PASSE D'ARMES
Le Centre ainsi que les personnages de Jarod, Miss Parker, Sydney... sont la propriété des producteurs du Caméléon. Le reste est à moi. Merci de ne pas archiver et de ne pas emprunter les personnages "originaux" sans mon autorisation.
L'histoire se déroule durant la saison 2, entre Gigolo et Cadeau Surprise.
Bonne lecture :-)
* * * * * * * * * * * * * * * *
CHAPITRE 6
Emma avait assisté à tout l'entraînement de Mme Darnnell depuis le bord de la piste, sans bouger et sans répondre aux salutations que lui adressaient sans se lasser tous ceux qui passaient près d'elle. Elle avait apporté un soin particulier à sa tenue, avait noté Jarod, relevé ses cheveux bruns et elle s'était maquillé les yeux, ce qui accentuait sa ressemblance avec Parker de façon dérangeante. Elle attrapa la main qu'il lui tendait pour l'aider à se relever, et elle se redressa en souplesse, nullement ankylosée par sa longue station immobile.
"Nous ne sommes pas vendredi," remarqua-t-il, affectant de s'étonner de sa présence.
Elle prétendit ne pas l'avoir entendu, une autre similitude avec Parker qui entendait parfois seulement ce qu'elle avait envie d'entendre. Elle lui tint son fleuret et son masque pendant qu'il enlevait sa veste.
Il prit un tube de Pez dans son sac de sport et lui offrit un bonbon.
"Non, merci, refusa-t-elle. Je ne mange pas ces cochonneries.
- Pourquoi pas? Puisque vous avez arrêté l'entraînement, vous pouvez vous le permettre." Elle se figea, et il en profita pour pousser son avantage. "A propos, que se passe-t-il? Je croyais que vous ne veniez ici que le vendredi.
- Je voulais discuter avec vous, répondit-elle sans détour. De Maxine."
* * * * * * * * * * * * * * * * * *
Ils étaient dans le Golden Gate Park, au bord du lac Stowe. Il faisait encore un peu frais pour les glaces mais, comme l'avait souligné Emma, l'hiver était la saison parfaite pour les crèmes glacées, elles fondaient moins vite. Elle avait commandé un cornet triple, avec du nappage et des amandes grillées.
"Je croyais que vous ne mangiez pas ces cochonneries? releva Jarod.
- Puisque j'ai arrêté l'entraînement...
- Et vous n'avez vraiment pas l'intention de le reprendre?
- Pour quoi faire?
- Vous aimez ça. Ca vous manque. La seule personne que vous punissez en refusant de recommencer, c'est vous.
- Je n'ai aucune intention de punir qui que ce soit. Je ne veux plus toucher un fleuret et ça s'arrête là. L'escrime a tué Max."
Jarod ouvrit la bouche pour lui répondre, puis il aperçut du coin de l'œil un loueur de bateaux à rames et il changea d'avis.
"Venez," dit-il en saisissant la jeune fille par le poignet.
Elle le laissa louer une petite embarcation, s'installa à l'intérieur sans broncher et en continuant de manger sa glace, lui proposa de l'aider à ramer. Lorsqu'ils furent au milieu du lac, à l'écart des autres promeneurs, elle se laissa aller en arrière et sourit.
"Je sais pourquoi vous avez fait ça. Vous vous imaginez que maintenant, vous allez pouvoir me dire tout ce que vous avez envie de me dire et que je vais être obligée de vous écouter.
- Et ce n'est pas le cas?" Il regarda autour de lui: le nombre d'issues lui semblait plutôt réduit.
"Je peux toujours faire un esclandre tel qu'ils enverront un bateau à moteur voir ce qu'il se passe. Si vraiment vous poussez le bouchon trop loin, je suis capable de plonger et de regagner la rive à la nage." Elle passa le bras par-dessus bord et laissa sa main couler dans l'eau. "C'est vraiment très froid. Vous n'allez pas m'obliger à faire un truc aussi idiot, si?
- Je préfère vous proposer un compromis: vous m'écoutez et si vous estimez que je pousse le bouchon vraiment trop loin, je vous promets que je ne viendrai plus vous ennuyer.
- Je ne crois pas que vous êtes du genre à renoncer comme ça." Elle haussa les épaules. "Allez-y. Vous savez, je ne peux pas vous empêcher de parler, et vous ne pourrez pas m'empêcher de piquer une colère si ce que vous dites me met hors de moi.
- Très bien." Il posa les rames. "Je pense que votre sœur était dopée à l'erythropoïétine - l'EPO..."
Elle ne lui laissa pas l'opportunité de terminer. Elle se leva d'un bond, faisant dangereusement tanguer la petite barque, et le toisa, les mains sur les hanches, indignée.
"Ramenez-moi dans le parc. Tout de suite.
- Asseyez-vous, demanda-t-il. Vous aviez promis de m'écouter.
- Je ne pensais pas que vous sortiriez de telles énormités. Vous en avez parlé à Carter?
- Oui. Il pense que jamais Max n'aurait accepté de prendre des substances illicites." L'embarcation continuait d'osciller. "Asseyez-vous, Emma, répéta-t-il, vous pourriez tomber. Je n'ai pas dit que votre sœur se dopait, mais qu'elle était dopée."
Elle se rassit sur le banc, les bras croisés.
"La différence est un peu trop subtile pour moi.
- Alors laissez-moi vous expliquer."
Elle soutint son regard.
"Allez-y. Mais commencez à ramer vers la rive."
Il saisit les avirons, décidé à lui prouver sa bonne volonté.
"La glace est vraiment fine autour de vous, soupira-t-il.
- Et si vous ne parvenez pas à maintenir l'équilibre, vous risquez de la briser ou de déraper. Alors faites attention à ce que vous dites.
- D'un côté, Carter et vous m'assurez que Max n'aurait jamais accepté de prendre des produits dopants, et je n'ai aucune raison de ne pas vous croire. Vous la connaissiez mieux que quiconque, n'est-ce pas?
- Exact.
- D'un autre côté, j'ai le rapport du médecin légiste. Son hématocrite était supérieure de 25% au moins à la moyenne, et elle a succombé à un arrêt cardiaque. Est-ce que vous connaissez les effets et les risques liés à l'EPO, Emma?
- Evidemment. Ca permet de repousser les limites physiologiques et d'améliorer l'oxygénation des muscles par augmentation de la part des globules rouges dans le sang. Mais au risque de faire une embolie ou..." Elle pencha la tête, complétant à regret: "... ou un arrêt cardiaque."
Elle regarda son cornet de glace, qu'elle n'avait plus du tout envie de terminer à présent, et elle désigna les rames d'un geste du menton.
"Vous pouvez ralentir la cadence, dit-elle. Vous allez attraper des cals, c'est pas génial pour tenir votre arme. L'EPO, enchaîna-t-elle, est très difficile à repérer: c'est une hormone naturelle, et de toute façon, l'hématocrite peut varier considérablement d'un individu à l'autre.
- Celle de Maxine était vraiment très élevée.
- Donc?
- Donc quelqu'un lui administrait de l'EPO. A son insu. Ca vous semble possible?
- Oui." Elle haussa les épaules. La crème glacée fondait, lui dégoulinant sur les doigts sans qu'elle y prête la moindre attention. "Les sportifs de haut niveau reçoivent des tas d'injections, des injections parfaitement autorisées, précisa-t-elle.
- Des cocktails de vitamines.
- Par exemple.
- Et Max faisait confiance aux gens qui s'occupaient d'elle, elle ne les aurait pas soupçonnés d'agir d'une façon qu'elle réprouvait.
- Carter a dû vous le dire: la modestie n'était pas la vertu cardinale de ma sœur. Alors quand elle ordonnait quelque chose, elle s'attendait à ce qu'on lui obéisse sans discuter."
Elle regarda la glace qui lui poissait les doigts, posa le cornet dans le fond de la barque et se rinça la main dans l'eau glacée du lac. Jarod lui tendit une des petites serviettes en papier que lui avait données le vendeur.
"Ca va aller? demanda-t-il.
- Vous voulez bien continuer à ramer, Jarod? Je n'ai pas très envie de rentrer chez moi pour l'instant."
* * * * * * * * * * * * * * * * * *
Le fichier central du FBI, à condition de savoir y entrer et s'y promener sans se faire prendre, était une source passionnante de renseignements. Il lui indiquait, en lettres noires sur fond gris scintillant, que le docteur Joseph Fuller avait travaillé pendant quatre ans et demi en Europe, pour le compte des Fédérations Française et Italienne d'Escrime, lesquelles l'avaient accusé d'avoir administré des bêtabloquants à des athlètes afin de réduire leur stress avant les compétitions. Fuller avait eu un bon avocat et s'en était plutôt bien tiré, mais sa carrière en Europe avait touché à sa fin.
Des bêtabloquants à l'EPO, songea Jarod, il existait une certaine marge, réduite mais bien réelle. Le tout était de savoir si le docteur Fuller était capable de la franchir, l'avait fait, et dans quel intérêt.
* * * * * * * * * * * * * * * * * *
Il était deux heures et demie du matin, et les coups frappés à la porte de son appartement allaient réveiller tout l'immeuble d'un instant à l'autre. D'une certaine façon c'était plutôt bon signe: Mlle Parker n'aurait pas pris la peine - le risque - d'annoncer sa présence d'une façon aussi bruyante. Partant de là, il en conclut que les ennuis qui risquaient de lui tomber dessus lorsqu'il ouvrirait la porte ne pourraient être que relativement mineurs.
Emma se tenait sur le seuil, en jean et parka, le visage rosi par le froid, une main posée sur le guidon de son vélo, et sans paraître trouver quoi que ce soit d'incongru à la situation.
"Vous permettez que je le rentre? demanda-t-elle en désignant le VTT. Je ne voudrais pas me le faire faucher."
Elle fit rouler le vélo à l'intérieur, le soulevant pour lui faire passer le seuil, et l'appuya contre le mur de l'entrée en prenant soin de ne pas érafler la peinture. Partagé entre amusement et surprise, il repoussa le battant, fit jouer la clef, mit la chaîne.
"Est-ce que quelque chose ne va pas? lui demanda-t-il.
- Au lac Stowe, vous m'avez dit que si je voulais parler avec vous, vous seriez disponible." Elle ouvrit sa parka et le gratifia d'un de ses rares sourires, qui rappelaient ceux de Parker de façon dérangeante. "Vous ne pensiez pas que je débarquerai en pleine nuit, hein?"
Il lui fit signe d'entrer dans le salon. Il ne pouvait pas la mettre dans la rue à une heure pareille.
"Vous êtes partie de chez vous sans prévenir, je parie? Vos parents vont être très inquiets.
- Ne vous en faites pas, ils dormaient. Ils ne se rendront même pas compte que j'ai filé.
- Ils pourraient se réveiller. Vous devriez les appeler pour leur dire où vous êtes."
Il lui désigna le téléphone posé sur le bureau.
"Les appeler? Mais, Jarod, s'ils sont réveillés par la sonnerie du téléphone à trois heures du matin, ils vont se faire un sang d'encre," le raisonna-t-elle en ne plaisantant qu'à moitié. Il décrocha le combiné et le lui tendit. "Vous allez me réexpédier chez moi sans cérémonie, c'est ça?
- Non, je veux seulement que vous préveniez vos parents que vous êtes ici."
* * * * * * * * * * * * * * * * * *
Il lui avait proposé un chocolat chaud et elle avait refusé en lui faisant remarquer qu'elle avait passé l'âge d'en boire. Lorsqu'il s'était servi une tasse, elle avait changé d'avis, reconnaissant que ça ne lui ferait pas de mal.
"Qu'est-ce que mon père vous a dit, au téléphone? lui demanda-t-elle en se pelotonnant sur le canapé défraîchi.
- Qu'il me faisait confiance.
- Oh, fit-elle sarcastiquement. J'espère que vous avez saisi la subtilité du sous-entendu?" Il la regarda sans comprendre et elle en déduisit à juste titre que le sous-entendu lui avait totalement échappé. "Carter est allé raconter à mes parents que j'avais le béguin pour vous, alors forcément, ils ont dû sauter au plafond quand je leur ai dit où j'étais. Je suis sûre que ce crétin est venu vous en parler aussi."
Les conseils de silence prodigués par Carter, décida-t-il, ne s'appliquaient pas si la principale intéressée renonçait elle-même au secret.
"Et il se trompe?
- En partie. Désolée pour votre ego, encore que je ne pense pas qu'il en souffrira beaucoup, n'est-ce pas? C'est juste que... vous représentez une énigme. Vous êtes la première personne qui me tire de mon indifférence depuis la mort de Max, c'est plutôt agréable. Rassurant."
Elle posa sa tasse sur la table, saisit le distributeur de Pez qui traînait et fit tomber un bonbon au creux de sa main.
"Cette femme que je vous rappelle, de quelle façon est-ce que je lui ressemble?"
Elle posait ses questions sans prendre de gants mais sans chercher à blesser non plus: elle avait seulement besoin de réponses.
"Elle aussi se protège derrière une façade d'insensibilité.
- Qu'est-ce qui l'a rendue comme ça?
- Quand elle était enfant, des gens ont tué sa mère. Presque sous ses yeux. Ils n'ont jamais été punis."
Il se souvenait, aussi clairement que si le meurtre de Mme Parker s'était produit la veille, des cris et des larmes de Parker, des ordres de Sydney interdisant en vain qu'on la laisse entrer dans le labo de simulation. Il se souvenait avoir hurlé et supplié pour que l'on ne fasse pas de mal à la jeune femme, il se souvenait de Sydney qui avait seulement été capable de le retenir, il se souvenait de la vague de peine et de douleur qui l'avait assailli quand un membre de la Sécurité avait traîné Parker en larmes dans le labo. Il pouvait détester Mlle Parker, mais il ne pouvait pas lui en vouloir, parce qu'il la comprenait, il comprenait ce qu'elle était et pourquoi elle était devenue ce qu'elle était.
"Jarod..."
La main d'Emma se posa sur la sienne.
"Vous lui ressemblez physiquement, ajouta-t-il. Et c'est une bonne fleurettiste.
- Je ne pratique plus l'escrime," lui rappela-t-elle.
Il se pencha en travers de la table pour lui reprendre le tube de Pez.
"C'est bien le problème."
* * * * * * * * * * * * * * * * * *
Emma avait regimbé, refusant de faire un pas de plus lorsqu'elle avait compris ce qu'il avait en tête et, comme il ne pouvait pas la forcer à entrer, il avait été obligé de parlementer pendant dix minutes, dans un vent glacé. Elle ne lui avait pas demandé, en revanche, où il avait trouvé sa tenue d'escrime ainsi que son fleuret. Elle avait enfilé les vêtements, en lui précisant à travers la porte des vestiaires des dames qu'il se donnait tout ce mal pour rien car elle n'avait pas la moindre intention de combattre. Elle le laissa l'emmener sur la piste, la relier au tableau de touches, elle mit son masque. Mais elle refusa de saluer et de se mettre en garde.
"Vous ne pouvez pas me forcer à me battre, lui dit-elle.
- Alors pourquoi avez-vous accepté de venir jusque là?
- Pour vous prouver que vous ne pouvez pas me forcer à me battre.
- Je vous parie le contraire."
Il se mit en garde, attendit qu'elle en fasse autant mais elle ne bougea pas, son fleuret pendant à bout de bras. Il attaqua malgré tout.
Elle para, rompit, puis elle se fendit, avec une rapidité qui le prit en défaut, et la pointe mouchetée du fleuret s'écrasa sur son plastron, à hauteur du flanc. Le tableau marqua une touche. Elle s'immobilisa aussitôt, bien au-delà de sa moitié de piste, et releva son masque.
"Comment avez-vous fait ça?" demanda-t-elle, partagée entre la stupeur et l'agacement.
Il affecta de ne pas comprendre ce qu'elle voulait dire. Il releva son masque et considéra son fleuret d'un air maussade.
"J'aurais pu mieux m'en sortir sur ce coup-là. Votre botte m'a surpris.
- Je ne parlais pas de l'engagement! s'exclama-t-elle, les dents serrées d'exaspération. Et vous le savez très bien. Comment vous êtes-vous arrangé pour que je riposte?
- Un être humain attaqué se défend. C'est atavique."
Elle passa délicatement sa main gantée le long de la lame souple du fleuret.
"Vous voulez que je me batte? Très bien. Mais je vous assure que vous allez le regretter.
- Je n'en attends pas moins de vous."
Elle ne souriait plus, elle ne se laissait plus distraire par des digressions. Ses yeux bleus trahissaient sa détermination, vides de toute émotion, de toute préoccupation en dehors de celle du duel à venir.
"En garde," ordonna-t-elle en abaissant son masque.
* * * * * * * * * * * * * * * * * *
"Vous m'avez laissé gagner, bien sûr."
Emma disparut un instant derrière le comptoir du club et en émergea avec des petites bouteilles de jus de fruit. Se promener dans l'académie à cinq heures du matin était très étrange. Il n'y avait absolument personne, aucun des sons qui bruissaient toute la journée. C'était calme et désert, apaisant; pendant près d'une heure, seul le cliquetis de leurs fleurets avait troublé le silence.
"C'aurait été inutile. Vous êtes vraiment douée, Emma.
- Arrêtez de vous payer ma tête et de me ménager, okay? On va refaire un combat, un vrai combat. J'ai entendu les moniteurs et les élèves parler de vous. Aucune championne junior de Californie ne pourrait battre un type avec un CV comme le vôtre.
- Je ne suis pas vraiment maître d'armes.
- Jarod..., protesta-t-elle.
- Je suis sérieux." Il regarda la photo de Maxine Ambruster. "Vous combattiez parfois contre elle? demanda-t-il à Emma.
- Je gagnais rarement." Elle laissa ses mains retomber sur ses genoux. "Je ne pouvais pas m'empêcher de me demander pourquoi elle était morte, elle. Pourquoi pas moi. Rien de plus atroce qu'un accident, pas la moindre possibilité de rationaliser. Sauf que ça n'avait rien d'un accident. Les sportifs sous EPO sont très surveillés, ils dorment même avec une ceinture thoracique qui les réveille si leur rythme cardiaque ralentit trop. Les gens qui ont fait ça à Max ne lui ont laissé aucune chance, Jarod. Ils ont tout simplement joué sa vie au poker.
- Je sais."
Elle le regarda attentivement.
"C'est vrai que vous n'êtes pas un maître d'armes, hein? Qu'est-ce que vous êtes, alors?
- Simplement quelqu'un qui trouve que ce qui est arrivé à votre sœur est injuste.
- Qui lui a fait ça?
- Je n'en suis pas encore sûr. Mais je peux vous promettre que les coupables ne s'en tireront pas à aussi bon compte." Il lui sourit. "Allez vous changer, je vous ramène chez vous."
Le Centre ainsi que les personnages de Jarod, Miss Parker, Sydney... sont la propriété des producteurs du Caméléon. Le reste est à moi. Merci de ne pas archiver et de ne pas emprunter les personnages "originaux" sans mon autorisation.
L'histoire se déroule durant la saison 2, entre Gigolo et Cadeau Surprise.
Bonne lecture :-)
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CHAPITRE 6
Emma avait assisté à tout l'entraînement de Mme Darnnell depuis le bord de la piste, sans bouger et sans répondre aux salutations que lui adressaient sans se lasser tous ceux qui passaient près d'elle. Elle avait apporté un soin particulier à sa tenue, avait noté Jarod, relevé ses cheveux bruns et elle s'était maquillé les yeux, ce qui accentuait sa ressemblance avec Parker de façon dérangeante. Elle attrapa la main qu'il lui tendait pour l'aider à se relever, et elle se redressa en souplesse, nullement ankylosée par sa longue station immobile.
"Nous ne sommes pas vendredi," remarqua-t-il, affectant de s'étonner de sa présence.
Elle prétendit ne pas l'avoir entendu, une autre similitude avec Parker qui entendait parfois seulement ce qu'elle avait envie d'entendre. Elle lui tint son fleuret et son masque pendant qu'il enlevait sa veste.
Il prit un tube de Pez dans son sac de sport et lui offrit un bonbon.
"Non, merci, refusa-t-elle. Je ne mange pas ces cochonneries.
- Pourquoi pas? Puisque vous avez arrêté l'entraînement, vous pouvez vous le permettre." Elle se figea, et il en profita pour pousser son avantage. "A propos, que se passe-t-il? Je croyais que vous ne veniez ici que le vendredi.
- Je voulais discuter avec vous, répondit-elle sans détour. De Maxine."
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Ils étaient dans le Golden Gate Park, au bord du lac Stowe. Il faisait encore un peu frais pour les glaces mais, comme l'avait souligné Emma, l'hiver était la saison parfaite pour les crèmes glacées, elles fondaient moins vite. Elle avait commandé un cornet triple, avec du nappage et des amandes grillées.
"Je croyais que vous ne mangiez pas ces cochonneries? releva Jarod.
- Puisque j'ai arrêté l'entraînement...
- Et vous n'avez vraiment pas l'intention de le reprendre?
- Pour quoi faire?
- Vous aimez ça. Ca vous manque. La seule personne que vous punissez en refusant de recommencer, c'est vous.
- Je n'ai aucune intention de punir qui que ce soit. Je ne veux plus toucher un fleuret et ça s'arrête là. L'escrime a tué Max."
Jarod ouvrit la bouche pour lui répondre, puis il aperçut du coin de l'œil un loueur de bateaux à rames et il changea d'avis.
"Venez," dit-il en saisissant la jeune fille par le poignet.
Elle le laissa louer une petite embarcation, s'installa à l'intérieur sans broncher et en continuant de manger sa glace, lui proposa de l'aider à ramer. Lorsqu'ils furent au milieu du lac, à l'écart des autres promeneurs, elle se laissa aller en arrière et sourit.
"Je sais pourquoi vous avez fait ça. Vous vous imaginez que maintenant, vous allez pouvoir me dire tout ce que vous avez envie de me dire et que je vais être obligée de vous écouter.
- Et ce n'est pas le cas?" Il regarda autour de lui: le nombre d'issues lui semblait plutôt réduit.
"Je peux toujours faire un esclandre tel qu'ils enverront un bateau à moteur voir ce qu'il se passe. Si vraiment vous poussez le bouchon trop loin, je suis capable de plonger et de regagner la rive à la nage." Elle passa le bras par-dessus bord et laissa sa main couler dans l'eau. "C'est vraiment très froid. Vous n'allez pas m'obliger à faire un truc aussi idiot, si?
- Je préfère vous proposer un compromis: vous m'écoutez et si vous estimez que je pousse le bouchon vraiment trop loin, je vous promets que je ne viendrai plus vous ennuyer.
- Je ne crois pas que vous êtes du genre à renoncer comme ça." Elle haussa les épaules. "Allez-y. Vous savez, je ne peux pas vous empêcher de parler, et vous ne pourrez pas m'empêcher de piquer une colère si ce que vous dites me met hors de moi.
- Très bien." Il posa les rames. "Je pense que votre sœur était dopée à l'erythropoïétine - l'EPO..."
Elle ne lui laissa pas l'opportunité de terminer. Elle se leva d'un bond, faisant dangereusement tanguer la petite barque, et le toisa, les mains sur les hanches, indignée.
"Ramenez-moi dans le parc. Tout de suite.
- Asseyez-vous, demanda-t-il. Vous aviez promis de m'écouter.
- Je ne pensais pas que vous sortiriez de telles énormités. Vous en avez parlé à Carter?
- Oui. Il pense que jamais Max n'aurait accepté de prendre des substances illicites." L'embarcation continuait d'osciller. "Asseyez-vous, Emma, répéta-t-il, vous pourriez tomber. Je n'ai pas dit que votre sœur se dopait, mais qu'elle était dopée."
Elle se rassit sur le banc, les bras croisés.
"La différence est un peu trop subtile pour moi.
- Alors laissez-moi vous expliquer."
Elle soutint son regard.
"Allez-y. Mais commencez à ramer vers la rive."
Il saisit les avirons, décidé à lui prouver sa bonne volonté.
"La glace est vraiment fine autour de vous, soupira-t-il.
- Et si vous ne parvenez pas à maintenir l'équilibre, vous risquez de la briser ou de déraper. Alors faites attention à ce que vous dites.
- D'un côté, Carter et vous m'assurez que Max n'aurait jamais accepté de prendre des produits dopants, et je n'ai aucune raison de ne pas vous croire. Vous la connaissiez mieux que quiconque, n'est-ce pas?
- Exact.
- D'un autre côté, j'ai le rapport du médecin légiste. Son hématocrite était supérieure de 25% au moins à la moyenne, et elle a succombé à un arrêt cardiaque. Est-ce que vous connaissez les effets et les risques liés à l'EPO, Emma?
- Evidemment. Ca permet de repousser les limites physiologiques et d'améliorer l'oxygénation des muscles par augmentation de la part des globules rouges dans le sang. Mais au risque de faire une embolie ou..." Elle pencha la tête, complétant à regret: "... ou un arrêt cardiaque."
Elle regarda son cornet de glace, qu'elle n'avait plus du tout envie de terminer à présent, et elle désigna les rames d'un geste du menton.
"Vous pouvez ralentir la cadence, dit-elle. Vous allez attraper des cals, c'est pas génial pour tenir votre arme. L'EPO, enchaîna-t-elle, est très difficile à repérer: c'est une hormone naturelle, et de toute façon, l'hématocrite peut varier considérablement d'un individu à l'autre.
- Celle de Maxine était vraiment très élevée.
- Donc?
- Donc quelqu'un lui administrait de l'EPO. A son insu. Ca vous semble possible?
- Oui." Elle haussa les épaules. La crème glacée fondait, lui dégoulinant sur les doigts sans qu'elle y prête la moindre attention. "Les sportifs de haut niveau reçoivent des tas d'injections, des injections parfaitement autorisées, précisa-t-elle.
- Des cocktails de vitamines.
- Par exemple.
- Et Max faisait confiance aux gens qui s'occupaient d'elle, elle ne les aurait pas soupçonnés d'agir d'une façon qu'elle réprouvait.
- Carter a dû vous le dire: la modestie n'était pas la vertu cardinale de ma sœur. Alors quand elle ordonnait quelque chose, elle s'attendait à ce qu'on lui obéisse sans discuter."
Elle regarda la glace qui lui poissait les doigts, posa le cornet dans le fond de la barque et se rinça la main dans l'eau glacée du lac. Jarod lui tendit une des petites serviettes en papier que lui avait données le vendeur.
"Ca va aller? demanda-t-il.
- Vous voulez bien continuer à ramer, Jarod? Je n'ai pas très envie de rentrer chez moi pour l'instant."
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Le fichier central du FBI, à condition de savoir y entrer et s'y promener sans se faire prendre, était une source passionnante de renseignements. Il lui indiquait, en lettres noires sur fond gris scintillant, que le docteur Joseph Fuller avait travaillé pendant quatre ans et demi en Europe, pour le compte des Fédérations Française et Italienne d'Escrime, lesquelles l'avaient accusé d'avoir administré des bêtabloquants à des athlètes afin de réduire leur stress avant les compétitions. Fuller avait eu un bon avocat et s'en était plutôt bien tiré, mais sa carrière en Europe avait touché à sa fin.
Des bêtabloquants à l'EPO, songea Jarod, il existait une certaine marge, réduite mais bien réelle. Le tout était de savoir si le docteur Fuller était capable de la franchir, l'avait fait, et dans quel intérêt.
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Il était deux heures et demie du matin, et les coups frappés à la porte de son appartement allaient réveiller tout l'immeuble d'un instant à l'autre. D'une certaine façon c'était plutôt bon signe: Mlle Parker n'aurait pas pris la peine - le risque - d'annoncer sa présence d'une façon aussi bruyante. Partant de là, il en conclut que les ennuis qui risquaient de lui tomber dessus lorsqu'il ouvrirait la porte ne pourraient être que relativement mineurs.
Emma se tenait sur le seuil, en jean et parka, le visage rosi par le froid, une main posée sur le guidon de son vélo, et sans paraître trouver quoi que ce soit d'incongru à la situation.
"Vous permettez que je le rentre? demanda-t-elle en désignant le VTT. Je ne voudrais pas me le faire faucher."
Elle fit rouler le vélo à l'intérieur, le soulevant pour lui faire passer le seuil, et l'appuya contre le mur de l'entrée en prenant soin de ne pas érafler la peinture. Partagé entre amusement et surprise, il repoussa le battant, fit jouer la clef, mit la chaîne.
"Est-ce que quelque chose ne va pas? lui demanda-t-il.
- Au lac Stowe, vous m'avez dit que si je voulais parler avec vous, vous seriez disponible." Elle ouvrit sa parka et le gratifia d'un de ses rares sourires, qui rappelaient ceux de Parker de façon dérangeante. "Vous ne pensiez pas que je débarquerai en pleine nuit, hein?"
Il lui fit signe d'entrer dans le salon. Il ne pouvait pas la mettre dans la rue à une heure pareille.
"Vous êtes partie de chez vous sans prévenir, je parie? Vos parents vont être très inquiets.
- Ne vous en faites pas, ils dormaient. Ils ne se rendront même pas compte que j'ai filé.
- Ils pourraient se réveiller. Vous devriez les appeler pour leur dire où vous êtes."
Il lui désigna le téléphone posé sur le bureau.
"Les appeler? Mais, Jarod, s'ils sont réveillés par la sonnerie du téléphone à trois heures du matin, ils vont se faire un sang d'encre," le raisonna-t-elle en ne plaisantant qu'à moitié. Il décrocha le combiné et le lui tendit. "Vous allez me réexpédier chez moi sans cérémonie, c'est ça?
- Non, je veux seulement que vous préveniez vos parents que vous êtes ici."
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Il lui avait proposé un chocolat chaud et elle avait refusé en lui faisant remarquer qu'elle avait passé l'âge d'en boire. Lorsqu'il s'était servi une tasse, elle avait changé d'avis, reconnaissant que ça ne lui ferait pas de mal.
"Qu'est-ce que mon père vous a dit, au téléphone? lui demanda-t-elle en se pelotonnant sur le canapé défraîchi.
- Qu'il me faisait confiance.
- Oh, fit-elle sarcastiquement. J'espère que vous avez saisi la subtilité du sous-entendu?" Il la regarda sans comprendre et elle en déduisit à juste titre que le sous-entendu lui avait totalement échappé. "Carter est allé raconter à mes parents que j'avais le béguin pour vous, alors forcément, ils ont dû sauter au plafond quand je leur ai dit où j'étais. Je suis sûre que ce crétin est venu vous en parler aussi."
Les conseils de silence prodigués par Carter, décida-t-il, ne s'appliquaient pas si la principale intéressée renonçait elle-même au secret.
"Et il se trompe?
- En partie. Désolée pour votre ego, encore que je ne pense pas qu'il en souffrira beaucoup, n'est-ce pas? C'est juste que... vous représentez une énigme. Vous êtes la première personne qui me tire de mon indifférence depuis la mort de Max, c'est plutôt agréable. Rassurant."
Elle posa sa tasse sur la table, saisit le distributeur de Pez qui traînait et fit tomber un bonbon au creux de sa main.
"Cette femme que je vous rappelle, de quelle façon est-ce que je lui ressemble?"
Elle posait ses questions sans prendre de gants mais sans chercher à blesser non plus: elle avait seulement besoin de réponses.
"Elle aussi se protège derrière une façade d'insensibilité.
- Qu'est-ce qui l'a rendue comme ça?
- Quand elle était enfant, des gens ont tué sa mère. Presque sous ses yeux. Ils n'ont jamais été punis."
Il se souvenait, aussi clairement que si le meurtre de Mme Parker s'était produit la veille, des cris et des larmes de Parker, des ordres de Sydney interdisant en vain qu'on la laisse entrer dans le labo de simulation. Il se souvenait avoir hurlé et supplié pour que l'on ne fasse pas de mal à la jeune femme, il se souvenait de Sydney qui avait seulement été capable de le retenir, il se souvenait de la vague de peine et de douleur qui l'avait assailli quand un membre de la Sécurité avait traîné Parker en larmes dans le labo. Il pouvait détester Mlle Parker, mais il ne pouvait pas lui en vouloir, parce qu'il la comprenait, il comprenait ce qu'elle était et pourquoi elle était devenue ce qu'elle était.
"Jarod..."
La main d'Emma se posa sur la sienne.
"Vous lui ressemblez physiquement, ajouta-t-il. Et c'est une bonne fleurettiste.
- Je ne pratique plus l'escrime," lui rappela-t-elle.
Il se pencha en travers de la table pour lui reprendre le tube de Pez.
"C'est bien le problème."
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Emma avait regimbé, refusant de faire un pas de plus lorsqu'elle avait compris ce qu'il avait en tête et, comme il ne pouvait pas la forcer à entrer, il avait été obligé de parlementer pendant dix minutes, dans un vent glacé. Elle ne lui avait pas demandé, en revanche, où il avait trouvé sa tenue d'escrime ainsi que son fleuret. Elle avait enfilé les vêtements, en lui précisant à travers la porte des vestiaires des dames qu'il se donnait tout ce mal pour rien car elle n'avait pas la moindre intention de combattre. Elle le laissa l'emmener sur la piste, la relier au tableau de touches, elle mit son masque. Mais elle refusa de saluer et de se mettre en garde.
"Vous ne pouvez pas me forcer à me battre, lui dit-elle.
- Alors pourquoi avez-vous accepté de venir jusque là?
- Pour vous prouver que vous ne pouvez pas me forcer à me battre.
- Je vous parie le contraire."
Il se mit en garde, attendit qu'elle en fasse autant mais elle ne bougea pas, son fleuret pendant à bout de bras. Il attaqua malgré tout.
Elle para, rompit, puis elle se fendit, avec une rapidité qui le prit en défaut, et la pointe mouchetée du fleuret s'écrasa sur son plastron, à hauteur du flanc. Le tableau marqua une touche. Elle s'immobilisa aussitôt, bien au-delà de sa moitié de piste, et releva son masque.
"Comment avez-vous fait ça?" demanda-t-elle, partagée entre la stupeur et l'agacement.
Il affecta de ne pas comprendre ce qu'elle voulait dire. Il releva son masque et considéra son fleuret d'un air maussade.
"J'aurais pu mieux m'en sortir sur ce coup-là. Votre botte m'a surpris.
- Je ne parlais pas de l'engagement! s'exclama-t-elle, les dents serrées d'exaspération. Et vous le savez très bien. Comment vous êtes-vous arrangé pour que je riposte?
- Un être humain attaqué se défend. C'est atavique."
Elle passa délicatement sa main gantée le long de la lame souple du fleuret.
"Vous voulez que je me batte? Très bien. Mais je vous assure que vous allez le regretter.
- Je n'en attends pas moins de vous."
Elle ne souriait plus, elle ne se laissait plus distraire par des digressions. Ses yeux bleus trahissaient sa détermination, vides de toute émotion, de toute préoccupation en dehors de celle du duel à venir.
"En garde," ordonna-t-elle en abaissant son masque.
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"Vous m'avez laissé gagner, bien sûr."
Emma disparut un instant derrière le comptoir du club et en émergea avec des petites bouteilles de jus de fruit. Se promener dans l'académie à cinq heures du matin était très étrange. Il n'y avait absolument personne, aucun des sons qui bruissaient toute la journée. C'était calme et désert, apaisant; pendant près d'une heure, seul le cliquetis de leurs fleurets avait troublé le silence.
"C'aurait été inutile. Vous êtes vraiment douée, Emma.
- Arrêtez de vous payer ma tête et de me ménager, okay? On va refaire un combat, un vrai combat. J'ai entendu les moniteurs et les élèves parler de vous. Aucune championne junior de Californie ne pourrait battre un type avec un CV comme le vôtre.
- Je ne suis pas vraiment maître d'armes.
- Jarod..., protesta-t-elle.
- Je suis sérieux." Il regarda la photo de Maxine Ambruster. "Vous combattiez parfois contre elle? demanda-t-il à Emma.
- Je gagnais rarement." Elle laissa ses mains retomber sur ses genoux. "Je ne pouvais pas m'empêcher de me demander pourquoi elle était morte, elle. Pourquoi pas moi. Rien de plus atroce qu'un accident, pas la moindre possibilité de rationaliser. Sauf que ça n'avait rien d'un accident. Les sportifs sous EPO sont très surveillés, ils dorment même avec une ceinture thoracique qui les réveille si leur rythme cardiaque ralentit trop. Les gens qui ont fait ça à Max ne lui ont laissé aucune chance, Jarod. Ils ont tout simplement joué sa vie au poker.
- Je sais."
Elle le regarda attentivement.
"C'est vrai que vous n'êtes pas un maître d'armes, hein? Qu'est-ce que vous êtes, alors?
- Simplement quelqu'un qui trouve que ce qui est arrivé à votre sœur est injuste.
- Qui lui a fait ça?
- Je n'en suis pas encore sûr. Mais je peux vous promettre que les coupables ne s'en tireront pas à aussi bon compte." Il lui sourit. "Allez vous changer, je vous ramène chez vous."
