Après que Legolas eut apaisé mes angoisses, Gimli vint nous trouver et nous mena jusqu'au Roi. Ce dernier souhaitait nous présenter ses condoléances et nous invita à manger à ses côtés. Le repas, bien que fugace, me rassasia bien vite. Je n'avais nulle envie de manger, mais par respect pour Théoden, j'avalais le peu de nourriture qui se trouvait dans mon assiette.

Il n'y eut point de grandes conversations tenues lors de ce repas. Le peu de mots échangés concernaient surtout le nombre de blessés dû à la bataille contre les wargs. Le conseiller de Théoden s'inquiétait de leur grand nombre et de leur survie sans soins. Touchée par sa détresse et concernée par leur avenir, j'offrais mes services en tant que guérisseuse. Nous étions venus au Rohan pour sauver ce Royaume, et même sans Aragorn notre objectif restait le même. De plus, m'occuper l'esprit ne pouvait qu'être bénéfique. Ainsi, je passais toute l'après-midi à l'infirmerie, guérissant les plus faibles et les plus gravement atteints. Mes amis vinrent me chercher lorsque la nuit fut tombée pour m'encourager à dormir quelque peu. Leur conseil était sage, ainsi, je les suivis sans opposer de résistance.

Ma nuit fut, hélas, entrecoupée de cauchemars, si bien qu'au petit matin, je ne me sentais pas le moins du monde reposée. Le cadavre d'Arargorn m'avait hanté à de nombreuses reprises, me réveillant en sursaut et me faisant trembler comme une feuille.

- « Votre Altesse ? Est-ce que ça va ? » me demanda une paysanne en me lançant un regard inquiet.

Je sortis de ma torpeur et la considérais.

- « Oui, je réfléchissais à la manière dont j'allais guérir votre mari. » répondis-je, en souriant pour la rassurer.

Elle hocha la tête, soulagée. Devant moi, se trouvait un homme allongé sur une civière, comme beaucoup d'autres. Il avait reçu un coup d'épée dans la cuisse la veille, durant le combat et la blessure semblait s'être infectée. Malheureusement, mon après-midi passé à l'infirmerie n'avait pas suffi à soigner tout le monde. Ainsi, j'y étais retourné dans la matinée, désirant aider le plus de monde possible et oublier ma peine et mes cauchemars.

- « Bien, je pense pouvoir régler ceci ! » annonçais-je finalement, en lançant un regard au blessé.

- « Vraiment ! Alors je ne vais pas perdre ma jambe ?! » s'exclama-t-il en souriant.

- « Non ! Nul besoin d'en venir aux extrêmes quand je suis ici. Vous avez cependant eu de la chance que l'infection ne se soit pas généralisée dans la nuit. » signifiais-je tandis que les deux époux se serraient la main, heureux.

Je souriais face à ce spectacle attendrissant. Peut-être qu'un jour, je pourrais également partager ma joie avec lui.

- « Je vais vous endormir avant de commencer. » déclarais-je.

L'homme acquiesça et ferma les yeux. Je posais mes mains sur ses tempes et quelques instants plus tard, sa respiration ralentit.

- « Maintenant, il ne sentira plus la douleur. Il se réveillera lorsque j'aurai terminé. » informais-je son épouse qui semblait légèrement inquiète.

Elle hocha la tête en signe d'approbation et me laissa commencer. Je nettoyais d'abord la plaie avant d'appliquer un onguent pour la désinfecter. Ensuite, je plaçais mes deux mains au-dessus de l'entaille et m'attelais à la cicatriser complètement grâce à un sort.

- « Où se trouve la Princesse Heldaria ? » entendis-je à ma droite.

Je n'eus pas besoin d'ouvrir les yeux pour reconnaître la voix de Legolas. Il semblait pressé de me trouver.

- « Elle soigne Gibbon. Ils sont derrière ce rideau. » indiqua une femme.

J'ouvris les yeux à l'instant où l'elfe nous rejoignit.

- « J'ai terminé. Votre mari est totalement guéri. Il pourra remarcher dès qu'il se réveillera. » indiquais-je en souriant à la femme qui me sauta dans les bras.

- « Merci mille fois ! » me lança-t-elle avant de me lâcher.

Je lui souriais en retour et me tournais vers mon ami.

- « Aragorn est revenu. » m'indiqua-t-il de but en blanc.

Je me figeais, n'osant croire ce que je venais d'entendre.

- « Il a survécu à la chute, Heldaria. Un garde vient de l'apercevoir sur le dos d'Arod, le cheval de Théodred. Il va bientôt pénétrer dans le Gouffre. » insista-t-il en voyant que je ne réagissais pas.

Il s'approcha de moi et prit ma main avec douceur. Je le suivis, encore sonnée. Je ne pourrais le croire qu'en voyant mon ami de mes propres yeux. Après toute cette souffrance, je ne pouvais me permettre d'espérer un tel bonheur. S'il s'avérait que j'étais en train d'halluciner, je ne me remettrais pas du retour à la dure réalité.

L'elfe m'emmena en dehors de l'infirmerie, mais je m'arrêtais brusquement.

- « S'il est vraiment revenu, alors c'est à vous de lui remettre ceci. » lançais-je en lui remettant le collier d'Arwen.

Il le regarda quelques instants avant de me sourire.

- «Je vous en prie, dîtes moi que mes yeux ne se jouent pas de moi... » soufflais-je en portant mon regard derrière l'elfe.

Il se tourna et regarda à son tour.

- « Espèce d'idiot ! T'es vraiment un abruti ! Tu m'as fait une de ces frayeurs, je n'en ai pas dormi de la nuit ! J'ai même eu une crise d'angoisse...» m'exclamais-je en sautant dans les bras d'Aragorn qui ne m'avait pas vu venir.

Il me rattrapa au dernier moment et me serra dans ses bras en riant.

- « Je suis ravi de voir que ma disparition t'ait touché à ce point. Ça prouve que tu m'aimes. » souffla-t-il sans me lâcher.

- « Tu croyais que j'allais en rire. Imbécile ! J'ai cru que j'allais en mourir, heureusement que nos amis étaient là…. Je te préviens, vu ce que je viens d'endurer, t'as intérêt à vivre au moins jusqu'à 700 ans ! » répondis-je en m'écartant.

Il sourit amusé et m'embrassa le front avant de se tourner vers Legolas qui nous regardait, attendri.

- « Vous arrivez tard. » lui reprocha l'elfe, avant de le détailler quelques instants. « Vous avez une mine affreuse. » ajouta-t-il en fronçant les sourcils.

Je souris, amusée. Mes amis en firent de même, contents de se retrouver. Legolas lui tendit ensuite le collier d'Arwen et mon ami le remercia, reconnaissant. Je savais qu'il était heureux de le retrouver, après tout, c'était sa seule preuve que leur amour existait bel et bien.

- « Il me faut parler au roi de toute urgence. » nous indiqua notre ami rôdeur en arborant un air grave.

- « Attendez-moi ! » demanda Gimli en courant vers nous.

Une fois réunis, nous nous dirigeâmes vers le hall principal de la forteresse. Théoden s'y trouvait avec le reste de ses conseillers. Il y avait fait installer son trône et il y passait le plus clair de son temps, réfléchissant à une stratégie pour sauver son peuple.

Quand Aragorn ouvrit les doubles portes en bois et pénétra dans la salle, tous le regardèrent éberlués.

- « Comment ?! Vous êtes vivant ?! » s'exclama Théoden en se levant, n'y croyant pas.

- « Mon seigneur, le récit de ma survie devra attendre un peu. En me dirigeant vers le Gouffre pour vous rejoindre, j'ai été témoin d'un événement qui nous concerne grandement et que vous saurez gré de connaître. En effet, j'ai croisé le chemin des troupes de Saruman. Je puis vous assurer que c'est une grande armée et qu'elle se dirige sur nous. » l'informa mon ami.

Je lui lançais un regard surprit et terrorisé. Il était certain que la décision de se terrer dans cette forteresse était mauvaise, mais je ne m'attendais pas à ce que nous ayons si peu de temps.

- « Une grande armée, vous dîtes ? » répéta le roi en nous tournant le dos.

- « Oui. L'Isengard s'est vidé. » affirma Aragorn, ne me rassurant pas le moins du monde.

- « Combien sont-ils ? » demanda Théoden.

- « Au moins dix mille. » répondit mon ami.

Je me figeais en entendant le chiffre. C'était beaucoup, beaucoup trop. Le Rohan n'avait pas la force et les hommes nécessaires pour se battre face à dix mille guerriers. Même s'il s'agissait d'Uruk et qu'ils n'étaient pas bien intelligents, ils avaient tout de même une certaine force.

Je lançais un regard à mes amis, qui semblaient partager mon avis. Dans l'état actuel des choses, nous étions condamnés.

- « Dix mille... » s'estomaqua Théoden en nous regardant.

- « C'est une armée constituée dans un seul but. Détruire le monde des hommes. Ils seront là à la tombée de la nuit.» informa Aragorn, ne faisant qu'accentuer la tension qui régnait dans la pièce.

Il nous restait très peu de temps pour nous préparer. Je fermais les yeux sous le poids de ces nouvelles. Je venais seulement de retrouver mon ami, et j'étais à nouveau forcée de faire face à la triste réalité : il était mortel, j'étais une elfe, si nous mourions – et c'était presque certain désormais – nous ne nous reverrions plus. J'allais à nouveau le perdre, tout comme Gimli. Ma seule consolation était que Legolas m'accompagnerait, un chagrin était toujours moins lourd à porter à deux.

- « Et bien qu'ils viennent ! » se résigna le Roi en s'éloignant. « Allons faire un tour de la forteresse. Commençons à préparer nos défenses ! » ordonna-t-il ensuite.

Il exigea que chaque personne - de sexe masculin bien évidemment - capable de tenir une arme soit prête à se battre au crépuscule, et ordonna que la porte du fort soit renforcée. Il nous emmena ensuite à l'extérieur des remparts et nous assura que nous serions capables de couvrir la chaussée et la porte. Il tenta de se rassurer comme il le pu, soulignant les succès du Gouffre au temps jadis. Il était terrifié, comme nous tous, et même si sa volonté de ne pas se laisser abattre était tout à son honneur, sa candeur risquait de nous coûter beaucoup. En effet, il refusait d'entendre nos conseils et nos avertissements, si bien qu'il en devenait orgueilleux.

- « Ils se briseront sur cette forteresse comme l'eau sur les rochers. Les hordes de Saruman vont piller et brûler, mais cela, nous l'avons déjà vu. Les récoltes peuvent être ressemées, les maisons reconstruites. À l'intérieur de ces murs, nous leur survivrons. » clama-t-il une fois que nous eûmes atteint les remparts supérieurs.

Je levais les yeux au ciel, agacée. Qu'il tente de se rassurer, je pouvais le comprendre, mais le déni ne nous mènerait à rien. Il ne voyait décidément pas l'enjeu de cette bataille. Il tentait de se convaincre que nous allions faire face à un siège, mais ce n'était pas le cas. Saruman voulait un génocide, il n'avait aucune requête. Son seul but était la mort des hommes.

- « Ils ne viennent pas anéantir les récoltes et les villages du Rohan. Ils viennent anéantir son peuple. Jusqu'au dernier enfant. » lui signifia Aragorn qui partageait mon agacement.

Théoden se tourna vers lui brusquement, le visage fermé, et lui attrapa le bras sans ménagement. Je me tendis et m'apprêtais à intervenir, mais Legolas me retint.

- « Que voulez-vous que je fasse ? Regardez mes hommes, leur courage ne tient qu'à un fil. Si telle doit être notre fin alors je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour qu'elle reste gravée dans les mémoires. » lança-t-il fermement en baissant le ton.

Sa volonté de cacher la réalité à ses soldats partait d'un bon sentiment, mais était inutile. Tous savaient ce dont il adviendrait de nous.

- « Vous avez besoin d'aide, mon seigneur. Envoyez des cavaliers en quérir. » insista Aragorn alors que le Roi s'éloignait à nouveau.

- « Et qui viendra ? Les elfes, les nains. Oh ! Peut-être bien la légendaire armée des Terres Éloignées ! » commença Théoden en me lançant un regard sévère. Je me tendis à l'extrême, commençant sérieusement à en avoir assez. « Nous n'avons pas la chance d'avoir autant d'amis que vous. Les anciennes alliances sont mortes. » continua-t-il sans démordre.

- « Le Gondor répondra. » affirma mon ami.

- « Le Gondor ! Où était le Gondor lorsque l'Ouestfolde est tombé ?! Où était le Gondor lorsque nos ennemis nous ont encerclés ?! Où était le… Non, seigneur Aragorn, nous sommes seuls. » clama-t-il avec colère.

- « Ah non mais maintenant ça suffit ! Je veux bien être compatissante, cependant vous commencez à me taper sur les nerfs. Ce que vous pouvez être arrogant et dramatique... » m'exclamais-je avec un agacement profond.

Le roi me regarda outré et furieux.

- « Comment... » commença-t-il en criant.

Legolas tenta de me retenir et Aragorn me lança un regard réprobateur.

- « Non. Vous voulez bien écouter pour une fois ?! Vous vous placez en victime et vous avez raison. Vous avez été attaqués de plein fouet, votre peuple à souffert, vous avez perdu votre fils. C'est douloureux et injuste, mais vous pensez vraiment être le seul à qui cela arrive ?! Mon seigneur, le mal a envahi toutes les régions. Sauron et Saruman visent toute la Terre du Milieu ! À l'heure qu'il est, je suis certaine qu'ils envisagent déjà de s'attaquer aux Hobbits. Vous voulez savoir où était le Gondor ? Il était en train de se défendre face au Mordor. Leurs forces diminuent de jour en jour à mesure que le mal grandit, ce sont les premières victimes. Sauron ne vous vise pas seulement vous, ils nous visent tous. Votre colère et votre chagrin sont compréhensibles. Vous voulez épargner vos hommes de la triste vérité et je peux aisément le comprendre, mais le déni ne vous apportera rien. Nous ne survivrons pas si vous rester sur la défensive et que vous refusez toute aide. Encore une fois, nous n'essayons pas de vous décrédibiliser, nous voulons juste vous aider. » insistais-je en tentant de rester calme malgré ma colère.

Même si je n'en étais pas la championne, la diplomatie était de mise face à lui.

- « Il est trop tard pour envoyer des messagers. Si vous voulez aider, allez donc faire ce que vous savez faire de mieux : soignez mes soldats. » répondit-il froidement en nous tournant le dos.

Il s'éloigna en vitesse et il eut bien raison. S'il était resté rien qu'une seconde de plus, je l'aurais étranglé. Je me mordis la langue pour ne pas l'insulter.

- « Heldaria, calmez-vous. Il n'en vaut pas la peine. » me lança Gimli en posant une main rassurante dans mon dos.

- « Il a la mémoire bien courte. Il y a peine quelques jours, c'est nous qui l'avons sauvé de son misérable sort. Sans nous, il croupirait encore sur son trône. » murmurais-je avec amertume.

- « Gimli a raison. Allons-y, ça ne sert à rien de le raisonner. » insista Aragorn en attrapant mon visage pour que je le regarde et que je me calme.

Je soufflais d'exaspération, mais décidais tout de même de les écouter.

- « Bien. Je vais aller à l'infirmerie. Même si ça ne me plaît pas de lui obéir, plus de soldats sur pieds nous donnent plus de chance de survie. » décidais-je. « Ah ! Au fait, il faut que je soigne ton bras. » repris-je en posant mon regard sur l'entaille qu'avait Aragorn au niveau de l'épaule.

- « Fermiers, forgerons, garçons d'écurie. Aucun n'est un soldat. » remarqua Aragorn, dépité.

J'avais passé quelques heures à soigner le plus d'hommes possible. Malheureusement, la nuit avait commencé à tomber bien vite et tous ceux qui n'étaient pas en état de se battre avaient reçu pour ordre de se diriger dans les cavernes. J'avais donc retrouvé mes amis à l'armurerie, n'ayant plus rien à faire. J'étais assise près de Gimli et je me concentrais sur l'une de mes épées que j'aiguisais avec attention.

- « La plupart ont déjà vu passer trop d'hivers. » rajouta le nain, n'améliorant pas notre humeur.

- « Ou trop peu. » insista froidement Legolas. « Regardez-les, ils sont terrifiés. Ça se lit dans leurs yeux. » poursuivit-il sur le même ton.

Les conversations cessèrent et tous portèrent leur attention sur l'elfe. Je le regardais, surprise. Ça ne lui ressemblait pas de réagir ainsi. Ce n'était pas bien sage de miner le moral des troupes avant une bataille. De plus tout le monde en était conscient, le faire remarquer n'était vraiment pas nécessaire.

- « Il y a de quoi… à 300 contre 10 000 ! » continua-t-il en elfique cette fois-ci.

Il aurait sûrement dû commencer dans cette langue, ça nous aurait évité tout ce cirque. Je lançais un regard à Gimli qui ne comprenait rien.

- « Ils se défendront mieux ici qu'à Edoras. » affirma Aragorn pour relativiser.

- « Aragorn, c'est une bataille qu'ils ne peuvent gagner. Ils mourront tous ! » insista l'elfe.

- « Alors je mourrais comme l'un d'entre eux ! » s'énerva mon ami en se rapprochant de Legolas.

Exaspérée par leur scène inutile et franchement pas bienvenue, je me levais d'un bond faisant tomber ma lame.

- « Assez ! Vous êtes ridicules. Aragorn, sortons de là avant que vous ne leur fassiez perdre tout leur courage. » m'énervais-je en me mettant entre eux.

Je poussais mon ami vers la sortie, récupérais mon arme et lançais un regard réprobateur à Legolas. Toute colère avait disparu de son visage, laissant place à la culpabilité. Il tenta de nous rattraper, mais fut arrêté par Gimli.

- « Messieurs, tout va parfaitement bien. Ils sont simplement fatigués et tendus, comme vous tous. Gardez espoir ! Tout n'est pas perdu tant que le courage demeure ! » clamais-je en leur souriant avant de les quitter à mon tour.

Même si je ne croyais pas à la victoire, cela ne voulait pas dire qu'elle était impossible.

- « Heldaria ! » entendis-je une petite voix m'appeler.

Je tournais la tête vers Eothain qui courut vers moi. Je fronçais les sourcils en voyant son accoutrement. Il portait une armure et tenait une épée.

- « Eothain ! Tu as été enrôlé pour te battre ?! » m'exclamais-je en m'accroupissant pour être à sa hauteur.

- « Oui. Ma maman et Frida sont très inquiètes, et moi, je suis terrifié. » souffla-t-il en tremblant légèrement.

Ma haine contre Théoden ne fit que grandir un peu plus. Quelle idée de recruter des enfants pour la bataille !

- « Bien. Il est hors de question que tu vois ces horreurs. Viens avec moi, je vais te ramener à ta famille. » déclarais-je en lui prenant la main.

Un sourire immense se dessina sur son visage, me confirmant que ma décision était la bonne. Il était trop jeune pour voir les horreurs qui allaient suivre.

Nous nous dirigeâmes en vitesse vers l'entrée des cavernes qui, par miracle, n'étaient pas encore scellées.

- « Halte-là ! Où allez-vous avec ce garçon ? » nous demanda un soldat en se mettant en travers de notre chemin.

- « Je le ramène à sa mère. » répondis-je simplement.

- « Le Roi a ordonné que tous les hommes capables de tenir une arme se battent. » m'informa-t-il.

- « Les mortels grandissent plus vite que les elfes, cependant, je suis certaine qu'à huit ans, aucun n'est un homme. » répondis-je en commençant à m'agacer.

- « Il est assez grand pour tenir une arme, alors il se bat. » insista-t-il en tentant de le tirer vers lui.

Je lui flanquais mon poing dans le nez.

- « Essayes de reposer tes sales pattes sur lui et tu ne pourras bientôt plus enfanter. Je me contrefiche des ordres de ton roi, ce n'est qu'un enfant et il n'a pas l'âge de voir des horreurs pareilles. Si vous voulez plus de soldats, il y a des dizaines de femmes prêtes à défendre leurs terres dans ces cavernes ! » clamais-je avant d'entraîner Eothain à l'intérieur.

Je savais qu'il y avait d'autres enfants là-haut mais je ne pouvais plus aller les chercher. Mon cœur se brisait à l'idée de ce qu'il allait leur arriver. J'avais au moins pu faire quelque chose pour Eothain.

Il rejoignit sa mère en courant quand il l'aperçut. Ils me remercièrent chaudement, avant que je ne retourne à l'extérieur. Le soldat que j'avais frappé était assis un peu plus loin et se tenait le nez.

- « Nous allons fermer les portes maintenant. » m'informa un autre homme en s'approchant de moi. « Je vous assure que ça ne nous plaît pas non plus de voir nos fils se battre, mais nous n'avons pas d'autres options. » continua-t-il en soupirant.

- « Bien sûr que vous aviez d'autres options, seulement, vous préférez la misogynie et la fierté à la sagesse. Vous avez choisi de condamner vos enfants alors que vos femmes sont capables de se battre. Votre roi aurait pu envoyer des messagers quérir de l'aide dès son réveil, mais il ne l'a pas fait, par orgueil et amertume. » répondis-je en m'éloignant.

Je me dirigeais vers le soldat blessé et il recula en me voyant arriver.

- « Je viens seulement vous soigner. Nous sommes déjà bien peu alors mieux vaux ne pas nous priver de vos services. » l'informais-je.

Il se releva et se laissa faire sans un mot. Quand j'eus terminé, je décidais de me diriger à nouveau à l'armurerie pour tenter de retrouver mes amis. L'heure du combat approchait et je souhaitais passer du temps en leur compagnie avant la catastrophe. C'était peut-être nos derniers instants ensemble.

- « Nous avons eu raison de vous faire confiance jusqu'ici. Pardonnez-moi, j'ai eu tort de désespérer. » entendis-je Legolas s'excuser tandis que je pénétrais dans la pièce.

- « Il n'y a rien à pardonner, Legolas. » lui répondit Aragorn, touché.

Je souris, rassurée que leur altercation n'est pas laissé de rancune.

- « Vous êtes mignons, je trouve. » déclarais-je en attirant leur attention.

- « Te voilà ! Où étais-tu ? Je t'ai cherché partout. » me demanda Aragorn.

- « J'ai ramené Eothain à sa famille. Théoden a demandé à ce que les enfants se battent, c'est une folie ! » répondis-je en serrant les dents.

- « Tu as bien fait. Il a déjà vu assez d'horreurs. » acquiesça-t-il tandis que je descendais les escaliers pour les rejoindre.

Gimli débarqua alors à nos côtés, tentant d'enfiler correctement une cotte de mailles.

- « Rahh… Si on avait le temps, je ferais ajuster cette cotte. » râla-t-il en la lâchant. Elle était bien trop grande pour lui, si bien qu'une bonne partie traînait au sol. « Elle est un petit peu serrée à la poitrine. » nous expliqua-t-il.

Je ris face à cette scène, accompagnée de Legolas et Aragorn. Nous avions un nain plutôt comique à nos côtés.

- « Vous aussi, vous devriez vous préparer. » me conseilla l'elfe.

- « Je suis déjà prête. » répondis-je en haussant les épaules.

- « Heldaria, il est hors de question que vous vous battiez sans protections. » me lança-t-il en fronçant les sourcils, mécontent.

- « Il a raison. File enfiler une cotte de maille. » rajouta Aragorn.

- « Oh non… ça recommence. Les papas poules sont de retour... » soufflais-je légèrement en levant les yeux au ciel.

- « Heldaria, ils n'ont pas tort. Même moi, je me suis habillé. Et je suis un nain ! » les encouragea Gimli.

- « Messieurs, douteriez-vous de mon habilité au combat ? » demandais-je en cherchant à éviter le sujet.

Je n'aimais pas me battre en armure, du moins pas celle des hommes. Elles étaient bien trop lourdes et encombrantes. J'avais besoin d'amplitude et de légèreté et empiler du métal sur mon corps donnait l'effet inverse.

Ils s'apprêtèrent à répondre, mais nous entendîmes le son d'un cor retentir dans le for.

- « Ce n'est pas un cor d'orque. » nous informa Legolas en courant vers la sortie.

- « Les elfes ! » m'exclamais-je en souriant.

Nous le suivîmes en vitesse, heureux au possible. Avec leur aide, ce combat n'était peut-être pas sans espoir.

- « J'apporte la parole d'Elrond de Fondcombe, et mes amis celle d'Aegnor et de Virani des Terres Éloignées. Autrefois, une alliance existait entre les elfes et les hommes. À cette époque, nous avons combattu et péri ensemble. » entendis-je alors que nous arrivions en courant à l'entrée du Gouffre. « Nous sommes venus honorer cette allégeance. » termina Haldir en nous regardant, fièrement.

Je lui lançais un sourire flamboyant avant que mes yeux ne se posent sur deux individus que je connaissais bien. Dagnir et Eldacar, mes frères. Mon cœur fit un bond dans ma poitrine tant j'étais heureuse de les voir ici. Mon Royaume avait réagi à la détresse du Rohan tout comme la Lorien et Fondcombe. Les elfes entraient en guerre contre Sauron et Saruman et la révélation de l'existence de Cenya ne devait pas y être pour rien.

- « Bienvenu. » lança Aragorn en se dirigeant vers Haldir et mes frères.

Ils se saluèrent avant qu'Aragorn ne prenne Haldir dans ses bras. Il fut d'abord surpris, mais répondit à son accolade en souriant. Mon ami en fit de même avec mes frères – ils furent bien moins timides que le capitaine de la Lothlorien – heureux de les revoir.

- « Vous êtes plus que bienvenus. » leur signifia-t-il en souriant, rassuré.

- « Il a raison ! Votre venue est un vrai regain d'espoir. » m'exclamais-je en prenant également Haldir dans mes bras. « Et vous ! Que faites-vous là ?! » demandais-je à mes frères en m'écartant de mon ami.

- « Mais quel chaleureux accueil tu nous fais ! Si tu veux, on peut repartir. » me lança Eldacar, faisant mine d'être vexé.

- « Laisse mon frère, son expédition en Terre du Milieu lui fait complètement perdre la tête. Allons, faisons demi- tour. » ajouta Dagnir en posant sa main sur son épaule.

Je secouais la tête en souriant, amusée par leur comportement. Leur présence me faisait chaud au cœur.

- « Mais quelle bande de susceptibles. Venez là mes frères ! Vous m'avez manqué. » m'exclamais-je en les prenant dans mes bras.

Ils me serrèrent fort contre eux avant de m'embrasser le front.

- «Ada nous a envoyé vous aider sous le conseil de la Dame de Lorien. » m'informa Dagnir.

- « Ama et lui ont décidé d'écouter ton conseil et de s'ouvrir à nouveau sur le monde. Ils disent que c'est aussi leur combat. » ajouta Eldacar.

- « C'est bien, très bien même. Il était temps que ça arrive. » répondis-je en souriant.

Ils hochèrent la tête, d'accord avec moi.

- « Tiens tiens ! Legolas, mon vieux. Ça faisait un long moment que l'on ne s'était plus vu. » lança Dagnir en apercevant mon ami dans mon dos.

Je m'éloignais pour les laisser se retrouver, voir mes frères aussi proches de l'elfe me rendait étrangement très heureuse. Je rejoignis Gimli non loin.

- « Votre sourire me dit que vous êtes content de voir des elfes. » murmurais-je à son attention.

Il s'arrêta de sourire et se racla la gorge en m'entendant.

- « Je suis content parce que les renforts sont arrivés. Leur nature elfique ne me plaît pas beaucoup. Vos frères auraient tout de même pu ramener des nains, il n'y a que des elfes dans vos rangs ! » me répondit-il de son ton râleur.

- « Ils habitent bien trop loin de la frontière. S'ils étaient venus, nos amis ne seraient jamais arrivés à temps. » expliquais-je au nain.

- « Heldaria ! Nous attendons tes ordres. » m'indiqua Dagnir en s'approchant.

Je lui lançais un regard surpris, n'ayant pas pensé à cela.

- « Suivez ceux d'Aragorn. Il connaît toute la stratégie de combat, il vous guidera. » répondis-je, trouvant cette décision plus sage.

Après tout, j'avais passé plus de temps à l'infirmerie qu'à écouter les stratégies de guerre qui avaient été décidées.

- « Tu es sûre ? » demanda Aragorn.

- « Si tu comptes devenir Roi, tu dois commencer à t'entraîner. Je te laisse les rênes. » acquiesçais-je en souriant.

Aragorn me sourit et hocha la tête.

- « Bien, il nous reste une petite heure avant que les Uruk n'arrivent. Qu'avez-vous prévu ? » demanda Eldacar en regardant mon ami et Théoden.

Ce dernier n'avait pas pipé mot depuis l'arrivée de nos amis. Lui et ses hommes nous regardaient à la fois émerveillés et surpris.

- « Allons dans la grande salle pour en discuter. Nous serons plus à l'aise. » proposa le Roi en sortant de sa torpeur.

Ainsi, moi, mes amis, Haldir, mes frères, Théoden et son second, nous retrouvâmes dans la salle du trône. Théoden et Aragorn nous expliquèrent comment ils avaient prévu de se battre et il fut ainsi décidé que les elfes soient sous le commandement de mon ami et les hommes sous ceux de leur roi.

- « Parfait. Maintenant que tout est clair, allons l'expliquer à nos soldats. » s'exclama Dagnir avec son entrain naturel.

Mes frères avaient toujours été optimistes et joyeux, quelque que puisse être le moment. Ils avaient le don de détendre l'atmosphère qu'importe le degré de tension qui se trouvait dans la pièce et je devais avouer que leur légèreté faisait du bien au moral, surtout avant une bataille comme celle qui nous attendait.

Ils s'apprêtèrent à sortir quand soudain, ils se stoppèrent net. Ils se tournèrent vers moi d'un même mouvement, et me scrutèrent quelques secondes. Je fronçais les sourcils, ne comprenant pas vraiment à quoi ils jouaient.

- « Dis-nous, tu ne comptes pas te battre contre dix mille Uruk enragés dans pareille tenue ? » me demanda Eldacar, d'un ton calme mais menaçant.

- « Non, parce que si c'est le cas. Je puis t'assurer que nous t'enfermerons dans cette pièce jusqu'à ce que tout soit fini. » continua Dagnir sur le même ton.

- « Je n'ai rien de plus à mettre. » répondis-je en haussant les épaules.

Ce qui était faux, bien sûr. Je vis Aragorn et Legolas me lancer un regard désapprobateur.

- « Je suis certain que ce bon vieux Roi Théoden aura la générosité de te prêter une cotte de mailles. » répliqua Eldacar, attirant le regard vexé du dit roi.

- « Vous savez très bien que je déteste me battre ainsi vêtue. Je ne peux pas bouger à mon aise ! Je serai bien plus en danger dans une de ces chemises de fer, incapable de me battre normalement. » me défendis-je en fronçant les sourcils.

- « Bien, alors tu resteras ici. » déclara-t-il, implacable.

- « Hors de question ! » m'exclamais-je en commençant à m'énerver.

Je vis mes frères me sourire moqueusement.

- « Mes amis, j'ai peut-être la solution à votre problème. La dame m'a donné ceci avant que nous ne quittions Caras Galadhon. C'est un cadeau pour vous, Princesse. » m'informa Haldir en nous montrant un paquet posé sur une table.

Je le récupérais et regardais son contenu. Il s'agissait d'une tenue de combat elfique, destinée à être portée par une elleth. L'intérieur était fait de mithril et l'extérieur de cuir végétal, créé et pensé pour la protection des soldats. La souplesse et la légèreté de la matière donnaient l'impression de ne rien porter et laisser toute liberté de mouvement.

- « C'est magnifique ! Elle est d'une telle qualité qu'elle surpasserait presque la mienne. » m'exclamais-je émerveillée en repensant à ma tenue de guerre qui m'attendait à l'armurerie d'Azur.

- « Haldir, mellon, cela nous aurait arrangé de l'enfermer ici. » râla Eldacar en le faisant sourire.

- « Merci, mon ami. C'est un très beau présent ! » remerciais-je le capitaine de Lorien.

Il me salua en souriant tendrement tandis que mes frères secouaient la tête dépités.

- « Arsh kair, irum narashair ! » (Prenez ça, bande d'imbéciles !) leur lançais-je en gnominé, avec un sourire espiègle.

J'étais la seule de ma fratrie, hormis Turindo, à maîtriser le gnominé. Du moins, ce fut le cas jusqu'à ce jour.

- « Ateir ralach sirn ? Diruba! » (T'en veux une ? Idiote !) me répondit Eldacar menaçant.

J'ouvris de grands yeux, surprise qu'ils m'aient compris.

- « Oui, petite sœur. Nous avons appris le gnominé nous aussi... » me lança Dagnir en s'approcha dangereusement. « Alors ne t'avise plus de nous insulter, narasha. » reprit-il en me donna une tape sur le front.

Un rire nerveux sortit de ma bouche. Je n'étais pas très contente d'avoir perdu mon moyen de jurer en toute impunité. Un regard de côté me permit de voir que mes amis trouvaient notre échange très amusant et que Théoden et Gamelin ne comprenaient rien à ce qu'il se passait.

- « Maintenant, habilles-toi et rejoins nous quand tu seras prête. » m'ordonna Eldacar en retrouvant son sourire enfantin.

Ils sortirent et les autres les suivirent, certains le sourire aux lèvres, le reste complètement perdus.

- « Pfff… C'est malin. Comment vais-je faire pour râler maintenant ? » soufflais-je, agacée.

- « C'est assez déroutant de vous voir vous disputer avec vos frères. Dans une langue qui m'est inconnue qui plus est.» me lança Legolas, en souriant.

Je relevais la tête vers lui, étonnée de le voir. Plongée dans mes pensées, je n'avais pas remarqué qu'il était resté dans la salle.

- « J'imagine, oui. Cependant, vous aurez tôt fait de vous y habituer, car cela risque d'arriver très souvent. » répondis-je en riant.

- « Ce n'est pas pour me déplaire. Je trouve que c'est une très bonne distraction. » répliqua-t-il, amusé.

Le voir aussi détendu et prompt à rire me donna des frissons. Je l'avais toujours trouvé magnifique, mais en cet instant, il l'était plus que de mesure. Je ne savais pas si c'était l'angoisse de la bataille ou le simple fait de le voir rire, mais je ne pouvais m'empêcher d'être en totale admiration devant lui. Je sus, à cet instant même, qu'il n'y avait aucun retour en arrière possible. Je l'aimais, infiniment, inconditionnellement et irrémédiablement. Mon cœur était à lui et le resterait à jamais. Que cela me plaisait ou non, je lui appartenais pour l'éternité.

Un silence paisible s'installa, tandis que je me perdais dans ma contemplation. Ses yeux rieurs s'étaient posés dans les miens et un léger sourire flottait encore sur ses lèvres. Aucun de nous ne parla pendant quelques secondes. Je n'avais aucune envie de mettre fin à cet instant. Je n'avais aucun désir de retourner à la réalité. Je voulais rester là, à l'admirer continuellement, enregistrant dans mon esprit chaque petit détail qui faisait de lui ce qu'il était : le bleu profond de ses yeux, la parfaite délicatesse de ses traits, la finesse irrésistible de ses lèvres, la blondeur presque pure de ses cheveux, sa grande taille démesurément étourdissante… Il était, définitivement, l'elfe le plus beau que je n'eus jamais croisé.

- « Je n'aurai jamais pensé qu'un jour, je tomberais sous le charme de la sœur de mes amis d'enfance. » souffla-t-il au bout de ce qui me parut des heures.

Je me figeais, n'osant croire ce que je venais d'entendre. Venait-il réellement de dire qu'il… ?! Non… Impossible.

- « Qu… Qu'avez-vous dit ? » demandais-je dans un murmure.

Il s'approcha doucement, tandis que je restais immobile. Je n'osais faire un geste de peur que tout ne soit qu'un songe duquel je me réveillerai pantelante et désespérément triste.

- « J'ai dit… Que j'étais tombé irrémédiablement amoureux de vous, Heldaria. » chuchota-t-il au creux de mon oreille.

Son souffle sur ma peau déclencha une multitude de frissons. Mes jambes devinrent molles et ma respiration s'accéléra grandement. Je n'avais pas rêvé. J'avais bien entendu ce qu'il avait dit. Il… Il m'aimait aussi.

Mes yeux plongèrent dans les siens tandis qu'il reculait son visage pour me regarder. Un sourire amusé déforma ses lèvres me faisant rougir. Comment pouvait-il être aussi à l'aise en avouant une chose pareille ?! Je n'avais encore rien dit et j'étais déjà mue par la gêne et la surprise. Il sembla remarquer mon trouble.

- « Je ne pensais pas que vous puissiez être si étonnée. Je n'ai fais aucun effort pour vous le cacher.» m'avoua-t-il sans perdre son amusement.

- « Je… je ne pensais pas possible que vous m'aimiez également... » répondis-je en rougissant.

J'ouvris de grands yeux quand je me rendis compte de ce que je venais de dire. Venais-je réellement de lui avouer mes sentiments ?! Je ne le regrettais pas, bien évidemment. Seulement, je me surpris de la spontanéité de ma phrase. Je m'étais tant tordu les méninges pour arrêter d'espérer son amour que ce moment paraissait totalement irréaliste. Et j'étais là, à présent, me tenant devant lui, à deux doigts de m'écrouler sous l'embarras et le soulagement, lui avouant mes sentiments si inattendus.

Ses lèvres s'étirèrent dans un grand sourire et ses yeux semblèrent briller d'une nouvelle étincelle.

- « Pouvez-vous répéter ? » me demanda-t-il amusé.

Je rougis de plus belle devant son assurance. Si seulement j'étais capable d'être aussi à l'aise que lui. Je ne me reconnaissais presque pas, je n'avais jamais été aussi gênée et intimidée. Ce sentiment était à la fois détestable et agréable.

- « Je vous aime. » murmurais-je en fixant mes pieds.

Je n'arrivais plus à le regarder dans les yeux. La profondeur de son regard me déstabilisait en tout point.

- « Pardon, je n'ai pas entendu. Vous disiez ? » insista-t-il en soulevant mon menton de son pouce, me forçant à plonger mes yeux dans les siens.

Je serrais les dents, commençant à en avoir marre de lui donner matière à rire en étant si peu maîtresse de mes réactions. Il fallait que je me reprenne. J'étais Heldaria, Princesse d'un grand royaume et guerrière émérite. J'étais capable de retrouver mon assurance, même face à Legolas, objet de tous mes désirs, maître de mon cœur. Ainsi, je plantais mes yeux dans les siens me forçant à ne plus les lâcher.

- « J'ai dit que je vous aimais. » répondis-je sans détour.

Il sourit, attendri avant de se rapprocher un peu plus, ses lèvres à quelques centimètres des miennes. Mon cerveau cessa de fonctionner, mon cœur arrêta de battre et ma respiration cessa. Il était si proche, mais semblait à la fois si loin. J'avais une irrésistible envie de l'embrasser, et son souffle léger, s'écrasant sur ma bouche, ne m'aidait pas vraiment à garder la tête froide.

- « Tant mieux. Je vais t'embrasser maintenant.» souffla-t-il, déclenchant de plus amples frissons.

- « D'accord... » fut tout ce que je sus répondre.

- « Tais-toi... » m'ordonna-t-il en souriant.

Il s'approcha un peu plus, ses lèvres frôlant désormais les miennes. Il allait vraiment le faire, je ne rêvais pas. Non. Ce n'était pas un songe. Il posa une main sur ma nuque et l'autre sur mes reins, et m'attira contre lui. La porte s'ouvrit alors brusquement, nous faisant sursauter.

- « Ah ! Les voilà ces deux-là ! Les Uruk arriv… Oh... » s'exclama Gimli en nous apercevant.

Nous regardâmes les nouveaux arrivants et je devins rouge écarlate quand j'aperçus mes frères et le nain, un sourire hilare aux lèvres.

- « Eh bah enfin ! Je commençais à me demander si je vivrais assez vieux pour vous voir franchir le pas. » ria le nain en applaudissant gaiement.

- « Je t'avais bien dit qu'il y avait un truc entre ces deux-là ! » s'exclama Eldacar en donnant un tape dans le dos de son jumeau.

- « Leurs regards ne trompaient personne ! Quand la famille va apprendre la nouvelle, ils ne vont pas en revenir. » répondit Dagnir en riant fortement.

Legolas arborait un sourire amusé, comme si tout ceci n'était pas le moins du monde embarrassant. Je levais les yeux au ciel, désespérée. Mieux valait que je me détendis aussi, je n'avais aucune raison de me sentir mal. Il m'aimait lui aussi, et c'était tout ce qui m'importait.

- « Tss ! Vous auriez pu choisir un meilleur endroit. » râla le nain à nos côtés, faisant apparaître un sourire amusé sur le visage de ceux qui purent l'entendre.

Mes amis, mes frères et moi-même nous trouvions sur le chemin de ronde du Fort accompagnés d'une grande partie des troupes elfiques. Les autres se trouvaient dans l'enceinte du fort, dans la cour basse, derrière nous. Quant à Théoden et ses hommes, ils s'étaient postés sur la tour principale.

Au loin, les troupes de Saruman s'avançaient vers nous, couvert par l'obscurité de la nuit. Le son rythmé de leurs pas parvenait jusqu'à nos oreilles et semblait même résonner dans le gouffre silencieux. Tous étaient concentrés sur l'ennemi approchant, le visage figé par l'angoisse et le corps tendu par la peur.

- « Mon ami, quelle que soit votre chance, pourvu qu'elle passe la nuit. » lança Gimli à Aragorn qui venait d'arriver derrière nous.

Je tournais la tête vers mon ami rôdeur qui ne répondit pas. En effet, si sa bonne fortune pouvait nous être utile, cela nous arrangerait bien. Un éclair fissura le ciel pendant quelques secondes suivi du son tonitruant de l'orage. Je fronçais les sourcils, cela commençait mal.

- « Vos amis sont avec vous, Aragorn. » assura Legolas.

- « Pourvu qu'ils passent la nuit. » insista Gimli, sombrement.

- « Allons, maître nain. Ne soyez pas pessimiste ! » lui lança Dagnir avec une tape sur l'épaule.

- « Nous sommes de très bons guerriers, nous survivrons ! » assura Eldacar.

Mes frères se trouvaient aux côtés du nain, tandis que j'étais entre Legolas et Haldir.

Pour toute réponse, Gimli grogna, pas vraiment convaincu. En vérité, personne ne l'était.

- « Ne meurs pas. Sauve-toi, s'il le faut, mais ne meurs pas. » me souffla Legolas en s'approchant pour n'être entendu que de moi.

- « Je ne partirai nul part sans toi et je ne fuirais devant aucun combat. Quoi qu'il arrive, nous finirons bien par nous retrouver. » répondis-je en plongeant mes yeux dans les siens.

L'inquiétude se lisait sur son visage, mais il me sourit tout de même et hocha la tête. L'heure n'était pas à la tendresse, mais je lui pris tout de même la main, désirant sentir une derrière fois sa présence avant d'être séparés par le combat. Il serra la mienne en retour et reporta son attention sur l'horizon.

La pluie tomba quelques instants plus tard, minant un peu plus le moral de chacun. Saruman ne laissait vraiment rien au hasard, son but était bel et bien de nous écraser.

- « N'ayez aucune pitié, car ils n'en auront aucune ! » ordonna Aragorn aux troupes.

Le cri du général Uruk-hai retentit dans le silence de la nuit et nos ennemis se stoppèrent. Nos armées se regardaient mutuellement tandis que la tension s'accentuait. L'attente en devenait presque insoutenable.

- « Qu'est-ce qu'il se passe là-bas ?! » demanda Gimli en sautant pour apercevoir les troupes de Saruman.

Notre ami était si petit que ses yeux ne dépassaient pas la muraille.

- « Dois-je tout vous décrire, ou vous trouvez un marche-pied ? » lui demanda Legolas en souriant, amusé par sa blague.

Gimli le regarda, surpris, avant de se mettre à rire fortement comme tout ceux qui eurent entendu leur échange.

- « Viens-tu réellement de faire une blague ? » demandais-je au blond en riant.

- « Un peu d'humour ne fait pas de mal. » me répondit-il avec un sourire radieux.

- « Surtout quand on s'apprête à mourir ! » s'exclama Haldir d'un ton léger, nous surprenant tous.

Décidément, la guerre semblait tous les dérider, ce qui n'était pas plus mal.

Un nouveau hurlement retentit dans la vallée et nous nous concentrâmes à nouveau sur nos ennemis. Ils se mirent à frapper le sol de leurs lances dans un bruit assourdissant. Les archers de Théoden armèrent leurs arcs et menacèrent les uruk qui continuèrent leur manège. Cela dura quelques secondes, avant qu'une flèche ne se plante dans le cou de l'un d'eux, ayant pour mérite de faire cesser le vacarme.

- « Attendez ! » hurla Aragorn, tout aussi surpris que nous.

L'arme semblait avoir échappé à un vieil homme dont le visage était tiré par l'inquiétude. Aucun d'eux n'était un soldat. L'uruk s'écroula au sol dans un gémissement répugnant et ses comparses se mirent à couiner de colère. Dans la seconde qui suivit, leur général donna le signal de départ et les troupes ennemis s'élancèrent vers le for. La bataille venait de commencer, nous n'avions plus le temps de désespérer, il fallait se battre.

- « C'est parti ! » soufflais-je en essayant de relâcher la pression de mes épaules.

- « Parez à tirer ! » hurla Aragorn.

Dans un même mouvement, nous armâmes tous nos arcs.

- « Leur armure a une faille au cou et sous les bras. » nous informa Legolas.

Nous changeâmes la trajectoire de notre visée, suivant les paroles de l'elfe.

- « Décochez les flèches ! » ordonna Aragorn.

Une cinquantaine de traits filèrent à travers les airs, touchant leurs cibles à chaque fois.

- « Ils ont touché quelque chose ?! » demanda Gimli, impatient.

- « Des uruk, maître nain ! » lui répondit Eldacar en encochant une nouvelle flèche.

Ce fut au tour des hommes d'envoyer leurs traits sur nos ennemis. Les minutes qui suivirent ne furent rythmée que par le son des arc tendus, le sifflement des flèches dans les airs et les gémissements des uruk qui s'effondraient par dizaines en contre bas. Malgré tout, le nombre de nos ennemis ne semblait pas diminuer à mesure que nous les tuions et ils rejoignirent rapidement - bien trop à mon goût - le mur. Quand ils furent suffisamment proches, ils répondirent à nos attaques à l'aide d'arbalètes. Leurs armes atteignirent certains elfes qui s'écoulèrent raides morts ou agonisant. J'avais beau avoir déjà vécu maintes batailles, les hurlements de souffrance, de peur et de mort me retournaient à chaque fois l'estomac. Cependant, je n'avais nul autre choix que de les ignorer et de continuer à me concentrer sur la trajectoire de mes flèches.

- « Échelles ! » hurla Aragorn au bout de quelques minutes.

Legolas traduisit pour le nain, qui en fut ravie. Ce dernier n'attendait qu'une chose : se battre. Je secouais la tête, exaspérée par les désirs de mon ami, même s'il m'amusait quelque peu. Il brandit sa hache fermement et se positionna.

Des échelles furent levées jusqu'au chemin de ronde, permettant un accès au for à nos ennemis. Nous sortîmes nos épées sous l'ordre d'Aragorn et chacun se positionna, attendant presque impatiemment les uruk. Ils ne tardèrent d'ailleurs pas à arriver, et bientôt, le chemin fut inondé des cris d'agonie de nos ennemies et de nos soldats. Le sang coulait à flots tandis que nous plantions nos lames dans le corps puant des créatures de Saruman et qu'elles en faisaient de même.

- « Legolas ! Et de deux ! » s'exclama Gimli, tandis que je décapitais un ennemi dans un cri de rage.

- « Et moi, j'en suis à dix-sept ! » s'exclama l'elfe en réponse.

Je tournais rapidement ma tête vers mes amis en fronçant les sourcils. Ils arboraient tout deux un sourire hilares tandis qu'ils faisaient un carnage dans les rangs ennemis.

- « Dagnir ! Eux aussi, ils jouent ! » s'exclama Eldacar non loin.

- « A combien en êtes vous ?! » leur demanda le nain.

- « 22 ! » répondit Dagnir.

- « 23 ! » s'écria Eldacar.

- « RAAAh ! Je ne laisserai pas d'oreilles pointues me dépasser ! » râla Gimli en planta sa hache dans un Uruk.

Je secouais la tête, trouvant leur enjouement légèrement excessif. Je plantais l'une de mes épées dans le corps d'un ennemi qui s'écroula de l'échelle emportant avec lui tous ceux qui grimpaient à sa suite.

- « Heldaria ! Joue avec nous ! » me demanda Dagnir.

- « Non, merci ! » répondis-je en amputant l'un des monstres de son bras.

- « Aurais-tu peur de perdre ? » me demanda Legolas avec un sourire espiègle.

- « Au contraire, je n'ai pas envie de vous humilier. » répondis-je avec une arrogance feinte.

- « Oh… Madame se croit supérieure ! Et bien joue et on verra bien qui t'écrasera ! » s'exclama Eldacar tandis que les autres approuvèrent.

Je souriais, amusée.

- « 33 ! » m'exclamais-je en embrochant un Uruk.

Mes amis et mes frères crièrent de frustration et reprirent leurs combats respectifs avec plus de hargne. Ce jeu était stupide et déplacé mais il nous permettait de dédramatiser l'horreur des combats et de trouver le courage de se battre et l'espoir de gagner. Après tout, nous risquions de mourir à chaque instant alors un peu d'amusement ne ferait de mal à personne.

Pendant ce qui parut être une éternité, nous combattîmes sans relâche. Les cris, le sang et les morts finirent par disparaître totalement de ma perception. J'étais plongée dans mes combats, luttant pour survivre. Je me battais avec hargne et colère, je défoulais toute ma frustration, ma tristesse et mon angoisse sur nos ennemis. Je me battais pour mon Royaume, pour mes amis, pour ma famille, pour Boromir, pour Legolas. Je me battais pour l'avenir et la paix, pour la justice et pour la liberté. Je luttais pour la vie, la vie de tout un chacun, de tous ceux qui n'était pas encore venu au monde. Il y avait tant de chose à accomplir, tant de choses à voir et à vivre. Sauron et Saruman ne pouvaient gagner, mieux valait la mort à la domination.

- « La chaussée ! Attention ! » entendis-je hurler, me sortant de ma torpeur.

J'abattis mon ennemi avant de tourner mon regard vers le pont. Plusieurs Uruk avançaient en rang en se protégeant de leurs boucliers. Leur but était sans nul doute de défoncer la porte du gouffre pour l'envahir. Plusieurs flèches les atteignirent ainsi que des roches.

Je n'eus pas le temps d'en voir plus, devant me battre contre de nouveaux ennemis. Mes frères et Haldir se trouvaient non loin de moi, mais mes amis avaient disparu de mon champ de vision. Cependant, la voix d'Aragorn résonna dans le for, m'assurant qu'il était encore en vie.

- « Abattez le, Legolas ! » l'entendis-je hurler dans mon dos.

Je ne pus me retourner pour voir ce qu'il se passait, mais son cri me glaça le sang. Je le connaissais assez pour savoir qu'il était inquiet.

- « Que se passe-t-il ! » demandais-je à Eldacar en décapitant mon assaillant.

- « Je ne sais pas vraiment. Je crois que... » commença-t-il avant de se stopper.

J'eus seulement le temps d'entendre un bruit d'explosion avant de perdre connaissance.

- «Heldaria ! » entendis-je au loin.

J'ouvris les yeux en gémissant, tandis qu'un mal de crâne me brouillait la vue.

- « Heldaria ! Tu m'entends ?! » demanda une voix inquiète.

- « Elle se réveille ! Protégez-nous le temps qu'elle émerge totalement. » ordonna une autre.

Quelqu'un me secoua légèrement, m'empêchant de me rendormir.

- « Hel'… Ouvre les yeux ! Réveille-toi. » m'ordonna cette même voix qui paraissait désormais familière.

Malgré la douleur, j'obéis. Ma vision resta floue pendant quelques secondes, puis, j'aperçus le visage inquiet d'Eldacar.

- « Hé… Ça va ? » me demanda-t-il avec douceur.

Je regardais autour de nous sans répondre, tentant de comprendre ce qu'il se passait. Le son des lames s'entrechoquant, le borborygme des uruk, les gémissements des mourants et l'odeur du sang et de l'orque s'imposèrent à mes sens et il ne me fallut qu'une seconde pour me souvenir. Je me levais en vitesse, manquant de tomber à cause d'un vertige.

- « Houla doucement, petite sœur. » me conseilla Eldacar en me rattrapant.

- « Que s'est-il passé ? » demandais-je avec précipitation.

Je récupérais mes épées, restées au sol.

- « Le mur a explosé et tu t'es pris une pierre sur la tête. » m'indiqua-t-il.

Je lançais un regard inquiet autour de nous et vis avec horreur qu'une brèche énorme avait été créée dans le mur. Les Uruk s'y déversaient par dizaines, envahissant rapidement la cour basse. Je serrais mes armes dans mes mains et m'apprêtais à repartir me battre, mais mon frère me bloqua la route.

- « Heldaria ! Tu es sûre que ça va ? » me demanda-t-il avec sérieux.

- « Oui ! J'ai connu pire. Maintenant, lâche moi et aide moi à abattre ces monstres. » m'exclamais-je en repoussant gentiment son bras.

Il hocha la tête et nous rejoignîmes Haldir et Dagnir qui nous maintenait à l'abri des Uruk depuis quelques minutes.

- « Haldir, Heldaria ! Au bastion ! » hurla Aragorn à notre encontre.

Mon cœur rata un battement en entendant sa voix. Il était vivant !

- « Au bastion ! » ordonnèrent Haldir et mes frères.

Je décapitais mon ennemi avant de commencer à me replier.

- « Heldaria ! Aller viens ! » me lança Dagnir en tendant sa main vers moi.

Je m'apprêtais à l'attraper quand un gémissant de douleur me stoppa. Je me tournais en vitesse et aperçu avec horreur qu'Haldir venait de recevoir un coup de cimeterre dans le dos.

- « Non ! » hurlais-je avec colère.

Je me précipitais vers lui en ignorant les appels de mes frères. Je décapitais avec force l'assaillant de mon ami et jetait son corps répugnant au loin.

- « Haldir ! Haldir ! » appelais-je, inquiète.

Il ne me répondit pas, mais s'écroula au sol, sur ses genoux. J'en fis de même et laissais son corps buter contre mon buste. Des larmes roulèrent sur mes joues.

- « Je vais te sauver, mon ami. » soufflais-je en lâchant mes épées et en entourant son corps de mes bras.

- « Heldaria ! Tu es folle ?! » hurla Dagnir.

- « Que fais-tu ?! » continua Eldacar.

- « Je lui sauve la vie ! Je n'ai pas pu aider Boromir, mais je refuse d'abandonner Haldir. Alors soit vous m'aidez, soit vous la fermez ! » clamais-je avec force.

Ils ne répondirent pas, mais bientôt, je les vis nous entourer. Ils barraient la route à nos ennemis, nous protégeant le temps que je soigne le capitaine de la Lorien. Je ne perdis pas de temps et je fermais rapidement les yeux. Tous les bruits alentours cessèrent d'envahir mes oreilles et je concentrais tous mes sens et toute mon énergie dans mon sort. Il y avait encore quelques mois, j'aurai été incapable de le sauver, mais désormais, grâce aux enseignements d'Elrond, c'était possible. Je me savais la force de le guérir.

- « Heldaria ! Dépêches toi, s'il te plaît. On ne va pas tenir longtemps. » m'informa Dagnir les dents serrées par l'effort.

J'ouvris les yeux quelques secondes plus tard.

- « Haldir ! Tu m'entends ? » demandais-je en espérant entendre sa voix.

- « Oui. » souffla mon ami avant de se redresser doucement.

- « C'est bon ! Aidez-moi à le lever. » demandais-je en récupérant mes armes.

Mes frères abattirent leurs ennemis et nous rejoignirent en vitesse tandis que quelques-uns de nos soldats nous couvrîmes le temps pour nous de traverser le chemin de ronde jusqu'au bastion.

- « Amenons-le à l'intérieur. » proposa Eldacar.

Nous suivîmes son idée et une fois dans le grand hall, je courus chercher un siège pour asseoir notre ami.

- « Vous êtes complètement folle, Princesse. » souffla Haldir en s'asseyant.

- « Je vais prendre ça pour un remerciement, mon ami. » répondis-je en souriant.

- « Il a raison ! » gronda Dagnir en me regardant durement.

- « Parce que tu aurais préféré que je le laisse mourir ?! J'ai déjà perdu assez d'amis comme ça. » m'exclamais-je avec exaspération.

- « Tu as fait ce qu'il fallait cependant, tu aurais pu nous prévenir. Tu t'es mise en danger sans même réfléchir une seconde aux conséquences. La prochaine fois, demande nous de te protéger avant de sauter dans la gueule du loup ! Tu es plus intelligente que ça normalement. » répondit Eldacar en fronçant les sourcils.

Je ne répondis rien, car je savais qu'il avait raison. J'avais été stupide, mais il était trop tard pour revenir en arrière.

- « Désolée. Je ne recommencerais pas, seulement ce qui est fait est fait. Le principal reste que nous allons tous bien, donc si on pouvait arrêter de parler et aller aider nos amis ce serait génial. » m'exclamais-je en montrant la grande porte.

Mes frères hochèrent la tête.

- « Reste ici Haldir, tu seras en sécurité pour un temps. Nous allons retourner aider les autres. » informais-je le capitaine de la Lorien qui acquiesça et referma ses yeux.

Je l'avais guéri si vite que toute son énergie avait été vidée. Moi-même, je sentais la fatigue m'envahir. Je n'en informais pourtant personne, souhaitant retourner me battre. Deux soldats en moins ne nous aideraient franchement pas.

- « Legolas ! » criais-je en apercevant la chevelure blonde de l'elfe.

Il se retourna, surpris et m'attrapa au dernier moment alors que je me jetais dans ses bras.

- « Tu es vivante... » souffla-t-il, soulagé.

Je m'écartais de lui à regret, mais lui lançais tout de même un sourire bienveillant. Il fronça soudain les sourcils et approcha sa main de ma tempe.

- « Tu saignes ! » s'écria-t-il.

- « Ce n'est rien… Je me suis juste pris une pierre pendant l'explosion. » répondis-je en attrapant ses doigts.

Il ne parut pas vraiment rassuré et lança un regard interrogateur à mes frères.

- « Elle s'est pris une pierre, s'est évanouie et a tenté de se suicider. » résuma Eldacar.

- « Quoi ?! » s'exclama le blond en fronçant les sourcils.

Il reporta son regard sur moi, attendant de plus amples explications.

- « Ne l'écoute pas, il exagère. Je... » commençais-je.

- « Gimli ! Aragorn ! Ne restez pas là ! » cria la voix de Théoden en contre-bas.

Je me précipitais vers le rebord de la muraille et regardais la chaussée au-dessous. J'aperçus mes deux amis se battant contre une bonne vingtaine d'Uruk.

- « Vite ! Une corde, il faut les remonter. » ordonnais-je, inquiète.

Il ne nous fallu que quelques secondes pour en trouver une et bientôt, Legolas la leur lança. Nous les remontâmes en vitesse, rassurés qu'ils soient sains et sauf.

- « Merci bien. » lança Gimli en nous souriant.

- « Ravi de vous voir tous les deux en vie ! » s'exclama Eldacar, leur envoyant une tape amicale sur l'épaule.

Nous n'eûmes pas le temps de nous attarder, car l'ordre de se replier fut donné. En effet, les armées de Saruman avaient réussi à passer la porte du Gouffre, et la brèche dans le mur leur permettait de s'y déverser en grand nombre. Nous étions cernés et notre seul espoir était encore de nous enfermer dans la grande salle.

- « Barricadons-nous ! » ordonna Dagnir une fois que nous fûmes tous à l'intérieur.

Chacun courut chercher de quoi renforcer la porte de la salle. Nous devions à tout prix retarder les Uruk qui étaient déjà en train de forcer l'entrée avec leur bélier. Même si cela ne nous sauverait pas et que nous n'avions que peu de chance de survivre, gagner du temps pouvait au moins permettre de chercher une solution.

- « N'y a-t-il pas un autre moyen pour les femmes et les enfants de sortir de ces cavernes ? » demanda Aragorn, alors que Théoden et son second restaient en retrait, silencieux.

Aucun d'eux ne répondit.

- « Y a-t'il une autre issue ? » insista mon ami, tendu.

- « Il existe un passage, il conduit dans les montagnes. Mais ils n'iront pas loin, les Uruk Hai sont trop nombreux. » répondit finalement Gamelin.

- « Faites dire aux femmes et aux enfants de passer par les montagnes. Et barricadez l'entrée ! » ordonna Aragorn en poussant le conseiller vers l'entrée intérieure des cavernes.

- « Autant de morts… mais que peuvent les hommes face à tant de haine ?! » demanda soudain Théoden, sortant de sa torpeur.

- « Ils peuvent espérer, mon seigneur. » lançais-je en m'approchant, un banc dans les bras. Mes frères me le prient des mains et l'emportèrent vers la porte, où la lutte entre les hommes et les Uruk continuait.

- « Il n'y a que vous pour espérer ! » cracha Théoden en me lança un regard noir.

- « Si c'était le cas, nous serions déjà morts. Regardez vos hommes, ils continuent de se battre. Vous êtes leur roi, ayant au moins foi en eux ! » répondis-je, agacée.

Il ne répondit rien, mais son regard se posa derrière moi.

- « Venez avec moi. Venez à leur rencontre. » lui demanda Aragorn, le sortant de sa torpeur.

- « Pour la mort et la gloire... » ajouta le roi avec un rictus.

- « Pour le Rohan, pour votre peuple. » insista mon ami en s'approchant de lui.

Une étincelle de surprise apparut dans les yeux de Théoden. Il nous regarda tous les deux, semblant retrouver son courage.

- « Le soleil se lève. » nous informa Gimli non loin.

Nous tournâmes notre regard vers une lucarne qui laissait, effectivement, passer les premiers rayons du jour. Les paroles de Gandlaf me revinrent en mémoire et ce fut à mon tour de retrouver la foi. Je savais que nous pouvions faire confiance au magicien. Nous avions peut-être une chance de sortir vainqueur de cette bataille.

- « Oui… Oui... » murmura le roi. « Le cor de Helm, mes amis, va retentir dans le Gouffre, une dernière fois. » s'exclama-t-il à haute voix.

Je me détendis quelque peu en entendant ses paroles. Enfin, il se décidait à agir avec honneur et courage.

- « Voici venue l'heure de tirer l'épée ensemble. » ajouta-t-il à notre encontre.

Gimli, heureux que nous passions enfin à l'action, courut rejoindre les escaliers qui menait au cor. Des chevaux furent rapidement amenés par des soldats, et quelle ne fut pas ma surprise lorsque j'aperçus Aron.

- « Que fais-tu là, mon ami ? » demandais-je en souriant.

Je tournais la tête vers mes frères qui me firent un clin d'œil avant de monter sur leurs propres montures.

- « Cruauté réveille toi. Qu'importe le courroux, qu'importe la ruine et que l'aube soit rouge ! » clama Théoden.

Le cor retentit dans le cor et la porte de la salle céda sous les assauts des Uruk.

- « Pour Eorlingas ! » cria le Roi.

Chaque cavalier dégaina son épée et les chevaux galopèrent vers la sortie. Les soldats de la main blanche se déversaient dans la salle par dizaine, mais bientôt, tous furent tués. Nous nous frayâmes un passage à travers leurs rangs, tranchant têtes et bras. Aucun de ceux qui se trouvèrent à proximité de nos lames ne survécurent. Nous étions guidés par le désespoir et plus rien ne pouvait nous arrêter. La peur ne serrait plus nos cœur, seul le courage et la fierté nous poussaient à avancer.

Bientôt, au milieu du chaos, un hennissement se fit entendre. Il sonna comme mélodie au-dessus des cris d'horreur et de souffrance. Je levais les yeux du combat et les posais sur Gandalf et gris poil. Tout deux se tenaient au sommet d'une côte, majestueux. Bientôt, l'istari fut rejoins par Eomer, le capitaine des Rohirrim. Bien que notre dernière rencontre met laissé un amer souvenir, je fus heureuse et soulagé de le trouver parmi nous.

- « Rohirrim ! Pour le roi ! » hurla le capitaine.

Gandalf, Eomer et ses cavaliers s'élancèrent vers nous à toute vitesse. Leurs cris de rage inondèrent le champ de bataille, nous redonnant l'espoir de survivre. Chacun se battit plus férocement que jamais, ne laissant aucune chance aux armées de Saruman. En moins de cinq minutes, la moitié des Uruk gisaient sans vie au sol. Les autres s'enfuirent en courant en direction de l'Isengard.

- « Restez hors de la forêt. N'approchez pas des arbres ! » ordonna Eomer.

Nous arrêtâmes notre course. Une expression de surprise se trouvait sur le visage de chacun face au paysage qui s'étendait devant nous.

- « La forêt de Fangorn s'est déplacée... » soufflais-je ahurie.

- « Les ents se sont révoltés. » répondit Gandalf à mes côtés.

Je posais mon regard sur lui, fronçant les sourcils.

- « C'est pour cela que vous avez laissé Merry et Pippin là-bas. Vous saviez que leur présence encouragerait cette révolte. » lançais-je, impressionnée.

- « Je ne prétends pas connaître l'avenir, Heldaria. J'avais cependant ma petite idée concernant leur rôle dans cette bataille. »

L'Istari me lança un sourire amusé quand soudain des cris d'horreur et de souffrance s'élevèrent. Ces derniers provenaient de la forêt.

- « Voilà qui calmera leur colère. Du moins, pour un temps. » lança Gandalf en observant les arbres se déchaîner.

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