Chapitre III : A la Poursuite de l'Homme à la Cape… Rouge

Si je suis revenu à Nibelheim, c'est parce que la cascade de Lucrécia est près d'ici, c'était pour me souvenir. Je n'ai plus que ça, des souvenirs. Un quart de siècle déjà… Et je suis encore dans cette chambre qui était la mienne en ce temps-là, la chambre qui m'était réservée pendant ma mission auprès des scientifiques de la Shin-Ra. Je me demande encore pourquoi c'est moi qu'on avait choisi pour cette mission. En fait, elle ne m'emballait pas du tout. D'ailleurs, c'était peut-être pour ça que j'avais été choisi ; mon caractère d'un naturel renfermé, ajouté à mon non-enthousiasme flagrant, et voilà : je ne risquais pas d'aller claironner à tous mes amis – si j'en avais – ce qui se trafiquait dans la Demeure de Nibelheim.

Tous ceux qui ont approché Jenova sont devenus fous. Ifalna avait raison. Deux mille ans après s'en être prise aux Cetras, la "Crise du Ciel" n'avait pas changé ses méthodes. Celle que Gast et Hojo prenaient pour une Ancienne s'était approchée des humains influençables, promettant amitié, paix, bonheur, et même gloire, et elle leur avait transmis le "virus", leur avait inoculé sa folie. C'est ce qui était arrivé à Séphiroth, qui s'est cru être le fils de Jénova, un être bien supérieur aux humains. Et il est mort sans même savoir son erreur. Bien sûr il était différent, il n'en était pas moins humain.

Cette chambre, tout près du laboratoire souterrain… Je me revois encore, traversant la place du village, quitter en courant la chambre d'hôtel de Lucrécia où j'avais trouvé son corps inanimé sur le sol, j'ai dévalé l'escalier en colimaçon vers le laboratoire, j'ai annoncé cette catastrophe à Hojo. Est-il devenu complètement fou à ce moment précis, ou avait-il déjà perdu la raison auparavant ? Il s'est arraché les cheveux, a poussé un râle et a sorti un revolver. J'ai senti la balle me toucher au ventre. Je n'ai pas senti la douleur immédiatement. Puis vinrent cette nausée, cette sensation de brûlure, la douleur, et le choc de ma tête contre le sol de ciment froid ; le bruit que cela fit résonne encore dans mon crâne.

Hojo, en perdant sa femme, avait aussi perdu un spécimen pour son expérience. Il se procura donc un autre cobaye : moi. Je m'en suis rendu compte à mon réveil – je ne sais combien de temps après que Hojo m'ait tiré dessus – lorsque ma haine et ma soif de vengeance ont fait appel à cette bête qui était en moi…

Aujourd'hui encore, j'essaie de reconstruire mes souvenirs. Tout est si flou. Et toutes ces longues années passées dans ce cercueil à dormir, à faire des cauchemars si réels ; je ne sais plus quels évènements se sont réellement passés et lesquels j'ai rêvés.

Après m'être calmé, j'ai senti la bête en moi se rendormir et je me suis retrouvé allongé sur le sol du laboratoire souterrain. Revenu à l'hôtel, Lucrécia n'était plus là, mais Hojo était là, un bébé dans les bras. Je me suis alors souvenu que Lucrécia avait mis au monde un petit garçon à peine quelques jours auparavant. Hojo était accompagné de plusieurs Soldats de Troisième Classe, qu'il avait sûrement fait venir durant mon évanouissement. Hojo m'a désigné comme étant l'assassin de sa femme, les soldats m'ont regardé comme si je sortais d'un asile psychiatrique ; et malgré mes protestations d'innocence, ils m'ont enfermé dans l'un des caissons du laboratoire. Et il a recommencé ses expériences sur l'enfant et sur moi. C'est ainsi que j'ai perdu mon bras. Une greffe de Jénova qui a été rejetée… Hojo aurait pu me laisser mourir alors ; mais il tenait encore à son spécimen, donc il m'a amputé et je me suis retrouvé avec ce bras mécanique, qui est là pour me rappeler que je ne suis plus humain dans le fond.





Lieu : Village de la Fusée - Temps : un an et un jour après les évènements de la Grotte Nord. Fin de matinée.

« Bon sang de *%#*# !!! Quel est l'espèce de #&*%#*¤ qui m'a volé mon Hautvent ! Si je le retrouve, j'en fais du pâté en croûte et je le bouffe pour mon quatre heures ! »





Lieu : partie boisée, région de Cosmo Canyon - Temps : deux jours plus tard.

« - Bon Yuffie, impossible de retrouver Vincent. Nous devons partir pour Mideel aujourd'hui même. Autant faire le chemin ensemble, OK ?

- Je ne dis pas non, ça ira plus vite avec le Bronco qu'à dos de Chocobo ; même si j'ai le mal de l'air…

- Avec le Hauvent, on aurait eu plus de place, mais un ersatz de *% #& me l'a piqué pendant qu'on était au Gold Saucer !

- Je ne savais pas que tu avais réparé le Bronco.

- Je ne l'ai pas fait, mais presque. J'ai utilisé certaines pièces du Tiny Bronco pour le construire. Un vrai bijou, n'est-ce pas ! Je l'ai appelé "Pin-Up".

- Ah ?

- Je vais prévenir Grand-Père de notre départ… Il a quelque chose à me dire avant qu'on parte. »



*****



A peu près au même moment où cette "joyeuse" conversation avait lieu au canyon Cosmo, Clad débarquait sur une île verdoyante du sud appelée Mideel ; il était accompagné de Tifa et Barrett. Ils affichaient des mines inquiètes alors qu'ils avaient été presque' insouciants trois jours plus tôt, lors de la fête au Gold Saucer. Pendant qu'ils se dirigeaient vers l'unique village de l'île, Clad repensa à tout ce qui s'était passé ces deux derniers jours. Il s'en était plus passé en deux jours qu'en toute une année. Il s'était dit qu'il connaîtrait enfin une petite vie bien tranquille, installée dans le quotidien et le banal. Il ne voulait plus devoir se battre, il ne voulait plus être un mercenaire – c'était Zack qui en avait eu l'idée, pas Clad. Il avait changé après la bataille finale à la Grotte Nord. Il s'était installé dans la région des Prairies, s'était fait construire une petite maison près de la ferme aux chocobos qu'il avait ensuite rachetée au grand-père de Choco Billy. Il travaillait à présent avec Billy et Chole et leur affaire tournait plutôt bien : après la destruction des réacteurs Mako et la chute de Midgar – moins due au Météore qu'à la Révolte des Taudis – toutes les machines qui marchaient à l'énergie Mako, y compris les transports en commun, s'étaient arrêtées. Le chocobo devenait le moyen le plus économique et le plus pratique pour la majorité des habitants de la région.

Barrett s'était installé dès le début à Kalm avec Marlène parce qu'il voulait élever la petite dans une gentille petite ville tranquille. Tu parles ! Le bourg est vite devenu une quasi-métropole, la majorité des Midgars ayant déménagé là.

Quant à Tifa, après un certain temps d'indécision, elle s'était aussi installée à Kalm, avait ouvert un restaurant-bar et s'était associée avec le directeur de l'Hôtel Gradient de Kalm ; l'hôtel étant l'ancienne auberge où Clad et ses amis avaient séjourné il y a maintenant plus d'un an. Tout comme la ville, l'auberge s'était bien agrandie…

Ils traversaient à présent une épaisse forêt. Il semblait que cette île, contrairement aux régions de Midgar et Junon, n'avait pas changé. Bientôt ils arriveraient au village où Clad avait émergé du monde d'illusions qu'il s'était crée dans son propre subconscient. Dans la Rivière de Vie, c'était Tifa qui l'avait aidé à se retrouver. Sans elle, il y serait encore ; elle avait toujours été là pour lui. Ironiquement, c'était elle qui lui avait fait promettre de venir l'aider si elle avait des ennuis… Les ennuis, pour sûr, ils allaient bientôt ressurgir. Les fantômes du passé ; mais d'un passé vieux d'un an – ou de six ans ?



*****



Vingt-six ans ! Vingt-six ans déjà. J'ai beau me le répéter, je n'arrive pas à y croire. C'est réel, pourtant cela ressemble à un rêve que je pourrais faire si j'étais toujours dans mon caveau. Lorsque Clad a soulevé le couvercle du cercueil, j'ai cru que je rêvais encore. Pendant qu'il me racontait ce qui l'amenait ici, j'ai pris conscience du fait que bien des années s'étaient écoulées, et que le bébé que j'avais connu avait bien grandi, mais n'avait pas pris le chemin que sa mère aurait voulu pour lui. J'ai ensuite compris que bien des choses que je croyais avoir rêvées s'étaient réellement produites durant mon sommeil : Séphiroth enfant élevé comme un rat de laboratoire, toujours seul car différent des autres gamins ; les membres d'élite du SOLDAT subissant tous les injections de Mako et de cellules Jénova – les mêmes que celles qui furent expérimentées sur Lucrécia et le fœtus qu'elle portait ; le grand incendie de Nibelheim ; et durant ce temps, me revenait en mémoire un petit air joué doucement au piano – si seulement je pouvais me souvenir de quoi il s'agissait. C'est peut-être la clef à mes interrogations ?

Mon PHS a sonné aujourd'hui. La première fois depuis près d'un an. Mais je n'ai pas répondu… Je voulais être seul…



*****



Clad était encore plongé dans ses pensées tandis qu'ils se frayaient un chemin dans la forêt de Mideel. Tifa aurait beaucoup donné pour pouvoir pénétrer les pensées du jeune homme. Il cachait tant de secrets dans son cœur, alors qu'elle aurait voulu qu'il les partage avec ses amis, avec elle surtout.

Le jour de la fête au Gold Saucer, Clad s'était d'abord montré très boute- en-train, puis il s'était rembruni lorsqu'on avait mentionné Vincent, et lorsqu'elle, Tifa, avait parlé d'Aeris… Les cicatrices n'étaient pas encore guéries, elle le voyait bien.

Son cœur s'était arrêté de battre un instant lorsque le soir suivant, elle avait décroché le téléphone et entendu Clad lui parler de… Séphiroth.

Après la fête, ils étaient tous restés dormir au Gold Saucer puis s'étaient quittés le lendemain matin, d'humeur assez joyeuse. Tifa était partie avec Clad, Barrett et Marlène. Puis arrivés au continent Est, Clad les avait raccompagnés à Kalm avant de rentrer chez lui dans les prairies un peu plus au sud.

Tifa ne reprit pas le travail tout de suite et laissa son restaurant fermé pour un jour de plus. Et le soir, alors qu'elle s'apprêtait à ouvrir le bar pour les habitués, le téléphone sonna. Elle décrocha et entendit la voix de Clad lui parler, très vite, avec angoisse. Et l'angoisse la gagna, elle aussi.

Les battements de son cœur s'arrêtèrent un instant. En une seconde qui lui parut une éternité, elle revit son village en flammes, et parmi les flammes, la grande silhouette de l'officier SOLDAT qu'elle avait guidé dans les montagnes de Nibel, le corps sans vie de son père dans le réacteur Mako, sa confrontation avec cet homme qu'elle avait soudain haï ; elle sentit à nouveau la lame froide la lacérer, revécut sa chute dans l'escalier de fer et, comme en ce temps-là, elle fut au bord de l'évanouissement.

Elle avait fermé les yeux un instant et comme Barrett s'inquiétait à côté d'elle, elle lui fit un signe de la main, et en même temps, elle revoyait ces yeux verts, cruels, perçants la fixer. Elle rouvrit les yeux et le temps d'un éclair, elle n'entendit plus rien – seulement le bruit assourdissant de son propre cœur qui s'était remis à battre, qui s'emballait et résonnait à ses oreilles. Puis enfin, à nouveau elle entendit la voix de Clad qui parlait toujours très vite, au bout du fil.

Cette voix l'avait rassurée… Même si Clad semblait très inquiet au téléphone, sa voix avait rassuré Tifa, tout comme elle l'avait aidée dans le réacteur Mako de Nibel. "Tout ira bien, Tifa". Tifa s'en souvenait : elle pensait qu'elle allait mourir à cet endroit précis, et puis Clad était venu, comme il lui en avait fait la promesse, un soir à Nibelheim, avec les étoiles pour témoins.

Alors elle avait laissé son restaurant fermé ce soir-là, l'avait laissé fermé le lendemain aussi. Barrett avait confié Marlène aux parents d'une amie de la petite fille, l'avait laissée une fois de plus, pour partir à la recherche d'un homme à cape comme l'année précédente. Mais il s'agissait cette fois-ci de rechercher un homme à la cape rouge. Vincent.

Pendant que Clad s'occupait de leur expédition à Mideel, Barrett et Tifa s'étaient renseignés dans les quelques villes du continent Est, sans succès. Personne n'avait vu un homme ressemblant à la description de Vincent Valentine.

Cid et Red étaient, eux, partis à sa recherche dans le continent Ouest. Tandis que Yuffie avait quitté son village d'Utai pour voir du côté de la région du Glaçon. Reeve et Cait Sith n'étaient pas restés sans rien faire non plus : Reeve avait écourté ses vacances à Costa del Sol – où il faisait un malheur auprès de la gente féminine grâce à Cait Sith "siiii mignon !" – et il essaya auprès de ses diverses "sources d'information" mais l'espion n'eut pas plus de résultat que ses amis, alors ils avaient abandonné les recherches pour faire route vers Mideel sans Vincent. Car Vincent semblait avoir bel et bien disparu.



*****



Lieu : Mideel - Temps : deux jours plus tôt, peu après le coucher du soleil.

« - Ah, Vincent, enfin je vous trouve ! C'est vous qui avez rangé les affaires du patient X…

- Oui, pourquoi donc ?

- Et vous avez déplacé son sabre, où l'avez-vous mis ?

- Mais…

- Vous savez que nous avons des enfants dans cette clinique, il n'est pas prudent de laisser une telle arme à leur portée. Dites-moi où vous avez mis ce sabre, il est sous clé au moins ?

- Je… je ne l'ai pas changé de place !

- Alors où est-il ? Il ne s'est pas volatilisé tout de même !

- C'était mon jour de congé, Docteur. Je ne suis pas allé à la clinique de la journée. J'étais au téléphone avec Clad Strife cet après-midi – j'avais essayé de le joindre sans succès ce matin – il vient de me rappeler et m'a dit qu'il allait venir ici, avec plusieurs amis. Ils devraient arriver dans un jour ou deux. Ils souhaitent vous voir et Mr. Strife m'a demandé de vous faire la commission…

- … hum, merci… J'ai vu une sorte de gros avion à hélices par ici cet après- midi. Maintenant que vous me parlez du jeune Clad, il me semble me souvenir qu'il avait un avion semblable, la dernière fois que je l'ai vu. Oui, l'année dernière, il possédait un avion tout à fait identique… Comment l'appelait-il ? …Le Vent-quelque chose. Vent Elevé, je crois. Non, c'était… "Hautvent" plutôt; oui : "Hautvent" ! »