Chapitre 2 : une rentrée tourmentée

La dernière semaine de vacances pointait le bout de son nez au Terrier. Installée sur le lit aménagé dans la chambre de Ginny, Hermione réfléchissait aux derniers événements survenus lors de leur escapade au chemin de Traverse et sur la nouvelle théorie d'Harry : Malefoy devenu mangemort. Ces derniers jours, Harry n'avait cessé de les harceler, Ron et elle à ce sujet. Bien qu'elle ait manifesté un désintérêt auprès de ses amis, elle restait quelque peu perplexe. À vrai dire, Harry l'avait intriguée sur certains points, en particulier ce mystérieux objet à réparer. Par expérience, elle préférait ne pas emballer son ami sur ce terrain car elle le connaissait trop bien pour savoir que celui-ci allait courir tous les risques possibles pour découvrir ce que préparait son meilleur ennemi. Mais l'idée que Malefoy soit désormais un partisan de Voldemort pour prendre la place de son père était tout de même exagérée… comme l'avait répété Ron, cela semble invraisemblable d'être un mangemort de dix-sept ans. Plongée dans ses pensées, elle sursauta lorsque l'on frappa à sa porte.

- Hermione chérie tu n'as plus rien à laver avant ton départ ? Demanda Mrs Weasley à travers l'entrebâillement de la porte.

- Non merci Mrs Weasley, ma valise est presque prête, répondit celle-ci, le cœur encore battant d'avoir été interrompue brusquement.

- Ah je suis contente de l'apprendre, je me demande où en sont Harry et Ron dans leur rangement. Ah ces deux là… j'espère qu'ils ne vont pas encore finir de ranger leurs valises le matin du départ, dit-elle plus à elle-même.

Le lendemain matin, les derniers préparatifs se déroulèrent dans le calme, tout le monde ayant bouclé sa valise la veille. Arrivés à la gare de King's Cross grâce à deux voitures fournies par le ministère, Harry, Ron et Hermione furent accueillis par deux Aurors pour passer la barrière. Hermione jeta un coup d'œil en biais à Harry qui visiblement, n'appréciait pas la compagnie de ceux-ci. Ce fut à son tour de se diriger vers le portail qui ouvrait la voie 9/3 quart. Avec l'aide de Mr Weasley qui gardait une main serrée sur sa baguette à l'intérieure de sa veste, elle franchit la barrière invisible.

Lorsque tout le monde fut arrivé sur le quai, Mrs Weasley les pria de monter au plus vite dans le train. Ron et Hermione tournaient les talons en direction du wagon des préfets lorsqu'Harry interpella Mr Weasley. Ceux-ci partirent à l'écart du groupe pour discuter, sous le regard sceptique d'Hermione. Elle en était sûre, Harry était en train de lui raconter ses soupçons vis-à-vis de Malefoy.

- Bon alors, tu viens ? lui demanda Ron, intrigué lui aussi par la conversation entre Harry et son père.

- Je te suis, répondit Hermione. Tu crois qu'il raconte la visite de Malefoy chez Barjow&Beurk à ton père ?

- Je suppose que oui… tu connais Harry, il maintient toujours ses idées à ce sujet. Franchement tu y crois à sa théorie ? Demanda Ron d'un air songeur.

- Je ne sais pas… Malefoy un Mangemort… c'est vrai qu'il ne paraît pas du tout son âge… mais tout de même il n'est pas encore majeur ! s'exclama Hermione. Et c'est quoi ce mystérieux objet à réparer… tout cela est assez louche !

- Tout ce que fait Malefoy est louche, plaisanta Ron en ouvrant la porte du wagon réservé aux préfets. Après-toi, proposa ce dernier d'un geste galant, ce qui surprit Hermione.

À l'intérieur, tous les préfets étaient déjà présents dans le wagon. Ron et Hermione saluèrent chaleureusement Ernie Macmillan et Hannah Abbot, les deux préfets de Poufsouffle ainsi qu'Anthony Goldstein et Padma Patil de Serdaigle. Comme toujours, les deux préfets de Serpentard, Drago Malefoy et Pansy Parkinson restèrent dans leur coin à dévisager les autres d'un regard hautain.

Hermione étudia le jeune homme plus attentivement cette fois-ci. Elle avait déjà remarqué chez Madame Guipure qu'il avait grandit de quelques centimètres au cours de l'été. Sa carrure s'était également élargie et jamais, il n'avait été plus attirant et séduisant qu'aujourd'hui. Ses cheveux toujours aussi blonds étaient plaqués en arrière, légèrement décoiffés par la fenêtre ouverte sur le côté. Avec ses yeux gris perçants, il regarda d'un œil intéressé Padma Patil pendant que Pansy lui souffla quelques mots à l'oreille. Sentant le poids de son regard sur lui, il détourna les yeux et plongea son regard dans celui d'Hermione.

Celle-ci reporta aussitôt son attention sur Ron, qui discutait avec Ernie de leurs anciennes séances de l'A.D. Honteuse de s'être faite si facilement démasquée, la jeune fille rougi jusqu'aux oreilles. Elle avait le sentiment d'être toujours observée par le Serpentard.

- Je me demande qui sera le nouvel enseignant de défense contre les forces du mal cette année, lança Ernie sur le ton de la conversation.

- Aucune idée, répondit Hannah, mais il ou elle ne peut pas être pire que cette harpie d'Ombrage. J'ai entendu dire qu'elle avait dû prolonger son séjour à Ste Mangouste à cause de ce qu'il lui était arrivé dans la forêt interdite, gloussa cette dernière.

- C'est vrai que les centaures ne l'ont pas loupée, répondit Hermione un sourire aux lèvres. Je n'ai jamais vu….

Mais elle fut interrompue par quelqu'un qui la poussa brusquement sur le côté. Lorsqu'elle se retourna, Malefoy se dirigeait vers la porte de sortie, suivit de près par Pansy Parkinson.

- Bon ce n'est pas que je m'ennuie à jouer les préfets, dit-il en baillant volontairement, mais j'ai des choses plus intéressantes à faire.

- Pansy gloussa telle une petite fouine derrière lui, tout en jetant un dernier regard hautain vers les autres préfets.

- Hent, la brigade Inquisitoriale doit surement lui manquer, lança au passage Ernie tandis que la porte du compartiment se refermait derrière eux. Allons patrouiller dans les compartiments Hannah. À tout à l'heure vous autres, dit-il d'un signe de main.

- Nous devrions faire pareil, décida Hermione, après on ira rejoindre Harry qu'en dis-tu ?

- Bonne idée, répondit Ron, j'espère que le chariot ne va pas tarder à passer je meurs de faim !

- Tu as englouti ton petit déjeuner i peine une heure Ron ! s'indigna Hermione devant un tel appétit.

Leur tour de ronde dans le train ne fut pas de tout repos, les deux amis étaient sans cesse harcelés par plusieurs de leurs condisciples qui tentaient de leur poser des questions sur Harry et les événements qui se sont produits au Ministère l'été dernier. Enfin, ils réussirent à s'échapper d'un groupe de filles particulièrement collantes et ils passèrent devant le wagon réservé aux Serpentard dans lequel Malefoy et sa bande d'amis riaient aux éclats. Lorsque ce dernier s'aperçut de la présence de Ron et d'Hermione, il leur adressa un signe grossier de la main. Les deux amis ignorèrent ce geste et partirent à la recherche du compartiment où se trouvait Harry.

Ils l'aperçurent par la fenêtre, en pleine discussion avec Neville et Luna lorsqu'Hermione ouvrit la porte.

- J'aimerais bien que le chariot du déjeuner se dépêche d'arriver, je meurs de faim, dit Ron avec convoitise.

Il se laissa tomber à côté d'Harry en se massant le ventre.

- Salut Neville, salut Luna. Tu sais quoi ? ajouta-t-il en se tournant vers Harry. Malefoy ne remplit pas ses obligations de préfet, il reste assis dans son compartiment avec les autres Serpentard. On l'a remarqué en passant.

Hermione observait Harry qui semblait intrigué par la nouvelle. En effet, cela ne ressemblait pas du tout à Malefoy de ne pas abuser de son pouvoir de préfet pour maltraiter quelques élèves de première année.

- Comment a-t-il réagit quand il vous a vu ? demanda Harry, intéressé.

- Comme d'habitude, répondit Ron, indifférent.

Il imita le geste grossier de la main que Malefoy leur avait adressé, quelques minutes plus tôt.

- Etonnant de sa part, non ? Enfin, pas ça, précisa-t-il en renouvelant son geste. On se demande pourquoi il ne profite pas de l'occasion pour brutaliser quelques élèves de première année.

- Oui, je ne sais pas ce qui lui prend, dit Harry d'un air pensif.

- Il préférait peut-être la brigade inquisitoriale, suggéra Hermione, en se rappelant de ce qu'avait dit Ernie un peu plus tôt dans le wagon réservé aux préfets. Le travail de préfet doit lui sembler un peu insipide après ça.

- Je ne crois pas, dit Harry. Je pense qu'il est…

Mais avant qu'il ne puisse développer sa théorie, la porte du compartiment se rouvrit et une fille de troisième année entra, hors d'haleine.

- Je dois apporter ça à Neville Londubat et à Harry P… Potter, balbutia-t-elle en devenant écarlate lorsqu'elle croisa le regard d'Harry.

Elle avait à la main deux rouleaux de parchemin attachés avec des rubans violets. Perplexes, Harry et Neville prirent chacun le sien et la fille sortit à reculons du compartiment, d'un pas trébuchant.

- Qu'est-ce que c'est ? demanda Ron tandis qu'Harry déroulait son parchemin.

- Une invitation, répondit-il.

Harry,

Je serais ravi si vous pouviez venir vous joindre à moi pour prendre une petite collation dans le compartiment

Cordialement, Professeur H.E.F. Slughorn.

- Qui est le professeur Slughorn ? interrogea Neville en regardant sa propre invitation d'un air interdit.

- Un nouvel enseignant, dit Harry. J'imagine qu'il faut y aller, non ?

- Mais pourquoi veut-il que je vienne aussi ? s'inquiéta Neville, comme s'il avait peur qu'on lui inflige une retenue.

- Aucune idée, répondit Harry. Écoute, ajouta-t-il, on n'a qu'à mettre la cape d'invisibilité, comme ça, on pourra observer Malefoy au passage et voir ce qu'il fabrique.

Hermione se mordit les lèvres, trouvant l'idée d'Harry téméraire, comme à son habitude. C'était ce genre d'initiative qui lui attirait généralement pas mal d'ennuis. Néanmoins, elle était tout aussi curieuse de connaître la raison de ce désintérêt chez Malefoy. Elle n'arrêtait pas de repasser l'image dans sa tête du jeune Serpentard, en compagnie de ses condisciples, riant aux éclats dans le compartiment à côté de cette bourrique de Pansy Parkinson qui le regardait d'un œil admiratif.

Plongée dans ses pensées jusqu'à l'arrivée du train à Pré-au-lard, elle sursauta quand Ron suggéra de se changer. Lorsque le train s'arrêta, ils hissèrent leurs bagages ainsi que la cage de Coquecigrue et le panier de voyage dans lequel voyageait Pattenrond hors du train. Ne voyant pas Harry revenir, Ron s'occupa de la valise d'Harry et de la cage d'Hedwige.

- Bon sang où est-il passé ? se demanda-t-il en reprenant son souffle. Il devrait être revenu depuis quelques temps de cette réunion ! J'ai vu Neville il y a plus de dix minutes dans le couloir.

- J'avoue que c'est inquiétant, répondit Hermione d'un regard perplexe. Peut-être qu'il a été retenu avec Slughorn ?

- Non regarde il est là-bas.

Il désigna du doigt le professeur qui au loin, ressemblait à un morse qu'on aurait habillé d'une veste en velours. Tout deux se regardèrent d'un air inquiet, scrutant la foule d'élèves qui descendaient du train à la recherche de leur ami. Comme ceux-ci bloquaient le passage sur le quai, ils décidèrent de monter dans la diligence qui les amenait vers l'école. Tout au long du trajet, Hermione s'inquiéta de l'absence de son meilleur ami, et ne participa pas à la conversation entre Ginny, Neville et Ron. Se pourrait-il qu'il lui soit arrivé quelque chose ? Elle avait depuis le début du voyage un mauvais pressentiment qu'elle ne pouvait expliquer. L'idée d'aller observer Malefoy dans son compartiment, même sous la cape d'invisibilité, lui avait parût déplaisante, voir même dangereuse.

Ils arrivèrent au pied du château, illuminé dans la nuit noire dans laquelle le parc était plongé. Ils furent tous accueillis par Rusard, le concierge, qui tenait à la main un Capteur de Dissimulation d'objets de magie noire. De ce fait, l'entrée au château prit plus de temps qu'à l'ordinaire. Dans la foule, Ron et Hermione tentèrent d'apercevoir Harry, qui restait toujours introuvable. Hermione repéra Malefoy qui pour une raison inconnue, affichait un sourire narquois lorsqu'il croisa à nouveau son regard. À présent, elle était persuadée que Malefoy était mêlé à l'étrange disparition d'Harry.

Quelques minutes plus tard, Rusard eut fini d'inspecter les deux amis, ceux-ci avancèrent en direction de la grande salle, déjà remplie d'élèves qui attendaient impatiemment la Répartition des quatre maisons. Ron et Hermione étaient en train de se chercher une place à la table des Gryffondor lorsque le professeur McGonagall interpella Hermione :

- Miss Granger, pouvez-vous me suivre s'il vous plaît.

Perplexe, Hermione jeta un coup d'œil intrigué vers Ron qui paraissait tout aussi surpris et suivit le professeur jusqu'à la salle de cours de métamorphose. Comme à son habitude, la directrice de Gryffondor gardait un air sévère derrière ses lunettes carrées et son chignon bien serré. D'un geste de la main, elle invita Hermione à s'asseoir à une chaise qui se trouvait face à son bureau.

- Ne vous inquiétez pas Miss Granger, je voulais simplement vous parlez des résultats que vous avez obtenus à vos BUSE, déclara le professeur McGonagall sur un ton qu'elle voulait rassurant.

Loin d'être rassurée, Hermione s'inquiéta davantage de cette visite à sa directrice de maison. Les résultats de ses BUSE ? Se pouvait-il que ses notes soient erronées ? Que l'on se soit trompé sur ses résultats et qu'elle avait en réalité tout raté ? Horrifiée par cette idée, Hermione dégluti difficilement avant de demander horrifiée :

- Y a-t-il un problème, professeur ?

- Non, non, Miss Granger, bien au contraire. Chaque année, le Ministère de la magie garde un relevé des notes de chaque élève de l'école à l'issue du Brevet Universel de Sorcellerie Elémentaire. Le but étant de sélectionner les meilleurs élèves pour un éventuel recrutement en vue d'une carrière ministérielle.

- Oh…je ne…, balbutiait Hermione, je ne savais pas.

- C'est pourquoi je vous ai fait venir maintenant Miss Granger, êtes-vous intéressée de prendre un rendez-vous auprès d'un membre du Ministère pour choisir une orientation ministérielle dès la fin de vos études ?

- Et bien... je n'ai pas encore vraiment réfléchi à ce que j'aimerai faire plus tard, répondit Hermione, gênée par ce manque de réflexion. Est-ce que je dois donner une réponse immédiate ?

- Non bien évidemment, vous pouvez donner une réponse définitive l'année prochaine. Le Ministère préfère vous en informer dès le début de l'année pour que vous puissiez prendre le temps d'y réfléchir, en fonction des options que vous avez choisies.

- Je comprends, répondit Hermione. Je me pencherai plus attentivement sur la question.

- Bien, vous pouvez dans ce cas retourner au banquet Miss Granger, termina le professeur McGonagall avec un léger sourire. Puis-je vous demander d'être discrète sur ce sujet ?

- Bien sûr professeur, bonne soirée.

Hermione quitta la salle de cours en direction de la Grande Salle. Elle accéléra le pas afin de ne pas manquer la Répartition des quatre maisons, présidée cette année par le professeur Flitwick. Lorsqu'elle entra, le directeur de Serdaigle était en train de ranger le choixpeau et le tabouret à l'aide d'un sortilège de lévitation. La Répartition venait certainement de se terminer pour laisser place à l'habituel banquet de bienvenue. La jeune fille se dirigea vers la table de Gryffondor auprès de Ron et de Ginny qui discutaient entre eux. À première vue, Harry était toujours absent, ce qui ne diminua pas son inquiétude.

- Que te voulait McGonagall ? Demanda Ron avant qu'Hermione eu le temps de s'asseoir à leur table.

- Oh rien d'intéressant, simplement pour me parler de mes options cette année… répondit vaguement Hermione. Toujours aucune nouvelle d'Harry ?

- Non, mais il ne devrait plus tarder maintenant… je suppose qu'il…

Mais il fut interrompu par le professeur Dumbledore qui se leva et annonça l'ouverture du banquet. À cet instant, de la nourriture apparut par magie sur les quatre longues tables qui représentaient les différentes maisons. Comme chaque année, le banquet était somptueux et les mets tout aussi délicieux. Ron se servit abondamment, mastiquant avec férocité sa cuisse de poulet. Hermione quant à elle, mangea très peu, toujours inquiète de l'absence de son ami.

- Ron ! S'indigna Hermione, comment peux-tu manger autant alors que ton meilleur ami est introuvable !

- Relaxe… toi… Hermiouune dit-il, entre deux bouchées de purée de pomme de terre. Il ne va pas tarder.

À peine eu-t-il fini sa phrase que la porte de la Grande Salle s'ouvrit à nouveau pour laisser entrer Harry, dont le visage était couvert de tâches. Hermione et Ron s'échangèrent un regard soulagé à la vue de leur meilleur ami qui se dirigeait déjà vers eux.

- Où est-ce que tu… Ça alors, qu'est-ce que tu as sur la figure ? s'étonna Ron en le regardant les yeux écarquillés, comme tous ceux qui étaient assis à leurs côtés.

- Pourquoi, il y a quelque chose qui ne va pas ? s'inquiéta Harry en prenant une cuillère, les yeux plissés pour regarder son reflet déformé.

- Tu es couvert de sang ! s'exclama Hermione. Viens là…

Elle leva sa baguette, prononça la formule : « Tergeo ! » et fit disparaître le sang séché.

- Merci, dit Harry en passant la main sur son visage propre. Et mon nez, ça va ?

- Il est normal, répondit Hermione d'un ton anxieux. Pourquoi ? Qu'est-ce qui s'est passé, Harry ? On a eu une peur bleue !

- Je vous raconterai plus tard, répliqua-t-il sèchement.

En effet, Ginny, Neville, Dean et Seamus s'étaient légèrement rapprochés de leur côté. Même Nick Quasi-Sans-Tête, le fantôme de Gryffondor, était venu flotter le long du banc pour surprendre la conversation.

- Mais…, insista la jeune fille.

- Pas maintenant, Hermione, coupa Harry, avec une gravité éloquente.

Il tendit le bras devant Ron pour attraper deux cuisses de poulet et une poignée de frites mais avant qu'il ait pu mettre la main dessus, elles avaient disparu, remplacées par des gâteaux.

- Tu as raté la Répartition, en tout cas, dit Hermione tandis que Ron plongeait sur un gros gâteau au chocolat.

- Le Choixpeau a raconté quelque chose d'intéressant ? demanda Harry en prenant un morceau de tarte à la mélasse.

- Toujours pareil… répondit Ron il nous a conseillé de rester unis face à l'ennemi, tu vois le genre.

- Dumbledore a parlé de Voldemort ?

- Pas encore, mais il réserve toujours son vrai discours pour la fin du festin. Ça ne devrait plus tarder, maintenant.

- Rogue m'a dit que Hagrid était arrivé en retard…

- Tu as vu Rogue ? Comment ça se fait ? s'étonna Ron entre deux bouchées de gâteau qu'il avalait avec frénésie.

- Je suis tombé sur lui, répondit Harry, évasif.

- Hagrid n'avait que quelques minutes de retard, dit Hermione. Tiens, regarde, Harry, il te fait signe.

Harry tourna la tête vers la table des professeurs et sourit à Hagrid qui, en effet, lui adressait un geste de la main. Hagrid n'avait jamais vraiment réussi à se comporter avec la dignité de sa voisine de table, le professeur McGonagall, dont la tête lui arrivait quelque part entre le coude et l'épaule et qui observait d'un regard désapprobateur cette façon un peu trop enthousiaste de saluer un élève.

Hermione suivit le regarde d'Harry qui se tourna en direction de la table des Serpentard. Elle observa Malefoy qui, sous les rires et applaudissements tapageurs de ses camarades, imita quelqu'un qui se fait fracasser le nez. Elle bouillonnait de rage, comprenant à l'instant le retard de son ami. Voyant qu'Harry était concentré sur la dégustation de sa tarte à la mélasse, elle préféra aborder un nouveau sujet :

- Alors, que voulait le professeur Slughorn ? demanda Hermione.

- Savoir ce qui s'était vraiment passé au ministère, répondit Harry.

- Il n'est pas le seul, lança Hermione avec dédain. On n'a pas arrêté de nous poser des questions là-dessus dans le train, n'est-ce pas, Ron ?

- Oui, dit Ron. Ils veulent tous savoir si tu es vraiment l'Élu…

- Même parmi les fantômes, il y a eu beaucoup de conversations à ce sujet, interrompit Nick Quasi-Sans-Tête.

Il inclina vers Harry sa tête à peine rattachée au reste de son corps en la faisant osciller dangereusement sur la fraise qu'il portait autour du cou.

- Je suis considéré comme une sorte d'autorité quand il s'agit d'Harry Potter. Il est de notoriété publique que nous entretenons des relations amicales. Mais j'ai assuré la communauté des esprits que je ne vous importunerais pas avec des questions. « Harry Potter sait qu'il peut se confier à moi en toute tranquillité, leur ai-je dit, j'aimerais mieux mourir que de trahir sa confiance. »

- Ça ne vous engage pas beaucoup puisque vous êtes déjà mort, fit remarquer Ron.

- Une fois de plus, vous manifestez à mon égard autant de sensibilité qu'une hache émoussée, dit Nick Quasi-Sans-Tête d'un air offensé.

Puis il s'éleva dans les airs et retourna à l'autre bout de la table de Gryffondor au moment où Dumbledore se levait à celle des professeurs. Les conversations et les rires qui résonnaient dans la salle s'évanouirent presque aussitôt.

- Je vous souhaite chaleureusement le bonsoir ! dit-il avec un grand sourire, les bras largement écartés comme s'il avait voulu étreindre tout le monde à la fois.

Comme l'ensemble des élèves présents, Hermione aperçut alors sa main droite qui était noircie et cadavérique.

- Qu'est-ce qui est arrivé à sa main ? s'inquiéta Hermione en sursautant.

Rien d'inquiétant, assura-t-il d'un ton dégagé. À présent… je souhaite la bienvenue aux nouveaux élèves et je salue le retour des anciens ! Une nouvelle année d'apprentissage de la magie vous attend…

- Sa main était déjà comme ça quand je l'ai vu cet été, murmura Harry à Hermione. Je pensais qu'elle serait guérie maintenant… ou que Madame Pomfresh aurait fait quelque chose.

- On dirait qu'elle est morte, remarqua Hermione avec une expression dégoûtée. Il y a des blessures qu'on ne peut pas guérir… des anciennes malédictions… il existe aussi des poisons sans antidote…

- … et Mr Rusard, notre concierge, m'a chargé de vous informer que tous les objets provenant du magasin des frères Weasley, Farces pour sorciers facétieux, sont rigoureusement interdits, sans aucune exception. Comme d'habitude, ceux qui voudraient jouer dans leur équipe de Quidditch devront donner leur nom au directeur ou à la directrice de leurs maisons respectives. Nous cherchons également de nouveaux commentateurs pour les matches. Les candidats devront se signaler de la même manière. Nous sommes heureux d'accueillir cette année un nouvel enseignant dans notre équipe, le professeur Slughorn.

Slughorn se leva, son crâne chauve brillant à la lumière des chandelles, son gros ventre, dans son gilet, plongeant la table dans l'ombre.

Le professeur Slughorn est un de mes vieux collègues qui a accepté de reprendre son ancien poste de maître des potions.

- Des potions ?

- Des potions ?

Le mot se répéta en écho dans toute la salle, les élèves se demandant s'ils avaient bien entendu.

- Des potions ? s'exclamèrent Ron et Hermione en tournant vers Harry un regard ébahi. Mais tu avais dit…

- Le professeur Rogue, quant à lui, poursuivit Dumbledore en élevant la voix pour couvrir la rumeur, se chargera des cours de défense contre les forces du Mal.

- Non ! s'écria Harry si fort que de nombreuses têtes se tournèrent vers lui.

- Harry, tu nous avais annoncé que Slughorn devait enseigner la défense contre les forces du Mal ! s'exclama Hermione.

- C'est ce que je pensais ! assura Harry.

Hermione jeta un œil en direction de Rogue, qui était assis à la droite de Dumbledore, ne se leva pas lorsque son nom fut prononcé. Avec une expression triomphale sur son visage, Il se contenta d'un geste nonchalant de la main pour remercier les élèves de Serpentard qui l'applaudissaient. Curieusement, Malefoy ne faisait pas partie de ces élèves, et préférait terminer son dessert. Elle continua de l'observer, intriguée par le changement de comportement du jeune homme, lorsqu'Harry intervient.

- Au moins, une chose est sûre, déclara-t-il d'un ton féroce, c'est que Rogue sera parti à la fin de l'année.

- Qu'est-ce que tu veux dire ? demanda Ron.

- Ce poste est maudit. Personne n'y est resté plus d'un an… Quirrell en est même mort. Personnellement, je vais croiser les doigts pour qu'il y ait un nouveau cadavre…

- Harry ! s'indigna Hermione, choquée.

- Peut-être qu'il reprendra les cours de potions à la fin de l'année, dit Ron, plus raisonnablement. Ce Slughorn n'aura peut-être pas envie de faire ça longtemps. Maugrey, lui, n'est pas resté.

Dumbledore s'éclaircit la gorge. Harry, Ron et Hermione n'étaient pas les seuls à avoir réagi. Un brouhaha s'était élevé dans toute la salle à l'annonce que Rogue avait fini par voir réaliser son désir le plus cher. Apparemment indifférent à la sensation qu'il venait de provoquer en annonçant la nouvelle, Dumbledore n'ajouta rien sur les professeurs et attendit quelques secondes qu'un silence total soit revenu avant de poursuivre :

- Autre chose à présent : comme tout le monde le sait dans cette salle, Lord Voldemort et ses partisans sont à nouveau en liberté et se renforcent de plus en plus.

Le silence devint tendu, pesant, à mesure qu'il parlait. Hermione jeta à nouveau un coup d'œil à Malefoy qui ne regardait pas Dumbledore mais faisait voler sa fourchette devant lui à l'aide de sa baguette magique, comme s'il trouvait les paroles du directeur indignes de son attention. Outrée par ce comportement volontairement désinvolte, Hermione reporta son attention sur Dumbledore.

- Je n'insisterai jamais assez sur les dangers que représente cette situation et sur les précautions que chacun d'entre nous doit prendre pour assurer notre sécurité. Les fortifications magiques du château ont été consolidées au cours de l'été, nous disposons désormais de moyens nouveaux, plus puissants, pour assurer notre protection, mais nous devrons nous garder soigneusement de toute imprudence, que ce soit de la part des élèves ou de celle des enseignants. Je vous demande donc instamment de respecter les restrictions qui pourraient vous être imposées pour des raisons de sécurité, aussi détestables qu'elles vous paraissent – en particulier l'interdiction de vous trouver ailleurs que dans votre lit en dehors des heures autorisées. Je vous supplie, au cas où vous remarqueriez quelque chose de suspect à l'intérieur ou à l'extérieur du château, d'en informer immédiatement un professeur. Je compte sur vous pour accorder, dans votre conduite quotidienne, la plus grande attention à votre sécurité et à celle des autres.

Dumbledore balaya la salle de son regard bleu, puis il sourit à nouveau.

- Mais maintenant, des lits tièdes et confortables vous attendent et je sais que votre première priorité sera d'être parfaitement reposés pour vos cours de demain. Souhaitons-nous donc bonne nuit. Salut !

Dans l'habituel raclement assourdissant des bancs qu'on repoussait, des centaines d'élèves commencèrent à sortir de la Grande Salle pour prendre le chemin de leurs dortoirs.

Hermione se précipita de sortir de la grande salle pour conduire les premières années au dortoir. Comme à son habitude, Ron manqua à ses devoirs de préfet et resta en arrière avec Harry qui lassait ses chaussures.

- Les premières années par ici s'il vous plait ! lança-t-elle d'une voix autoritaire.

Elle commença à monter les escaliers de l'entrée lorsqu'une voix traînante qu'elle ne connaissait que trop bien lui lança :

- Alors Granger, tu aimes le nouveau nez de ton pote Potty ?

Elle lança un regard féroce en direction de Malefoy qui la devançait de quelques marches.

- Malefoy espèce de… si jamais tu t'approches à nouveau d'Harry je te jure que…

À présent, il était à sa hauteur et à sa grande surprise il se rapprocha de la jeune fille pour lui murmurer d'un ton narquois à l'oreille :

- Et qu'est-ce que tu crois pouvoir me faire ? lui demanda-t-il avec un air de défi dans la voix.

Il était si près à présent qu'elle pouvait sentir une odeur d'herbe fraîche qui se dégageait du jeune homme. Elle sursauta à cette approche inhabituelle, même s'il s'agissait à nouveau de narguer la Gryffondor. Rapidement, elle retrouva ses esprits pour répliquer à son tour d'un ton moqueur :

- Je ne sais pas Malefoy, te donner une autre gifle par exemple. Cela fait quelques années que tu n'en as plus reçues de ma part et ça commence à me démanger.

Elle éclata de rire devant l'air ahuri du Serpentard qui ne s'attendait pas à une telle réponse. Arrivée en haut de l'escalier, elle jeta un dernier coup d'œil en direction du jeune homme dont le teint était devenu rouge vif à l'évocation de ce souvenir honteux.

Contente de sa réplique, elle savoura ce moment jusqu'à son arrivée devant le tableau de la Grosse Dame qui ouvrait le portail au dortoir des Gryffondor. Elle s'arrêta net, réalisant qu'elle ne connaissait pas le mot de passe.

- Heu… dit-elle comme seule réponse, gênée devant le regard suspicieux de la Grosse dame.

- Hermione ! lança la voix de Neville derrière elle, tout essoufflée. Je connais le mot de passe, c'est Mandragore.

- En effet, répondit la Grosse Dame qui laissa entrer les élèves.

Les premières années s'avancèrent pour découvrir leur nouveau dortoir et Hermione expliqua aux élèves les dispositions à prendre pour leur installation. Lorsqu'elle eu fini, elle monta dans son nouveau dortoir réservé aux filles de sixième année. Lavande et Parvati étaient déjà en train de ranger leurs affaires tout en gloussant sur les derniers potins de la rentrée. Elles s'interrompirent lorsqu'Hermione entra dans le dortoir.

- Comment vas-tu Hermione ? Demanda Parvati sur le ton de la conversation.

- Très bien et vous ? Vous avez passé de bonnes vacances ? Répondit Hermione.

- Oui si on veut… répondit vaguement Parvati. Mais ça n'a pas été facile de convaincre mes parents de revenir à Poudlard cette année, dit-elle dans un soupir.

- Quoi ? Mais nous sommes en sécurité à Poudlard, bien plus que chez nous ! Dumbledore a mis en place des sortilèges de protection puissants.

- Je sais, c'est ce que j'ai répondu à mes parents, c'est pourquoi je suis là cette année…

Elles rangèrent le reste de leurs affaires en silence jusqu'à ce que Lavande et Parvati discutent à nouveau de potins, puis comme à leur habitude de garçons. Généralement, Hermione évitait ce genre de discussion, les écoutants sans vraiment prêter attention. Mais à présent, Lavande invita Hermione à participer à leur conversation

- Et toi Hermione, tu n'as personne en vue ? demanda Lavande, vivement intéressée. Pas même Ron Weasley ? Tu restes souvent avec lui il me semble…

Elle avait lancé cette phrase sur un ton quelque peu différent, comme pour se rassurer elle-même, ce qui n'échappa pas à Hermione.

- Nous sommes simplement amis, répondit cette dernière d'un air méfiant.

- Ah je croyais… et Drago Malefoy ?

Le cœur d'Hermione bondit dans sa poitrine à l'évocation de son nom, sans qu'elle en sache la raison. La surprise sans doute, ce qui la fit éclater de rire.

- Malefoy ? Bien sûr que non ! Pourquoi cette question ?

- Nous t'avons vue tout à l'heure en pleine discussion dans les escaliers avec, répondit Parvati les yeux pétillants de ragots. Vous aviez l'air proches quand vous parliez c'est pour ca…

Mais Hermione n'ajouta rien d'autre et alla se changer dans la salle de bain avant de se coucher. Elle se regarda dans la glace avant de se rincer le visage. Sans qu'elle sache pourquoi, ses joues avaient pris une teinte rosée. À la vitesse de la lumière, l'image de Malefoy se penchant vers elle dans les escaliers pour lui murmurer cette phrase à l'oreille lui revint aussitôt en mémoire. Chassant ce sentiment de chaleur qui lui monta aux joues, elle s'habilla et sorti de la salle de bain pour se coucher dans son lit. À nouveau, elle repensa à cette odeur d'herbe fraîche, comme si elle s'endormait en pleine nature, sous le soleil d'une journée d'été.