Bon. Et ben nous y voilà.
Bonsoir tout le monde et me revoici. Ça a mis du temps. Ça a mis un sacré paquet de temps. Non que je me sois tournée les pouces et ai rushé d'écrire ce chapitre en quelques heures. Non, non, j'étais dessus depuis des semaines maintenant. Mais alors la petite voix insidieuse a fait son grand retour dans ma tête et m'a fait perdre toute confiance en moi. Je ne savais pas si c'était une bonne idée de continuer, j'avais peur de l'évolution que je donnais aux personnages et à l'intrigue... Bref, j'étais vraiment paumée et très peu sûre de moi.
Et puis bon, il a fallu remonter les manches et s'y remettre. J'ai reçu entre temps quelques commentaires qui m'ont remonté le moral et m'ont fait dire que non, je n'étais pas complètement à l'ouest et que j'allais bien quelque part avec cette histoire. Alors merci à ces personnes d'avoir lancé une bouée de sauvetage à laquelle je me suis cramponnée. Bilan, désolée pour ce grand retard, je me "rattrape" dirons-nous avec un sacré long chapitre.
Et ce chapitre... Bordel. On n'est pas vraiment sur du "bonne humeur, bonne ambiance" hein (coucou euphémisme). Je vous aurais prévenu (le titre donne déjà le ton). Mais bon, c'est nécessaire pour la suite de l'intrigue donc hein, on fait avec !
Réponse à Ana : Je vois ce que tu veux dire et c'est vrai, je suis assez d'accord avec toi sur la réaction de Sirius. Dans mes premiers jets d'écriture, il ne se mettait pas à pleurer face aux autres mais durant le peaufinage, j'ai finalement changé. Je me disais qu'avec tout ce qu'il apprenait, la mort de Rémus, ce long laps de temps une fois de plus perdu dans sa vie, le post-guerre, les vies qui ont avancées sans lui... ça le rendrait complètement désemparé et pis voilà, j'ai opté pour les larmes. Mais j'entends complètement ton point de vue. Concernant Ron/Hermione, je te suis et j'irais même jusqu'à dire que je n'ai jamais vraiment adhéré à leur relation. M'enfin des choix doivent être faits et on fait avec hein ! ^^ C'est pour ça que c'est si chouette d'avoir des fanfictions aha. Merci beaucoup beaucoup beaucoup pour ton commentaire et j'espère que la suite te plaira !
Réponse à Fleur d'Ange : merci pour tes commentaire ! :) Effectivement, c'est tout le dilemme d'Hermione au début de ce récit qui se trouve déchirée entre sa vie d'avant et celle qu'elle s'est construite dix ans plus tard. Harry regagne une partie de sa vie, tandis qu'elle se confronte à la sienne. Bref, merci tout plein pour les comm ! :)
Là-dessus, bonne lecture et j'espère à bientôt !
SGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSGSG
Chapitre IV : Trahir
22 juin 1996
Luna arpentait seule les couloirs de Poudlard. Un observateur extérieur n'aurait rien remarqué qui sortait de l'ordinaire chez la sorcière aux cheveux blonds. Ses yeux bleus conservaient leur air ahuri et lunaire, comme de coutume. Mais quelqu'un de plus aguerri aurait compris que la jeune fille traversait une passe difficile. Et cela ne touchait pas seulement Luna Lovegood. L'école tout entière semblait plongée sous une chape de plomb. Les esprits étaient tourmentés, et les clameurs habituelles avaient laissé leur place à de sombres ruminements. Partout où l'on passait, les élèves jetaient des regards inquiets à tout va.
La bataille au Ministère de la Magie avait porté un coup fatal aux membres de l'AD. Tous et toutes n'avaient pas été blessés mais s'étaient confrontés à la dure réalité de leur monde en proie aux forces maléfiques. Luna traversa le pont menant au parc de Poudlard. Elle fit quelques pas vers le lac avant que ses yeux ne repèrent une silhouette familière. Harry était assis devant la rive, perdu dans sa contemplation. Luna s'approcha pour le rejoindre mais s'arrêta au dernier moment. Le regard du jeune homme était livide. Ses bras enserraient fermement ses genoux. Luna ressentit un élan de compassion face à son camarade. Depuis qu'ils étaient revenus à Poudlard, Harry s'était davantage isolé. Dumbledore l'avait reçu dans son bureau sitôt la bataille quittée et depuis, il n'était plus le même, oscillant entre des phases de grande apathie et des colères brutales. Son esprit semblait toujours ailleurs. Ses meilleurs amis l'avaient constaté aussi. Son attitude lui rappelait la détresse qui avait été la sienne il y avait de cela des années lorsqu'elle avait perdu soudainement sa maman. Elle aurait aimé lui en parler mais sentit que le moment n'était pas encore venu. Pour l'heure, il lui fallait le laisser tranquille et accepter son deuil. La sorcière aux longs cheveux l'observa une dernière fois puis s'enfonça dans la forêt en quête des Sombrals.
o O o
L'ambiance au diner fut aussi morose que le reste de la journée. Luna était assise à côté de ses camarades serdaigles, qui évitaient scrupuleusement de lui adresser la parole, et observait le clan des Gryffondors. Hermione tentait par tous les moyens d'évoquer Sirius mais Ron lui adressait des regards insistants pour qu'elle s'abstienne. Harry demeurait silencieux et Ginny le regardait avec inquiétude. Même Neville semblait à fleur de peau. Luna piocha dans son assiette et attendit patiemment que le repas se conclut.
Lorsqu'elle quitta la Grande Salle, la jeune fille s'apprêtait à se rendre dans sa salle commune. Mais alors que Luna se dirigeait vers la tour Serdaigle, un bourdonnement résonna à ses oreilles. Elle fit aussitôt demi-tour et pris les escaliers jusqu'au quatrième étage. Luna poussa la lourde porte en bois et arriva dans un long couloir de pierre, revêtu de tapisseries ainsi que de vitraux colorés. En s'y engageant, elle tomba sur Neville qui semblait plongé dans la contemplation de l'un d'eux. Luna s'approcha discrètement et tapota son bras.
« Neville. »
Ce dernier battit des paupières et se décala pour la regarder.
« Luna. Ça va ? , demanda-t-il d'une voix éteinte.
- J'ai l'impression que c'est à toi qu'il faut poser cette question, rétorqua la sorcière avec un timide sourire.
- Je… Oui. Oui, ça va » marmonna le grand sorcier avant de se reporter aux dessins du vitrail.
Luna resta à ses côtés et contempla la surface irisée du verre pendant quelques instants. Puis elle se rapprocha :
« Ça n'a pas été facile… De revenir de là-bas. »
Neville se retourna une nouvelle fois vers elle, incertain. Luna lui adressa un sourire désolé.
« On a tous été chamboulé par ce qui s'est passé là-bas. Au Ministère. Et j'ai l'impression qu'on essaye tous de panser nos plaies comme on peut, expliqua-t-elle en plongeant son regard dans le sien.
Neville resta silencieux pendant quelques secondes, mal à l'aise. Puis il répondit à son regard.
- C'est elle. Je ne pensais pas être confronté à elle ce soir-là.
- Qui ?
- Bellatrix Lestrange. »
Son nom résonna comme une insulte dans la bouche de Neville. Il resserra ses poings.
« Elle a torturé mes parents… Elle a pratiqué le sortilège du Doloris jusqu'à ce qu'ils en perdent la raison, avoua-t-il d'une voix hachée.
- Je suis désolée Neville, murmura Luna en prenant sa main dans la sienne.
- J'ai longtemps attendu d'être face à elle pour pouvoir me venger. Les venger… Mais arrivé là, je n'ai rien pu faire. Elle m'a vaincu sans le moindre effort. J'ai été trop faible. »
Les mains de Neville tremblaient de rage maintenant. Son regard s'était fixé sur le sol, la honte étant encore trop intense. Luna continua de lui tenir la main et le força à la regarder de nouveau.
« Tu es brave et courageux Neville. Et un jour, le monde entier sera au courant.» affirma la jeune fille avec sérieux.
Les joues du garçon virèrent au cramoisi. Neville ne parvint pas à soutenir le regard bienveillant de sa camarade et balbutia un remerciement.
« Si tu as besoin de quelqu'un, je suis là » conclut Luna en tapotant son épaule amicalement. Neville bredouilla de nouveau quelques mots incompréhensibles et s'engagea dans les escaliers.
Satisfaite, Luna parcourut le couloir menant à la bibliothèque. Elle traversa les portes imposantes et se retrouva bientôt au milieu de centaines et de centaines d'étagères remplies à craquer. Elle se dirigea vers l'aile est avant d'être interrompue par un « tu-tut » aigu. Se retournant, Luna fit face à Madame Pince qui la regardait avec impatience, le nez retroussé.
« La bibliothèque ferme ses portes dans trois minutes, indiqua-t-elle d'une moue pincée.
- Je n'en ai pas pour longtemps », répondit la sorcière aux cheveux blonds avec un sourire poli.
Puis, n'attendant aucune réponse, elle continua son chemin sans prêter attention au soupir excédé de la bibliothécaire. Luna traversa de nombreuses étagères où voletaient de vieux livres poussiéreux. Certains se traînaient difficilement vers leur emplacement originel tandis que d'autres secouaient leurs pages sur les tables vides. Parvenue à la fin de la dernière rangée, elle trouva ce qu'elle était venue chercher.
Hermione était face à une longue table de travail, afférée à consulter plusieurs livres à la fois. Ses cheveux étaient ramenés en un grossier chignon d'où s'échappaient des mèches folles. Ses yeux virevoltaient à travers les différents ouvrages. Elle tournait les pages avec des mouvements empressés et maladroits. Hermione s'arrêta sur un des exemplaires, jura et referma le livre d'un coup sec. Les piles de livres s'amoncelaient tout autour d'elle, certains renversés plus qu'autre chose. Absolument rien ne coïncidait avec sa manière habituelle de faire. Luna avait observé Hermione Granger durant de nombreuses heures à la bibliothèque. Elle travaillait avec méthode et application. Ici, on aurait dit qu'une tempête était à l'œuvre et ravageait tout sur son passage. Prudemment, Luna s'approcha.
« Hermione ? »
Cette dernière sursauta et leva des yeux ahuris.
« Luna ? Qu'est-ce que tu fais là ? , balbutia-t-elle.
- Oh, j'ai suivi… Madame Pince m'a dit que la bibliothèque fermait bientôt, se reprit-elle avec un sourire poli.
- Ça n'est pas possible, je n'ai pas encore fini ! s'exclama Hermione qui replongea aussitôt la tête dans les différents ouvrages.
- Elle avait l'air plutôt sérieuse quand elle m'a dit ça, ponctua Luna en se rapprochant.
- Moi aussi ! Je ne peux pas me permettre d'arrêter maintenant.
- Qu'est-ce que tu fais ?
- Des recherches ! J'ai besoin de résoudre ce problème et par Merlin, je le résoudrai quoiqu'il m'en coûte ! , s'exclama la brune avant de claquer une nouvelle fois la couverture d'un exemplaire.
- Hermione… Qu'est-ce que tu cherches ? , demanda prudemment Luna en continuant à s'approcher.
- Un moyen ! Je cherche un moyen ! rugit la jeune femme qui tremblait maintenant.
- Un moyen pour quoi ?
- Un moyen pour qu'il revienne ! » s'écria-t-elle en balayant le livre devant elle d'un revers de la main.
Hermione releva alors la tête et regarda Luna avec des yeux effarés. Cette dernière ne dit rien mais la sorcière reconnut dans son regard un sentiment bien familier. La pitié. Hermione éclata alors en sanglots et s'assied brutalement face à la table. Elle cacha son visage dans ses mains, tremblante. Luna continua de s'approcher d'elle avec le plus grand tact. Parvenue à sa hauteur, elle s'assied à son tour et posa une main dans son dos. Hermione se raidit mais continua à sangloter dans ses bras. La voix de Luna s'éleva, douce et patiente :
« Quand j'étais enfant, j'ai perdu ma mère. Elle aimait bien faire des expériences mais un jour, un de ces sortilèges a mal tourné. »
Hermione leva des yeux plein de larmes vers elle. Luna lui sourit tristement et continua :
« J'avais neuf ans. C'était une épreuve très douloureuse. J'ai beaucoup pleuré. Mon papa aussi… Il essayait de faire comme si tout allait bien mais on savait, lui et moi, que ça n'était pas le cas.
- Je suis désolée Luna, murmura Hermione entre deux sanglots.
- Je comprends ce que c'est. Cette sensation qu'un grand vide s'est formé en toi et qu'il ne te laissera jamais reconstruire quelque chose… »
Hermione fuit le regard compatissant de sa camarade et baissa la tête pour n'observer que le sol sous ses pieds. Luna caressa lentement l'épaule de cette dernière.
« Elle finit par passer. Au bout d'un moment, elle ne fait plus si mal. Elle irrite juste ; et puis arrive un jour où elle disparait complètement. Le vide s'est résorbé.
- Je ne sais pas si je pourrais jamais le résorber, avoua Hermione.
- Tu y arriveras. Ça prendra du temps mais au bout du compte, tu parviendras à oublier.
- Je ne veux pas l'oublier ! s'écria alors la belle brune qui était de nouveau secouée par les sanglots.
- Je ne dis pas que tu l'oublieras… Mais les souvenirs feront moins mal. La douleur s'estompera quand tu y penseras. »
Hermione consentit à relever la tête pour contempler sa camarade. Luna lui adressa un sourire triste.
« C'est normal de pleurer ses morts, ajouta-t-elle d'une voix douce. Plus tard, lorsque tu auras assez pleuré, tu pourras le laisser partir. Et ça ne te fera plus mal. »
Hermione aurait aimé objecter mais les paroles de Luna semblaient trop sincères pour être contredites. La jeune fille continua de caresser son épaule et Hermione se laissa aller à espérer qu'un jour, peut-être, elle parviendrait à oublier.
o O o
18 juin 2006
Les trois amis sortirent de l'hôpital Sainte-Mangouste lorsque les quatre heures de l'après-midi sonnèrent. Harry affichait un sourire exalté sur le visage. Il se retourna vers les deux jeunes femmes et les serra brusquement dans ses bras.
« Je n'en reviens pas », exulta-t-il. Sa voix était un mélange d'euphorique et d'incrédulité. Les deux femmes lui rendirent son étreinte. Hermione, elle, ne pouvait s'empêcher de ressentir un poids inconfortable au cœur. Une douleur qui s'était éveillée.
« C'est invraisemblable… Pourtant il est là. Il est bien vivant, continua le jeune homme à la cicatrice.
- Je suis heureuse qu'on l'ait enfin retrouvé. Ça ne devait pas être agréable ; d'être tout seul dans cette salle lugubre », constata Luna.
Harry et Hermione frémirent.
« Lorsqu'il sera prêt, je le ferais sortir d'ici. Il viendra vivre avec nous. On rattrapera ensemble tous ces moments qui n'ont pas pu avoir lieu. Il fera à nouveau partie de la famille », annonça Harry alors qu'il marchait d'un pas frénétique.
Les jeunes femmes accélérèrent le pas pour rester à sa hauteur. Malgré ce poids à la poitrine, Hermione ne pouvait s'empêcher de sourire timidement. Harry était transformé. Cela faisait bien longtemps qu'elle ne l'avait pas vu dans cet état d'excitation sans bornes. Il était bon de retrouver cette facette de son camarade.
« Avant toute chose, il faut que je l'annonce à Ginny, elle ne va pas y croire ! Et puis il faut qu'on réaménage un peu la maison, il ne faut pas qu'il se sente en territoire inconnu. Son ancienne chambre doit être remise sur pied, et puis il faut encore que je demande l'autorisation de Ginny. Oui, je dois m'en occuper. Hermione, tu as l'heure ?
- Euh je oui. Il est quatre heures, bredouilla la belle brune.
- Merlin, je ne suis pas sûr qu'elle sera rentrée. Mais bon, autant l'attendre à la maison directement. Bon sang, je ne sais pas comment je vais aborder la chose, continua Harry qui peinait à rester cohérent tant l'excitation triomphait sur son cerveau.
- Je crois que c'est une bonne idée, lança alors Luna. Rentre à la maison et assieds-toi une minute. Il faut que tu te remettes de tes émotions. »
Harry se retourna vers Luna qui lui adressait un petit sourire.
« On dirait que tu es sous le coup d'une potion d'Euphorie, reprit-elle. C'est charmant mais aussi un peu inquiétant. »
Le sorcier éclata de rire et passa une main dans ses cheveux déjà ébouriffés.
« Tu as raison Luna. Je ne tiens plus en place, c'est terrible… Je vais rentrer et me poser un peu. Lorsque Ginny rentrera, je lui expliquerai tout.
- En voilà une bonne idée, répondit Luna avec une mine amusée.
- C'est que… J'ai l'impression d'avoir retrouvé une partie de moi. C'est comme si le destin m'avait rendu ma famille, expliqua-t-il avec un sourire soulagé.
- Je suis tellement heureuse pour toi Harry, soupira Hermione en le prenant dans ses bras.
- Merci Mione… »
Tous deux restèrent accolés quelques instants avant de se séparer. Mais alors qu'Harry s'apprêtait à transplaner, il se frappa vivement le front.
« Merlin, j'ai complètement oublié ! Ginny m'avait demandé de t'inviter à dîner chez nous ce soir ! » s'exclama Harry en regardant Luna.
Cette dernière l'observa un moment puis, devant sa mine embarrassée, haussa les épaules et répondit :
« Ça ne fait rien. Nous aurons l'occasion de rattraper ça… Ce soir, tu as des choses plus importantes à régler.
- Tu es sûre ? s'excusa le brun en se frottant l'arrière du crâne.
- Certaine. Je repasserai chez vous une prochaine fois.
- Tu veux venir chez nous Luna ? » proposa aussitôt Hermione
Les mots dévalèrent ses lèvres avant qu'elle n'ait le temps d'y réfléchir. Harry la regarda avec étonnement mais Luna lui adressa un sourire.
« Avec plaisir. »
Hermione sourit en retour tout en cherchant à estomper la stupeur qui devait s'afficher sur son propre visage. Maintenant qu'elle avait engagé sa parole, il aurait été malvenu d'annuler. Même si elle ne pouvait s'empêcher de se demander ce qui lui avait pris tout à coup.
« Dis à Ron que je le verrais demain, lança Harry qui s'éloignait du duo.
- Je le ferai. Embrasse Ginny pour moi surtout, indiqua Hermione en hochant la tête.
- Et bonne chance », conclut Luna avec un sourire satisfait.
Harry leur fit un signe de la main et disparut en un « pof » discret. Les deux femmes se regardèrent alors. Luna dardait ses grands yeux bleus ébahis sur Hermione et celle-ci eut un sourire crispé. Le manège dura quelques secondes avant que la blonde ne reprenne la parole.
« Je ne sais pas où tu habites. »
Hermione éclata d'un rire maladroit.
« Excuse-moi, je suis encore un peu… chamboulée j'imagine. Prends mon bras. »
Luna s'exécuta et toutes deux transplanèrent dans la minute.
o O o
Les deux sorcières arrivèrent au beau milieu du salon. Luna jeta des coups d'œil curieux dans toute la pièce et hocha la tête.
« J'aime beaucoup ici. »
La pièce était assez menue mais bien agencée. Un grand canapé de velours bleu trônait au milieu, encadré par deux fauteuils du même acabit. Une petite table basse et rectangulaire était placée devant le canapé. On y avait posé quelques dessous de verre en bois ainsi que plusieurs magazines. Le mur du fond était occupé par deux grandes bibliothèques en acajou avec des portes vitrées. Les étagères étaient bien évidemment remplies jusqu'à ras bord. Un lustre aux pendants en verre donnait une atmosphère chaleureuse à la pièce. Quelques photos et bibelots étaient accrochés çà et là sur les autres murs.
« Merci. Ron trouve que la pièce n'est pas assez chargée mais je l'aime telle quelle. Je crois qu'il regrette un peu le Terrier, expliqua Hermione avec un sourire amusé. Une tasse de thé ?
- Volontiers. » acquiesça Luna.
Hermione fit un signe pour mener son invitée dans la cuisine. Toutes deux s'installèrent sur le plan de travail pendant que la bouilloire ronronnait doucement.
« Je suis désolée pour ce matin, dit vivement la brune.
- Aucun problème, la rassura Luna.
- Ça n'est vraiment pas dans mes habitudes de faire cela. Je veux dire, rater un rendez-vous et venir au travail en retard, grimaça-t-elle.
- Je crois que rien n'était habituel aujourd'hui », tempéra la sorcière avec un sourire.
Hermione le lui rendit, crispée.
« Est-ce que tu pourras repasser dans la semaine à mon bureau ? C'est juste pour signer le formulaire de synthèse de ta dernière découverte.
- Oui, je devrais pouvoir revenir après-demain.
- Formidable », soupira Hermione, soulagée.
Luna l'observait longuement. La belle brune aurait souhaité pouvoir se noyer dans son bol de thé plutôt que de continuer à subir ce regard intense. Son invitée n'avait certes pas une posture d'inquisitrice mais Hermione sentait qu'elle disposait de facultés étranges qui lui permettaient d'être très intuitive à son sujet. Trop intuitive. Alors qu'elle tentait par tous les moyens de trouver un sujet trivial de conversation, la blonde reprit :
« Il va y avoir un sacré bazar avec tout ça. »
Hermione écarquilla les yeux.
« Oui c'est… Ça va changer pas mal de choses, murmura-t-elle dans un souffle.
- Tout va finir par aller mieux... Je le sens, ponctua la sorcière blonde en posant une main sur la sienne.
- Luna, tu… » , commença Hermione avant d'être interrompue par un « bang » familier.
Apparut dans la cuisine le visage réjoui de Ron Weasley, encore vêtu de son long manteau brun.
« Je suis rentré ! » annonça-t-il, ravi, à l'adresse de sa compagne. Ce fut alors qu'il remarqua qu'Hermione n'était pas seule. Luna se retourna et lui adressa un sourire poli.
« Bon retour chez toi, le salua-t-elle.
- Luna ? Tiens… Qu'est-ce qui nous vaut le plaisir ? , bredouilla Ron en s'avançant vers le plan de travail où les jeunes femmes étaient posées.
- Je l'ai invitée à manger avec nous ce soir », annonça Hermione en lui adressant un sourire maladroit.
Ron fit de son mieux pour cacher son étonnement et adressa un fier sourire à son invitée. Puis il se pencha vers Hermione et déposa un baiser sur son front.
« Très bien ! J'ai déjà une faim de loup, s'exclama-t-il, jovial.
- La journée s'est bien passée ? demanda Luna en reprenant une gorgée de thé.
- Oh, rien de bien gratifiant. Je suis intervenu dans une rixe entre deux communautés magiques du Norfolk. Une sombre histoire à propos de chasse aux Licheurs qui n'est pas très bien vue par le clan adverse… Bref, beaucoup de diplomatie et de paperasse pour pas grand-chose, expliqua Ron en s'accoudant à la table.
- Mon preux défenseur des sorciers opprimés, lança Hermione avec un sourire en coin.
- Honnêtement, pas tant que cela… Je n'imaginais pas que le boulot d'un Auror traite de ce genre de cas, soupira Ron en levant les yeux au ciel.
- C'est parce que nous sommes en période de paix, ponctua Luna avec un sourire satisfait.
- Certes, et je ne vais pas m'en plaindre. Et vous alors ? »
Hermione releva les yeux vers Luna. Cette dernière attendit quelques secondes puis, devant le silence de son hôtesse, prit la parole :
« Sirius est revenu. »
Ron la contempla un instant, sans rien dire. Puis ses sourcils se froncèrent. Il tourna la tête vers Hermione qui continuait à regarder son invitée. Elle resserra ses bras contre elle, sentant la douleur revenir. Le regard du sorcier alterna entre les deux femmes pendant quelques secondes. Enfin, éberlué, il demanda :
« Pardon mais… Quoi ?
- On l'a trouvé là où on l'avait laissé la dernière fois. Il semblerait qu'il ait réussi à franchir le Voile, expliqua Luna.
- Il est… Il est vivant ? balbutia Ron.
- Assez oui. Il lui faudra encore du repos pour retrouver toutes ses capacités mais il ne s'en est pas trop mal tiré tout à l'heure, au vue des circonstances.
- Il était réveillé ? Vous lui avez parlé ?! », s'exclama Ron en se retournant vivement vers Hermione.
Cette dernière déglutit et posa délicatement sa tasse sur la table. Elle finit par lever les yeux vers lui et répondre :
« Ça n'a duré que quelques instants mais oui, Harry a pu lui parler. »
Luna ne releva pas et continua son récit.
« Il est encore très faible mais sa tête semble fonctionner correctement. Nous lui avons expliqué ce qu'il s'était passé dans les grandes lignes. Ça n'a pas été facile pour lui.
- Mais pourquoi vous ne m'avez pas prévenu ? demanda Ron éberlué.
- Je savais que tu étais à l'extérieur, je ne voulais pas t'affoler », répliqua Hermione avec désarroi.
Luna constata que les mains d'Hermione s'étaient mises à trembler. Elle garda cette remarque pour elle-même et expliqua :
« Sirius venait à peine de réapparaître à la surface. Il a déjà éprouvé un grand choc en voyant Harry. Il fallait le ménager. »
Ron quitta alors Hermione du regard pour contempler Luna. Il passa une main ennuyée dans ses cheveux courts.
« Oui, oui bien sûr. C'est normal… Bon sang, quelle histoire… Et Harry ? Il va bien ?
- Il a mis du temps à accuser le coup mais je crois qu'il s'en est tout à fait remis. Il est parti euphorique de l'hôpital et avait hâte de raconter la nouvelle à Ginny.
- Il… Il serait question qu'ils installent Sirius chez eux, à Grimmaurd, ajouta Hermione à voix basse.
- Oui… Oui, ça paraît aller de soi… Je ne pense pas que Ginny s'y opposera. Et puis, ce sera un environnement familier pour Sirius… Bon sang, je n'en reviens pas. C'est incroyable.
- Je pense que nous sommes tous et toutes un peu sous le choc. Ça n'est pas un retour anodin », conclut Luna en hochant la tête.
Hermione leva les yeux et vit qu'elle la regardait. La douleur s'accentua. Ron hochait lui-aussi la tête, les yeux perdus dans le vide. Son air éberlué ne l'avait pas quitté. Tous les trois restèrent silencieux pendant de longues minutes, face à leurs réflexions.
Les cinq heures sonnèrent, venant briser l'immobilité de l'assemblée. Ron frappa dans ses mains et lança d'une voix plus assurée :
« Bon, et bien il convient de célébrer cela en attendant que Sirius soit remis sur pied. Luna, je te sers quelque chose à boire ?
- Volontiers.
- Herm ?
- Oui, merci.
- Ce soir, il nous reste du ragoût de ma mère. Elle nous avait laissé embarquer une large portion lors de notre dernière réunion familiale. Tu m'en diras des nouvelles Luna ! »
Ron ouvrit les placards et invita les jeunes femmes à s'installer au salon. Tous trois burent un verre de vin sur le canapé et Ron lança de nouveau la conversation. Il évoqua les dernières nouvelles du clan Weasley tout en s'intéressant à celles de leur invitée. Ils s'installèrent à table peu après et mangèrent le plat concocté par Molly avec entrain. Les conversations allaient bon train dans la salle à manger. Seule Hermione restait un peu en retrait. Elle participait seulement lorsqu'elle en sentait la nécessité. La soirée semblait se passer dans une sorte de brouillard lointain, loin de sa personne. Luna et Ron le remarquèrent à quelques reprises mais s'abstinrent de tout commentaire. Vers les vingt-deux heures, Luna quitta leur domicile en les remerciant chaleureusement pour l'accueil. Hermione lui sourit poliment lorsqu'elle s'approcha pour l'embrasser. Les yeux bleus la scrutèrent une dernière fois avant de disparaître dans un « pof » discret.
Restés seuls, Ron referma la porte et soupira d'aise.
« Ça n'était pas si mal tout compte fait ! »
Hermione le regarda et haussa un sourcil. Ron eut un rire embarrassé.
« J'ai pris peur lorsque j'ai vu qu'elle était chez nous. Mais il s'avère qu'on a passé une bonne soirée.
- Luna est très gentille, murmura Hermione.
- Oui, bien évidemment ! » s'empressa de répondre Ron.
Puis il se mit face à sa compagne et passa une main dans son dos.
« Tu vas bien ? lui demanda-t-il enfin.
- Je… oui, ça va bien, pourquoi ? répliqua-t-elle, surprise.
- C'est que… Tu étais un peu ailleurs durant le diner. On dirait que tu as passé une journée éprouvante, avoua le sorcier aux taches de rousseur.
- Oui, c'est le cas, finit par dire Hermione en sentant l'étau se resserrer autour de sa poitrine. Tout s'est bousculé aujourd'hui : le réveil manqué, les allers et retours frénétiques pour retrouver Harry, le retour de Sirius, l'hôpital… C'était un peu trop pour moi.
- Je comprends bien Mione, je ne sais pas comment tu as fait pour tenir toute la journée. »
« Je ne l'ai pas fait. » pensa la sorcière avec douleur. Elle sentait l'abattement revenir à la charge. Ron continua de la regarder et la prit dans ses bras.
« Tu sais ce que tu vas faire ? lui dit-il d'une voix chaude.
- Non…
- Tu vas monter et te faire couler un bain chaud. Et tu vas y rester jusqu'à ce que tes doigts soient fripés comme une vieille dame, expliqua Ron en étouffant un rire.
- Je ne sais pas, j'ai pris un retard considérable sur les dossiers aujourd'hui.
- Ça ne sert à rien Mione, dans l'état dans lequel tu es, tu ne feras rien de constructif. Repose-toi, tu l'as bien mérité. »
Hermione releva la tête et Ron vint déposer un baiser sur ses lèvres. Elle ferma les yeux puis hocha la tête.
« Tu y arriveras toute seule ? demanda-t-il alors qu'elle prenait les escaliers.
- Oui, je devrais m'en sortir, soupira-t-elle avec un sourire en coin.
- N'hésite pas, si tu as besoin d'un sorcier vaillant et sans peur pour te tirer des griffes de la baignoire dans ton plus simple apparat », argua le jeune homme avec un clin d'œil.
Hermione leva les yeux au ciel, pouffa, et continua de monter les escaliers.
Arrivée au premier étage, elle ferma la porte de la salle de bain derrière elle et ouvrit les robinets. Tandis que le niveau de l'eau montait, la belle brune contemplait le sol. Hermione revivait sans cesse dans son esprit les heures marquantes de cette journée. La peur qu'elle avait ressenti en écoutant le message de Harry et le désarroi qu'elle avait expérimenté en ne parvenant pas à le trouver tout de suite. La longue série d'angoisses qui ne l'avait pas quitté sur son chemin vers Sainte-Mangouste. Et puis la révélation… Hermione enleva prestement ses vêtements et plongea dans l'eau. Sa peau se hérissa au contact de l'eau mais elle prit une longue inspiration et s'allongea au fond de la baignoire. Les yeux fermés, elle écoutait les battements désordonnés de son cœur, étouffés par le débit de l'eau.
Il était revenu. Sirius était revenu d'entre les morts. Elle avait eu l'occasion de le voir et de le toucher pourtant une part d'elle-même doutait encore. Quelque chose en elle ne voulait pas croire en ce retour inespéré. Un sentiment qui lui tenaillait le cœur depuis qu'elle avait reposé ses yeux sur lui. « Il n'a pas changé. Il est resté exactement le même ». Pourquoi cela lui faisait-il si mal alors ? Elle aurait du être euphorique, comme Harry, de voir Sirius revenir du Voile. Il ne s'était pas contenté d'être son premier amour. Le grand brun avait été tellement plus pour elle. Pour autant, dès que leurs regards s'étaient retrouvés, Hermione avait ressenti une grande souffrance. Une brèche s'ouvrir et l'engloutir tout entière.
La sorcière ne parvenait pas à contrôler la myriade d'émotions qui lui faisait tourner la tête. Le soulagement se superposait à la tristesse, l'euphorie à l'inconfort, la nostalgie au désespoir. Elle aurait aimé hurler. La jeune femme se redressa vivement et expulsa l'air restant de ses poumons. Elle noua ses bras autour d'elle et posa sa tête sur ses genoux. Puis, sans qu'elle n'ait besoin de rien faire, les larmes roulèrent sur ses joues. Hermione pleura de tout son saoul et resta ainsi un long moment.
o O o
Dans une noirceur d'encre, au beau milieu de la forêt, Sirius courait à perdre haleine. Ses yeux scrutaient le chemin de terre. L'air froid lui envahissait les poumons. Forçant l'allure, il dévala la pente rocailleuse qui s'offrait à lui. Sa conscience d'homme vint se superposer à l'animal, s'imprégnant de toutes les sensations proposées. La fraicheur du vent. Le martellement de ses pattes contre la terre sèche. Ses poumons en feu. L'appétit commençant à poindre. Le besoin de continuer à courir, plus vite encore. Patmol exultait. C'était exactement ce dont il avait besoin.
Un frémissement dans les branchages lui fit reprendre contact avec la réalité. Le gros chien noir tourna la tête pour contempler le loup-garou qui courait à ses côtés. Ce dernier pressa l'allure, et lui lança un regard farouche. « Un défi » pensa l'animagus. Patmol accéléra le pas et poussa un hurlement d'allégresse. Derrière lui, il entendit le martèlement de sabots. Cornedrue arrivait à sa hauteur. Il vit les bois majestueux s'arcbouter afin de donner un nouveau souffle à la course. « Plus vite » somma sa part d'animal. Sirius s'esclaffa et donna une autre impulsion. Les trois animagus filaient à travers les arbres sombres et denses de la Forêt Interdite. Trois forces de la nature que rien ne pouvait arrêter. Ils étaient libres. « Libres. »
Sirius se réveilla en sursaut. Il battit frénétiquement des paupières, étourdi par le changement de cadre. Le grand brun tourna la tête et vit qu'Harry le regardait en souriant. Il fallut quelques secondes au sorcier pour émerger totalement du songe.
« Harry » murmura-t-il d'une voix rauque.
Ce dernier accentua son sourire.
« Est-ce que ça va ?
- Je rêvais », répondit simplement l'animagus.
Il se releva péniblement mais arrêta d'un geste Harry qui s'était dressé vers lui. Il s'assied contre les barreaux du lit, inspira longuement, puis rouvrit les yeux.
« Quelle heure est-il ?
- Un peu plus de dix heures. »
Sirius regarda derrière son filleul puis demanda :
« Tu es tout seul ?
- Oui, indiqua Harry qui s'installait maintenant face à lui. Ginny doit encore régler quelques détails à la maison mais elle passera en fin d'après-midi. »
Sirius hocha la tête, sombre. L'étau dans sa poitrine continuait de se resserrer. Quelque chose clochait, c'était maintenant une certitude. Restait à savoir s'il souhaitait réellement savoir quoi. Chassant ses pensées inconfortables, le grand brun reprit :
« Tu n'es pas au travail ?
- Oh, j'ai envoyé un hibou en indiquant que je ne serais pas souvent là cette semaine. Ils comprendront, assura le jeune homme.
- Oui, j'imagine… Merci d'être là, répondit-il d'une voix profonde, posant sa main sur la sienne.
- Sirius, si tu savais comme tu m'as manqué… reprit le jeune homme, balbutiant. Lorsque tu es parti, je me suis retrouvé seul, complètement seul. J'étais désespéré. Tu m'avais dit que rien n'était plus important que les amis et la famille que l'on se forgeait. Mais lorsque tu as disparu… Quelque chose s'est brisé. Les autres étaient là, ils m'entouraient, mais une part de moi se sentait plus seule que jamais. Je sais qu'ils seraient horrifiés s'ils m'entendaient et je ne veux pas les faire souffrir… Mais j'ai eu l'impression d'affronter cette guerre seul. »
Sirius l'écouta sans broncher. Son cœur se serra à mesure que son filleul se confiait à lui. Harry semblait avoir gardé ces pensées pour lui et tenté tant bien que mal de ne jamais les partager. Le sorcier était à la fois soulagé qu'il lui en parle et terrifié qu'il ait ressenti cette solitude absolue durant son combat. Il ne savait pas quoi dire afin d'atténuer son fardeau. Harry sembla alors sortir de sa torpeur et contempla son parrain avec horreur.
« Excuse-moi. »
Sirius posa une main sur la sienne.
« Tu viens de revenir et je parle de mes ressentiments… C'est que… Tu es là. Tu es de nouveau là, murmura Harry qui resserra sa main contre celle de son parrain.
- Harry, il n'y a rien à excuser, répondit Sirius en le regardant avec sérieux. Tu pourras toujours compter sur moi. Je regrette de n'avoir pas pu être à tes côtés pour t'aider à porter ce fardeau. »
« Je regrette tellement de choses. » songea l'animagus, étouffant son chagrin.
« Merci », prononça Harry, une larme dévalant sa joue.
Sirius l'effaça doucement et reprit la parole.
« Raconte-moi ce qu'il s'est passé.
- Tu es sûr ? Les soigneurs m'ont dit que ce serait peut-être trop d'informations en peu de temps, objecta Harry, inquiet.
- Je vais bien », lui assura Sirius.
Harry s'installa plus confortablement sur le lit de son parrain. Il enleva ses lunettes et les essuya avec un pan de sa chemise.
« Par quoi commencer ?
- Luna a parlé de votre dernière année à Poudlard. Elle a dit qu'elle était retournée à l'école tandis que tu étais parti à la recherche des Horcruxes.
- Oui… À la mort de Dumbledore, j'ai compris que je n'avais plus qu'une chose à faire. Il fallait que ce soit moi. Je devais mettre un terme à Voldemort, quoiqu'il m'en coûte. Et pour cela, il fallait que je traque un à un les Horcruxes qu'il avait disséminés sur son passage. Je me suis donc élaboré un plan de bataille et je comptais partir sur leurs traces…
- Tout seul ?
- Oui… Mais évidemment, rien ne s'est déroulé comme prévu. Hermione et Ron ont tout de suite compris ce que je comptais faire. Ils m'ont dit que jamais ils ne me laisseraient partir.
- Et ils ont eu raison, murmura Sirius tandis que l'image de la sorcière s'imposait à son esprit.
- Oui, ils ont eu raison, concéda Harry. On a commencé à réfléchir à ce qu'il convenait de faire. Et bien vite, nous avons réalisé que nous ne pouvions pas retourner à Poudlard. Mais personne ne devait être au courant. Ni les parents d'Hermione, ni le Terrier, ni même les membres de l'Ordre… Nous avons gardé le secret jusqu'au mariage de Fleur et Bill.
- Bill ?
- Bill Weasley ! Il s'était entiché de Fleur Delacour lors du Tournoi des trois sorciers. Ils se sont mariés le 1er août 1997. Nous y étions tous… C'est là que le Ministère est tombé. »
Sirius écoutait religieusement son filleul, ses mains crispées sur les siennes.
« Dans le chaos général, nous avons disparu en laissant le moins de traces possibles… Mais ça n'a pas été suffisant. Heureusement, Hermione avait tout prévu. Elle nous a encore sauvés une bonne dizaine de fois.
- C'est bien elle, murmura Sirius en sentant malgré lui ses lèvres s'étirer en un sourire triste.
- Dumbledore ne nous avait laissé que de maigres pistes… Nous avons parcouru des kilomètres et des kilomètres afin de trouver les Horcruxes. Ce fut une quête éprouvante… Combien de fois l'ais-je maudit de ne pas m'avoir donné des informations claires. J'étais désemparé face à notre manque de réussites, plus encore lorsque je croisais leur regard à tous deux. Surtout celui de Ron. À chaque échec, je sentais qu'il me détestait un peu plus. Il m'avait suivi de son plein gré, mais sa famille lui manquait horriblement et il vivait dans la peur constante qu'il leur arrive un malheur et qu'il ne soit pas là pour les aider. C'est finalement ce qui l'a fait partir.
- Ron… Ron vous a laissé ? » demanda Sirius, ébahi.
Harry s'agita et passa une main lasse dans ses cheveux.
« Oui. Probablement le pire souvenir de notre amitié. Nous étions en possession d'un Horcruxe, le médaillon de Serpentard, le vrai cette fois-ci. L'objet n'était pas seulement maléfique, il était vivant. Il investissait nos pensées et fouillait dans ce qu'il y avait de plus sombre en nous. Il s'en nourrissait. »
Sirius frémit d'horreur.
« Un soir, Ron est venu me confronter. L'Horcruxe exerçait davantage de pouvoir sur lui. Nous nous sommes disputés. Puis il est parti… Hermione et moi, nous nous sommes retrouvés seuls. J'étais ivre de rage mais Hermione, elle, était désemparée. Elle avait le cœur brisé. »
Sirius sentit sa main libre se resserrer contre le drap. Une pierre dévalait sa gorge et cognait contre sa cage thoracique. Mais il ne prononça pas un mot.
« Il a fallu du temps avant que nous nous remettions sur les rails. Le départ de Ron avait laissé un trou béant. Après bien des semaines, nous avons réussi à soigner notre relation.
- Elle est restée avec toi jusqu'à la fin ?
- Jusqu'à la fin. Depuis ce soir fatidique, j'ai une dette envers Hermione. Elle a été et est toujours ma plus fidèle alliée. C'est grâce à elle que j'ai pu m'en sortir », déclara Harry avec émotion.
La pierre était dorénavant plus lourde, encombrant son estomac. Sirius hocha la tête, gravement.
« Nous avons continué la route tous les deux, appris des éléments clé pour la poursuite de notre quête. Nous nous sommes rendus à Godric's Hollow le soir de Noël… »
Harry releva alors les yeux vers son parrain et resserra son étreinte.
« J'ai vu ma maison, Sirius. La maison dans laquelle mes parents m'ont élevé… Et j'ai pu leur rendre visite. Voir l'endroit où ils reposaient. », murmura-t-il, les larmes aux yeux.
Sirius passa tendrement sa main contre le bras du jeune homme.
« Ron a fini par nous rejoindre et nous nous sommes rendus à Poudlard comme je l'ai déjà évoqué. Ensemble, nous avons détruit les derniers Horcruxes, puis Voldemort lui-même. La bataille a été terrible. Et nous avons perdu beaucoup d'alliés… »
Sirius sentit que les larmes commençaient à poindre et les effaça d'un geste vif. Il n'était pas capable de penser à Remus. Pas maintenant, alors que la douleur était si vive.
« Sirius, on n'est pas obligés d'évoquer ça maintenant, tenta alors Harry, confus.
- Harry, dis-moi, répondit Sirius, levant ses yeux d'acier vers son filleul.
- Maugrey nous a quitté avant le mariage de Bill et Fleur. Les Mangemorts nous avaient tendu une embuscade. Severus est mort de la main de Voldemort. Et Fred… Fred est mort dans la bataille. »
L'annonce du décès du jumeau Weasley frappa Sirius de plein fouet. Il se souvint des semaines passées avec lui et sa famille à Grimmaurd. Sous bien des aspects, Fred et George lui avaient rappelé ses compagnons Maraudeurs. Mais il n'était plus… Fred n'était plus.
« Quel âge avait-il ? Dix-neuf ans ? Vingt ? Circé… Ce n'était qu'un gamin » pensa-t-il le cœur lourd.
Les deux hommes restèrent silencieux un moment, plongés dans leurs pensées. L'espace d'un instant, Harry avait replongé dans les horreurs de la guerre. Ces événements qu'il avait juré de ne jamais revivre. Sirius, lui, ressentait à cet instant précis un grand vide. Les compagnons de l'Ordre étaient tombés. Son frère était tombé. Dora était tombée… Pour que le monde sorcier retrouve la paix. Toutefois, cela lui semblait être une piètre consolation à lui, revenu d'entre les morts. Une fois encore, il n'avait pas été là lorsque les êtres aimés avaient eu besoin de lui. Que ce serait-il passé s'il n'avait pas disparu ? Lequel de ses amis serait encore vivant, à ses côtés ?
Harry sembla lire dans ses pensées et s'approcha pour le prendre dans ses bras.
« Tu n'es pas responsable Sirius. Une fois de plus, tu n'es pas responsable.
- Harry… ¸murmura le sorcier en passant un bras dans son dos.
- Bon nombre d'entre nous se tiennent encore debout. Nous avons gagné la guerre. Et si nous avons abondamment pleuré nos morts, nous avons aussi célébré les vivants. »
Sirius se détacha légèrement de son filleul pour le regarder. Harry sourit à travers les larmes.
« Rémus et Tonks ont eu un enfant. »
Le cœur de Sirius eut un raté.
« Il s'appelle Teddy…, continua Harry avec émotion. Il est métamorphomage, tout comme Tonks. Et il est magnifique, Sirius. C'est un enfant incroyable. Tu le verras par toi-même. »
Sirius regarda son filleul avec désespoir. L'idée qu'il existe, en ce monde, un descendant de Rémus, était trop dur à encaisser présentement. L'animagus réprima son chagrin et hocha la tête pour marquer son acquiescement.
« Je suis son parrain, reprit Harry dont la voix trahissait le sentiment de fierté.
- C'est formidable Harry », déclara Sirius dans un souffle, faisant tous les efforts du monde pour ne pas trahir son désarroi.
Un bruit résonna alors contre la porte. Les deux hommes tournèrent la tête et virent un médicomage approcher vers eux. Ce dernier salua Harry Potter d'un signe de tête auquel il répondit.
« Je vais te laisser… Il faut que tu te reposes et qu'ils prennent soin de toi. Mais je reviendrais, annonça le jeune homme en se penchant pour étreindre son parrain.
- Je n'aurais pas bougé », répondit Sirius en serrant davantage le jeune homme contre lui. Il le maintint un peu trop longtemps contre lui pour éveiller ses soupçons.
Harry l'observa avec inquiétude.
« Tu veux que je reste ? lui demanda-t-il.
- Non, non non. Ne t'en fais pas pour moi. Rentre chez toi », assura le sorcier en se forçant à sourire.
Harry répondit à son sourire et passa une dernière fois la main contre son épaule.
« Je reviendrais. » promit-il en franchissant la porte de la chambre.
Sirius poussa un profond soupir une fois son filleul parti. Le médicomage s'approcha.
« Je vais simplement vérifier votre état M. Black.
- Allez-y, indiqua Sirius en fermant les yeux. Le chagrin reprit ses droits et il se laissa aller à lui.
- Est-ce que je peux faire quoi que ce soit ? demanda le sorcier.
- Je voudrais dormir, murmura Sirius dans un souffle.
- Je vais arranger ça. »
Le médicomage prononça une formule et l'animagus se rendit au sommeil sans opposer la moindre résistance. Seul le sommeil lui permettrait de s'échapper de cette cruelle réalité.
o O o
Hermione contemplait son bureau, sans rien dire. Elle était arrivée de bonne heure le matin afin de rattraper son absence de la veille mais rien ne semblait pouvoir la sortir de sa transe. Les yeux dans le vague, elle laissait s'écouler les minutes sans parvenir à reprendre ses habitudes. Elle avait passé la nuit lovée dans les bras de Ron, mais l'esprit tourmenté. Le sommeil n'était pas parvenue à la saisir plus de quelques heures.
Miranda passa alors devant son bureau et soupira.
« Mlle Granger, je vous conseille de faire quelque chose. »
Cette dernière battit des paupières et leva les yeux vers sa collègue.
« Vous dites ?
- Vous n'avez manifestement pas la tête à travailler sur vos dossiers. Excusez-moi de vous le dire mais vos cernes dévorent la partie supérieure de votre visage.
- En effet Miranda… merci », répondit la sorcière aux cheveux bouclés en observant son reflet à travers le miroir trônant sur le bureau de sa collègue.
Son regard se reporta alors à un point fixe face à elle et le monde extérieur disparut, emportant avec lui les soupirs pincés de l'autre sorcière.
Ce fut à l'heure du déjeuner où quelque chose parvint enfin à capturer l'attention d'Hermione. Une note de service arriva, voletant légèrement dans leur direction. Miranda ouvrit la porte de leur bureau afin de la laisser passer. L'avion en papier violet fila comme une fusée pour atterrir sur le bureau d'Hermione. Celle-ci fronça les sourcils et la déplia.
« Viens prendre ta pause à la maison. Tu connais le chemin. Gin. »
Hermione sentit son estomac se contracter. La note de service serrée dans la main, elle se leva en un instant et prit son manteau.
« Je mangerais à l'extérieur. Ne m'attendez pas », indiqua-t-elle à la sorcière ainée.
La belle brune s'engagea dans le couloir et en quelques minutes, fut postée devant l'une des imposantes cheminées du Ministère. Elle prit une poignée de poudre de cheminette et prononça distinctement les mots : « 12 Square Grimmaurd ». La sorcière disparut ainsi dans une gerbe d'étincelles vertes.
Elle réapparut dans le salon familial de la grande maison des Black. Hermione fit un pas hors de la cheminée et contempla les lieux. Les années avaient beau avoir passé, elle ne pouvait se résoudre complètement à retourner dans cette maison. Les souvenirs affluaient trop vite. La douleur persistait. Mais avant qu'elle n'ait le temps de s'y attarder, la jeune femme fut accueillie par une sorcière aux longs cheveux roux.
« Hermione, la salua Ginny avec un air inquiet.
- Gin » répondit Hermione avec émotion.
Toutes deux se contemplèrent un long instant sans rien dire. Enfin, Hermione parcourut les quelques mètres qui les séparaient et se précipita dans les bras de sa camarade. Ginny renforça son étreinte, passant une main délicate dans ses cheveux.
« Je suis là, Herm, je suis là. » murmura-t-elle.
La sorcière aux cheveux bouclés se laissa alors aller. Elle s'accrocha désespérément à son amie.
o O o
« Tiens, ça te fera du bien » indiqua Ginny en déposant une une tasse de thé près d'elle. Hermione la remercia d'un hochement de tête. Ginny vint s'asseoir face à elle, une fois que le repas fut installé sur la table. Elle observa son amie, le front plissé. Hermione but une gorgée du liquide chaud et soupira. Ses yeux cherchèrent ceux de son amie.
« Tu sais, déclara-t-elle sans détour.
- J'ai à peine fermé les yeux cette nuit. Harry était intenable. »
Hermione sentit malgré elle ses lèvres s'orner en un sourire triste.
« Il était dans tous ses états lorsque je suis arrivée. J'ai eu une peur bleue Herm… Je ne l'avais jamais vu comme ça. Il était…
- Transporté, compléta Hermione en hochant la tête.
- Je ne l'ai pas cru au départ », avoua Ginny en secouant la tête.
Hermione la regarda avec sérieux. Ginny frottait l'extrémité de ses ongles, le regard perdu.
« C'était impensable… Il avait disparu depuis dix ans. Aucune trace de lui. Tout avait été tenté pour le ramener, du moins c'est ce que je croyais.
- Moi aussi, dit la belle brune dans un souffle.
Ginny releva les yeux vers elle.
- Tu avais tout fait pour le faire revenir. Je t'ai vu perdre le sommeil, chercher des heures et des heures durant un moyen d'inverser le processus. J'ai bien cru qu'on allait te perdre. »
Hermione ne voulait pas repenser à cet épisode de sa vie. Elle avait tant donné pour essayer de le ramener parmi eux. Et voilà que dix années plus tard, il réapparaissait au beau milieu de leurs vies, sans qu'ils ne sachent comment. C'était un aveu d'échec particulièrement cruel.
« Comment il était ?
- Il… Il est… » , commença Hermione mais l'émotion lui étreignait la gorge.
Lorsqu'elle fermait les yeux, elle le revoyait encore et encore dans ce lit d'hôpital. Le regard qu'il lui avait adressé lorsqu'elle était apparue devant lui. « Toute cette dévotion, cet… non ! » s'écria-t-elle mentalement. Face au désarroi de sa compagne, la sorcière aux cheveux roux prit ses mains dans les siennes.
« Il est le même Ginny… Exactement le même, balbutia enfin Hermione, secouée de sanglots.
- Tu veux dire qu'il n'a pas…
- Quoiqu'il se soit passé durant ces dix années, le temps n'a eu aucune prise sur lui… Et je ne sais absolument pas quoi faire ! »
Ses sanglots s'intensifièrent à mesure qu'elle prenait conscience de ses sentiments. Ginny quitta sa chaise pour la serrer contre elle. Hermione se cramponna à elle comme un radeau de sauvetage. Elle avait désespérément besoin d'aide. Ginny la berça lentement, caressant ses longues boucles brunes. Puis elle se mit à genoux pour observer son amie.
« Comment a-t-il réagi lorsqu'il t'a vu ? demanda-t-elle simplement.
- Il… Il était sous le choc. Il m'a quitté lorsque je n'étais encore qu'une gamine et de me voir âgée maintenant… De nous voir tous comme ça… Il était déboussolé.
- Et ensuite ?
- Ensuite… , continua Hermione, crispant ses mains contre celles de sa camarade, ensuite il m'a regardé avec une telle tendresse… C'était comme si ces dix années n'avaient jamais existées. Son regard… était le même que lorsque nous étions ensemble. La même intensité, la même confiance…
- Et toi ? Qu'est-ce que tu as ressenti lorsque tu l'as vu ? reprit Ginny d'une voix douce.
Hermione resta muette un instant, tentant de rassembler ses pensées.
- C'était comme si la foudre s'était abattue sur moi. J'ai cru que mon corps lâchait et que mon esprit s'éparpillait à travers l'univers. Je n'arrivais pas à accepter le fait qu'il soit là… C'était impossible.
- Et ensuite ?
- Ensuite…Nous nous sommes retrouvés tous les deux, une fois Harry et Luna sortis. Je me suis rapprochée de lui. On s'est tenus la main. Il m'a regardé et souri. J'ai eu envie de disparaître… murmura Hermione.
- Pourquoi ? continua Ginny sans faillir.
- Parce que… Parce que je ne pouvais pas assumer son regard. Je ne pouvais pas le regarder dans les yeux après ce que je lui ai fait, balbutia Hermione, ruisselante de larmes.
- Qu'est-ce que tu veux dire par là ?
- Je l'ai trahie Gin ! , s'écria-t-elle enfin, laissant le chagrin l'emporter sur la raison. Je l'ai laissé mourir et je l'ai oublié ! Il est parti et j'ai continué ma vie… Je me suis rapprochée de Ron et j'en suis tombée amoureuse. »
Hermione plongea son visage dans ses mains afin de dissimuler sa honte. Ginny referma ses bras autour d'elle. Elle l'étreignit plus fort à mesure que les sanglots la secouaient. La sorcière aux cheveux roux tenta de réfréner les larmes qui menaçaient de couler à son tour et souffla un grand coup. Elle déposa une série de baisers sur le front de son amie et continua à caresser ses cheveux.
« Hermione, tu ne l'as pas trahi… murmura-t-elle, tentant de la calmer.
- Bien sûr que si Ginny… Je l'ai trahi et il ne me le pardonnera jamais. Je ne me le pardonnerais jamais.
- Sirius finira par comprendre… Cela prendra du temps mais il comprendra ; les choses ont évolué.
- Tu ne te rends pas compte… Il a déjà perdu dix années de sa vie et je m'apprête à lui briser le cœur, gémit la sorcière désemparée.
- Hermione, regarde-moi. »
Elle se redressa, le visage ruisselant de larmes. Ginny les effleura doucement et planta ses yeux ardents dans les siens.
« Est-ce que tu es prête à quitter tout ce que tu as construit ces dernières années ?
- Non, sanglota-t-elle.
- Est-ce que tes sentiments pour Ron ont changé ?
- Non, répéta Hermione en secouant la tête.
- Est-ce que te rendre malheureuse permettra à Sirius d'être heureux ?
- Non, murmura-t-elle.
- Alors ne t'inflige pas ça. Je t'en prie », conclut Ginny en dégageant les boucles désordonnées du visage de sa camarade.
Les yeux désarmés d'Hermione s'attardèrent encore sur Ginny. Elle tenta de répliquer, de se battre comme son point de vue, mais les mots de la sorcière avaient tracé leur voie dans son esprit. La cruelle vérité émergeait, celle qu'Hermione tentait à tout prix de réprimer car elle l'horrifiait. Elle avait fait son deuil. Les paroles de Luna lui revenaient en mémoire. Elle avait oublié. Hermione avait oublié la douleur, la perte, le manque cruel de Sirius à ses côtés. Ce qu'ils avaient partagé durant cet été crucial. Le désespoir dans lequel sa mort l'avait plongée. Elle s'était battue encore et encore pour le garder près d'elle mais le temps avait repris ses droits. Lui avait offert une seconde chance et une vie qu'elle n'était pas prête de sacrifier. Hermione laissa affluer les larmes et accepta son chagrin. La sorcière ne pouvait plus se mentir à elle-même : elle avait trahi.
