Echec et mat, ma Reine

Echec et mat, ma Reine !

1ère Epoque : Chapitre 22

Jeux

L'éclair frappa Valoran de plein fouet et l'envoya s'écraser sur le mur. Il se cogna la tête et sombra dans l'inconscience.

Luttant pour ne pas suivre le jeune homme dans les ténèbres, Raistlana jeta un regard incrédule autour d'elle. La statuette-sangsue n'avait pas bronché, gorgée d'énergie magique jusqu'à la gueule et pourtant Valoran venait d'être balayé par de la magie brute, incontrôlée.

L'archimage se secoua et releva les barrières émotionnelles que Dalamar avaient réussi à mettre à mal.

Son esprit s'éclaircit, libéré de la peur et de la haine. Elle se tortilla comme elle put pour s'asseoir sur le lit et secoua ses mains au-dessus des draps. Voyant que cela ne donnait rien, elle rongea la cordelette de cuir qui maintenait sa dague dans son fourreau.

L'arme d'argent tomba sur les draps.

La récupérant avec les dents, il glissa maladroitement la pointe de l'arme dans la serrure qui l'entravait et fourragea frénétiquement dedans.

Le cadenas s'ouvrit.

Raistlin se débarrassa de la chaîne et couru vers la porte. L'ouvrant à la volée, il fut soufflé par la bouffée d'énergie magique qui s'engouffra dans la pièce.

En surcharge, la statuette se fendilla et fut réduite en poussière, libérant les énergies qu'elle avait accumulées.

Un nouveau choc en retour jeta la jeune femme à terre.

Groggy, elle s'appuya contre le montant de la porte et se redressa. Secouant la tête, elle balaya les environs du regard.

De part et d'autre du large couloir sur lequel s'ouvrait la pièce, des enclos métalliques enfermaient plusieurs dizaines de golems.

Les créatures s'agitèrent, ne reconnaissant pas l'odeur de leur maître.

Prudemment, veillant à faire le moins de bruit possible, l'archimage se glissa vers l'autre bout du couloir.

Un énorme chien blanc apparu devant lui et gronda de colère.

L'archimage recula devant l'animal qui claquait des mâchoires à quelques centimètres de son visage.

Raistlana avala difficilement sa salive et chercha une échappatoire.

Traçant un symbole dans l'air, elle eut la surprise de voir le sort glisser sur le familier comme de l'eau sur le dos d'un canard.

Elle recula davantage.

Amiel avança à son tour.

Mètre par mètre, le Molosse la fit reculer jusqu'à la chambre.

L'archimage sentit bientôt la froidure des pierres se presser dans son dos.

Valoran choisit ce moment pour apparaître à la porte.

Le jeune mage se tenait la tête et une longue traînée de sang marbrait d'écarlate l'épaisse crinière blé mur.

L'empoignant par l'épaule, il propulsa la jeune femme à l'intérieur de la chambre et la jeta au sol.

Revenant au lit, il se saisit de la chaîne abandonnée.

"- Oh, vilaine, vilaine fille… Pourquoi m'as-tu frappé ?" Demanda le mage fou d'une voix enfantine. "Pas gentille, pas gentille…"

L'archimage plongea ses yeux dans ceux de Valoran.

Elle y chercha un semblant d'intelligence.

Elle n'y trouva rien

Amiel entra dans la pièce en coup de vents.

"- Amiel, elle n'est pas gentille, elle m'a frappé…"

Le familier soupira de contrariété et se frotta contre son maître.

Le mage leva la chaîne.

"- Tu comprendras certainement que je ne puis tolérer un tel écart de conduite." Siffla-t-il en parodiant le ton et les paroles de Dalamar.

Raistlana ne put faire un geste pour se protéger lorsque la chaîne s'abattit sur son dos.

Un glapissement de douleur s'échappa de sa gorge.

Elle se roula en boule sous le second coup.

Un troisième impact s'abattit sur les bras qu'elle leva en une pathétique tentative de protection.

Le goût métallique du sang emplit sa bouche et une côte grinça lorsqu'un coup de pied l'atteignit.

Valoran continua à frapper pendant de longues minutes.

La pluie coup se calma enfin. L'archimage cracha un peu de sang et toussa à s'en déchirer les poumons.

Valoran la remit sur ses pieds sans douceur et lui arracha les lambeaux de vêtements qui lui restaient avant de la jeter sur le lit.

Amiel s'interposa entre Raistlin et la fureur du mage blanc.

"- Valoran, cela suffit ! Tu as assez joué."

Le mage se redressa le regard flamboyant.

"- Amiel, je fait ce que je veux. Elle est à moi. Tu m'as promis !"

Raistlin tiqua. Il ne pouvait entendre la conversation du mage et de son familier, mais aux paroles de l'homme, il n'était pas du tout sûr d'apprécier la discussion quelle qu'elle soit.

"- Elle appartient à la Reine. Tu aurais put encore l'utiliser si tu n'étais pas assez idiot pour l'abîmer. Avec tes bêtises, tu va lui faire perdre le bébé."

"- Un bébé ?"

Raistlin accusa sérieusement le coup et blêmit.

"- Il est hors de question que tu me fasse un gosse. 'Valoran' !" Cracha-t-il comme une insulte.

La voix du mage blanc s'adoucit.

"- Cela n'a rien à voir, Raistlana." Pour la première fois, sa voix était joyeuse et affectueuse. "Tu n'as pas entendus ? Tu es enceinte. N'est ce pas une nouvelle étonnante ?"

L'archimage eu un hoquet incrédule.

"- C'est…c'est pas …possible…"

"- Oh que si, petit humain. N'est ce pas amusant ? Le plus puissant archimage de Krynn qui se fait engrosser par son apprenti." Le Molosse eut un rire désagréable. "Mais rassure toi petit mage. Tu le mettras au monde cet enfant. Et la Reine l'éduqueras à Sa convenance. Il sera le plus magnifique étendard de Sa Ténébreuse Majesté."

Raistlin se raidit et se remémora l'étrange conversation qu'elle avait eut avec Pyra. Maintenant, elle comprenait.

"- Jamais ! Jamais mon enfant ne servira la Reine. Je le tuerais d'abord."

Amiel Ricana.

"- Tu n'auras même pas ce choix. Valoran va bien s'occuper de toi. N'est aucune crainte."

Le Molosse se tourna vers le mage

"- Il y prendra même plaisir. N'est ce p…." Le familier se tut et se demanda quel était encore le problème avec son maître.

Une expression d'intense révérence sur le visage, il s'assit près de l'archimage et lui posa une main sur le ventre.

"- Tu seras une bonne maman, hein ? Tu vas l'aimer et bien t'en occuper ?" Demanda-t-il d'une voix tendre.

Raist resta silencieux, un peu confus par les méandres imprévisibles du cerveau malade en face de lui.

Une petite partie de sa propre matière grise, en sommeil depuis son retour, se réveilla et se remit à fonctionner.

Une lueur calculatrice se refléta dans son regard et une expression de totale vulnérabilité glissa sur ses traits avec la facilité d'un acteur consommé.

"- Bien sûr que je vais l'aimer. Toutes les mamans aiment leurs petits."

Une expression nostalgique se peint sur le visage de Valoran que l'archimage ne manqua pas.

"- Valoran." Commença-t-il de sa voix la plus raisonnable et la plus persuasive. "Tu ne veux pas que ce bébé soit malheureux n'est ce pas ? "

Le mage blanc secoua la tête.

"- Je savais bien que tu étais un bon garçon… Mais je ne peut pas élever un enfant toute seule tu vois. Ce petit à besoin de son père et de sa tante, tu ne crois pas ?"

Valoran acquiesça encore de la tête.

"- Bien… Tu devrais me ramener vers eux, tu ne crois pas?… Qu'est ce que tu va faire maintenant ?"

Amiel bondit dans la "conversation" en grondant avec colère.

"- Emmène la à la Reine. C'est l'heure. La Reine ne tolérera aucun retard…"

"- C'est hors de question Amiel. J'ai remplit ma part du marché. La Reine doit remplir la sienne. Elle ne t'aura pas. Tu es à moi. Elle à promis."

Raistlin secoua la tête en constatant que l'esprit du mage s'enfuyait à nouveau. Devant le regard satisfait d'Amiel, il compris que son seul rempart contre la Reine était encore plus fragile qu'il ne l'avait cru. La pensée n'avait rien de réjouissante. Déjà, le Molosse se préparait à l'emmener.

"- Valoran…" Une joie toute enfantine illumina les traits du mage. "Fais moi sortir de cette grotte s'il te plaît. J'ai besoin d'air frais."

Le mage l'aida à se relever, lui posa une de ses robes sur les épaules, la noua puis guida la jeune femme vers l'extérieur.

Amiel semblait au bord de l'apoplexie.

"- Tu ne peux ! Tu dois obéir à la Reine" Cria-t-elle avec un rien de panique dans la voix.

Voyant que ses ordres n'étaient pas écoutés, elle tenta de les renforcer par un contact physique et se frotta contre les jambes son maître. Raistlin eut un mouvement de répulsion et Valoran chassa le Molosse à coup de pieds, ravi que l'archimage le félicite pour sa gentillesse et sa prévenance.

Amiel s'enfonça dans les profondeurs de la grotte. Elle avait un rapport à faire, et elle n'avait vraiment pas envie d'en subir les conséquences.

Les deux mages émergèrent à l'air libre, plusieurs golems les surveillaient à leur insu, suivant les ordres du molosse. Euthanos et Salys sur les talons, gémissants de peur devant la colère et la désapprobation de leur maître.

Raistlin inspira l'air frais du soir avec ravissement. Il tenta de contacter mentalement Dalamar, mais du se rendre à l'évidence. Il était tous simplement épuisé. Son enlèvement, plus sa grossesse, l'avaient vidé de toutes ses forces. Il suivit Valoran, cherchant des yeux un moyen de fuir, mais dût y renoncer. Ils n'avaient pas parcourus cents mètres qu'il dût s'asseoir pour reprendre son souffle.

Valoran se porta aussitôt près de lui.

Ravalant sa répulsion et offrant un visage des plus ouvert et affectueux au fou, il fit un énorme effort pour lui parler gentiment.

"- Tu es fatigué ? Tu devrais rentrer dans la grotte et te recoucher. Tu ne devrais pas t'agiter autant dans ton état…"

Raist ravala l'envie de lui rappeler que son épuisement était en grande partie sa faute, le mage ne se souvenant visiblement de rien.

Il lui montra un magnifique sourire plein de fossettes.

"- Ce n'est rien Valoran. L'air frais me fait du bien. J'ai les poumons fragiles et l'air de la grotte est trop lourd pour moi. Ca va passer si je peux rester dehors un moment. 'Ce qui je l'espère sera suffisant à Pyra et Dalamar pour me retrouver !" Finit-il en pensées.

"- Si tu veux "

"- Tu es un brave garçon." Félicita-t-il Valoran en ayant toutes les difficultés du monde à ne pas avaler sa langue devant une telle mauvaise fois.

***********************

"- Je l'ai !"

Dalamar bondit sur ses pieds et se porta au côté de Pyra.

"- Tu es sûre ? "

"- Il n'y a pas beaucoup de magicienne enceinte dans le coin, petit elfe. Il devait être protégé par un bouclier. Sa présence vient d'apparaître tout d'un coup. D'après son aura, il est épuisé, mais en bonne santé. J'ai la localisation précise. Il est immobile pour l'instant. Il faut y aller maintenant."

Dalamar hésita.

"- Hé bien, qu'y a-t-il ?" Demanda Talion. "Ton amie t'attends !"

L'elfe se tordit les mains.

"- Pour le bébé…"

"- Je lui en parlerai, Dalamar. Je m'occupe de tout." Le rassura La magicienne aux cheveux de feu avec un rien d'exaspération dans la voix.

La magicienne et le fermier se préparèrent à exfiltrer (1) l'archimage sans recevoir d'aide de la part de l'elfe. L'un comme l'autre le savait trop nerveux pour être utile à quoi que ce soit. D'une pensée, Pyra ordonna à Sharn et Ekalaka de veiller à ce qu'il ne soit pas dans leurs pattes.

Elle ôta le gant qui protégeait la Pierre. Elle s'embrasa puis se mit à sourdre d'impatience au contact de Koran.

Les deux mages et le fermier sortirent de la caverne. Consultant sa carte, Pyra indiqua le nord.

"- Allons-y !"

Dalamar intervint.

"- Attendez moi un instant." Demanda-t-il en se ruant dans la grotte.

Il couru dans la cuisine et fourragea un instant dans les tiroirs. Il en extirpa ce qu'il cherchait et se dépêcha de rejoindre ses acolytes.

"- Valoran est à moi !" Rappela-t-il avec un sourire sadique en désignant l'objet qu'il avait barboté dans la cuisine.

Pyra baissa les yeux. Dans sa main droite, l'elfe tenait une mandoline (2).

(1) Exfiltrer : faire évader quelqu'un d'un lieu en douceur, sans que quiconque s'en rende compte.

(2) Mandoline : instrument de cuisine servant à émincer et à râper finement. Demandez à votre môman, elle doit bien en avoir une dans sa

cuisine.

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