Maladresse

Un petit 5+1
Etrangement, je ne crois pas en avoir jamais écrit un seul.

1.

Le vendeur tremblait de peur lorsqu'il tendit la petite boite au Chasseur qui le foudroya du regard.
Boya la lui arracha littéralement des mains pour étudier ce qu'il y avait à l'intérieur.

La décoration en soie avait l'air bien plus belle dans sa boite qu'elle ne l'était dans sa main.

La soie était de qualité moyenne, son tissage a peine correct et il ne parlait même pas du bain de teinture inférieur.

"- Vous n'avez pas mieux ?"

L'homme se rebella un peu. Son orgueil de professionnel était heurté par la déception, presque le dégout du jeune homme devant l'objet précieux qui aurait permis de nourrir une famille entière pendant un an. Au moins.

"- Vous vous rendez compte de ce que vous avez dans les mains ?" Sa famille fournissait l'Empereur depuis des générations ! Comment ce rien du tout pouvait-il déprécier ainsi son travail.

"- De la soie de qualité inférieure ?" Un coassement d'outrage échappa à l'artisan. Le cultivateur voulait sa mort ou quoi ? Insolent ! "Le fil n'est pas régulier, le tissage est fait en simple trame, la teinture n'est même pas homogène… et pourtant, ce n'est pas une couleur difficile. Si c'était du rouge ou du violent… Mais là, c'est juste du jaune." Continua Boya qui finit par tirer son dizi de sa ceinture pour montrer la pampille attachée à l'instrument. "Je voudrais quelque chose de cette qualité. Ou quelque chose de mieux."

L'artisan se mit littéralement à baver sur l'objet. D'où venait cette pampille ! Et cette soie ! Elle brillait à la lumière ! et ce tissage ! C'était… oui, c'était un dessin qui était fait par le tissage lui-même. Il n'avait jamais vu un objet en soie d'une qualité aussi remarquable. Celui qui les fabriquait devait être riche à millions.

"- C'est… Je n'ai jamais vu quelque chose de cette qualité. Vous ne voudriez pas me le vendre ?"

Ecœuré, Boya rendit la boite au vendeur avant de tourner les talons. Il n'allait certainement pas vendre sa pampille. C'était l'un des objets les plus important qu'il puisse avoir, à égalité avec les quelques bijoux qui lui restaient de sa mère.

Il était déjà ronchon en arrivant, mais la qualité inférieure de l'objet et l'artisan qui lui courait derrière en lui proposant des sommes de plus en plus ridicule pour le cadeau que QingMing lui le mettaient lentement dans une réelle colère noire.

Il finit par se retourner brusquement et poser la main sur son épée avant de gronder.

L'homme glapit et s'enfuit.

On lui avait recommandé la boutique pourtant ! Ça ne devait être qu'une blague pas drôle. Ses frères allaient l'entendre. Mais avec ça, il n'avait toujours rien à offrir à QingMing.~

QingMing cacha son sourire derrière son éventail.

Il prit la dague des mains de son ami et le remercia avec tout le sérieux qu'il était capable de montrer pour le cadeau, tout sauf idéal.

"- Merci Boya."

Le demi-démon ne savait pas trop quoi en faire mais il souriait quand même largement à son ami. Ce n'était pas le cadeau qui comptait, mais le geste. Il voyait bien le malaise de Boya qui n'avait même pas réussit à faire un paquet cadeau correct pour l'arme mais l'avait juste enroulé dans un morceau de tissu pas trop fripé. La maladresse de son ami, sa brusquerie même pour lui offrir le cadeau étaient tellement adorables que les yeux du nordiste brillaient de tendresse.

Le malaise de Boya quitta lentement ses épaules lorsqu'il fut sur que son ami était, à défaut de satisfait, au moins content de son cadeau maladroit.

De l'autre côté de la pièce, les shishen de QingMing avaient levés les yeux au ciel. Ce n'était pas vraiment ce qu'ils avaient à l'esprit lorsqu'ils avaient encouragés Boya à commencer sa cour avec des petits cadeaux. C'était la sixième arme qu'il offrait à QingMing en autant de visite. A ce rythme, QingMing allait finir soit par le prendre comme une insulte, soit comme un défi.

Ou ouvrir une armurerie.

Au choix.

2.

Sha ShengShi grognait à mi-voix.

Ce n'était pas vraiment comme ça qu'il avait prévu de passer son après-midi.

Lorsque Boya Daren était venu lui demander maladroitement son aide pour trouver un cadeau pour QingMing parce que "il avait été amoureux, alors forcément il savait quoi offrir", le jeune démon avait été partagé entre éclater de rire, refaire la figure de l'humain à la phalange et lui balancer un coup de genou dans l'entrejambe.

Heureusement pour les capacités copulatoires et reproductives de l'humain, Sha ShengShi le connaissait assez en deux courtes années pour savoir qu'il ne se moquait pas, ni ne voyait à mal. Il était juste comme toujours, totalement à côté de la plaque sur les sentiments des autres autant que les siens. Sa cruauté ordinaire n'était pas réfléchie ni même voulue. Il ne réalisait pas qu'il blessait le jeune démon en parlant de sa défunte compagne. Boya n'était pas méchant. Juste émotionnellement incompétent. Ils avaient déjà mis près de deux ans à lui faire comprendre qu'il était amoureux de QingMing après tout et que c'était à lui de faire le premier pas. Leur maître ne ferait rien, pas avec le passif que le chasseur avait avec les renards démons.

Honey Bug avait raison.
ils ne pouvaient pas lui faire confiance pour trouver de quoi faire correctement la cour à leur maître.

"- Qu'est-ce que tu veux lui offrir ?"

"- Quelque chose qui lui fasse plaisir."

"- Tu réalises que quoi que tu luis offres, il est content parce que c'est toi qui le lui offre, n'est-ce pas ?"

Boya fit la moue.

"- Quelque chose qu'il utilise."

Boya était totalement à coté de la plaque, mais il avait parfaitement conscience que ce qu'il avait offert à QingMing jusque là ne pouvait pas lui faire plaisir sortit du geste du cadeau.

Il faisait de son mieux pourtant ! Il était juste… pas très doué.

Sha ShengShi secoua la tête avec un petit sourire au visage. Les premiers temps avaient été difficile pour lui avec le chasseur à la Maison. Jusqu'à ce qu'il s'en ouvre à son maître qui avait discuté avec Boya. QingMing ne voulait pas que ses servant soient malheureux chez eux. La pièce rapportée était Boya. Pas Sha ShengShi. Alors QingMing avait demandé à Boya de discuter avec le shishen pour mettre à plat leur différent. Boya était venu lui parler directement avec son manque total de tact ordinaire. Quand ils avaient finit de discuter, Sha ShengShi le voyait plus comme un petit frère mal maladroit, un peu râpeux aux entournures et surtout avec la délicatesse émotionnelle d'une soupière, mais comme un petit frère. S'attacher à Boya était… Facile une fois qu'on avait dépassé les contours épineux.
Aussi facile que s'attacher à QingMing.

"- Quelque chose qu'il utilise… C'est assez large. Mais pas d'arme en tout cas. Il en a assez pour une vie entière je crois."

Boya rougit avant de détourner résolument la tête.
Sha ShengShi dut faire un effort pour ne pas le serrer dans ses bras en roucoulant d'amusement devant ses manières pataudes

"- Ça nous limite à des vêtements, du matériel de calligraphie, de la décoration subtile." Bien préciser le subtil. Boya avait la subtilité d'une éruption volcanique au milieu d'un lac en plein hiver. "Des livres profanes ou sacrés, il n'est pas sectaire, des outils de cultivation ou de la nourriture."

Boya grimaça.

Au moins avait-il une idée un peu plus fine de ce qu'il pouvait lui offrir.

"- Merci."

Sha ShengShi lui tapota l'épaule.

"- Qu'est-ce que tu veux lui offrir ?"

"- …. Un vêtement ?"

"- C'est un bon début."

"- Un vêtement solide, joli et utile ?"

"- Excellent !"

"- Et blanc. Pour ne pas jurer avec ce qu'il a déjà."

"- On se rapproche."

"- Je… Je crois que j'ai une bonne idée."

Sha ShengShi remercia les cieux.

"- Veux-tu que je t'accompagne jusqu'au bout ?"

Boya secoua vigoureusement la tête comme le shishen en était sûr.

"- Non, je veux trouver moi-même."

"- Alors, je reste là." Le servant montra un petit bouiboui qui servait du thé et des baos à la viande. "Si tu as besoin, je suis là."

Boya prit son courage à deux mains pour aller faire le tour de la boutique. Il en ressortit une bonne heure plus tard avec un paquet sous le bras et l'air très content de lui-même.

Sha ShengShi avala le reste de sa tasse de thé pour le rejoindre.

"- On peut rentrer ?"

Le chasseur ressemblait à un chat avec de la crème sur la moustache.

"- Oui."

Le démon voulait voir ce qu'il avait trouvé.

Il n'était pas le seul.

Ils étaient attendus lorsqu'ils rentrèrent. Tout le monde voulait voir ce que Boya allait offrir à leur maître cette fois.

QingMing était en train de lire sur la terrasse quand Boya lui apporta le paquet.

"- C'est pour moi ?"

"- Oui." Toujours aussi bavard.

Le demi-renard prit le paquet. Cette fois, il avait été fait par quelqu'un d'autre. Il ouvrit le papier de soie pour en sortir l'épais manteau en laine et soie. Il était blanc, la qualité superbe, le cadeau était magnifique mais… L'utilité pour un renard du nord élevé dans les Plaines de Glace du yin yang était… inexistante ?

QingMing eut un sourire tendre pour son maladroit futur compagnon. Il le laissait lui faire la cour comme il en avait envie même si c'était bien inutile.

Ça faisait plaisir à Boya de vouloir lui faire plaisir. QingMing n'était qu'un homme. Il appréciait que son amoureux fasse de son mieux pour le séduire et lui prouver son affection.

Le demi-renard replia le manteau.

"- Il est magnifique Boya. Merci. Je n'aurais jamais froid avec ça sur le dos." Non, il allait même cuire comme un bao à la vapeur !

Boya lui dédia un immense sourire de plaisir mêlé de soulagement. Il n'avait pas trop fait n'importe quoi cette fois !

QingMing lui déposa même un baiser sur le front pour le remercier.

Le chasseur s'empourpra affreusement.

Il était sur son petit nuage pendant que QingMing allait ranger le manteau quand il entendit Kuang HuaSHi murmurer à Xue TianGou.

"- C'est une blague ? Un manteau pour un renard nordique élevé dans les congères ?"

Le sourire de Boya disparu immédiatement. Le manteau était effectivement une idée STUPIDE ! Il en aurait presque pleuré.

"- Boya ?"

"- Je suis désolé QingMing. Je suis un idiot."

Il se retrouva immédiatement caché dans les bras de son ami.

"- C'est un magnifique cadeau, Boya. Je l'aime beaucoup."

Stupide ! Il était STUPIDE !

Sha ShangShi secoua la tête.

De tout ce qu'il aurait pu trouver. Un manteau…

Misère…

3.

Cette fois, il avait emmené Mi Chong avec lui. Sha ShengShi avait été de bon conseil sur le fond, mais sur la forme, il n'avait pas été assez précis pour que Boya évite de se mettre dedans. Il y avait bien UN truc à ne pas acheter et il avait bien sûr trouvé le moyen de prendre celui-là.

"- C'était une bonne idée dans l'absolu, Boya Daren. Un vêtement, c'est toujours une bonne idée. Mais QingMing Daren a au contraire besoin de vêtements les plus légers possibles. Il a toujours chaud dans ses robes du yin yang. J'ai beau tenter de tisser des vêtements les plus fins possibles, ce n'est jamais assez frais pour lui. Savez vous qu'il ne porte jamais de chaussettes dans ses bottes ? Sinon, elles sont détrempées de l'intérieur en moins d'une heure. Quand il était adolescent, il sabotait les semelles de ses bottes pour que la neige rentre à l'intérieur et le rafraichisse."

Boya était dépité. Il était tellement sûr d'avoir la bonne idée sur le moment et c'était la PIRE qui soit.

"- D'accord. Quelque chose d'aussi léger que possible."

"- Oui et vous savez, le blanc lui va bien, mais il n'a que ça. Si vous lui offrez quelque chose à porter, essayez de la couleur ? Je suis sûr qu'il appréciera grandement."

"- Quelque chose de léger et de coloré. D'accord…"

Boya notait laborieusement ce que lui disait la jeune démone. Comme avec Sha ShengShi, ils avaient longuement discutés de leur différent. Il s'était platement excusé pour l'avoir attaqué sans préavis.

Mi Chong était une gentille fille. S'il ne fallait pas la chatouiller là où ça ne la démangeait pas, elle était quand même fondamentalement de bonne composition. Elle comprenait les actions de Boya. Il s'était excusé et ne recommencerait jamais. Il n'y avait pas eut de blessure, juste quelques cheveux coupés. Ce n'était pas grand-chose. Elle l'avait bien généreusement pardonné.
Surtout après qu'il lui eut offert un pot de miel de lotus.

Comment avait-il trouvé le cadeau parfait pour elle alors qu'il galerait autant à trouver quelque chose pour QingMing ? C'était ridicule.

"- Vous avez une idée de ce que vous allez lui offrir ?"

Boya hocha la tête.

Cette fois, il demanderait au vendeur ce qu'il pensait avant de prendre tête baissé.

"- Voulez vous que je vienne avec vous ?"

Il déclina. C'était SON cadeau. Même s'il avait besoin d'aide, il voulait que ça reste le sien. Sinon, où était la valeur ?

Mi Chong resta à l'attendre en buvant une tasse de thé au miel, un petit sourire aux lèvres. Il était adorable ce grand imbécile maladroit. Elle n'aurait jamais cru qu'elle puisse s'attacher autant à lui qu'elle s'était attaché à QingMing. Elle espérait vraiment que les deux hommes finiraient par convoler. Et même si ce n'était pas en justes noces, elle avait hâte de voir la marque des dents de son maître sur la gorge du jeune chasseur.

Lorsqu'il sortit de la boutique de soierie, il avait une moue dépitée au visage mais un petit paquet sous le bras.

"- Vous avez l'air déçut."

"- La qualité de la soie ne vaut pas la tienne."

Mi Chong en fut… affreusement flattée

Ils rentrèrent à la Maison pour que Boya puisse offrir son paquet à QingMing.

Comme à chaque fois, QingMing le prit avec un sourire pour l'ouvrir. Il fallait être honnête, il attendait quelle idée saugrenue avait eut son adorable amoureux cette fois encore.

Il écarta le papier de soie qui révéla de la soie écarlate brodée d'argent. Si c'était superbe et d'une délicatesse infinie, il n'arrivait pas à savoir ce que c'était.

Il le déplia à moitié, rougit affreusement, le replia dans le papier et se racla la gorge.

"- Boya… Où as-tu eut l'idée de trouver… Ça !"

"- … Ça ne te plait pas, n'est ce pas ?" Boya était dépité.

QingMing ne put retenir un petit coassement. Ho si ! Le dudou lui plaisait ! Il lui plaisait même BEAUCOUP ! Mais c'était un dudou pour femme d'abord, et il était beaucoup trop court pour lui. S'il portait ça, il serait adorablement indécent. Il avait bien une idée pour le porter et surtout quand, mais leur relation allait devoir évoluer quelque peu pour qu'il le porte pour Boya.

"- Ho si. Ça me plait. Ça me plait même beaucoup." Le demi-renard rougissait de plus en plus. "Tu peux être certain que je le porterai. Mais pas tout de suite." La voix de QingMing s'était faite caressante. Assez pour chasser ses shishen tout aussi écarlates.

Boya eut droit à un autre baiser sur le front et un de plus qui effleura ses lèvres. Il repartit pour JingYun en se sentant tout chose. Jusqu'à ce que Xue TianGou l'attrape au vol avant qu'il ne parte et ne le gronde pendant deux bonnes heures pour ce cadeau honteux et bien trop suggestif ! Quand Boya osa faire remarquer qu'il adorerait voir QingMing avec, le tengu faillit le châtrer à la main. Il allait lui dévoyer son bébé renard ! Dépravé ! Garçon de mauvaise vie !

Boya fuit à son temple, perturbé.
N'était-ce pas ce que tout le monde attendait de lui ? Qu'il dévoie QingMing et finissent tous les deux par faire des choses que la morale réprouvait hors mariage ?

Il était perdu.

4.

Lorsqu'il revint à la Maison une semaine plus tard, Boya rasa les murs pour trouver QingMing. Il ne voulait pas se faire tomber dessus par le tengu, juste profiter un peu de la présence de son ami.

Le demi-renard l'accueillit avec un large sourire, du thé, des petits gâteaux et un confortable coussin près du sien au lieu de devant lui.

"- Bonjour Boya. Tu m'as manqué."

L'inquiétude du jeune chasseur disparu rapidement.

"- Tu m'as manqué aussi."

Décidément, il n'y avait rien de mieux que passer un peu de temps avec son ami.

Boya n'en avait aucune idée mais QingMing portait son précédent cadeau sous ses robes. La soie lui agaçait agréablement les mamelons au moindre mouvement au point qu'ils auraient été visibles s'il n'avait pas porté sa robe de dessous, plus épaisse que les autres.

Boya prit la tasse de thé que QingMing lui offrit puis croqua dans le bao qu'il lui présenta sans vouloir le lâcher. Comment aurait-il pu savoir que les renards faisaient ainsi la cour à leur partenaire ? Un renard devait être capable de nourrir et prendre soin de sa moitié.

Ils restèrent tranquillement épaule contre épaule jusqu'à ce que Mi Chong s'excuse de les déranger. QingMing était rappelé en urgence dans le nord. Plusieurs shidi avaient fait n'importe quoi et s'étaient perdu lors d'un cours sur les portails. Comme QingMing était le meilleur sur le sujet, le Yin Yang avait longuement grincé des dents avant de l'appeler finalement pour qu'il vienne aider à retrouver les enfants disparus.

Boya le laissa partir avec regret.

La chaleur de QingMing contre son flanc lui manquait déjà.

Xue TianGou l'observa les sourcils froncé un long moment avant de soupirer.

"- Puisque nous en sommes là, c'est moi qui vais vous accompagner cette fois. Histoire que vous ne lui trouviez pas n'importe quoi."

Boya ne protesta pas. Il n'avait pas en tête de chercher un cadeau pour QingMing ce jour là mais pour la paix des ménages, il n'allait pas refuser la proposition du tengu. Il aurait largement préféré continuer sa journée à se faire cajoler par QingMing mais on ne pouvait pas tout avoir probablement. Le voir partir pour répondre à l'appel de sa secte lui avait brisé le cœur. Si QingMing le ressentait aussi fort quand lui partait pour retourner à la sienne, il allait vraiment réfléchir à s'installer définitivement là.

Encore fallait-il qu'ils en discutent avant.

C'était compliqué de discuter pour un Boya.

"- Je vous suis." Soupira-t-il.

Le tengu haussa un sourcil de le voir aussi facilement se soumettre à son oukase. Peut-être allait-il pouvoir faire quelque chose de lui si les petits cochons ne le mangeaient pas.

"- Venez."

Xie TianGou ouvrit un portail pour une grande ville qui n'était pas la capitale.

"- Où sommes-nous ?"

"- La capitale du nord." Il montra une montagne au loin. "Le yin yang est là-bas." Ce qui était un secret jalousement gardé.

Boya pinça les lèvres. Le tengu s'attendait à ce qu'il laisse tout tomber pour rejoindre QingMing ? A pied il y mettrait des jours. Les montagnes étaient toujours bien plus loin qu'elles ne le paraissaient au premier abord.

"- Que voulez vous lui offrir cette fois ?"

"- Je crois que je vais abandonner les vêtements." Il tombait à coté à chaque fois. "Peut-être un bibelot ?"

Le shishen hocha la tête. Il fallait le vouloir pour se rater avec un bibelot.

"- QingMing aime la délicatesse et la beauté. Ce qui me fait me demander ce qu'il vous trouve. Vous êtes mignon mais vous avez la délicatesse d'un taureau dans un magasin de porcelaine."

Boya se mis à bouder. Il savait être délicat merci beaucoup ! Il était juste… énergique. Voila. Energique.

"- C'est une idée ça, une porcelaine délicate !"

Xue TianGou y réfléchit. Boya semblait attendre sa validation avant de faire une autre bêtise. C'était agréable de voir le tueur de démon évoluer assez avec les mois pour prendre en compte les avis d'esprits et de démons.

"- C'est même une excellente idée ! Voulez-vous que je vienne avec vous ?" Boya refusa une fois de plus. Une porcelaine délicate, ça ne devait pas être SI difficile que ça. "Evitez un pot de chambre. Vous lui offrez un cadeau. Pas un trousseau de mariage. Pas encore."

Boya s'empourpra affreusement mais ne rectifia pas. Au contraire. Il eut un petit sourire un peu timide avant de littéralement fuir dans la plus proche boutique de porcelaine. Il en ressortit rapidement pour une autre de meilleure qualité. Il lui fallut faire une dizaine de boutiques avant de trouver ce qu'il cherchait. Il finit par en ressortir avec une boite en bois marqueté à la main.

"- Vous avez trouvé votre bonheur ?"

"- Je crois."

Le retour à la Maison fut aussi rapide que les autres. Un jour peut-être aurait-il le droit d'apprendre à le créer lui aussi. Par droit de mariage. L'idée même faisait toujours rosir le chasseur depuis que les shishen de QingMing lui avait mis le nez de force dans ses propres sentiments pour le contraindre à les regarder en face et les comprendre.

Le temps qu'ils rentrent, QingMing était rentré lui aussi.

"- Tu as retrouvé tes bébés disciples fugueurs ?"

QingMing leva les yeux au ciel mais il souriait. Il avait craint un instant que Boya ne soit rentré à JingYun. Le voir avec une boite à la main et Xue TianGou dans le dos le faisait frémir d'anticipation. Qu'est ce que son ami lui avait trouvé cette fois ?

"- Oui, ils étaient cachés là où se cachent tous les bébés disciples qui ont besoin de se cacher du monde et des punitions : dans les étables des chèvres." Les énormes caprins avaient tendances à considérer tout ce qui était plus petit que leur menton comme leur propres petits et à repousser tous les adultes. "Je n'arrive pas à comprendre comment je peux être le seul à y avoir pensé."

Les chèvres l'avaient toujours apprécié. Ce qui était étrange à cause de sa nature. Elles auraient du le considérer comme un prédateur et un danger. Mais non. Elles le considéraient encore comme un chevreau et l'acceptaient au milieu d'elles sans difficultés. Mais QingMing avaient passé des mois à dormir entre elles quand il était petit. C'était le seul endroit où il était à l'abri de ses "amis" de sa classe. Le dortoir était une zone de non droit quand on était un demi-renardeau. Il était la victime désignée de la vingtaine d'autres enfants. QingMing avait très vite appris à venir se cacher dans la fourrure des chèvres et à cacher ses quelques affaires dans le foin pour qu'on arrête de tout lui voler ou lui détruire. Zhong Xing n'en avait jamais rien su. Ou n'avait jamais voulu savoir. QingMing avait arrêté d'aller se cacher avec les chèvres pour dormir quand il avait eut une chambre à lui lorsqu'il était devenu un sénior. Ce n'était pas si vieux. Il avait dix-sept ans à l'époque. Avec une durée de vie aussi longue qu'un humain médiocre, les chèvres n'avaient pas encore oubliées son odeur.

"- Les pauvres gamins se sont cachés là pour ne pas se faire gronder par leur professeur."

"- Qu'est ce qu'ils ont fait ? "

"- Rien ou presque. C'est bien le problème. Le maître en question voulait les faire fouetter pour avoir cassé quelques bibelots. D'accord, ils sont utiles pour la méditation, mais ce n'est rien de valeur ou qui soit puissant."

Boya était scandalisé. La discipline du nord était ridicule.

"- J'ai réglé le problème." QingMing n'était peut-être pas le chef de secte comme il aurait du l'être par droit d'héritage, il restait le fils adoptif de Zhong Xing, mais il avait une aura suffisante en tant que Tueur de Serpent entre autre pour qu'on l'écoute.

Surtout qu'il était le Maître le plus jeune. Il avait aussi plus de coffre que les autres quand il s'agissait de hurler ce qu'il ne faisait que très rarement. Alors quand il bramait, ça s'écrasait mollement.
QingMing était détesté par ses pairs mais pire, ils le craignaient. Ils savaient tous qu'il serait leur prochain chef de secte quand l'actuel aurait défunté. Ils ne pourraient l'empêcher. QingMing était trop fort, même à son jeune âge.

"-Tu as quelque chose pour moi ?" Ne put résister QingMing plus longtemps.

Il voulait voir ce qu'il y avait dans la boite.

Boya se rassit sur le coussin près de lui pour lui poser la boite sur les genoux. Elle était jolie en elle-même mais ce n'était pas le cadeau.

Kuang HuaShi et Sha ShengShi avaient reposés leurs instruments de musique avec curiosité. Qu'est ce que Boya avait trouvé cette fois ?

"- Ho Boya !"

La poupée en porcelaine était charmante.

Kuang HuaShi dédia un regard scandalisé au chasseur. Il se sentait outré de voir cette.. chose… sous leur toit. Il y avait déjà une poupée de porcelaine ici ! Et c'était son médium à lui ! Il n'y avait pas besoin d'en avoir une autre !

"- Boya… Tu as remarqué ?"

"- QingMing ?" Qu'est ce qu'il avait raté cette fois

Le pauvre chasseur commençait à se dire qu'il n'arriverait jamais à rien.

"- Elle ne te plait pas ?"

"- Elle est très jolie mais…"

"- Mais ?"

"- Elle est habitée."

Le scandale de Kuang HuaShi fut si fort que son compagnon dut venir le cacher dans ses ailes pour qu'il évite d'aller casser l'objet.

"- Habitée ?"

"- Un esprit est enfermé dedans." Ce n'était donc pas une première main.

Les deux prêtres durent longuement travailler la poupée pour éveiller momentanément l'esprit qui dormait à l'intérieur. Il n'était pas encore cultivé suffisamment pour s'éveiller naturellement. C'était un esprit de petite fille. Sans doute sa première propriétaire. Elle n'était pas assez consciente d'elle-même pour qu'ils puissent en déterminer grand-chose à part qu'elle était morte assassinée par son père et que son sang avait coulé sur la poupée.

"- Je vais la ranger à l'abri. Avec toute l'énergie ambiante ici, elle pourra s'éveiller tranquillement avec le temps." Rassura QingMing en réponse à une question que Boya n'avait même pas pensé à poser.

Il s'en fichait il fallait bien avouer. Il voyait juste qu'encore une fois, son cadeau était raté.

A force, il aurait pu en pleurer.

La prochaine fois, il allait se rabattre sur du basique.

Ce serait encore plus risible mais quand l'univers avait décidé qu'il n'était pas fichu de trouver quelque chose de correct pour faire sa cour, il fallait bien prendre des mesures.

Et si Kuang HuaShi pouvait cesser de le foudroyer du regard… Qu'est ce qu'il lui avait fait enfin !

5.

Cette fois, c'était Kuang HuaShi qui avait prit Boya par le col pour l'emmener en course avec lui.

Ça faisait des semaines que le chasseur n'avait plus tenté sa chance avec de nouveau cadeau pour faire la cour à QingMing. Le jeune renard commençait à se désespérer. Est-ce que Boya avait lâché l'affaire ? Avait-il trouvé mieux ailleurs ? Une demoiselle peut-être. Quelqu'un qui serait capable de lui donner la famille, les petits qu'il était en droit d'attendre de l'existence. Et pas un demi renard-démon au banc de sa secte qui n'avait même pas encore eut le courage d'aller rencontrer le Shifu de celui qu'il aimait de peur qu'on lui notifie clairement de ne pas chercher à s'approcher de lui.

Boya n'avait pas résisté quand le shishen l'avait attrapé par le col, littéralement arraché au flanc confortable de QingMing pour l'entrainer avec lui.

QingMing avait rit doucement mais sa déception de voir le chasseur lui être arraché était réelle.

"- Ne rentrez pas trop tard, d'accord ?"

"- Occupe toi donc de tes queues, QingMing." Avait marmotté Kuang HuaShi avant d'ouvrir un portail.

Il était ronchon depuis l'arrivée de la poupée de porcelaine. QingMing lui avait installé un petit espace dans la cuisine qui était l'endroit le plus chaleureux et le plus occupé de la maison. La poupée pourrait cultiver tranquillement et passivement jusqu'à son éveil. Dès qu'il passait là, il fallait que le shishen se retienne de la détruire. Il était jaloux. Il était le seul esprit né d'une poupée dont son maître devait s'occuper. Xue TianGou avait beau lui montrer son affection pour lui chaque jour qui passait, rien n'y faisait. Il boudait comme un môme. Et il voulait des réponses.

Une seconde fois, Boya se retrouva avec un des servants de son ami dans les rues glacées et venteuses de la capitale du nord.

Il n'avait même pas eut le temps de prendre une cape pour se protéger du froid. Malgré son Node doré, il n'allait pas tarder à claquer des dents.

Kuang HuaShi eut pitié. Un peu. Juste ce qu'il fallait pour que Boya n'attrape pas une pneumonie. QingMing lui en aurait sans doute voulu.

Il poussa Boya dans une auberge pour qu'on leur serve du thé.

"- Pourquoi avez-vous choisit cette poupée ?" Autant être très clair.

"- … Parce qu'elle est jolie ?"

L'esprit s'attendait à toutes les réponses sauf quelque chose d'aussi franc et ridicule. Juste jolie ? il avait choisit ce machin juste parce que c'était JOLI ?

"- Mais une poupée ?"

"- Xue TianGou avait parlé de quelque chose de délicat. C'est délicat une poupée ? Non ?"

L'esprit fulminait presque. A moins que….

"- … Vous ne savez pas ce que je suis n'est-ce pas ?"

Boya secoua la tête, un peu perdu.

"- Un esprit mais à part ça ?"

"- Je suis né d'une poupée un peu comme celle-là." Le ton était lugubre.

Boya resta interdit une seconde avant de réaliser.

"- Je n'ai jamais voulu vous remplacer ! Je suis désolé !" Il était réellement confus et désolé.

La colère du shishen diminua un peu. Au moins n'était-ce pas un acte de défiance envers lui. Ni de mépris.

"- Finissez votre thé. Vous avez un cadeau à trouver à QingMing. Quelque chose de bien pour une fois !"

"- Je fais ce que je peux, vous savez ?"

"- C'est probablement ce qui me désole le plus. Vous faites des efforts et vous tombez systématiquement à côté."

Boya se désola lui aussi.

"- A ce rythme, il n'acceptera jamais de m'épouser." Qui accepterait d'épouser quelqu'un qui n'était pas capable de simplement trouver UN cadeau correct ? "Je ne vais pas lui offrir un peigne pour les cheveux !" On offrait ça aux femmes. Pas à un homme. Quand bien même était-il aussi bel homme que QingMing.

Boya rougit soudain. Il aurait apprécié de passer des heures à peigner les cheveux de QingMing et de jouer avec.

Kuang HuaShi lui jeta un coup d'œil en coin. Pourquoi qu'il était tout rouge le chasseur, là. A quoi avait-il pensé ?

"- Si vous pouviez éviter d'avoir des pensées indécentes en ma présence ? j'ai participé à l'éducation de QingMing. Il est comme un fils pour moi. Ou presque."

"- C'est vous qui avez insisté avec les autres pour que je lui fasse la cour !" Boya était scandalisé maintenant.

"- Il y a une différence entre lui faire la cour et vouloir le culbuter dans les couvertures."

"- C'est vous qui avez l'esprit dans le caniveau. Je ne pensais pas à ça. Juste à lui brosser les cheveux."

Le shishen renifla avec hauteur. Il n'y croyait pas une seule seconde. Mais pour la paix des ménages, il n'insista pas davantage.

"- Quelle idée de cadeau avez-vous ?"

"- Quelque chose d'utile." On revenait aux fondamentaux. "Visiblement, les vêtements et les bibelots, ça ne va pas. Alors quelque chose d'utile."

Tant qu'il ne lui offrait pas un balai, des casseroles ou de la lessive…

"- Ce n'est pas plus bête qu'autre chose. Essayez de trouver quelque chose qui peut être le seul à utiliser. Pas des casseroles ou des bols, hein."

Boya rosit. Il y avait pensé.

Le shishen soupira. Mais qu'est ce qu'ils allaient faire de lui ? Vraiment ?

"- Vous êtes désespérant." Et toute cette bonne volonté, là ! C'était bien la seule chose qui les empêchait de lui hurler dessus. On ne pouvait pas être à ce point maladroit naturellement. Quelqu'un avait dut lui apprendre. Ce n'était pas possible autrement !

"- Mes excuses."

Kuang HuaShi le chassa vers les boutiques de qualité de la ville. Qu'il fouille et qu'il ne revienne pas sans un cadeau qui puisse être personnalisé un minimum !

Boya fuit littéralement devant l'irritation du shishen.

Lorsqu'il le retrouva plusieurs heures plus tard, il avait une petite boite enroulé dans un joli morceau de soie rouge.

"- Vous avez trouvé quelque chose ?"

"- La personnalisation a pris du temps."

"- Bon. Alors on rentre."

L'esprit n'avait même pas le courage de demander ce que c'était. Il était sur que ce serait encore raté.

Une fois de retour à la Maison, Boya n'attendit pas pour apporter son cadeau à son renard.

Il le posa devant lui avec un soupir.

"- J'imagine que c'est encore raté" Il n'y croyait plus vraiment lui-même.

QingMing eut un pauvre sourire.

"- Tu sais que tu n'as rien à me prouver n'est ce pas ? Tu ne me dois rien."

Le chasseur secoua la tête mais ne dit rien. Les paroles s'étranglaient dans sa gorge sans qu'il ne soit capable d'exprimer son trouble et son irritation. Il voulait tellement parvenir à faire UN cadeau à son renard. Juste un seul qui lui fasse vraiment plaisir et ne finisse pas dans un placard à prendre la poussière.

QingMing soupira doucement. Il ne savait pas comment Boya pouvait se rater à ce point à chaque fois. C'était presque un don à ce niveau-là. Si ça n'avait pas été aussi triste, ça aurait pu être presque drôle.

C'est avec une certaine appréhension que QingMing dénoua le petit morceau de soie pour dégager la boite. Elle était plus longue que large. Un instrument peut-être ?
Il l'ouvrit et resta un instant charmé par le pinceau de calligraphie. Il était blanc avec un seiman en argent sur le manche. Les poils du pinceau était en martre marron et blanc. L'objet était remarquablement adorable. Si ce n'était le regard meurtrier que Kuang HuaShi jetait une fois de plus à Boya.

"- Non mais il fait exprès là ! Ce n'est pas possible autrement ! Il a quelque chose contre moi ! La poupée, maintenant ça ! Et je suis allé avec lui en plus ! Il a fait ça sous mon nez !"

Boya était une fois de plus perdu. Qu'est ce qu'il avait fait de mal cette fois ?

"- Kuang HuaShi fait les pinceaux de toute la maison. En général avec mes mues. C'est… C'est sa prérogative."

Boya s'en serait presque tapé la tête contre les murs.
C'était un don.
Ce n'était pas possible autrement.

Comment faisait-il pour TOUJOURS trouver le pire ?
Il en avait les larmes aux yeux pendant que QingMing avait reposé le pinceau dans sa boite pour aller consoler son shishen furieux.

Boya préféra rentrer à JingYun discrètement avant que quelqu'un ne décide de lui cogner dessus.

+1.

QingMing avait reçu l'invitation à JingYun avec un mélange d'angoisse et d'anticipation.
Qu'est ce que la secte Est voulait ? Avaient-ils enfin été prévenu de ce qu'il était par le yin yang ? Ils étaient assez mesquins pour faire ça si ça pouvait le blesser et le rendre malheureux. QingMing les connaissait assez pour savoir que son temple ferait toujours tout ce qu'ils pouvaient pour lui faire de la peine.

Ses shishen avaient voulu l'accompagner. Le demi-renard avait refusé. Quoi qu'il se passe, il assumerait seul.

Ses shishen étant ce qu'ils étaient, ils l'avaient suivi. Sha ShengShi était caché dans des buissons en contrebas du temple avec Kuang HuaShi et Xue TianGou surveillait ce qui se passait en hauteur. Ils faisaient confiance à Boya mais pas à son temple. Si le chasseur de démon avait une tendresse évidente pour leur maître, ils ne pouvaient que rester sur la défensive face à un temple entier de tueurs de démons.

QingMing ouvrit un portail devant les grandes portes du temple. Il sentit immédiatement qu'on le mettait en joue avec des arcs.
C'était normal.
Sans doute.

"- Bonjour. Je suis Anbei QingMing. J'ai été invité par Yuan Boya."

Immédiatement, on baissa les arcs et on ouvrit la porte. Des jeunes disciples entre quinze et vingt ans lui sourirent largement.

"- QingMing Daren ! Bonjour ! On vous attendait. Entrez, entrez !" Le plus âgé eut un petit geste d'excuse vers les armes. "C'est juste une précaution, ne le prenez pas mal."

Ils s'écartèrent pour le laisser entrer dans la cour de la secte. Les disciples présent ne cachèrent pas leur curiosité à l'arrivée du prêtre en blanc. Ils avaient tous entendu parler de QingMing. Boya n'avait que son nom à la bouche depuis qu'il était revenu de la Capitale après avoir aidé à la destruction du Serpent. Ils voulaient tous rencontrer l'homme qui avait charmé leur shixiong.

"- QingMing !"

"- Boya !"

Les deux hommes se prirent les mains sans même y réfléchir. Ils souriaient tous les deux avec la même tendresse.

"- Votre invitation était inattendu, Boya Daren." Souriait largement QingMing.

Son ami lui avait manqué. Il avait même craint de ne pas le revoir. Kuang HuaShi avait été long à calmer après le dernier cadeau du jeune homme. Le shishen avait été persuadé que le chasseur l'insultait personnellement alors que ce n'était que maladresse et accident.

L'invitation de Boya avait été un soulagement.

"- Je craignais que vous n'acceptiez pas de venir, QingMing Daren." Avoua Boya.

Derrière eux, les disciples de l'Est les regardait se tourner autour avec amusement. Les plus vieux pariaient déjà combien de temps il faudrait avant que leur Premier Disciple ne soit officiellement retiré de la liste très sélect des dix meilleurs partis de la Capitale. Quant aux plus jeunes, ils trouvaient juste la chose affreusement romantique. D'accord, l'amoureux que leur Shixiong s'était choisit était un garçon et même pas complètement humain. Mais ça n'en était que plus romantique encore à leurs yeux !
le chasseur de démon qui avait perdu sa famille sous les crocs d'un renard qui tombait amoureux d'un maître d'un autre temple avec qui il s'était battu pour sauver le monde. Un maître qui était lui même un demi renard. Un maître que Boya avait d'abord détesté avant que les qualités du demi-humain ne parviennent à dépasser la haine et qu'il n'en tombe lentement amoureux. C'était digne d'un conte de fée.

Pour les petits shidi, c'était comme voir une vraie histoire d'amour à l'ancienne se dérouler devant leurs yeux.

"- Et vous êtes juste à l'heure." Continuait Boya.

"- A l'heure, Boya Daren ?"

QingMing cacha le bas de son visage derrière son éventail. Qu'est ce que Boya avait en tête exactement ?

Boya lui offrit son bras. Il avait parfaitement conscience que tous les yeux étaient sur eux. Même son Shifu les regardait se tourner autour comme deux hérissons qui peinent à savoir comment s'accoupler à cause des piquants.
QingMing hésita encore une seconde avait de poser sa main sur le bras de Boya.

"- Venez, QingMing Daren."

Tous ces ronds de jambe étaient bien inutiles entre eux mais… Bah. Boya avait décidé de lui offrir quelque chose et QingMing était curieux d'aller jusqu'au bout.

Il le suivit donc le long des couloirs du temple qu'il foulait pour la première fois.
QingMing était sur que Boya le trimballait partout pour le montrer à chacun. A chaque fois qu'ils croisaient d'autre disciples, Boya souriait. Il ne l'avait pas dit une seule fois, mais à chaque fois QingMing avait entendu le "C'est mon QingMing à moi !" dans son sourire et la façon dont Boya avait de se redresser, fier comme un coq.
Les autres membres de JingYun le laissaient faire avec un rien de blâme amusé et attendrit.
Boya le présentait à son temple comme s'il était important pour lui. Comme s'il aurait un jour toute légitimité à se balader là et devait être connu de tous et toutes.

Boya ouvrit soudain une porte. Ils étaient sur un large balcon où avait été installée une table, des coussins et un diner fin.

"- Boya ?"

"- Je sais que je ne suis pas très doué pour te montrer mon heu…. Mon affection, QingMing. Mais ne doute jamais que je… je…" Boya peinait à dire ce simple mot qu'il n'avait jamais prononcé depuis la mort de sa mère.

QingMing prit ses mains dans les siennes. Il lui peinait de voir Boya souffrir de ne pas arriver à dire ce qu'il avait sur le bout de la langue.

"- Je sais Boya."

Il prit ses doigts pour les porter à ses lèvres et en embrasser le bout.

Le chasseur rougit affreusement. Même ça il n'était pas capable d'y arriver. Il fallait que QingMing l'aide pour ça aussi et ça le dévastait. Il n'arrivait juste pas à DIRE ce qu'il ressentait.

Boya repoussa gentiment QingMing pour l'aider à s'installer à la table.

"- Je sais que mes cadeaux sont toujours ridicules. Je suis incapable de savoir comment te faire plaisir. Je ne sais pas comment comprendre ce qui fait plaisir aux gens alors… Voila. Je pensais qu'un diner rien que tous les deux…"

"- Tu l'as préparé toi-même ?"

Boya hocha la tête.

"- J'ai passé ces dernières semaines dans les cuisines à apprendre."

Le cœur de QingMing se gonfla d'amour pour son adorable chasseur. Boya avait passé tout ce temps au loin pour apprendre comment cuisiner ? Rien que pour lui ? Comment QingMing pouvait-il avoir autant de chance ?

Il goûta les plats avec empressement. S'il voulait être vraiment honnête, Honey Bug cuisinait mieux que Boya. Evidemment. Mais la cuisine de Honey Bug manquait de tout l'amour que Boya avait mit dans ses plats. Elle manquait de cet effort presque désespéré pour lui faire plaisir, pour qu'il soit certain qu'il comptait très fort pour lui. Comment QingMing pourrait-il ne pas trouver ça délicieux ?

Il en avait les larmes aux yeux.

"- QingMing ?" Boya était au bord de la panique.

Est-ce qu'il s'était encore ramassé au pont de faire pleurer son renard ?

"- C'est… C'est tellement bon ! Je crois que je n'ai jamais rien mangé de meilleur."

Le chasseur hésita un instant. QingMing était honnête ou il disait ça pour lui faire plaisir.

"- Tu… Tu es sur ?"

"- Boya, c'est absolument divin. J'aimerai vraiment profiter de ta cuisine tous les jours, tu sais."

Boya se sentit rougir. C'était une déclaration en bonne et due forme ça, n'est ce pas ?

"- QingMing… Je serai le plus heureux des hommes si je pouvais te nourrir tous les jours."

Sans le savoir, il satisfaisait intimement les besoins du renard tout autant que de l'humain chez QingMing. Le renard avait besoin d'avoir un partenaire qui prendrait soin de lui, qui serait capable de les nourrir lui et leur progéniture.

"- Boya…"

Les yeux de QingMing avaient prit une couleur jaune ambrée et ses pupilles étaient fendues comme jamais Boya ne les avait jamais vu. C'était la première fois qu'il était réellement confronté au renard.

Boya prit les mains de QingMing dans les siennes pour le retenir s'il réalisait qu'il avait relâché son contrôle suffisamment pour que ses trois queues et ses oreilles se montrent.

Boya aurait dû être terrifié mais il était charmé par les petites oreilles rondes et si blanches, les longues, très longues queues fines et touffues à la fois qui invitaient à perdre ses mains dedans pour les caresser jusqu'à ce que la lune tombe.

"- QingMing…. QingMing… Je… Je…" Pourquoi ? Pourquoi n'arrivait-il pas à le dire ! C'était si ridicule !

"- Je sais Boya… Je sais." Le demi-démon avait les larmes aux yeux mais il souriait plus largement que Boya ne l'avait jamais vu.

Pour une fois, il n'avait peut-être pas raté son cadeau finalement !

Il fallait qu'il en profite. C'était le moment ou jamais. Si seulement il y arrivait. Si seulement il pouvait PARLER.

"- QingMing… QingMing…."

"- Je sais Boya…"

Le renard lui embrassa encore le bout des doigts. Il ne voulait pas que Boya se force. Il avait la preuve de ce qu'il n'arrivait pas à dire. Ça lui suffisait. C'était plus qu'il n'aurait jamais espéré recevoir un jour de quelqu'un. QingMing n'avait pas besoin que Boya lui dise. Juste qu'il lui montre.

Boya secoua très fort la tête. Il serrait les doigts de QingMing dans les siens aussi fort qu'il fermait les yeux. Il avait BESOIN d'arriver à le dire. Il fallait qu'il parvienne à exprimer ce qui le rongeait depuis qu'ils s'étaient rencontrés.

Il avait comprit qu'il aimait QingMing lorsqu'il l'avait abandonné sur son bout de toit après lui avoir rendu le pipa que Sha ShengShi avait volé. Et il avait eut peur. Il avait laissé la colère le submerger. Il avait enterré ce sentiment qui le terrifiait sous la colère et la rancœur. Il avait préféré s'en détourner parce qu'il ne savait pas quoi faire d'un sentiment qui lui était étranger depuis des années. Surtout qu'il n'était pas certain de survivre. Il ne voulait pas que ses derniers jours soient dérangés par autre chose que son devoir.

Mais ils avaient survécut. Ils s'étaient séparés. Boya s'était languit de QingMing jusqu'à ce qu'il trouve le courage de l'appeler et lui demande s'il pouvait venir le voir.

Retrouver QingMing avait été le plus beau cadeau que la vie lui avait offert.

Comment pouvait-il ne pas vouloir lui rendre la pareille ? QingMing le savait peut-être. Mais lui avait besoin de le lui dire et de lui offrir tout ce qu'il avait dans le cœur.

Il força encore. Les mots lui raclaient la gorge comme une malédiction qui ne veut pas sortir.

"- Je… Je…." Ça ne voulait pas. Ça ne passait pas. Il serra plus fort les doigts de QingMing dans les siens. Boya posa ses lèvres sur ses doigts pour rassembler tous ses forces. Jamais quelque chose n'avait été plus difficile de tout sa vie. "Je…. Je…. QingMing… Je…. Je t'aime, QingMing." Voila. Enfin. Il avait réussi à le dire.

Boya eut l'impression que son cœur s'arrachait de sa poitrine pour passer par sa bouche lorsqu'il parvint enfin à prononcer ces quelques petits mots si risibles et si galvaudés par autant de monde. Pour lui, ils avaient plus de force que toutes les bénédictions du monde. Ou toutes les malédictions de l'Empire. Et il avait réussi à les offrir à QingMing. Enfin.

QingMing resta comme paralysé de longues secondes. Il eut un instant l'impression que son cœur s'était arrêté dans sa poitrine et qu'il ne redémarrerait jamais. Avait-il fait une attaque tellement le bonheur de les entendre venait de ravager ses méridiens ? Faisait-il une déviation d'entendre des mots qu'il connaissait mais n'espérait plus entendre sortir de la bouche de Boya ?

Puis il retrouva le contrôle de ses membres. Il écrasa brutalement Boya contre son torse avant de l'embrasser rudement. S'ils avaient été en intérieur, il aurait renversé Boya sur les coussins pour lui faire subir les derniers outrages sur le champs. Il avait attendu trop longtemps.

"- Pa… Pardon." S'excusa le renard quand il retrouva enfin un semblant de contrôle. Il attendait ça depuis si longtemps que ses désirs lui avaient échappés un instant.

Boya était resté stupéfait, incapable de bouger ou de répondre au baiser sous la surprise.

Hors d'haleine, il rougissait comme un adolescent, affreusement émoustillé en même temps. La tête lui tournait sous le manque d'oxygène autant que la décharge de sérotonine qui venait de déferler dans son cerveau. A moins que ce ne soit le qi que QingMing venait de lui donner en même temps qu'il l'embrassait, que Boya avait accepté et qu'il lui avait rendu avec le sien. Ils n'étaient même pas encore intimes qu'ils commençaient déjà à cultiver à deux pour un simple baiser.

Boya repris les lèvres de QingMing avec timidité. Il n'avait jamais embrassé personne avant. QingMing à l'inverse avait de l'expérience, c'était évident. Une certaine jalousie remplit le ventre de Boya qui se promis de lui faire oublier tous les autres.

"- Je t'aime QingMing." C'était plus facile à dire la deuxième fois.

"- Je t'aime aussi mon Boya."

Boya posa son front contre le sien.

"- Je t'aime." Il allait finir par adorer dire ces trois mots si simple.

Cette fois, son cadeau était réussit au moins.

"- Je t'aime." Il ferma les yeux et se gorgea de l'odeur de son renard autant que de la chaleur de ses bras pendant que les crocs de QingMing se posait sur la gorge et la mordait à sang.