Bonjour à toustes !

Merci pour vos nombreuses reviews et vos « joyeux anniversaire » dans celles-ci, ça m'a beaucoup touché.
Un merci particulier pour les « Guest » qui me laissent régulièrement des reviews mais à qui je ne peux répondre en privé.

Nous retrouvons Drago et Harry, en vacances chez ce dernier. C'est un chapitre important pour nos deux protagonistes, particulièrement Drago. Vous verrez.

Bonne lecture !


Chapitre 20 — Souvenirs

Mardi 7 avril 2020

Drago ouvre les yeux et met quelques instants à se souvenir pourquoi il ne reconnaît pas l'endroit où il se trouve. Il n'est ni à Poudlard ni chez lui, mais dans le grand lit de Harry, dans sa maison. Il tourne la tête et découvre sans surprise que la place à côté de lui est vide. Drago n'a jamais été du matin, il n'aime pas se lever tôt et dort sans difficulté jusqu'à neuf ou dix heures. Rien n'a jamais changé cela : ni les remontrances familiales toute sa jeunesse, ni les horaires imposées à Poudlard puis pendant ses études, ni élever un enfant qui se réveille aux aurores, ni son travail de professeur qui lui impose des horaires stricts. Alors, dès qu'il le peut, et cela est rare, il dort tard le matin.

Drago s'étire tel un fléreur puis se lève. Il écoute, mais il n'y a pas de bruit dans la maison. Cela fait sourire le professeur de Potions, Harry est resté silencieux pour ne pas le déranger. Il n'a plus l'habitude de vivre avec quelqu'un d'autre que lui-même ou Scorpius et c'est très agréable de partager la vie de quelqu'un qui se soucie de lui.

L'homme blond se rafraîchit rapidement dans la salle de bain attenante à la chambre puis s'habille et descend à la cuisine. Il se prépare un thé, tranquillement. Il ouvre tous les placards et trouve une tasse, une boîte avec des sachets de thé et réussit à allumer sans trop de difficulté la bouilloire de Harry. Comme beaucoup des objets dans cette cuisine, c'est moldu, mais Harry l'a utilisé la veille pour leur faire une infusion et Drago se rappelle qu'il faut juste appuyer sur un petit bouton.

Drago sirote lentement son thé et grignote quelques biscuits trouvés dans une boîte posée sur le large plan de travail. Il est assis à la grande table qui meuble le milieu de cette cuisine qu'il trouve étrange. D'après Harry, c'est « moderne » selon les critères moldus : le plan de travail est en chêne clair et les meubles sont gris et rouge. Ce qui est certain c'est que ça ne ressemble pas du tout à ce que Drago connaît, mais il pourrait s'y habituer. C'est fonctionnel, il l'a déjà constaté. Et la cuisine est chaleureuse et très lumineuse : une grande baie vitrée donne sur le jardin et permet à la lumière d'éclairer la vaste pièce.

Harry lui a raconté que Ginny et lui ont acheté la maison après leur mariage et une période de colocation avec Ron et Hermione. A l'époque, la maison n'était pas comme aujourd'hui, le couple a changé la décoration de toutes les pièces au fur et à mesure des années. Iels ont installé des appareils moldus puisqu'il s'agit d'un quartier moldu et donc connecté aux différents réseaux. Drago est stupéfait des inventions moldues et comprend que, sans magie ni elfes de maison, ces humains ont développé d'autres méthodes pour se faciliter la vie.

Après son frugal petit-déjeuner, Drago se met en quête de Harry et l'appelle. Une voix s'échappe du couloir du rez de chaussée :

— Je suis dans mon bureau.

Drago le rejoint. Harry est en train de feuilleter un livre, debout devant une des bibliothèques. La pièce est éclairé par le soleil qui entre par la grande fenêtre derrière l'imposante table. Les deux murs principaux sont recouverts d'étagères et meubles vitrés contenant des objets. Drago devine qu'il s'agit de souvenirs de l'école et de sa vie en général. Une pensine repose dans un coin et un support à souvenirs bien rempli la jouxte. Le bureau de Harry est recouverts de parchemins et Drago reconnaît des copies en cours de correction quand il s'en approche.

— Bien dormi ? lui demande Harry en venant l'embrasser chastement, une main sur la taille.

— Très bien, merci. C'est très calme ici, ça fait du bien de ne pas avoir besoin de rester aux aguets des éventuels élèves qui pourraient avoir besoin de moi.

— J'adore cet endroit, un vrai havre de paix. Nous l'avions choisi pour cette raison d'ailleurs.

Effectivement, l'endroit est très paisible : un immense jardin entoure la maison et les voisins sont à une distance raisonnable pour la banlieue londonienne. La rue est peu passante et uniquement fréquentée par les riverains. Drago s'assoit dans le confortable fauteuil derrière le bureau.

— Tu as encore beaucoup de devoirs à corriger ?

— Oui, mais ça peut attendre. J'ai profité que tu dormais pour avancer dans mon travail. J'ai aussi les cours de la rentrée à préparer et je sais maintenant que ça me prendra du temps. Les deux semaines ne seront pas de trop si je veux aussi me reposer et profiter d'être avec toi.

Le Serpentard jette un œil aux parchemins partiellement annotés. Les gribouillis presque illisibles de Harry le font sourire et il se demande comment ses étudiant·e·s arrivent à le relire. Son regard glisse sur des photos posées sur le côté : les enfants de Harry, ainsi que Ginny et lui lors de leur mariage. Il retient une grimace, il ne veut pas passer pour le nouveau petit-ami jaloux, il sait que c'est ridicule. Harry a un passé et lui également, il faut faire avec.

— Je termine juste de vérifier une information dans ce livre et je suis à toi.

Le regard de Drago remonte vers Harry, concentré sur sa lecture. Il le trouve beau et désirable, quand bien même il est encore en pyjama et totalement décoiffé. Ce qui ne change pas vraiment du quotidien, sa chevelure restant indomptable. Il ne le lâche pas des yeux et le regarde poser son ouvrage dans le rayonnage puis venir écrire quelques mots sur une feuille. Harry se penche sur le bureau pour attraper une plume et la tremper dans de l'encre, juste à côté de Drago qui est encore sur le fauteuil. Il est tourné vers Harry et le bas de son dos, découvert par la position de Harry, est tentateur. Drago ne peut s'empêcher de le chatouiller sur le côté et Harry se trémousse en grognant son mécontentement. Puis il se relève et s'assoit à moitié sur le bureau, bras croisés, quasiment entre les jambes de Drago.

— Je parie que ce bureau ne t'a pas servi qu'à travailler, glisse Drago, un sourire narquois sur les lèvres.

— Pourtant je t'assure que si. Je n'ai jamais culbuté qui que ce soit là dessus.

Drago fait la moue.

— En revanche, Albus a été conçu sur ce fauteuil, ajoute Harry après un petit temps, devant la mine déçue de Drago.

Drago se lève d'un coup et son air horrifié fait éclater de rire Harry. Ce dernier décide de donner quelques explications.

— Albus est un accident, mais nous ne regrettons pas qu'il soit là. J'étais assis ici à lire les papiers pour le divorce et Ginny m'a rejoint pour la même raison. Par habitude, elle s'est assise sur mes genoux. Je te fais grâce des détails, mais bon voilà. Ça faisait longtemps que ça n'était pas arrivé et ça a clôt notre histoire de façon positive finalement, bien que nous avons toujours été d'accord sur le fait que la séparation était indispensable.

— Vous avez divorcé avant de savoir qu'elle était enceinte ?

— Oui, nous avons signé ce jour là. Nous nous protégions, elle n'aurait pas dû tomber enceinte. La décision de le garder a été difficile, mais ça s'est très bien passé après sa naissance parce que nous nous sommes organisés.

— Je suis bien heureux qu'il soit là, pour Scorpius ! Il a accepté mon fils sans une once d'hésitation, malgré son nom. Et tous les autres enfants de ta famille ont suivi, je n'en aurai jamais espéré tant pour lui. Je craignais énormément que mon passé, et celui de mon père, lui porte préjudice. Se lier d'amitié avec un Potter dès la rentrée a certainement limité les réactions négatives.

Harry se rapproche de Drago et lui prend les mains. Il sent qu'il a besoin de soutien, son passé est lourd à porter. Et il sait pourquoi.

— Tu oublies que ta présence à Poudlard depuis des années et le fait que tu aies acquis le respect des gens ont sûrement aidé à son intégration. Tu as amplement montré que tu n'es pas ton père et que ses idées ne sont plus les tiennes. Les gens le savent.

— A Poudlard, oui. Ailleurs, j'en doute. J'espère simplement que la vie de Scorpius ne sera pas trop difficile à cause de tout ça.

Harry caresse du pouce le dos de la main de Drago, pour l'apaiser.

— Les choses s'améliorent avec le temps, je suis certain qu'il s'en sortira. Et il est bien entouré en cas de difficulté. Ne t'inquiète pas.

Drago hoche la tête, perdu dans ses pensées et ses inquiétudes. Harry décide de le dérider un peu et se coule contre lui. Il passe ses mains sur sa taille et remonte dans le dos, langoureusement. Puis descend sur ses fesses.

— Si tu veux, on peut changer les choses et créer de nouveaux souvenirs de débauche dans ce bureau, susurre Harry.

— Pas pour le moment, répond Drago avec un sourire, mais j'apprécie que tu aies proposé.

Harry est content que sa diversion ait fonctionné, que Drago ne soit plus morose à cause de son passé. Ils sortent de la pièce et décident d'aller acheter le repas du midi.

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Jeudi 9 avril 2020 — Drago

Le ventre plein, je repose mon dos contre les coussins du vieux canapé râpé de Harry. La main sur mon estomac, je soupire de satisfaction.

— Alors ? Mieux ou moins bien que le japonais ?

— Hum… je ne sais pas. C'est trop différent. Mais c'était bon.

Mon regard s'égare sur les barquettes et les boîtes en carton éventrées qui gisent sur la table basse. Ce soir, Harry m'a fait manger indien. Il a décidé de me faire découvrir la nourriture moldue à sa façon, en accéléré, et a commandé différentes choses à chaque repas depuis que je suis arrivé. Excepté lundi soir puisqu'il avait cuisiné. Les sushis d'hier me restent en mémoire comme l'une des découvertes les plus spectaculaires de ma vie, à mon grand étonnement.

J'ai encore la bouche pleine de curry et le souvenir du dessert glacé aux saveurs étonnantes me fait sourire. Harry est totalement excessif, mais je crois que ça fait parti des choses que j'aime chez lui. J'aurais sûrement détesté ça quand nous étions jeunes, je trouvais toutes les excuses pour le haïr de toute façon, même quand ce n'était pas justifié. Je le regarde pendant qu'il achève sa glace et la langue qui nettoie la petite cuillère me nargue. Je ne sais pas s'il le fait exprès, mais ça ne me surprendrait pas.

Dans le silence relatif de la pièce, je regarde autour de moi pour la centième fois depuis que je suis arrivé dans cette maison. Harry passe beaucoup de temps dans le salon, j'ai l'impression qu'il n'en sort que pour dormir ou travailler. La pièce est grande et assez peu lumineuse contrairement à d'autres endroits de la demeure. Pour autant, elle est accueillante et chaleureuse avec ses tapis, son canapé usé par les années recouvert de plaids et de coussins, sa grande cheminée allumée dont le bois craque en se consumant et la musique en fond sonore. J'aime sa table basse en bois brut qui lui ressemble et son parquet foncé qui sent bon la cire, me rappelant les vieux meubles de mon enfance.

De grands cadres égayent l'endroit et le personnalise. Il s'agit de photos prises par Harry pendant sa carrière d'Auror, lors de ses déplacements un peu partout. Il y a un cliché des gratte-ciel de New York, un autre des landes Irlandaises balayées par les vents et un troisième de la cathédrale Notre Dame de Paris avant l'incendie. Et d'autres photos d'endroits que je ne connais pas.

Je me rends compte du gouffre qui nous sépare quand je compare sa maison et la mienne. Quand j'ai acheté le petit appartement de Pré-au-Lard, je ne voulais pas reproduire le faste du Manoir et j'en aurais été de toute façon incapable financièrement. De ce fait, il est assez impersonnel, mais j'ai fais de mon mieux pour qu'il ne soit pas froid. Je n'ai que peu de souvenirs ou photos que je souhaite exposer parmi ce qu'il me reste, la majorité de nos biens ayant été saisie à la fin de la Guerre. Il y a tant de choses qui me rappellent de mauvais moments que je n'ai pas envie de risquer de replonger dans mes angoisses et mes traumatismes en les mettant sur une étagère. Je ne sais même pas si Scorpius connaît le visage de son grand-père. Peut-être l'a-t-il vu dans les nouveaux livres d'Histoire de la Magie, mais je ne supporterai pas d'exposer un portrait de mon père chez moi. Toutes les photos d'enfance que je possède sont enfermées dans un coffre, sauf quelques-unes avec Mère. Mon fils est la seule personne qui décore les murs de mon appartement, avec Astoria et sa famille. Et cela m'effraie profondément de réaliser que je me sens si bien chez Harry que je n'ai pas envie de repartir. Après seulement deux mois de relation et alors que je ne suis même pas capable de lui dire que je l'aime, c'est particulièrement angoissant. D'autant plus que je n'ai pas la certitude absolue que ce soit le cas, je n'ai jamais été amoureux avant.

Mon regard finit par être attiré par Harry qui gesticule et farfouille dans ses poches.

— Tu cherches quelque chose ?

— Je ne sais pas où j'ai mis ce fichu téléphone. Je viens de me souvenir que Tulipe devait m'envoyer un SMS. Elle est censée venir pour me parler de l'enquête.

— Si c'est comme les autres fois où tu l'as égaré, il peut-être n'importe où… Un jour tu vas perdre ta tête, Potter !

— Je t'emmerde, Malefoy !

Nous nous fixons du regard un long moment, sans animosité. Ses lèvres frémissent, retenant un sourire, tout comme les miennes. Le temps des affrontements est bien loin maintenant. Nos prises de bec régulières ne comptent pas et j'ai l'impression qu'elles sont inévitables. C'est ainsi que nous fonctionnons : nos différences nous obligent à y être confronté et à les dépasser.

— Pourquoi tu n'utilises pas un sortilège d'attraction ?

— J'ai déjà essayé, je l'ai amèrement regretté. S'il est dans une pièce fermée, il va juste se fracasser contre la porte. Et un simple Reparo ne pourra rien pour le remettre en état. Ça fait parti des inconvénients de ces objets, non seulement c'est fragile à la base, mais avec l'adaptation au monde magique, seuls les fabricants peuvent réparer ça. Et j'en ai besoin, je ne peux pas prendre le risque de le détruire.

Je suis perplexe sur l'utilité d'un objet aussi fragile. Je n'ai pas l'habitude qu'on ne puisse pas réparer quelque chose d'un coup de baguette. J'ai raté quelque chose en ne m'intéressant pas à la culture moldue quand elle a commencé à se mêler à la nôtre. Il faut vraiment que je me plonge dedans sinon je vais rapidement être dépassé.

Harry finit par se lever et partir à la recherche de son téléphone perdu. Il ne me propose même pas de l'accompagner, il sait que je vais l'envoyer sur les snargaloufs. Je l'attends patiemment et mon attention se porte sur la musique qui se diffuse dans la pièce. Harry aime la musique et il en met tout le temps, juste en fond. Il m'a montré comment utiliser son petit ordinateur portatif pour déclencher la diffusion du son. Un sortilège associé permet que la musique d'être entendue dans toute la maison sans pour autant être assourdissante. Il m'a expliqué aussi ce qu'il pouvait faire d'autre avec l'ordinateur. Je trouve ça incroyablement fascinant qu'un si petit objet puisse faire tant de chose. Le nombre de groupes de musique moldue est tout aussi vertigineux et un monde entier s'ouvre devant moi. Certains morceaux qu'il m'a fait découvrir ont écorché mes oreilles, mais d'autres étaient très plaisants. Tout comme le reste, je compte bien m'y intéresser un peu plus, ça changera des deux ou trois radios sorcières diffusant les mêmes antiquités depuis que je suis enfant.

Les premières notes et paroles d'un morceau me font lever la tête :

« I hear the ticking of the clock (J'entends le tic-tac de l'horloge)

I'm lying here the room's pitch dark (Je suis allongé·e ici, dans les ténèbres de la chambre)

I wonder where you are tonight » (Je me demande où tu es ce soir)

C'est mélancolique et puissant. Je me dirige jusqu'à l'ordinateur pour regarder le nom de l'artiste et de la chanson : « Céline Dion - Alone », bien évidemment ça ne me parle pas du tout, je n'ai pas la moindre idée de qui est cette personne. Mais sa voix me transporte et les paroles, que j'écoute avec attention maintenant, me touchent :

« No answer on the telephone (Pas de réponse au téléphone)

But the night goes by so very slow (Mais la nuit passe si lentement)

Oh, I hope that it won't end though (Pourtant, j'espère qu'elle ne finira pas)

Alone » (Seul·e)

Quand ce que je devine comme le refrain commence, la puissance des mots me giflent mentalement :

« Till now I always got by on my own (Jusqu'à maintenant je me suis toujours débrouillé·e seul·e)

I never really cared until I met you (Je ne m'en suis jamais préoccupé·e jusqu'à notre rencontre)

And now it chills me to the bone (Et maintenant cela me glace jusqu'aux os)

How do I get you alone? » (Comment puis-je t'avoir pour moi seul·e ?)

Je m'accroche au bureau sur lequel l'ordinateur est posé. Je ne peux détacher mon regard de l'écran et mon cœur frappe fort contre mes côtes. La voix profonde et magnifique ajoute de la puissance aux mots. Et le deuxième couplet me met presque à genoux :

« You don't know how long I have wanted (Tu ne sais pas combien de temps j'ai espéré)

To touch your lips and hold you tight, no (toucher tes lèvres et te serrer fort, non)

You don't know how long I have waited (Tu ne sais pas combien de temps j'ai attendu)

But I was going tell you tonight (Mais j'allais te le dire ce soir)

But the secret is still my own (Mais le secret est toujours mien)

And my love for you is still unknown (Et mon amour pour toi est encore caché)

Alone » (Seul·e)

La réalisation est un cognard me percutant à pleine vitesse, je pourrais presque avoir écrit cette chanson. Du moins en partie. La solitude de ma vie avant Harry ne me pesait pas, je m'en rendais à peine compte. C'est seulement depuis que j'ai accepté de m'ouvrir à lui et envisagé d'avoir une vie amoureuse que j'ai compris à quel point j'étais seul. Et que je ne veux plus l'être. Et qu'il faut que je lui dise que je l'aime, parce qu'il faut qu'il le sache.

Ces quelques mots écrits par une inconnue me transpercent. Je réalise que mes sentiments sont là, bien réels, et que j'ai si peur que je refusais de les accepter. À partir du moment où nous nous aimons, plus rien ne me retient de le dévoiler à tout le monde, parce que je peux croire en un avenir. Mais si je le dis… Je ne sais pas si je suis capable d'affronter le regard de tout le monde, qu'on me trouve anormal. Ce n'est pas parce que ça s'est bien passé avec Scorpius et les enfants de Harry que ça sera le cas des autres. Ma propre mère refuse ma différence, alors qu'en penseront des étrangers ?

« Till now I always got by on my own (Jusqu'à maintenant je me suis toujours débrouillé·e seul·e)

I never really cared until I met you (Je ne m'en suis jamais préoccupé·e jusqu'à notre rencontre)

And now it chills me to the bone (Et maintenant cela me glace jusqu'aux os)

How do I get you alone? (Comment puis-je t'avoir pour moi seul·e ?)

How do I get you alone? (Comment puis-je t'avoir pour moi seul·e ?)

How do I get you alone? (Comment puis-je t'avoir pour moi seul·e ?)

How do I get you alone? (Comment puis-je t'avoir pour moi seul·e ?)

Alone (Seul·e)

Alone » (Seul·e)

Le dernier refrain s'achève et j'essuie une larme qui perle au coin de mon œil. Je me rassois sur le canapé, complètement bouleversé. Fort à propos, une musique plutôt joyeuse résonne maintenant dans la maison et cela m'aide à me sentir mieux.

Harry revient quelques minutes après et je commence à me remettre de mes émotions, bien que je me demande comment je vais bien pouvoir aborder ce que je veux lui dire. Il me semble inconcevable de lui balancer sans contexte que je suis finalement tombé amoureux de lui. Je prends une grande inspiration pour me reprendre avant de le regarder. Il a son précieux téléphone dans la main et un air préoccupé. Quelle mauvaise nouvelle a-t-il encore reçue ?

— Alors ? Des nouvelles de ta copine Auror ?

— Ah oui, elle vient dimanche matin, tu seras encore là ?

— Mon Portoloin pour New York est à quatorze heures, donc oui. Qu'est-ce qui ne va pas ?

— Je suis si transparent que ça ?

— Je commence à te connaître un peu, Potter… Tu tires une tête pas possible.

Harry s'assoit à côté de moi sur le canapé, pousse d'une main les restes du repas et pose un objet devant moi. C'est une baguette.

Je la regarde sans comprendre. Puis je regarde de nouveau Harry, son visage est toujours inquiet. Je reporte mon attention sur le morceau de bois.

Puis je me souviens : aubépine, crin de licorne, vingt-cinq centimètres, plutôt souple. Ma première baguette. J'ai un coup au cœur en la prenant en main et je la sens vaguement réagir à mon contact. Je regarde de nouveau Harry, il a un sourire crispé.

— D'où ça vient ?

— Du fin fond d'un de mes tiroirs… Je cherchais mon téléphone quand je suis tombé dessus, je ne me souvenais pas que je l'avais mise là. Pour être honnête, je ne savais même plus que je l'avais.

— C'est incroyable que tu l'ai conservée tant d'années. J'étais persuadé que je ne la reverrais jamais.

— Tu pourras la garder comme baguette de secours, c'est toujours utile d'en avoir une. Comme je te la rends de mon plein gré, je pense que son allégeance reviendra vers toi. D'autant plus que tu es son propriétaire d'origine, elle doit s'en souvenir.

Un sentiment étrange me parcourt. Cette semaine chez Harry est vraiment source d'émotions fortes et me chamboule complètement. Je ne sais pas ce que ça augure pour le futur, j'espère pas trop d'écueils.

— Je sens qu'elle pourra m'obéir. De toute façon, ça ne peut pas être pire que la baguette de prêt que j'ai eu pendant un an et avec laquelle j'ai passé les ASPIC…

L'air perplexe de Harry me fait sourire. Je lui raconte dans les grandes lignes les obligations qui ont été les miennes pendant l'année charnière qui a suivie ma sortie d'Azkaban jusqu'à ma libération officielle : une résidence obligatoire en Angleterre, des sorties soumises à autorisation de mon abominable agent de réinsertion, une baguette de prêt truffée de sortilèges de surveillance notamment la Trace et une limitation de puissance, une obligation à réussir au moins cinq ASPIC. Il y a eu la suite aussi : les dommages et intérêts, un suivi judiciaire pendant cinq ans, qui m'a forcé à revenir à Londres plusieurs fois par an et ma nouvelle baguette sous surveillance et soumise à la Trace pendant dix ans.

Harry a la bouche ouverte de surprise et ressemble à un poisson hors de l'eau. Nul doute qu'il ne savait rien de tout cela et connaissant son tempérament de sauveur de la veuve et de l'orphelin, il n'aurait pas approuvé. Cette discussion me fait me souvenir d'un détail important.

— Je ne t'ai jamais remercié pour ton témoignage à mon procès. Grâce à toi, le Magenmagot a été clément, quoi que tu en penses. Je ne me plains pas de mon sort, j'ai eu de la chance par rapport à d'autres… Gregory a pris cinq ans. Pansy m'a appris qu'il a fait une dépression et s'est suicidé trois jours avant d'être libéré.

— Je n'ai fais que dire la vérité, Drago. Je ne savais même pas si ça aurait une quelconque influence et je n'étais pas vraiment en état de m'en préoccuper à ce moment là. Franchement, je me fichais de ce qui allait t'arriver.

— Merci quand même.

Harry a l'air un peu gêné. Je sais maintenant que ce n'est pas de la fausse modestie comme je l'imaginais avant. Il n'aime vraiment pas être mis en avant, remercié pour ce qu'il a fait, malgré les années, cela n'a pas changé. Cette discussion me ramène vingt-deux ans en arrière, à ce jour funeste où une poignée de personnes ont eu mon avenir et ma vie entre leurs mains.

Mercredi 26 août 1998

La salle du Magenmagot est pleine à craquer de badauds et de journalistes. Je suis assis au milieu de l'amphithéâtre, en contrebas de toute cette foule. Je suis certain que c'est voulu, pour écraser l'accusé. Mais je ne suis pas en état de m'offusquer de quoi que ce soit : cela fait presque quatre mois que je suis en détention provisoire et cela a achevé ma combativité déjà plus que réduite au naturel.

Le Président énonce les chefs d'accusation à mon encontre, c'est long. Ils ont beaucoup de choses à me reprocher, à raison. Ces quelques mois en prison m'ont fait suffisamment réfléchir, je sais depuis le début que j'ai mal agi, mais maintenant j'ai conscience que je dois payer pour ça. Que l'argent de ma famille et l'influence que mon père a eu pendant des décennies ne serviront à rien ici. De toute façon, mon paternel est déjà à Azkaban, son procès s'est achevé la semaine dernière.

Ensuite c'est le tour de mon avocamage de prendre la parole et je sais qu'il fera son possible pour moi. Au moins une chose que je peux me payer : une personne compétente, c'est mon seul espoir que la punition soit raisonnable. Je n'espère même pas être acquitté.

Il y a peu de personnes qui peuvent, et veulent bien, témoigner en ma faveur : ma mère, mes amis et, curieusement, Potter. Pour les premiers, je ne doute pas que le Magenmagot n'en tiendra pas compte, ou presque. Concernant Potter, je ne pensais pas qu'il allait accepter de passer à la barre pour moi. Mon avocamage pense que c'est la meilleure chance que j'ai et je suis d'accord avec lui, même si je ne vois pas bien en quoi il va pouvoir m'aider.

Au bout d'un certain temps, je le vois s'avancer à l'annonce de son nom, depuis l'un des gradins bourré à craquer de spectateurs. Il joue un peu des coudes et rejoint le niveau du Magenmagot, juste au dessus du mien. Je suis au plus bas, au sens propre et au figuré. Il a une tête de d'inferi : des cernes lui mangent la moitié du visage, ses yeux sont presque vitreux de fatigue et je crois qu'il tremble.

Monsieur Potter, pouvez-vous nous dire quelles relations vous entretenez avec mon client ? commence mon avocamage.

Je sais déjà d'avance toutes les questions, ou presque, qui seront posées. Celle-ci sert à montrer que notre inimité prouve la bonne foi de Potter. Admettons.

Malefoy et moi, nous nous détestons depuis le premier jour à Poudlard. Nous avons des idées et des conceptions de la vie totalement opposées, impossible de s'entendre avec lui.

La voix de Potter est monocorde et un peu éteinte. Où est passé le Gryffondor combatif ?

Y a t-il déjà eu des affrontements ?

Plusieurs, oui. Surtout des insultes et moqueries lancées dans les couloirs de l'école. Et en sixième année on s'est battus l'un contre l'autre.

Pouvez-vous expliquer le contexte et ce qui s'est passé ?

Je serre les dents, je ne sais pas exactement ce que Potter va raconter, mais les mauvais souvenirs me reviennent déjà en mémoire. Mon avocamage, qui s'est entretenu avec Potter il y a quelques jours, sait déjà dans les grandes lignes ce qu'il va répondre apparemment. Mais il n'a rien voulu me dire.

Je soupçonnais Malefoy de comploter un truc malsain pour Voldemort. Je l'ai beaucoup surveillé cette année-là. Jusqu'à ce que je le suive un jour jusqu'aux toilettes et que je le surprenne en train de pleurer. Il avait l'air de plus en plus mal avec les mois qui défilaient, mais je ne pensais pas qu'il était si désespéré. Il n'a pas aimé que je le trouve et on s'est jeté des sorts violents à la figure. J'ai failli le tuer ce jour-là.

Sa voix se brise sur les derniers mots. Je frissonne et je ferme les yeux sous le souvenir de la douleur. Je lui suis reconnaissant de ne pas parler de la tentative de Doloris sur sa personne. J'ai l'impression que cela l'a un peu réveillé, il se tient plus droit et son regard est sorti du vague. Je ne sais pas si c'est parce qu'il parle de moi ou parce qu'il repense lui aussi à ce moment terrible.

Pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé en haut de la tour d'Astronomie de Poudlard, juste avant la mort d'Albus Dumbledore ?

Je fixe mon avocamage avec surprise, ce n'était pas dans les questions dont il m'a parlé. A tous les coups, il a décidé de certaines choses depuis son entrevue avec Potter. Je crains très fortement la réponse de Potter et je ne vois pas bien ce qu'il va pouvoir dire alors qu'il n'était pas là !

Le professeur Dumbledore et moi revenions d'un court séjour à l'extérieur de Poudlard, une petite quête pour nous aider à gagner la guerre qui menaçait déjà. Il a entendu du bruit dans les escaliers et m'a immobilisé d'un Stupéfix alors que j'étais sous ma cape d'invisibilité, à quelques mètres de lui.

La mâchoire m'en tombe. Potter était là, il a tout vu ! Je retiens mon souffle et espère que ma lâcheté, dont il a été témoin, jouera en ma faveur. Il continue.

Malefoy est arrivé et ils ont discuté un peu. Il a menacé Dumbledore qui a voulu l'aider, mais il a dit qu'il était obligé d'obéir sinon sa famille et lui allaient être tués par Voldemort. Il l'a désarmé, mais n'a jamais pu le tuer. Il a baissé sa baguette. Les Mangemorts sont arrivés ensuite et Rogue a achevé Dumbledore. J'ai appris plus tard que Dumbledore savait tout de la mission de Malefoy et que son assassinat par Rogue avait été orchestré pour éviter à un jeune homme de seize ans de devenir un meurtrier sous la contrainte, d'autant plus que Dumbledore se savait condamné par un sort de magie noire qui lui rongeait le bras. À mon avis, ils ne savaient pas que Malefoy ne serait pas capable de lancer l'Avada.

Mes mains serrent avec force le fauteuil auquel je suis enchaîné, j'en ai mal aux articulations. Ces souvenirs sont très durs à revivre. Et les mots de Potter, largement en ma faveur, me surprennent. Je ne sais pas ce que lui a dit mon avocamage, mais il a visiblement été très convaincant : je ne peux pas croire que Potter dise tout cela de son plein gré et par amitié pour moi. Et j'apprends des choses dont je n'avais pas la moindre idée concernant Rogue et Dumbledore.

Je ne sais pas de quoi j'ai l'air, menotté à ma chaise, mais l'échange de regard avec Potter me surprend. Il n'y a ni haine, ni pitié, ni dégoût dans ses yeux et je lui en suis reconnaissant. Rien ne m'avait préparé à ça alors que j'ai toujours été infect avec ce petit privilégié. Je ne peux m'empêcher de continuer à détester ce binoclard arrogant, alors qu'il est en train de me sauver les fesses.

J'aimerais maintenant parler de ce qui est arrivé au Manoir Malefoy au mois de mars. Pouvez-vous nous indiquer comment vous vous êtes retrouvés là-bas et ce qui s'est passé ?

Mes amis, Ron et Hermione, et moi, nous avions décidé de ne pas retourner à Poudlard pour la septième année. A la place nous avons cherché des objets liés à Voldemort pour réussir à le détruire, c'était la quête commencée avec Dumbledore et qu'il m'a en quelque sorte légué à sa mort. Nous changions de lieu sans arrêt, nous savions que nous étions recherchés. Un jour, des rafleurs nous sont tombés dessus et nous ont capturés. Au lieu de nous amener au Ministère comme ils auraient visiblement dû le faire, ils nous ont transportés chez les Malefoy. Ron et Hermione sont mes amis depuis l'enfance, tout le monde le sait et je crois qu'ils espéraient les faire parler pour dire où j'étais et me livrer ensuite à Voldemort. Personne ne m'avait reconnu grâce à un sort que Hermione m'avait lancé sur la figure, déformant mes traits. Bellatrix Lestrange et Lucius Malefoy ont demandé à Drago de me regarder pour savoir si c'était moi sous les boursouflures. J'ai vu dans ses yeux qu'il m'avait reconnu. Il a menti et a dit qu'il ne savait pas. Ensuite, on a été enfermé et Hermione torturée. Puis, avec l'aide de Dobby, un elfe libre, nous avons pu nous échapper après un affrontement dans le salon. Drago n'y a pas vraiment pris part, il est resté dans son coin et a montré peu de résistance quand je lui ai arraché sa baguette des mains. Je crois qu'il avait peur.

Les souvenirs de ce jour là me tordent le ventre. Évidemment que j'avais peur : un meurtrier fou de pouvoir menaçait ma famille depuis des mois et vivait chez nous, sans compter ma tante complètement désaxée et l'ignoble Greyback qui hantaient les lieux comme s'ils étaient chez eux. Personne n'aimerait vivre des choses pareilles et j'avais bien compris que mes parents ne savaient plus comment se sortir de ce merdier, excepté en tentant de satisfaire le fou furieux qui donnait les ordres, dans l'espoir que les choses s'améliorent.

Moi, j'ai réalisé en cours d'année que notre seul espoir c'était Potter. Des rumeurs couraient sur lui et sur sa capacité à pouvoir détruire le Seigneur des Ténèbres. C'est la raison qui m'a poussé à mentir alors que je l'avais reconnu : des yeux pareils on n'en voit pas à tous les coins de rues. Je voulais juste qu'il nous débarrasse de cette situation.

Je vous remercie pour ce récit, monsieur Potter, reprend mon avocamage. Une dernière question, maintenant : lors de la bataille de Poudlard, vous avez affronté Drago et ses camarades. Racontez-nous ce qui s'est passé, s'il vous plaît.

Encore une fois, nous cherchions l'un de ces objets pour affaiblir Voldemort, dans un endroit un peu spécial de Poudlard. Malefoy et ses amis sont arrivés et nous ont menacés. L'un d'eux, je ne sais plus si c'est Crabbe ou Goyle, a lancé un Avada dans ma direction, que Malefoy a détourné. Il s'en est suivi un échange de sortilèges un peu violents et une course poursuite dans la salle, entre les objets entassés là. L'un des deux amis de Malefoy a ensuite jeté un maléfice du Feudeymon qu'il n'a pas pu maîtriser. Le feu a failli nous carboniser, a tué le lanceur du sort et nous sommes tous sortis de la salle au dernier moment, grâce à des balais qui traînaient là.

Encore une fois, je regarde Potter avec des yeux ronds. Ses réponses ne cessent de me surprendre. Cette fois il ne me regarde plus et je vois bien qu'il n'a pas l'air dans son assiette. Je ne comprends pas pourquoi il n'a pas mentionné que ses amis et lui nous ont littéralement sauvé la vie ce jour là. A sa place, je m'en serai vanté autant que possible. Ce mec est incompréhensible pour moi, il a raison, on ne peut pas s'entendre, nous sommes bien trop différents.

Mon avocamage remercie Potter qui rejoint difficilement sa place et je prie les fondateurs pour que son intervention ait une influence sur le verdict à venir.

Comme vous avez pu l'entendre, mon client et monsieur Harry Potter n'étaient pas ce que l'on peut appeler des amis. Et pourtant, de façon totalement volontaire, mon client a contribué à garder notre Sauveur en vie, ce qui lui a permis d'accomplir la prophétie et de nous débarrasser de Vous-savez-qui. Je souhaite que ces éléments soient pris en compte lors des délibérations. Vous allez maintenant pourvoir visualiser des souvenirs que mon client a accepté de fournir, afin que vous ayez des informations concernant les conditions dans lesquelles il est devenu Mangemort.


N'oubliez pas de me laisser une petite review si vous avez aimé :)

Petite note sur le morceau de musique que Drago entend dans ce chapitre.
Le morceau Alone a été écrit et composé par le groupe « Heart », repris par de nombreuses personnes, notamment Céline Dion, bien que j'ai découvert ce morceau dans Glee dont j'aime aussi beaucoup la version. Mais inclure une référence à Glee dans ce chapitre était compliqué (je ne pense pas que Harry connaisse la série ^^) et comme j'aime beaucoup la version de Céline Dion, voilà.
Soyez indulgent·e·s, j'ai fais la traduction des paroles moi-même, aidée de mes bêtas, c'est sûrement imparfait mais cela permettra aux non anglophones de comprendre le sens général au moins.

On se retrouve dans deux semaines, le 28 octobre 2022 avec le chapitre 21 : « Une semaine chez Harry ».
En attendant, portez vous bien !