Hello tout le monde ! Malgré le fait que mon autre fiction du moment, "Tokyo ghost stories", soit toujours en cours, j'ai décidé de suivre mes envies et mes inspirations du moment pour me lancer dans cette histoire :) Cette fois ce sera donc sur Bungou Stray Dogs, qui n'est, certes, ni le meilleur manga, ni le meilleur anime de tous les temps (malgré la qualité graphique, sur ce coup franchement respect les studios Bones), mais qui a réussi à créer, à mon sens, l'un des personnages les plus fascinants (et beaux gosses) de l'histoire du manga, j'ai nommé Osamu Dazai !

Pour ceux qui ne sont pas familiers avec l'univers de BSD, les personnages sont tous inspirés d'écrivains japonais ayant vécu pendant le 20e siècle. Dazai ne fait bien sûr pas exception, et est inspiré de l'écrivain du même nom, connu pour être un maniaque du suicide, mais aussi pour son livre, "No Longer Human", qui est juste un classique de la littérature japonaise. Petit conseil d'ailleurs, lisez ce bouquin, ça vaut le coup, ou regardez l'adaptation d'Aoi Bunkaku Series qui est juste magnifique (à prendre quand même avec quelques antidépresseurs parce niveau mort intérieure c'est violent). Le titre de cette fiction, "La Déchéance d'un homme", est le titre français de l'œuvre phare de Dazai. Évidemment, je ne prétends pas me mesurer à ce monstre de la littérature (et de la dépression), mais je ne pouvais pas m'imaginer écrire une fiction sur un personnage qui est carrément son avatar dans le monde du manga, sans lui rendre hommage :)

Pour les connaisseurs, quelques petites précisions : il n'y aura pas de Soukoku dans cette fiction. Le personnage de Chuuya interviendra, mais gardera un rôle assez mineur. Je pense que les histoires qui développent la relation entre Dazai et Chuuya sont en effet assez nombreuses, du coup j'ai décidé de m'orienter vers autre chose. Cette fiction mettra beaucoup en scène le duo Dazai/Kunikida, que je trouve particulièrement charismatique, ainsi qu'un OC. Je précise que d'habitude je N'AIME PAS les OC, mais là... je sais pas, ce perso s'est glissé dans ma tête et je n'ai pas réussi à m'en débarrasser. Cela dit, l'OC en question sera inspiré de la vie du vrai Osamu Dazai : il s'agit de Tomie Yamazaki, sa dernière femme, et celle avec qui il s'est suicidé (parce que oui, dans la réalité, Dazai a finalement accompli son rêve de rendre l'âme en compagnie d'une jeune et belle femme...). Voilààà ! Évidemment, et je le dis à chaque fois COMMENTEZ ! J'ai eu l'occasion de me rendre compte que les commentaires en français sur le fandom de BSD étaient particulièrement rares, mais je le répète encore et encore, COMMENTEZ ! derrière les fanfic que vous lisez, il y a des auteurs qui donnent de leur temps et de leur passion sans rien en retour, donc leur faire un coucou pour leur dire si vous avez aimé ou non est la moindre des choses, et pour nous, c'est une putain de récompense ! ;)

Cette petite intro/plaidoyer terminée, je vous souhaite une bonne lecture !


Chapitre 1.

Il avait espéré des marches moins étroites, et peut-être même un ascenseur.

En jetant un dernier œil dehors, l'homme à lunettes secoua son parapluie et essuya les épaulettes de son complet trop grand.

C'était la première fois qu'il venait ici. Depuis qu'elle avait quitté son logement de fonctions.

« Pourquoi diable a-t-elle choisi un endroit comme celui-là ? »

Un immeuble insalubre, perdu dans les ruelles les plus glauques de Tokyo, et hanté par de sombres silhouettes au corps décharné et à l'hygiène plus que douteuse. Si on ne lui avait pas répondu à l'accueil, il aurait juré entrer dans une maison hantée…

– La troisième à gauche. Deuxième étage », marmonna une voix rauque depuis l'autre côté du comptoir.

Ses cheveux gras lui tombaient sur le front et cachaient le blanc de ses yeux rongés par l'alcool et la solitude. La gérante faisait partie de ces gens à qui on ne donne plus de jeunesse, et dont la vieillesse se prolonge dans une misérable décadence jusqu'à faire d'eux un tas de peaux défraichies, de graisse, d'os et de saletés dont même les chiens ne veulent plus.

– Merci.

– Si vous lui cherchez des emmerdes j'appelle les poulets.

– Je suis un ami.

– Elle n'a pas d'ami.

C'était vrai. Aussi vrai que lui-même faisait partie des poulets dont elle parlait, donc pas grand-chose à craindre de la vieille grabataire.

– Je n'en n'ai pas pour longtemps.

L'étroitesse des escaliers lui donna le tournis. Au détour du premier étage, il entendit un bruit exécrable de déglutition et dut presser le pas pour ne pas être submergé par l'odeur.

Le clapotis de la pluie griffait les fenêtres, et il se surprit à fixer les vitres comme si c'était le dernier regard qu'il lancerait vers le monde extérieur.

La troisième porte à gauche du deuxième étage, qui aurait en réalité pu se situer au quatrième niveau, tant les plafonds étaient hauts, affichait le numéro 6. À peine quelques secondes après qu'il eut frappé, une voix résonna de l'autre côté du panneau, et lui dit d'entrer. Le verrou n'était même pas fermé.

« Ça faisait longtemps, Ango. »

Elle était assise sur une chaise pivotante à accoudoirs, face à sa fenêtre. La chambre était d'une propreté inattendue. Aussi propre que vide. Seul un lit une place trônait au centre, impeccablement fait, accoudé à une petite tablette qui devait lui servir de bureau mais où il n'y avait pas un seul livre, une seule feuille ou un stylo. Le mur opposé avait été affublé d'une penderie où se balançaient trois robes, deux jupes, quatre chemisiers et un manteau, au-dessus d'une paire de talons si usés qu'on en avait mal aux pieds rien qu'à la regarder. Un petit lavabo, des toilettes et un bac à douche faisaient office de salle de bain, seulement séparés de la chambre par un petit muret où reposait une serviette blanche. Une subtile odeur de lavande s'en dégageait, et il comprit que c'était sûrement là le seul luxe qu'elle s'accordait. Il régnait dans cette chambre toute grise, dont les murs jaunes avaient passé depuis longtemps et dont l'humidité rongeait le plafond, une impression de solitude qui dévorait l'âme et le cœur.

– Ça faisait longtemps, en effet.

Il s'aperçut que sa voix tremblait.

Lentement, et avec un petit sourire, elle se tourna vers lui et lui pointa du doigts l'extrémité du lit.

– Tu peux t'asseoir.

– Avec plaisir.

Ce visage, il ne l'avait pas vu depuis trois ans, si bien que la regarder dans les yeux, c'était comme plonger dans le passé. Ni grande ni petite, elle avait la peau blafarde, les traits tirés et de longues cernes sous ses pupilles d'un gris marin, beaucoup trop terne. Ses cheveux bruns tombaient en boucles négligées sur ses épaules, dont elle tentait de dissimuler la maigreur sous un châle rapiécé. Elle portait une robe noire, dont le col remonté lui donnait l'air d'une vieille femme en deuil. Tout dans le sourire qu'elle lui délivrait, dans la manière dont elle le regardait, sentait l'amertume, l'abandon. Il avait l'impression d'avoir une morte en face de lui.

– Qu'est-ce qui t'amène ?

Il sursauta en entendant sa voix pour la seconde fois, et se força à lever les yeux vers elle.

– Je voulais simplement te voir. Savoir comment tu allais.

– Je suis toujours vivante, comme tu vois », gazouilla-t-elle en plissant les yeux à la manière d'un chat.

– Je ne suis pas sûr que cet endroit te convienne vraiment… ça fait longtemps que tu ne nous as plus donné de nouvelles. Le chef s'inquiète pour toi.

– Qu'il vienne me voir lui-même, et il verra que je me porte comme un charme. Quant à cet endroit… », elle porta un regard circulaire, inexpressif, à cette chambre qu'il devinait être devenue sa prison et son seul univers. « Je l'aime bien. »

– Il te ressemble…

– N'est-ce pas ?

– Tu as tellement changé…

En prononçant ces derniers mots, il crut qu'il allait se mettre à pleurer et se mordit la lèvre pour ne pas faiblir. Pas maintenant. Pas devant elle.

– Que dit le docteur ? » murmura-t-il pour se redonner une contenance.

Elle leva les yeux au ciel.

– Toujours la même chose.

– Ça ne va pas s'arranger ?

– Ils ont déjà fait tout ce qu'ils ont pu.

– Mais…

– Pourquoi tu ne me dis pas plutôt ce qui t'amène vraiment ?

Son sourire avait disparu et son expression s'était revêtue de quelque chose de tranchant, de rêche et d'impénétrable qui lui coupa le souffle. Ça non plus, elle ne l'avait pas avant.

– Je… j'ai… j'ai une mission pour toi.

– À la bonne heure !

Et sans transition, elle s'esclaffa d'un rire nerveux, compulsif, qui fit trembler tout son corps comme s'il ne s'agissait plus que d'un tas d'os agglutinés les uns contre les autres. Sa voix aigüe raisonna contre les murs et le laissa quelques secondes pantois, incapable de savoir comment réagir.

– Je… ce n'était pas censé être drôle…

– Et pourtant… je ne savais pas que vous pratiquiez ce genre d'humour au ministère !

– Quel genre d'humour ?…

Encore une fois, son regard glacial se ficha dans le sien tandis que son visage retrouvait son caractère inexpressif.

– Noir.

Il ne put s'empêcher de déglutir et prit sur lui pour se lever et ainsi la dominer de sa hauteur. Elle ne semblait pas plus impressionnée.

– Ce n'est ni une blague, ni une visite de courtoisie Tomie ! Le ministère a besoin de tes services.

Les sourcils de la jeune femme se froncèrent et elle soutint son regard avec une agressivité presque palpable.

– Qu'il aille se faire foutre », susurra-t-elle entre ses dents.

– L'affaire est grave.

– Qu'est-ce que tu veux que ça me fasse ?

– Nous avons besoin de toi.

– C'est non.

– Je t'en prie !

Sans réfléchir, il s'était jeté au sol, les mains en avant en guise de supplication. Seul le silence lui répondit. En sentant l'odeur de cuir de ses bottines lui chatouiller le nez, il leva lentement les yeux et vit ses pieds reculer, ses mollets se crisper tandis qu'elle pivotait pour lui tourner le dos.

– Va-t-en…

– Tomie… je sais que ça a été dur. Mais ça fait cinq ans maintenant… tu ne crois pas qu'il serait temps de vivre de nouveau ?

– Va-t-en Ango. S'il te plait. Et ne revient plus ici.

Il y sera.

C'était son dernier espoir. Son tout dernier argument pour la faire revenir. En serrant les dents et les poings, il se redressa et attendit, en sachant parfaitement qu'elle avait saisi de qui il parlait.

– Qui ça ?…

– Tu le sais très bien.

De nouveau, elle fit tourner la chaise dans sa direction et se remit à le fixer, comme si elle cherchait à déceler le mensonge dans ses paroles.

Il y sera. Comment ?

– Le ministère demande une coopération.

– Avec eux ?

Il n'en fait plus partie.

– Alors qui ?

– Une Agence de détectives armés. Il est là-bas maintenant. Depuis deux ans.

Ses yeux se plissèrent et elle pivota pour cacher ses mains qu'il avait vues commencer à trembler.

– Pourquoi ?

– Le ministre t'expliquera l'affaire en détails. Tout ce que je peux te révéler, c'est que seuls des cerveaux comme les vôtres peuvent la résoudre.

– C'est-à-dire ?

– Brillants.

La pluie battait toujours derrière les fenêtres et dans la troisième chambre à gauche du deuxième étage, une ombre s'étendit. Une ombre plus glaciale que la nuit, tandis que pour la première fois depuis cinq ans, Tomie Yamazaki souriait vraiment.