Voici dès à présent le chapitre 4 !
Mais avant, réponses aux reviews !
Artemisia-bee : Ohh coucou! Je suis heureuse de te retrouver avec cette histoire ! J'ai hâte d'avoir tes retours, je suis ravie que ça te plaise pour l'instant !
Zaillyn : Merci beaucoup pour ce si beau premier commentaire ! Je suis ravie que ces versions de ces deux personnages te plaisent autant, j'adore les écrire ainsi ! Merci encore, j'espère que ce chapitre te plara tout autant !
Chapitre 4 - Cohabitation
…
Rapport 01
Jaeger a accepté la proposition à 6 heures 54.
Nous sommes allés prendre ses affaires dans son dortoir et nous les avons déposées à l'entrée de l'aile ouest. Cette partie du QG est vraiment dégueulasse. À 7h32, Jaeger a commencé le nettoyage.
Je manifeste de nouveau la nécessité qu'aucun soldat ne pénètre cette partie du QG durant ces trois mois, au risque de mettre en péril l'expérience. Je demande que chaque jour, Armin Arlet se présente à 8 heures précises du matin à l'entrée du couloir, face à la première porte à droite, où seront situés mes appartements, avec assez de provisions pour 2 repas par personne.
En cas d'urgence et seulement d'urgence vitale, lia Major Hanji Zoe pourra se présenter devant mes appartements et y frapper trois coups brefs afin de me prévenir. En aucun cas, iel ne sera autorisé.e à entrer sans mon autorisation explicite.
Caporal Rivaille Ackerman
…
Eren était épuisé.
Il regarda la grande horloge qui fonctionnait encore malgré la colonie de termites qui l'avaient ravagée, et souffla en constatant qu'il était à peine 10h45. Il avait le dos en miettes et la tête lui tournait à cause du manque de sommeil. Il était déjà exsangue en temps normal après deux transformations par semaine alors qu'il ne dormait que quatre heures par nuit au maximum, mais là, c'était d'un tout autre niveau.
Rivaille lui avait demandé d'astiquer toute l'aile ouest de l'étage des hauts gradés, du sol au plafond. Cela aurait pu lui rappeler l'époque où il venait d'entrer dans l'escouade du caporal, pendant laquelle la plupart des tâches qu'il effectuait avec Petra, Gunther, Erd et Auruo consistaient à astiquer chaque recoin du QG jusqu'à ce que le maniaque qui leur servait de chef soit satisfait, mais là… Et bien là c'était tout bonnement impossible.
L'aile ouest était constituée d'un couloir très haut de plafond, qui desservait six pièces, dont trois avaient leur salle d'eau en enfilade. Le tout devait faire plus de 150 mètres carrés, sans compter les fenêtres et les balcons qui ponctuaient chacune des chambres, au nombre de quatre. Eren avait cru comprendre que la première porte sur la droite correspondrait à l'entrée des appartements du Caporal, puisque c'était la première pièce qu'il avait eu à briquer de fond en comble.
C'était la plus grande des chambres. Au vu de sa taille, il s'agissait plus d'une sorte de dépendance que l'on pouvait habiter à temps plein que d'une chambre : il y avait d'abord une sorte de salon-bureau, qui donnait sur un balcon et de hautes fenêtres très lumineuses depuis qu'Eren les avaient astiquées à s'en user les doigts, puis une table que les termites avaient miraculeusement laissé tranquille menait vers une petite cuisine tapissée de carreaux de ciments vieillis. Sur la gauche de l'entrée, le salon se poursuivait avec deux fauteuils mités placés face à une cheminée éteinte depuis bien longtemps. Enfin, au fond de la pièce, se tenaient deux grands panneaux, comme des paravents anciens, qui délimitaient le coin chambre, et permettaient un peu d'intimité au grand lit en bois qui trônait juste à gauche d'une porte qu'il fallait encore huiler pour en faire taire les couinements, et qui menait à la salle de bain, munie d'une grande baignoire avec un circuit d'eau chaude que surplombait un lustre plus ouvragé que toutes les sculptures qu'Eren avait pu voir dans sa vie.
Le titan assaillant avait presque fini de rendre cette immense pièce présentable, il ne restait plus qu'à changer la literie, lessiver les fauteuils, et maintenir l'espace en courant d'air afin que l'odeur de moisissure parte pour de bon. Il aurait certainement le temps de nettoyer un autre appartement comme celui-ci avant que la nuit ne tombe, mais il sentait qu'il n'en avait absolument pas la force. Pourtant il devait se faire violence, ne serrait-ce que pour gagner du temps, parvenir à se régénérer complètement, et tenter de s'enfuir sous sa forme titanesque.
Si il me fait trimer comme ça tous les jours sans manger, je n'aurais même pas retrouvé la moitié de mes forces dans une semaine… Se dit le jeune homme en pinçant les lèvres. C'était ça le plan génial du caporal ? Le fatiguer ad vitam aeternam en lui faisant récurer des joints de carrelage jusqu'à ce que mort s'en suive ? Il se redressa un peu trop vite sur ses jambes après avoir bordé le drap sous le matelas, et vacilla avant de se rattraper au montant du lit juste à temps pour ne pas s'écraser par terre.
Alors que son champ de vision redevenait presque normal, Eren entendit une porte s'ouvrir, et sentit quelque chose. Quelque chose qui ressemblait à une odeur de viande.
Il courut presque pour passer entre les paravents et se diriger vers la porte qui venait de s'ouvrir sur le caporal portant un plateau avec le repas. Ce dernier renifla devant l'expression inhabituelle qui animait le visage de l'assaillant. Il ressemblait à un chat devant une boite de sardines.
« Du calme morveux. » Prononça simplement la voix froide en posant le plateau par terre. « Mange. »
Eren ne se fit pas prier, et se rua sur le plateau pour en dévorer le contenu. Le goût salin de la viande déclencha une gerbe de salive qui lui fit prendre conscience d'à quel point il avait faim. Ce ne fut qu'au bout de longues minutes à mastiquer en soupirant de plaisir sous la sensation délicieuse d'avoir quelque chose dans le ventre qu'il se rendit compte de la position dans laquelle il était.
Rivaille n'avait pas bougé d'un pouce, et par conséquent, il le surplombait alors qu'il se tenait debout devant lui. Le titan assaillant était quant à lui à genoux par terre, dans une posture plus que dégradante face au regard d'acier qui semblait le narguer.
« T'as vraiment l'air d'un chat de gouttière affamé. » Claqua le timbre blasé du caporal, alors qu'un tic vint soulever la commissure droite de ses lèvres.
Eren sentit la rage infuser dans chacun de ses muscles. Il amorça un geste pour se saisir du plateau et l'envoyer en pleine tête de l'homme qui se foutait ouvertement de sa gueule, mais à sa grande surprise, ce dernier fléchit ses genoux, et s'accroupit devant lui, réduisant drastiquement la distance qui les séparait.
« Si j'étais toi je ne ferais pas ça. » Articula Rivaille dans un murmure. « Termine-moi le nettoyage de cet appartement, et occupe toi de la chambre attenante. Ce sera la tienne. Je veux que tout soit impeccable avant 18 heures. Ensuite tu me rejoindras ici et nous discuterons des termes de notre arrangement. » Ordonna t-il d'un souffle qui balaya les fins cheveux tombant sur les joues d'Eren.
Le caporal saisit le plateau dont il ne restait presque plus rien avant de se redresser et de partir sans un mot vers la petite cuisine. Eren resta quelques secondes immobile après son départ, encore abasourdi et le cerveau complètement éteint à cause de l'incongruité de ce qu'il venait de vivre. Il déglutit difficilement et secoua la tête en se rappelant de ce que son supérieur lui avait demandé. Il se dressa comme un automate sur ses deux jambes, toujours un peu vacillant à cause de la fatigue, mais avec le ventre plein et un léger pic d'énergie.
Il mit une petite heure à terminer le nettoyage du grand appartement, en prenant soin d'éviter le regard de son supérieur lorsqu'il le croisait, ce dernier s'étant mis à ranger ses effets personnels dans les nombreux tiroirs et placards qui ornaient les murs. Eren trouva surréaliste le moment où il vit Rivaille déposer minutieusement ses affaires de toilette dans la salle de bain. Il semblait y avoir une place pour chaque chose, dans une disposition précise et mystérieuse que seul le caporal semblait connaître. Le titan n'aurait jamais pu penser qu'un jour il verrait la brosse à dent de son supérieur. Et pourtant, elle était là, placée dans un gobelet trônant dans le coin droit de l'évier en faïence blanche.
Eren se demanda une nouvelle fois pour quelle raison son psychopathe de caporal se donnait autant de mal à déplacer toutes ses affaires et à habiter un endroit aussi désert pour passer trois mois en tête à tête avec lui, mais ne trouva aucune réponse qui ait vraiment du sens. Il n'avait manifestement pas l'intention de l'affamer ou de le torturer pendant trois mois, et même si ça allait lui prendre un temps non négligeable, il aurait fini d'astiquer toute l'aile ouest bien avant la fin du laps de temps que Rivaille lui avait annoncé. Alors qu'est ce qu'il préparait ?
…
Il était dans les temps. 18 heures allaient bientôt sonner, et il ne lui restait plus que les carreaux de sa nouvelle chambre à astiquer avant que sa première journée de ménage ne prenne fin.
Le titan assaillant franchit le seuil de la petite salle d'eau qu'il venait de finir de nettoyer. Elle était bien plus spartiate que celle du caporal, ne se constituant que d'une vasque, d'une douche minuscule alimentée uniquement à l'eau froide et de toilettes. Eren aurait pu grommeler plusieurs minutes sur l'injustice de la situation mais en vérité, il n'avait jamais connu un tel luxe depuis bien longtemps. En temps normal, il profitait des douches communes, comme tous les soldats du bataillon, sans eau chaude et surtout sans intimité.
La chambre en elle-même était plutôt agréable. Bien plus petite que celle du caporal, mais confortable et douillette. Il avait même un lit deux places rien que pour lui, placé face à une grande fenêtre donnant sur un petit balcon surplombant le parc, tout comme celui de l'appartement de Rivaille, qui le jouxtait. Il avait lui aussi une cheminée, à côté de laquelle était dressée une petite table qui aurait mérité un bon coup de cire, mais qui plaisait beaucoup au jeune homme, notamment grâce au fauteuil qu'il lui avait attribué, et qui donnait envie de s'y attabler pendant des heures.
Après avoir lessivé les carreaux, le titan vit qu'il lui restait encore quelques minutes pour se débarbouiller avant de rejoindre son supérieur dans ses appartements. Il fila à la salle d'eau et prit une douche glaciale qui lui fit un bien fou et lui permit de se décrasser les mains, rendues calleuses par la manipulation intensive du balai. Il en profita pour se raser sommairement sa barbe de trois jours avec une petite lame qu'il avait trouvé dans un des vieux tiroirs de la salle d'eau, avant d'enfiler un uniforme propre.
18 heures sonna alors qu'Eren toquait à la porte du caporal. Il attendit quelques instants avant que celui-ci ne daigne ouvrir la porte, et entra sans un regard dans la pièce qui avait maintenant l'air d'être complètement habitée. Par un maniaque du rangement, certes, mais habitée quand même.
« Assieds-toi. » Prononça le caporal, en tenant une sorte de dossier dans les mains, d'où dépassaient des feuilles plus ou moins jaunies par le temps.
Eren fut fier de voir qu'aucune gerbe de poussière ne jaillit du vieux fauteuil sur lequel il s'affala, de même que l'odeur d'humidité semblait avoir totalement disparu de la pièce. Il ne sentait à présent plus que l'odeur fraiche du savon, et celle, douceâtre, des bougies qui avaient été allumées un peu partout dans la pièce, anticipant sur la lumière du jour qui disparaissait peu à peu à l'horizon.
Le titan attendit patiemment que son supérieur prenne place dans le fauteuil devant lui en se triturant les doigts. Il avait une vive sensation d'irréel, peut être due à la fatigue, mais plus certainement à l'absurdité de la scène dans laquelle il se trouvait. Il ne se rappelait pas avoir déjà été seul avec le caporal dans une pièce qui n'était pas les cachots. Il ne se rappelait pas non plus avoir vu son supérieur aussi calme. Habituellement, il ne rencontrait Rivaille que lors d'échanges très brefs, quand ils faisaient le point avec Hanji pour une mission spéciale ou bien lorsqu'il avait fait une connerie. La plupart du temps, ces échanges se terminaient en commentaires sarcastiques, en rivalité violente, ou même en démonstration de force si il allait trop loin avec le caporal qui était très soupe-au-lait. Alors à cet instant, il ne savait pas vraiment comment réagir à cette atmosphère bizarre. Il eut presque envie de lancer une pique au petit homme encore plongé dans la lecture de ce dossier étrange, pour le faire réagir comme à son habitude, mais sa curiosité était trop grande pour tout envoyer valser maintenant, alors il se ravisa.
Finalement, le plus âgé quitta sa lecture et pendant une fraction de seconde, Eren vit une lueur dans les yeux mornes qui lui assécha la gorge d'un coup, mais qui disparut aussitôt. Le caporal vint s'assoir face à son subordonné en s'adossant complètement contre le fond du fauteuil et en croisant les jambes et se mit à toiser intensément le titan qui haussa un sourcil :
« Vous cherchez le meilleur moyen pour m'écorcher vivant et me faire rôtir à la broche ? » Amorça t-il dans un sourire pour briser ce silence pesant.
« Non. »
Voyant qu'il n'ajouterai rien, Eren soupira en attrapant quelques mèches rebelles du bout des doigts pour tenter de les coincer dans son chignon, et demanda plus sérieusement :
« Vous avez l'intention de me dire ce que vous prévoyez pour ces trois mois de… Cohabitation ? »
Rivaille se redressa un peu dans son siège et regarda le plus jeune comme s'il était déjà fatigué, ou du moins profondément ennuyé.
« D'après toi morveux, qu'est ce que je compte faire ? »
« J'sais pas. J'aurais parié sur de la torture physique et mentale, ou que vous me laisseriez dépérir à petit feu, mais ça a pas l'air d'être votre plan, ou bien vous faites comme si vous étiez un peu humain pour m'égorger par surprise pendant mon sommeil. » Répondit Eren en retrouvant son sourire goguenard.
« Quelle était la première partie du marché ? » Demanda la voix morne du caporal.
« Je ne vois plus que vous, je me transforme pas, je vous obéis pendant trois mois. Mais je vois pas trop pourquoi vous faites ça et dans quel but. »
Rivaille se remit debout, fit quelques pas dans la pièce qui commençait nettement à s'assombrir autour d'eux, et reprit la parole :
« Tu es un danger pour tout le monde ici, sauf pour moi. Tu es trop épuisé pour maîtriser comme il se doit la transformation titanesque. Et tu as besoin que quelqu'un t'enseigne les limites auxquelles tu dois te plier. » Asséna t-il d'un ton grave alors qu'il regardait par la fenêtre, montrant son dos à son subordonné. « Je suis le seul qui peut mener à bien ce travail avec toi, c'est pour ça qu'on est là. » À peine eut-il terminé sa phrase qu'il entendit le fauteuil derrière lui grincer.
Eren s'était levé d'un bond sous la poussée adrénaline qui lui enflammait les sens. Il se rendit compte qu'il n'avait pas ressentit ses crises de colère habituelles de tout l'après midi, mais c'était comme si elles s'étaient toutes additionnées d'un coup pour surgir comme des furies à cet instant précis. Il se mit à respirer plus fort et à contracter ses poings fermés. Il allait massacrer ce type qui osait lui parler sur ce ton et le traiter comme un moins que rien. Plutôt crever que de se plier à cette ordure.
« Oï crétin. » Poursuivit Rivaille en lui tournant toujours le dos. « Arrête de respirer comme un buffle et rassieds-toi. »
Eren ne vit plus qu'une bande rouge lui barrer son champ de vision, alors qu'un hurlement de rage lui érafla la gorge. Il se précipita sur le soldat qui venait de le provoquer une nouvelle fois, et lui agrippa l'épaule violemment pour le retourner vers lui et qu'ils se fassent face. Le regard opalin du plus âgé se fit encore plus méprisant alors qu'il soulevait un sourcil face à la colère du titan assaillant.
« T'as quelque chose à partager Jaeger ? » Ajouta t-il une nouvelle fois avec un rictus.
« LA FERME ! » Hurla Eren en attrapant son supérieur par le col. « Bordel mais qu'est ce qui vous fait croire que vous pouvez me parler comme ça ? Vous vous prenez pour l'homme le plus fort de l'humanité hein? Mais vous n'êtes RIEN, RIEN DU TOUT ! Vous allez mourir comme une merde, piétiné, brûlé vif par ce qui va vous tomber sur la gueule ! Vous pensez que c'est moi qui ai un problème, MOI ? J'ai jamais rien entendu d'aussi drôle putain vous êtes hilarant ! Vous pensez peut être que j'ai autant de temps à perdre que vous, que je peux me permettre d'attendre des ordres de ces lèche-merde qui prennent les décisions pour tout le monde ?! Vous pensez que je vais jouer au clebs comme vous, à attendre qu'on m'envoie la baballe pour aller la chercher ?! Vous ne savez RIEN de la réalité de ce monde, vous êtes comme un gamin qui a passé toute sa vie dans une grotte pleine de merde, VOUS ME DEGOUTEZ, JE VEUX VOUS VOIR CREVER LA GUEULE OUVERTE ! » Continua de tempêter le titan en amorçant un mouvement pour donner un coup de poing à l'homme qu'il tenait toujours par le col avec sa main gauche.
Rivaille para facilement le coup, et agrippa les poignets d'Eren pour les maintenir derrière son dos. Le titan se débattit comme un diable en continuant d'hurler d'une voix de dément :
« JE VAIS VOUS TUER, BANDE DE RATS INCAPABLES, LÂCHES, VOUS ETES TOUS MORTS! »
Le caporal regretta un instant de ne pas avoir pensé à mettre des boules de coton dans des oreilles pour protéger ses pauvres tympans des sons de veau à l'agonie que produisait le plus jeune. Il raffermit durement sa prise sur ses deux bras, et les coinça derrière son dos pour pouvoir l'agenouiller sans ménagement dans son fauteuil, face à lui, en faisant peser tout son poids sur les deux jambes du titan avec son genou. L'entreprise mit l'assaillant encore plus hors de lui, et Rivaille dut faire preuve d'une réactivité sans pareille afin d'éviter les coups de dents intempestifs qu'Eren tentait de lui donner, seule riposte qui lui était permise vu l'entrave de ses bras et le poids de Rivaille sur ses jambes pliées sous lui.
Au bout de longues minutes, le titan assaillant semblait avoir épuisé presque toute son énergie. Ses yeux encore furieux étaient embrumés de fatigue, et il était essoufflé comme s'il venait de courir pendant trois heures. Il n'y avait maintenant plus que quelques mots qui passaient la barrière de ses lèvres, devenues totalement blanches :
« Lâches… Meurtriers… Allez tous… Vous faire foutre… »
Les mots se muèrent en marmonnements rauques entrecoupés de gémissements d'angoisse. Rivaille sentit que c'était le moment propice pour libérer les bras d'Eren de sa poigne de fer, et le jeune homme écrasa sa tête sur le torse de son supérieur en continuant de marmonner et en respirant trop vite. Il était trop sonné par sa crise de colère pour se rendre compte qu'il était une nouvelle fois à genoux, mais cette fois sur son fauteuil, toujours surplombé par Rivaille qui le maintenait dans cette position grâce à la pression de son genou. Il fut aussi trop sonné pour se rendre compte que le caporal avait posé ses doigts froids sur sa nuque, et que ce fut précisément ce geste qui fit tout craquer.
D'un coup, sans prévenir, il se passa quelque chose qu'Eren n'avait plus connu depuis au moins 4 ans. Une grosse boule se forma dans sa gorge et la remonta à une vitesse folle pour en sortir, fracassant tout sur son passage. Et le jeune homme se mit à pleurer, comme il n'aurait jamais cru pleurer un jour depuis la mort de sa mère. Il sanglota comme un enfant se réveillant d'un affreux cauchemar, enfouissant le plus possible sa tête dans la chemise d'uniforme sombre du caporal, l'imbibant de larmes et certainement d'autres substances qui firent se froncer le nez de Rivaille, sans pourtant qu'il ne fasse dégager cette boule de nerfs de son torse. Il continua sa caresse légère sur la nuque d'Eren, traçant des cercles apaisants à la naissance de ses cheveux, en murmurant des paroles rassurantes :
« Shh… Calque ta respiration sur la mienne. Voilà, comme ça… »
Les mains du jeune homme lâchèrent petit à petit leur prise sur l'uniforme du caporal, et les sanglots se turent au bout de longues minutes. Il faisait à présent complètement nuit, et Rivaille baissa les yeux vers le visage du titan, dont les yeux gonflés par sa crise de nerf s'étaient fermés. Il dormait.
Le caporal poussa un soupir. Il était temps, se dit il en maintenant la nuque de son subordonné de sa main gauche alors qu'il passait son bras libre sous ses cuisses pour le porter. Il quitta ses appartements en tenant son chargement, et se dirigea dans la chambre attenante avant de le coucher dans son lit et de rabattre la couverture en plumes sur le corps endormi.
Il resta là quelques secondes, debout, fixant le titan qui dormait. Il semblait un peu plus apaisé, et ses respirations profondes ressemblaient presque à des ronronnements. Rivaille renifla avant de sortir en fermant doucement la porte.
N'hésite pas à me laisser une review, je les adore toutes !
À la semaine prochaine pour la suite !
