa position de départ habituelle lors des sessions précédentes avec Todoroki. Elle était très semblable à la sienne d'ailleurs, ce qu'Aizawa n'avait sûrement pas manqué.
Le héros l'observa avec attention, ses yeux noirs s'attardant par endroits. Le haussement de sourcil peu impressionné qu'il afficha ensuite poussa Izuku à rentrer la tête dans les épaules, le jugement étant très clair.
— Fléchis les genoux davantage, écarte tes pieds un peu plus… Oui, comme ça. Garde tes bras un peu plus près du corps… C'est mieux.
Izuku prit le temps de mémoriser la posture, désireux de montrer qu'il pouvait apprendre rapidement. Avec un peu de chance, peut-être même que ça pourrait provoquer une réaction positive chez Todoroki à leur prochaine session… Ou du moins, éviter qu'il le dévisage comme si Izuku était profondément stupide.
Oui, ça serait déjà pas mal.
S'ensuivit alors une bonne demi-heure où Aizawa prit le temps de lui montrer la bonne façon de porter un coup à un opposant, même si il ne faisait que se battre avec de l'air pour le moment. La manière de bouger, de se tenir, de garder son équilibre, …
Quand Aizawa décréta que c'était suffisant pour passer à la suite, Izuku avait fait tellement de mouvements à répétition qu'une fine pellicule de sueur perlait sur son front. Il descendit la moitié de sa bouteille d'eau en une gorgée dès que le professeur lui annonça qu'il avait droit à cinq minutes de pause.
— On va profiter que tu aies les mouvements bien en tête et que tes muscles soient échauffés. Dit-il, fouillant dans sa poche droite, ses gestes lents et la tête baissée.
Il se leva du banc, sortant victorieux de ses recherches, un anneau en bronze dans la main. Quelque chose semblait y être gravé mais c'était trop petit pour qu'Izuku distingue clairement de quoi il s'agissait.
Aizawa prit une profonde inspiration tout en faisant une rotation avec sa tête, sa nuque craquant au passage. Il glissa ensuite l'anneau à son annulaire avant de refermer son poing, les yeux fermés et les sourcils froncés. Après à peine quelques secondes de concentration, Izuku entendit un bruit derrière lui.
Alors qu'il pivotait sur lui-même pour voir d'où il provenait, un tourbillon noir venant du plafond le fit reculer précipitamment. Le mouvement brusque le fit trébucher et ce fut sur les fesses qu'il vit les volutes, semblables à du sable, descendre en une spirale douce vers le sol. Pendant qu'il se relevait, ne détournant pas les yeux un instant du phénomène, la poussière noire commença à se rassembler en une silhouette vaguement humaine.
Une fois que l'Echo eut pris une forme qui semblait lui convenir, des particules de sable en suspens continuant de virevolter paresseusement autour de lui, il tourna la tête en direction d'Aizawa. Celui-ci ne lui accorda aucune attention pour l'instant, ses yeux fatigués fixés sur Izuku.
— L'Echo ne peut pas reproduire l'Alter d'une personne, ni même improviser. Il va tout simplement copier des mouvements qu'il a vu être utilisés par son original. Ce n'est donc pas parfaitement représentatif du niveau de tes futurs camarades, mais c'est un bon début.
— Est-ce qu'il imite plusieurs personnes en même temps ou seulement une à la fois ?
La question lui avait échappé avant qu'il ne pense à la retenir. Aizawa se tut un instant, semblant considérer le fait de lui répondre.
En voyant ses paupières lourdes, ses yeux rougis par la fatigue et sa posture avachie, un noeud se forma dans la gorge d'Izuku. Son regard glissa sur l'anneau qu'Aizawa faisait tourner autour de son doigt à l'aide de son pouce. C'était sûrement ce bijou qui lui permettait de contrôler l'Echo ; ce qui signifiait qu'il était en train de lui transmettre de son énergie en ce moment-même. Il pourrait lui poser des questions plus tard, quand le temps qui passait ne serait pas lié au déclin de l'énergie d'Aizawa.
— Tu verras bien, répondit-il finalement en se rasseyant.
Il fit un vague signe de main en direction de l'Echo, un « allons-y » muet. La silhouette de sable noir se tourna instantanément vers Izuku, prenant une position de combat qu'il reconnut tout de suite : celle de Todoroki.
Izuku l'imita, mettant en pratique ce que le professeur lui avait montré plus tôt. Les sourcils froncés, il observa l'Echo avec attention.
— Il n'y aura pas de pause, alors tâche de tenir le plus longtemps possible.
Izuku jeta un dernier regard en coin à Aizawa et à la manière dont il tentait péniblement de garder les yeux ouverts.
Je ne sais pas qui craquera le premier...
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Le sol était encore humide de l'averse de cette nuit quand Izuku franchit les portes du dortoir, prêt pour son jogging. Contrairement au sommeil profond auquel il avait eu droit grâce au traitement de Recovery Girl, cette nuit il s'était retrouvé dans son rêve habituel. Il avait l'impression d'y avoir passé des heures, adossé à la paroi tiède.
Aucune vibration n'avait trahi un quelconque mouvement de la part du garçon de l'autre côté. Peut-être n'était-il même pas présent. Izuku avait, avec difficulté, tenu la promesse qu'il s'était faite à lui-même : ne pas regarder, qu'importe ce qui pourrait se passer. C'était loin d'être facile mais il résistait tant bien que mal à la curiosité qui ne cessait de grandir en lui.
Théoriquement, le fait de savoir qu'il était dans un rêve aurait dû lui laisser la possibilité de le modifier à sa guise. Il avait fait pas mal de recherches, des années plus tôt. Pourtant, rien de ce qu'il y avait appris ne l'avait aidé. Même s'il s'était persuadé qu'il pouvait casser la paroi, il n'y était jamais parvenu. La pièce restait la même, toujours désespérément plongée dans l'obscurité, éclairée uniquement par ces petites boules à la lumière blanchâtre.
Après des semaines à avoir essayé de faire apparaître une porte —sans résultat—, il avait dû se résigner. Même si c'était son rêve, il ne contrôlait rien lorsqu'il était à l'intérieur. C'était rageant mais il n'y pouvait rien.
Frottant une dernière fois la cicatrice de son omoplate qui le démangeait depuis son réveil, il se mit à trottiner vers la piste de course à pied. L'odeur de terre humide emplit ses poumons, amenant avec elle un sentiment de calme, renforcé par le bruit des oiseaux chantant au loin.
Alors qu'il arrivait au terrain, il vit une silhouette familière déjà en pleine course. Avec un gilet noir entre-ouvert sur le dos et un pantalon de jogging gris clair —ou peut-être pas ?—, Todoroki courait à un rythme soutenu, ses pieds foulant le revêtement synthétique rouge de ses baskets blanches. Un nuage de buée s'échappait de sa bouche à chacune de ses exhalations.
Après une courte inspiration, carrant les épaules et les poings serrés le long du corps, Izuku rejoignit la piste, accélérant un peu pour rattraper Todoroki.
Ça se passera mieux que la dernière fois, hein ?
Il vacilla un instant, son rythme ralentissant brusquement, bien malgré lui. Fronçant les sourcils, contrarié par cette hésitation soudaine, il se reprit.
Comme s'il avait senti sa présence, Todoroki tourna la tête dans sa direction avant de s'arrêter, poussant Izuku à l'imiter s'il ne voulait pas lui rentrer dedans.
Tous deux restèrent là à s'observer en silence, Todoroki avec une expression gardée sur le visage, son regard fixé résolument sur l'espace à côté de la tête d'Izuku.
— Midoriya…
Izuku retint un sursaut, tel un enfant qui vient d'être pris sur le fait alors qu'il allait faire une bêtise. La bouche entre-ouverte, il continua de regarder Todoroki sans dire un mot, poussant ce dernier à glisser un coup d'oeil dans sa direction. Il ne s'était pas attendu à ce que Todoroki parle le premier.
Les secondes s'égrènant toujours sans réaction de sa part, l'autre garçon finit par se tourner complètement vers lui, les mains dans les poches de son jogging, évitant toujours de croiser son regard.
« Il devrait être… réceptif. »
Les muscles d'Izuku se relâchèrent, sa position devenant nettement plus détendue —ce qui n'échappa pas à Todoroki.
— Bonjour, Todoroki. Dit-il, un sourire timide étirant ses lèvres. Désolé de te déranger…
Il se gratta la nuque, baissant la tête et lançant un regard gêné à l'autre garçon par-dessous ses cils avant de poursuivre :
— C'est une mauvaise habitude. Désolé.
Tu l'as déjà dit. Abrège.
Tout en se mordillant l'intérieur de la joue, Izuku tenta de se rappeler les notes qu'il avait prises la veille au soir après sa séance pratique avec Aizawa. En rentrant au dortoir, complètement vidé, il s'était lancé dans la rédaction de ses excuses pour éviter de s'éparpiller quand il les présenterait à Todoroki. Il avait fini par s'endormir, assis à son bureau, et s'était réveillé ce matin avec une partie de son brouillon imprimée sur la joue.
— Hum- Par rapport à ce qui s'est passé l'autre jour… Je tenais à m'excuser d'avoir autant insisté. Tout ça c'est nouveau pour moi : avoir un Alter, entrer à U.A, … Je me suis emballé sans prendre en compte ce que toi tu ressentais. Tu as clairement dit que tu voulais être tranquille mais j'ai forcé quand même et tu as fini par t'énerver-
— Arrête.
Izuku releva la tête, les yeux grands ouverts. Il aurait pu croire qu'il avait encore réussi à irriter Todoroki s'il n'avait pas vu le regard empli de culpabilité que celui-ci dardait sur lui. Les sourcils froncés assez fort pour créer une ride entre les deux, la mâchoire contractée et les épaules tendues, Todoroki le regardait avec une lueur dans le regard qu'Izuku ne lui avait encore jamais vu.
Une brise passagère vint agiter ses cheveux, mélangeant mèches rouges et blanches entre elles, avant de disparaitre. Izuku frissonna, les mots bloqués dans sa gorge.
— Rien de ce que tu as fait ne justifiait-
Il jeta un regard emprunt d'un dégoût non dissimulé à l'avant-bras d'Izuku, là où se trouvait le bandage, bien qu'il soit masqué par la manche de son sweat. Le nez plissé, il détourna la tête d'un mouvement sec, sa voix trahissant ses émotions tumultueuses :
— Tu ne méritais pas que je m'attaque à toi de cette manière. On ne blesse pas les gens seulement parce qu'ils ne font pas ce que tu veux.
Todoroki serra les dents si fort qu'Izuku put les entendre crisser. Chaque centimètre de son corps semblait être tendu à l'extrême, comme la corde d'un arc prête à se rompre. Autour de lui, des vagues de chaleur commençaient à irradier, comme d'un macadam en pleine canicule.
— Je refuse d'agir comme mon enfoiré de paternel. Je ne suis pas comme lui et je ne le serai jamais, alors arrête de t'excuser quand c'est moi qui suis en tort.
Inspirant profondément, tentant de se calmer, Todoroki ferma les yeux. L'air autour de lui se rafraîchit, balayé par de légers coups de vent qui eurent tôt fait de dissiper la chaleur persistant encore.
Izuku ne dit rien. Ce n'était pas la première fois que Todoroki mentionnait son père, son dédain —non, sa haine— transpirant par chacun de ses pores. Il ne savait pas d'où elle provenait, mais une chose était sûre : Todoroki s'en voulait vis-à-vis de ce qu'il s'était passé à leur dernier entraînement.
— Todoroki, ce n'est pas-
— Je suis désolé.
Surpris, Izuku inclina la tête de côté.
Il s'est… excusé ?
Si jusqu'ici, Izuku avait trouvé de nombreuses similitudes entre Kacchan et Todoroki, elles s'arrêtaient là.
Kacchan était plutôt du genre à montrer qu'il était désolé, à faire des choses pour se faire pardonner sans avoir à prononcer les mots à voix haute. Ça n'avait jamais dérangé Izuku ; ses actions résonnaient aussi fort que ses paroles. Pourtant, entendre les excuses de Todoroki à voix haute apaisa en partie la boule au ventre qu'il avait depuis le début de leur échange.
Devant lui, ses yeux gris cette fois plongés dans les siens, Todoroki ne pipait mot, ayant visiblement dit ce qu'il avait à dire.
Qu'est-ce que je dois répondre ?
'Ce n'est rien' ? Mauvaise idée, au vu de sa réaction.
Izuku ne voulait pas non plus minimiser l'importance de ses excuses. Ça semblait important pour lui. Le mieux qu'Izuku pouvait faire, c'était d'être sincère en retour.
Un sourire étira ses lèvres, surprenant Todoroki dont les yeux s'écarquillèrent presque imperceptiblement mais assez pour qu'Izuku le remarque.
— Je n'ai pas pensé une seule seconde que tu avais fait exprès de déclencher ton Alter.
Il posa la main sur son avant-bras, à hauteur de la brûlure, ce qui n'échappa pas au regard de Todoroki. Ce dernier pinça les lèvres, sourcils froncés de nouveau.
— Je ne vais pas te mentir en disant que je n'ai rien senti, continua-t-il, toujours souriant. Mais je ne sens presque plus rien maintenant et je peux bouger mon bras comme d'habitude. Alors, j'accepte tes excuses, à condition qu'on laisse cette histoire derrière nous.
— Tu minimises-
Izuku secoua la tête tout en agitant les mains devant lui.
— Non, non, pas du tout ! Mais t'en vouloir…
Il haussa les épaules, fourrant les mains dans les poches de son sweat à capuche avant de continuer :
— T'en vouloir ne changera rien à ce qui s'est passé. Ca ne m'apportera rien et à toi non plus.
Todoroki inclina la tête de côté avant de le dévisager de haut en bas. Son visage avait repris une expression parfaitement neutre. Ne sachant pas quoi faire d'autre, Izuku continua de sourire, frottant le sol du bout de sa basket.
— Tu es bizarre, Midoriya. Déclara finalement l'autre garçon, après un soupir résigné.
— Ce n'est pas la première fois qu'on me le dit, répondit Izuku en se grattant la joue nerveusement avec son index. Mais ne t'inquiète pas : je vais te laisser tranquille à partir de maintenant. Plus de papotage pendant ou en dehors des entraînements.
Si Todoroki ne voulait pas de lui dans son espace, alors Izuku respecterait son souhait.
— D'ailleurs, je ne t'ai jamais vraiment remercié mais…
Izuku redressa la tête pour finir sa phrase, prenant soin de regarder Todoroki dans les yeux pour lui montrer qu'il était sincère.
— Merci de m'aider à m'entraîner.
Il s'empressa de continuer en voyant Todoroki ouvrir la bouche, prêt à protester.
— Je sais qu'on ne t'a pas laissé le choix ! … mais ça n'empêche pas que ça m'aide.
— Ca t'aide…
Le haussement de sourcils dubitatif qui accompagnait ses mots fit chauffer les joues d'Izuku.
— Je sais que ça ne se voit pas encore, dit-il en riant doucement. Je vais faire des efforts et prouver que je peux y arriver, que je peux être à la hauteur.
Todoroki ne répondit rien. De toute manière, qu'aurait-il pu dire à ça ? Pour le moment, ce n'étaient que des mots. Izuku devrait lui montrer qu'il pensait chacun d'eux, en commençant par laisser l'autre garçon finir son jogging sans le déranger davantage.
Il se remit à trottiner sur place, ses muscles ayant déjà commencé à se refroidir après ce petit moment d'inactivité.
— A tout à l'heure, dit-il avant de commencer à courir, dans le sens opposé à celui dans lequel allait Todoroki avant qu'il l'interrompe.
Enfin… ça, c'est fait.
Il soupira intérieurement, un peu déçu de devoir renoncer à une possible amitié.
Izuku était habitué à ne pas être très entouré. Il ne l'avait jamais été et ne le serait sûrement jamais à l'avenir. Les gens trouvaient ses marmonnages bizarres, la plupart du temps, mais ce n'était pas quelque chose qu'il pouvait contrôler.
Une pensée pour Namigawa lui traversa l'esprit, amenant avec lui un sentiment de nostalgie mêlé de culpabilité. Il ne lui avait toujours pas parlé et n'avait pas la moindre idée de ce qu'il dirait quand il le ferait.
Le bruit de pas martelant le sol juste derrière lui le sortit de ses réflexions. Avant qu'il n'ait pu tourner la tête, Todoroki vint se poster à sa hauteur, ralentissant alors son rythme pour se caler sur celui d'Izuku.
Ses yeux gris rencontrèrent brièvement les siens, écarquillés de surprise, mais il les détourna bien vite, continuant de courir comme si de rien n'était. Izuku le dévisagea quelques secondes supplémentaires, ses pieds continuant leur course malgré le blanc qui venait d'envahir son esprit.
Sans qu'il ne s'en aperçoive, un sourire étincelant étira ses lèvres. Son coeur manqua un battement avant de repartir de plus belle, faisant des bonds dans sa poitrine, comme un oiseau surexcité dans une cage. Il dut se retenir pour ne pas accélérer le pas, de peur que Todoroki ne se méprenne.
Quand ce dernier jeta un nouveau regard dans sa direction, le sourire d'Izuku était si large qu'il en avait mal aux joues. Il baissa la tête, espérant que le nid de corbeaux qu'il avait sur le crâne et qui lui servait de chevelure dissimulerait en partie son visage et l'expression extatique qui ne semblait pas vouloir s'en détacher.
— Très bizarre… lui sembla-t-il entendre, murmuré à mi-voix.
Et à son agréable surprise, ça ne sonnait pas nécessairement comme une critique.
.
.
Izuku venait de se mettre à table, le poignet en miettes, quand Todoroki fit son apparition dans la cuisine du dortoir sur le temps de midi. Ne voulant pas gâcher les progrès qu'ils avaient faits quelques heures plus tôt, Izuku le laissa se préparer à manger en silence. Il regarda curieusement par-dessus son bol de riz alors que Todoroki sortait un Tupperware étiqueté « vendredi » du frigo.
Si la situation avait été un peu plus stable —si leur première interaction civilisée n'avait pas eu lieu seulement ce matin—, Izuku aurait demandé qui préparait tous les plats qui se trouvaient là. Il avait quelques doutes sur le fait que Todoroki s'amusait à découper ses radis en forme de pieuvre et arranger ses morceaux d'omelette en coeur, mais il pouvait se tromper. Après tout, ils ne se connaissaient pas vraiment.
Todoroki s'assit à table avec lui, en diagonale, avant de lui souhaiter un bon appétit, la voix basse et posée. Surpris, Izuku resta un instant bouche-bée avant de lui rendre la pareille.
Ils mangèrent en silence, l'atmosphère restant cependant agréable. Todoroki ne semblait pas avoir grand-chose à dire et Izuku soupesa le mérite de lancer la conversation lui-même, avant de se raviser. Il avait dit qu'il n'empiéterait plus sur l'espace personnel de Todoroki ; ce n'était pas parce que celui-ci lui avait métaphoriquement donné la main qu'il devait lui attraper le bras. Il allait laisser l'autre garçon décider du rythme à adopter.
Posant ses baguettes, il fit quelques rotations avec son poignet droit, espérant diminuer la douleur qui parcourait ce dernier. Evidemment, sans grand résultat.
— Tu t'es blessé ?
Izuku plaqua sa main sur la table par réflexe, ne s'étant pas attendu à une question de la part de Todoroki. Il s'en mordit tout de suite les doigts, un courant électrique reliant instantanément son poignet au pli de son coude. Face à lui, Todoroki le regardait calmement, comme si il venait simplement de lui demander l'heure. Ses yeux gris se posèrent un instant sur sa main avant de revenir vers ceux d'Izuku.
Il pouvait presque l'entendre se demander pourquoi il avait réagi ainsi. Cependant, Izuku était loin d'avoir envie de parler de sa mère et des crises qui pouvaient découler de ce genre de questions avec elle.
— Non, c'est à cause de Monsieur Aizawa.
Le haussement de sourcils qu'il reçut en réponse le fit rougir jusqu'à la racine de ses cheveux.
— Non, non, non ! Pas dans ce sens-là ! Je voulais dire : la prise de notes pendant le cours !
— Ah ?
— Je ne sais pas ce qui s'est passé entre hier et aujourd'hui, mais Monsieur Aizawa était en pleine forme. Dit-il, repensant à leur professeur quand il était rentré dans la salle de classe pour le cours de théorie. Je suppose qu'il a enfin pu avoir une bonne nuit de sommeil… il était épuisé hier.
Todoroki plissa les yeux, réfléchissant à quelque chose. Quand son visage se relaxa de nouveau, il semblait en être arrivé à sa propre conclusion mais il n'en fit pas part à Izuku.
— Peut-être.
La seule autre explication était néanmoins trop personnelle pour qu'Izuku décide de s'y pencher trop longtemps.
Il n'y avait pas énormément de choses qui puissent faire passer quelqu'un de l'état de quasi-zombie à l'homme pimpant qui avait franchi le seuil de la classe réservée à la seconde A ce matin. Beaucoup de sommeil, être kidnappé et remplacé par un clone, … et dans le cas d'un Ignae : une recharge d'Anima.
En tout cas, quoi qu'il se soit passé, Aizawa avait donné son cours à un rythme très soutenu, forçant Izuku à prendre énormément de notes à la volée. Avec un peu de chance, l'élancement dans son poignet se calmerait d'ici quelques heures, et si pas, sa consultation avec Recovery Girl le lendemain matin réglerait le problème.
— Je t'attends pour partir ? Demanda Izuku, se relevant pour aller poser ses plats vides dans l'évier.
Todoroki en avait presque fini avec son propre repas. A la question d'Izuku, il releva la tête, les sourcils à peine haussés. Il ne s'attendait visiblement pas à ce qu'Izuku lui propose de l'attendre pour aller au cours pratique de l'après-midi.
Jetant un coup d'oeil à l'horloge, il répondit :
— Non, vas-y. J'ai un appel à passer avant de partir.
Il doit vraiment téléphoner à quelqu'un ou bien il veut être un peu tranquille ?
Cette pensée pessimiste lui effleura l'esprit avant qu'Izuku l'en chasse. Vu ce qu'il savait de Todoroki, s'il avait juste voulu être seul, il l'aurait dit clairement.
— OK. A tout à l'heure, alors.
Remontant à sa chambre pour aller enfiler une tenue de sport, Izuku sortit son téléphone de sa poche. Il le sortit de veille, aucune notification ne s'affichant à l'écran, et fronça les sourcils en se mordant la lèvre. Toujours aucune nouvelle de sa mère.
Comme il l'avait déjà fait de nombreuses fois depuis son arrivée à U.A, Izuku composa le numéro de sa mère et porta le smartphone à son oreille. Les tonalités retentirent, toutes plus longues les unes que les autres.
— Vous êtes bien sur la messagerie d-
Izuku soupira, arrêtant de mordiller l'ongle de son pouce qu'il avait porté à sa bouche sans s'en rendre compte pendant qu'il attendait. Les battements de son coeur résonnait dans son crâne, semblant infiniment plus lents qu'ils n'étaient en réalité. L'inquiétude qui le rongeait toujours, même quand il ne pensait pas directement à sa mère, était telle un rongeur coincé dans sa poitrine, grattant sa chair pour s'échapper.
Il n'était pas surpris de n'avoir aucune réponse. C'était la même chose à chaque fois qu'il avait essayé. Hésitant néanmoins à réessayer tout de suite, il fit défiler sa liste de contacts —si courte soit-elle— avant de se figer sur le nom de Namigawa. Izuku laissa son pouce en suspens, se mordillant l'intérieur de la joue, partagé sur la marche à suivre. Un regard à la date sur son écran finit de le convaincre.
Ca ne sert à rien de reculer ce moment…
Ca ne l'enchantait pas, mais il devait mentir. C'était la seule solution.
A Namigawa :
Salut ! Désolé de prévenir maintenant mais ma tante a eu un accident. Je vais aller avec ma mère chez elle pour l'aider dans la maison pendant qu'elle se rétablit. Je ne sais pas pendant combien de temps on va rester là-bas. Désolé pour l'aquarium…
Peu importe qu'il n'ait pas de tante —à sa connaissance—, Namigawa n'en savait rien.
Ses yeux s'agrandirent en voyant « Lu » apparaître presque instantanément sur son message. Dans les secondes qui suivirent, les trois petits points indiquant que Namigawa tapait une réponse ne cessèrent de clignoter comme une guirlande de Noël défectueuse.
De Namigawa :
Salut. Mon dieu, j'espère que ce n'est pas trop grave !
De Namigawa :
Ne t'inquiète pas pour l'aquarium. Ce sera pour une prochaine fois.
Après quelques clignotements supplémentaires, les trois points disparurent, sans aucun nouveau message.
Namigawa et lui ne s'échangeaient jamais beaucoup de messages. Plus souvent qu'autre chose, c'était elle qui le contactait pour parler de révisions mais elle était un peu plus bavarde d'habitude.
Un nouveau coup d'oeil à l'horloge de son téléphone lui indiqua qu'il allait être en retard s'il ne se pressait pas. Aussi, après avoir enfilé sa tenue de sport à la volée, il s'élança dans les escaliers, évitant le temps d'attente possible pour l'ascenseur si Todoroki l'avait pris pour le quatrième étage.
Son poignet, et le reste de son corps, risquaient encore de prendre cher.
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L'entraînement se passa plutôt bien, comparé à tous ceux qui l'avaient précédé. Oui, Izuku avait fini à terre plus d'une fois, mais au moins, il avait réussi à arracher un haussement de sourcils semi-impressionné à Todoroki. Ca en valait donc la peine.
Encore plus quand, au milieu de la séance, Todoroki lui avait fait une critique constructive avant même qu'Aizawa ait pu finir d'ouvrir la bouche.
— Tu télégraphes trop ton mouvement, avait-il dit, avant de l'envoyer au tapis.
Pour une fois debout au bord du terrain, Aizawa avait affiché un air satisfait devant les efforts de Todoroki. C'était encore plus impressionnant à voir avec ses cheveux coiffés en un chignon lâche, sa barbe rasée de près et ses yeux grands ouverts, sans aucune rougeur.
Malgré les ecchymoses à venir, Izuku avait quitté le gymnase Gamma avec le sourire aux lèvres. Lui et Todoroki avaient regagné le dortoir dans un silence confortable, uniquement interrompu par les murmures enthousiastes d'Izuku.
Ils avaient mangé ensemble à nouveau au dîner, Izuku parcourant ses notes de cours pour vérifier que tout était assez clair pour qu'il puisse se relire aisément plus tard. Todoroki l'avait regardé faire en dégustant un plat de nouilles soba, les traits détendus.
Izuku était allé se coucher d'excellente humeur. Il avait dû faire quelques exercices de musculation pour dépenser le sursaut d'énergie qui l'avait envahi après que Todoroki lui ait souhaité une bonne nuit en prenant l'ascenseur. Ca l'avait tellement surpris sur le coup qu'il était resté un instant figé, avant de parvenir à lui répondre dans un bafouillement étranglé à l'instant où la porte se refermait.
Les choses se déroulèrent à peu près de la même façon le lendemain. A ça près qu'Aizawa avait rajouté un nouvel exercice à son entraînement. Exercice auquel Todoroki n'avait pas besoin de participer mais il était néanmoins resté après que leur professeur lui ait dit que son implication était terminée pour la journée. Assis sur l'un des bancs, il avait pu assister à la piètre performance d'Izuku. Cette nouvelle méthode d'entraînement, destinée à améliorer ses réflexes et sa rapidité, avait fini de l'épuiser pour la journée.
Les deux garçons étaient rentrés ensemble aux dortoirs, dans le silence le plus total. Izuku était bien trop fatigué, ne serait-ce que pour songer à dire quelque chose. Si Todoroki n'avait pas été là, il ne savait même pas s'il se serait souvenu du chemin.
Heureusement pour lui, le lendemain était un dimanche : son jour de repos.
Il se leva un peu plus tard que le reste de la semaine, profitant un peu plus longtemps de la chaleur de son lit, emmitouflé dans sa couverture. Dehors, le ciel était toujours gris et l'air humide. Il avait plu durant la nuit mais Izuku avait été bien trop profondément endormi pour s'en rendre compte. Sa fatigue était telle qu'il n'avait pas non plus rêvé de la pièce sombre, ce qui n'était pas pour lui déplaire.
— Salut.
La voix de Todoroki lui fit lever la tête de ses notes. Celui-ci avait l'air encore à moitié endormi, les yeux entrouverts et les cheveux en bataille. Son pantalon de jogging gris et son T-shirt blanc étaient plissés et de travers, comme si ils avaient été enfilés à l'aveuglette. Le tout lui donnait une aura douce et attendrissante, contrastant fortement avec celle qu'il dégageait d'habitude.
— Salut, répondit Izuku, avant de prendre une nouvelle cuillère de ses céréales. Bien dormi ?
— Hn…
Le petit grognement couplé à la manière adorable dont Todoroki plissa le nez firent sourire Izuku. Même si l'autre garçon ne se montrait pas vraiment plus bavard qu'avant l'accident, il était néanmoins beaucoup plus détendu.
— Il devrait y avoir plus d'heures dans une nuit, finit-il par dire, dardant sur une Izuku un regard sérieux, comme s'il venait d'avoir une révélation.
Izuku pouffa, s'étranglant presque avec les céréales qu'il avait encore en bouche.
— Ca va ? Demanda Todoroki, la tête penchée de côté.
La manière dont il avait esquissé un mouvement dans sa direction avant de s'immobiliser n'échappa pas à Izuku.
Poussant son bol de côté —il n'avait pas vraiment faim, de toute façon—, Izuku reprit son stylo en main pour continuer de rédiger sa synthèse. Mieux valait faire les résumés de son cours de théorie au fur et à mesure, plutôt que d'attendre la dernière minute. De plus qu'en une semaine, Aizawa avait déjà couvert énormément de matière, encore plus depuis son récent regain d'énergie.
— C'est passé par le mauvais tuyau. C'est rien.
Todoroki hocha simplement la tête avant de se diriger vers la cuisinière pour y mettre chauffer une bouilloire d'eau.
Au moment de sortir une tasse de l'armoire au-dessus de l'évier, il regarda Izuku par-dessus son épaule :
— Tu veux du thé ?
— Oh, oui, merci !
Izuku sentit ses pommettes chauffer face à la prévenance de son colocataire.
Lorsque l'eau fut assez chaude, Todoroki vint le rejoindre à table, s'asseyant à nouveau sur la chaise en biais par rapport à lui. Izuku n'osa pas lui demander pourquoi il ne prenait pas la place face à lui. Ce n'était pas pour étendre ses jambes en tout cas.
Ils étaient tous les deux en pleine conversation —Izuku étant le principal orateur et Todoroki sirotant son thé calmement—, notes de cours et petit déjeuner oubliés sur le côté, quand Aizawa entra dans la pièce.
Les cheveux toujours coiffés, cette fois en une demi-queue de cheval, et aucune cerne à l'horizon, le professeur les salua avant de demander à s'entretenir avec Izuku.
— A plus tard, dit Todoroki en posant sa tasse vide dans l'évier avant de partir en direction des ascenseurs.
Il n'avait pas l'air particulièrement concerné par le fait qu'on lui ait demandé de quitter la pièce, même si ce n'était qu'implicite. Izuku nota néanmoins l'absence d'un micro-sourire ou d'un simple coup d'oeil dans sa direction. Todoroki avait juste dardé la table d'un regard insondable, puis il s'était levé sans adresser la parole à Aizawa.
Celui-ci l'avait regardé partir, n'ayant pas l'air surpris ou contrarié par la façon dont Todoroki l'avait ignoré à l'instant. Ses yeux sombres semblaient briller d'une émotion qu'Izuku ne put traduire que comme du regret. A quel propos ? Il l'ignorait.
Bien vite, ce même regard se porta vers lui. Ne sachant pas quoi faire devant la posture gardée de son professeur, les épaules tendues et les bras croisés sur le torse, il se redressa dans sa chaise.
Aizawa considéra les places libres autour de la table avant de prendre celle face à Izuku.
— J'ai eu des nouvelles de la police, déclara-t-il, son ton n'annonçant pas de bonnes nouvelles. Le jour de ton arrivée ici, à peine une heure après que nous avons contacté ta mère, une très grosse somme d'argent a été prélevée sur son compte.
Alors qu'Izuku ouvrait la bouche, une tonne de questions lui brûlant les lèvres, il enchaîna :
— Ils ont vérifié les caméras de surveillance de l'automate sur lequel le prélèvement a été effectué. La personne qui l'a fait portait un long manteau noir et un foulard sur la tête. Son visage était en partie caché derrière des lunettes de soleil mais vu sa taille et sa corpulence, ça correspond à la description physique de ta mère.
Le souffle d'Izuku se bloqua dans sa poitrine, son coeur se serrant comme si il allait s'arrêter.
— Elle était seule et la police n'a pas vu de personne suspecte à proximité. Ils ont essayé de la suivre avec d'autres caméras mais elle s'est volatilisée dans la foule au centre-ville. Ils soupçonnent qu'elle ait changé de tenue pour qu'on la repère moins facilement.
Même si après le message qu'elle lui avait laissé, il savait déjà qu'elle était partie d'elle-même, entendre ces mots lui faisait toujours l'effet d'un coup de poignard. Elle l'avait réellement abandonné derrière elle, sans lui donner d'explication.
«Ton Alter n'aurait pas dû se déclarer. »
Pourquoi ?
Il ne comprenait pas sa réaction. Qu'avait-elle exactement à cacher ?
Pourquoi est-ce qu'elle ne m'a rien dit ?
Il s'était toujours montré digne de confiance. Alors pourquoi n'avait-elle pas jugé utile de lui parler de- peu importe ce que ça pouvait être ?
En réalité, la seule raison qui lui venait était qu'elle avait découvert qu'il avait un Alter de mutation Foudre —quand ?— et qu'elle avait eu peur pour sa sécurité, décidant donc de le cacher —comment ?— sans rien lui dire. Pourtant, il n'arrivait pas à croire que sa mère ait pu lui laisser croire qu'il était sans-Alter. Elle savait à quel point ça comptait pour lui. Il allait avoir dix-sept ans et était parfaitement en âge de comprendre.
Elle n'aurait pas fait ça… hein ?
— Je sais que cette situation est difficile pour toi.
Aizawa le regardait attentivement, analysant ses réactions. Les coudes posés sur la table, les mains croisées sous le menton, l'inquiétude se lisait sur ses traits. Nul doute que les yeux d'Izuku devaient être rendus brillants par les larmes qu'il retenait péniblement.
Les mains crispées en poing sur le tissu de son short, Izuku baissa la tête pour cacher son expression. A la périphérie de sa vision, la pièce tanguait légèrement, lui donnant l'impression de vaciller, bien qu'il soit toujours immobile.
Devant lui, Aizawa émit un long soupir avant de continuer :
— Mais si tu te souviens de quoi que ce soit —même si ce n'est qu'un minuscule détail qui te semble suspect avec le recul— il faut que tu me le dises. Ca peut aider la police à la retrouver.
Izuku se mordit la lèvre. Il ne savait pas quoi répondre. Ses pensées se bousculaient dans son esprit, le laissant confus. Enfonçant la tête entre ses épaules, il la secoua :
— Je ne sais pas…
Dans le silence qui suivit, Aizawa soupira de nouveau.
— Tu devrais te reposer quelques heures. Tu as le temps de réfléchir. Ne force pas trop et garde juste ça dans un coin de ta tête. Si quelque chose te revient, on en parlera plus tard.
Quand il eut quitté le bâtiment, Izuku resta au même endroit, fixant le kaki de son short sans vraiment le voir. Il continua à réfléchir, assez longtemps pour que son thé cesse de fumer complètement.
Qu'est-ce que tu me caches maman ?
.
.
Il avait fini par migrer dans le salon, assis dans un coin du canapé, jambes recroquevillées contre son torse. Les bras pliés sur les genoux et le menton appuyé sur ceux-ci, Izuku zappait paresseusement entre les chaînes à la télévision.
Il n'avait pas réussi à se convaincre de finir sa synthèse, préférant ranger ses notes et les laisser sur le bord de la table. Bien qu'il ait fait le tour des programmes plusieurs fois déjà, rien n'avait réussi à capter son attention.
Ce fut ainsi que Todoroki le trouva quand il descendit déjeuner.
— Midoriya ?
Izuku releva la tête, ses yeux se focalisant de nouveau sur ce qui l'entourait. Il força un sourire qu'il savait peu convaincant, mais il n'avait pas l'énergie de faire mieux.
— Oh, Todoroki. Ça va ?
— C'est plutôt à toi qu'il faut demander, fit-il, restant debout derrière le canapé, les mains dans les poches. On dirait que quelqu'un est mort.
Izuku ne se formalisa pas de la manière abrupte dont Todoroki avait prononcé ces mots. Ses yeux gris —bleus— n'exprimaient pas une seule once de malice et son expression était neutre.
Ses cheveux étaient coiffés maintenant, cachant toujours en partie la cicatrice qui entourait son oeil gauche. Il avait enfilé d'autres vêtements : un jean et un pull en grosse maille bien ajusté. Izuku avait chaud rien qu'à le regarder mais Todoroki avait l'air parfaitement à l'aise dans cette tenue.
Izuku déplia ses jambes et se tourna vers lui dans le canapé, le bras posé sur le dossier. Todoroki s'avança, venant s'y appuyer lui aussi. Cette nouvelle position obligea Izuku à pencher la tête en arrière pour continuer à croiser son regard.
— C'est- hum… C'est un peu compliqué, dit-il.
— Compliqué ?
Pour quelqu'un qui n'aimait pas beaucoup qu'on se mêle de ses affaires, Todoroki avait l'air plutôt curieux.
Prenant en considération leur relation jusqu'à récemment, Izuku hésitait à lui répondre. S'il disait qu'il ne voulait pas en parler, Todoroki pourrait le prendre mal —surtout qu'Izuku s'était lui-même montré bien curieux en premier— mais en même temps, il ne tenait pas à lui déballer toute l'histoire maintenant.
Todoroki s'en rendit compte lui-même, à en juger par la manière dont ses yeux s'agrandirent.
— Tu ne veux pas en parler.
Avec un sourire gêné, Izuku s'empressa de répondre :
— Pas tout de suite… mais peut-être un autre jour ?
Izuku ne savait pas à qui entre lui et l'autre garçon il adressait l'interrogation mais Todoroki sembla s'en contenter.
— Qu'est-ce que tu regardes ?
Il avait orienté le haut de son corps vers l'écran de TV, un sourcil arqué en signe d'interrogation. N'ayant absolument aucune idée du programme sur lequel il s'était arrêté en dernier, Izuku l'imita.
— Un… documentaire sur la porcelaine… apparemment ?
— Ah. Je comprends mieux l'air dépité alors.
Izuku cligna lentement des yeux.
Il… vient de faire une blague ?
— Peut-être, répondit Todoroki, imperturbable en s'éloignant du canapé d'un coup de hanche.
Une fois la surprise passée, et la bouche d'Izuku refermée, celui-ci éclata de rire. Il se laissa tomber contre les coussins, en se tenant le ventre et une main sur la bouche.
Le tumulte d'émotions négatives qui l'avait maintenu dans un état semi-végétatif jusque-là venait de s'alléger soudainement. Comme un nuage noir qui laisse place à un soleil timide.
D'un revers de la main, Izuku essuya les larmes de rire qui avaient perlé au coin de ses yeux. Le temps qu'il se calme, Todoroki était parti s'installer à la cuisine pour dîner. Même si l'estomac d'Izuku ne réclamait toujours pas de nourriture, il rejoignit son colocataire à table.
Il n'y avait pas d'entraînement aujourd'hui, mais ça ne voulait pas dire qu'il n'avait pas besoin d'énergie. Aussi, Izuku se fit cuire du riz —en proposant un bol à Todoroki au passage— et sortit une boîte de sardines du frigo. Todoroki accepta le riz mais plissa le nez en voyant la conserve de poisson. Son expression —celle d'un enfant à qui on sert des légumes verts— arracha un nouveau sourire à Izuku. Ces petites mimiques lui donnaient un côté attachant qui tranchait totalement avec son attitude froide et distante.
— Tu as quelque chose de prévu cet après-midi ?
Tout en posant sa question, Izuku resta concentré sur ses baguettes et son repas. C'était difficile de savoir comment Todoroki allait le prendre. Izuku voulait juste se changer les idées mais sans pour autant lui faire croire qu'il comptait lui imposer sa présence alors qu'ils n'avaient pas de cours pratiques pour aujourd'hui. Même si Izuku n'était pas du tout contre l'idée.
— Pas vraiment. Répondit simplement Todoroki, sur un ton neutre. J'irai sûrement à la salle.
— La salle ?!
Izuku avait relevé la tête si vite que le riz qu'il était en train de porter à sa bouche atterrit sur la table. Avec un rire nerveux, il s'empressa de le ramasser avec ses baguettes et de l'avaler avec un sourire embarrassé.
Todoroki continua de le regarder comme si la scène n'avait pas eu lieu, concentré plus particulièrement sur le coin de sa bouche.
— Tu as un grain de riz, dit-il, sans aucune inflexion.
— Ah ? Où ça ?
Si Izuku s'attendait à ce que Todoroki lui indique l'endroit exact en utilisant son visage comme un miroir, ça n'était visiblement pas ce que ce dernier avait compris. Il leva sa main libre et la tendit vers Izuku sans la moindre hésitation.
Ses doigts effleurèrent la joue d'Izuku en s'emparant du grain fugitif. La sensation de chaleur inattendue sur sa peau provoqua un léger frisson dans tout le corps d'Izuku.
— Là, dit Todoroki en brandissant son butin à quelques centimètres de son visage, faisant presque loucher Izuku pour le regarder.
La surprise laissa bien vite place à des picotements à l'endroit exact où le contact avait eu lieu et Izuku ne put s'empêcher de sourire largement. Une bouffée de joie traversa son corps, propageant avec elle une douce chaleur agréable, semblable à celle des doigts de Todoroki.
C'était la première fois, en dehors d'un combat, que l'autre garçon le touchait volontairement. C'était aussi la première fois qu'il le faisait avec une expression aussi… normale. Comme si le fait de toucher Izuku ne l'avait pas dérangé le moins du monde.
Il ne doutait pas qu'il devait avoir l'air idiot avec un sourire pareil, juste pour un grain de riz. Mais Todoroki ne dit rien à ce sujet, son regard fixement ancré sur le visage d'Izuku, les yeux écarquillés légèrement. Il se tenait toujours dans la même position : bras tendu au-dessus de la table.
Son immobilité finit par inquiéter Izuku.
— Hm, merci pour-
Il fit un geste vague en direction de son visage :
— -le coup de main.
Un rire nerveux lui échappa alors qu'il se grattait l'arrière de la nuque, un peu gêné d'être observé aussi longuement.
Le bruit sembla sortir Todoroki de ses pensées. Il rétracta lentement son bras, regardant sa main avec un air interrogatif. Lui-même devait être surpris par son geste.
Izuku s'empressa de se lever et de lui ramener une serviette.
— De quel genre de salle est-ce que tu parlais ?
— La salle de sport, répondit Todoroki distraitement en s'essuyant les mains. Celle au sous-sol.
— Il y a une salle de sport au sous-sol ?!
Todoroki leva les yeux vers lui, un sourcil haussé :
— C'est ce que j'ai dit…
Sentant ses joues chauffer, Izuku se dépêcha d'enchaîner :
— Dans le bâtiment principal ?
— Non, celle de notre dortoir. Il y a en une pour chaque classe. Elles ne sont pas énormes mais c'est déjà pas mal.
— Est-ce que…
L'idée de pouvoir faire des exercices en dehors de sa chambre pour une fois était particulièrement tentante. Mais est-ce que Todoroki accepterait qu'il l'accompagne ? Ou alors, au pire, il pourrait toujours attendre que l'autre garçon ait terminé avant de descendre à la salle.
Tout en se mordillant la lèvre, les jambes tressautant sur place, il continua :
— Ça te dérangerait si je venais avec toi ?
— Aucun problème.
Il ne lui avait même pas fallu deux secondes de réflexion avant de répondre.
— Génial, soupira Izuku, soulagé d'entendre une réponse positive.
Il y avait une nette amélioration dans leur relation. Et bien qu'ils n'en soient pas au stade de pouvoir faire un marathon de l'intégrale de One Justice tous les deux dans un fort de couvertures, Izuku prendrait volontiers ce que Todoroki voudrait bien lui donner.
.
.
Quand Todoroki avait dit 'pas énorme' en parlant de la salle de sport, Izuku ne s'était pas attendu à une pièce d'au moins vingt mètres carrés. Encore moins à une dizaine d'appareils de musculation, ainsi qu'un espace cardio avec des tapis de course et des vélos elliptiques.
Le mur du fond n'était qu'un énorme miroir qui donnait une impression de profondeur encore plus forte à l'espace. Devant se trouvait une zone sans machine ; juste quelques tapis au sol et des bancs d'exercice agrémentés d'un cuir noir rembourré. Perpendiculairement à ce miroir, il y avait une énorme étagère en métal remplie d'une collection variée d'haltères et de poids différents.
C'est… wow…
Todoroki, déjà plus loin dans la salle, lui jeta un regard par-dessus son épaule, sac de sport sur l'autre et une main dans sa poche de pantalon.
La bouche grande ouverte, Izuku s'était arrêté à l'entrée, son regard faisant des allers-retours entre tous les équipements disponibles et- est-ce que c'était un distributeur de boissons énergisantes ?!
— Tu- tu appelles ça 'pas énorme' ?! Dit-il, sa voix montant dans les aigus sans son consentement.
Todoroki lança un regard circulaire à la pièce, les sourcils à peine froncés, comme si il ne comprenait pas où Izuku voulait en venir.
Oh… en tant que fils du Numéro 2, il doit être habitué à plus.
Vu la relation compliquée que semblait avoir Todoroki avec son père, Izuku préféra garder cette révélation pour lui. Il balaya l'air de la main quand son colocataire se tourna vers lui, l'interrogation claire dans ses yeux gris.
Une fois leurs affaires posées dans l'un des casiers ouverts à disposition près de la porte d'entrée, les deux se dirigèrent d'un commun accord vers les tapis de course. Izuku prit place sur le sien, posant sa serviette sur l'une des barres latérales.
Il n'avait jamais mis les pieds dans une vraie salle de sport, et encore moins une avec du matériel aussi sophistiqué. La multitude de boutons sur l'écran de l'appareil le laissait hésitant sur la marche à suivre, bien que les indications sur certains d'entre eux parlent d'elles-mêmes.
Voyant qu'il fixait bêtement la console de contrôle, Todoroki se pencha vers lui, son propre tapis étant déjà en route, le poussant à adopter un rythme de marche rapide pour s'échauffer.
— Il y a un souci, Midoriya ?
— Heu… Je ne sais pas trop…
Il désigna la console en général avant se gratter la joue de l'index, se sentant idiot.
Todoroki ne s'en formalisa pas. Il grimpa sur les rebords de son propre tapis pour rester immobile en faisant sa manipulation puis il démarra celui d'Izuku. Tout en le faisant, il lui expliqua les différentes fonctions disponibles et programma la machine sur le même mode que lui.
— Attention, il va se mettre en route.
L'écoutant attentivement, Izuku hocha la tête, prêt à marcher dès que nécessaire. Il envoya un sourire reconnaissant à Todoroki alors que celui-ci se redressait. Le mouvement créa un courant d'air furtif, portant une odeur de fraise aux narines d'Izuku. Son sourire s'élargit davantage en comprenant que ça devait venir des cheveux de Todoroki.
Ils restèrent une demi-heure sur les tapis, augmentant la vitesse et la hauteur de la pente au fur et à mesure. Dès qu'ils avaient commencé à trottiner, Todoroki avait mis ses oreillettes et n'avait plus dit un mot. Cependant, ce silence n'avait pas mis Izuku mal à l'aise. L'autre garçon ne cherchait pas à l'ignorer, alors Izuku n'essaya pas d'entamer la discussion.
Il était déjà plus qu'agréablement surpris qu'ils soient là, tous les deux, et que Todoroki soit prêt à l'aider sans qu'il n'ait eu à lui demander.
Après leur séance de cardio, ils firent un tour des différentes machines, Todoroki faisant une démonstration à chacune d'elle pour qu'Izuku sache comment les utiliser correctement. Ils finirent tous les deux à des coins opposés de la pièce, plus par coïncidence que par un désir de s'ignorer.
Deux heures plus tard, Izuku se sentait assez fatigué pour passer une bonne nuit. Ses muscles étaient assez douloureux pour savoir qu'il avait bien travaillé mais pas assez pour qu'il soit courbaturé le lendemain.
Près des miroirs, Todoroki était installé sur un des bancs, prêt à soulever une barre chargée de quelques disques ayant l'air suffisamment lourds pour qu'Izuku s'inquiète. Ne songeant même pas au fait que Todoroki pourrait mal le prendre, il traversa la salle, zigzaguant entre les machines, et vint se poster à hauteur de la tête de celui-ci.
— Un coup de main ?
La tête en bas, Todoroki le regarda, les sourcils haussés. Il cligna lentement des yeux, les mains déjà posées sur la barre pour la soulever des encoches.
Même si il n'avait encore rien dit, Izuku se sentit obligé d'enchaîner :
— Je sais que tu as l'habitude de t'entraîner tout seul mais- hum, c'est dangereux de faire ça tout seul. Je peux t'assurer ?
Le regard appuyé en direction des bras d'Izuku suivi d'un haussement de sourcil, cette fois dubitatif, l'irrita un instant mais il chassa le sentiment rapidement. Après tout, il n'avait pas brillé par ses compétences physiques jusqu'ici. Et ce n'était pas comme si Todoroki avait surveillé le nombre de kilos qu'il avait soulevé sur chaque machine.
— J'ai plus de force que j'en ai l'air, se contenta-t-il de dire, un sourire assuré collé aux lèvres.
— … d'accord.
De toute façon, il n'avait pas grand-chose à y perdre. Il n'y avait personne d'autre qu'Izuku ici et Todoroki comptait le faire seul à la base.
Jetant un coup d'oeil aux nombres indiqués sur les poids, Izuku ne doutait pas de pouvoir les soulever en cas de besoin.
Todoroki se mit à enchaîner les répétitions par suites de vingt. Il n'avait pas l'air essoufflé plus que ça, même si il gardait les yeux fermés, les sourcils froncés. Izuku n'avait pas l'habitude d'être dans cette position. Il n'avait jamais assuré personne auparavant et l'angle que lui offrait sa position était… intéressant —à défaut d'un meilleur mot.
Les cheveux de Todoroki étaient collés sur son front —peut-être un peu plus du côté rouge que du côté blanc ?—, une ride de concentration barrant celui-ci. Les muscles de ses bras se contractaient et se décontractaient sous l'effort. C'était la première fois qu'Izuku le voyait avec un haut sans manche et il était assez satisfait de voir que leurs musculatures à ce niveau n'étaient pas très différentes. Mais avec un Alter comme le sien, Todoroki n'avait pas besoin de beaucoup plus. Izuku, quant à lui… et bien, ça restait encore à définir.
Quand il se concentra de nouveau sur le visage de Todoroki, celui-ci avait les yeux ouverts. Bien qu'il n'ait rien fait de mal, Izuku détourna la tête, sa nuque soudainement devenue brûlante.
— Je- je me demande si Aizawa va trouver un nouvel exercice pour demain, bredouilla-t-il pour combler le silence.
— Hn, possible.
Le bruit du métal s'entrechoquant attira l'attention d'Izuku. Todoroki venait de reposer la barre et était maintenant assis, en train de s'essuyer le visage avec sa serviette.
— Je ne t'aide pas, demain.
— Ah… ?
Todoroki dut voir à quel point la question lui brûlait les lèvres parce qu'il réfléchit un instant avant de finalement lui donner plus de détails.
— J'ai une visite familiale.
Ses traits détendus et son ton neutre eurent le mérite d'indiquer à Izuku que le visiteur ne devait pas être Endeavour.
— C'est chouette, répliqua-t-il, combattant la boule qui venait de lui nouer la gorge.
Si Todoroki avait remarqué la manière dont il s'était crispé, il n'en laissa rien paraître.
— Tu as terminé ? Demanda Izuku, pour être sûr, pointant du menton le banc de musculation.
Il acquiesça avant de partir vers l'endroit où il avait abandonné sa bouteille d'eau.
Voulant chasser les pensées négatives qui venaient de pointer à nouveau le bout de leur nez, Izuku s'empressa de commencer ses étirements. Grâce à Namigawa et aux échauffements qu'elle lui avait montrés pour ses cours de danse, Izuku était plutôt souple. Il devait donc pousser un peu plus pour sentir que ses étirements étaient efficaces. Face au miroir, les jambes écartées, il tendit les bras pour se grandir un maximum avant de se pencher en avant. Il souffla longuement en venant poser ses avants-bras sur le tapis, jetant un oeil devant lui pour s'assurer que son dos était bien droit.
La douce sensation de douleur à peine perceptible provoquée par l'exercice le fit soupirer d'aise, lui donnant de quoi se concentrer sur autre chose que les pensées liées à sa mère. Il écarta un peu plus les jambes, content d'avoir enfilé un legging. Un short n'aurait peut-être pas apprécié l'expérience.
Il allait commencer à se redresser, quand un gros craquement de plastique résonna derrière lui, suivi d'un hoquet de surprise. Le bruit soudain le fit sursauter et il se laissa tomber à quatre pattes, tournant la tête vers son origine.
Les yeux écarquillés, bouche entrouverte, Todoroki fixait la bouteille écrasée dans sa main et dégoulinant encore de l'eau qui avait débordé sous la pression. Une petite flaque d'eau s'étendait à ses pieds, ayant éclaboussé l'avant de ses baskets blanches.
— Todoroki ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
— Je… l'ai écrasé… ?
La manière profondément stupéfaite dont il regardait la bouteille, comme si il ne comprenait pas ce qui venait de se produire, eut tôt de faire éclater de rire Izuku. Il bascula de côté et dût se tenir les côtes, envoyant un regard d'excuse à Todoroki entre deux crises de rire.
Celui-ci n'était pas contrarié le moins du monde, bien trop occupé à analyser la scène du crime, totalement perdu. Il s'arrêta sur la bouteille à nouveau, plissant les yeux.
Cette expression suspicieuse suffit à faire rire Izuku de plus belle.
— Par les Quatre, T-Todoroki… ahahah, qu'est-ce que- qu'est-ce que cette bouteille t'avait fait ? Ahah !
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.
Le lundi, malgré une longue nuit de sommeil, Izuku était aussi fatigué que s'il n'avait pas dormi. Il avait commencé sa nuit en rêvant de Musutafu —pourquoi cette ville, alors qu'il n'y habitait plus depuis des années ?—, le soleil couchant pour seule compagnie alors qu'il cherchait sans relâche sa mère dans les rues désertes. Chaque fois qu'il lui semblait apercevoir sa frêle silhouette au loin, elle disparaissait avant qu'il puisse s'en approcher.
Il avait presque été soulagé quand il s'était retrouvé dans la pièce sombre habituelle. Le changement de paysage avait été si brusque, —un instant à l'entrée du parc de son enfance, celui d'après face à un vide obscur éclairé de minuscules lumières statiques— qu'il n'avait pas eu le temps de fermer les yeux.
Adossé à la paroi invisible, et transparente encore une fois, se trouvait le même garçon que l'autre fois. Il était assis, la tête baissée. Ses épaules dénudées étaient tendues et sans vraiment comprendre pourquoi, Izuku pensa qu'elles semblaient plus larges que celles de Todoroki. De là où il se tenait, Izuku ne distinguait pas grand-chose de plus.
Comme il avait de toute façon déjà regardé, Izuku avait décidé de s'avancer vers la paroi sans essayer d'en voir davantage mais en gardant néanmoins les paupières ouvertes. Il s'était appuyé dos au mur et, sûrement à cause du sentiment de solitude intense qui l'habitait encore du rêve précédent, il avait tendu le bras pour poser le flanc de sa main contre le mur invisible.
Il n'avait pas pu détacher son regard de cet endroit, attendant quelque chose tout en sachant que c'était en vain. Du moins, jusqu'à ce que, timidement, une autre main vienne joindre la sienne de l'autre côté de la paroi. Bien que leurs doigts ne se touchaient pas vraiment, Izuku avait senti une onde de chaleur envahir sa main.
Le tumulte d'émotions contradictoires qui l'avait accompagnée restait encore un mystère pour Izuku maintenant qu'il était réveillé.
Mais cette impression d'avoir oublié quelque chose ? Elle lui était revenue en pleine figure. Tout ça ne l'avait pas aidé à passer une bonne nuit et maintenant, il en payait le prix.
— Midoriya, trop lent.
Comme venait si justement de le faire remarquer son professeur, Izuku n'était pas assez réactif. L'impact du projectile sur l'arrière de sa cuisse lui fit plier le genou et presque tomber au sol. Il grimaça en sentant le poids de la boule collante obsidienne augmenter en même temps qu'elle grossissait, attachée fermement à sa jambe. Trois de ses petites copines étaient déjà accrochées à lui, le ralentissant bien assez sans que celle-ci vienne leur donner un coup de main.
Aizawa avait introduit cet exercice deux jours plus tôt seulement, et Izuku le détestait déjà. Pour entraîner ses réflexes —ce qui n'était pas optimal avec un seul adversaire—, son professeur avait décidé qu'il fallait sortir l'artillerie lourde.
Et pour être lourde, elle est lourde…
De gros canons, d'ordinaire cachés derrière de grandes plaques de béton, occupaient tous les murs du gymnase. Ils crachaient aléatoirement de petites boules noires comme du charbon, pas plus grandes que le poing d'Izuku, qui adhéraient à toutes les surfaces. Dès qu'elles entraient en contact avec quelque chose, elles se mettaient à gonfler jusqu'à trois fois leur taille.
Le but d'Izuku ? Traverser le terrain entier deux fois, un aller-retour, en maximum vingt minutes. La difficulté était que chaque nouveau projectile qui l'atteignait le rendait de plus en plus lent. Il fallait aussi éviter toutes les boules déjà au sol, sous peine d'y rester collé comme une mouche sur de la glu. Izuku en avait malheureusement déjà fait l'expérience plusieurs fois.
— Douze minutes, annonça Aizawa sur un ton contrarié.
Izuku calcula la distance qui le séparait de sa destination.
A moins d'un miracle, il n'y arriverait pas. Il ne lui restait que huit minutes et il n'avait même pas complété l'aller.
Un nouveau projectile vint se greffer sur le précédent, le forçant à tirer sa jambe derrière lui pour continuer de progresser. Les deux boules pesant lourdement sur son dos lui avaient presque fait considérer l'idée d'enlever son T-shirt pour s'en délester. Une d'elle était cependant accrochée à son T-shirt et à son pantalon.
— Treize minutes, soupira la voix de son professeur, quelque part sur la gauche.
Difficile de voir où exactement, avec la boule qui était collée de ce côté de sa tête. Sa nuque ne le remerciait d'ailleurs pas pour ce qu'elle était en train de subir.
Vu son état de fatigue, c'était étonnant qu'il n'ait été touché que cinq fois —six ? Six fois. En plein sur la hanche, cette fois. Le nouvel ajout de poids du côté de sa jambe handicapée le fit tituber de côté, manquant de justesse deux nouveaux projectiles.
Avec un dernier regard pour le mur qu'il était censé toucher pour valider la première partie de l'exercice, il serra les poings. C'était rageant de voir sa destination si près et pourtant si loin. Ses mâchoires étaient contractées à s'en faire grincer les dents alors qu'il tentait péniblement de parcourir les derniers mètres qui l'en séparaient.
Il esquiva tant bien que mal une nouvelle salve, refusant de s'avouer vaincu sans avoir au moins essayé. La masse sur sa tête le déséquilibrait, l'empêchant de contrôler ses mouvements comme il l'aurait voulu. Il suait à grosses gouttes, éreinté par les cinq précédentes tentatives qui s'étaient toutes soldées par un échec, bien que pas aussi retentissant que celui qui s'annonçait.
Dans la périphérie de son champ de vision, après avoir tourné la tête, il vit Aizawa regardant sa montre, visiblement prêt à mettre fin à l'exercice.
Alleeez !
Heureusement que Todoroki n'était pas là pour voir ça.
La gorge aussi sèche que le désert, Izuku tenta en vain d'avaler un peu de salive. Il essuya la transpiration qui lui dégoulinait dans les yeux d'un revers de bras, lui aussi tout aussi humide. Alors qu'il rabaissait son bras, sa vue à nouveau dégagée, la pièce tangua. D'un mouvement brusque, il bougea le pied pour se tenir droit, son vertige manquant de lui faire rendre son déjeuner.
— Je pense qu'on va s'arrêter-
La voix d'Aizawa lui paraissait lointaine, noyée par le sifflement aigü qui lui vrillait les tympans.
Dans un dernier élan de persévérance, Izuku leva les yeux, fixant le mur derrière ses paupières à moitié closes.
Allez. Allez ! ALLEZ !
Son prochain pas en avant fut le dernier. Sa vision, devenue floue, lui donna un haut-le-coeur et il tendit la main en avant pour se rattraper en sentant tout son corps basculer vers l'avant.
Il se heurta violemment au mur, le froid du béton agissant comme un relaxant pour ses pauvres muscles endoloris.
… le mur ?
Des pas précipités retentirent derrière lui mais Izuku ne pouvait que fixer le mur contre lequel il était affalé, à bout de souffle. Il y avait pourtant bien dix mètres entre lui et ce même mur à peine un instant plus tôt.
Qu'est-ce qui vient de se passer ?
— Midoriya, comment est-ce que tu te sens ? Ça va ?
Il se contenta d'hocher la tête, hébété. Aizawa le força à se tourner vers lui, ses gestes doux malgré tout. Il le détailla de la tête aux pieds, faisant un état des lieux complet en quelques secondes. Izuku ne devait pas avoir l'air en si mauvais état que ça parce que l'inquiétude dans le regard sombre du professeur s'atténua.
— Je crois bien que c'est fini pour aujourd'hui. Mais félicitations, on dirait bien que tu as pu utiliser ton Alter.
Si Izuku avait eu plus d'énergie en réserve, il aurait sûrement fait un bond en l'air. A la place, il ne put que sourire largement, les yeux s'embuant de larmes à ces simples paroles.
— C'est vrai ? … Je veux réessayer.
— On verra ça demain, enfant à problèmes. Tu n'es plus en état.
Izuku n'aurait su dire si le « bien sûr que si » qu'il avait voulu rétorquer avait réellement franchi ses lèvres ou non, avant qu'il ne sombre dans l'inconscience.
.
.
Todoroki était déjà à table quand Izuku rejoignit les dortoirs après quelques heures de repos à l'infirmerie. Recovery Girl l'avait tout simplement laissé dormir puisque son état de fatigue était la cause principale de son passage auprès d'elle. Il y avait bien les bleus énormes laissés par les projectiles au moment de l'impact mais il s'y habituerait.
Izuku alla s'asseoir en face de Todoroki, se laissant tomber sans grande délicatesse sur sa chaise.
— Séance difficile ? Demanda ce dernier, après avoir avalé un morceau d'omelette roulée.
Toujours fatigué, Izuku posa sa joue sur la table, les bras ballants.
— Oui.
— Alors pourquoi est-ce que tu souris comme ça ?
Comme si ce n'était pas assez clair, Todoroki pointa la bouche d'Izuku avec ses baguettes, un nouveau morceau d'omelette pincé entre celles-ci.
Izuku regarda l'omelette avec envie, son estomac jugeant bon de s'exprimer bruyamment au même moment. Son colocataire éloigna les baguettes ainsi que le reste de son repas dans un geste protecteur. L'absence d'animosité sur ses traits accentua le sourire d'Izuku.
— J'ai utilisé mon Alter, déclara-t-il, avec une pointe de fierté.
D'accord, il ne l'avait pas vraiment fait volontairement. Mais c'était quand même la première fois que son Alter se manifestait depuis sa rencontre avec Sludge ; ça devait compter pour quelque chose.
— Tu as fini avec les neurones frits ? C'est pour ça que tu as été à l'infirmerie ?
Izuku se redressa, croisant les bras sur la table, avant de pencher la tête de côté.
— Hein ?
Ca a l'air plutôt… spécifique ?
— C'est ce qui se passe quand Kaminari utilise un voltage trop élevé, expliqua Todoroki, un bras toujours enroulé autour de son repas.
— Oh, Kaminari, l'autre personne avec une Ascendance de mutation Foudre ?
Penché en avant, Izuku darda un regard brillant de curiosité sur Todoroki. Aizawa ne lui avait pas dit grand-chose au sujet de l'autre élève qui partageait sa situation.
Il avait vraiment hâte de le rencontrer et d'en apprendre davantage au sujet de leur Ascendance si rare. Qui pourrait mieux l'aider à comprendre son Alter que la personne qui en avait un de la même nature ?
Todoroki hocha la tête après un instant d'hésitation. Il n'avait pas l'air de vouloir approfondir le sujet. Alors qu'il avalait un morceau de poivron pané —un moyen sûr de ne pas avoir à parler—, Izuku décida de dévier un peu la conversation.
— Aizawa dit que j'ai fait une espèce de déplacement éclair. J'étais debout au milieu de la pièce puis pouf ! - j'étais contre le mur. Je ne me rappelle pas bien de ce qui s'est passé mais j'ai hâte de pouvoir le refaire ! La dernière fois, j'avais électrocuté le Vilain qui était en train de m'attaquer… du coup, ça veut dire que je sais peut-être encore faire d'autres choses avec mon Alter ! Ce serait trop cool ! J'ai hâte de-
— Tu es un vrai moulin à paroles quand tu veux, intervint Todoroki, sur un ton parfaitement plat.
Son visage n'exprimait aucune émotion en particulier.
« Ferme-la, Deku ! Personne ne veut t'entendre marmonner comme un cinglé. »
Mal à l'aise, Izuku se recula sur son siège, tête rentrée dans les épaules. Tout en se frottant distraitement le bras, il murmura des excuses.
Un raclement sur la table en bois attira son attention. Izuku jeta un regard à Todoroki par-dessous ses mèches ; celui-ci avait poussé son plateau vers lui, encore à moitié rempli.
— Je n'ai jamais dit que ça me dérangeait, dit-il, poussant un peu plus son dîner vers Izuku.
Il n'y avait pas de raison apparente pour que Todoroki ait utilisé son Alter, et pourtant, Izuku était sûr qu'il ne faisait pas aussi chaud dans la cuisine quelques secondes plus tôt.
Izuku laissa ses lèvres s'étirer en un sourire timide. Comme il n'avait pas de paire de baguettes à portée de main, il se dirigea vers un onigri, d'un geste peu assuré.
— Merci, bredouilla-t-il avant de prendre sa première bouchée.
Todoroki attendit qu'il ait avalé son morceau pour recommencer lui aussi à manger. Il ne déplaça pas le plateau, le laissant trôner entre eux, comme une invitation.
Izuku ne s'attendait pas à une si bonne fin de soirée pour cette journée.
.
.
Vu ce qui s'était passé la veille, Izuku était remonté à bloc au début de son entraînement du lendemain. Comme Todoroki était disponible, ils avaient commencé par la séance de combat au corps-à-corps habituelle.
Izuku avait pu constater avec joie qu'esquiver les attaques de Todoroki devenait de moins en moins difficile, même si répliquer restait une autre paire de manches.
Pour son plus grand bonheur, Todoroki continuait de lui dispenser ses conseils, par-ci, par-là. Aizawa avait l'air d'apprécier le changement dans leur dynamique parce qu'il intervenait rarement, n'hésitant plus à sortir pour décrocher son téléphone, par exemple.
Quand était arrivé le moment de passer à l'exercice des projectiles, Todoroki était retourné aux dortoirs. Il avait dit être fatigué et s'était éclipsé après avoir obtenu l'accord de leur professeur. Izuku avait été un peu déçu en le voyant quitter le gymnase. Mais Todoroki avait mieux à faire que regarder Izuku se faire coller au sol par un amas de boules noires.
Et par les Quatre, ça n'était pas arrivé qu'une fois. Quelque part vers sa sixième tentative, il avait été recouvert de tant de projectiles qu'on aurait dit qu'un camion avait déversé une cuve de goudron sur lui.
Son Alter refusait obstinément de se manifester. Ils en étaient maintenant à la tentative numéro onze et le mieux qu'Izuku avait pu faire était d'arriver à la moitié du trajet retour au moment où le timer de vingt minutes avait sonné.
Il était fatigué —pas autant que le jour précédent, mais assez pour que l'image mentale de son lit soit des plus attrayantes. Une bonne douche brûlante ne ferait pas de mal à ses pauvres muscles endoloris et il devrait faire une croix sur la salle de sport pour ce soir.
— Essaye de te rappeler ce que tu as ressenti hier, dit Aizawa, distraitement.
Entre deux esquives, Izuku lui jeta un coup d'oeil par-dessus son épaule. Le professeur était assis sur l'un des bancs, près de l'entrée du gymnase, le devoir qu'Izuku lui avait rendu le matin-même entre les mains. Un bic rouge derrière l'oreille, il lisait attentivement, comme s'il ne s'attendait pas un seul instant à ce qu'Izuku fasse quelque chose de remarquable.
Sentant une pointe d'agacement monter en lui, Izuku pinça les lèvres. Sa distraction lui valut une boule en plein milieu du dos qui le déséquilibra, manquant de le faire tomber en avant s'il n'avait pas avancé une jambe sur laquelle s'appuyer assez vite. Le choc lui avait coupé le souffle un instant mais ce n'était rien auquel il ne soit déjà habitué. Il se reprit rapidement, continuant à avancer autant que possible pour se rapprocher de son but.
Quelque chose s'agitait dans sa poitrine, tentant de prendre plus de place que ce que sa cage thoracique ne le permettait. Une bouffée d'irritation le fit serrer les dents, ses poings se serrant si fort que ses ongles s'enfonçaient dans sa peau, sans pour autant la transpercer.
Son bras gauche pendait inutilement le long de son corps, presque entièrement avalé par plusieurs projectiles qui avaient fusionné ensemble. Leurs poids conjugués lui donnaient l'impression que son épaule allait finir par se déboîter, ajoutant ainsi une douleur inutile à celle qu'il ressentait déjà.
Il ignorait combien de temps il lui restait pour finir l'exercice ; le trajet retour presque au complet. Aizawa n'ayant pas entamé le décompte des minutes, il devait encore lui en rester au minimum dix. Sauf si, bien sûr, le héros était trop occupé pour se soucier du timer sur son téléphone.
Izuku fronça les sourcils, prenant une profonde inspiration. Les projectiles continuaient de pleuvoir, de plus en plus durs à éviter avec la fatigue qui s'installait. Il fallait qu'il fasse quelque chose. Il ne lui restait que deux semaines avant la rentrée. Deux semaines pour faire ses preuves, avant qu'Aizawa ne décide de l'envoyer en première.
Il s'immobilisa, ignorant au passage la boule qui heurta son épaule. Ses yeux verts, assombris par la frustration, se plantèrent sur le mur opposé. La créature qui s'agitait sous ses côtes se figea soudainement, comme un félin ayant trouvé sa proie. De nouveaux projectiles vinrent se greffer sur ses vêtements et sur sa peau ; un sacrifice auquel il devait consentir. Izuku ferma les yeux, visualisant l'endroit exact où il voulait être.
Le mur.
Il prit une nouvelle inspiration, la laissant gonfler ses poumons. Distraitement, il nota que le bruit des canons s'était tu, mais il ne s'en préoccupa pas.
Le mur.
Kacchan avait toujours dit et répété qu'il pouvait être le meilleur parce qu'il « savait » qu'il l'était. Il ne doutait jamais de ses capacités.
Le mur.
Avec toute l'assurance qui l'habitait, il tendit une main devant lui et fit un pas en avant. La seconde qui s'égraina pendant son mouvement lui parut infiniment plus longue… jusqu'au moment où son corps percuta le mur dans un choc douloureux qui le fit tomber sur les fesses.
— Oow, gémit-il, une main sur son front qui avait pris le plus gros du choc.
Des courbatures et une migraine. Fantastique !
— On arrive enfin à quelque chose, fit Aizawa.
Son professeur était debout à côté de lui, une main tendue pour l'aider à se relever. Izuku l'accepta volontiers, encore un peu sonné par sa violente rencontre avec le béton. Sa tête lui faisait mal mais ce n'était pas insurmontable. Il savait maintenant ce que devait ressentir une cloche d'église aux heures piles.
Sur les parois de la pièce, tous les canons étaient au repos. Les projectiles étaient quant à eux toujours actifs, boursouflés et collés à leurs points d'impact autour du gymnase et sur Izuku.
— Mais est-ce que tu peux le refaire ? Demanda Aizawa, sourcil levé.
Il sortit la télécommande de contrôle de sa poche et désactiva les sphères. Instantanément, celles-ci se résorbèrent pour reprendre leur taille d'origine, tombant au sol avant de rebondir paresseusement jusqu'à la trappe au pied du mur. Quand elles s'y furent toutes engouffrées, le clapet se referma, se fondant avec le reste de la paroi.
Izuku soupira d'aise, roulant des épaules et moulinant des bras pour chasser la lourdeur qui s'y était installée. Aizawa le regarda faire, ses yeux sombres semblant calculer la marche à suivre.
— On va procéder autrement, dit-il, se massant la nuque d'une main. Il faut qu'on avance plus vite.
L'heure qui suivit fut dédiée uniquement à son Alter. Aizawa voulait qu'il arrive à l'utiliser avec aisance, sans prendre cinq minutes à l'activer. Pour ce faire, le héros avait utilisé une craie pour tracer des croix blanches à différents endroits dans le gymnase. Suivant ses indications, Izuku devait se déplacer sur la croix demandée.
Si ça avait été compliqué au début, il avait assez rapidement maîtrisé la technique, en répétant le processus qu'il avait utilisé plus tôt. Restait cependant que l'arrivée n'était pas parfaite. Il n'avait réussi qu'une seule fois à finir son mouvement parfaitement sur la croix ; le reste du temps, il la manquait de peu.
— Je n'arrive pas très bien à visualiser, admit-il à Aizawa quand celui-ci lui demanda ce qu'il pensait être le souci.
— Explique-toi.
— Pour me déplacer, je m'imagine à l'endroit exact où je veux apparaître. Mais les croix ne sont pas toutes très visibles alors c'est un peu plus compliqué…
Les tentatives les plus ratées étaient à chaque fois pour des déplacements sur une longue distance, quand son objectif se trouvait plus loin. Il voyait tout de même les traits de craie mais pas distinctement.
Aizawa consulta sa montre, sourcils froncés. Au-dessus d'eux, le soleil pointait timidement son nez entre les nuages qui avaient assombri le ciel depuis le matin. Le gymnase était baigné dans la lumière déclinante de la fin d'après-midi.
— On va arrêter là pour aujourd'hui, mais je voudrais vérifier quelque chose avant. Recommence encore une fois.
Chassant une mèche noire qui s'était échappée de son chignon, le héros pointa une croix derrière lui, vers laquelle Izuku était déjà orienté. Elle était parfaitement visible et Izuku se sentit soulagé de finir la session sur une note positive ; il y arriverait sûrement sans aucun problème.
Il hocha la tête avant de fermer les yeux. La sensation montante dans sa poitrine était devenue familière et il l'associait à présent à son Alter sans hésitation. Après l'heure qu'il venait de passer à y faire appel, il était maintenant capable de reconnaître l'instant où son Alter entrait en action.
Confiant, il fit un pas —jusqu'à ce que la pointe de son pied heurte quelque chose, faisant basculer son corps en avant. C'était comme choper dans une bordure invisible alors qu'il sprintait à pleine vitesse. Le moment où son visage heurta le sol, un craquement lugubre retentit, suivi par une vive douleur qui remonta dans son nez, le poussant à prendre une inspiration soudaine qui emplit sa gorge d'un goût métallique.
Sonné, Izuku s'appuya sur ses mains pour s'asseoir. Il en porta ensuite une à son visage pour confirmer ce qu'il savait déjà : il s'était cassé le nez. Ses doigts, tout comme le sol à l'endroit où il était tombé, étaient couverts de sang. Le gémissement de douleur qui accompagna cette constatation fit grimacer Aizawa.
— C'est bien ce que je pensais, dit-il, le pied posé à quelques centimètres derrière Izuku, clairement sur son chemin.
Est-ce qu'il vient de- ?
— Ce n'est pas une téléportation. C'est un déplacement rapide, continua-t-il, sans dire un mot au sujet du croche-pied évident qu'il venait de faire à Izuku. Si tu fermes les yeux et qu'un obstacle apparait, tu ne peux pas le voir. En combat, ça peut t'être fatal. Il va falloir travailler ça, demain.
Se tenant l'arête du nez, tête penchée en arrière, Izuku se releva. Aizawa lui tendit un mouchoir en papier venu de nulle part dont il se saisit rapidement. Des trainées sanglantes avaient déjà taché le blanc de son T-shirt et Izuku eut une pensée pour sa mère qui aurait sû quoi faire pour que ça ne soit pas définitif.
Le mouchoir était déjà imbibé et n'allait pas tarder à percer. Avec un regard semi-compatissant qu'Izuku aperçut à peine avec sa tête penchée en arrière, Aizawa posa une main dans son dos pour le guider vers la sortie.
— Je pensais que tu aurais le temps de te rattraper avec les mains si nécessaire, dit-il, et Izuku prit cette phrase pour l'excuse qu'elle était. Je vais t'accompagner chez Recovery Girl et puis tu pourras retourner aux dortoirs.
— Merci. Et je tâcherai d'y penser pour la prochaine fois.
Izuku aurait aimé sourire pour montrer qu'il comprenait ses intentions mais il avait encore l'impression qu'on enfonçait un clou au milieu de son visage et sa nuque commençait déjà à lui faire mal de tenir la position. A la place, il grimaça en sentant un peu plus de sang couler dans l'arrière de sa gorge.
Au moins, Todoroki n'avait rien vu.
.
.
Le lendemain, Aizawa avait amené des cônes pour servir de repères. Au lieu de faire de simples essais d'un point à un autre, Izuku devait se déplacer jusqu'à la cible que le héros lui indiquait au fur et à mesure qu'il avançait dans son parcours. Avoir à peine une seconde pour se réorienter dans la bonne direction était difficile et ses résultats n'étaient pas très probants. Il finissait soit juste après le cône, soit il l'envoyait valser en shootant dedans à son arrivée. Les rares fois où Aizawa lui donnait le mur comme destination, il finissait soit un bon mètre en-deçà ou bien, plaqué contre celui-ci.
Bien que Recovery Girl l'ait guéri la veille, la douleur était toujours assez claire dans sa mémoire pour qu'il n'oublie pas de mettre ses bras en avant à chacune de ses réceptions.
Il y avait bien eu un moment mémorable où, en arrivant sur le cône, il avait piqué du nez en avant. Même s'il avait battu des bras de toutes ses forces pour se stabiliser, il avait fini par tomber en avant, terminant par une culbute pour laquelle son dos et le sommet de son crâne ne le remerciaient pas.
Aizawa avait maintes fois soupiré.
— Tu ne t'appliques pas assez. Avait-il dit, les bras croisés et une main sur le front.
Il avait recommencé à bailler un peu plus souvent que ces derniers jours. Le blanc de ses yeux était de nouveau en train de se colorer de rouge et la repousse de sa barbe devenait déjà apparente. Ses cheveux restaient néanmoins relativement ordonnés, en comparaison au jour de leur rencontre.
— Il va falloir passer au niveau supérieur…
C'était donc ainsi qu'ils se retrouvaient dans la situation présente. Avec un Izuku inquiet, tapant nerveusement du pied au sol tout en écoutant les nouvelles consignes d'Aizawa, face à un Todoroki Shouto imperturbable attendant de savoir son rôle dans l'entraînement d'aujourd'hui.
— Midoriya, tu ne fais pas assez attention à ton point de chute. Il faut que tu modères tes appréhensions, fit Aizawa, un air sévère sur ses traits fatigués. Tu ne gères pas assez bien ton point d'arrêt. Soit tu lui fonces dedans, soit tu arrives bien avant. Les seuls essais qui ne se sont pas mal finis sont ceux pour lesquels je venais de te demander de faire attention.
Izuku grimaça en baissant la tête, une main jouant avec la tirette de son sweat. A côté de lui, Todoroki glissa un regard dans sa direction, mains dans les poches. Penaud, Izuku lui sourit par-dessous ses cils. L'autre garçon cligna des yeux lentement et Izuku s'apprêtait à lui demander s'il allait bien, avant qu'Aizawa ne continue de parler.
— Si tu ne fonces pas dans la cible, tu t'arrêtes trop tôt. En situation réelle, ça peut être tout aussi dangereux. Todoroki-
Il se tourna vers le concerné.
— Tu vas être notre cible, continua-t-il, faisant avaler sa salive de travers à Izuku.
— Quoi ? Dit-il, le son plus proche d'une porte qui grince que d'une voix humaine.
Il aurait tout aussi bien pu se taire pour le peu de réaction qu'il obtint de la part de Todoroki et Aizawa.
— J'espère que Midoriya se souciera plus de ton bien-être qu'il ne le fait pour lui-même. Ca te pose un problème ?
— Non, aucun. Répondit Todoroki, en haussant les épaules.
Le gémissement étouffé qui échappa à Izuku les fit enfin réagir. Tous deux se tournèrent vers lui, d'un même mouvement, un sourcil arqué. L'effet miroir aurait pu le faire rire, s'il n'avait pas été trop occupé à s'imaginer fonçant dans Todoroki de manière répétitive.
Oui, ils s'entendaient significativement mieux, mais est-ce que cette bonne entente durerait après une flopée de collisions douloureuses ?
— Todoroki, tu es sûr ? Fit-il, dans un couinement nerveux, tout en se frottant le bras au niveau du coude.
Celui-ci hocha simplement la tête, son visage dénué de toute inquiétude.
— Un problème, Midoriya ?
Aizawa le regardait avec attention, bras croisés sur le torse.
Déglutissant difficilement, Izuku acquiesça, tout en continuant de jeter des regards en coin à Todoroki pour confirmer que son expression restait la même.
— Alors, on y va. Todoroki, va te mettre là-bas, dit le héros en pointant un coin de la salle.
Todoroki suivit ses consignes sans une seconde d'hésitation. Izuku fit une grimace en pensant que son colocataire n'avait pas dû bien comprendre ce qui l'attendait. Néanmoins, il se mit en position lui aussi pour commencer l'exercice.
Ce qui suivit fut une myriade de tentatives ratées, durant lesquelles Izuku se força à garder les yeux ouverts autant que possible. C'était une sensation assez étrange, comme descendre dans une cabine d'ascenseur : bouger sans vraiment bouger. Le mouvement initial qu'il amorçait pour se déplacer et celui qu'il terminait à l'arrivée étaient clairs pour lui. Le trajet entre les deux ? Très particulier.
S'il devait donner une explication, c'était comme si, à l'activation de son Alter, le sol se déplaçait sous lui, plutôt que l'inverse. Il avalait en un seul pas la distance complète qu'il voulait parcourir. Ce n'était pas aussi compliqué à maîtriser que ce qu'il aurait cru, même si ça avait tendance à lui donner un peu la nausée.
Le plus dur était de gérer l'arrivée, comme Aizawa ne cessait de le lui reprocher. Izuku avait beau essayer d'aller au plus près de Todoroki, il finissait toujours à un mètre de lui, voire encore plus loin.
— Midoriya… soupira Aizawa, pour la énième fois.
Il était assis sur l'un des bancs, ou plutôt affalé. Sa tête était rejetée en arrière, contre le mur, et il avait les yeux fermés, exhortant au calme et à la patience.
Izuku se crispa, tête basse. Il aurait aimé disparaître, et pas que l'espace d'un déplacement éclair. Passer outre sa crainte de blesser Todoroki n'était pas aisé et finissait systématiquement par l'obliger à s'arrêter plus tôt que prévu.
— Hmm.
Il porta son attention sur l'autre garçon en se mordant les lèvres ; il ne savait même pas ce qu'il voulait demander.
Todoroki pencha la tête, un sourcil levé, une question évidente dans ses yeux gris.
— Oh, dit-il finalement, étant arrivé à ses propres conclusions. Tu peux y aller, Midoriya. Je ne suis pas en sucre.
— … d'accord.
Izuku serra le tissu de son sweat dans ses poings, cherchant le courage nécessaire.
Évidemment, dans le cursus héroïque, il devrait faire bien plus que pousser un autre élève à terre. Mais dans la situation actuelle, il restait hésitant. Il ne voulait pas que Todoroki croit qu'il essayait de se venger pour la brûlure en ne faisant pas attention.
Si Todoroki insistait, il n'avait pas d'excuse pour ne pas faire de son mieux.
— On y retourne, déclara Aizawa, maintenant penché en avant, les coudes appuyés sur les genoux.
Se mettant en place, Izuku offrit un dernier regard à Todoroki, une excuse préventive. Ce dernier ne réagit pas mais il semblait réfléchir à quelque chose, ses yeux plongés dans ceux d'Izuku. L'espace d'un instant, Izuku se souvint du bref espoir qu'il avait eu en croisant le regard de Todoroki pour la première fois, l'espoir de découvrir enfin à quoi ressemblait la couleur bleue.
Un frisson le traversa, hérissant les poils de ses bras et de sa nuque, en totale contradiction avec la vague de chaleur qui irradia sa poitrine et ses joues.
Wow, n'importe quoi, Izuku.
Il secoua la tête, rompant le contact visuel. Quand il regarda de nouveau Todoroki —prenant soin de fixer son épaule—, celui-ci l'observait toujours, une lueur d'incompréhension dans les yeux.
Avant que son esprit n'en vienne encore à des réflexions aussi délirantes qu'inutiles, Izuku se focalisa sur ce qu'il avait à faire et activa son Alter.
Malgré toute sa bonne volonté, Todoroki finit sur les fesses. Ca aurait cependant pu être pire ; Izuku aurait pu lui tomber dessus. Seule l'absence d'une quelconque trace d'irritation sur le visage de Todoroki l'empêcha de s'affoler. A la place, il se contenta de s'incliner, mains jointes en s'excusant auprès de l'autre garçon.
— J'ai connu pire, se contenta de dire Todoroki tout en se relevant.
— Essaye de te situer mieux dans l'espace, fit Aizawa, pas surpris le moins du monde par ce qu'il venait de se passer.
Il bailla avant de s'immobiliser, la bouche toujours ouverte, et de sortir son téléphone de sa poche. Ce qu'il vit sur l'écran dû lui faire plaisir parce qu'un léger sourire souleva le coin de sa bouche, un reniflement amusé accompagnant la scène.
Quand le héros eut rangé son téléphone à sa place, sans rien avoir fait de plus que le regarder, il darda un regard contrarié sur ses deux élèves. D'un petit signe de main qu'Izuku associa à un « du balai » muet, il grommela :
— Qu'est-ce que vous attendez ? Allez, encore.
Le changement d'attitude quasi instantané fit sursauter Izuku, mais aussi Todoroki.
Je me demande ce qui l'a fait sourire comme ça.
Ils se remirent au travail.
Peut-être qu'Izuku n'aurait pas dû se réjouir autant de ne pas s'être étalé sur Todoroki plus tôt. Parce qu'il s'était bien rattrapé par la suite. Une heure plus tard, il ne comptait plus le nombre de fois où Todoroki avait fini à terre. Parfois, l'autre garçon arrivait à se stabiliser en mettant une jambe en arrière au moment du choc. D'autres, il terminait presque couché sur le dos. Izuku avait mal aux genoux à force de finir à quatre pattes —sa position de réception favorite, apparemment.
L'expression de Todoroki se faisait de moins en moins sereine au fur et à mesure que le temps passait. Après qu'Izuku lui ait mis un coup de tête dans le menton en se relevant, le faisant se mordre la langue, il avait même l'air de regretter d'avoir accepté de participer à l'exercice.
Izuku avait envie de mettre fin à cette session plus que gênante mais Aizawa ne semblait pas prêt à leur dire d'arrêter. Il se sentait plus que mal envers Todoroki qui se laissait silencieusement balancer au sol.
A son nouvel essai, il était épuisé par le stress. Une main invisible comprimait son thorax, rendant chaque inspiration désagréable. Il ne pouvait pas s'empêcher de se mordiller l'intérieur de la joue, gesticulant nerveusement.
Quand son pied quitta le sol, son Alter s'agitant dans sa poitrine, il ne souhaitait qu'une seule chose : réussir. Pourtant, une seconde de doute le fit bouger ses mains avant qu'il ait le temps de réfléchir plus que ça à ce qu'il faisait.
Son pied se posa au sol. Une de ses mains se posa contre le torse de Todoroki pendant que l'autre prenait l'arrière de sa tête en coupe, leurs deux corps basculant dans un même mouvement. Au moment du choc avec le sol, le front d'Izuku vint taper contre la poitrine de Todoroki.
Izuku prit un instant à comprendre ce qui venait d'arriver.
— Midoriya, à ce stade, je ne suis pas vraiment sûr qu'on puisse appeler ça un accident. Fit Aizawa sur un ton dubitatif.
La sensation de chaleur sur son visage venait-elle de l'intense sentiment de mortification qu'Izuku ressentait à ce moment… ou bien émanait-elle de Todoroki ? Il n'aurait su le dire. Peut-être les deux.
Sa main bloquée entre la tête de Todoroki et le sol, les phalanges douloureuses, Izuku ne pouvait pas se dégager aussi vite qu'il l'aurait voulu. Sous lui, Todoroki bougeait si peu qu'Izuku crut qu'il avait arrêté de respirer. Relevant la tête doucement, les joues assurément rouges, il croisa le regard de l'autre garçon.
— Hu.
Le souffle tiède de Todoroki lui balaya le visage et Izuku s'empourpra davantage. Il ne s'était pas attendu à ce qu'ils soient si proches.
— Désolé, dit-il dans un murmure, suivi d'un petit rire gêné presque inaudible.
Muet comme une carpe, Todoroki se redressa, posant ses mains derrière lui pour y prendre appui. Libéré, Izuku s'empressa de reculer, s'asseyant fesses contre talons. Son coeur s'agitait frénétiquement dans sa cage thoracique et il détourna la tête, passant une main dans sa chevelure verte pour cacher son visage derrière son bras.
— Désolé, répéta-t-il.
Par les Quatre, on dirait vraiment que je l'ai fait exprès !
— Ca… va.
Todoroki avait l'air surpris de ce qu'il venait de dire, comme lorsqu'il avait annoncé avoir écrasé sa bouteille à la salle de sport.
— J'en ai assez vu pour aujourd'hui, déclara Aizawa.
L'oeillade peu amène qu'il lança à Izuku quand celui-ci osa regarder dans sa direction le fit rentrer la tête dans ses épaules.
— On va passer au combat corps-à-corps pour l'heure qui reste. Je vous laisse deux minutes pour vous remettre les idées en place et on enchaîne.
— Ou- oui !
Todoroki se contenta d'un hochement de tête qu'Izuku aperçut du coin de l'oeil.
Si Izuku se jeta d'une manière particulièrement vorace sur sa bouteille d'eau, c'était uniquement parce qu'il était soudainement assoiffé.
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Voilà, c'est tout pour ce chapitre. :) J'espère que ça vous a plu. (Surtout, dites-le avec un petit commentaire :D)
On reste encore un peu avec Shouto et Izu pour le prochain chapitre mais pour le chapitre 8, on va dire bonjour à Kacchan :D :D
Vous n'êtes pas prêts ! (D'ailleurs, moi non plus xD)
