Bonjour tout le monde !

Voilà le chapitre 14 !

Bonne lecture !


« Tu as l'air de bonne humeur dis donc. » Dit Lupusregina avec un grand sourire amusé.

« Qu'est-ce qui te permet de dire cela ? » Demande platement Narberal, qui inspecte son uniforme d'un œil chirurgical.

« Le fait tu as déjà vérifié plus de cinq fois, en moins de quinze minutes, qu'il y a n'a pas faux-plis sur tes habits ? » Répond la louve, en prenant sa pose nonchalante habituelle.

« Nous allons bientôt nous présenter devant Lady Lunaria. » Déclare Gamma, sans lever la tête. « La moindre imperfection doit être éradiquée. » Assure-t-elle.

« ''Éradiquée'' ? » Répète CZ sur le ton de la conversation, étonnée du choix de mot de son homologue.

« Et elle ose dire qu'elle n'est pas sur-motivée ? » Glousse Bêta, moqueuse. « En plus, nous n'avons rendez-vous que dans plusieurs heures. »

« Je dois admettre que je suis d'accord avec Lupusregina. » Fait Solution, qui observe la scène depuis le coin où elle se trouve. « Depuis que tu es revenue de ton tour d'assistance avec Milady, tu es encore plus pointilleuse que d'habitude. »

« Elle est contente d'avoir reçu une mission privée, de notre maîtresse en personne. » Confirme Entoma, en cachant le bas de son visage avec sa manche, comme si elle voulait dissimuler un sourire.

« Tsundere. » Commente Delta, l'humour de ce mot facilement perceptible sous l'habituelle neutralité.

« Ça n'a rien à voir ! » Se défend la Maid concernée, en rougissant quasi-imperceptiblement, fixant sa plus petite collègue avec des yeux accusateurs.

« Elle vient de se jeter toute seule dans le piège, n'est-ce pas ? » Dit Epsilon, en levant les bras au ciel, une expression goguenarde sur le visage.

« Yep ! Complètement ! » Confirme la louve en rigolant doucement.

« Allons, allons. » Intervient Yuri, en claquant délicatement deux fois dans ses mains. « Laissez notre sœur en paix. » Elle replace ses lunettes dans un petit geste gracieux. « Tu peux être rassurée, Narberal. » Continue-t-elle, en gardant sa personnalité de professeure stricte. « Tout comme les quatre premières fois que tu as inspecté ta tenue, elle ne présente pas le moindre défaut. Tu es aussi prête que quelqu'un puisse l'être. »

« Merci Onee-Sama. » Répond Gamma, en appelant leur responsable avec le respect dû à sa position de première des Pléiades.

Il y a petit moment de battement, durant lequel la création de Nishikienraï prend quand même le temps de balayer quelques grains de poussière imaginaire de sur sa manche gauche, avant de paraître satisfaite. Ce qui fait pousser un soupir, qui passe inaperçu, à sa supérieure directe, alors que Lupusregina et Solution sourient de plus belle.

C'est à ce moment là que Sebas fait son entrée. L'ensemble des soubrettes se redressent aussitôt et le saluent, avant même qu'il n'ai finit de fermer la porte de leur logis attitré, au Dixième Étage de la Grande Tombe de Nazarick. Mais lorsqu'elles relèvent la tête, elles sont stupéfaites de voir Méléa, l'intendante personnelle de Shalltear, qui le suit de près. Elles ne l'avaient pas remarqué à cause de sa relativement petite taille, comparé à la stature du Majordome.

Cette dernière, se tenant droite avec toute l'élégance d'une dame de la noblesse, fait alors une brève révérence en direction de l'audience encore sous le coup de la surprise. Elle prend ensuite la parole d'une voix toute aussi posée et gracieuse que sa posture ne le laisse imaginer.

« Mes plus sincères salutations, Pléiades. » Salue-t-elle, distinguée et extrêmement polie. « Pouvoir enfin avoir d'échanger de vive voix, est un véritable plaisir. »

« Tout le plaisir est pour nous Méléa-sama. » Répond finalement Yuri, qui s'est rapidement reprise, en s'inclinant pour la saluer, imité par ses homologues d'une manière synchrone. « Veuillez nous pardonner de cet accueil inconvenant à une personne de votre rang, nous ne vous attendions pas. »

« Nul besoin de vous excuser. » Assure l'Alpha des [Vampire Brides], avec un sourire léger. « Il ne s'agissait là que d'un test préliminaire, que vous avez toute passée brillamment. »

Cette fois, les six servantes s'échangent des regards incrédules. Entres elles, de Béta à Zéta, tandis que la Seconde du groupe interroge, avec des yeux qui expriment bien le trouble collectif, son supérieur silencieusement.

Un test ? Sur quel sujet ? Et pour quel raison ? Auraient-elles fait quelque chose qui a déplu à leur Lady ?

« Soyez rassurée. » Dit le Majordome avec une expression réconfortante. « Lady Lunaria n'a fait que laisser carte blanche à Miss Méléa, en ce qui concerne un aspect important des relations que nous allons devoir créer dans ce Nouveau Monde. »

L'attention se porte sur la principale actrice à cet instant, dont les pupilles écarlates scintillent avec un éclat joueur et amusé. Prenant une position d'attente très similaire à celle utilisé d'ordinaire par l'unité combattante devant elle, elle reprend la parole d'un ton dégagé et solennel.

« Sans révéler inutilement, et impoliment, le contenu de la rencontre avec Milady qui vous attend plus tard dans la journée, je peux dire que notre Maîtresse vous exposera les différentes Personna qu'elle incarnera à l'extérieur de Nazarick. » Explique-t-elle. « À plusieurs occasions, sans le moindre doute, notre régente se retrouvera en présence de la Royauté de différents États. À cet effet, et sur ses ordres, je suis venu vous enseigner l'étiquette élémentaire qui doit être respectée en présence de telles sommités, puisque vous serez très fréquemment à ses côtés durant ces instants plus que cruciaux. »

De plus en plus, l'incompréhension gagne du terrain dans l'esprit de l'auditoire. La Dernière des Êtres Suprêmes pense-t-elle vraiment qu'elles sont incapables de savoir comment se comporter ? Même s'il s'agit de vulgaires humains, elles savent bien qu'elles n'ont pas mot à dire tant que la seule restante de leur 41 vénérés Créateurs, ne leur donne la permission.

« N'ayez nulle crainte, Lady Lunaria n'a pas le moindre reproche à vous faire concernant votre standing à l'encontre des habitants de notre forteresse, ou envers ceux résidant en dehors. » Déclare Malia avec un sourire chaleureux faisant ressortir légèrement ses longues canines. « Cependant, la très grande majorité des personnalités influentes de ce Nouveau-Monde, utilisent un langage corporel de courtoisie différent de celui dont nous usons. » Elle refait une révérence rapide, quoique toujours distinguée, pour appuyer son propos. « Lord Peroroncino nous a gracieusement instruit, Shalltear-sama et moi-même, de nombre de coutumes de politesses que je vais aujourd'hui vous inculquer. Pour vous permettre, ce faisant, de représenter Milady et Ains Ooal Gown de la manière la plus adéquate qui soit. »

Une grande joie s'empare des six Pléiades, qui ont du mal à retenir leur excitation. Non seulement, elles vont pouvoir servir la Dernière des Êtres Suprêmes avec toujours plus de grâce et d'efficacité, mais elles vont également recevoir un enseignement venant directement d'un autre de leurs Lords. Sans attendre, elles s'inclinent avec déférence.

« Nous nous plaçons entre vos mains parfaitement capables, Malia-sama. » Font-elles d'une seule voix.


Loin de là, dans une chambre du Palais Royal de Re-Estize, Renner Theiere Chardelon Ryle Vaiself observe la cour fleurie, qui se trouve juste en dessous du balcon juxtaposant sa chambre personnelle. Le soleil est radieux, et un magnifique spectacle de couleurs vives accueille les yeux des quelques personnes qui peuvent le voir. Pourtant la troisième fille du Roi Ramposa III, n'a que faire d'un tel tableau. Elle n'a d'intérêt que pour le jeune homme blond qui est en train de ramasser un bouquet, probablement à son attention.

''Qu'il est mignon.'' Pense-t-elle, son visage se déformant hideusement, pour laisser apparaître l'espace de quelques secondes, sa véritable nature de psychopathe obsessionnelle. ''Quels yeux de petit chiot innocent vas-tu me montrer aujourd'hui, Climb ?''

C'est en entendant quelqu'un frapper à la porte qu'elle reprend immédiatement sa façade de Princesse Dorée. Bien que l'idée d'avoir l'opportunité d'observer longuement son garde du corps dans relativement peu de temps, la réjouisse, il y a des affaires plus pressantes qui doivent être adressées en premier lieu. C'est pour cette raison qu'elle a demandé à rencontrer au plus vite ses pions les plus efficients et les plus compétents.

« Je vais rester dehors Boss. » Dit une voix claironnante et amusée. « Je crois pas qu'une tête de pioche comme moi, vous soit vraiment utile dans une conversation aussi compliquée. »

« Finalement un peu de calme. » Réplique une autre femme, cassante.

« Sois pas triste la naine. » Répond la première en poussant un rire sonore. « Je serai pas loin si tu as besoin de moi. Crie et j'arrive dans la seconde. »

« Vas-tu te taire maudit gorille !? »

« Gagaran, Evileye, pouvez-vous arrêter de vous chamailler s'il vous plaît ? » Demande une troisième personne, autoritaire et en même temps légère. « Ne faisons pas honte à Renner en nous comportant comme des sauvages. »

Deux des cinq membres de Blue Roses apparaissent de derrière les rideaux qui encadrent l'entrée de la chambre, tandis que la dernière présente referme la porte derrière elles. Avec un sourire joyeux, le leader du groupe se dirige sans attendre en direction de son amie. Qui le lui rend à l'identique.

« Ton groupe est toujours divertissant Lakyus. » Commente la dernière née de la famille royale sur un ton moqueur.

« Ne m'en parle pas. » Dit-elle, en feignant l'indignation. « Nous sommes loin d'une sinécure. »

Un petit rire léger s'échappe des lèvres de la Princesse, tandis qu'elle s'assoie à la table recouverte d'une nappe en soie blanche, en face d'une des très rares habitantes de ce château qu'elle respecte profondément. La Magic Caster de leur équipe, quant à elle, va s'installer dans l'ombre de l'arche qui encadre le seul accès à ce balcon, puis lance un sortilège de mutisme discrètement. Permettant à leur future conversation de reste secrète.

« Désires-tu une tasse de thé Lakyus ? » Demande poliment Renner en prenant la théière en argent dans un geste délicat. « Il risque de ne plus être à la température idéale cependant. »

« Ce sera parfait, merci. » Assure l'Aventurière.

Un liquide à la couleur ambrée chaleureuse rempli rapidement la tasse n'attendant que sa buveuse, qui ne se fait pas prier pour en boire avec un certain raffinement. Le goût est à la hauteur de ce à quoi elle s'attendait, et malgré que la sensation soit agréable, sans compter sur le goût exquis, cela ne l'empêche pas d'afficher une mine contrarié.

« Qu'est-ce qui te tracasse à ce point ? » S'enquiert la jeune fille, l'air inquiète.

« Je sais parfaitement que tu ne fais ça que pour préserver les apparences... » Répond la combattante, contrite. « Mais je n'ose imaginer le prix d'un thé aussi somptueux, alors que je viens d'apprendre que le Comte Duv a décider d'augmenter les taxes sur son domaine, pour aménager la nouvelle aile de son inutilement grand château, tandis que la plupart des paysans là-bas sont déjà au bord de la famine à cause des inondations de ce printemps. »

« La nouvelle est parvenu à mes oreilles il y a peu. » Dit la Princesse, l'air désolée. « Je désirai aborder le sujet avec Père, malheureusement, il n'est plus lui-même depuis le décès de Sir Stronoff. » Raconte-t-elle. « Sa blessure est profonde. Je crains qu'il ne puisse jamais se remettre véritablement. Il était l'un de ses bien tristement rares soutiens loyal et intègre. »

« Maudits Nobles. » Crache pratiquement l'Aventurière, glacial et venimeuse. « J'ai tellement honte d'être née parmi eux parfois. » Avoue-t-elle. « Penser qu'ils iraient jusqu'à faire assassiner le meilleur combattant de notre Royaume, simplement par ce qu'il vient du peuple... Quand est-ce qu'ils comprendront qu'ils ne sont pas supérieur aux autres ? Que le Talent n'est pas réservé à la Noblesse ? En quoi est-ce compliqué ? Bande de sales petits profiteurs bons à... »

« Apaise-toi Lakyus. » Fait son amie en posant une main réconfortante sur la sienne. « Toutes les familles Nobles de sont pas ainsi. Prenons la tienne en exemple. » Déclare-t-elle en souriant gentiment. « Il est vrai que tes parents sont distants et froidement professionnels, cependant ils ne sont ni injustes, ni cruel, et veillent que leurs serviteurs aient, au minimum, de quoi vivre dignement. De plus, ne m'as-tu pas toi même raconté qu'ils ont finis par te pardonner d'avoir abandonné ton rang ? »

« Oui, tu as raison... » Reconnaît la jeune femme, en se calmant.

C'était il y a environ un an. Elle ne s'attendait absolument pas à renouer avec les seins de cette manière. Au départ, l'aristocrate pensait devoir subir un blâme froid et douloureux, peu importe à quel point elle pouvait affirmer ne plus être affectée par ce genre de chose. La vérité est souvent tout autre.

En effet, encore plus loin en arrière, quelques semaines après qu'elle ait fuit le château familial en douce, et être tombé dans un piège grossier qui manqua de lui coûter la vie à cause de son manque d'expérience, si ce n'est pour l'intervention de Gagaran à ce moment là, elle reçue une lettre avec le sceau de sa famille. Le contenu était des plus blessant.

Son père, dont elle avait reconnu l'écriture, lui déclara sans le moindre détour, ni ménagement, qu'elle était répudiée, perdait le droit d'utiliser ses noms de famille et que si jamais elle osait s'approcher son ancienne demeure, elle serait arrêtée et jeté dans les oubliettes comme une vulgaire criminelle.

Ce soir là, sur le conseil de sa future nouvelle partenaire, elle se saoula pour la première fois de sa vie. Puis passa le reste de la nuit à serrer dans ses bras une couverture rapiécée et malodorante, dans une auberge miteuse. La seule qu'elle pouvait se payer à l'époque. Pour ne finalement réussir à s'endormir qu'avec le lever du soleil.

Le surlendemain, elle reprit connaissance avec une migraine si abominable, qu'elle n'a encore jamais réussi à l'égaler à ce jour. Même avec touts les coups qu'elle allait prendre durant sa carrière. Ainsi qu'un cœur meurtri. Pourtant, en dépit de la douleur aussi bien physique qu'émotionnel, elle se sentait, en quelque sorte, libre et apaisée. Sa vie lui appartenait désormais complètement.

Ainsi durant les trois années qui suivirent, la jeune femme forma un groupe aussi disparate que soudé et efficace. Au final, elles devinrent le deuxième groupe d'Aventurières de tout le Royaume à atteindre le rang d'Adamantite. Qui sont unanimement reconnu de par leurs compétences, comme appartenant au Domaine des Héros des Mythes et Légendes.

Et, un jour à priori comme les autres, une demande s'adressant expressément à son groupe arriva à la Guilde. Il s'agissait d'une demande d'extermination d'un petit groupe de Demi-humain mangeur de chair humaine, qui s'était installé dans le domaine de son enfance.

Elle fut pour le moins surprise de recevoir cette Quête, surtout que d'après les informations préliminaires, une équipe un rang en dessous du sien aurait été parfaitement capable de gérer la situation. Le tout avec un salaire presque cinq fois moindre. Tout indiquait que ses parents souhaitaient la rencontrer en personne.

Après en avoir longuement discuté avec ses camarades, elle choisit de suivre leurs conseils. Chercher à les éviter maintenant n'avait pas vraiment se sens. Elles acceptèrent donc la requête et se mirent en route.

La traque se déroula sans problèmes imprévu et le soir même, l'ensemble de Blue Roses se retrouva face à face avec le commanditaire de la tâche qu'elles venaient d'accomplir.

L'air semblait peser plusieurs tonnes, et pourtant Lakyus pu trouver la force de soutenir le regard de son Père durant la longue, très longue minute de silence qui suivit son arrivée dans le petit salon où se tenait cette réunion.

Protocolaire, comme à l'accoutumé, il fit apporter la récompense promise, en les remerciant de leur travail rapide et efficace. Puis lorsque l'intendant quitta la pièce, son attitude changea légèrement. Il gardait sa façade professionnelle, mais elle était moins rigoureuse.

Il confirma que cette requête n'était effectivement qu'un prétexte, et qu'il aurait préféré que cette conversation demeure privée, mais accepta de bonne grâce que c'était un espoir vain.

Il raconta ensuite que quelques jours après que la lettre lui annonçant qu'elle était déshéritée, ait été expédiée, son frère Azuth, celui là même qui était responsable de son choix de vie à cause des histoires rocambolesques qu'il lui racontait, avait pratiquement enfoncé la grande porte. S'en est suivi une altercation des plus haute en couleur entre les deux hommes.

Une fois l'échange redevenu civilisé, le leader de Red Drop a finit par le convaincre d'attendre de voir comment la situation allait évoluer, avant de prendre une mesure aussi drastique. Le principal argument qui le fit suspendre son jugement, étant celui qu'essayer de contraindre sa fille à endosser le rôle d'une épouse modèle, ne ferait que provoquer une catastrophe spectaculaire.

Entendre cela ne manqua pas de profondément gêner Lakyus, qui dû essuyer le rire moqueur de Gagaran, ainsi que des remarques aussi diverses qu'embarrassantes de la part des ses autres camarades. Le pire fut cependant sa mère, qui, de son air faussement innocent enfonça le clou jusqu'au bout du bout, ajouta qu'elle n'avait effectivement eue une fille que de sexe. Un véritable garçon manqué.

Durant toute cette joyeuse querelle, la jeune femme essaya de faire taire le reste de l'audience, sous le regard de son père ne fit pas la moindre remarque et se contenta d'observer. Après plusieurs minutes, il se leva et prit une dernière fois la parole.

Il déclara solennellement que bien qu'il n'approuverait et ne soutiendrait jamais sa décision d'abandonner aussi disgracieusement son rang et son titre, il reconnu qu'elle avait su construire quelque chose de grand par ses propres efforts. Le tout en gardant la dignité qui convenait à une personne de haut-rang.

Tournant les talons pour sortir, il ajouta, sans ralentir ni se retourner, que tant qu'elle continuerait à agir de la sorte, elle pouvait considérer le contenu de la lettre qui l'avait tant blessé il y a plusieurs années, comme nul et non avenu.

L'Aventurière fut proprement statufiée en entendant ces mots, ne pouvant prononcer la moindre réponse cohérente.

Et, alors que sa mère se leva à son tour pour rejoindre son époux, elle mima silencieusement avec ses lèvres un ''Nous t'aimons et nous sommes fiers de toi ma fille'', tout en s'inclinant poliment. Avant de prendre congé à son tour.

Le reste de la journée est flou dans les souvenirs de Lakyus, mais elle se souvient s'être effondrée en larmes de joie et de soulagement, épaulée par ses amies, dès qu'elle était certaine que plus la moindre personne du domaine ne pouvait plus la voir ou l'entendre.

« Tu as raison Renner. » Soupire-t-elle longuement. « Merci... Et désolée. Tu as tellement d'autres choses dont tu dois te préoccuper, et pourtant il faut encore que tu me remontes le moral. »

« Tu es mon amie Lakyus. » Affirme la Princesse avec fierté. « Je t'aiderai autant de fois qu'il s'en trouvera nécessaire. »

''Haaa...'' Soupire, mentalement cette fois, la combattante. ''Pourquoi est-ce cet imbécile de Barbro qui est l'héritier du Trône, alors qu'il y a une personne aussi intelligente, gentille et méritante qu'elle, juste à côté ? Ce système est complètement détraqué...''

Terminant sa tasse de thé, elle repose le récipient sur la soucoupe, dans un geste qui a retrouvé sa sérénité et sa détermination.

« Bon, assez parlé de moi. » Fait-elle en se redressant. « Si tu as demandé à nous voir aussi rapidement, c'est qu'il y a du nouveau. Je me trompe ? »

« Correct. » Confirme son interlocutrice, satisfaite de la voir à nouveau motivée et attentive. « Malheureusement, cela ne concerne pas Eight Fingers. » Son expression s'assombrit.

« Comment ça ? » S'enquiert l'Aventurière, perplexe. « Vu les récentes pertes que nous leurs avons infligés, ils devraient commencer à renforcer leurs mesures de sécurité. Ce qui signifie qu'ils vont devoir engager plus de ressources. Cela devraient faciliter la tâche à tes informateurs pour remonter à la source. »

« Ton raisonnement est parfaitement correct. » Répond la dernière née de la famille royale, sérieuse. « C'est l'occasion pour laquelle toi et ton équipe avez si durement travaillé qui se concrétise. Il faudra sans aucun doute des mois avant qu'un opportunité similaire ne se représente. »

« Tu commences vraiment à m'effrayer Renner... » Avoue Lakyus. « Qu'est-ce qui pourrait être plus important qu'une chance de porter un coup aussi dur à ces maudits criminels ? »

Sur cette question, la Princesse sort avec délicatesse une lettre pliée en deux de sa grande manche et la tend à son amie. Celle-ci la saisit, avant de la déplier en prenant soin de la cacher dans ses bras, pour éviter qu'une personne avec une longue-vue, ou un outil similaire ne puisse en connaître le contenu en observant de loin.

Aussitôt qu'elle a finit de lire la première phrase, son sang se transforme presque littéralement en glace dans ses veines :

''Très importante, intense et soudaine activité de Zurrernorn. Suspicion de la tenu imminente d'un rituel à grande échelle.''

Levant avec difficulté les yeux vers celle qui porte le titre de Princesse Dorée, elle en reste bouche bée. Incapable d'assimiler l'information qu'elle vient d'obtenir.

Ce qui alerte immédiatement Evileye. Car, bien que leur Leader puisse se montrer impulsive et un peu trop directe, à cause de l'infernale influence de Gagaran, elle n'est pas du genre à rester paralysée. Aussi mauvaise que soient les nouvelles.

La Magic Caster sort donc de son coin d'ombre, se penche pour lire à son tour le contenu de sa missive... Et garde pour elle un juron. Ce qui ne l'empêche pas de réagir verbalement quand même.

« Pauvres fous... »

« Par pitié Renner... » Dit l'Aventurière dans un souffle presque inaudible, parvenant enfin à se reprendre. « Dit moi que celui qui a écrit ce message exagère... Qu'il est alarmiste... »

« Je crains de devoir te répondre par la négative Lakyus. » Répond-t-elle avec le plus grand sérieux. « Quoi que cette secte désire réaliser, je suis certaine qu'ils ont l'intention de faire subir à E-Rantel, le même sort que celui qui s'est abattu sur le village de Noum. »

''La Tragédie de Noum'', ou bien encore ''Le Sacrifice de Noum'' parmi tant d'autres autres façons dont il est appelé dans les livres d'Histoire, a eu lieu il y a une vingtaine d'années. Un petit village d'environ six cent habitants avait été englouti par une expérience magique ratée, de ce culte pourchassé par toutes les autorités de ce monde. Personne n'a jamais vraiment su ce qu'ils espéraient obtenir ou découvrir, mais il fallu des mois pour purifier les environs et se débarrasser des Morts-Vivants qui apparaissaient à une cadence infernale.

« Je suis vraiment heureuse que tu nous témoigne une si grande confiance, » Affirme la combattante. « mais en toute honnêteté, nous ne pouvons gérer une telle crise à seulement nous cinq. » Assure-t-elle, toujours horrifiée par la nouvelle. « Il faut que l'armée soit mobilisé, et aussi humiliant que cela puise paraître, il faut demander de l'aide aux pays étrangers. »

« J'aurai profondément aimé pouvoir faire cela. » Reconnaît Renner, amère, et réellement contrariée. « Malheureusement, je doute d'être en mesure de faire davantage. » Elle joue absentement avec le bord de sa tasse. « Père n'est pas en état de prendre une décision aussi importante en ce moment, Barbro Nii-sama ne me croirait tout simplement pas, et Zanac Nii-sama prendrai le temps de vérifier plusieurs fois ce que je lui rapporterai. Il ne prendrai la décision d'intervenir qu'une fois trop tard. Quant à quérir main forte... »

Elle sort plusieurs autres documents de la même manche que précédemment, avant de les présenter aux deux personnes présentes.

« Je vous laisserai les consulter en détail plus tard, cependant, voilà en substance un résumé concis : Le Saint Royaume de Roble, tout comme le Royaume Draconique, est désormais menacé de disparition pure et simple à cause d'une invasion de Demi-humains sans précédent. » Elle passe à la deuxième feuille. « La Théocratie de Slane est accaparée par deux fronts déjà existants, je doute qu'ils puissent réagir en temps et en heure. » Elle passe au suivant. « L'État du Conseil D'Argland est neutre depuis sa fondation, il n'interviendra que s'il est directement menacé. Et concernant l'Empire de Baharuth... » Elle montre la dernière feuille. « Je suspecte fortement que Jircniv préférera attendre que notre nation implose sous la pression de cette nouvelle catastrophe, avant de lancer un force armée conséquente, sans aucun doute assisté par le célèbre Fluder Paradyne, pour réaliser une opération de purification et de pacification rapide et déterminante. »

« Ce qui lui permettra de passer pour un héros aux yeux du peuple lorsqu'il apprendra la nouvelle. » Fait Lakyus, les dents serrées à cause de la colère. « Je déteste les gens comme lui... Comment peut-on aussi froidement sacrifier des dizaines de milliers de personnes, comme on sacrifie une pièce sur un échiquier ? »

Elle prend alors un grande inspiration pour se calmer et remettre de l'ordre dans ses idées. Elle oublie trop facilement que la façon d'appréhender une situation change du tout au tout, lorsqu'on se retrouve à la tête d'une nation. Et bien que cela ne diminue en rien le dégoût qu'elle ressent pour ce genre de monarque, qui prend de telles décisions sans sourciller, elle ne doit pas s'éparpiller pour le moment.

« Ne peux-tu pas lui écrire, en lui expliquant que le chaos pourrait se répandre sur son territoire tout aussi rapidement que sur le notre par exemple ? » Suggère l'Aventurière.

« Malgré toutes nos divergences, je me dois de reconnaître que l'Empereur Sanguinaire est aussi intelligent que je ne le suis, si ce n'est plus. » Répond la princesse, ce qui arrache une grimace à son amie. « Il déduira très rapidement, en observant le terrain, que les chances que cette catastrophe l'impacte directement sont presque nulles. Et, même dans le cas plus qu'improbable, ou il choisisse d'être excessivement prudent et décide d'agir préventivement, il n'y a alors que deux scénarios possibles. Qui sont tout aussi mauvais l'un que l'autre pour nous. » Elle lève l'Index. « Premièrement, il décide d'agir avec diplomatie et demande un effort commun entre nos deux nations. »

« Ce qui sera aussitôt rejeté par les Nobles, si sa Majesté n'est pas en état de se prononcer. » Fait Lakyus, qui sait déjà comment ça va finir. « Barbro et sa clique se moqueront ensuite de lui, l'accusant d'être devenu fou, ou de chercher à les déstabiliser. Et il se contentera de nettoyer ce qui restera de nous après. »

« Exact. » Confirme sobrement Renner, qui lève ensuite son Majeur. « La deuxième option est qu'il choisisse de rassembler son armée immédiatement, afin de faire avorter le projet de Zurrernorn au plus vite. Seulement s'il agit de cette manière, la Noblesse, qui serait obligatoirement informée de cette manœuvre belliqueuse, pourrait ordonner une mobilisation immédiate. Ce qui ne ferait qu'ajouter, si jamais l'état d'avancement de ce rituel joue contre nous, aux nombres de personnes sacrifiées. Rendant la situation encore plus catastrophique. »

« Charmant tableau. » Commente Evileye, sardonique.

« Mais pourquoi ne sommes-nous entourés que de fous !? » S'écrit Lakyus, en s'enfonçant la tête dans ses mains, incapable de retenir sa frustration cette fois.


Une fois la nuit tombée, alors que la plupart des habitants du château royal sont en train de dormir plus ou moins paisiblement, que les gardes et autres domestiques assurent leurs devoirs nocturnes, il y a une personne encore en train de travailler assidûment.

À la lueur d'un chandelier dont les bougies sont bientôt consumées, la Princesse Dorée est en train de relire en détail, pour la quatrième fois, les derniers rapports qui viennent de lui parvenir aujourd'hui, dont elle a donné une copie à la leader de Blue Roses. Mais malheureusement pour elle, elle n'a pas encore trouvé cette inspiration qui lui vient pourtant assez naturellement en temps normal. Et les ouvrages qu'elle consulte actuellement en parallèle, ne l'aide pas à progresser rapidement.

Pour faire simple : Il se passe bien trop de choses dans un trop court laps de temps.

La soudaine invasion du Saint Royaume de Roble par une coalition de Demi-Humains, d'une ampleur égalée seulement par celle assaillant le Royaume Draconique. Faisant pourtant face à un péril qui devrait forcer une mobilisation globale et immédiate de toutes ses ressources, sans compter l'absolue nécessité de s'unir, cette nation vient pourtant, presque simultanément, de se scinder soudainement en deux. Alors que rien ne pouvait le laisser présager. Laissant les deux moitiés dans un état de mort imminente au vu de ce qui est connu à cet instant.

Le regain d'activité aussi imprudent qu'inexplicable de Zurrernorn à E-Rantel, alors que depuis deux décennies les seules informations disponibles sur eux, étaient de simples rumeurs qui peuvent être qualifiées, au point de paraître ridicule, de banals ''bruit de couloir''. Jamais dans leur histoire qui semble remonter très loin, si l'on en croit les archives, ils n'avaient fait preuve d'un tel empressement.

Cependant, la plus mauvaises de toutes les nouvelles nouvelles que Renner a reçue dernièrement, était sans le moindre doute d'apprendre que Jircniv s'était enfermé dans sa chambre. Pour se laisser aller à l'ivrognerie la plus sommaire.

Ce qui, pour être totalement honnête, l'a, d'une certaine façon, réellement effrayée. Bien qu'elle soit extrêmement méfiante envers lui, principalement par ce qu'il a été le seul a voir au-delà de sa façade, elle n'en pas moins un respect indéniable pour l'homme de pouvoir qu'il est. Tout comme elle, il sait parfaitement se contrôler, garde en permanence un discours et un comportement poli. Peu importe qui se trouve en face lui. Il a bien conscience que la vraie, la plus importante des batailles, est celle qui permet de contrôler son adversaire par un fin jeu de pouvoir politique et de méninges.

C'était sa conviction. Jusqu'à maintenant, tout du moins. Qu'a-t-il pu apprendre, pour en arriver à succomber à une débauche aussi basique ?

Le réel problème auquel fait face Renner actuellement, est qu'une seule et unique hypothèse se tient pour expliquer ces phénomènes. Et celle-ci ne lui plaît absolument pas.

Au départ, elle pensait qu'il s'agissait d'une seule organisation, qui après avoir méticuleusement, longuement, très longuement, ourdi complots après complots, en était venu à contrôler une majeure partie du monde connu. Avant de soudainement décider de passer à la phase suivante d'un plan grandiose, dont elle ne parvenait pas à deviner la finalité.

En dépit que cela paraissait assembler toutes les pièces disponibles sur le moment, elle a finit par abandonner cette première vision. Par ce que la Théocratie de Slane était complètement épargnée par cette vague inattendue de phénomènes imprévisibles. Et elle doutait plus que fortement, qu'une nation qui ait réussi à survivre à la folie conquérante des Eight Greed Kings, ainsi qu'aux ravages aveugles des Evils Deities, n'ai pas pu trouver un moyen d'étouffer dans l'œuf, ce genre de machinations. À moins d'en être l'auteure, ce qui serait diamétralement opposé à toutes les opérations qu'ils ont menés ces derniers siècles. Donc encore moins probable.

De plus, en prenant le temps d'étudier de manière détaillées de nombreux paramètres, parmi lesquels figurent la topographie, la répartition des ressources naturelles, les forces militaires, pour ne citer que ceux-ci, les différents point de troubles ne pourraient jamais donner naissance à quelque chose d'ordonné. Un peu comme ci la main droite d'un homme ignore ce que fait la gauche. Tout semble indiquer que le seul but de tout cela est le chaos. Il n'y a pas la moindre cohérence si on essaye de regarder ça avec une vue globale.

C'est là qu'elle a réalisé, que chacun de ces incidents doit être regardé séparément. Si l'on considère qu'à chaque endroit se trouve une cause, et donc des conséquences différentes, alors cela prend davantage de sens.

S'en est suivit alors deux autres questions : qu'est-ce qui peut bien provoquer de tels remous en si peu de temps ? Et pourquoi cela se produit-il dans un écart temporel si restreint ?

C'est en observant distraitement le symbole de la Théocratie, que sa cause probable lui est apparu avec autant de violence que la morsure d'un chien enragé. Sentant aussitôt une boule se former dans son abdomen, elle a fait apporter dans sa chambre, par Climb, plusieurs livres et encyclopédies, sous le couver de vouloir chercher un moyen d'approfondir certaines de ses demandes, comme celle concernant sa proposition d'installer une rotation des cultures, pour en améliorer le rendement.

Alors qu'elle termine de lire les passages qui l'intéresse, les dernières relations de causes à effets terminent de se mettre en place, à la fois sur ses notes et dans ses pensées. Et ce qu'elle redoutait se confirme...

La première trace dans l'Histoire fut il y a six-cent ans, la seconde cinq-cent, et la dernière remonte à deux-cent... Des êtres aux pouvoirs inimaginables sont soudainement apparu sans la moindre raison, ni signe annonciateurs. Certains ont choisit de régner pacifiquement, d'autres de conquérir ou de détruire. Mais ils partagent tous cette origine nébuleuse. Et ce schéma paraît se répéter suivant une certaine logique, comme des vagues qui s'écrasent sur des rochers à intervalles plus ou moins régulier :. Une nouvelle arrivée se produit une fois quelques siècles écoulés.

Refermant l'ouvrage, elle se lève et va sur le balcon de sa chambre. La lune illumine le ciel d'une nuit relativement fraîche, alors que son regard se porte sur la fenêtre de son petit chiot adoré.

Elle en a désormais la certitude... De nouveaux ''Dieux'' sont sur le point de redessiner la carte du monde... De quel manière ? Est-ce par le complot ? La Guerre ? Voilà le seul point qu'elle ne peut véritablement discerner.

L'espace d'un court instant, elle se demande si elle devrait donner de plus amples informations à Lakyus. Avant de se raviser. Bien qu'elles soient toutes assez ridiculement crédules, à l'exception de Evileye, qui semble conserver des réserves sur sa personne, les membres de Blue Roses n'ont pas obtenues le Rang d'Adamantite par un quelconque concours de circonstances. Elles vont d'ores et déjà appliquer un principe de précaution maximum, dans leur traque de Zurrernorn. Leur dire d'être encore davantage prudentes n'apportera rien de plus.

Évidemment, être privée de leur support serait une perte très difficile à surmonter, cependant c'est un sacrifice qu'elle fera sans la moindre hésitation si le besoin s'en fait sentir. Non, la seule question qui lui importe donc maintenant est la suivante : Que faire pour que son mignon petit Climb et elle, survivent à la tempête dévastatrice qui s'annonce ?


Toujours en pleine nuit, dans une ruelle sombre et malodorante de E-Rantel, une jeune femme se faufile sous le couvert de la nuit, en utilisant les sorts [Fly] et [Invisibility], en plus de l'obscurité profonde qui rend n'importe quel personne qui n'est pas habituée à ce genre de conditions, presque aveugle.

Pourtant, en dépit de toutes ces mesures de sécurités drastiques, qui peuvent sans exagération être décrites comme de la paranoïa, elle n'arrive plus à se débarrasser de cette horrible impression que le couperet se rapproche de plus en plus de sa nuque. Cette peur commence à la ronger physiquement, à tel point que cela commence à en devenir visible : cernes, amaigrissement continu, fatigue physique et mentale que même la plus longue des nuits ne peut atténuer. Elle commence même à avoir des hallucinations diverses depuis quelques jours. Légères et sans conséquences pour l'instant, mais elle sait parfaitement que ça ne va aller qu'en empirant.

Chassant ces pensées au fond de son esprit, elle se concentre de nouveau sur le chemin devant elle. Son sortilège de dissimulation devrait encore durer plus d'une dizaine de minutes, soit largement assez longtemps pour lui permettre de rentrer sans être repérée. C'est alors qu'elle remarque être déjà arrivée à destination.

Aurait-elle oubliée de faire les six détours habituels ? Aurait-elle volée à une trop grande vitesse ? À moins que ce ne soit le fait de se remémorer tout ce qui l'a amené ici à cet instant précis, qui lui fait perdre conscience du temps qui passait ?

En se rapprochant de la lucarne qui lui sert de point d'entrée, elle regarde la montre a gousset qui pend négligemment derrière le carreau, sale au point de pas pouvoir discerner l'intérieur de la pièce si on ne se colle pas sur la vitre, et voit qu'elle a même plusieurs minutes de retard.

Sans attendre, elle rentre en se faufilant avec une agilité surprenante et se pose sans faire le moindre bruit. Toujours aussi silencieusement, elle approche de la porte de l'unique chambre de ce logis crasseux, et frappe trois fois. Deux autres coups lui répondent. Elle frappe de nouveau le même nombre de fois. Cinq coups se font entendre de derrière le panneau. Dont le dernier n'est pas à la suite des premiers. La jeune femme donne deux derniers coups, et enfin le panneau de bois pivote pour laisser apparaître deux petites filles. Des jumelles.

« Arche Onee-Chan ! » S'écrient-elles à l'unisson, réjouis de pouvoir retrouver leur aînée.

« U-Chan, Ku-Chan ! » Répond de la même manière l'adolescente, qui prend dans ses bras ses deux cadettes.

Les trois échangent un long, tendre et chaleureux câlin. Puis l'ancienne noble déchue les repose sur le sol avec toute la douceur et l'attention que peuvent exprimer les membres d'une même famille. Du moins ceux qui composent une fratrie un tant soit peu normale.

« Hey, Hey, Onee-Chan ! » Dit Kuuderika, en tirant de ses petites mains sur sa cape. « Aujourd'hui aussi on a parfaitement joué au jeu du silence ! Même que j'ai gagné deux fois de plus que U-Chan ! »

« C'est même pas vrai Kuu-Chan ! » S'indigne Ureirika, en faisant cette petite moue avec les joues gonflées, si typiques des enfants. « La deuxième fois, ça ne compte pas ! Je n'ai pas parlé ! J'ai juste respiré un peu fort, c'est tout ! »

« U-Chan, t'es une mauvaise perdante ! » Dit sa jumelle en lui tirant la langue.

« Allons, allons, on se calme. » Dit Arche, affichant un sourire fatigué, en leur caressant la tête de manière affectueuse. « Ce n'est pas grave que tu es perdu aujourd'hui, U-Chan. Tu gagneras mieux demain. »

La concernée grommelle à voix basse, mais ne dit rien de plus, tandis que sa sœur affiche un sourire triomphant enfantin.

Soulagée, une fois de plus, qu'elles croient toujours au mensonge qu'elle a inventé de toute pièce, pour leur permettre de supporter ces longues journées ou elles restent seules, et ne doivent pas faire de raffut pour ne pas alerter d'éventuels poursuivants. Mais une fois encore, le dégoût et la honte de les obliger à supporter des conditions de vie aussi misérables reviennent la dévorer. Arche réprime donc, avec une difficulté qui devient de plus en plus insurmontable avec les jours qui se suivent et se ressemblent, une larme.

« Et si on prenait un bain toutes les trois ? » Propose la jeune femme, en se rappelant qu'elles ne se sont pas lavées depuis plus d'une semaine. « Et à la fin, si vous êtes sage, vous aurez droit à une surprise. »

« Ouais ! Ouais ! Un bain et une surprise ! » S'écrient le duo d'enfants, toujours plus enjouées. « Comme ça on sera toutes belles et toutes propres ! »

Remerciant l'entrain et l'innocence de ses sœurs, l'adolescente prépare donc le nécessaire pour qu'elles puissent faire trempette. Elle redouble donc le sortilège de mutisme qui protège l'endroit, avant faire apparaître de l'eau, puis de la faire chauffer avec un sort de [FireBall] modifié par ses soins.

Prenant le temps de profiter de ce rare moment de détente et de partage, l'aînée n'a pratiquement pas le temps de se morfondre une fois encore sur à quel point, elle a, ironiquement, apprit à développer si vite sa maîtrise magique pour s'adapter à sa situation plus que précaire.

S'en est risible si l'on pense comment elle a, par mi tant d'autres exemples, réussi à remodeler [Reinforce Armor] pour augmenter drastiquement la durabilité d'un vêtement au lieu d'une personne. Donnant naissance à un habit, en vulgaire tissu, qui est tout aussi résistant qu'une cotte de mailles, aussi bien à l'usure qu'a l'abrasion. Tout en lui permettant de pratiquement repousser la saleté, et l'empêchant de dégager une mauvaise odeur, même après avoir été porté pendant une très longue période.

Avant, son ancien mentor en aurait été plus que fasciné, et lui aurait fournit en récompense nombres de savoirs qu'il garde jalousement, et ne distille qu'au compte gouttes pour ses élèves les plus méritant. Mais désormais, elle ne peut plus compter sur lui, ni sur quiconque d'autres qu'elle-même.

Une demi-heure plus tard, les trois sœurs sont assisses à une table rudimentaire, lavées, coiffées et partageant un bon repas. Par chance, la Magic Caster a largement assez de moyens pour leur permettre de ne rien manquer de fondamental. Elle prend juste garde à ne jamais trop acheter chez un même marchand, pour que l'on pense qu'elle est toute seule.

Arche a d'ailleurs un sourire large en voyant Kuuderika piquer, sans s'en cacher, une part de la tarte aux fruits à Ureirika, qui s'empresse de répliquer en faisant de même. Résultat, toutes les deux ont mangées la même quantité de gâteau. Simplement ce n'était pas dans leurs assiettes respectives.

Une fois le dîner terminé, l'ancienne noble leur offre sa fameuse surprise : A chacune, un excessivement large paquet de confiseries, enrobées dans de nouvelles robes colorées. Un gage de remerciement du marchand qu'elle a escorté aujourd'hui, et qui n'avait pas de quoi payer l'intégralité de la somme requise en pure monnaie. Ce qui fait bondir de joie les jumelles, qui sont véritablement heureuses de pouvoir porter quelque chose de neuf.

Un aussi étrange que joyeux défilé de mode à échelle réduite s'ensuit, tandis qu'elle applique sur ces vêtements, les mêmes types de protection et de conservation que sur les anciens.

Mais bientôt la fatigue se fait sentir et le trio va s'installer dans l'unique lit. Arche au centre, ses deux cadettes alternant leur position à droite et à gauche, suivant leurs envies du moment. Ces dernières sont tout sourire, et ne cessent de poser des questions. En dépit de l'épuisement, leur chaperonne prend le temps de répondre à chacune d'entre elles avec grand plaisir. Prenant soin de jouer sur les mots quand la réponse doit rester un secret, pour les préserver au maximum.

« Dit Onee-Chan, tu nous feras une autre surprise lorsqu'on arrivera au centième jour du Jeu du Silence ? » Demande Ureirika, les yeux brillants d'excitation et d'espoir.

« Uniquement si vous êtes sages et si vous suivez bien les règles du jeu. » Dit la jeune femme, souriante, ne montrant rien de sa détresse intérieure lorsqu'elle entend ces mots.

Il est vrai que cela fait cinquante jours qu'elles sont arrivés à E-Rantel. Elle leur a promis ce jour-là qu'elles ne resteraient ici que seulement cent jours au maximum, avant de continuer à voyager vers le Sud. Pour aller s'installer dans leur nouvelle maison, spécialement payée par leur parents pour qu'elles puissent vivre tranquilles.

Bien sûr, ce n'était qu'un mensonge de plus.

En vérité, elle a surprit ses... Géniteurs... En plein milieu d'une conversation, au hasard d'un retour anticipé d'une de ses missions avec son groupe, avec l'un des nombreux collecteurs de dettes qui devenaient de plus en plus pressants.

Malgré qu'elle ait été en mesure de ramener une quantité importante de revenus dans son foyer, au dépend de sa propre sécurité parfois, cela ne suffisait même pas à payer les intérêts. Son père vivant encore dans l'illusion qu'il est un noble puissant avec des fonds illimités, et sa mère n'étant rien de plus qu'une poupée de chair complètement soumise à lui.

Ainsi lorsque le pauvre hère entendit qu'il fallait rembourser au plus vite, sinon il risquait d'avoir de graves conséquences, eut pour première réaction de réagir violemment et de menacer le percepteur devant lui.

Celui-ci, parfaitement calme et composé, se contenta de lui rappeler qu'il suffisait d'un mot de sa part, pour que gens moins poli n'enfonce la porte, et les emporte tout les cinq pour être vendu aux esclavagistes.

Le silence s'installa et Arche entendit l'homme qui lui tenait lieu de père, s'affaler dans le trop luxueux divan acheté il y a peu, pour une somme exorbitante. Elle crut l'entendre bredouiller de nouvelles menaces aussi vaines que pitoyables durant quelques secondes, avant de faire une proposition qui lui donna l'impression d'avoir le cœur brutalement empalé par un pieu en métal glacé.

Il lui offrait ses deux plus jeunes enfants pour rembourser une partie de ses dettes, déclarant qu'avec elles en moins à nourrir et loger, ils pourraient rembourser plus facilement. Que les sommes d'argent ramenées par sa première fille allaient augmenter dans un futur proche. Ainsi que bien d'autres inepties du même acabit. Et durant l'intégralité de ce discours délirant, pas une seule fois sa mère ne chercha à protester, ou seulement à se faire remarquer.

La Magic Caster resta figée, comme catatonique, dans le recoin ou elle était caché pendant une durée impossible à déterminer. Son esprit ne faisait que s'imaginer les pires scénarios : Kuuderika et Ureirika mourant d'épuisement, seules et désespérées au fond d'une mine, sans jamais revoir la lumière du jour. Abusées sexuellement pour le reste de leurs vies, par des hommes aux goûts aussi immondes que leurs apparences et leurs manières. Torturées et mutilées par un quelconque dégénéré...

Le soir même, elle pénétra en douce dans la cachette de Foresight et déroba l'intégralité de la somme importante, qu'ils venaient de gagner en remplissant une mission illégale, pour le compte du Bureau des Affaires Internes. Normalement, elle aurait attendu le lendemain et aurait négocié avec ses camarades pour obtenir une plus grande part. Étant tous des gens bien, elle est certaine qu'ils auraient acceptés. Mais elle n'avait pas le temps. Elle laissa juste un court message d'excuse, expliquant pourquoi elle trahissait leur confiance de cette manière.

Moins d'une demie-heure plus tard, elle réveilla doucement ses deux sœurs et leur raconta cette histoire de déménagement surprise. Usant même de sa magie devant elles pour la première fois, pour les faire partir au plus vite. Elle n'oublia cependant pas de laisser une partie de l'argent à James, leur Intendant, et le seul a qui les intérêts de sa famille tenait vraiment à cœur, lui expliquant ce qu'elle avait fait.

Pour avoir choisit de rester envers et contre tout après qu'ils aient été déchu de leur titre de noblesse, veillant sur les petites jumelles à sa place, et essayant de contenir l'obsessionnelle attitude dépensière de ses parents.

Il méritait bien plus, certes, malheureusement, elle ne pouvait faire mieux et espérait qu'il comprendrait.

Au moment ou toutes trois s'apprêtaient à passer le poste de garde, Arche eue une brève hésitation. Elle se souvenait parfaitement de l'expression déçue de son professeur, Fluder Paradyne, lorsqu'elle lui a annoncé devoir renoncer à sa carrière en qualité de pratiquante des Arcanes, à cause des dettes de sa famille. Peut-être serait-il disposé à la reprendre sous son aile, si elle choisissait bien ses mots.

Avant de décider de rester sur son idée première. Surtout à cause des rumeurs très inquiétantes qui couraient ces derniers temps. Apparemment un genre de manifestation magique inattendue, l'avait rendu presque complètement hystérique. Même certains des Trente, ces disciples les plus talentueux commençaient à se méfier de lui.

Les voilà rendu où elles en sont aujourd'hui...

Ayant sous-estimé le coût de son voyage, la jeune femme est obligé de prendre des requêtes de plus en plus dangereuses, de plus en plus fréquemment, de la part de commanditaires de plus en plus sordides, pour récupérer assez d'argent pour pouvoir passer la frontière avec la Théocratie de Slane. Elle pense, ou pour être parfaitement honnête envers elle-même, espère, pouvoir leur prouver qu'elle pourrait leur être utile d'une manière ou d'une autre. Peu importe laquelle.

Mais elle sait que tôt ou tard, elle va fait une erreur qui va lui coûter plus qu'elle ne peut payer. Bien sûr, elle n'a également pas oublié que les organisations criminelles de Arwintar ne vont certainement pas en rester là. Ses parents ont, sans aucun doute, déjà été vendu en esclaves. Mais cela est loin de rembourser les sommes astronomiques qu'ils ont empruntés.

Sans compter que si elle commence à avoir une trop grande réputation auprès des bandits de cette ville, elle risque de ne plus pouvoir se défaire d'eux. Ce qui finirait, inévitablement, par causer du tort à ses sœurs.

Et ça, jamais, non, jamais, elle ne se le permettra...

« Pourquoi pleures-tu Onee-Chan ? » Demande alors Kuuderika, inquiète.

Sortant soudainement de ses pensées moroses, Arche reste plusieurs secondes sans réagir. Avant de porter sa main dominante à son visage. Se frottant les yeux, elle se rend compte qu'elle est effectivement en train de verser des larmes.

Avec un effort qui lui coûte presque physiquement, elle s'essuie les yeux et se force à montrer un sourire rassurant. Qui n'est, heureusement, pas percé à jour par les derniers membres de sa famille.

« Ce n'est rien Kuu-Chan, j'étais juste un peu triste que Papa et Maman, ne soient pas là avec nous. » Mentant une nouvelle fois par nécessité, en dépit de son dégoût d'elle-même.

« C'est vrai que j'aimerai pouvoir jouer au Jeu du Silence avec eux moi aussi. » Affirme Ureirika, en essayant de remonter le moral de son aînée. « Mais on pourra le faire lorsqu'ils nous rejoindrons dans notre nouvelle maison ! »

« Tu as parfaitement raison U-Chan. » Confirme la Magic Caster, en caressant avec douceur la chevelure de sa petite sœur.

« Ah ! C'est pas juste ! » S'exclame sa jumelle, jalouse, en gonflant les joues de façon comique. « Pourquoi il n'y a que U-Chan qui ait le droit d'avoir des tapes sur la tête ! J'en veux moi aussi ! »

« Premièrement, les petites demoiselles bien élevées ne disent pas ''je veux''. » La gronde gentiment Arche. « Ensuite, je ne t'ai pas oubliée Kuu-Chan. » Termine-t-elle, en lui donnant à son tour son lot de caresses affectueuses.

Les trois partagent ainsi un moment de complicité et de légèreté, avant de se laisser lentement et paisiblement, glisser dans un sommeil réparateur. Le premier depuis longtemps pour la jeune femme. Pour la première fois depuis qu'elles se sont enfuies précipitamment, elle s'endort avec le réel espoir que les choses vont finir par s'arranger.


Fin du Chapitre 14 !

N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez.