Juin 1987, Manoir Wayne
- Nanny, Nanny ! Comment tu m'aimes ?
- Grand comme ça, répondit la gouvernante en ouvrant les bras au maximum.
- C'est grand ! et Père, comment il m'aime ?
- Pareil que moi, comme ça.
La gouvernante répéta son geste. L'enfant fit une moue boudeuse et renifla.
- C'est pas vrai.
- Ah bon. Et pourquoi ?
- Parce que si Père y m'aimait autant que toi, alors il serait plus souvent dans la maison.
Olivia soupira.
- Ce n'est pas sa faute, tu sais. Il travaille beaucoup et grâce à ça tu as une jolie maison, et plein de professeurs chouettes.
Rose croisa le bras et réfléchit. Elle finit par opiner et quitta le giron de sa Nanny. L'enfant partit dans son monde imaginaire et s'assit dans l'herbe. Elle regarda les arbres au loin, qui se dressaient au milieu du terrain de sa maison.
La gouvernante la surveillait du coin de l'œil tout en lisant un roman policier passionnant. Il y avait un moment que la petite n'avait pas posé de question sur l'amour que lui portait son père. Olivia avait beau lui assurer que le patriarche l'aimait beaucoup, Rose ne semblait jamais totalement convaincue. Il fallait dire que Monsieur n'était pas souvent là pour dire de vive voix à sa fille qu'il l'aimait. Et quand il rentrait au Manoir, il ne s'occupait pas vraiment d'elle. Les premières années, elle le suivait partout, tout le temps, et s'occupait sagement dans un coin, sans rien lui demander. L'enfant ne souhaitait pas être source d'ennuis pour son père et elle était très calme avec lui. Dès qu'il partait, elle était capable d'être le plus merveilleux des anges, comme elle pouvait tout d'un coup partir dans des crises de colère extraordinaires.
Pourtant, depuis quelques mois déjà, Rose se désintéressait de son père, qu'il soit là ou pas. Elle cherchait moins son attention. Elle posait peu de questions, et des jours comme celui-ci étaient rares. Olivia se réjouit qu'elle s'en intéresse aujourd'hui. Pas qu'elle pense que Monsieur méritait beaucoup d'intérêt de la part de sa fille, mais au moins ça voulait dire que son attention se focalisait sur quelqu'un d'autre que Derek. Depuis qu'elle l'avait rencontré, le changement avait été extraordinaire. Rose n'avait plus que ce prénom à la bouche. Elle parlait de lui, rêvait de lui, pensait à lui à longueur de journée. L'enfant ne semblait plus respirer que par lui.
Et lui, si dévoué, n'était pas en reste : il se pliait à tous les caprices de Rose, toutes ses exigences, faisait ce qu'elle voulait sans jamais protester. Olivia avait donc discuté avec les parents du petit, estimant qu'il valait mieux pour leurs personnalités que les enfants soient éloignés. Elle craignait que sa protégée ne martyrise le petit blond plus qu'autre chose.
Seulement, elle avait appris que Derek agissait de la même façon que Rose : il parlait d'elle pendant des heures, lui écrivait des lettres, voulait aller la voir, l'inviter, lui téléphoner… Bien qu'il n'y ait pas de téléphone chez les Wayne.
Les deux enfants, qui n'avaient pas quinze ans à eux deux, étaient déjà dépendants l'un de l'autre. Et rien ne semblait pouvoir les séparer.
Olivia soupira. Alors, des jours comme ceux-ci, des jours où Rose prêtait attention à quelqu'un d'autre que Derek, ne serait-ce que pour quelques heures, elle les bénissait. Renonçant à lire, elle rejoignit l'enfant dans l'herbe. Elle s'assit et tenta de la refaire parler de son père :
- Tu sais, ton père est triste de ne pas être plus souvent avec toi. Il aimerait bien, mais il a beaucoup de responsabilités avec le travail.
Rose regarda un nuage qui passait.
- Il arrive bientôt Derek ?
Samedi 14 octobre 1995, 6 heures, dortoir des Serdaigles
Rose se retourna. Encore et encore. Elle s'agita dans son sommeil. Ses paupières frémirent. Puis sa main droite se crispa et elle serra la mâchoire. Elle murmura :
- Non…
Ses tempes commençaient à coller de sueur. Son corps se roula en boule, ses yeux se plissèrent. Elle montra les dents. Rose gronda étrangement, et plop ! Elle se transforma, sans se réveiller. La panthère continuait de sursauter, agitée de tics. Elle sortit ses griffes et laboura les draps. Puis, après un dernier couinement et un sursaut trop puissant, l'animal s'écrasa au sol dans un bruit sonore. L'Animagus ouvrit aussitôt les yeux, surprise. Des rideaux s'ouvrirent et le visage endormi de Lisa apparut. Elle écarquilla les yeux en voyant son amie transformée et allongée au sol, l'air hébété. L'animal se leva, s'ébroua et regarda Lisa, toujours désorienté par son cauchemar. Rose reprit sa forme humaine.
- Cauchemar ? lança son amie tandis que Rose s'asseyait.
- Oui.
- Toujours le même ?
- Toujours.
- Ça fait une semaine que tu dors mal. Tu devrais peut-être régler cette situation non ?
- Pitié, pas de discussions philosophiques à six heures du matin.
- Je dis ça pour toi, moi, répliqua Lisa en haussant les épaules.
Elle se leva et s'étira.
- Je vais chez les garçons. Tu viens ?
Rose se leva à son tour. En chemin, elle se remémora la semaine passée. Elle avait évité un maximum de croiser William ou Blaise. Après que les deux garçons l'avaient embrassée – et surtout qu'elle réalise ce qui s'était passé – Rose avait décidé qu'elle avait besoin de temps pour réfléchir, et préférait esquiver leur compagnie. Il était pourtant inévitable qu'elle les voie : l'un était dans sa maison et ami avec tout le monde, l'autre passait certains cours à quelques centimètres d'elle, ne supportant pas qu'elle l'ignore. De ce fait, elle s'était mise à faire un cauchemar récurrent, mêlant joyeusement les baisers qu'elle avait échangés avec les deux garçons à des scènes d'horreur où tout le monde finissait par mourir dans d'atroces souffrances. Elle, en particulier, parce qu'elle avait séduit deux garçons en même temps. Et les élèves de Poudlard, déguisés en Mangemorts, qui scandaient :
- Coupable ! Coupable ! Coupable !
Bref, ses nuits n'étaient plus du tout reposantes et elle commençait à être sérieusement fatiguée. Surtout qu'elle n'entrevoyait aucune solution à son problème : est-ce qu'elle devait choisir entre les deux ? est-ce qu'elle avait envie de choisir ? Parce que Rose aurait préféré garder les deux à la fois, rien que pour elle. Cependant, elle était suffisamment lucide pour deviner qu'ils ne seraient probablement pas d'accord pour se la partager. Et quel dommage ! Elle était consciente que choisir l'un, voulait dire détériorer ses relations avec l'autre… au moins pendant un certain temps. Elle ne voulait pas se retrouver avec un petit ami en plus et un ami en moins. Il lui semblait impossible de se dépêtrer de cette situation.
Rose poussa un soupir en regardant Lisa disparaitre entre les rideaux du lit d'Anthony. Rose préféra le lit de Derek bien sûr, et elle poussa les lourds tissus… pour se figer. Pas de Derek. Elle se retourna et s'approcha du lit de Terry.
Les deux garçons étaient là, l'un dans les bras de l'autre, profondément endormis. Elle sourit, les trouvant juste trop mignons – Derek aurait a-do-ré ce qualificatif. Elle s'éloigna, puis investit le lit de son meilleur ami, s'allongeant entre les draps froids. Un nouveau soupir s'échappa de ses lèvres.
De voir ses amis les plus proches roucouler les uns avec les autres la rendaient un peu morose. Pourquoi fallait-il qu'elle se soit fourrée dans une situation compliquée ?
Si Blaise n'avait pas été là…
Non, si William n'avait pas été là…
Oh, zut. Je sais pas.
Elle ferma les yeux. Depuis une semaine donc, elle dormait mal, ce qui la fatiguait et la rendait indifférente à beaucoup de choses. Elle avait vu ses amis partir à une réunion dangereuse à laquelle, elle devait bien se l'avouer, elle aurait finalement bien assisté. Mais ça ne l'intéressait plus. Michael l'agaçait avec sa Ginny, qu'elle trouvait bien froide, et Mandy l'exaspérait à se lamenter quand elle voyait le couple. Derek passait beaucoup trop de temps avec Terry, et sans être vraiment délaissée, Rose ne pouvait s'empêcher d'éprouver une pointe de jalousie. Elle trouvait que Padma commençait à se donner des grands airs avec son nouveau rôle de préfète, sans parler d'Anthony. Elle se crispa. Ah lui, qu'est-ce qu'il pouvait l'énerver en ce moment ! Monsieur je-suis-allé-à-la-réunion-et-je-sais-plus-de-choses-que-Rose !
Elle soupira. Rose savait pertinemment que sa susceptibilité du moment était due à sa fatigue et ses prises de tête personnelles, mais cela ne servait qu'à la faire enrager un peu plus. En tout cas, elle se félicitait d'être parvenue à se contenir et à ne pas s'être vengée sur un des Serdaigles, qui n'y étaient finalement pour rien dans ses tourments.
La jeune fille tourna la tête vers les rideaux. Une frimousse bronzée apparaissait, et deux yeux noirs la fixaient.
- J'aurais dû me douter que c'était toi, marmonna-t-il. J'ai jamais entendu quelqu'un soupirer autant.
Rose esquissa un sourire puis se figea.
- Je vous ai réveillés ?
- Terry s'est retourné un peu violemment et il m'a écrasé.
Le sourire de son amie apparut pleinement. Il se glissa près d'elle et la poussa pour qu'elle lui laisse de la place.
- Encore ton cauchemar ?
- Oui. Le même.
Derek se tourna sur le côté et se souleva sur un coude. Il plongea ses yeux dans ceux de Rose.
- Tu n'es coupable de rien, tu sais. À chaque fois, ce sont eux qui t'ont embrassée.
- Si j'étais une fille bien, je les aurais repoussés.
- Mais Rose…
- Quoi ?
- Tu n'es pas une fille bien !
Elle se mit à rire doucement. Rose passa son doigt sur sa cicatrice, une pensée lui venant brusquement en tête.
- Tu sais, depuis que Blaise et moi…
- Avez échangé votre salive dans les cachots, compléta-t-il, la faisant pouffer.
- Je crois que je n'ai plus vraiment peur qu'il s'approche.
- C'est une bonne nouvelle non ?
- Oui et non…
- Pourquoi ?
- Si j'avais encore peur qu'il voie ma cicatrice, ça aurait été une bonne raison pour lui parler et… comment dire…
- Choisir William ?
- C'est ça. Mais maintenant ils sont tous les deux au même plan non ?
Derek réfléchit tranquillement.
- Tu sais, je me disais… Zabini revendique votre baiser, mais William non. Ça ne t'aide pas à choisir ?
Rose ferma les yeux.
- Pas vraiment. Je ne peux pas m'empêcher de me dire que, si on parlait, William pourrait finir par… je sais, c'est prétentieux, mais peut-être qu'il finirait par me dire que je lui plais, alors…
- Alors, discute avec William. Comme ça tu seras fixée.
Son amie grogna et se blottit dans ses bras. Elle cacha sa tête contre son torse et marmonna :
- J'ose pas.
Derek éclata de rire.
- Ça c'est nul comme excuse ! Tu l'attrapes, tu le coinces dans un coin et tu lui dis « William Van Alten, es-tu oui ou non intéressé par moi ? ». C'est simple !
- Ben voyons.
- J'en étais sûr que tu me trompais une fois la nuit venue ! s'exclama soudainement une voix triomphale.
Rose et Derek se mirent à rire. Le blond écarta les rideaux d'une main et regarda Terry, assis au bord de son lit, l'index pointé vers eux.
- Avec une fille en plus ! C'est parce que c'est une Sang-Pure, c'est ça ?! déclama le brun d'une voix théâtrale.
- Mince. Je crois qu'on est découverts, minauda Rose.
- Ciel, Terry ! Je te croyais en voyage d'affaires !
- Mais je suis revenu plus tôt, et qu'est-ce que je découvre ! Une femme !
Elle éclata de rire.
- Sacrilège !
Terry sourit puis se leva et les rejoignit sur le lit. Il se pencha et embrassa les lèvres de Derek. Rose se cacha le visage et couina :
- Nannyyyy ! Derek y fait des choses bizarres avec un Monsieur étrange !
Le couple se mit à rire en chœur.
- C'est bon, vous avez fini votre comédie matinale ? grogna une voix mal réveillée.
Rose se mordit les lèvres, l'air faussement coupable.
- Je crois qu'on a réveillé Michael.
Elle s'étira, puis roula sur le côté et se leva.
- Me faites pas un petit dans le dos hein !
- Y'a pas de risque, rit Terry.
Elle traversa la chambre et ouvrit les rideaux de Michael.
- Allez Michaelounet, boude pas !
Il hurla en voyant la lumière.
- Nooooon, pas la lumière du jour ! je vais mouriiiir ! à l'assassin !
- Bonjour Dracula ! Bien dormi ?
- Jusqu'à ce que j'entende trois givrés brailler, oui.
Rose se laissa tomber lourdement sur le matelas.
- C'est pas bon de trop dormir. C'est pour toi qu'on fait ça, tu sais.
Son ami lui fit une moue peu convaincue.
- C'est encore toi qui as réveillé tout le monde, je suppose ?
- Affirmatif.
- Va leur parler.
- Ah, tu vas pas t'y mettre !
Il leva les mains en signe de capitulation.
- D'accord, d'accord. Si on allait manger plutôt ?
- Tu m'intéresses.
- Tu es trop prévisible.
Elle sourit et se leva.
- Aha, on savait que vous étiez là ! clama la voix enjouée de Mandy.
Padma et elle venaient de faire leur apparition dans la chambre.
- Michael vient de proposer d'aller manger, indiqua Rose.
- Vous savez qu'il n'est que sept heures ? leur apprit Anthony qui venait d'ouvrir ses rideaux.
- Et ?
- Et qu'est-ce qu'on attend, j'ai faim moi ! geint Derek.
Lisa sourit à son petit ami et se leva à son tour.
- On pourrait peut-être aller s'habiller avant non ?
- Naaan, allez-y en pyjama les filles ! Pour une fois, on se fera remarquer, lança Michael.
- Ben tiens, quelle bonne idée. Et vous, vous y allez en caleçon ? rétorqua Padma.
- Ah non ! contra Terry.
Il jeta à un coup d'œil à Derek, l'air effrayé à cette perspective.
- Terry a raison. On ne sera pas de taille à lutter contre les groupies du Quidditch. On est trop faibles.
Mandy éclata de rire. Les filles retournèrent à leur dortoir pour s'habiller et se préparer. La blonde jeta un regard en biais à Rose.
- Pitié Mandy, arrête de me poser cette question. Je ne me suis pas encore décidée à leur parler.
Son amie soupira puis peigna ses cheveux coupés au carré.
- Un jour, peut-être, supposa Padma en souriant.
Rose gonfla les joues et démêla ses boucles avec ses doigts. Elle enfila ses chaussettes et se frotta les bras une fois son pull mis.
- J'ai déjà froid, marmonna-t-elle. Heureusement qu'on est samedi, je peux mettre un pantalon.
- Fais comme moi, lança Mandy. Mange, t'auras chaud !
Lisa éclata de rire.
- Mais elle mange. C'est le pire.
Padma haussa les épaules.
- Elle est faite pour être toute mince, qu'est-ce que tu veux. C'est comme ça.
- Et je grossis, rappela l'intéressée. C'est long, mais je prends du poids depuis la rentrée.
- C'est vrai, admit Lisa. Tu as meilleure mine que l'an dernier, c'est sûr.
Rose sourit et s'enroula dans sa cape d'hiver.
- On va juste dans la Grande Salle, tu sais ? rappela Mandy.
- Je sais. Mais j'ai trop froid.
- Vous êtes prêtes ?
Elles rejoignirent les garçons dans la salle commune.
- Qui les a laissées partir pour s'habiller ? grognait Derek, les bras croisés.
Mandy lui tira la langue, puis ils sortirent les uns après les autres pour descendre de leur tour. Dans la Grande Salle, il n'y avait presque personne, mais les tables étaient prêtes pour le petit déjeuner. Ils prirent place et entamèrent leur repas.
- T'enlèves pas ta cape ? demanda Michael à Rose.
Elle secoua la tête.
- Elle a trop froid, lui apprit Padma.
- Un gros glaçon grognon, chantonna subitement Mandy. Grelotte dans l'igloo…
- Screugneugneu, gronde-t-il… continua Lisa. Soit je gèle, soit je fonds.
Anthony lui lança un regard incrédule.
- C'est agaçant, c'est agaçant, reprit Terry, la tête dodelinant comme celle d'un enfant.
- C'est agaçant d'être un glaçon, poursuivit Lisa.
- Un gros glaçon grognon grelotte dans l'igloo ! acheva Mandy.
Les trois Serdaigles éclatèrent de rire. Rose avait les yeux grands ouverts, puis elle se mit à rire.
- C'est très mignon. Vous avez appris ça à l'école Moldue ?
- Oui, confirma Lisa. Apparemment, on avait le même genre d'instituteur !
Terry lui sourit et lança un regard à Derek qui le regardait fixement depuis qu'il avait commencé à chanter. Le brun roucoula :
- Je t'en chanterai une ce soir si tu veux. Rien que pour toi.
Les filles éclatèrent de rire.
- Faut voir, badina Derek. Ça dépend ce que ça raconte.
- On ne veut pas savoir ! s'exclama Michael, faisant de nouveau rire les autres.
- Y'a pas de confiture de fraises ? s'étonna soudainement Rose, regardant la table.
- Catastrophe, railla Anthony en souriant.
- Non, mais… y'a pas de confiture de fraises !
- Tu as envie de fraises, Rose ? lança Padma, les yeux pétillants.
- Tu es enceinte peut-être ? continua Mandy.
- Nan. Pas à ma connaissance. Mais moi je voulais de la confiture de fraises.
Elle fronça le nez. Lisa leva les yeux au ciel devant son caprice.
- Tss, tss. Tout se dégrade. On va en parler à Dumbledore si tu veux, proposa Michael, un sourire moqueur aux lèvres.
- Tiens, fit Terry. De la marmelade de citron. C'est bon.
Il lui tendit le pot que la jeune fille en soupirant. Anthony la regarda ouvrir le pot et étaler avec méfiance la gelée sur un toast. Puis il leva la tête, attiré par un bruit.
- Tiens. Voilà les Serpentards.
Rose se figea, sa tartine dans la bouche.
- Ce sont les cinquièmes, précisa le préfet en la regardant. Au grand complet, comme nous.
- Chilenche, maugréa-t-elle, la bouche pleine.
Terry sourit.
- Ils se sont assis, reporta le brun. Et Zabini est toujours à la même place.
Il baissa le nez vers sa tasse.
- Oups. Il m'a vu.
- Aussi, arrête de les mater comme ça, râla Mandy.
- Je crois qu'il est perturbé que tu aies changé de place, tu sais, lança Lisa. Il ne peut plus croiser ton regard.
Rose haussa les épaules, jouant les indifférentes.
- Et en Botanique alors ? demanda Terry. Tu ne peux pas l'éviter.
- Je joue les fatiguées. Comme il n'est pas agaçant, il me fiche la paix.
- Tu ne pourras pas être fatiguée et à moitié malade toute l'année, rappela Lisa. Déjà que tu as repoussé votre rendez-vous…
- Je sais, grommela Rose. Et pour le rendez-vous, Madame Chourave m'a donné une très bonne excuse en décalant la date butoir pour notre devoir.
Elle attrapa sa tasse de thé et la sirota tranquillement. Derek voulut changer de sujet et lança :
- C'est à quelle heure l'entrainement déjà ?
- Quatorze heures non ? répliqua Michael. On ira demander à Roger.
- Si vous le trouvez.
- Il sera certainement à la Bibliothèque, avança Terry.
Anthony rassembla ses couverts.
- Moi, j'y vais à la Bibliothèque justement. Vous n'aurez qu'à m'accompagner.
- Bibliothèque. Oh bon sang.
- Quoi ?
- Demain. C'est demain mon rendez-vous avec Blaise pour qu'on fasse nos devoirs. J'avais pas réalisé la date, expliqua-t-elle à Lisa qui la regardait.
- Y'a pas de raison que ça se passe mal, fit Terry avec un sourire engageant.
- C'est vrai. Tu n'es pas non plus obligée de décider dans les vingt-quatre heures si tu préfères rester avec lui ou avec William, nota Padma.
Derek hocha la tête, convaincu. Rose soupira puis se leva, imités par les autres. Après un crochet par leur Salle Commune pour se brosser les dents et prendre leurs affaires, ils passèrent la matinée à la Bibliothèque.
Ils déjeunèrent rapidement et se séparèrent. Les joueurs de Quidditch partaient à leur entrainement, Anthony et Lisa retournèrent à la Bibliothèque et Padma rejoignit sa sœur. Terry, Mandy et Rose décidèrent de rester dans la Salle Commune. Rose se pelotonna dans son fauteuil avec un roman tandis que Terry et Mandy écrivaient des lettres pour leurs familles.
Après un chapitre ou deux, les yeux de Rose se fermaient régulièrement. Au début, elle essaya de lutter, mais la fatigue l'emporta vite. Elle pencha la tête contre le dossier et posa son livre sur ses genoux.
Une silhouette, debout face à elle, quelque part. Tout était trouble. Du brouillard. Rose s'approcha. La silhouette se précisa. C'était une femme au regard profond. Elle sentit le vent souffler autour d'elle. Les cheveux de la femme voletèrent, faisant de petites vagues. Elle avait un air si sévère… Rose la vit incliner la tête sur le côté, puis sourire.
- Qui êtes-vous ? murmura Rose.
Ses mots semblèrent s'envoler vers nulle part.
Le sourire de l'inconnue s'accentua, mais elle ne répondit pas. Attirée par un éclat, Rose baissa les yeux et vit un médaillon d'or briller à son cou. Elle plissa les yeux. Elle reconnut la forme d'un animal, un oiseau peut-être.
Elle releva de nouveau la tête et fixa l'inconnue une nouvelle fois. Osant lui sourire, elle se rendit compte qu'elles se ressemblaient, un peu. Rose ne sut pas si c'était elle… plus tard… ou quelqu'un du passé…
Tout se brouilla.
Le livre de Rose glissa et tomba au sol avec un bruit sourd. Elle se redressa d'un bond, ouvrant des yeux ensommeillés. Mandy releva la tête et sourit.
- Bien dormi ?
- J'ai fait un rêve étrange…
- Pas de cauchemar ?
- Non. Un rêve apaisant.
Rose sourit. Et, pour la première fois en une longue semaine, elle parut sereine aux yeux de ses amis, malgré les cernes qui s'étalaient sous ses yeux.
Elle ferma les paupières. Elle se sentait bien. Comme si elle s'était transformée en panthère quelques instants. Ses soucis n'étaient pas réglés, loin de là, mais ils lui semblaient tout d'un coup moins graves que ce qu'elle s'imaginait d'habitude. S'étirant, la jeune fille se leva et ramassa son livre, pour le continuer sans se rendormir.
Il commençait à se faire tard quand l'équipe rentra enfin de l'entrainement. Ils partirent se changer rapidement, puis tous se hâtèrent vers la Grande Salle, de peur de rater le diner. Michael et Derek semblaient mourir de faim et se jetèrent sur tout ce qui leur tombait sous la main. Rose ne put ignorer les regards insistants de William sur elle. À chaque fois qu'elle levait la tête, il la regardait, semblant toujours sur le point de dire quelque chose, mais ne prenant jamais la parole. Peut-être n'osait-il pas parler devant tout le monde ? Rose le regarda en coin, et il persistait dans son manège. C'était compliqué de l'ignorer.
Finalement, les sixièmes quittèrent la table avant les cinquièmes, sans que William n'ait rien dit. Rose était perplexe et le regarda sortir. Derek finit par se pencher vers elle :
- Il t'en veut, révéla-t-il.
- Hein ? pourquoi ?
Ça y était, ses pires peurs étaient confirmées. Elle allait devoir choisir tout de suite. Et elle n'était pas prête.
- Parce que tu n'es pas venue à l'entrainement, fit Michael. Et la dernière fois, tu avais promis que tu serais là au prochain.
- Oh… j'avais oublié…
- Il ne l'a pas dit sur un ton sérieux, dit Derek pour la rassurer.
Mais les regards insistants alors ? pensa Rose, ajoutant un souci de plus à sa liste.
- Je lui en parlerai…
- Oui ? encouragea Mandy.
- Un jour, conclut-elle en lui tirant la langue de façon enfantine.
Son amie soupira sans pouvoir s'empêcher de sourire.
Dimanche matin, elle se réveilla de nouveau au sol, après avoir fait son terrible cauchemar pour la huitième fois. Cette fois-ci, les élèves-Mangemorts l'avaient capturée et enchainée en haut de la tour d'Astronomie. L'orage tonnait, des éclairs zébraient le ciel et ils l'entouraient tous, hurlant en chœur d'une voix stridente :
- Tu dois mourir ! Tu es coupable ! Coupable d'être une traitresse à ton sang ! Tu dois mourir !
Cette fois-ci, elle resta panthère plus longtemps que d'ordinaire, remontant sur son lit sous le regard inquiet de Lisa. Cette dernière vit l'animal se rouler en boule sur le matelas aux draps griffés, les yeux hagards. Elle se leva finalement et la rejoignit, se blottissant contre la bête pour la rassurer. Elle passa ses doigts dans le pelage noir, pour l'apaiser, encore et encore. La panthère finit par fermer les yeux et se détendre peu à peu. Mandy et Padma apparurent au bout du lit et lancèrent des regards interrogatifs à Lisa.
- Le cauchemar, résuma-t-elle.
Les deux filles s'installèrent à leur tour sur le lit et entourèrent l'animal, qui ronronna doucement pour les remercier.
Peu à peu, elles se mirent à discuter, la panthère les écouta tranquillement. Elles finirent par se lever et aller à la salle des bains. Rose reprit forme humaine et partit s'habiller à son tour, enlaçant Lisa pour la remercier. Elles descendirent dans la Salle Commue, où une dizaine de Serdaigles travaillaient déjà. Elles s'installèrent sur les fauteuils et attendirent les garçons pour aller prendre leur petit déjeuner, comme d'habitude. C'est au bout d'un gros quart d'heure qu'ils firent leur apparition, décoiffés et mal réveillés. Les filles se levèrent d'un bond et se ruèrent sur Terry qui n'eut pas le temps de protester.
- JOYEUX ANNIVERSAIRE ! crièrent-elles en chœur, oubliant d'être discrètes.
- Merci, merci, répondit-il tant bien que mal, à moitié étouffé.
Elles s'écartèrent pour le laisser reprendre son souffle. Il esquissa un petit sourire.
- J'en ai des fans !
Il les regarda à tour de rôle, et devant leurs petites mines innocentes, il se renfrogna et marmonna :
- Qu'est-ce que vous me cachez, vous ?
Padma sifflota, Mandy regarda ailleurs, Lisa alla embrasser Anthony et Rose farfouilla dans ses poches, marmonnant :
- Par Merlin, j'ai oublié ma baguette… c'est bête.
- Les filles ? relança Terry.
Rose releva la tête.
- On sait que tu avais dit non.
- Mais on n'a pas pu résister, tu sais, continua Lisa.
- Et puis c'était tellement mignon ! s'exclama Mandy.
- Et tu y as droit toi aussi, justifia Padma.
- Oh non ! Vous n'avez pas fait ça ?!
Elles hochèrent la tête en chœur, ravie.
- Rose ?
Les trois Serdaigles se tournèrent vers leur amie, qui sortit sa baguette.
- Accio cadeau !
Comme Anthony fronçait les sourcils, Lisa expliqua :
- Sinon ce n'était pas discret.
Un paquet déboula de la chambre des filles en lévitant et traversa la Salle Commune, flottant par-dessus les quelques élèves présents. Une petite boule crème se trouvait sur le dessus et paraissait follement s'amuser.
- Kietel est du voyage, nota Mandy.
- Tiens.
Le paquet, à la forme reconnaissable, s'arrêta et tomba dans les mains de Lisa en douceur. Rose récupéra le petit Boursouf qui couinait de contentement.
- Salut, petite chose ! Ouvre Terry, ouvre !
Il soupira.
- Vous êtes cinglées.
- Oui ! lança Mandy, ravie.
Lisa posa le cadeau sur la table et le brun défit le papier qui dissimulait une cage. Les Serdaigles purent admirer une petite chouette multicolore qui dormait, la tête sous l'aile.
- C'est une chouette hulotte ! dit Padma.
- Tu as vu, elle a les mêmes couleurs de cheveux que nous ! souligna Lisa.
Terry se mit à rire.
- Merci. Il ne fallait pas. Merci.
Il embrassa chacune des filles tour à tour, puis secoua de nouveau la tête.
- Elle est super mignonne, lâcha-t-il finalement, sous le charme, faisant rire les autres.
Le petit rapace se réveilla lentement au bruit que faisaient les humains. Ses yeux s'ouvrirent en grand et se posèrent sur Terry. L'animal hulula doucement et s'ébroua. Le Serdaigle ouvrit la porte de la cage et passa sa main, la présentant à plat.
- Salut. Je m'appelle Terry.
Nouveau hululement.
- Elle est adorable, murmura Mandy.
Les Serdaigles s'étaient regroupés autour de l'animal qui les regardait avec curiosité. Michael les tira de leur rêverie en indiquant qu'ils devraient aller l'amener à la volière et aller prendre leur petit-déjeuner.
Padma protesta énergiquement.
- Oh, on pourrait la laisser ici ! Si on la mettait dans notre dortoir avec Kietel et Duke ? proposa-t-elle à Terry.
Il fut ravi que sa chouette n'aille pas seule à la volière dès maintenant. Lisa se chargea donc de l'y amener, Kietel posé sur son épaule.
Elle revint et annonça que leurs trois locataires semblaient déjà s'entendre. Ils descendirent – enfin ! dit Michael – pour prendre leur petit déjeuner.
La journée s'étirait sans encombre, et les cinquièmes années prirent leur temps pour tout. Ils profitèrent de leur dimanche tranquille pour s'amuser avec les trois animaux, qui avaient été exemplaires durant leurs absences.
Finalement, après le déjeuner, pendant lequel Terry s'était extasié sur les chouettes hulottes grâce aux livres prêtés par Lisa et avait attendri tout le monde, Rose chargea son sac sur son épaule et traversa les couloirs sans se presser. Une fois la Bibliothèque en vue, elle inspira un grand coup, replaça une mèche de cheveux derrière son oreille, et entra dans la grande pièce. Elle fit un sourire à Madame Pince, puis chercha du regard parmi les allées. Elle repéra une table un peu à l'écart, près d'une fenêtre, encore inoccupée. Elle posa son sac dessus, puis se pencha pour en sortir ses affaires.
- Bonjour, Rose.
Elle sourit et se retourna.
- Bonjour Blaise. Ça va ?
Il opina et s'installa à son tour. Elle s'assit tranquillement et approcha ses parchemins d'elle.
- Bien passé ton samedi ?
- Oui. J'ai eu un entrainement de Quidditch.
Elle sourit.
- Alors ?
- J'aurais très bien pu être Batteur principal, bougonna-t-il. Je ne suis pas plus mauvais que Vincent ou Grégory.
- Quel dommage. Enfin, ça t'évitera d'abîmer ton joli visage, taquina-t-elle.
Il se rapprocha d'elle.
- Mon quoi ?
- Ton joli visage ? répéta-t-elle, incertaine.
Il eut un sourire en coin tout à fait charmant. Sans prévenir, Blaise redressa un parchemin pour cacher leurs visages, puis s'approcha encore plus près d'elle.
- Pas ici, souffla Rose.
Hypnotisée par son regard sombre, elle mourrait d'envie de s'avancer, mais son esprit Serdaigle hurlait « pas dans la Bibliothèque ! C'est sacrilège ! ». Alors elle recula un peu, ouvrant grand ses yeux. Blaise eut une expression déçue mais n'insista pas. Il reprit sa place et posa la feuille. Il poussa son devoir vers Rose.
- Tiens, c'est le dessin que j'ai fait.
- Merci.
Rose se pencha sur les feuilles et compara les deux dessins. Elle fit une moue.
- Je crois que je devrais tout recommencer…
- Sans te vexer, c'est la meilleure chose à faire, chuchota Blaise en souriant.
Elle sourit à son tour et froissa son parchemin, puis en prit un nouveau.
- Tu ne fais pas d'autres devoirs en attendant ? s'étonna-t-elle en voyant qu'il ne bougeait pas.
- Si, si… Pardon, tu m'absorbais.
Les joues de Rose se colorèrent. Il se décida enfin et sortit son manuel de Potions.
- La dissert' sur le Philtre de Paix ?
Il confirma et étala quelques notes devant lui.
- Je pourrai t'aider après, si tu veux.
- Tu l'as déjà faite ?
- Seulement le brouillon, mais je pense que c'est plutôt bon. Derek m'a aidée, avoua-t-elle avec un demi-sourire.
- Merci alors.
Elle hocha la tête puis se plongea dans le recopiage intensif des schémas de Blaise. Ce dernier la laissa travailler en paix pendant quelques minutes, puis sembla se lasser des Potions. Il délaissa sa plume, et, le regard toujours concentré sur son livre ouvert à plat sur la table, sa main alla chercher celle de Rose. Il pressa ses doigts contre les siens.
- Qu'est-ce qu'il y a ? souffla-t-elle.
- T'es belle, fit-il en le regardant à présent.
Le rouge sur ses joues fut plus soutenu qu'auparavant.
- Me déconcentre pas, murmura-t-elle.
Il sourit et laissa ses doigts caresser distraitement la main de Rose. Il avait reporté son attention sur son livre. Son pouce passait lentement à l'intérieur de son poignet. Rose se mordait les joues pour rester concentrée sur son schéma. Blaise fit remonter sa main sur son bras, dessinant des arabesques sur sa peau.
- Arrête ! chuchota-t-elle.
Blaise sourit encore de la voir troublée, et pas découragé, continua ses caresses, remontant sur son bras, touchant son épaule, frôlant sa nuque… Partagée entre l'envie qu'il cesse et celle qu'il ne s'arrête jamais, elle se tortilla, puis réussit à lui lancer un regard perçant.
- Fais tes devoirs !
- Tu m'avais promis un rendez-vous, répliqua-t-il de sa voix profonde.
Elle haussa un sourcil et prit un air aussi outré qu'elle le pouvait à cet instant.
- Non… tu m'a donné le choix entre ça et étudier… Et on dirait que j'ai choisi.
Pour la première fois, il parut vraiment touché par son rejet. Sa main quitta Rose et il croisa les bras, regardant au loin.
Au bout de quelques minutes, elle le regarda de nouveau et vit qu'il n'avait pas bougé. Elle leva les yeux au ciel.
- Arrête de bouder ! Je voudrais seulement finir ce schéma.
Il ne se dérida pas. Rose se mordit la lèvre. Elle l'avait vraiment vexé.
- Blaise ?
En l'absence de réaction, elle soupira et finit par poser sa plume, incapable de continuer. Elle adopta la même position que lui et regarda dans la même direction.
- Tu regardes quoi ? demanda-t-elle.
- Toi.
Elle tourna la tête et le vit, à quelques centimètres d'elle. Elle sourit doucement.
- Tu as fini de bouder ?
Trop rapidement pour qu'elle ait le temps de réagir, il décroisa ses bras, leva son livre de Potions à hauteur de leurs visages et attira d'une main Rose vers lui, pour capturer ses lèvres. Il s'attendait à ce qu'elle résiste et y mit plus de force que nécessaire. Le choc fut violent, et après avoir marmonné un « désolé », il reprit ses lèvres et l'embrassa.
Les doigts de Rose glissèrent le long de la mâchoire de Blaise et elle entrouvrit la bouche, montrant qu'elle lui pardonnait. Elle attrapa à son tour le livre de Potions, pour mieux les cacher des autres.
Ils se contentaient de s'embrasser, lèvres contre lèvres, sans bruit. Les doigts de Rose s'accrochèrent au col du pull de Blaise. Ses ongles effleurèrent la peau de son cou. Blaise avait encore glissé sa main dans les cheveux de Rose.
Au moment où elle le rapprocha d'elle, où elle allait glisser sa langue contre la sienne, quelqu'un fit tomber un livre et ils sursautèrent si violemment que Rose mordit malencontreusement la lèvre de Blaise.
Il recula, les yeux grands ouverts de surprise, touchant sa lèvre. Rose lâcha le livre qui tomba sur la table. Elle se couvrit la bouche d'une main.
- Par Circée ! Je suis désolée !
- Ce n'est pas grave, rassura-t-il. Je n'ai pas eu le temps d'avoir mal.
La Serdaigle se mordilla les lèvres. Il lui sourit et se racla la gorge.
- Bon alors, tu le finis, ce schéma ?
Rose lui lança un regard accusateur.
- La faute à qui si on n'avance pas ?
- On était deux derrière le livre, rappela Blaise.
- Je t'avais demandé de ne pas me déconcentrer, pourtant.
- Ce n'est pas ma faute si tu ne peux pas te concentrer quand je suis à côté de toi.
- Et ce n'est pas ma faute si tu as décidé de nous faire tomber dans la luxure, se défendit-elle.
- Si, ça, c'est entièrement ta faute.
Elle sourit. Se penchant sur le parchemin, elle décida d'abandonner la lutte. Blaise s'appuya sur un coude et la regarda faire. La Serdaigle n'avait plus qu'à copier la légende et elle aurait terminé. Elle sentit sa main s'approcher d'elle. Blaise enroula sa tresse autour de ses doigts, touchant délicatement son dos au passage. Il abandonna vite les cheveux pour passer, encore, son pouce contre la peau de sa nuque. Le bout de ses doigts passait délicatement, sans en avoir l'air, sous le col de son pull, et reculait aussitôt. La main gauche de Rose, posée sur sa cuisse, se contractait régulièrement. Elle se retenait d'aller se coller à Blaise. Elle n'était même plus sûre de copier sa légende correctement. Comme elle poussait un énième soupir, il se rapprocha d'elle.
- Tu es belle quand tu es concentrée.
Elle rougit et fit mine de l'ignorer, ce dont il avait horreur. Un dernier mot sur le parchemin…
- J'ai terminé, annonça-t-elle.
Il retira sa main de sa nuque, elle respira plus calmement.
- Chouette.
Rose laissa échapper un rire qui lui attira un regard courroucé d'un préfet-en-chef.
- Je vais t'aider à ranger.
Elle pouffa encore, rassemblant ses affaires. Blaise la devança et sortit le premier de la Bibliothèque.
- Tu es si pressé, nota-t-elle. Pourquoi ?
- J'ai envie de passer du temps seul avec toi. Ailleurs qu'à la Bibliothèque.
Elle sourit et se mit en route.
- C'est demandé étrangement, mais je veux bien qu'on reste ensemble aujourd'hui.
Il eut un sourire satisfait qu'elle ne vit pas. Il la rattrapa rapidement.
- On va dans « notre » salle ? demanda-t-il.
- Tu n'as pas faim ? Moi oui.
- Il n'y a rien à manger à la Grande Salle à cette heure.
- À la Grande Salle, non. Dans les cuisines, oui.
- Tu sais comment y aller ? demanda-t-il, étonné.
- Oui monsieur.
Rose lui fit un sourire mystérieux et mena leurs pas, tournant et virant sans hésitation. Blaisa la suivait sagement en bavardant avec elle. Il commença à tourner à un mauvais angle.
- Hé, où tu vas ? C'est par là.
Elle l'attrapa par le bras pour qu'il la suive. Blaise inversa la situation et enroula sa main autour de celle de Rose. Elle lui lança un coup d'œil mais ne fit aucun commentaire.
Arrivés dans le bon couloir, elle s'arrêta en plein milieu.
- Tu es perdue ?
- Non. Mais j'ai fait une promesse, répliqua-t-elle. Tu dois fermer les yeux.
Il la regarda intensément puis finit par obéir. Elle le guida en le tenant toujours par la main et en murmurant des instructions.
Enfin, elle se planta devant le tableau représentant une coupe de fruits, chatouilla la poire qui se tortilla et se transforma en poignée. Rose ouvrit la porte et descendit quelques marches, entrainant Blaise avec elle. Elle ferma soigneusement la porte derrière eux.
- C'est bon ? s'enquit-il.
- Presque, souffla-t-elle.
Elle se redressa autant qu'elle le pouvait, sur la pointe des pieds, et posa brièvement ses lèvres sur celles de Blaise.
- C'est bon, dit-elle en s'éloignant.
Il réprima un sourire et ouvrit ses yeux noirs. Elle lui souriait, un peu timidement.
Ils se tournèrent vers les cuisines. Des elfes de maison accouraient déjà et les entourèrent. Le Serpentard ouvrit des yeux étonnés et laissa Rose diriger les opérations.
- Bonjour. Vous pouvez nous apporter euh… tu veux quoi ? interrogea-t-elle en se tournant vers Blaise.
- Je mangerais bien des lasagnes… décida-t-il subitement.
- Parfait Mister !
Et un escadron d'elfes disparut.
- Des gaufres pour moi.
Une créature s'inclina et disparut.
- Des lasagnes ?! fit-elle avec un sourire amusé.
- Je n'ai pas beaucoup mangé ce midi.
Elle sourit encore plus et s'assit sur les marches. Il l'imita et des elfes les encerclèrent en protestant que le sol n'était pas assez propre pour qu'ils s'y installent. Rose les envoya promener et se tourna vers Blaise.
- Pourquoi ?
- Pourquoi quoi ?
- Pourquoi tu n'as pas mangé ?
- Parce que je n'avais pas très faim, expliqua-t-il simplement.
Rose pencha la tête sur le côté. Leurs plats arrivèrent. Des elfes installèrent des serviettes et une petite table à côté d'eux, malgré leurs protestations. Blaise attrapa sa fourchette et lança :
- C'est la première fois qu'on mange ensemble.
Rose leva les yeux en l'air pour réfléchir.
- C'est vrai. J'ai déjà mangé avec William, mais jamais avec toi.
Mais qu'est-ce qui te prend, espèce de marteau ?!
Blaise reposa lentement sa fourchette sans la regarder.
- Mais c'est normal, il est chez Serdaigle aussi et… tenta-t-elle de se rattraper.
Elle sentait qu'elle n'arrangeait pas la situation alors elle se tut. Mais comment oublier qu'ils l'avaient tous les deux embrassée récemment ? Elle n'arrivait pas à choisir entre eux deux, consciente que cette situation ne pourrait pas durer éternellement, elle en perdait le sommeil et évidemment, elle faisait une gaffe…
- Oublie de que je viens de dire, souffla-t-elle précipitamment.
Il contracta sa mâchoire pour toute réponse.
- Blaise, s'il te plait…
- Tu sais, n'est-ce pas ?
Déconcertée, elle demanda :
- Je sais quoi ?
- Entre ton William et moi.
Elle tiqua au mot « ton » mais ne fit pas de commentaire.
- Développe, proposa-t-elle.
Il fronça les sourcils.
- Je sais que tu lui plais. Il sait que tu me plais. L'année dernière, quand tu étais à l'infirmerie… Quand nous avons parlé de notre « guerre »… tu n'avais pas compris ?
- Honnêtement ? Non. J'avais du mal à suivre les conversations.
Elle n'osait pas le regarder. Il poussa son genou du sien.
- Maintenant que tu sais… si tu pouvais éviter de me comparer à lui en appuyant bien sur mes points faibles…
- Oublie ce que j'ai dit s'il te plait, c'est sorti tout seul.
- Retiens-toi la prochaine fois, répliqua-t-il avec acidité.
Elle fixa ses gaufres avec un intérêt tout relatif.
- Sauf si tu as déjà choisi, poursuivit Blaise.
Rose redressa la tête.
- Choisi ?
- Lui ou moi. Il faudra bien faire un choix un jour, non ? ça ne peut pas indéfiniment rester comme ça. Je suis bien conscient que lui aussi doit chercher à passer du temps avec toi.
Elle ferma les yeux. Il venait de mettre le doigt là où il ne fallait pas.
- Est-ce qu'on pourrait juste… manger sans discuter de ça ?
- On peut. Mais ça faisait un moment que je voulais te le dire.
- Depuis quand ?
- Quand on s'est embrassés en retenue, avoua-t-il.
Rose lui fit un sourire. Elle attrapa avec délicatesse une gaufre recouverte de chantilly. La jeune fille croqua prudemment dedans, essayant de rester digne. Blaise sourit et planta sa fourchette dans les lasagnes fumantes.
Ils mangèrent en silence, calmes et concentrés. Rose avala trois gaufres pendant qu'il vidait le plat de pâtes. Il s'affala finalement contre les marches et regarda la Serdaigle attaquer une quatrième pâtisserie. Sentant son regard sur elle, Rose leva les yeux. Elle lui tendit sa gaufre avec un petit sourire, toujours intimidée après leur conversation. Se redressant, il l'attrapa en lui renvoyant son sourire. Blaise mordit dedans et disparut derrière la crème fouettée. Elle l'observa, muette, la bouche presque entrouverte à force de le regarder croquer dans la gaufre. Il acheva le dessert en un temps record. Rose sourit à nouveau.
- T'as de la chantilly, là.
Elle pointa sa bouche du doigt. Il se trompa de côté, alors elle reprit :
- Non, là !
Elle avança un peu plus le doigt. Blaise ordonna :
- Montre-moi mieux. Ou fais-le, tiens.
Rose glissa sur les genoux, tendit son pouce et effleura finalement la peau de Blaise. Elle s'approcha de son corps et récupéra la crème sur son doigt. Il la regardait faire. Rose recula sa main, ne sachant plus quoi faire. Il ne lui laissa pas le temps de réfléchir et attrapa la main fine et porta le pouce à ses lèvres. Il suça rapidement le doigt de Rose, le nettoyant de la chantilly. Les yeux de Rose s'agrandirent et sa respiration se coupa. Blaise retira le pouce de Rose de sa bouche, sans lâcher sa main. Irrésistiblement attirée, elle se penchait inconsciemment vers lui.
À genoux à son tour, il tira enfin sur son bras pour la rapprocher de lui. Leurs lèvres se lièrent, Blaise serra Rose, la tenant par la taille. Elle passa ses bras autour de son cou et se colla étroitement contre lui. Il ouvrit la bouche en premier et mordilla la lèvre de Rose, pour demander accès à sa langue. Elle entrouvrit les lèvres et Blaise laissa passer sa langue pour aller chercher celle de Rose, enfin. Elles se touchèrent, se caressèrent, glissant l'une contre l'autre. La main droite de Blaise se glissait vers les fesses de Rose, l'autre autour de la taille, son pouce pressé contre le ventre de la jeune fille.
Finalement, Blaise se laissa retomber dans une position plus confortable, entrainant Rose avec lui. Il s'assit sur les marches et appuya son dos contre le mur. Elle s'installa à califourchon sur lui, ses mains dans son cou, qu'elle laissa glisser le long de son torse, ses doigts caressant le pull. Une main se glissa dans le dos de Blaise, l'autre finit par s'accrocher à son col. Ses lèvres étaient toujours accrochées aux siennes, son corps pressé contre celui de Blaise. Il enserrait son dos de la main gauche, tandis que sa main droite glissait toujours plus bas, caressant la jambe de Rose par-dessus le tissu de son jean. Quand Blaise pressa ses doigts contre l'intérieur de la cuisse fine, elle répondit en collant son bassin au sien, aussi enflammée que lui.
À bout de souffle, elle finit pas s'éloigner un peu de lui, de ses lèvres humides. Les joues rougies comme jamais il n'avait vu, la respiration haletante, ses iris verts scintillants… Blaise la trouva belle comme jamais. Il glissa sa bouche contre le cou blanc et y déposa quelques baisers humides et brulants. Rose s'assit sur les cuisses de Blaise et pencha la tête en arrière sans s'en rendre compte. Il remonta le long de sa mâchoire, puis embrassa le cou juste en-dessous de l'oreille. Il prit le lobe entre ses lèvres et entendit avec délice le léger gémissement de Rose. Il relâcha sa prise et chercha de nouveau les lèvres rougies par les baisers.
Leurs baisers se multiplièrent, leurs corps se pressaient avidement l'un contre l'autre.
Blaise finit par passer sa main sous le pull de Rose et presser ses doigts contre les côtes, protégées par un léger t-shirt. Il se retenait de le faire depuis un moment, et, impatient de sentir la peau contre lui, il froissa le tissu pour le faire remonter. Enfin, ses doigts glissèrent contre la peau mise à nu.
Rose eut une inspiration sourde et sonore, et elle mordilla les lèvres de Blaise à son tour. La main de Blaise glissa dans son dos, peau contre peau.
Le genou de Rose glissa un peu sur la petite marche, et elle ouvrit les yeux pour se stabiliser, abandonnant à regret les lèvres de Blaise. Elle ne tenta pas de reprendre son souffle, mais elle se rappela soudainement l'endroit où ils se trouvaient. Perdu, Blaise la regarda. Elle lui lança un sourire et décolla la grande main de sa peau. Sans rien dire, elle remit de l'ordre dans sa tenue, restant volontairement éloignée de Blaise.
Ce dernier sembla comprendre et jeta un petit regard autour de lui, reprenant conscience de leur environnement. Les elfes de maison semblaient hésiter entre les ignorer ou les jeter dehors. Blaise eut un sourire en coin. Il souleva Rose de ses genoux et l'aida à se relever. Ils remontèrent vite les marches. Avant de sortir, Rose se racla la gorge et marmonna :
- Merci pour tout… et désolés.
Riant, Blaisa la poussa dehors. Il referma la porte, et ils s'adossèrent au mur, encore à bout de souffle.
- Tu crois qu'ils vont nous laisser revenir ? demanda Blaise en riant.
Rose éclata de rire.
- J'en doute. On a quand même bien mangé.
Ils se regardèrent, s'esclaffant.
- Tu vois je te l'avais dit ! murmura une voix excitée, quelques mètres plus loin.
Rose releva la tête, alarmée. Elle plissa les yeux et pencha la tête sur le côté. Blaise inspira pour parler, mais elle leva une main pour le faire taire.
- T'avais raison… Zabini et l'aristo couchent toujours ensemble… chuchota une autre voix.
- Partons avant qu'ils n'arrivent.
Puis des pas s'éloignèrent. Rose bondit et courut jusqu'au coin du couloir, contourna une statue et s'arrêta. Susan Bones et Hannah Abbott. Elle aurait dû reconnaitre leurs voix.
- Rose ?
Blaise l'avait rejointe et voulait comprendre ce qui venait de se passer
- Elles étaient derrière la statue. Coïncidence ou elles nous ont suivis depuis la Bibliothèque, je ne sais pas…
- Mais qui ?
- Des Poufsouffles, gronda la jeune fille. Celles de l'an dernier.
- Qui ont lancé les rumeurs sur notre liaison ? se rappela-t-il.
- Les mêmes. Ça va être reparti pour un tour.
Elle se tourna vers lui comme il ne répondait pas. Il lui fit un sourire en coin.
- Cette rumeur ne me gêne pas, lâcha-t-il enfin.
Elle lui lança un regard mi-furieux, mi-amusé. Elle n'arrivait pas à savoir si la rumeur la faisait rire ou la mettait en colère. Blaise souligna, au moment où elle ouvrait la bouche :
- J'espère jusque que ça n'arrive pas aux oreilles d'Ombrage… elle ne m'effraie pas, mais je me méfie.
Rose hocha la tête, d'accord avec lui. Elle proposa :
- Il vaut mieux qu'on se sépare là et qu'on retourne dans nos dortoirs, non ?
Blaise fit une moue peu convaincue. Elle renchérit :
- Si on reste encore ensemble, on va finir par se pointer en même temps dans la Grande Salle. Niveau discrétion, il y a mieux non ?
Il soupira et elle sourit.
- Tu as gagné. De toute manière, nous sommes obligés de nous revoir, je n'ai pas fini la dissertation de Potions.
- On se revoit demain en Botanique, répondit-elle en souriant.
Il lui sourit en retour, puis sembla hésiter. Elle arqua un sourcil et demanda :
- Que t'arrive-t-il ?
- Je me demande s'il est raisonnable de t'embrasser, là, en plein milieu du couloir.
Il suffit à Rose qu'il prononce « embrasser » pour qu'elle soit momentanément à sa merci. Ses yeux s'ouvrirent en grand et elle ne dit rien. Blaise eut son petit sourire en coin, puis il se pencha et l'attira derrière la statue du couloir. Il emprisonna son menton et leva son visage vers lui. Il se pencha, encore et encore, puis sourit de nouveau. Rose penchait la tête en arrière par réflexe, ses yeux se fermaient à moitié. Comme Blaise s'arrêtait à mi-chemin, elle rouvrit les paupières. Elle lui lança un regard d'incompréhension totale, rougissant un peu.
- Ce ne serait peut-être pas prudent finalement, estima-t-il, se redressant quelque peu.
Rose se mit alors sur la pointe des pieds et s'appuya aux épaules de Blaise. Elle pressa ses lèvres contre les siennes, glissant une main sur sa nuque pour l'approcher d'elle. Il l'enlaça aussitôt, souriant pendant leur baiser. Il se pencha et permit à Rose de poser ses pieds au sol. Leurs lèvres entrouvertes, elle le sentait sourire contre elle et l'imita inconsciemment. Sa langue glissa vers la bouche de Blaise et chercha sa langue. Elle la caressa en douceur, puis l'abandonna. Rose mit fin à leur baiser et se détacha du corps de Blaise. Rouvrant les yeux, elle lui sourit puis murmura :
- À demain.
Il soupira et sourit, la laissant partir en premier. Rose se faufila hors de l'ombre de la statue, puis traversa couloirs et escaliers pour rejoindre sa Salle Commune, la tête ailleurs.
Elle répondit à l'énigme de l'entrée, puis retrouva ses amis qui étaient tous là. Dès qu'il la vit s'approcher, Derek se retourna sur son fauteuil et la pointa du doigt.
- AHA ! clama-t-il. Ne dis rien, je SAIS ! On sait TOUS !
Terry le regardait avec des yeux ronds, Lisa se mit à rire. Rose haussa un sourcil et se pencha vers le blond.
- Et vous savez quoi ?
- Que vous n'avez pas fait que vos devoirs, fit-il en souriant.
Rose se redressa et croisa les bras.
- Qu'est-ce qui vous fait croire ça ?
- Petit un : il est dix-huit heures, commença Terry.
- Petit deux : un Serpentard ne passe pas quatre heures de son temps à faire des devoirs, continua Lisa.
- Petit trois : t'es coiffée comme Hagrid, dit Mandy.
- Petit quatre : t'es méga débraillée, nota Michael.
- Petit cinq : si tu voyais ta tête. On dirait leur prof de divination. Complètement hallucinée, précisa Derek.
Rose les considéra à tour de rôle et finit par éclater de rire. Tout en s'affalant dans un fauteuil, elle défit la tresse dans ses cheveux et les ébouriffa. Elle raconta comment avait commencé l'après-midi et se recoiffa soigneusement en même temps. Elle passa sous silence les détails les plus privés, sans rougir une seule fois. Elle résuma brièvement que deux Poufsouffles les avaient vus. Anthony lui lança un regard sérieux.
- Ça risque de vous attirer des ennuis. Il va falloir être prudents.
- Je sais.
- Alors, alors, c'est officiel ou pas ? demanda Mandy.
Rose la regarda longuement.
- Non.
Son amie eut l'air déçu.
- On n'a pas parlé de ça. C'était juste… impulsif. Enfin, pour moi c'était ça. Je crois.
- Aïe, ponctua Lisa.
- Pourquoi ? demanda Michael.
- Pour Rose, c'était une impulsion, intervint Padma. Peut-être pas pour Zabini. Vu comme il semblait sérieux en parlant de choix… Il pourrait avoir mal interprété leur… après-midi.
Rose soupira.
- C'est ce que je me suis dit après coup. J'ai essayé d'en finir rapidement, mais enfin je…
- Difficile de résister, hein ? sourit Terry, lisant dans ses pensées.
- Si vous saviez, soupira-t-elle.
- NON ! On veut pas savoir ! s'exclama aussitôt Michael. Non merci. Ni pour Rose, ni pour Terry, ni personne.
Mandy et Padma éclatèrent de rire. Derek s'étira puis proposa qu'ils aillent diner.
Le petit groupe traversa le château, s'installa à table. Difficile pour eux d'ignorer les regards provenant de la table des Poufsouffles.
- Au moins ça n'a pas encore fait le tour de l'école, remarqua Michael en s'asseyant.
Rose reprit sa place habituelle, faisant face à Blaise, assis de l'autre côté de la salle. Il la regarda prendre place, puis lui fit un sourire en coin. Elle fit pétiller ses yeux, comme il avait l'air de tant aimer, puis s'occupa de son assiette.
Le mercredi suivant, alors qu'ils venaient de s'installer à leurs places habituelles pour le diner, quelqu'un d'autre remarqua le changement opéré entre Rose et Blaise.
- Tu t'es réconciliée avec Zabini, lança une voix en s'installant.
La jeune fille leva le nez et lança un regard autour d'elle. Leurs amis de sixième venaient d'arriver.
- Salut William. Tu disais ?
- Je disais, toi et Zabini, vous vous reparlez. Tu ne lui tournes plus le dos.
- Tu avais remarqué ça ? demanda-t-elle d'une voix plus sèche qu'elle ne l'aurait voulu.
- J'avais surtout remarqué les coups d'œil furieux qu'il me jetait.
Surprise, Rose posa ses couverts.
- Pourquoi tu ne m'en as pas parlé ?
- Parce que ça fait dix jours que tu m'évites, répliqua-t-il en souriant.
Les Serdaigles autour d'eux se figèrent, attendant la suite assez peu discrètement.
- C'est vrai, concéda Rose.
Elle était agacée qu'il lui lance ça en plein repas devant tout le monde alors elle renchérit :
- Depuis que tu m'as embrassée dans la Salle Commune, je t'évite un peu.
Ce n'était pas totalement vrai, mais bon. Elle avait un honneur à tenir.
William la fixa sans répondre. Elle poursuivit :
- Disons que c'est surtout parce que tu t'es enfui juste après, disant que tu ne voulais pas faire ça. Je ne souhaite pas être une gêne pour toi, tu comprends.
Il posa sa fourchette à son tour. Rose n'ajouta rien, attendant sa réaction – et surtout, elle ne voulait pas non plus aller trop loin dans la provocation.
- D'accord. Un partout. Nos comptes sont réglés ? demanda-t-il alors avec un calme olympien qu'elle admira.
- Presque.
Il attendit la suite.
- Reste à savoir pourquoi tu n'as pas assumé. Mais ça peut attendre, si tu préfères terminer ton repas, proposa Rose aimablement.
William hocha la tête, s'autorisant un demi sourire.
- Merci.
Rose reprit ses couverts et se servit du gratin. Elle mâchonna sans rien dire puis fit :
- Alors les cours avec Ombrage ? Comment ça se passe ?
- C'est l'horreur, dit-il avec un rire désabusé. On lit. On ne fait que lire. Les ASPIC seront catastrophiques à ce rythme-là. On aura trop de retard à rattraper l'an prochain.
Elle eut une moue compatissante. Leurs amis se détendirent en les entendant changer de conversation.
- Elle ne tolère pas la moindre contestation, renchérit Idriss. Au début, j'ai cru qu'elle allait tuer Nassim.
- Je demandais juste quand on allait commencer la partie pratique !
Michael secoua la tête en soupirant.
- Elle agit pareil avec nous. Avec tous les niveaux en fait je crois.
- C'est pour ça qu'elle est là, rappela Anthony. Pour obéir au gouvernement, qu'importent nos examens. La pratique est prohibée par eux, alors elle nous interdit d'en faire.
Il lança un regard significatif à Rose qui contracta la mâchoire.
- Et lui faire face serait inutile et dangereux, fit remarquer cette dernière.
Terry leva les mains en signe de paix.
- Ça suffit tous les deux, interrompit Derek. Laissez-nous manger tranquillement.
Devant l'air étonné des sixièmes, Lisa expliqua avec diplomatie :
- L'un est persuadé qu'il faudrait écrire une pétition et l'envoyer aux gouverneurs de l'école, l'autre est contre. Enfin, tant qu'ils se chamaillent, ils ne font pas de bêtises, conclut-elle en souriant.
Bluffés, Rose et Anthony se regardèrent rapidement, puis se mirent à rire.
- Pardonnez-nous, commença le brun.
- On vous laisse manger, finit Rose.
- Pourtant, ce n'est pas une mauvaise idée, lança Marc rêveusement. Ça pourrait être faisable. La pétition, je veux dire.
Ils se lancèrent des coups d'œil. Tous les cinquièmes furent pris d'un tel fou rire qu'ils en abandonnèrent leur repas. Michael s'étouffa avec son steak tellement il riait. Derek dut lui taper dans le dos, contrôlant son fou rire lui aussi. Lisa cacha ses yeux dans sa main et Anthony retira ses lunettes pour essuyer une larme.
- Imaginez… hoqueta Mandy… la tête de la secrétaire…
Ils repartirent de plus belle. Perdus, les quatre plus âgés les regardaient sans comprendre. Rose releva finalement la tête de ses bras où elle s'était cachée pour rire et aperçut Blaise qui les regardait. Elle lui fit un sourire plus enjoué que d'habitude, et William se retourna pour voir à qui elle souriait comme ça. Les regards des deux garçons se rencontrèrent. Rose arrêta de respirer. Ils s'affrontèrent du regard un instant, puis Blaise eut une grimace de mépris et s'intéressa à un Serpentard qui lui parlait. William revint à sa position initiale et se préoccupa de son assiette, les sourcils froncés. Il releva subitement la tête, alors que les Serdaigles le regardaient discrètement, leur fou rire passé.
- Tu sais n'est-ce pas ?
Rose haussa un sourcil.
- Je sais quoi ?
- Que Blaise est mon rival.
Décidément. Ils se sont mis d'accord ou quoi ?
- Je sais.
William hocha la tête puis s'occupa de nouveau de son assiette sans plus parler.
Idriss et Nassim divertirent la petite troupe avec leurs histoires toujours rocambolesques, puis les joueurs de Quidditch racontèrent leur entrainement de la veille. Lorsque Terry, les yeux plus brillants que d'ordinaire, demanda nonchalamment quand aurait lieu la prochaine séance, Derek regarda son assiette, un sourire aux lèvres. Les filles n'osèrent pas se regarder sous peine d'éclater de rire.
Le dessert passé, les douze Serdaigles reprirent le chemin de leur Salle Commune.
En rentrant, ils s'étalèrent sur des canapés et des fauteuils. Ils discutèrent, écoutant les sixièmes parler de la nouvelle organisation des cours après le passage des BUSE, puis diversifièrent leurs activités en jouant aux échecs, aux cartes et autres… comme souvent.
Rose lisait la Gazette du Sorcier du matin, empruntée à Anthony. Écœurée de leurs bêtises et de l'aveuglement général autour de Vous-Savez-Qui, elle posa le journal et attrapa le magazine hautement intellectuel qui trainait là : Sorcière Hebdo. Elle l'avait déjà lu, mais elle le feuilleta de nouveau, s'arrêtant sur les articles qui l'avaient intéressée.
- Alors, tu cherches des conseils sur comment faire de la fine cuisine pour votre famille avec une carotte et deux cailloux, ou sur réaliser soi-même sa robe de soirée à partir de trois rideaux de grand-mère ?
Rose leva le nez et se mit à rire, impressionnée par la justesse de ses titres parodiques.
- Non, sur comment prendre du poids en cinq jours, mais je ne trouve pas.
- Tu m'étonnes, railla William. Ce serait l'article le plus cours du monde. Solution numéro un : videz l'intégralité de vos placards de cuisine et dévorez tout. Solution numéro deux, mangez vos placards. Ou votre mari.
Elle éclata encore de rire.
- Pauvre mari.
William se racla la gorge.
- Tu veux qu'on parle ? devina son amie.
Il hocha la tête et désigna les escaliers du menton.
- D'accord.
Rose plia le magazine et l'abandonna sur une table basse. Ils quittèrent le cercle de leurs amis et gravirent les marches pour aller au dortoir. William lui désigna son lit de la main et elle s'assit directement en tailleur.
- Alors. Pourquoi ?
- Pourquoi je t'ai embrassée ou pourquoi j'ai fait comme si de rien n'était ?
- Les deux, tiens. Au moins tout sera clair.
Il s'assit sur le lit en face du sien. Posant les coudes sur ses cuisses, il croisa les doigts et fixa le bout de ses chaussures.
- Je ne sais pas pourquoi, à ce moment précis, je t'ai embrassée. Parce que j'en avais envie me semble une explication correcte et logique.
Il lui lança un bref regard. Elle ne le quittait pas des yeux.
- Et si j'en ai eu envie, c'est parce que tu me plais. Enfin, je veux dire, j'aime passer du temps avec toi, discuter, rire, tout. Même quand tu râles ou que tu fais ton aristo, j'aime ça…
Rose s'obligea à fermer la bouche. On va éviter de baver…
Il redressa encore la tête.
- Je peux pas faire plus clair que ça… tu m'attires. Alors, l'autre fois, je n'ai pas résisté, j'ai arrêté de réfléchir et…
- Et paf.
Il lui fit un sourire malgré sa gêne.
- Ensuite, je sais pas, je me suis rendu compte que je n'aurais peut-être pas dû me permettre de faire ça, sans te demander ton avis. J'avais peur que tu m'en veuilles, aussi. Alors j'ai préféré fuir, et ne pas en reparler. Ça me paraissait plus simple.
Elle hocha doctement la tête.
- C'est compréhensible.
- Et toi, Rose ? Tu en penses quoi ?
William lui lança un de ses rares regards sérieux. Elle fit une moue, puis croisa les bras.
Ce n'est vraiment pas un sujet que j'ai envie d'aborder, là. Et puis je dis quoi ? Euh, excuse-moi, mais je ne sais pas ce que je veux, tu veux bien repasser plus tard s'il te plait ?
- Rose ?
- Je sais que je te plais. J'avais compris.
Elle passa sous silence le fait qu'elle avait eu de l'aide, beaucoup d'aide, de la part de Lisa, Mandy, Terry, Padma, Derek… avant de pouvoir comprendre. Elle continua :
- Ça ne m'a pas dérangée que tu m'embrasses.
Quel euphémisme !
- Mais ça m'a vexée que tu fasses comme si rien ne s'était passé.
William hocha la tête.
- Lui aussi t'a embrassée non ?
Elle lui lança un coup d'œil perçant.
- Oui.
- C'était comment ?
Rose haussa un sourcil, perplexe. Il se reprit, confus :
- Non, non, je voulais dire, quand, comment, le contexte.
Elle lui sourit.
- Pendant une retenue.
- Oh. La fameuse, avec Rogue.
- Celle-là.
Il y eut un blanc. Rose s'agaça et lança :
- Écoute, je réponds à tes questions, alors ne fais pas la tête si la réponse ne te convient pas.
- Je ne fais pas la tête. Je cherche comment te poser la question sans te brusquer.
- Quelle question ?
Il soupira, puis sembla abandonner l'idée de la diplomatie :
- Lequel tu préfères ? de nous deux ?
Rose eut un rire léger. Elle posa son menton dans sa main, le coude appuyé sur un genou.
- La version diplomate, ça aurait été : « Penses-tu choisir l'un de nous deux un de ces jours, Rose ? ».
- Voilà. Je n'aurais pas mieux dit, approuva-t-il en se déridant. Alors, dis-moi ?
- Je ne sais pas William. Je ne sais pas.
Son ami hocha lentement la tête, résigné. Finalement, il choisit de le prendre avec humour. Il se plaça bien en face de Rose et se tint bien droit.
- Écoute. J'ai un an de plus que toi. Je suis bientôt majeur. J'ai bientôt fini mes études. Donc, dans deux ans, quand tu sortiras de l'école, j'aurais peut-être déjà un métier. Ou du moins, je serai en train de faire des études supérieures. Et comme je finirai avant toi, je pourrai t'entretenir plus tôt.
Rose fronça les sourcils, amusée par l'idée.
- Ensuite, je suis plutôt beau garçon. Je fais du sport, je ne bois pas – que de façon exceptionnelle en tout cas –, je ne fume pas. Je suis fidèle – très bon point ça. Ma mère est sympa, mon père aussi, et comme j'ai de la famille un peu partout en Europe, on peut voyager souvent avec moi.
Elle se retint de rire et affichait un large sourire.
- Je suis pas difficile à vivre, je suis un type conciliant qui n'aime pas trop les disputes. D'accord, j'ai un nom de famille lourd à porter, mais il est inoubliable ! Ah, et je suis ouvert à l'idée d'avoir des enfants, si ma moitié en veut aussi – mais pas plus de douze, hein !
Rose éclata de rire.
- J'aime bien faire des cadeaux et j'ai plutôt bon goût. J'aime le cinéma, les musées – pas trop longs, le sport bien sûr, les voyages, heureusement pour moi, et la bonne cuisine. Je suis super drôle, on ne s'ennuie jamais avec moi. Je ne suis pas allergique aux félins, tu noteras ce léger détail, s'il t'intéresse. J'aime bien les petits animaux poilus et blancs aussi. Pourquoi je dis ça moi ? se demanda-t-il en aparté, récoltant un nouveau rire de Rose.
Il s'interrompit pour lui lancer un petit sourire charmeur.
- Et super point bonus, il parait que j'embrasse bien.
Il la regarda droit dans les yeux.
- Franchement, si avec ça, je t'ai pas convaincue…
Pour toute réponse, un rire s'échappa de la gorge de Rose.
- Tu as de bons arguments. Surtout par rapport aux animaux.
- Tu vas étudier ma candidature ?
- Promis, rit-elle encore.
Redevenant sérieux, il ajouta :
- Je ne veux pas te mettre la pression. Mais c'est vrai qu'il faudra choisir un jour, moi, lui ou personne. Tu ne pourras pas avoir les deux en même temps, on prendrait trop de place.
- Je n'en doute pas. Tu me donnes du temps pour réfléchir alors ?
- Oui. Mais pas trop non plus.
- On peut quand même rester amis pendant ce temps ?
- Tout à fait.
- Alors je vais étudier ça de près. Merci.
- À ton service.
Rose se leva finalement et fit quelques pas vers la sortie.
- Rose ?
Elle se retourna et haussa un sourcil, geste dont il ne se lassait pas.
- Il faudrait que lui et moi, on soit sur un pied d'égalité, tu ne penses pas ?
Son sourcil se leva un peu plus.
- Est-ce qu'il a revu ton Animagus ? demanda-t-il, soudainement très sérieux.
- Non.
Il parut rassuré. Rose ne s'attendait pas vraiment à cette question et elle était désemparée. William plissa les yeux et lâcha :
- Tu pensais que j'allais te demander quoi ?
Elle haussa les épaules.
- Aucune importance. À plus, William.
Elle repartit vers la porte du dortoir.
- Combien de fois il t'a embrassée ? lança-t-il brutalement.
Son amie se figea. Soupirant, elle leva la tête et regarda le plafond, toujours dos à lui.
- Quelle importance ?
- Eh bien, pour qu'on soit à égalité.
Rose avala sa salive, commençant inconsciemment à compter.
L'an dernier… la retenue… la Bibliothèque… les cuisines… le couloir… je dois compter les baisers d'adieu aussi ? Ceux après l'Astronomie ? après la retenue ?
ABRUTIE ! Ne fais pas ça.
Elle secoua la tête pour calmer ses pensées.
- Pourquoi tu ne réponds pas, Rose ?
William avait eu le temps de se lever et de la rejoindre le temps qu'elle compte. Elle baissa les yeux, le sentant à quelques pas derrière elle.
- Il a tant d'avance que ça ?
- Je ne pense pas que ce soit important.
- Je n'ai pas précisé dans mon CV, mais je suis quand même un peu jaloux aussi. Enfin, peut-être que ce n'est qu'en ce qui te concerne. Alors j'aimerais bien savoir. Sinon je ne vais penser qu'à ça.
Sa franchise avait le don d'épater Rose. Elle déglutit et ferma les yeux.
- Plusieurs fois. Voilà.
- Plusieurs fois ? Genre deux ? trois ? plus ?
Elle haussa les épaules. William la contourna et se planta face à elle. Son air si sérieux, son regard presque blessé qu'elle ne réponde pas faillirent la faire flancher.
- J'ai envie de t'embrasser, lâcha-t-il d'un coup.
Décidément, son honnêteté était à peine croyable. Rose le regarda d'un air incrédule.
- Tu as le don de me sortir de ces phrases, toi…
- C'est ce que je pense.
- Si c'est juste pour essayer de concurrencer Blaise, ce n'est pas la peine de faire ça, répliqua Rose froidement.
- C'est peut-être un peu pour ça. Pour que tu nous compares. Et aussi parce que j'ai envie.
William lui fit un grand sourire innocent.
- Tu veux bien que je t'embrasse s'il te plait Rose ?
Elle soupira.
Dis non. Dis non, ce serait stupide de dire oui. C'est déjà suffisamment compliqué comme ça, pas besoin de se lancer dans une compétition de baisers…
- D'accord, d'accord. Mais arrête ce numéro.
Bon. Elle n'avait pas dit « oui » directement.
Il lui fit un sourire rayonnant qui lui réchauffa le cœur. William caressa doucement sa joue, puis glissa sa main dans la nuque de Rose. Il approcha leurs visages et posa ses lèvres sur les siennes. Elle glissa ses mains sur les épaules musclées, William l'enlaça de son bras gauche, la serrant un peu contre lui. Bientôt Rose enserra sa nuque à son tour et il entrouvrit la bouche, mêlant leurs souffles. La poitrine de Rose, collée au torse de William, se soulevait au rythme de ses respirations. La langue de William s'insinua entre leurs lèvres et attira celle de Rose contre elle. Elle la caressa doucement, se liant à elle avec langueur. Puis elle disparut. William embrassa les lèvres de Rose une fois, puis deux, avec une douceur infinie. Et il s'écarta d'elle, relâchant leur étreinte.
Abasourdie par la délicatesse du baiser, Rose mit une seconde de plus que lui pour ouvrir les yeux. Ses pupilles dilatées se resserrèrent et elle vit vraiment William face à elle. Les yeux bleus se plongèrent dans les verts et il eut un petit sourire.
- Chut, dit précipitamment Rose en posant un doigt sur les lèvres de son ami. Ne dis rien.
Il hocha la tête comme un enfant sage. Elle eut à nouveau envie de ses lèvres contre les siennes.
- Je vais descendre maintenant. Bonne nuit, William.
Elle lui fit un dernier sourire et se glissa hors de la pièce, les jambes cotonneuses. Elle descendit les escaliers sans faire attention à rien et remonta aussitôt ceux du dortoir des filles. Sonnée, elle se précipita sous la douche, retirant prestement ses vêtements.
Sous l'eau chaude, Rose frissonna en repensant au baiser de William.
Rien à voir avec ceux de Blaise. Rien. C'était comme le premier, tellement doux. Aucune sauvagerie comme avec Blaise.
Troublée, les joues rougies, elle prit une longue douche. Quand elle s'allongea, elle resta les yeux grands ouverts pendant des heures, caressant machinalement Kietel. De parler à William ne l'avait pas du tout, mais alors pas du tout, aidée.
Le jeudi en Botanique, Blaise ne semblait pas se souvenir pourquoi Rose l'évitait et gardait autant ses distances. Peu habitué à ce qu'elle l'ignore, il finit par coincer son poignet contre le plan de travail et fronça les sourcils sans un mot, attendant une explication. Elle leva les yeux au ciel et marmonna à mi-voix :
- La rumeur. On avait dit qu'on ferait attention.
Il soupira et la relâcha. Elle se frotta machinalement le poignet et repensa à la fois où William lui avait fait des marques terribles quand il essayait de la maitriser. Les bleus avaient totalement disparu maintenant. Ils s'étaient développés très vite mais n'étaient pas restés longtemps, fort heureusement.
William…
Le regard qu'il lui avait lancé le matin au petit déjeuner ne laissait aucun doute sur le fait qu'il attendait qu'elle fasse un choix. Ses yeux bleus avaient transpercé Rose avec une intensité inhabituelle. Elle faisait ce qu'elle pouvait pour reculer l'échéance, prétendant ne pas voir ou ne pas comprendre les regards que William et Blaise étaient capables de lui lancer. Elle comptait bien gagner des jours, voire une semaine ou deux de délai, le temps de savoir où elle-même en était.
Comme elle tenait toujours son avant-bras, Blaise se pencha un peu vers elle, délaissant ses plants.
- Je t'ai fait mal ? demanda-t-il, la voix plus caressante que jamais.
Elle sursauta et tourna la tête pour le regarder, ignorant les picotements dans son ventre.
- Non, non, tout va bien.
Elle lui fit un sourire et s'attela de nouveau à sa Botanique. Le Serpentard soupira régulièrement jusqu'à la fin du cours, visiblement déçu que Rose tienne sa promesse et se tienne loin de lui. Elle ne put s'empêcher de sourire à chacune des manifestations de déception de Blaise.
Au dîner de samedi, lorsque les Serdaigles firent leur apparition, les élèves aux tables de Gryffondor, Serpentard et Poufsouffle les fixèrent. Michael marmonna quelque chose d'incompréhensible et alla s'asseoir rapidement. Anthony lança un regard accusateur à Rose une fois qu'ils furent assis. Son amie tiqua, mais ils ne dirent rien. Rose se pencha un peu sur le côté pour apercevoir Blaise. Il la regarda rapidement d'un air consterné, et elle ne put s'empêcher de sourire. Durant le repas, elle vit des élèves de sa propre maison se pencher par-dessus leurs assiettes pour regarder dans la direction des cinquièmes. Rose s'intéressa seulement à son assiette, jusqu'à ce qu'elle craque et relève la tête.
- Ils m'agacent ! lança-t-elle vivement, les doigts crispés sur sa fourchette.
Anthony la fixa de nouveau.
- Et ne me dis pas que je l'ai cherché. Est-ce qu'on se préoccupe de savoir si Hannah Abbott couche avec des centaures, nous ? Et puis d'abord, ça ne les regarde pas, c'est ma vie !
Sa fourchette se tordit sans qu'elle ne le remarque. Sa lèvre supérieure commençait à se relever machinalement sur ses dents.
- Laisse couler, lança Terry de sa voix apaisante. Ça les occupe… et toi tu sais où tu en es non ?
Elle lui lança un regard furieux.
- Non, justement, souffla Lisa, osant à peine parler. Allez, Rose, ne t'en occupe pas.
Elle passa sa main dans le dos de son amie pour l'apaiser. Derek lui pressait le genou sous la table. Rose soupira, puis se pencha pour effleurer le bras de Terry pour s'excuser. Il lui sourit en retour. Derek lui prit sa fourchette des mains et la redressa tant bien que mal.
Michael s'éveilla de sa torpeur et demanda :
- Ils sont pas là les sixièmes ?
Padma tourna la tête dans tous les sens pour les trouver. Ce fut Mandy qui les repéra en premier, en bout de table, près de la sortie. Idriss croisa son regard et elle lui fit un signe de main amical. Les autres se retournèrent en le voyant saluer et sourirent à leur tour. Rose attendit que William pose les yeux sur elle, pour lui faire une petite grimace amusante, mais elle fut stoppée dans son élan par le regard meurtrier qu'il lui envoya avant de détourner la tête.
Ahurie, elle croisa le regard de ses camarades, qui avaient vu la même chose qu'elle. Comprenant soudainement, Terry fit d'une voix incrédule :
- Ne me dites pas qu'il croit à cette rumeur ?
- L'imbécile, lâcha Derek.
Rose ferma la bouche. Ça ne pouvait être que ça. Comment, après ce qu'ils s'étaient dit, après ce qu'ils avaient fait, William pouvait croire un truc pareil ?! Ça ne lui ressemblait pas. Elle formula cette dernière pensée à voix haute. Anthony prit une inspiration, jeta un œil à Lisa puis déclara :
- Je pense qu'il est jaloux, Rose. Tout simplement.
- Jaloux ? Mais pourquoi ?
- Tu sais, on n'est plus vraiment rationnels quand il s'agit de sentiments… continua son ami.
- On ? hésita Mandy.
- Les garçons, l'éclaira Derek.
Elle secoua la tête, de plus en plus agacée.
- Il va encore falloir qu'on discute tous les deux, marmonna-t-elle.
Elle jeta un œil furieux aux Poufsouffles. C'était leur faute, encore une fois. Elle serra les poings, son diner oublié. Sa colère s'installait et ne voulait plus partir. Derek la surveillait du coin de l'œil. Rose se mordit furieusement la lèvre inférieure et ferma les yeux.
Respire. Inspire, expire.
Mais elle bloqua sa respiration sans s'en rendre compte. Ses yeux s'écarquillèrent. Elle allait perdre.
Lisa la poussa du coude.
- Rose ? ça va ?
Elle secoua la tête pour toute réponse.
- Pars, chuchota Derek. Tout de suite.
Elle se leva aussi calmement que possible, les doigts tremblants. Il l'imita, décidé à la suivre.
- Partons tous, lança Anthony.
Ils se levèrent, moins discrètement que nécessaire, et quittèrent en toute hâte la Grande Salle. Heureusement que les couloirs étaient déserts, car leur Salle Commune était loin, et Rose savait qu'elle ne tiendrait pas aussi longtemps. Derek la guidait pendant qu'elle luttait, mais en tournant dans un couloir, elle perdit le contrôle.
Plop !
La panthère atterrit silencieusement sur le dallage. Ses sept amis l'entourèrent aussitôt, pour la cacher aux regards qui pourraient se glisser sur elle.
Elle se faisait toute petite, les yeux agrandis par la peur d'être découverte. Ses pensées s'apaisèrent vite et son rythme cardiaque baissa suffisamment pour la laisser respirer.
Terry surveillait avec Mandy, les oreilles et les yeux attentifs à tout nouveau bruit. Mais il était encore tôt et le diner était loin d'être fini. Peu rassurée, Padma poussa quand même tout le monde à avancer, doucement mais sûrement, en direction de la Salle Commune.
Ils progressaient lentement, se retournant sans cesse pour être sûr que personne n'aperçoive une oreille velue, un bout de queue noire, une patte de félin.
La panthère, elle, reprenait le contrôle sur ses pensées et ses sentiments. Parfaitement consciente du niveau de danger de la situation, elle ne trainait pas et avançait rapidement, à pas feutrés.
En bas de leur tour, pourtant certains d'être seuls, ils ne ralentirent pas. L'animal eut la joie de partir dans les escaliers à toute vitesse, dépassant ses camarades. Ses soucis envolés, il s'amusait à sauter les marches quatre à quatre, à bondir toujours plus haut. Il arriva bien avant les sept humains et s'assit sagement, lissant son pelage à grands coups de langue.
Ils apparurent enfin, presque tous essoufflés d'être montés si vite. Derek ouvrait la marche sereinement, et Mandy la fermait, la main sur un point de côté.
Le grand blond s'adressa directement à l'Animagus :
- Avoue : tu voulais juste t'amuser dans les escaliers.
Terry venait de le rejoindre et s'appuyait à lui pour reprendre sa respiration. Ce fut Rose qui lui répondit :
- C'est ça, mais je savais que vous n'accepteriez jamais si ce n'était pas une urgence.
Anthony secoua la tête en souriant. Lisa était encore paniquée à l'idée qu'ils se fassent prendre et Padma se recoiffait, hors d'haleine.
- Avouez que c'était marrant… tenta Rose, qui se sentait coupable.
Michael secoua la tête.
- T'es un monstre. J'ai même pas eu le temps de prendre un dessert.
Et ils étaient tous les huit, après leur course effrénée, en train de rire comme des enfants devant la porte de la Salle Commune.
- Je suis vraiment, vraiment désolée, dit Rose avec sincérité.
- T'en fais pas, répondit Anthony en lui pressant l'épaule.
Il se tourna pour répondre à l'énigme du heurtoir de la porte qui attendait.
Ils s'engouffrèrent comme un seul homme dans la salle et s'affalèrent directement sur les fauteuils, sauf Rose qui commença à faire les cent pas, guettant la porte d'entrée.
- Tu comptes attendre son retour ? interrogea Mandy.
- Oui. Je ne vais pas le laisser croire ces rumeurs débiles.
Derek réfléchit depuis le fauteuil qu'il partageait avec Terry.
- Tu sais quoi ? Il va soit essayer d'esquiver, soit chercher une confrontation directe.
- On dirait qu'il parle d'un boxeur en plein combat, nota Michael, blasé par le vocabulaire du blond.
Derek fit un geste impatient de la main.
- Si j'étais toi, j'irais…
- Directement dans sa chambre ! T'es un génie !
Elle traversa la pièce d'un bond et monta les escaliers.
- Elle m'a tuée avec sa course, geint Mandy, massant toujours ses côtes. Elle pouvait pas devenir une tortue ou un escargot ? Noooon, une panthère ! clama-t-elle, provoquant les rires des autres.
- Bon, au moins… on les entendra pas hurler, se satisfit Anthony.
- Qui te dit qu'ils vont se crier dessus ? contra Terry.
- Ils vont peut-être parler sagement, comme des adultes. William est plutôt mature, nota Padma.
- Oui, mais Rose est capricieuse… Si jamais ils s'embarquent dans une discussion mouvementée et que William ne cède pas…
Derek eut un regard attendri, un léger sourire aux lèvres.
- Ou peut-être qu'ils vont se réconcilier en deux secondes, et qu'ils vont se lancer dans un baiser passionné, s'enthousiasma Lisa. Vous y aviez pas pensé à celle-là hein ?!
Michael leva les yeux au ciel.
- Tiens, les voilà.
- Il faudrait qu'on le fasse aller dans sa chambre, murmura Mandy.
Idriss et Nassim se dirigèrent vers les cinquièmes, Marc dans leur sillage, mais leur quatrième ami ne sembla pas vouloir les suivre. Il fit un vague signe au groupe et lança :
- Je suis crevé, je vais direct au lit.
Son sourire n'atteignit pas ses yeux et il gravit les marches pour aller à son dortoir.
- Bah il s'y est attiré tout seul, conclut Padma, satisfaite.
- Il a dû croire que Rose était avec nous… supposa Mandy.
- Raté !
- Qu'est-ce qui est raté ? demanda Nassim en s'installant avec eux.
Tandis que Derek se lançait dans l'explication de leur manœuvre, William, lui, venait d'entrer dans sa chambre. Il ne savait pas trop s'il était en colère, ou très fatigué, ou les deux. Il pensa d'abord à aller prendre une douche, mais il se ravisa et se dirigea vers son lit afin d'y récupérer son pyjama. Il fit quelques pas et se figea. Une silhouette venait de se détacher silencieusement de l'ombre de la chambre.
- William.
Désarçonné, il ne sut pas quoi dire.
- Ton regard au repas, commença Rose à toute vitesse. Il ne faut absolument pas que tu croies ce qui se raconte. Je ne couche pas avec Blaise, je te le certifie. C'est une rumeur infondée et idiote.
Elle prit une goulée d'air.
- Je ne sais pas pourquoi tu y as cru, ou alors tu es en colère pour autre chose, ou alors je suis à côté de la plaque et je suis désolée, mais en tout cas je voudrais qu'on en parle. S'il te plait.
Elle se tut finalement et le fixa, attendant une réaction. William soupira et se laissa tomber sur son matelas. Elle prit timidement place à côté de lui.
- Je sais bien que ce n'est qu'une rumeur de plus. Il y en a tellement eu depuis l'an dernier…
- Alors… c'était quoi ce regard qui tue pendant le repas ?
Il se passa la main sur le visage et resta le front appuyé sur sa paume, le coude planté sur le genou.
- Je ne sais pas trop, Rose… je crois que c'est d'entendre parler d'une nouvelle rumeur.
- Je ne comprends pas…
Il réfléchit.
- Je crois que c'est d'entendre une nouvelle rumeur à propos de toi et Zabini, finit-il par dire.
Le brun releva la tête et opina, convaincu de sa phrase.
- Voilà, c'est ça. C'est que tout l'école parle de toi ET de lui en même temps. Surtout à propos de… de sexe. Comme si vous étiez ensemble.
Rose le considéra sans rien dire.
- Et si une nouvelle rumeur vient de se propager, ça veut dire que des gens vous ont vus ensemble. Donc que tu as passé du temps avec lui. Et ça…
Il lui jeta un rapide coup d'œil.
- Ça me rend dingue.
Il fixait les paumes de ses mains, qui devaient être passionnantes. Rose tripota des boucles de ses cheveux qui avaient glissé de son épaule.
- On s'est vus dimanche dernier pour faire des devoirs à la Bibliothèque, dit-elle enfin. Mais je t'en avais parlé, je crois.
Il confirma.
- C'est tout. On passe quelques cours ensemble, mais ça aussi tu le sais. Ou du moins, tu t'en doutes.
Elle darda ses yeux sur lui.
- Ta franchise m'étonnera toujours, tu sais ? lança-t-elle soudainement.
Il sourit un peu et répliqua :
- Je savais que j'aurais dû le mettre dans mon CV, ça.
Rose se mit à rire. Elle pencha la tête sur le côté.
- Alors, fini de bouder ?
Il rit à son tour.
- Oui. Ça soulage de parler.
Le joueur de Quidditch se tourna vers elle et chercha ses yeux verts. Elle haussa un sourcil.
- Il y a quand même quelque chose qui me chagrine.
- Dis-moi.
Rose s'attendait au pire. À quoi pensait-il ?
- Si ces… d'abord qui a lancé cette rumeur ?
- Hannah Abbott et Susan Bones. Les mêmes que l'an dernier… apparemment j'occupe beaucoup de leur temps libre.
Il eut un air étonné et amusé.
- Donc, si ces filles ont relancé la rumeur l'autre dimanche, c'est qu'elles vous ont vus ensemble. Toi et Zabini.
Elle hocha prudemment la tête.
- Si elles se sont dit que vous couchiez ensemble… vous faisiez quoi à ce moment-là ?
Tss.
Elle le regarda, le visage impassible.
- Et ne me dis pas que ça n'a aucune importance.
Son sourire lui échappa avant qu'elle réponde d'une voix posée.
- Après la Bibliothèque, nous avons discuté dans le couloir, et j'ai entendu ces deux nouilles pas du tout discrètes. J'ai eu le temps de les apercevoir avant qu'elles filent.
William sembla rassuré par l'honnêteté réciproque de Rose. Finalement, il lança :
- Vous vous êtes embrassés ?
Rose ferma les yeux.
C'est reparti pour un tour.
- Oui.
- Est-ce que tu vas enfin me dire combien de fois vous vous êtes embrassés ?
Elle serra les dents, essaya de ne pas être trop brutale.
- Écoute William, je sais que vous êtes… rivaux tous les deux – le terme est trop chevaleresque mais je n'ai rien de mieux, et que tu sembles un peu jaloux, mais ça précisément, ça ne te regarde pas.
Elle esquissa un sourire, ne voulant pas le vexer.
- Nous ne sommes pas en couple, et on ne parle pas d'un ex-petit ami dérangeant. S'il te plait, arrête de me poser cette question.
Il hocha la tête sans la regarder, regrettant d'avoir autant insisté. Il pensait qu'elle avait raison, ça ne le regardait pas dans le fond. Même si ça le rendait fou.
Rose se mordit la lèvre, inquiète à l'idée qu'il fasse la tête, ce qui n'était pas son but après tout. Elle voulait surtout éviter de l'effrayer en lui disant que Blaise l'avait embrassée cinq fois, sans compter les baisers d'adieu qui…
Pitié arrête ça tu vas finir par faire une gaffe.
Elle se tourna vers son ami.
- Ne fais pas la tête, je t'en prie…
- Je ne boude pas.
Il ne put résister à l'envie de la titiller un peu plus.
- Je me dis juste qu'il doit avoir une sacrée avance sur moi pour que tu refuses de répondre.
Elle soupira, excédée. Il leva les mains en l'air en signe de reddition.
- D'accord, d'accord, j'arrête, rit-il.
Rose sourit et en rajouta une couche :
- On peut dire que vous êtes sur un pied d'égalité puisque je n'ai pas encore couché avec lui pour de vrai.
William tourna la tête si vite vers elle que sa nuque craqua et elle éclata de rire.
- Pardon. C'était trop tentant. Tu t'es fait mal ? s'enquit-elle.
- Non, non, marmonna-t-il. J'ai bien compris que tu essayais de m'achever.
Elle rit encore et il sourit. En le voyant se masser la nuque, elle n'eut qu'une seule envie : remplacer sa main et le toucher pour l'apaiser. Elle souleva sa main de sa cuisse et allait joindre le geste à la pensée, quand il prit la parole.
- Merci de m'avoir fait la surprise de m'attendre dans ma chambre.
Il avait un petit sourire aux lèvres.
- Tu comptais m'éviter n'est-ce pas ? demanda-t-elle, reposant sa main sur sa jambe.
- Oui, avoua-t-il. Je voulais réfléchir à ce que je ressentais, seul.
- Mais je t'en ai empêché.
Il haussa les épaules, pas perturbé.
- J'aime bien aussi quand tu es avec moi quand je cogite.
Rose sourit en penchant la tête sur le côté. Ses cheveux glissèrent et lui encadrèrent le visage.
- Tu as de jolis cheveux, déclara d'un coup William.
Surprise, elle sentit ses joues chauffer et elle redressa la tête.
- Euh, merci.
- J'ai souvent envie de les toucher, tu sais ça ?
Elle eut un sourire en coin.
- Ah pardon, ma franchise. C'est un peu trop, c'est ça ?
Il lui sourit largement.
- Avoue que c'est mieux que si je te disais qu'ils sont moches.
Rose se mit à rire.
- Je suis d'accord. C'est un peu déconcertant que tu me dises tout ce que tu penses, mais je m'habitue.
- Oh non, je ne te dis pas tout ce que je pense…
Comme elle fronçait les sourcils, il fit un vague geste de la main.
- Et ça vaut mieux. Sinon je serais tout le temps en train de parler et tu essaierais de m'étrangler.
Elle rit de nouveau, puis redressa la tête et fixa la porte. Il suivit son regard, intrigué.
De légers coups retentirent alors contre la porte, qui s'ouvrit. Une tête passa dans l'entrebâillement :
- Euh, excusez-moi, fit la voix de Marc, mais je peux entrer ?
Rose lui sourit et lui fit signe qu'il pouvait avancer.
- J'allais bientôt partir.
Elle se tourna vers William alors que leur ami disparaissait dans la salle de bain.
- Merci pour ta franchise.
- Toujours.
Elle se leva et lissa sa jupe par réflexe. William la regarda faire puis se leva d'un bond.
- Je t'accompagne, je vais descendre quelques minutes.
Rose prit la tête et se dirigea vers la porte. Derrière elle, le brun tendit la main pour l'arrêter, mais il hésita, et se ravisa. Il laissa retomber son bras le long de son corps. Secouant la tête, il la suivit à l'extérieur de la chambre. Les deux Serdaigles passèrent le restant de la soirée avec les autres, discutant de choses et d'autres, tous réunis au coin du feu.
Lundi en fin d'après-midi, ils se séparèrent en deux groupes : ceux qui retournaient à la Salle Commune, et ceux qui allaient à l'entrainement de Quidditch. Vu la météo, Rose ne culpabilisa pas trop de ne pas aller jouer les groupies dans les gradins. Les garçons, eux, n'avaient pas trop le choix. La nouvelle politique de leur capitaine était de s'entrainer le plus souvent possible, même si leur premier match ne serait pas avant début décembre.
Les « réfractaires au sport », comme les avait appelés Michael, étaient au chaud dans une Salle Commune presque vide. Rose ressortit le livre sur lequel elle s'était endormie quelques jours plus tôt. Elle espérait secrètement qu'il aurait le même effet et qu'elle pourrait s'endormir. Son sommeil nocturne était toujours agité et sa fatigue l'écrasait. Même Anthony était plus indulgent avec elle ces derniers temps, ce qui n'était pas bon signe, songea-t-elle en souriant. Elle se lova dans un coin du canapé face au feu, puis se plongea dans sa lecture, bercée par les discussions des autres.
Quelques dizaines de pages suffirent pour la faire sombrer. Elle se laissa emporter.
Bientôt de petites lumières fusèrent dans sa tête, comme de minuscules feux d'artifice. Tout devint blanc.
Et Rose se retrouva à marcher, quelque part, peut-être dans un champ – elle sentait de l'herbe sous ses pieds. Encore une fois, elle ne voyait pas grand-chose : un brouillard épais l'enveloppait.
Puis une silhouette se dessina, à quelques mètres d'elle. La même que la dernière fois. Rose continua d'approcher, voulant la voir de plus près.
Elle était différente : elle paraissait encore plus âgée maintenant. Elle portait toujours son pendentif en forme d'oiseau. Elle avait l'air fatiguée, mais se tenait droite, fière.
- Qui êtes-vous ? demanda-t-elle de nouveau.
Mais elle n'eut pas de réponse. Ses lèvres s'étirèrent en un petit sourire. Rose n'osait plus avancer, de peur de la faire fuir. Étrangement, elle était consciente qu'elle rêvait. Elle se sentait en sécurité et ne voulait pas quitter la femme mystérieuse.
Qui était-elle ? Personne qu'elle connaissait. Une invention de son esprit ?
Une vision de son avenir ? Non, elles ne se ressemblaient pas assez pour ça.
Frustrée, Rose fronça les sourcils et soupira.
Le sourire de la femme s'accentua, puis les traits commencèrent à se brouiller. Elle disparaissait peu à peu, comme avalée par la brume. Avant de se retrouver seule, Rose entendit un cri. Un cri d'animal, celui d'un oiseau sombre, qui vit dans le brouillard des rêves étranges.
Elle se rappela. Un corbeau.
Rose ouvrit doucement les paupières. Elle fixa le plafond un instant, un peu perdue. Ses yeux papillonnèrent, puis elle songea à la femme du rêve. C'était la deuxième fois qu'elle la voyait, mais maintenant, impossible de se souvenir à quoi elle pouvait bien ressembler. En tout cas, elle se sentait de nouveau apaisée, comme la première fois.
- Rose ? lança une voix qui lui parut lointaine.
Elle se redressa lentement et s'assit.
- J'ai dormi longtemps ?
- Une bonne heure, lui apprit Lisa. Sans cauchemar apparemment.
- C'est la deuxième fois que ça m'arrive. Je crois que c'est ce livre qui m'aide, supposa-t-elle en riant.
Lisa sourit et lut le titre du roman : « Vie et Mort d'un Mage Indien », par Amouh Rirdanhui.
- Mais pourquoi tu lis ça ?! s'exclama son amie en riant.
- J'essaie de me cultiver, grommela Rose. Mais ça ne marche pas. Si tu as des insomnies, lis ça, c'est radical.
- Je n'en doute pas !
Rose la regarda et se mit à rire aussi.
- Lis autre chose, tu te fais du mal pour rien.
Mandy se pencha vers elle et lut le résumé.
- Argh, je meurs, lança-t-elle en posant son menton sur sa poitrine.
Ses amies éclatèrent de rire.
- Ok, ça va, j'ai compris, je change de livre… je vais aller le reposer.
- C'est ce que tu as de mieux à faire, approuva Lisa en souriant.
Rose s'étira en se levant, et alla reposer le livre sur les étagères de la bibliothèque privée des Serdaigles, sur l'étagère consacrée aux « divertissements ». Réprimant un nouveau rire, elle le rangea soigneusement, regrettant de ne pas avoir pris son Anthologie des Animagus en venant à Poudlard. Son père et elle avaient estimé que ce n'était pas le meilleur livre à se balader sur soi par les temps qui couraient… et le seul exemplaire que la Bibliothèque de l'école était dans la Réserve. Elle se résigna et partit chercher quelques affaires dans le dortoir pour avancer ses devoirs, notamment un complexe commentaire de texte sur la théorie de la Métamorphose demandé par McGonagall. Ses amis l'imitèrent et ils s'installèrent tous les six pour étudier sur une des grandes tables de la Salle.
Nassim et Marc les avisèrent en rentrant dans la tour des Serdaigles et se dirigèrent vers eux. Nassim jetait fréquemment des regards derrière lui et Marc leur sourit.
- Dites… vous faites quoi samedi prochain ? le soir ?
Ils se regardèrent pour s'interroger mutuellement du regard.
- Rien de spécifique, répondit Anthony. Enfin, je crois qu'il y a encore un entrainement de Quidditch, en milieu d'après-midi…
- Parfait alors ! se réjouit Marc.
- Samedi prochain, c'est l'anniversaire de William, expliqua enfin Nassim devant leurs airs interrogateurs.
- Et on organise une petite fête. On aimerait vous inviter !
- Oh chouette ! fit immédiatement Mandy.
- C'est une bonne idée, approuva Terry.
- En plus, pas besoin de demander l'autorisation aux préfets… si vous invitez les préfets, dit Rose avec malice, souriant à Anthony et Padma.
Nassim rit.
- C'est un bonus non négligeable.
- Il a quel âge ? demanda Padma.
- Dix-sept ans ! On doit fêter ça, c'est obligé !
Ils opinèrent tous avec force.
- Bon, on compte sur vous pour garder le secret… on veut lui faire la surprise. C'est pour ça qu'on a attendu qu'il soit en entrainement pour vous en parler.
- Et on ne veut pas prendre le risque que ça soit annulé par l'autre mégère, ajouta sombrement Marc.
- Vous mettrez Derek et Michael au courant ?
- Évidemment, confirma Anthony.
- Qui est invité ? s'enquit Terry.
- Vous huit ; nous huit ; et Roger et Selena, du Quidditch. Je suppose que d'autres septièmes pourraient nous rejoindre, on en connait quelques-uns, grâce à Roger et Selena justement…
- « Nous huit » ? répéta Lisa.
- Les sixièmes ! Nous quatre et les quatre filles.
Rose fit une très discrète grimace que seul Terry vit. Il savait qu'elle trouvait Cho Chang et ses amies niaises. Il enchaina :
- Niveau logistique, comment on peut vous aider ?
- Eh bien, on a déjà réglé le plus important : la boisson.
Ils pouffèrent tous.
- Roger nous prête main forte, il a passé commande via les jumeaux Weasley qui se débrouillent toujours pour aider des étudiants en détresse ! fit Nassim, ravi du plan.
- Selena adore la musique et nous prêtera le nécessaire. Pas de quoi faire une discothèque, mais assez pour une petite soirée.
- Pour la nourriture, on avoue qu'on est un peu coincés.
Les cinquièmes se regardèrent avec complicité.
- On veut bien s'en charger, fit Mandy, toute souriante.
- Vraiment ? Vous êtes sûrs de trouver de quoi faire ?
- Certains, confirma Rose.
- Donc… vous, nous, Roger, Selena… presque vingt personnes c'est ça ?
- Voilà. On a prévu de lui faire la surprise quand ils rentreront de l'entrainement, vers dix-huit heures trente.
- On s'est dit qu'on pourrait tout préparer dans un coin de la Salle Commune, par exemple là-bas, dit Marc en pointant vers un coin un peu reculé, entre les escaliers des dortoirs et une énorme bibliothèque, où se trouvaient un vieux canapé et quelques fauteuils.
- On les laissera tous rentrer ensemble, Roger veillera à ce qu'ils restent groupés. On les laissera prendre une douche, pour leur bien-être et surtout le nôtre. Idriss se chargera de contrôler William pour qu'il redescende des dortoirs en dernier.
- Vous avez pensé à tout, fit Padma en souriant. C'est noté pour nous en tout cas !
Anthony remonta ses lunettes sur son nez.
- Les voilà.
Les joueurs venaient de passer la porte. Ils se turent et retournèrent à leurs devoirs. Nassim et Marc se lancèrent habilement dans une conversation sur l'importance de la fraicheur des ailes de chrysopes dans la potion de Polynectar qu'ils étudiaient actuellement.
Michael, Derek et les autres étaient pleins de boue, décoiffés et certainement en sueur. Ils se dirigeaient tous vers les escaliers, probablement pour aller prendre une douche méritée. Quelques élèves les suivirent du regard alors qu'ils saluaient quelques personnes qu'ils connaissaient.
Terry lança un regard à Derek qui laissait clairement comprendre ce qu'il pensait à ce moment-là : le blond était parfaitement à son goût. Son petit ami lui lança un sourire charmeur, puis se ravisa et rejoignit ses amis. Michael hésita, mais monta finalement les marches et disparut dans le dortoir.
- Tu es tout boueux, nota Mandy.
- Il a plu cette nuit et le terrain n'a pas séché.
Rose se pencha vers Terry.
- Ferme la bouche, murmura-t-elle.
Il serra les lèvres. Lisa lui sourit, amusée.
- Bien passé ? s'enquit Anthony.
- Roger a pas mal hurlé, mais dans l'ensemble, il avait l'air content. Il est assez exigeant, alors on ne prend pas tout en compte.
- Rose a dormi, signala soudainement Mandy. Sans cauchemar.
Derek tourna la tête vers elle.
- Vraiment ?
- Quelques minutes, acquiesça-t-elle. Ok, peut-être plutôt une heure d'après Lisa. En tout cas, ça m'a fait du bien.
Il hocha la tête d'un air sérieux.
Michael redescendit dans la Salle Commune, propre et frais. Il lança un sourire craquant à quelques petites qui le regardèrent comme un trésor. Rose leva les yeux au ciel puis sourit.
- Te revoilà. Bon, je monte prendre ma douche moi aussi.
Derek se redressa de la chaise sur laquelle il était appuyé et partit dans les escaliers. Terry le regarda disparaitre, toujours subjugué. Rose soupira, puis l'attrapa par le bras et tira jusqu'à ce qu'il se lève.
- Hein ?
- Debout !
- Mais qu'est-ce que tu attends pour le rejoindre ? exhorta Mandy.
- On ne va pas t'accompagner jusqu'à la douche, je te préviens, lança Rose.
Elle le guida jusqu'au bas des marches et lui poussa doucement l'épaule. Terry se racla la gorge, puis gravit quelques marches, et enfin poussa la porte du dortoir.
Derek avait déjà disparu et il vit la lumière filtrer sous la porte de la salle de bains. Terry s'approcha, donna quelques légers coups.
- Derek ? appela-t-il doucement.
La porte s'ouvrit aussitôt. De la vapeur enveloppa Terry, et la chaleur sortit de la pièce. Derek était toujours habillé de sa tenue boueuse. Il lança un sourire à Terry.
- Salut.
Terry sourit, rasséréné d'être seul avec lui. Derek glissa sa main sur sa joue et l'approcha de lui. Il lia rapidement leurs lèvres pour un baiser pressé, le faisant entrer dans la salle de bains. Il ferma la porte. Terry plaça ses mains sur les épaules de Derek et l'approcha encore de lui. Derek se pencha, enlaça son petit ami, se serra contre lui. Ils s'embrassèrent, encore. Leurs lèvres frémissaient et Derek fit reculer Terry jusqu'à le plaquer contre la porte. Les doigts de Terry glissèrent dans les cheveux blonds. Ceux de Derek s'accrochèrent au pull qu'il avait envie d'enlever. Il glissa finalement ses mains dessous, froissant la chemise pour la sortir du pantalon noir. Ne résistant pas, Derek tira sur la laine et enleva son pull à Terry. Décoiffé, ce dernier apparut les joues rougies, les yeux troublés. Les doigts agiles de Derek défirent la cravate bleue, il la fit glisser autour du cou pour la laisser tomber à terre. Il déboutonna la chemise blanche, lentement, sans que Terry ne l'arrête. Enhardi à son tour, le brun délaça la tenue de Quidditch du joueur, enlevant la première couche de la robe. Derek eut un sourire en coin, posa encore ses lèvres sur celles de Terry, puis fit glisser les manches de ses bras. Le brun se retrouva torse nu. Il embrassa encore son petit ami, glissant sa langue dans sa bouche, cherchant l'autre. Derek attrapa enfin celle de Terry entre ses lèvres et suçota doucement, faisant pousser un soupir discret au brun. Les mains accrochées au restant de la tenue de sport, Terry se décida et lui retira définitivement. Ses doigts coururent sur le torse aux muscles dessinés, il griffa un peu la peau et un gémissement rauque roula dans la gorge de Derek.
- Terry… gronda-t-il inconsciemment.
Il avait fermé les yeux et, trop concentré sur les lèvres rouges qu'il ne quittait pas et les caresses sur son torse, il ne sentit pas Terry s'approcher du pantalon bleu nuit. Il défit les deux premiers boutons, Derek ouvrit les yeux et interrompit leur baiser. Son petit ami n'osait pas le regarder, soudainement tétanisé par sa propre initiative. Les boutons restants furent défaits, et le blond se retrouva rapidement en caleçon. Ses prunelles noires cherchaient le regard de Terry, qui s'obstinait à regarder ailleurs. Il finit par lui soulever délicatement le menton, mais renonça à lui dire quoi que ce soit en le voyant si rouge. Le Poursuiveur se contenta de sceller à nouveau leurs lèvres, plaquant ses mains sur les hanches du brun. Les épaules arrondies, il enveloppait quasiment Terry, comme pour le cacher, le protéger d'autres regards – pourtant ils étaient seuls. Son trésor à lui. Ses doigts jouèrent avec la ceinture qu'il défit graduellement, prêt à s'arrêter. Comme Terry ne disait rien, il continua son chemin et déboutonna le pantalon à son tour. Derek planta un baiser, et un second, dans le cou de son petit ami. Puis ils se retrouvèrent tous les deux en caleçon, Derek caressant doucement le ventre et les hanches de Terry, embrassant encore et encore ses lèvres gonflées. Il effleura le bord du caleçon, coula un doigt sous l'élastique, et s'interrompit en sentant le tressaillement de son petit ami. Ses mains remontèrent vers le torse et restèrent là, caressant la peau tiède. Deux mains tremblantes se posèrent sur les siennes. Derek cessa aussitôt tout mouvement et s'éloigna de la bouche rouge.
- Pardon, chuchota le blond en écartant les mains pour les plaquer sur la porte.
- Non, c'est juste…
Sa voix était toute petite.
- Pas ici, finit-il.
Derek hocha la tête et ferma les paupières, maitrisant sa respiration. Il planta ses yeux noirs dans ceux de Terry.
- Je suis désolé, rajouta ce dernier, subitement gêné.
- Non, chuchota le blond, caressant sa joue. C'est moi. Ne me laisse pas faire quand tu n'as pas envie, je te l'ai déjà dit.
Terry acquiesça puit eut un petit sourire. Derek se pencha encore, l'embrassa une fois, puis deux, et recula.
- Je te laisse sortir, murmura-t-il. Sinon je ne vais jamais la prendre, cette douche.
Il eut un sourire en coin. Terry rougit un peu plus, s'écarta de Derek. Il ramassa ses affaires qu'il serra contre lui, et lança un dernier regard coupable à son petit ami. Ce dernier se pencha, effleura une dernière fois ses lèvres et susurra :
- J't'aime.
Terry sourit, puis sortit de la salle de bains et referma la porte. Il regagna son lit rapidement, et balança ses affaires en vrac dessus. Il prit quelques inspirations profondes et tenta de calmer sa tension. Il frissonna légèrement, puis se rappela qu'il était toujours en caleçon. Le Serdaigle reprit ses vêtements un à un et les enfila, respirant toujours à fond. Il entendait l'eau couler dans la salle de bains. Terry regarda la porte un bref instant, puis sortit de la chambre et rejoignit la Salle Commune. Il s'affala sur un sofa où ses amis avaient migré et personne ne fit de commentaire, fort heureusement. Rose le laissa s'appuyer contre elle, et il lut par-dessus son épaule, pour se changer les idées.
Derek finit par les rejoindre après avoir pris une longue douche. Il s'assit sur le canapé, contre Terry et enroula son bras autour de ses épaules. Il lui déposa un léger baiser sur la joue et s'intéressa au magazine que lisait Michael. Terry quitta l'épaule de Rose pour se blottir contre Derek. Ils allèrent diner tous ensemble peu après. Les joueurs étaient calmes après leur entrainement et les autres papotèrent avant qu'ils n'aillent tous se coucher.
Pendant le cours d'Astronomie, les Serdaigles discutaient posément, à voix basse. Ils ne voulaient pas se faire attraper, mais ils n'arrivaient pas à résister : il fallait qu'ils discutent de la fête d'anniversaire de William. C'était leur divertissement de la semaine et ils ne pensaient presque qu'à ça. Ils étaient très investis par leur mission « nourriture » et avaient fait une liste pour ne rien oublier.
- On est d'accord qu'on ne va pas tous aller aux cuisines en même temps ? demanda Lisa.
- Non, bien sûr que non. De toute façon c'est contre le décret d'Ombrage. Il faut qu'on soit deux maximum, rappela Terry.
- Il faudrait qu'on étale ça sur plusieurs jours, ce serait plus discret, proposa Michael.
- Pas bête. Bon, alors, notre liste ?
- Elle est là, fit Rose en la sortant de sa poche.
Ils la lurent à tour de rôle, se la passant de main en main. Elle était particulièrement longue.
- Je sais pas si on aura assez, pouffa Mandy.
- Qui a mis des légumes sur cette liste ? se moqua Anthony.
Les autres rirent à leur tour.
- C'est moi, fit Lisa d'une voix féroce, ce qui coupa court aux moqueries de son petit ami.
Il remonta ses lunettes sur son nez pendant que les autres se regardaient, amusés.
- C'est bien… tenta-t-il vainement, sous l'œil courroucé de la rousse.
Elle finit par lever les yeux au ciel et sourire.
- Laissez-moi mes légumes, supplia-t-elle finalement, faisant encore plus rire ses amis.
- On ira les chercher en dernier, annonça Rose. Comme ça ils seront frais. Les autres choses de la liste peuvent être récupérées dans le désordre je pense…
Comme les autres opinèrent, Mandy enchaina :
- J'ai hâte d'y être… de faire autre chose qu'étudier un samedi soir, pour une fois…
- Surtout une fête, renchérit Derek. On n'en fait jamais, sauf quand on gagne au Quidditch… et ça fait longtemps.
- Ah au fait Rose ! Idriss m'a dit qu'il s'attendait à ce que tu prennes des shots en public, pour compenser l'absence de photos l'été dernier ! fit Michael.
- Ben tiens.
Cela provoqua l'hilarité générale des Serdaigles.
- On t'accompagnera, compatit Padma en posant une main sur l'épaule de Rose, qui riait toujours.
- J'y compte bien…
Comme la professeure Sinistra passait dans les rangs, ils se focalisèrent sur leurs télescopes respectifs.
Une ombre se glissa près de Rose.
- Salut, Blaise, commença directement la jeune fille.
- Bonsoir, Rose.
Elle leva la tête et lui sourit.
- Ça va ?
Il opina et lui frôla la main.
- Vous parliez d'une fête ?
Étonnée, elle haussa un sourcil.
- C'est pas bien d'écouter les conversations des autres…
Blaise lui lança un sourire presque coupable.
- Je n'ai pas pu résister. Enfin, j'étais surtout obligé puisque j'essaie de capter ton attention depuis une heure. Il fallait bien que je sache quand tu serais disponible pour moi.
Elle leva les yeux au ciel, amusée.
- Alors, cette fête ?
- Pas si fort.
Rose se rapprocha de lui, il se pencha vers son télescope pour qu'elle puisse lui murmurer à l'oreille.
- Samedi soir, on fait une fête pour l'anniversaire de… l'un d'entre nous. Dans notre Salle Commune. On est chargés de ramener de quoi manger, finit-elle avec un sourire complice.
Il ne répondit pas tout de suite. Puis…
- Lequel d'entre vous ?
Elle avait essayé pourtant. Elle se résigna.
- William.
Rose sentit la tension dans les épaules de Blaise et elle croisa les bras, attendant la suite.
- Vraiment ? grogna-t-il. Et il t'a invitée personnellement je suppose ?
- Non, c'est une surprise qu'on lui fait, répondit-elle patiemment.
- Une surprise… répéta-t-il pensivement. Une idée à qui ?
- Ses amis. Ils nous ont invités, tous les huit, précisa-t-elle, espérant couper court à sa montée de jalousie.
- Il va avoir quel âge ? interrogea-t-il.
- Euh, dix-sept ans, fit-elle, surprise par la question.
Il ronchonna de plus belle.
- Parce que ? voulut-elle comprendre.
- Dix-sept ans. La majorité.
Blaise lui jeta un regard, et devant son mutisme, termina :
- L'alcool.
- Dis, Blaise…
La colère commençait à la gagner.
- Je ne suis pas une Gryffondor de treize ans qui ne sait pas se maitriser, je te signale.
Il grommela encore.
- Et, je fais encore ce que je veux non ?
Elle était excédée par sa réaction. Non mais vraiment !
- On n'est pas en couple, je te rappelle.
- Très bien, fit-il finalement. Très bien.
À sa surprise, il ne dit plus rien et se contenta de regarder où était la professeure. Décontenancée, Rose referma la bouche, desserra les poings et se tourna vers son parchemin.
Blaise la saisit d'un coup par le bras et l'entraina avec lui, toujours muet. Il l'attira dans un recoin sombre de la tour, entre la tourelle menant aux escaliers et le parapet. Il la poussa contre le mur froid et fondit aussitôt sur ses lèvres. Rose n'eut pas le temps de protester – de toute façon, elle n'en avait subitement pas la moindre envie. Elle répondit immédiatement à son geste en enroulant ses bras autour de son cou et pressant sa bouche avec avidité contre lui. La langue de Blaise se frayait déjà un passage entre ses lèvres, tandis qu'il se collait à elle autant qu'il le pouvait, sa main en bas de son dos pour mieux la presser contre lui. Son autre main glissait le long de son dos, passa sans gêne sur ses fesses, et continua le long de sa cuisse. Comme Rose mordillait sa lèvre, il eut un soupir grave, presque un grondement, et souleva la jambe de Rose pour l'enrouler autour de son bassin. Elle inspira de surprise et se laissa faire. Le rouge aux joues, elle sentait Blaise entièrement contre elle, brulant, ses doigts imprimés dans sa cuisse. Il n'avait pas arrêté un seul instant de l'embrasser, suçant sa langue, mordillant ses lèvres à son tour.
Un gémissement sourd échappa à Rose, que lui seul entendit. Il sourit pendant leur étreinte, sentant des ongles lui griffer la nuque. Il lâcha ses lèvres et descendit dans son cou, y posant quelques baisers fiévreux. Il remonta vers son oreille, embrassa sous le lobe et susurra d'une voix encore plus basse que d'ordinaire :
- Pour pas que tu m'oublies samedi soir…
Puis il la relâcha en douceur, posant la jambe de Rose à terre, retirant ses bras de son cou. Il rajusta sa propre cravate, se pencha, lui donna un dernier baiser plus mesuré et la planta là, les yeux écarquillées, pantelante.
Les nuits suivantes, il lui sembla que ses cauchemars étaient plus intenses. Elle y voyait tour à tour les élèves-Mangemorts qui la harcelaient, son père qui lui disait la détester depuis sa naissance, William qui l'ignorait et Blaise qui la rejetait complètement, le tout entrecoupé de scènes de torture dont Olivia ne sortait jamais vivante. Vendredi vers trois heures du matin, elle dut se relever précipitamment pour aller vomir tellement les images dans sa tête étaient horribles. Elle commençait à regretter les crises de douleur. Elle se recoucha après avoir bu suffisamment d'eau pour enlever le gout acre de sa bouche, épuisée. Kietel se blottit contre elle, et son doux ronronnement résonnant dans son oreille l'aida à s'apaiser. Elle somnola sans s'endormir complètement, trop anxieuse de refaire un cauchemar.
Elle fut la première levée, et laissa un mot à Lisa pour dire qu'elle n'arrivait plus à dormir et serait dans la Salle Commune. Elle y attendit ses amis en lisant distraitement le nouveau Sorcière Hebdo de Mandy. Rose sourit en repensant aux titres parodiques qu'avait inventés William la dernière fois.
William…
Blaise…
Ah non hein. La nuit, ça suffit pour se torturer.
Elle soupira et tourna distraitement une page. Elle tomba sur les conseils mode de la semaine et se mit à songer à ce qu'elle allait porter samedi soir. Elle avait envie… de porter quelque chose de joli. Rose leva les yeux au ciel à cette pensée, mais c'était la vérité : elle voulait que William la trouve jolie, voilà.
- À quoi tu penses, ma Rose ? lança une voix au-dessus de sa tête. Tu fais plein de grimaces.
Derek se laissa tomber dans le fauteuil à côté d'elle. Elle lui sourit, il lui tendit les bras et elle abandonna son siège.
- Je pense à…
Comme elle ne terminait pas, il jeta un œil à la page du magazine ouvert.
- Conseils mode ? Genre, tu as besoin de ça toi ?
Elle haussa les épaules.
- Mais non voyons, une aristo ça a pas besoin de conseils mode… juste d'assistants shopping personnels !
Elle rit contre lui, il lui embrassa la tempe.
- Cauchemar ?
- Oui. Encore pire, depuis que… l'Astronomie…
Derek, au courant de ses aventures, eut un sourire amusé. Il renversa sa tête contre le fauteuil et ferma les yeux.
- Nuit trop courte ? se moqua-t-elle.
Il sourit.
- Même pas. J'ai dormi tout seul.
- Ça va avec Terry ? s'enquit-elle.
- Oui, oui, pas de panique.
Il soupira sans ouvrir les yeux.
- C'est juste que… parfois… je préfère dormir seul.
Elle attendit qu'il poursuive.
- Parce que j'ai tellement envie de…
Derek secoua une de ses grandes mains pour éluder le terme.
- Mais Terry n'est pas prêt. Alors je préfère lui laisser un peu d'espace. J'ai peur de devenir trop insistant, dans ma…
- Frustration sexuelle ? proposa Rose.
- J'allais dire dans ma fougue, protesta-t-il en ouvrant les yeux.
- Ta fougue alors, pouffa-t-elle. Si tu veux appeler ça comme ça…
Il rit à son tour. Il parcourut la grande pièce des yeux, soudainement inquiet.
- Ne t'inquiète pas, il n'y a personne. J'avais vérifié.
- Merci.
Il referma les yeux et serra sa meilleure amie plus fort contre lui. Elle le sentit être secoué d'un nouveau rire.
- Quoi ?
- Dis-moi, mardi soir en Astronomie… est-ce que Blaise était… fougueux ?
Elle hurla de rire au moment où les autres cinquièmes débarquaient dans la Salle Commune, interrompant leurs confidences. Ils se levèrent et les suivirent hors de la tour. Derek lui tint la main jusqu'à l'entrée de la Grande Salle et lui pressa les doigts.
- T'as pas répondu, chuchota-t-il alors qu'elle se tournait vers lui, les sourcils froncés.
Elle vit son petit air malicieux auquel elle ne pouvait pas résister.
- Ben, fit-elle, rougissant un peu malgré tout. Je crois.
- Alors ça mon petit chat, y'a pas de « je crois ». C'est oui ou c'est non.
Elle fut mi-scandalisée, mi-amusée par le nouveau surnom. Alors qu'ils suivaient toujours leurs amis vers leurs places attitrés, il se pencha vers elle et murmura :
- C'est facile, tu lui demandes : « dis-moi Blaise, la dernière fois c'était ta baguette magique que j'ai sentie dans ta poche ou alors c'était ta baguette magique ? »
Rose dut s'accrocher à lui tellement elle riait. Ils s'affalèrent sur les sièges, hilares. Les autres les regardaient sans faire de commentaire. Ils avaient l'habitude.
Quand ils virent les Serpentards au grand complet s'installer, ils recommencèrent à pouffer sans se regarder. Soudainement, Rose se redressa et lui marmonna :
- Comment tu sais qu'elle est magique ?
Derek éclata d'un rire encore plus sonore et Rose dut prendre une serviette de table pour essuyer ses larmes.
- Qu'est-ce qui leur arrive ? murmura assez fort une voix près d'eux.
- Salut Nassim. Ne t'inquiète pas. Ça leur arrive régulièrement, répondit Terry d'une voix indulgente.
- Nous on est habitués, fit Lisa. On ne fait plus attention.
- De l'extérieur, ça donne quoi ? demanda Mandy.
- C'est… spécial… admit Marc.
Les deux amis relevèrent la tête pour saluer les sixièmes années qui venaient de s'installer.
- Alors William, fit Rose d'une voix enjouée, prêt pour…
Elle s'interrompit alors qu'un coude écrasait sa main.
- Aïe !
- Oh, pardon mon chat, fit Derek innocemment.
- « Mon chat », vraiment ? lui grogna-t-elle en secouant sa main.
Il lui fit un sourire taquin, ravi.
- Tu disais ? dit William, tourné vers Rose.
- Je disais, prêt pour l'entrainement de demain après-midi ? Ça fait trois jours que celui-là m'en parle, précisa-t-elle en désignant Derek du pouce.
- Celui-là, celui-là… il a un prénom, ronchonna l'intéressé.
Elle lui tira la langue et reporta son attention sur William.
- Toujours prêt ! confirma-t-il. Tu viendras ?
- Oh, euh…
Elle jeta un regard à ses amis qui tentaient de rester impassibles.
- On a vraiment beaucoup, beaucoup de devoirs, lança Anthony avec son air sévère. Rose, honnêtement, tu ferais mieux de rester pour étudier. Je suis sûr que l'équipe peut se débrouiller sans ton soutien de temps en temps…
Familiers du ton autoritaire du préfet, les autres ne trouvèrent pas sa réflexion déplacée. Reconnaissante, Rose lui sourit malgré elle. Si William trouva étrange qu'elle ne se rebelle pas contre l'avis de leur ami, il ne dit rien.
- Tu as raison, je sais bien… Va pour les devoirs alors, fit-elle, ajoutant une petite grimace pour faire bonne mesure. Désolée, ajouta-t-elle en se tournant vers William.
- Ah, c'est pas grave. Je me souviens de ce que c'est !
Elle lui sourit avec chaleur.
Quand ils quittèrent la table pour aller en Potions, Rose rattrapa Anthony qui marchait en tête.
- Merci, lui souffla-t-elle.
- Ah il faut bien tirer profit de mon autorité naturelle de temps en temps, se vanta-t-il avec humour.
- Non mais vraiment, marmonna-t-elle, le faisant rire. On est au point pour notre liste au fait ?
- Oui. Manque plus qu'un passage demain midi, Michael et Padma s'en occupent.
- Pour les légumes de ta chérie, se moqua-t-elle.
Il grimaça, le souvenir du regard accusateur de Lisa toujours frais dans sa mémoire.
- Elle t'aime quand même tu sais. Même si t'aimes pas les légumes.
Il rit doucement de nouveau et tint la porte à tout le groupe pour entrer dans la salle du professeur Rogue.
Plantée devant son armoire, Rose se mordillait la lèvre inférieure. Kietel était sur le lit et la regardait, poussant un couinement adorable de temps en temps, auquel elle répondait par réflexe.
Mandy observait son manège depuis un moment : Rose était à moitié habillée, figée, et marmonnait une phrase dès que Kietel poussait un petit cri. Ou le contraire. La blonde croisa les bras et ne put s'empêcher de sourire. C'était la deuxième fois depuis qu'elle la connaissait que Rose était désemparée sur la tenue à choisir. Lisa et Padma se rapprochèrent de Mandy et lui firent un sourire complice. Elles rejoignirent Rose.
- Un coup de main peut-être ? proposa gentiment Lisa.
Rose se retourna vers elle, l'air désespéré.
- Oui, pitié…
Mandy ne put retenir un rire. Rose eut un sourire dépité.
- Je sais pas quoi mettre pour… pour… la fête, termina-t-elle maladroitement.
- Pour te sentir jolie pour William ? suggéra Padma avec douceur.
Rose regarda ses pieds et marmonna un « oui » gêné.
- Commence par : quels vêtements, toi, tu aimes porter ? À part notre sublime uniforme, bien sûr, ironisa Mandy, qui le détestait.
- Franchement, plus je regarde mon armoire, plus je déteste tout.
- Ah c'est normal ça ! fit Lisa. C'est parce que tu réfléchis trop. Ça m'arrive tout le temps quand je veux me sentir belle pour Anthony, au bout d'un moment, je trouve toutes mes fringues moches.
Padma croisa les bras, en plein réflexion.
- Bon. Déjà, déterminons : on montre le haut ou le bas ?
- Ah oui, bon départ ça, valida Mandy. Jupe courte ? ou haut court ?
Lisa hocha la tête et se pencha dans l'armoire après un coup d'œil à Rose, qui semblait perdue.
- Oh regarde cette jupe en jean ! Elle est bien pour une soirée comme ce soir.
Les deux autres approuvèrent.
- Elle est vachement plus courte que l'uniforme ! nota Rose, qui avait oublié l'existence de cette jupe noire.
- Oui, c'est le but… rappela Mandy en soupirant. C'est une taille haute ?
- Oui. Oh je sais ce qui irait avec ! s'exclama Padma. C'est un haut rouge assez court, je t'ai déjà vue avec…
Disant cela, elle se pencha et farfouilla dans les piles.
- Voilà ! fit-elle triomphalement, brandissant le haut. Ça fait longtemps que tu ne l'as pas mis…
Rose hocha la tête.
- J'avais perdu trop de poids, c'était moche…
- Maintenant je suis sûre que ça ira, rassura Lisa. Regarde comme tu as regrossi !
- Ça c'est une phrase qu'il faudrait pas me dire, à moi… marmonna Mandy, faisant rire ses amies. Mais à toi on peut !
Rose considéra la tenue, posée sur son lit.
- C'est pas mal du tout… j'aime bien ce haut, avec le nœud devant et les manches évasées. Il n'est pas trop décolleté ?
- Essaie pour voir.
Elle l'enfila, retira son jean et passa la jupe en même temps.
- Ah c'est trop beau, lâcha Padma. Le décolleté est très bien. Et il n'est pas trop court, on ne verra ton ventre que si tu lèves les bras. Comme on voit déjà tes jambes, ça équilibre bien.
- La jupe te va super bien aussi. Tu veux mettre des collants ? Mais pas les moches de l'uniforme hein !
Les filles rirent.
- Oui des collants, mais promis, pas les gros en laine, s'esclaffa Rose. J'en ai des fins, noirs. Ça ira bien.
Lisa hocha la tête, satisfaite.
- Merci pour votre aide. Et vous alors ? Vous mettez quoi ?
Elles lui montrèrent leurs tenues pour la soirée. Les filles s'étaient moins pris la tête, ou alors elles avaient plus l'habitude que Rose… en tout cas tout était joli.
- Trop, trop mignon ton pull avec les perles, dit-elle à Mandy.
- Ah, c'est mon pull de séduction fétiche ça !
Elles rirent.
- Et tu veux séduire qui ? s'enquit Lisa.
Elle réfléchit.
- Franchement ? Je ne sais pas. Mais ! Au moins j'aurai mon pull porte-bonheur, quoi qu'il arrive !
Les trois autres lui sourirent.
C'est en plein déjeuner que Mandy se tourna vivement vers Rose.
- Chaussures !
- Non moi c'est Rose, tu te souviens ?
Ce qui déclencha l'hilarité de leur tablée. Mandy chassa la réflexion comme on chasse une mouche.
- Quelles chaussures tu vas mettre ?
- Ah ! Euh, ben…
Ses trois amies la fixaient, et les quatre garçons se regardèrent. Ils furent rassurés : aucun d'eux ne comprenait ce qui se passait.
- Et ne me réponds pas « comme d'habitude », parce que l'habitude, ce sont les chaussures…
- De l'uniforme, compléta Padma. On le saura que tu l'aimes pas celui-là !
Nouveaux rires.
- On regardera tout à l'heure d'accord ? fit Lisa, avisant les sixièmes qui arrivaient vers eux.
Elles hochèrent la tête et retournèrent à leur repas.
Finalement, Rose sélectionna des chaussures que Mandy jugea acceptables, et elles attendirent que l'équipe de Quidditch parte s'entrainer pour quitter leur chambre.
Elles descendirent retrouver Marc, Terry, Anthony et Nassim. Ils étaient déjà en train d'installer une table dans le coin que Marc avait mentionné, et de disposer des chaises en plus des fauteuils déjà présents.
- On pensait mettre à manger sur la table, fit Nassim. Mais plutôt à la dernière minute.
- Idem pour les... liquides, fit Anthony.
- Tenez, j'ai descendu la bannière, dit Marc en la dépliant.
C'était une banderole affichant « Joyeux Anniversaire William », qu'ils avaient tous signée discrètement pendant la semaine.
- Elle est parfaite, confirma Rose qui n'avait pas encore vu la version finale.
Ils l'accrochèrent de manière à pouvoir la dérouler uniquement à l'arrivée de William. Selena avait passé son matériel pour la musique aux garçons, et ils étaient en train de l'installer. Ils vérifièrent discrètement que tout fonctionnait. Satisfaits, ils se regardèrent, puis regardèrent l'heure. Dix-sept heures.
- Bon… dans une heure on amène le reste, on planque et on attend ok ?
- On les laisse rentrer, ils iront se doucher… ça nous laisse le temps de tout mettre sur la table.
- Et dès qu'il redescend, on lance les hostilités !
- OK. Les filles, on remonte ?
Elles partirent toutes en hâte et papotèrent en se préparant.
- C'est seulement la deuxième fois que ça nous arrive de nous préparer comme ça pour une soirée, souligna Padma. Avec le bal l'an dernier.
- C'est vrai… est-ce que c'est parce que nous sommes des rats de bibliothèque, ou parce qu'on vieillit ? se questionna Lisa.
Mandy rit.
- Honnêtement… probablement les deux…
Rose pouffa dans son coin. Elle enfila ses collants, ferma ses Doc Martens et fut prête.
- Tu t'attaches pas les cheveux ?
- Non… je vais les laisser libres…
Elle rougit un peu et Lisa devina.
- Il aime bien tes cheveux hein ? demanda-t-elle à voix basse.
- Oui…
Soudain, son amie la prit dans ses bras.
- Tu peux pas savoir comme ça me fait plaisir de te voir comme ça. L'année dernière, c'était… tellement…
Sa voix mourut.
- Je sais, murmura Rose à son tour. Merci.
Elles s'étreignirent encore un peu et se séparèrent quand Mandy déclara :
- Dix-huit heures !
Elles se chargèrent des provisions dissimulées dans leur chambre et retournèrent dans la Salle Commune. Les huit Serdaigles cachèrent tout derrière la table, sous une nappe sombre qui ferait très bien illusion. Nassim apporta une caisse bien fermée, qu'il glissa sous la table avec un sourire espiègle, faisant un clin d'œil à Padma qui le regardait faire, sans rien dire, son insigne de préfète cachée dans sa poche de jean.
Ils s'installèrent tous innocemment dans leur coin, papotant, jouant aux cartes qu'ils avaient amenées, patientant sagement. Rose poussa le vice jusqu'à faire semblant de faire ses devoirs, accompagnée par Anthony.
À dix-huit heures trente, la porte s'ouvrit et laissa passer l'intégralité de l'équipe de Quidditch. Derek était en tête et leur fit un clin d'œil. Il fit un petit crochet par leur coin car il ne résista pas à l'envie d'aller embrasser furtivement Terry, qui rougit jusqu'aux oreilles.
Le monde de Rose s'arrêta. Elle venait de poser les yeux sur William, qui entrait, en pleine conversation avec Roger. Il était décoiffé, apparemment essoufflé. Ses joues étaient encore rougies par le froid, et il souriait à ce que lui disait son capitaine. Elle détailla sa tenue de Quidditch, laissant son regard dévaler sur le corps musclé du Batteur. Il tourna la tête en direction de Rose, ou de quelqu'un d'autre, en tout cas son regard tomba sur elle. Ses yeux bleus brillaient et elle eut l'impression qu'il entrait dans son âme – ce qui était impossible. Des papillons battirent furieusement des ailes dans son estomac quand son sourire s'élargit en la voyant assise là, à même le sol, travaillant sur une table basse. Il esquissa un pas vers elle, quand Idriss l'empoigna fermement et dit, suffisamment fort pour que tout le monde entende :
- Douche. T'iras draguer après, là, tu pues.
Tout le monde rit, et il fit un sourire solaire à Rose, qui ne l'avait pas quitté des yeux. Il disparut dans son dortoir.
Rose fut sortie de sa rêverie par Mandy qui clama d'une voix pieuse :
- Par tous les mages, ça y est, c'est enfin arrivé.
Elle avait fermé les yeux et joint les mains. Les autres la regardèrent avec des yeux ronds, et Lisa souriait déjà, attendant la bêtise qu'elle allait immanquablement sortir.
- Merlin, soyez témoin de ce jour béni où une personne a réussi la prouesse de couper la parole à Rose en public.
Les autres pouffèrent de rire.
- On n'y croyait plus, ajouta-t-elle sur le même ton.
Pour toute réponse, Rose lui mit une tape sur le bras du plat de la main. La blonde rouvrit les yeux et rit. Terry se pencha vers Rose, une serviette imaginaire à la main.
- Attends Rose, bouge pas, il te reste un peu de bave là, je vais te l'enlever…
Elle éclata de rire en le repoussant, définitivement revenue sur terre. Elle avait les pommettes en feu. Elle se leva d'un bond et lissa sa jupe.
- Bon, on installe ou on se moque de moi ?
- On devrait faire les deux, proposa Lisa. Heureusement qu'il n'y avait pas d'encre dans ta plume…
Rose baissa les yeux. Sa plume était toute froissée et elle avait fait un trou dans le parchemin posé dessous. Elle tira la langue à Lisa et ils s'attelèrent à tout installer sur la table. Nassim ouvrit la malle et sortit des gobelets. Les amies de Cho Chang arrivèrent et les aidèrent, se joignant naturellement aux conversations. Tout le monde fut bientôt réuni, à l'exception d'Idriss et de William. Derek jeta un œil à la tenue de Rose et valida d'un pouce levé. Elle lui sourit.
- Il arrive, souffla Idriss en apparaissant, dévalant les marches à toute vitesse.
Dès que William arriva en haut des escaliers, ils s'écrièrent tous :
- SURPRISE !
Et la banderole se déroula. William mit une seconde à réaliser, puis s'exclama finalement :
- Mais quoi ! Trop bien !
Enthousiaste, il leva les bras au ciel, provoquant les rires de tout le monde.
Nassim alla vers lui et lui colla une bouteille de Bièraubeurre dans les mains.
- Joyeux anniversaire, mon pote, fit-il, tout content que la surprise ait fonctionné.
- Vous êtes trop forts ! Je m'y attendais pas, avoua William en souriant.
Ils se firent passer des bouteilles, Selena lança la musique.
- C'est pour ça que tu m'as dit de me faire beau ? lança-t-il soudainement à Idriss, qui sourit.
- Tu es en jean et en t-shirt, répliqua-t-il néanmoins.
- C'est mon plus beau t-shirt, contra William.
- Un t-shirt blanc !
- C'est mon plus beau t-shirt blanc ? fit William, faussement hésitant.
Marc leva les yeux au ciel, puis sa bouteille et clama :
- À William et ses dix-sept ans !
- À William ! reprirent les autres en chœur.
- À moi ! s'écria ce dernier, tout sourire, faisant rire le groupe devant lui.
Ils burent ensemble et Nassim fit un geste vers la table recouverte de nourriture.
- Servez-vous ! Et remerciez les cinquièmes sans qui cette table aurait été vide !
Derek leva sa bouteille déjà vide dans la direction de leur ami. William semblait tout joyeux et passait de personne en personne, discutant quelques instants à chaque fois. Malgré elle, Rose le suivait du regard, admirative devant ses indéniables talents sociaux, auxquels elle n'avait jamais réellement prêté attention jusque-là. D'autres septièmes les rejoignirent après un grand signe de la part de Roger.
- Alors William, lança l'un d'eux, quelle va être ta première action en tant que personne majeure et responsable ?
Ils s'esclaffèrent tous au qualificatif « responsable ». William fit mine de réfléchir, puis saisit de nouvelles bouteilles dans la malle de Nassim.
- Me mettre une caisse !
De nouveaux éclats de rire fusèrent, William déboucha quelques bouteilles et les fit passer à la ronde. Rose prit la boisson qui lui arrivait dans les mains mais ne but pas. Elle préféra écouter distraitement une conversation entre Selena et Lisa à propos de musique.
- Mais tu vois, je préfère leur album d'avant, celui-là est trop… commercial, moins original, disait la grande septième.
- Je suis d'accord. Mon préféré, c'est le quatrième album ! Je l'écoute toujours en boucle l'été, chez mes parents.
Rose sourit : elles parlaient des Bizarr'Sisters. Elle navigua vers la table, son estomac se rappelant soudainement à elle. Elle tomba nez à nez avec Cho Chang, qui lui sourit gentiment.
- Salut, fit son ainée.
- Salut, Cho. Alors l'entrainement ? Vous êtes prêts pour décembre ?
- Oh oui, je pense… avec la quantité de séances que Roger nous impose, pas le choix !
Rose eut un petit rire compatissant. Elle vit Derek faire une grimace derrière, et elle sourit un peu plus, sachant très bien que Cho volait très mal depuis quelques semaines. Les amies de Cho, Marietta, Isobel et Rebecca se joignirent à elle. Rose se surprit elle-même : elle resta très courtoise et les quatre filles n'étaient pas si niaises que ça. Ce qu'elle n'avouerait jamais à personne.
Lisa et Anthony étaient en pleine discussion avec des septièmes années et les interrogeaient sur la préparation aux ASPIC. Idriss les interrompit brusquement :
- Ah non hein ! On parle pas de cours pendant une fête d'anniversaire ! Le prochain qui parle d'étudier…
- Il boit un shot de whisky Pur-Feu ! s'écria Nassim, brandissant une bouteille de la malle.
Les septièmes émirent des sifflements admiratifs.
- Que voulez-vous, il fallait au moins ça pour les dix-sept ans de William, se justifia Roger en souriant.
- Tiens, je vous raconterais bien mes révisions pour l'ASPIC de Métamorphoses ! lança un septième.
- SHOT ! brailla Idriss en le servant.
Tout le monde le regarda avaler l'alcool d'un coup. Il se redressa sous les sifflets et les encouragements des autres. Mandy avait la main plaquée sur la bouche, amusée. Il lui fit un clin d'œil charmeur et elle rougit violemment. Selena administra une tape derrière la tête de son camarade.
- Couché, Luke.
Les cinquièmes années éclatèrent de rire, Selena leur fit un sourire.
- Désolée pour lui. Il est…
- Charmeur ? proposa Roger qui s'était glissé près d'eux.
- Dragueur ? fit un septième.
- Très relou ? enchaina une autre fille aux cheveux blonds.
- Insupportable, conclut Selena, faisant de nouveau rire les filles de cinquièmes.
Amusé, Terry sourit et reporta son attention sur ce qu'il suivait de près depuis le début de la soirée : William. Enfin, plus spécifiquement, l'attitude de William envers Rose. Il ne s'était pas encore approché d'elle, toujours accosté par quelqu'un. Il discutait joyeusement avec tout le monde, mais son regard retombait constamment sur la jeune fille, où qu'il soit. Il la dévorait franchement du regard dès qu'il se retrouvait seul – ce qui ne durait jamais longtemps. Dès qu'elle avait adressé la parole à d'autres garçons – les septièmes années –, Terry avait vu le Batteur se tendre un peu, encore plus concentré sur elle, répondant plus distraitement à Isobel et Marc.
Rose, elle, n'avait pas vu les regards de William, puisqu'elle essayait de ne pas trop le fixer. Le souvenir des moqueries de Mandy et Terry était encore frais et elle ne voulait pas se ridiculiser devant tout le monde. Nassim se glissa près d'elle.
- Dis-moi, Rose… t'aurais pas envie de parler des BUSE par hasard ? fit-il, pointant la bouteille de Pur-Feu du doigt. Non parce que…
- Les photos de vacances, c'est ça ? répliqua-t-elle avec humour.
- Tu lis dans mes pensées ! s'exclama-t-il.
Elle leva les yeux au ciel.
- Quelles photos de vacances ? demanda le septième qui avait qualifié Luke de « dragueur ».
- Soi-disant, Madame picole dans les bars pendant ses vacances, mais elle ne partage pas les photos ! résuma Idriss, taquinant ouvertement Rose.
- Et ça… fit Nassim, l'air triste. Ça me désole.
Rose éclata de rire.
- Si je vous dis qu'il n'y a pas de photos, vous me croyez ou pas ?
Ils firent un haussement d'épaules dramatique en soupirant, relançant l'hilarité des filles.
- J'ai une solution ! lança le septième année.
Comme Rose haussait un sourcil dans sa direction et dardait ses yeux verts sur lui, il eut un sourire en coin.
- Pardon, j'en oublie d'être poli. Owen.
Il tendit sa main qu'elle serra, le sourire aux lèvres.
- Rose.
- Donc, Rose… tu es là. Le Pur-Feu est là. Il y a bien un appareil photo dans le coin. Bon, d'accord, il n'y a pas de bar, mais honnêtement, est-ce si important ?
Mandy et Lisa ouvrirent la bouche de stupeur devant la proposition, avant de se reprendre et de rire avec Rose. Selena et Padma étaient déjà hilares.
- Peut-être plus tard, d'accord ? taquina Rose. Il faut que je me mette en condition d'abord, vous comprenez.
Comme les garçons hochaient gravement la tête, elle leva de nouveau les yeux au ciel. Elle regarda ses amies, marmonnant :
- Si je tombe, vous tombez avec moi, je vous préviens.
- On te suit, t'inquiète, rassura Mandy, follement amusée.
Rose tourna la tête et rata William de peu. Il venait de se relancer dans une conversation avec Isobel et Rebecca. Elle ne l'avait pas vu fixer le groupe qu'elle formait avec leurs amis et les septièmes, son regard bleu assombri.
Terry lui, suivait toujours leurs actes manqués du regard et souriait malgré lui. Derek se glissa près de lui.
- Qui est-ce que tu observes comme ça ?
Le brun se contenta de pointer Rose et William du menton.
- Ils ne se sont pas encore adressé la parole. Rose n'ose pas y aller – enfin c'est ma théorie. Et lui n'arrête pas de se faire accoster et n'arrive pas à aller vers elle. Pourtant il essaie.
Comme Derek attendait, il poursuivit :
- Il ne la lâche pas du regard, depuis le début. Quand ce septième lui a parlé, j'ai cru qu'il allait lui sauter dessus pour lui casser la figure, rigola-t-il doucement.
- À ce point ?
- Il n'est pas « attiré par elle » ou je sais pas quoi.
Derek fronça les sourcils, Terry clarifia à voix encore plus basse :
- Il est amoureux.
- Hein ?
- Raide dingue, je te dis.
- Je suis d'accord avec Terry, chuchota une voix supplémentaire.
Lisa était arrivée doucement derrière eux. Le brun lui sourit, content d'avoir du soutien. Derek se redressa.
- Bon.
Et il partit.
- Mais qu'est-ce qu'il fait ? s'étrangla Terry, le voyant se diriger droit vers William, attrapant deux bouteilles de bière au passage.
- Laisse-le faire, souffla Lisa en le retenant. Au pire, s'ils se battent, ça mettra de l'animation dans la soirée.
Il eut une mine scandalisée pendant qu'elle riait.
Derek, lui, venait de se planter naturellement devant William. Il lui tendit la bière.
- Tiens. Je me suis dit que tu devais en avoir marre de la Bièraubeurre, maintenant que t'es vieux.
- Ah, bonne idée, rigola William. Le gout sucré commençait à m'écœurer.
Ils trinquèrent et burent en silence.
- Pourquoi tu vas pas la voir ? demanda abruptement Derek.
William eut une expression de stupeur et éloigna le goulot de sa bouche. Il jeta un œil, presque malgré lui, dans la direction de Rose, qui papotait toujours avec ses amis.
- Je veux pas… la harceler, finit-il par dire. Elle viendra quand elle voudra non ?
- Non, fit fermement le blond.
- De quoi ?
- Elle viendra pas, pas ce soir.
Il regarda avec tendresse sa meilleure amie qui se passait une main dans les cheveux. Définitivement hébété, William baissa le bras et posa sa bière sur une table. Il avait perdu alors…
- Y'a trop de monde, poursuivit Derek. Elle vient de se rendre compte que tu es super populaire et elle ne va pas vouloir, je sais pas, s'afficher devant tout le monde je suppose. Au cas où tu l'envoies balader.
Allant de surprise en surprise, William se passa la main devant les yeux.
- Attends je comprends rien… trop de monde ? Elle est… timide… ?
Lui-même n'y croyait pas trop. Derek haussa les épaules.
- Pas sûre d'elle, plutôt. Donc… bouge-toi, conseilla le blond. Parce que, crois-moi, Zabini, il attend pas. Lui, il va la chercher.
William lui lança un regard noir, Derek leva les mains :
- Me regarde pas comme ça, c'est vrai.
Son ami soupira et reprit sa boisson, avala quelques gorgées. Puis il eut un sourire.
- Tu veux que je te dise ? Je pensais que tu venais me casser la gueule, avoua-t-il.
Derek attendit la suite, les sourcils froncés, un petit sourire aux lèvres.
- Parce que j'arrête pas de la regarder. Je peux pas m'en empêcher, confia-t-il de nouveau.
Le blond se mit à rire.
- Mais non. En revanche, reprit-il très sérieusement, si tu lui fais du mal…
- Oh, je me doute, fit William, résigné.
Il posa sa bouteille vide sur la table.
- Bon, puisque faut tout faire pour Madame l'aristo alors…
Il murmura un merci à un Derek souriant et traversa la petite foule, ses yeux rivés sur le dos de Rose. Il ne vit pas Derek se tourner vers Terry et Lisa et lever les deux pouces en l'air, ravi ; il ne prêta pas non plus attention à Rebecca qui voulait encore lui parler. Il entendait juste le rire de Rose qui s'élevait du groupe, puis sa voix :
- Mais non ! Et comment tu t'es sorti de ça au juste ?
- De l'embuscade ? Eh bien, j'ai sorti ma baguette et j'ai crié…
- « William, au secours », avant de partir se cacher derrière moi, bien sûr, compléta William en les rejoignant.
Rose se retourna et rit en voyant son air moqueur dirigé sur Idriss.
- N'importe quoi ! protesta ce dernier. Je me suis battu bravement.
- Mais oui, on sait, t'inquiète pas, rassura Mandy, faussement compatissante. Tu as été brave.
- Caché derrière William, marmonna Marc une fois de plus, multipliant leurs rires.
Idriss fit semblant d'être offensé et se tourna vers le brun :
- Tiens, te voilà toi ! Tu draguais qui encore ?
- Personne, fit-il en levant des mains innocentes.
Il jeta un regard rapide à Rose. Elle souriait toujours.
- Alors, il parait que c'est vous qui avez amené de quoi manger ? dit-il aux cinquièmes, qui approuvèrent. Comment vous avez fait ?
- Ah, ça…
- Secret professionnel, termina Anthony.
- Je le savais qu'il se passait des choses pas nettes dans votre dortoir, fit William d'un air accusateur. Sinon vous passeriez pas la moitié de votre temps tous les huit là-dedans.
Les cinquièmes se lancèrent des sourires complices.
- N'insiste pas, tu ne sauras rien, dit Rose.
- Très bien… Bon, en attendant, j'ai faim.
Il tendit son bras à Rose, très chevaleresque.
- Guide-moi.
Elle rit et glissa sa main contre son bras, le menant vers la table. Elle désigna les plats qui la recouvraient et dit simplement :
- Voilà.
- Voilà ? C'est tout ! Tss. Tu n'es pas une bonne hôtesse, taquina-t-il.
Elle haussa les épaules.
- Tu sais bien… j'ai des gens pour faire ça à ma place, sourit-elle finalement, ce qui fit rire William à son tour.
Il se servit d'un sandwich et l'avala en un temps record, pendant que Rose lui expliquait qu'ils avaient tous signé la banderole et qu'il pourrait la garder après.
- C'est gentil ça… Tu as signé où toi ?
Pendant qu'elle montrait sa signature, il engouffra deux sandwiches supplémentaires.
- Une vraie signature de noble, remarqua-t-il, les yeux pétillants de malice.
Elle lui fit une petite tape sur le bras.
- Tu as fini oui, répliqua-t-elle, ce qui ne fit qu'accentuer son air moqueur.
- Tu veux un truc à boire ? demanda-t-il, se penchant vers la caisse.
Il sortit une bière pour lui et attendit la réponse de Rose.
- Euh… genre, un soda ?
Il fouilla dans la caisse.
- Ah, y'a rien sans alcool…
Il soupira.
- C'est tout Nassim, ça, sourit-il encore. Quand il a une idée dans la tête…
- Oui ? fit l'intéressé qui venait d'apparaitre. Quand j'ai une idée dans la tête ?
- Tu l'as pas ailleurs ! rétorqua William. Pas de sans alcool alors ?
Son ami eut l'air contrarié.
- Ben, si… pas dans cette caisse ?
Il réfléchit un instant.
- Ah mais si ! Dans notre chambre, la seconde caisse ! Dans la précipitation, j'ai oublié de descendre les deux.
- Pas de problème, je vais chercher ça. Sous ton lit ?
- C'est ça, confirma son ami. Tu vas t'en sortir seul ?
- Mais oui. Je prends une assistante avec moi.
- Qui, moi ? fit Rose, éberluée.
- Ça te fera les bras ! décida le brun. Allez, monte !
Rose leva les yeux au ciel et traversa la pièce. Nassim rattrapa William avant qu'il ne disparaisse à son tour.
- Ramène un autre Pur-Feu aussi, fit-il. La bouteille est presque vide. Sous le lit d'Idriss.
- Ça marche.
Et il partit vers Rose, sans voir Nassim et Idriss se taper dans la main, ravis que leur plan se soit déroulé comme prévu.
Elle l'avait attendu en bas des marches et le regarda la rejoindre.
Essaie de ne pas trop baver, cette fois…
Son sourire lui échappa. William lui présenta de nouveau son bras, qu'elle prit avec amusement.
- Tu es content de la fête alors ?
- Très, confirma-t-il. Vous avez fait un bon boulot, je ne m'y attendais vraiment pas. Ça n'a pas été trop difficile de convaincre Anthony ?
- Pas du tout, répondit-elle en riant. Je crois qu'on avait tous besoin de décompresser.
William ouvrit la porte de son dortoir et laissa Rose entrer. Elle resta muette.
- Mais… qu'est-ce que c'est… que ce bordel ?
Elle porta la main à la bouche, essayant de ne pas rire. On aurait dit qu'une tornade était passée dans la chambre et avait tout retourné. Il eut un air embarrassé.
- Ah, désolé… on n'a pas eu le temps de ranger…
Elle pouffa de rire.
- Depuis combien de temps ?
Il rit devant son air moqueur.
- Tu peux aller sous le lit d'Idriss ? Ils m'ont demandé de ramener une bouteille de Pur-Feu. Je vais chercher sous celui de Nassim pour la réserve.
Rose se dirigea vers le lit que William pointait et se pencha. Elle finit par se mettre à genoux, la tête quasiment par terre. Elle vit un sac en papier marron et tendit le bras pour l'attraper, se tortillant quelques instants le temps d'y arriver. À son grand soulagement, c'était le bon sac et elle l'attrapa, se redressant peu à peu, remettant de l'ordre dans ses cheveux et lissant sa jupe.
William, subjugué, ne bougeait plus depuis qu'elle avait commencé à se pencher. Il avait la bouche entrouverte, et eut le réflexe de la refermer quand Rose se tourna vers lui. Elle haussa un sourcil.
- Ben alors ?
- Euh, oui, oui, le lit, tout ça…
Il plongea sous le lit de Nassim, mais se redressa aussitôt sur les genoux.
- Je t'ai dit que je te trouvais belle ce soir ?
Elle ouvrit la bouche de stupeur et secoua la tête machinalement.
- Tu es belle ce soir. Encore plus que d'habitude, ajouta-t-il, satisfait du rouge qui s'installait sur les pommettes de Rose.
- Merci… marmonna-t-elle.
Il lui jeta un dernier regard, glissa ses yeux le long de son corps, et disparut de nouveau sous le lit. Elle resta bouche bée quelques secondes, puis pour s'occuper, ouvrit le sac en papier qu'elle tenait. Rose sortit la bouteille du sac et la contempla un instant, avant de se décider. Elle retira le bouchon et renifla le liquide ambré. Elle ne put retenir une grimace qui fit rire William, à genoux devant une caisse en bois.
Rose le regarda, amusée.
- T'as jamais essayé ? demanda-t-il.
- Non… déjà, parce que je n'ai pas l'âge, dit-elle sévèrement. Ensuite…
- Ensuite ?
- Parce que je me suis dit, imagine ça me rend malade ? Devant tout le monde ?
Elle eut une nouvelle grimace, dégoûtée cette fois. Il sourit, et fut soudainement inspiré :
- Tu veux qu'on essaie ? Maintenant, ensemble, je veux dire ?
Son sourcil se haussa encore, jaugeant la proposition.
- Pourquoi pas…
- Ne te force pas hein, ajouta-t-il précipitamment. C'est juste que je me suis dit… là, tu n'es pas devant tout le monde. Et la salle de bains n'est pas loin. Mais c'est pas une obligation.
Elle lui sourit.
- OK. J'ai envie d'essayer.
- Je t'accompagne alors.
Il jeta un œil autour de lui, repéra la carafe d'eau près d'une fenêtre et il saisit deux gobelets propres. Il lui en tendit un pour qu'elle serve.
- Stop, stop ! s'écria-t-il en riant.
- Pardon…
- Je vais le prendre pour moi celui-là. Mets-en moins pour toi.
Elle se laissait guider comme une élève studieuse. William la trouvait irrésistible avec son air concentré et il fit un pas en arrière.
- Prête ?
- Prête, confirma-t-elle après avoir soigneusement rebouché la bouteille et l'avoir posée par terre.
- T'es pas obligée de boire cul sec, précisa-t-il soudainement. Prends ton temps.
- Mais c'est comme ça qu'on fait non ?
Elle haussa brièvement un sourcil amusé et porta le verre à ses lèvres, attendant le feu vert.
- Ok, go !
Ils avalèrent le liquide ambré en même temps.
- Oh ! hoqueta Rose, prise de court par la sensation de l'alcool fort dans sa gorge, par la particularité du Pur-Feu.
Elle crut avaler des flammes et eut un autre hoquet. Un éclair zébra le ciel orageux et détourna l'attention de William une seconde. Quand il revint poser les yeux sur Rose, il lâcha son verre vide, qui atterrit lourdement sur la moquette bleue et roula.
L'animal en face de lui le fixait, paralysé. Comme le Serdaigle ne bougeait pas, la queue de la panthère fouetta l'air et elle fit quelques pas en arrière, s'enfonçant dans l'ombre d'un lit.
Bientôt, William ne la vit plus, et il réagit enfin. Il se décala un peu pour la voir, mais la pièce était trop sombre.
- Te cache pas… viens, encouragea-t-il doucement.
Il ne savait pas si elle risquait de se vexer s'il s'accroupissait, alors il resta debout, tendant son bras dans sa direction par réflexe.
- Viens… répéta-t-il sur le même ton.
Un museau apparut finalement, venant timidement vers lui. Elle se dirigeait lentement vers la lumière, vers sa main tendue. Elle s'arrêta à une cinquantaine de centimètres de lui, indécise. Et s'il paniquait ? Et s'il hurlait ? Et s'il l'attaquait ? Et s'il… fuyait ?
Sa panique devait se voir dans ses yeux car William murmura :
- Tout va bien… tout va bien.
Elle s'approcha encore et s'arrêta à quelques centimètres de lui, le laissant décider s'il voulait la toucher ou pas. Elle s'assit.
William laissa son bras retomber le long de son corps.
- Ça alors…
Puis soudain, il éclata de rire. Déconcertée, elle pencha la tête sur le côté.
- « Mon chat »… je viens de comprendre !
Elle remua ses moustaches, amusée. Il la regarda de nouveau.
- Tu sais ce qui est bien ?
Il laissa passer un silence.
- Tu peux pas répondre ! Alors, mon petit chaton, ça va ? gazouilla-t-il comme s'il parlait à un tout petit animal. Tu es un très mignon chaton inoffensif, a-do-rable.
Elle retroussa brièvement ses babines sur ses crocs, ce qui redoubla l'hilarité de son ami. Il finit par lui tendre de nouveau la main. Elle n'hésita pas plus longtemps et colla son museau dans la paume offerte, ce qui eut le mérite de le faire taire. Elle frotta sa tête contre ses doigts, un ronronnement démarra automatiquement. Il sourit.
- Heureusement que tu n'as pas gouté à ça en bas devant tout le monde !
Il s'agenouilla finalement et prit la grosse tête poilue entre ses deux mains, ne pouvant s'empêcher de gratouiller derrière les oreilles. La panthère fermait à demi les yeux, ravie de l'attention. William arrêta son mouvement et la regarda profondément.
- Merci.
La seconde d'après, il entendit « Non, c'est moi qui te remercie » avant que des lèvres douces se posent sur les siennes. La surprise passée, il répondit au baiser de Rose, tenant toujours son visage entre ses mains. Elle rompit le baiser la première et il la relâcha, s'éloignant un peu. Il vit des larmes au bord de ses yeux et s'affola.
- Pourquoi tu pleures ? Je t'ai fait mal ? C'est le coup du chaton inoffensif c'est ça ?
Elle rit et chassa les larmes d'un geste.
- Pas du tout. Pardon, je sais pas ce qui me prend, chuchota-t-elle.
Rose regarda par terre.
- J'ai eu peur, je crois.
- De quoi ?
- Que tu me rejettes, avoua-t-elle d'une toute petite voix.
- Rose, non… non, répéta-t-il, la prenant subitement dans ses bras. Si tu partais boire des shots dans des bars avec des inconnus, peut-être…
Elle rit dans son cou, s'installa contre lui.
- Mais pas parce que tu es… toi. Jamais.
Elle hocha lentement la tête, soulagée. Elle caressait machinalement ses côtes de son pouce. Il savoura le moment.
- Dis, si tu pleures à chaque fois que je te touche… je vais finir par me vexer, prévint-il, la faisant rire encore.
- C'est pas forcément négatif, taquina-t-elle. C'est peut-être parce que la sensation est si incroyable que j'en pleure.
- Je préfère ça, marmonna-t-il.
Il sentait encore la caresse sur ses côtes, et maintenant elle passait sa main dans son dos en plus.
- Arrête, chuchota William, touchant le pouce de Rose.
- Pardon, fit-elle, subitement gênée, stoppant tout mouvement.
- Ne te méprends pas, ajouta-t-il. J'adore ça.
Elle rougit un peu plus.
- Mais c'est en train de me rendre fou, termina-t-il en la regardant.
Rose sourit avec douceur, et il se pencha sur ses lèvres, pour l'embrasser une nouvelle fois. Elle pencha la tête en arrière et ferma les yeux alors qu'il caressait son visage et prenait sa bouche. Son bras se resserra autour de la taille de Rose et il la plaqua contre lui, laissa son autre main descendre du visage au cou, du cou au bras, et passer sur sa hanche, qu'il enserra.
Rose fit remonter sa main le long de son torse, sentant chaque côte, chaque muscle rouler sous ses doigts. Elle s'accrocha à lui, à ses épaules et son cou, pressant ses lèvres contre lui, le souffle court. Les mains de William glissèrent entre sa jupe et son haut rouge, trouvèrent leur place sur la peau de Rose. Sa langue caressait celle de Rose, encore et encore, entre deux baisers humides. Les doigts de William s'étalèrent dans son dos, ses pouces se glissèrent sous la ceinture de la jupe, touchant sa peau avec langueur. Il n'eut pas conscience qu'il glissait son genou entre les jambes de Rose pour mieux se coller à elle. Sa jupe remonta sur ses cuisses. Il ne résista pas et caressa l'une d'elle de sa main, sur le collant fin.
Elle soupira d'aise et sa main quitta l'épaule musclée pour glisser le long du t-shirt blanc, se frayer un chemin sous le tissu. Rose remonta lentement le ventre de William, caressant la peau chaude avec délice. Elle quitta sa bouche pour aller embrasser son cou, il gronda de plaisir, ondula inconsciemment ses hanches. Il sentit sa bouche revenir contre la sienne et sa main lâcha la taille de Rose, pour aller se perdre à son tour sous son haut, remonta de plus en plus, effleura un autre tissu…
Une alarme sonna au fond de sa tête et il se figea. Maudissant sa conscience qui l'interrompait à un moment délicieux, il soupira en s'éloignant lentement de Rose. Il récupéra ses propres mains baladeuses et les glissa dans les cheveux de Rose, les écartant de son visage pour l'embrasser encore. Il ne voulait pas qu'elle enlève ses doigts de sa peau, sous son t-shirt… mais bientôt la caresse disparut, avec la main de Rose. Il libéra sa jambe, prisonnière de celles de Rose, lui rajusta sa jupe. Elle le regardait faire sans rien dire. De toute façon, elle n'aurait pas pu parler si elle l'avait voulu.
William retrouva la parole le premier et marmonna :
- Et qu'est-ce que je fais, pour mon premier jour de majorité ? J'abuse d'une mineure, bravo moi…
Enfin, Rose rit. Elle secoua la tête, remit son haut en place, lissa le t-shirt blanc de William.
- Je te dirais bien que je suis désolé, mais je sens que tu n'apprécierais pas, vu mon historique, lança-t-il avec son sourire charmeur.
- Je confirme, répliqua-t-elle d'un air qu'elle voulait sévère, mais qui ne fut qu'attendri.
- Donc, pas désolé.
- Moi non plus, fit-elle, le regardant droit dans les yeux, remettant ses cheveux en place.
- Ne me regarde pas comme ça ou je ne réponds plus de mes actes, murmura-t-il, posant ses lèvres sur les siennes, les mordillant fiévreusement.
Elle étouffa un gémissement. Elle mourrait d'envie qu'il ne réponde plus de ses actes. Il caressa son bras distraitement.
- Et je recommence…
Il se recula et lui fit un clin d'œil.
Ferme la bouche, s'ordonna-t-elle.
- Typiquement masculin ça, continua-t-il. Trois verres de Bièraubeurre et ça se maitrise plus avec une jolie fille…
Elle pouffa.
- Trois verres de Bièraubeurres, vraiment ? demanda-t-elle, un sourcil levé haut. Dans toute la soirée ?
- Pour commencer la soirée… fit-il, penaud.
Elle croisa les bras, faussement fâchée.
- Et tu vas te souvenir de tout ça demain ou tu auras tout oublié ?
Il lui renvoya son sourire le plus aguicheur.
- Ça, ma Rose… que ce soit trois verres ou cinquante-six, c'est impossible à oublier.
Elle rougit une nouvelle fois et il ne résista pas à lui faire un baiser rapide. Elle se dérida, il caressa son sourire de ses doigts.
- Il faut vraiment que j'arrête de te toucher, sinon on va passer le reste de la soirée ici…
- D'accord… souffla-t-elle, hypnotisée.
- Rose, non ! s'exclama-t-il, la faisant sursauter. Il faut dire non voyons !
Elle éclata de rire. Il se releva et l'aida à son tour, la soulevant rapidement du sol, avec un peu trop de force.
- À chaque fois j'oublie que tu es toute mince, grogna-t-il en guise d'excuse.
- J'ai grossi je te signale.
- J'avais remarqué, confirma-t-il en la caressant du regard, s'arrêtant sur chacune de ses courbes, la faisant encore rougir.
- Arrête, murmura-t-elle. Sinon, on ne va jamais quitter cette chambre.
Il se racla la gorge.
- Oui, alors, justement, je te laisse partir devant ? Tu peux ramener le Pur-Feu, je descendrai la caisse tout seul.
- Mais…
Elle s'arrêta une seconde.
- Tu n'avais pas besoin de moi pour les sodas, n'est-ce pas ?
Il eut un sourire coupable.
- Pas vraiment. J'ai vu une opportunité de rester seul avec toi et de…
- D'abuser d'une mineure, rappela-t-elle en souriant.
- Non ! ça, c'était pas prémédité.
Elle haussa un sourcil.
- Je ne vais pas te mentir, j'espérais que ça arrive, précisa-t-il.
- Moi aussi, souffla-t-elle.
Il esquiva son regard.
- Je ne te regarde plus. Même, je t'ignore. C'est mieux pour ta pureté de mineure.
- N'importe quoi ! s'exclama-t-elle, à moitié irritée, à moitié hilare.
Elle fit une moue et croisa les bras.
- Embrasse-moi encore une fois. Et je pars.
- Comment je suis censé résister moi ? grogna-t-il en l'attirant contre lui.
Au lieu de lui donner un baiser, il mordilla d'abord ses lèvres, les lécha doucement. Rose frémit entre ses bras. Il s'arrêta, ne bougea pas.
- C'est qui, Owen ?
- Qui ça ? murmura-t-elle, ailleurs.
- Exactement, répliqua-t-il férocement.
Et il posa sa bouche contre la sienne, pendant qu'elle souriait. Il embrassa ses lèvres, son cou offert, alla même jusqu'à sa clavicule. Il la tenait contre lui, ses bras enroulés à sa taille, elle était agrippée à ses épaules, comme souvent. Un dernier baiser sur ses lèvres rougies qu'il suçota et il la relâcha.
- Bon maintenant Rose, tu arrêtes de me sauter dessus, ça devient indécent.
- Pardon.
Ils se sourirent et attendirent quelques secondes. Rose n'était pas sûre de pouvoir bouger les jambes sans que ses genoux cèdent. Elle respira profondément, sans regarder William. Lui non plus ne la regardait pas, attendant que le tumulte en lui s'apaise.
- J'y vais, fit-elle d'une petite voix, ramassant la bouteille par terre.
Rose redescendait discrètement les escaliers quand Selena s'exclama :
- Ça suffit la rigolade ! Maintenant vous allez bouger vos popotins !
Une nouvelle musique, bien plus entrainante, résonna dans la salle. Gloussant, Rose atteignit la table et posa discrètement la bouteille dessus. Nassim, qui servait de nouveaux verres, la regarda et lui lança d'un air goguenard :
- Bah alors ! Vous en avez mis du temps !
- Les bouteilles étaient bien cachées, rétorqua-t-elle, un sourire aux lèvres.
- Ah ça, explique tout ! fit-il sans se départir de son sourire moqueur.
Elle levait les yeux au ciel lorsqu'elle entendit Padma hurler, victorieuse :
- Anthony a parlé des cours ! Enfin !
- Shot ! cria alors Rose, levant bien haut la bouteille de Pur-Feu.
William, en haut des escaliers avec la deuxième caisse de boisson, gardait les yeux rivés sur elle alors qu'elle levait les bras au ciel, comme hypnotisé par la peau qui apparut lorsque son haut se souleva.
- Eh l'amoureux ! Tu veux un coup de main pour ta caisse ?
William lança un regard amusé à Idriss qui l'avait interpellé du bas des marches.
- Tu peux la lâcher des yeux tu sais, elle ne va pas s'envoler ta dulcinée.
Son ami rit et ils transportèrent la boîte jusqu'à la table.
Pendant ce temps, Anthony remonta ses lunettes sur son nez.
- Très bien, fit-il courageusement.
- T'es pas obligé, lui chuchota Lisa.
- Si.
Rose remplit un verre à liqueur à ras bord et le tendit impérieusement à son ami, pendant que le reste du groupe les regardait.
Anthony prit une inspiration, et avala le contenu de son verre d'un seul coup, puis le leva bien haut en signe de victoire, avant de le claquer dramatiquement sur la table. Des hourras l'accompagnèrent. Lisa avait la main sur la bouche, se retenant de rire.
Anthony la regarda et lui saisit le bras, l'approchant de lui sans rien dire. Il se pencha vers elle et l'embrassa passionnément, devant tout le monde, ce qui ne leur arrivait jamais.
Tous les Serdaigles étaient hilares. Rose sentit une main dans le bas de son dos, pendant que William s'installait à ses côtés. Elle lui sourit. Puis fronça les sourcils. Il comprit immédiatement.
- Juste pour ce soir, ma Rose. Juste pour ce soir, plaida-t-il.
Son sens commun venait sûrement de partir en congés, car sa réponse fut insensée.
- D'accord, murmura-t-elle.
Comment résister à sa main contre elle, sa voix caressante, son regard brillant, et cette façon qu'il avait de dire « ma Rose » ?
Il eut l'air tout satisfait et sourit, sa main lui caressant doucement la peau.
- Bon maintenant que les préfets sont hors-jeu… commença Nassim. Selena, monte le son !
- Oh ouais, confirma cette dernière.
Rose fut entrainée par Mandy et Padma dans une danse sans queue ni tête mais qui les fit beaucoup rire. Bientôt tout le monde dansait un peu n'importe comment, discutant fort par-dessus la musique, buvant entre deux chansons ou même pendant. Rose avait bu une bière, qu'elle avait trouvée amère. Elle avait tout de même terminé sa bouteille sous le regard amusé de Derek.
- Mais dis donc… finit-il par lui dire, le regard pétillant.
Elle leva les mains devant elle.
- C'est toi-même qui l'a dit : je ne suis pas une fille bien.
Il éclata de rire et l'embrassa sur la tempe.
- Tu es une fille très bien. Pourquoi vous n'êtes pas redescendus en même temps ? Tout va bien ?
- Oui, tout va très bien. Euh, je ne sais pas… C'est lui qui m'a dit de partir devant.
Derek médita un instant puis eut son sourire espiègle.
- Ah, mais bien sûr. La fougue.
- Hein ?
- Il était… plein de fougue… il fallait que ça se calme, tu comprends ?
- Oh ! compris. Tu crois ?
- Aucun doute, vu qu'il te regarde comme si tu étais comestible depuis tout à l'heure.
Et ils se mirent à pouffer. Comme elle jetait un regard vers William, ce dernier lui sourit et fit mine de la rejoindre, quand un Roger bien éméché le saisit et brailla :
- William ! T'as rien à boire ! Allez, viens !
Le brun se laissa entrainer vers la table après un clin d'œil à Rose, qui laissa échapper un nouveau rire. Lisa et Anthony se pelotaient régulièrement dans un coin, et Mandy et Padma avaient lancé des paris pour savoir dans combien de temps ils allaient disparaitre dans le dortoir des garçons. Rose dansait avec les filles de sixième et de septième. Elles riaient beaucoup, et heureusement que Rose ne vit pas les regards très intéressés que certaines d'entre elles lançaient vers la star du jour, en train de partager une nouvelle bière avec les autres joueurs de Quidditch. Des garçons rejoignirent les filles sur la piste improvisée, poussés par Selena qui voulait voir tout le monde danser. Marc entraina Rose sur une nouvelle chanson, la faisant tourner jusqu'à ce qu'elle éclate de rire et lui échappe par mégarde. Elle avait virevolté trop loin de lui. D'autres mains la rattrapèrent et elle continua à danser, dans un joyeux brouhaha de danseurs plus ou moins gracieux.
Un peu à l'écart, William avait arrêté de converser avec ses équipiers, encore absorbé par Rose. Il fut rapidement évident à Derek qu'il ne regardait pas que Rose, vu la tête sombre et le regard assassin qu'il commençait à avoir. Le grand blond chercha sa meilleure amie dans la foule et la vit, se trémoussant avec Owen et leurs amis. Owen était proche de Rose, pas trop au gout de la jeune fille qui ne lui prêtait pas spécialement attention, mais beaucoup trop pour celui de William.
Désinhibé par l'alcool, il posa bruyamment son verre sur une table et croisa les bras, incapable de maitriser sa jalousie. Voyant Derek qui le regardait, il ronchonna :
- Lui, un de ces jours… je le démolis.
Derek éclata de son rire sonore. Il réfléchit une seconde et eut un sourire joueur.
- Viens. On va lui montrer qui c'est le patron.
Il empoigna son ami et l'entraina au milieu de la piste, pour se planter devant les septièmes années.
- Luke ! brama Derek. Fini la drague, on joue maintenant !
Intéressé, Luke arrêta de danser et attendit la proposition du grand blond, qui se saisit d'un jeu de cartes qui trainait dans le coin.
- OK, fit le plus âgé, l'air amusé.
Tous les autres s'étaient immobilisés, Selena avait même baissé le son.
- On joue à quoi ?
- Plus ou moins, annonça Derek en montrant le paquet de cartes.
Aussitôt, Nassim partit chercher des verres, pendant que d'autres prenaient une petite table, l'installait au milieu et ajoutait des chaises.
- Qui est ton équipier ?
- Lui, répondit Derek en désignant William du doigt. Toi ?
Luke jaugea ses amis. Roger était clairement trop éméché pour être utile.
- Owen.
Idriss posa théâtralement plusieurs verres pleins sur la table, devant les deux garçons assis.
- Voilà les munitions.
Terry leva les yeux au ciel, et Rose, bien échauffée et très sérieuse, posa ses mains sur les épaules de Derek, debout derrière lui.
- Deux équipiers ? s'étonna Owen.
- Non. Elle, c'est ma coach.
Rose leur fit un sourire féroce en massant les épaules de son ami. Nassim resta debout entre les deux participants et fit office d'arbitre.
- Plus petite carte : le deux. Plus grande : l'As. Celui qui devine juste, ne boit pas. Celui qui a tort, boit. Trois gorgées par carte, cinq pour valet, dame, roi, as.
Les deux garçons s'affrontèrent du regard en opinant. Leurs amis ricanaient ouvertement.
- Le premier à terminer les six verres passe la main à son équipier. Le nouvel équipier a six nouveaux verres. Le premier à abandonner passe la main à son équipier. L'équipier doit terminer les verres restants en plus des siens.
Tout le monde était très attentif et hochait la tête à tout ce que Nassim disait. Rose se pencha vers l'oreille de Derek et lui murmura quelques paroles que personne n'entendit. Il lui fit un petit sourire presque coupable.
Et le jeu commença, avec Idriss qui distribuait les cartes et son cousin qui surveillait.
- Noire ou rouge ? demanda Idriss.
- Rouge ! fit aussitôt Derek.
Il retourna un trois de carreau. Luke prit un des verres et avala ses trois gorgées réglementaires.
- Plus ou moins ? fit Idriss vers le septième.
- Plus.
Un dix de trèfle fit son apparition, Derek sourit et but. Ainsi, à chaque carte, l'un ou l'autre des participants buvait dans un de ses verres. Les autres étaient toujours autour, riant et faisant des commentaires plus ou moins encourageants. Dès qu'elle sentait les épaules de son ami se détendre, Rose retournait murmurer à son oreille. À chaque fois, il reprenait du poil de la bête et jouait plus férocement. Terry avait un air de plus en plus inquiet qu'il ne parvenait pas à cacher, malgré un sourire indulgent qui flottait sur ses lèvres.
Bientôt, Derek, qui tenait apparemment très bien l'alcool, n'eut plus qu'un verre devant lui, tout comme Luke. Rose regarda le septième avec un peu de dédain et lâcha :
- Tu vas perdre.
- Déloyal ! cria Owen. La coach adverse démotive mon partenaire.
Sous les huées, Nassim leva les mains pour demander le silence. Il réfléchissait à une sanction, l'air faussement sérieux.
- La sanction du juge… est que Rose doit boire le dernier verre de Derek ! annonça-t-il à la cantonade. Sinon, le participant sera disqualifié et Rose renvoyée de son poste de coach.
- Oups, fit cette dernière.
Elle se pencha de nouveau pour marmonner à l'oreille de Derek, qui la regardait, hébété par ce qu'elle racontait. Il répliqua sur le même ton :
- Franchement, mon chat… ça vaut le coup non ?
- Tu es beaucoup trop éméché pour m'être d'un quelconque soutien, râla-t-elle.
Il rit. Elle réfléchit. Bon, ce n'était que de la bière dans ces verres. Et maintenant, elle en connaissait le gout. Pas de risque d'être prise par surprise. Déterminée, elle releva la tête et fixa Nassim.
- Nous acceptons.
Il y eut des cris d'acclamation et des sifflets autour d'eux. William croisa son regard et sembla sur le point de faire quelque chose, mais elle releva fièrement la tête et haussa le sourcil. Il sourit en secouant la tête.
Rose se retourna vers Owen, qui lui tendait le verre plein, un sourire aux lèvres. Elle le prit, en considéra le contenu un instant, puis, cramponnée à l'épaule de Derek, porta le gobelet à ses lèvres et commença à boire. Elle força son cerveau à déconnecter et but, aussi vite qu'elle le put.
- C'est incroyable ! commenta Idriss, dramatique. La coach de l'équipe rouge termine le verre plus rapidement que les participants eux-mêmes !
Il fit une pause, laissa Rose terminer sous les rires.
- C'est une victoire de l'équipe rouge, tous les verres sont vides ! clama-t-il lorsque Rose leva le gobelet vide vers le plafond, récoltant sifflets et applaudissements dans l'assistance.
Derek siffla avec les autres, puis, cédant sa place à William :
- Je passe la main à mon partenaire ! annonça-t-il. Barman, six verres pleins s'il vous plait !
Il ne vacillait même pas quand il se leva et embrassa la joue de Rose.
- Tu vois, pas de fauve… murmura-t-il, récoltant un sourire. Allez, coach, reprit-il d'une voix forte, encore un participant à encourager !
Six verres avaient fait leur apparition devant William, qui s'était assis, l'air concentré. Rose reprit sa position derrière la chaise mais n'osa pas mettre ses mains sur ses épaules, les laissant reposer sur le dossier.
Le jeu reprit, et Luke termina bravement son sixième verre, pour laisser la place à Owen, qui s'assit avec un sourire satisfait. Quelques cartes défilèrent avant que William ne tourne la tête vers Rose :
- Et mes encouragements à l'oreille alors ? réclama-t-il, faisant rire les autres.
Rose leva les yeux au ciel et se pencha.
- Vous êtes de vrais gamins, murmura-t-elle pour lui seul. C'est mon encouragement pour le moment.
Il eut un petit rire et but cinq gorgées comme un roi se présentait à lui, contrairement à sa prédiction. Il avait parfaitement remarqué le petit jeu de son adversaire : à chaque fois que William buvait, Owen regardait Rose droit dans les yeux. Il fut même certain de l'avoir vu faire un clin d'œil alors qu'il vidait son deuxième verre. Ce que William ne pouvait pas voir, c'est que Rose, prenant toujours son rôle très au sérieux, le regardait chaque fois avec un peu plus de condescendance, persuadée qu'il essayait de les déstabiliser. Mais cela ne faisait qu'encourager le septième. En reposant son verre, Owen fit un haussement de sourcils suggestif à Rose. Dans son agacement devant la provocation, elle posa ses mains sur les épaules de William.
- Déglingue-le, ordonna-t-elle en chuchotant.
- Oui Madame, confirma-t-il en souriant.
C'était tout l'encouragement dont il avait besoin alors que la carte face à lui réclamait trois gorgées. Machinalement, Rose massait les épaules de William, comme elle l'avait fait à Derek. À chaque fois qu'il buvait, la pression s'accentuait sur ses muscles et il souriait.
Il ne leur restait qu'environ deux verres chacun, quand Owen s'écria :
- La coach adverse dope son protégé !
Interrompant leurs conversations et commentaires, tout le monde poussa des petits cris scandalisés et amusés.
- Avez-vous des preuves de ce que vous avancez ? interrogea Idriss.
- Parfaitement ! Elle lui masse les épaules et il boit deux fois plus vite !
- En effet, c'est dérangeant, admit Nassim en bon arbitre.
Il réfléchit encore, quand Idriss se pencha vers lui et lui fit une proposition qu'il sembla adorer.
- Très bien ça ! Pour les cinq prochaines cartes, la coach adverse doit aller encourager Owen !
Les filles hurlèrent de rire et Roger siffla. William se figea, les doigts de Rose plantés dans sa peau. La jeune fille resta très digne, lâcha un « très bien », et quitta William pour aller se poster derrière Owen, qui souriait de plus en plus.
- Coach ! rappela Idriss avant de retourner une carte. Les mains sur les épaules !
Rose s'exécuta en levant les yeux au ciel et posa brutalement ses mains sur le septième. Elle ne vit pas Owen faire un clin d'œil à William, mais vit bien William, qui, dans son agacement, serra trop fort son gobelet presque vide qui se froissa et se vida sur la moquette.
- Faute ! rugit Luke. L'adversaire tente de se débarrasser de ses munitions !
Les autres rirent devant l'air outré des participants. Nassim leva une main pour réclamer le silence.
- Considérant que les accidents peuvent arriver, ce verre va être remplacé… plein. Barman, s'il vous plait…
Idriss s'exécuta et posa un nouveau verre devant William qui ne se démonta pas. Son ami retourna une carte après qu'il eut dit « plus ». C'était plus et il regarda Owen.
Ce dernier, de plus en plus amusé, remua les épaules sous les mains figées de Rose, pour l'inciter à masser.
- Coach, fais ton travail, commanda-t-il, ce qui fit faire un rictus à Rose et à Derek, toujours attentif au jeu.
Personne ne lui donnait d'ordre. Elle massa sans délicatesse pendant qu'il buvait ses trois gorgées. Il posa son verre, répondit à Idriss et regarda William boire à son tour. Rose ne le quittait pas des yeux. Owen remua à nouveau les épaules, elle reprit son massage mécanique. Comme il portait de nouveau son verre à ses lèvres, il ferma les yeux un instant et laissa échapper un petit son rauque, pour bien montrer qu'il était très satisfait du massage. Rose leva les yeux au ciel et reprit son observation de William. Il était d'un coup très calme et buvait en silence. Elle se demanda si c'était parce qu'il était parvenu à maitriser sa jalousie, ou si c'était parce qu'il allait perdre le défi. Ce qu'elle n'espérait pas, hors de question qu'Owen gagne alors qu'elle était obligée de le tripoter !
Elle planta ses yeux dans ceux de William et releva un peu la tête, pour l'inciter à reprendre sa combativité. Elle redressa ses épaules et se tint bien droite pour qu'il l'imite. Amusé, il sourit et fit ce qu'elle demandait. Presque malgré elle, ses yeux glissèrent sur ses lèvres et s'y attardèrent, suffisamment longtemps pour qu'il s'en aperçoive. Elle se rendit compte qu'elle se mordait la lèvre inférieure en même temps et arrêta, un peu gênée. William eut un sourire rayonnant, se redressa de toute sa carrure et se pencha vers Owen.
- Alors… pas trop peur de perdre ? Je vais bientôt récupérer ma coach et ton rythme s'affaiblit…
Il eut un rictus satisfait et retourna contre le dossier de sa chaise. Rose lui retourna son sourire victorieux, ravie de sa réaction. Owen haussa les épaules, feignant l'indifférence.
- Je la garde pour encore une carte, et je veux mon encouragement à l'oreille, fit-il finalement.
Hésitante, Rose se pencha quand même, sous l'œil sévère de Nassim qui surveillait qu'elle s'exécute.
- Amuse-toi comme tu peux, murmura-t-elle. Toi aussi… tu vas perdre… lamentablement…
Owen sourit comme si elle avait été gentille. Elle se redressa.
- Merci, lança-t-il d'une voix séductrice. C'est exactement ce que j'avais besoin d'entendre.
Rose ne l'écoutait plus et gardait le regard posé sur William. Dès qu'il eut avalé les cinq gorgées imposées par le valet de pique, elle lâcha Owen et retourna à son poste, derrière lui. Cette fois, ses doigts coururent directement à ses épaules et elle se pencha vers lui.
- Tu as été brave, susurra-t-elle. Votre jeu est débile, mais c'est rigolo.
Il tourna la tête et se retrouva face à elle, presque lèvres contre lèvres.
- Ah non ! s'écria une voix. Un bisou, c'est carrément de la triche !
William rigola et leva les mains en signe de paix. Ils retournèrent à leur jeu et enchainèrent les gorgées d'alcool, toujours sous les encouragements de leur public, qui discutait tout en les observant du coin de l'œil. Rose avait un peu décroché, sûrement la fatigue, l'alcool bu et le fait que ses mains touchaient William. Elle était un peu ailleurs et laissait ses doigts courir sur les épaules, la nuque, se glisser un peu dans ses cheveux, couler vers son cou, caresser sa clavicule. Alors qu'elle entamait inconsciemment un mouvement vers les pectoraux de William, il lui saisit la main et la porta à ses lèvres. Il embrassa délicatement sa paume et la reposa sur son épaule. Réveillée, Rose rougit un peu. Cette fois, c'est William qui fit un haussement de sourcil suggestif à Owen. Ce dernier rit en terminant son cinquième verre.
- Pardon, fit une petite voix à l'oreille de William.
- Tu recommences quand tu veux… en privé, répliqua-t-il en la regardant rougir un peu plus.
Elle réinstalla sagement ses mains sur les épaules musclées, qui bougeaient sous le rire de William. Elle vit les verres vides devant eux.
- Tu as presque gagné, chuchota-t-elle rapidement. Plus qu'un verre chacun.
- C'est pas plus mal. Je commence à saturer, répondit-il sur le même ton.
- Lui aussi, ajouta Rose en désignant Owen, qui commençait à changer de couleur.
Elle se redressa et coula un regard à Nassim, qui fatiguait car il ne réagit pas à sa provocation :
- Ben alors Owen, tu faiblis ? lança-t-elle, sous le regard surpris et ravi de William.
L'intéressé ne répondit pas. Idriss retourna une carte après avoir entendu « moins ». Un As sortit, William croisa les bras, attendant qu'Owen entame le dernier verre. Le septième porta le verre à sa bouche, avala peut-être deux gorgées… avant de reposer précipitamment le verre sur la table et de se lever d'un coup. Il eut un sourire désolé vers Luke, puis disparut dans les escaliers sous les rires du groupe.
- WILLIAM GAGNE ! clama Nassim, leva le bras de son ami en signe de victoire.
- Et Derek ! ajouta Idriss, levant aussi le bras du grand blond.
De nouveau, des cris de réjouissance s'élevèrent du groupe, et Selena remonta le son de la musique. La table fut enlevée et les danseurs retrouvèrent leur piste. Rose entraina William à l'écart.
- Ça va ? demanda-t-elle finalement, inquiète de ce qu'il avait ingurgité.
- Ça va, répondit-il d'un ton bourru.
Elle faillit rire devant sa mine bravache.
- Tu sais quoi ? finit-il par dire. Je vais m'absenter discrètement quelques minutes et quand je reviens…
Il laissa un blanc.
- Oui ?
- Je euh… rien du tout, pardon, ajouta-t-il précipitamment.
Il lui fit un clin d'œil et fila vers son dortoir, sans que personne ne le voie partir.
- Vous êtes… chauds comme la braise, lança Lisa en rejoignant Rose qui éclata de rire.
- Quel spectacle on a dû offrir, marmonna-t-elle finalement. Enfin… pas autant que toi et Anthony !
Son amie pouffa, toute ravie. Padma et Mandy vinrent près d'elles en les voyant discuter calmement, loin de l'agitation.
- C'est la première fois qu'il se lâche comme ça en public. Moi ça ne me dérange pas, mais je sais que lui est tellement plus réservé… j'espère qu'il ne va pas regretter demain, finit-elle, perplexe.
- Ça m'étonnerait. Il t'aime trop pour ça !
Lisa eut un de ses sourires doux. Trop curieuse, elle finit par demander à Rose ce qui s'était passé dans la chambre pendant leur absence. Rose résuma : le shot de whisky, la transformation, la séance de baiser passionnée… Mandy lui demanda, après avoir écouté sagement :
- Bon. Officiel ou pas ?
Rose secoua la tête.
- Non… c'est juste… ce soir, c'est différent. Il est d'accord, ajouta-t-elle avant que Padma n'ouvre la bouche. C'est même lui qui m'a demandé.
Malgré leur complicité, malgré tous ces baisers, ces caresses échangées, il était difficile d'oublier Blaise. Mandy n'était visiblement pas d'accord, mais elle ne dit rien de plus.
- Tiens, revoilà le prince charmant, dit finalement Padma.
Rose leva les yeux au ciel à l'expression, mais regarda quand même William descendre les escaliers. Il avait son air enjoué habituel et son sourire charmeur plaqué au visage. Il sourit à ses camarades de sixième qui l'appelaient et se glissa près d'elles, se lançant dans une conversation animée que les cinquièmes ne pouvaient pas entendre. Les septièmes furent les premiers à les quitter ; Selena rangea son matériel après avoir demandé à Nassim si elle pouvait le récupérer, et salua tout le monde.
- Merci pour la soirée ! Félicitations encore, William. Salut !
- Elle est vraiment super sympa, commenta Mandy une fois qu'elle eut disparue.
Les autres septièmes se chargèrent de Roger, et le ramenèrent dans leur dortoir. Owen fit un dernier clin d'œil vers le groupe et lança un « sans rancune ! », clairement destiné à William, qui répondit d'un sourire. Les filles de sixième restèrent encore un peu, les deux groupes papotant dans le calme, laissant l'excitation de la soirée se tasser.
Un regard sévère d'Anthony, revenu à son comportement habituel, les incita à ranger plus ou moins approximativement ce qu'ils avaient éparpillé et déplacé au cours de la soirée. Les bouteilles d'alcool furent rangées dans les caisses, qui disparurent de nouveau dans la chambre des garçons. La banderole fut décrochée et soigneusement pliée pour la remettre à William, qui n'arrêtait pas de les remercier pour la « super soirée de la majorité ». Ses camarades féminines de sixième partirent ensuite. Rose leur tournait le dos et ne put qu'entendre Rebecca souhaiter une bonne nuit à William en gloussant. Le temps qu'elle se retourne, l'air meurtrier, la sixième avait tourné les talons et Terry s'était planté devant Rose. Elle regarda Rebecca entrer dans son dortoir et elle posa les yeux, furibonde, sur son ami devant elle.
- Jalousie mal placée, fit-il d'une voix chantante.
- Ma parole, toi aussi tu es imbibé, gronda Rose, amusée à présent.
- Peut-être, admit-il en croisant les bras. Et toi, tu n'as pas le droit d'être jalouse. C'est pas juste.
Elle savait qu'il avait raison et soupira.
- Je sais, je sais…
- On ne peut pas avoir le beurre, l'argent du beurre, et le crémier.
Elle le regarda, ébahie.
- Enfin, se reprit-il, on ne peut pas avoir le sorcier, l'autre sorcier et l'exclusivité !
Et il éclata de rire, suivi par Mandy qui avait tout écouté. Rose décroisa les bras, un sourire aux lèvres. Elle chercha Anthony des yeux pour qu'il envoie tout le monde se coucher, mais tomba sur William, qui lui sourit évidemment, et vint vers elle. Terry et Mandy s'éclipsèrent si vite qu'elle crut avoir rêvé leur présence. Dès que son ami fut en face d'elle, elle le considéra et recula lorsqu'il fit un pas en avant. Désorienté, il la regarda sans rien dire, son sourire évanoui. Rose inspira longuement, voulant être sûre que son nez ne la trompait pas.
- Tu as changé de t-shirt, commença-t-elle.
- Euh, oui ?
- Et tu t'es lavé les dents, continua-t-elle, la voix un peu fraîche.
- Mais…
Il renonça à lui demander comment elle le savait et attendit la suite. Vu l'expression qu'elle avait, ce n'était pas terminé.
- Et…
Elle fit une pause, inspira de nouveau.
- Tu sens la fille, termina-t-elle froidement.
Arrête ça tout de suite, hurla sa raison. Jalousie mal placée !
Le cri de sa raison fut noyé sous la dernière bière qu'elle avait avalée et la colère qui dansait en elle. De plus en plus perdu, William ferma la bouche et ne dit rien. Elle croisa les bras et inspira de nouveau, cette fois pour se maitriser. Elle avait l'impression d'être deux : une partie qui la suppliait de se calmer immédiatement, l'autre qui avait envie de tout casser. Surtout la tête de Rebecca. C'était stupide. William l'imita et croisa les bras aussi, un peu agacé. Il contracta les muscles de ses bras lorsqu'elle ouvrit la bouche, alors elle la referma, momentanément distraite. Elle se mordit la lèvre et soupira, la raison l'emportant finalement sur sa jalousie (mal placée).
- Désolée, fit-elle en regardant le bout de ses chaussures. Oublie. C'est déplacé.
Il se détendit visiblement.
- Je n'oublierai que si tu réponds à une question : comment tu le sais ?
- Pour le t-shirt, les dents ou cette… ou Rebecca ?
- Les trois, dit-il, amusé par son langage.
- Tu sens la lessive, la menthe et Rebecca a laissé son odeur sur toi.
- Super-odorat félin ?
Elle haussa les épaules.
- Ça dépend des moments. Parfois c'est ça, d'autres c'est super-ouïe…
- J'ai changé de t-shirt parce que j'avais renversé de la bière dessus et je n'aime pas l'odeur. Je me suis lavé les dents après avoir… remercié les toilettes avec ma bière – elle rit – et pour…
- Ne dis rien pour la troisième. T'as pas à te justifier, marmonna-t-elle. Je le fais pas, moi.
- Pour Rebecca, poursuivit-il comme s'il n'avait rien entendu, elle m'a embrassé la joue après m'avoir souhaité bon anniversaire. Je n'avais rien demandé et je n'ai pas eu le temps de l'arrêter.
Rose rougit, gênée par sa propre attitude. Il soupira à son tour. Elle osa à peine le regarder et renouvela ses excuses.
- Je t'ai parlé de ma nouvelle stratégie ? demanda-t-il brusquement.
- De quoi ? fit Rose, perdue.
- Pour te séduire.
Elle sourit un peu et secoua la tête.
- Je fais comme si… l'autre n'existait pas.
Ce fut irrésistible pour Rose. Elle fit mine de réfléchir et lâcha d'un coup :
- L'autre… Tu veux dire Owen ?
Il ouvrit la bouche, choqué, puis la referma aussi sec avant de rire franchement.
- Bien joué, dit-il finalement. Non, le vrai autre. Je fais ce que j'ai envie de faire : être avec toi. Te parler, t'écouter, te faire rire… t'embrasser aussi, te toucher…
William s'avança lentement vers elle. Il tendit la main, caressa sa joue.
- Le reste, je peux rien y faire. Je suis là, tu le sais. C'est à toi de voir.
Elle déglutit, intimidée, muette, puis elle hocha la tête, tripotant le nœud sur le devant de son haut. Il souriait devant son air timide, qu'elle n'avait qu'avec lui. Et peut-être l'autre, mais il ne voulait pas savoir. Il lui prit la main dans la sienne et caressa doucement la peau avec son pouce. Elle exerça une pression dessus et il la vit relever la tête et sourire.
- Merci.
- Ah, je suis trop gentil, fit-il. Ça me perdra.
Elle rit et se rapprocha un peu plus de lui.
- Tout à l'heure… avant que tu partes dans ton dortoir pour euh… discuter avec les toilettes…
- Oui ? encouragea-t-il en riant un peu.
- Tu as dit que quand tu reviendrais, tu… mais tu n'as pas fini ta phrase.
- Ah, ça.
Il eut un air embarrassé, alors elle attendit.
- Tu vas pas lâcher l'affaire j'imagine ?
- Maintenant, non. J'ai trop envie de savoir.
- J'allais… j'allais te dire quelque chose de très indécent et j'ai réussi à me retenir à temps, expliqua-t-il, les joues un peu colorées.
Ça ne fit qu'attiser la curiosité de Rose qui brulait d'envie d'en savoir plus. Machinalement, elle se rapprocha encore de lui et posa main libre sur son torse, le regardant fixement.
- Mais quelle sorcière tu fais… marmonna-t-il, impuissant.
- Littéralement.
Il rit. Puis grogna quand la main de Rose remonta jusqu'à son cou.
- Dis-moi…
La caresse continuait et il ferma les yeux. Les doigts glissèrent dans son cou, suivirent sa mâchoire, un pouce effleura ses lèvres.
- Si je continue à ne pas te dire, tu continues à me toucher ? chuchota-t-il.
La main de Rose retourna sur le pectoral, immobile.
- C'est le contraire. Si tu parles, je te touche, susurra-t-elle. Si tu ne parles pas, j'enlève ma main.
Joignant le geste à la parole, elle décolla sa paume de son t-shirt. La main de William l'y plaqua d'autorité.
- Ok, ok… céda-t-il sous son sourire ravi.
Il referma les yeux, soudainement trop gêné de la regarder pendant qu'il parlait.
- J'allais te dire… tout ce que j'avais envie de te faire…
La main recommença sa caresse.
- Tout ce que j'aimerais te faire, tout le temps en fait… t'embrasser, jusqu'à ce que tu sois essoufflée…
Rose colla en douceur son corps contre le sien.
- Toucher ton corps, te sentir frémir sous mes doigts…
Sa main glissa sous le t-shirt blanc, fraiche contre sa peau chaude. Il l'enlaça instinctivement.
- Embrasser ta peau, partout, sur ta bouche, sur tes bras, tes jambes, ton ventre…
Une deuxième main s'insinua sous le tissu, caressant le bas de son dos.
- Tes seins, souffla-t-il si bas qu'elle faillit ne pas entendre.
Électrisée, Rose se hissa sur la pointe des pieds, son corps glissant contre celui de William qui en perdit la parole, et elle chercha ses lèvres. Il les lui donna sans se faire prier et l'embrassa fiévreusement, glissant une main dans sa nuque, s'emmêlant dans ses cheveux. Les doigts de Rose se contractèrent sur sa peau et ses ongles le griffèrent un peu quand elle sentit la langue de William contre la sienne. Il émit un son guttural de plaisir.
Elle ne sait pas comment elle réussit à retirer sa main de son torse, à reculer son visage, à l'embrasser chastement sur les lèvres et à s'éloigner suffisamment de lui pour arrêter leur baiser. À bout de souffle, elle inspira longuement par les narines pendant que William rouvrait les yeux et la regardait intensément. Toujours logée dans ses bras, elle finit par lui demander à voix basse, pas dupée :
- Tu allais vraiment dire tout ça, tout à l'heure ?
- Disons que… ça aurait été moins poétique.
Elle rit contre lui, il l'imita.
- Ah, vous êtes là, les amoureux fougueux ! clama une voix.
- Les amoureux fougueux ? marmonna William en se retournant, pendant que Rose plaquait sa main sur sa bouche pour ne pas rire.
- Anthony essaie de « rassembler tous ses moutons » pour nous envoyer au lit, expliqua Derek. Donc… au lit !
- Oui mon capitaine, répliqua Rose, à moitié hilare devant son meilleur ami, qui, enfin, vacillait dangereusement malgré son discours cohérent.
William fit un sourire à Rose, toujours contre lui. Il se pencha et l'embrassa sur les lèvres pendant que Derek fermait les yeux en faisant un bruit écœuré. Il fit un clin d'œil à Rose et lui caressa une fraction de seconde les fesses, la faisant ouvrir de grands yeux.
- J'ai oublié de les mentionner tout à l'heure, justifia-t-il.
Elle pouffa et le laissa partir vers son dortoir après un dernier baiser rapide. Derek s'appuya contre la bibliothèque et regarda sa meilleure amie, amusé.
- Chut, le devança-t-elle. Tais-toi et va cuver.
Il éclata de rire et elle le guida pour monter les marches, l'emmenant jusqu'à son lit. Il s'y écroula de tout son long, faisant craquer le bois. Elle lui retira ses chaussures, aidée de Terry.
- Je m'occupe du reste, va te coucher, lui dit-il en souriant.
Elle l'enlaça brièvement et souhaita bonne nuit à tous les garçons avant de retrouver sa chambre. Ses compagnes étaient en train de se déshabiller quand elle arriva. Mandy se figea et la fixa :
- J'ai juré que je ferai pas de commentaires, alors j'en ferai pas. Mais zut alors ! Le prince charmant quoi !
Padma éclata de rire et Rose la regarda sans trop vouloir comprendre. Elle leur sourit et se jeta sur son lit, ferma les rideaux et s'y déshabilla rapidement, sombrant rapidement d'un sommeil sans cauchemar, mais plein de verres de Pur-Feu et de bruns au sourire charmeur.
