Disclaimer : Presque tout ici appartient à JK Rowling.
Les Chroniques des Maraudeurs
Première année
Chapitre 4 : Premières classes
Ce fut Remus qui se réveilla le premier ce matin-là il resta quelques instants étendu sur le dos, à profiter de l'atmosphère paisible qui régnait dans la petite pièce. Les trois autres dormaient profondément – enfin, presque. Remus entendait James marmonner dans son sommeil, Peter ronflait doucement, et Sirius – apparemment, Sirius faisait un cauchemar. Remus l'entendait se débattre dans son lit dans tous les sens. Se demandant ce qui se passait, il se leva, et alla écarter les rideaux du lit à baldaquins.
_ Sirius ? Sirius ! Réveille-toi, c'est qu'un cauchemar !
Sirius s'immobilisa soudain, les yeux grand ouverts Remus fut frappé par la panique qu'il y lut.
_ Du calme, Sirius, tout va bien, fit Remus très vite. Doucement, c'est fini, là… ben mon vieux, ça c'était un cauchemar ! Ca va mieux ?
Sirius s'était assis, et regardait alentour, les yeux toujours écarquillés de panique. Puis il cligna des yeux, secoua la tête, et se détendit. Il eut même un petit rire.
_ Alors ça, c'est pas croyable. Il suffit que je ne me réveille pas chez moi pour que je panique. Non, franchement.
_ C'est normal, t'as pas à avoir honte, fit Remus d'un ton rassurant. J'ai mis une bonne minute moi-même à me rappeler où j'étais. En plus, tu sortais d'un cauchemar terrible, apparemment – tu t'en rappelles ?
_ Non, je ne me rappelle jamais de mes cauchemars.
_ T'es sûr ? Des fois ça aide d'en parler.
_ T'en fais pas pour moi, je survivrai. J'ai pas hurlé, quand même ?
_ Non, mais tu te débattais comme si quelqu'un essayait de te noyer.
_ Tu sais quoi ? J'ai dû trop manger de ce délicieux rosbif et de la sauce à la moutarde, hier au banquet.
Remus n'en tira rien de plus. Puis James et Peter se réveillèrent, et il fallut descendre manger, ce qui était nettement plus facile en théorie qu'en pratique.
Il y avait cent quarante-deux escaliers à Poudlard, des dizaines de couloirs et pas mal de passages secrets. Il y avait aussi des portes qui ne s'ouvraient que si elles le voulaient – l'une d'entre elles voulut même obliger Lily à chanter une berceuse avant de s'ouvrir, et Lily en eut tellement assez qu'elle tourna les talons et s'en alla. Les élèves qui n'avaient pas le sens de l'orientation se perdaient facilement. Peter restait accroché à James, Sirius et Remus pour éviter de se perdre.
Il était surprenant de constater à quel point Sirius et Remus s'étaient bien adaptés au château. Surtout Sirius. James était constamment étonné par la connaissance que son ami avait acquise en si peu de temps. Lui-même avait encore du mal à se faire à Poudlard – tout y changeait si vite. Une porte pouvait apparaître un jour et disparaître un autre, ouvrir sur des passages différents suivant les jours de la semaine, ou même n'ouvrir qu'un jour par semaine. Les marches des nombreux escaliers pouvaient bouger sous vos pas, et il fallait en éviter quelques unes – quand ce n'était pas Peeves, l'esprit frappeur du château, qui vous tirait le tapis sous les pieds ou vous poussait derrière le dos pour vous faire peur en criant " J't'ai eu ! " Les deux seuls êtres qui arrivaient à le faire tenir à peu près tranquille étaient le Baron Sanglant, le fantôme sinistre qui hantait la tour des Serpentard (comme Nick Quasi-Sans-Tête hantait la tour des Gryffondor), et le concierge, Brutus Adams. Mais Adams faisait peur à tout le monde. Il avait beau être grand et massif, on ne l'entendait jamais arriver, et il flanquait une trouille bleue aux élèves de première année. Toujours silencieux, il lui suffisait de darder ses yeux glacés sur les élèves pour leur donner une forte envie de déguerpir.
Le seul élève à ne pas avoir peur d'Adams était Mondingus Fletcher. Ce type était un farceur né, et très vite James et Sirius se mirent à observer ses techniques. Il connaissait des passages secrets dont même Adams n'avait pas idée, ce qui était très pratique pour se dissimuler à chaque alerte. Et elles étaient nombreuses – bien qu'après coup, personne ou presque ne puisse jamais prouver avec certitude que Mondingus était dans le coup. Il avait une collection impressionnante de Bombabouses, de Pétards Mouillés du Professeur Flibuste, de Bougies Bohèmes et de plein d'autres attrapes qui faisaient que les choses avaient une fâcheuse tendance à exploser autour de lui. Arthur Weasley, qui était dans sa classe, confia un jour aux deux amis que " Fletch " avait réussi, en cours de Potions, à faire fondre le chaudron de tout le monde au moins deux fois en un an, et pas une seule fois Walsh n'avait pu prouver qu'il était derrière le coup.
Ce furent donc les exploits de Mondingus Fletcher qui poussèrent James et Sirius à faire quelque chose eux-mêmes. Vexés d'être considérés comme des petits parce qu'ils étaient en première année, ils décidèrent de réagir. Et ils n'avaient pas besoin de chercher très loin pour trouver une cible adéquate – ce fut Rogue qui fit les frais.
Leur tout premier cours de la semaine était Potions. La salle de classe se trouvait dans un des cachots, et ils partageaient ce cours avec les Serpentard. A la surprise de Remus, Lily et Peter, Sirius et James s'assirent plutôt près des Serpentard. Le professeur Walsh commença par faire l'appel. Arrivée à Sirius, elle leva les yeux et fit :
_ J'espère que vous ferez au moins moitié aussi bien que votre sœur, Black.
Sirius eut l'air vexé. Puis, l'appel fini, elle leur parla des Potions de sa voix basse et froide. Personne n'osait faire un bruit.
_ Vous êtes là pour apprendre, dit-elle ensuite, et je suis là pour vous apprendre, aussi je ne tolèrerai pas de chahut. Je parle, vous écoutez, vous écrivez. Vous parlez quand je vous interroge. Et si quelqu'un n'est pas d'accord, il peut prendre la porte tout de suite.
Personne ne bougea.
_ Nous allons commencer par un test, pour voir lequel d'entre vous a daigné ouvrir ses livres pendant l'été. Un point en plus à chaque réponse juste, un point en moins à chaque réponse fausse. Vous – elle darda ses yeux sur Peter, qui pâlit d'un coup – Pettigrow, c'est ça ? Quelle est la différence entre l'aconit et le napel ?
Peter ouvrit la bouche, mais aucun son ne sortit. Il regardait partout d'un air désespéré. Rogue commençait déjà à ricaner dans son coin. Lily et Lisa levèrent la main ensemble, et Remus suivit après une seconde. Walsh fronça les sourcils, ce qui lui donnait l'air encore plus terrible.
_ Eh bien, donnez une réponse.
Toujours rien. Wilkes s'étranglait de rire. Puis Peter finit par dire d'une toute petite voix :
_ Euh… elles n'ont pas la même couleur ?
Rogue s'effondra sur sa table, secoué de grands éclats de rire.
_ Vous ne savez même pas de quoi vous parlez, Pettigrow, avouez, fit Walsh d'une voix glaciale. Le napel et l'aconit sont deux plantes, également connues sous le nom de " tue-loup ". Un point de moins à Gryffondor. Vous me copierez ce chapitre de votre livre dix fois et vous me le rendrez dans deux jours.
Peter donnait l'impression qu'il allait plonger sous la table. James jeta un regard noir à Rogue et chuchota quelque chose à Sirius, qui sourit largement d'un air entendu et écrit quelques mots sur un bout de parchemin, qu'il lui passa sous la table.
_ Maintenant, Rogue, continua Walsh en se tournant vers lui, au lieu de rire bêtement, dites moi à quelle page de votre manuel se trouve la recette de la Potion de Ratatinage ?
Rogue eut l'air triomphant et ouvrit la bouche pour répondre seulement, au lieu de la réponse attendue, ce fut un grand Couac ! qui en sortit. Rogue devint très rouge alors que les Gryffondor éclataient de rire. James frappa dans la main de Sirius sous la table.
_ Je vois que certains d'entre vous connaissent déjà le Maléfice Canardière, fit Walsh de sa voix grinçante. Connaîtraient-ils la formule magique qui en annule les effets ? Je suis curieuse de savoir…
Remus se leva d'un air tranquille et murmura quelques mots. Walsh accorda un point à Gryffondor d'un air suspicieux. Quand il se rassit, James et Sirius le fusillèrent du regard :
_ Qu'est-ce qui t'a pris ?
_ Ca va pas, chez toi ? C'est Rogue, je te signale !
Remus se contenta de sourire et de secouer la tête d'un air mystérieux :
_ Faites moi confiance.
Rogue répondit correctement à la question et jeta un regard méprisant à Peter, James et Sirius.
Le cours passa lentement à la fin, la cloche sonna, et tout le monde se leva pour sortir de classe – sauf Rogue. Il resta assis, et on voyait à son air paniqué qu'il n'avait pas la moindre idée de ce qui se passait.
_ Eh bien, Rogue, fit Walsh, aimez-vous à ce point ma classe que vous voulez rester après la fin du cours ?
Rogue lui lança un regard désespéré Sirius, James et Lily s'arrêtèrent sur le pas de la porte.
_ Je… je suis collé ! finit par articuler Rogue. Quelqu'un m'a collé à ma chaise !
Un nouvel éclat de rire secoua les Gryffondor, alors que Walsh furieuse se tournait vers Remus :
_ C'est un coup bas, Lupin ! Je ne trouve pas ça drôle ! Un point en moins pour Gryffondor !
Malgré la perte des points, les quatre amis riaient encore en arrivant dans la classe de Flitwick.
_ Je ne douterai plus une seconde de toi, mon vieux, fit Sirius en essuyant ses larmes de rire. La tête de Rogue quand il s'est aperçu qu'il était collé à sa chaise !
_ Ca n'a pas de prix ! fit James en souriant largement.
_ Comment t'as fait ? demanda Peter d'un air admiratif.
Du coup, ils étaient tous de très bonne humeur pendant tout le cours d'Enchantements, bien que Flitwick leur dise qu'ils ne feraient pas voler des objets avant le mois d'octobre. Ils se contentèrent d'ouvrir leurs livres et de commencer par le commencement – la théorie. Mondingus avait dit vrai : il fallait une bonne pile de livres pour que Flitwick réussisse à voir par-dessus son bureau. Mais il mettait tant d'enthousiasme dans ses cours que personne n'avait envie de se moquer de lui.
Pendant le repas de midi, Sirius, James et Remus discutaient avec animation de la nouvelle prof de Métamorphoses. Tous se demandaient si elle était aussi sévère qu'elle en avait l'air – et une nouvelle prof ! Ca faisait longtemps, d'après Véga, qu'on avait pas eu de nouveau professeur à Poudlard.
_ Moi je vous parie qu'elle est aussi terrifiée que nous, fit Remus.
_ Ah, parce que tu es terrifié, toi ? plaisanta James. Tu n'en donnes pas l'air, tu sais.
_ Non, si ça se trouve elle a l'air, comme ça, d'être sévère, mais en fait elle est très sympa.
_ On verra bien. Peut-être aussi que c'est une peau de vache dans le genre de Walsh.
_ Comme tu dis, on verra bien !
Quand ils arrivèrent tous dans la classe de Métamorphoses, leur professeur n'était pas encore arrivée. Cela leur donna le temps pour s'installer, puis la porte claqua et McGonagall entra d'un pas rapide. Elle posa sa serviette sur le bureau, et regarda avec attention ses élèves par-dessus ses lunettes carrées.
_ Bien que je sois nouvelle ici, je ne veux pas que vous pensiez pour autant que je ne suis pas capable de bien m'y prendre avec une classe. Quiconque fera du chahut pendant mon cours sera expulsé sans espoir de retour.
Puis sa voix s'adoucit légèrement, et elle continua :
_ Je m'appelle Minerva McGonagall, et je suis là pour vous apprendre à maîtriser l'art de la Métamorphose. Je sais que cet art est compliqué, difficile, ce ne sera pas chose facile, mais si vous accordez un peu d'attention aux cours, tout se passera bien.
James, Sirius, Remus, Lily et les autres ne pouvaient qu'écouter attentivement après cette entrée en matière. Sirius enfouit son menton dans ses mains et fixa McGonagall avec un air béat, tandis que Remus prenait sa plume d'un geste machinal.
_ Et j'avertis les petits plaisantins, ajouta McGonagall d'un air sévère, le premier qui fait une farce, je le transforme en chameau. Ou autre chose.
Et elle changea son bureau en vache brune à tache blanches, puis d'un petit coup de baguette, le bureau fut de retour. James sursauta, et Sirius se redressa. Transformer un élève comme punition était censé être interdit, mais tout de même, il valait mieux ne pas prendre de risque.
En sortant, les élèves étaient enthousiasmés – même Peter. Il faut dire que si Walsh n'épargnait personne, McGonagall préférait encourager. C'était une différence importante.
Mais le cours préféré de James, Sirius et Remus fut, et de loin, le cours de vol. James savait déjà tenir un balai et voler, et Remus avait quelques notions, mais Sirius n'avait jamais tenu un balai de sa vie – pas un balai magique, en tous cas. Néanmoins, tous trois se révélèrent plutôt bons, ainsi que Lisa Dodger et Charlie McKinnon Madame Bibine, la professeur de vol, leur accorda un de ses rares sourires, et leur dit que s'ils prêtaient une attention particulière aux leçons de vol, l'année prochaine ils feraient certainement partie de l'équipe de Gryffondor. Il suffisait qu'ils travaillent un minimum leur " style ". Le mot fit dresser les sourcils de Remus, pendant qu'un sourire un peu ironique se dessinait sur les lèvres de James et que Sirius manquait tomber de son balai à force de rire. Il y croyait à peine.
L'Histoire de la Magie était le cours le plus ennuyeux que tout le monde aie jamais vu. Arthur Weasley n'avait pas exagéré en disant que les cours du professeur Binns étaient assommants. Non seulement la Grande Rébellion des Gobelins n'intéressait personne, mais Binns parlait d'une voix monocorde qui, ajoutée à la torpeur d'après le repas – l'Histoire de la Magie tombait chaque fois en début d'après midi pour les première année de Gryffondor cette année, pour on ne sait quelle obscure raison – ennuyait profondément les élèves, qui devaient lutter sincèrement pour ne pas s'endormir.
Le seul cours qui aurait pu rivaliser d'ennui avec l'Histoire de la Magie était, curieusement, la Défense contre les Forces du Mal. Le professeur Rebus Ricochet croyait à la théorie et à la connaissance livresque, et il avertit ses élèves dès le premier cours que les travaux pratiques seraient rares dans sa classe :
_ Se défendre contre des créatures des Ténèbres, différentes Malédictions ou Sortilèges requiert autre chose qu'une baguette magique et un coup de chance. Cela demande une grande connaissance de toute chose liée aux Forces du Mal, et vous acquérez cette connaissance en écoutant mon cours et en le complétant en lisant le plus de livres que vous pourrez. Aussi j'aimerais que vous laissiez votre baguette magique dans votre sac quand vous entrez dans cette classe.
Fergus Finnigan, qui disait s'être déjà retrouvé face à face avec un troll, était scandalisé en sortant du premier cours.
_ Comment il veut qu'on se défende contre un machin comme ça avec un livre ? fulminait-il, alors qu'il avait raconté son aventure pour la énième fois. " De la théorie, rien que de la théorie "… Il faut aussi qu'on apprenne comment se défendre, nom d'un chien !
_ Peut-être qu'un livre peut se révéler utile, avait glissé Lily, qui avait pourtant également l'air déçu. Comme a dit Flitwick, " rien ne se pratique sans des bases théoriques ".
_ Et puis après tout, fit Sirius en rangeant dans son sac son livre épais d'Histoire de la Magie qui ne voulait pas rentrer, ces livres sont tellement lourds qu'ils assommeraient au moins deux trolls.
Malgré sa petite déception en Défense contre les Forces du Mal, Lily découvrait avec ravissement qu'elle se débrouillait plutôt bien. Les cours d'Enchantements en particulier la passionnaient, et elle fut une des premières à réussir les travaux pratiques. En Potions, Walsh l'intimidait, et elle n'osait pas tellement lever la main de peur d'essuyer les foudres du terrible professeur. Il n'y avait bien que Sirius – ou Rogue – pour ne pas sembler prêter attention à ses remarques à l'acide. Mais Sirius semblait imperméable à la mauvaise humeur. Cependant, James remarquait que plus les professeurs faisaient des remarques à propos de l'excellence de Véga, plus son ami se renfermait. Quand il voulut en parler à la jeune fille :
_ Enfin, James, c'est pas ma faute si j'ai des bonnes notes en classes, s'exclama-t-elle. Je suis franchement désolée pour Si, mais de toute façon il faut qu'il se construise lui-même, et finalement ça ne peut être que bénéfique.
James n'en était pas si sûr. Mais comme Véga avait l'air d'y tenir, il n'insista pas et se contenta de rassurer Sirius dans ses – ils étaient rares – moments d'amertume.
Sirius n'était apparemment pas le seul à avoir des problèmes dans sa famille. Dans la deuxième quinzaine de septembre, Remus, l'air inquiet et assez fatigué, annonça à ses amis qu'il ne serait pas là pendant un ou deux jours. Sa mère était malade, et il préférait retourner chez lui brièvement avec l'accord du directeur. Mais à Lily qui lui demandait qu'avait sa mère exactement – elle pourrait peut-être le rassurer, son père était docteur – il ne décrit les symptômes d'aucune maladie précise.
Quand il revint, le jour suivant en fin d'après-midi, il était pâle, et semblait malade et épuisé. Les quatre autres, inquiets, voulurent lui demander ce qui n'allait pas, ce qu'ils pouvaient faire – il se contenta de secouer la tête avec un pauvre sourire, et de dire qu'il avait été malade dans le train pendant le voyage de retour, et que sa mère allait mieux. James, Sirius et Lily se posèrent des questions pendant quelques jours, puis l'histoire fut oubliée et tout redevint normal.
Une sorte de routine s'était déjà installée : une fois qu'on savait où aller et surtout par où y aller, Poudlard n'était pas si impressionnant ni si bizarre que ça. Les Potions étaient dans les cachots, l'Astronomie dans la Tour Sud, les serres pour la Botanique derrière le château, presque dans le parc. Et entre, il y avait tout un dédale de portes, de couloirs et de salles de classes. Et au milieu, Adams, dont on ne savait jamais de quel côté il allait débarquer pour vous avoir.
Sirius et James avait déjà trouvé la salle commune des Serpentard ils passaient leur temps libre à essayer de trouver le mot de passe pour tenter de rentrer dedans et faire ce pour quoi ils semblaient avoir un don naturel – des farces. En attendant, ils se vengeaient en cours de Potions, de Vol – le malheureux Severus Rogue ne faisait pas le fier sur un balai – et de Botanique. C'était si facile. Il suffisait de lancer un Pétard Mouillé du Professeur Flibuste dans le chaudron de quelqu'un, ou de mettre une Bombabouse bien placée dans son sac, ou de glisser une grenouille dans le col d'une fille de Serpentard – ça, c'était la spécialité de Sirius. La première fois qu'il y avait réussi, c'était en cours de Botanique. Mira Katapan, une fille de Serpentard derrière qui il était assis et qui avait une langue de vipère, avait fait un bond et avait poussé un hurlement à vous glacer le sang. Chourave en avait laissé tomber le pot en terre cuite qu'elle tenait à la main.
_ Miss Katapan ? Quel est le problème ?
_ J'ai… un truc m'a… j'ai un machin dans le cou !!
Le professeur Chourave s'était approchée d'un pas ferme, avait regardé dans son col et en avait sorti, sous les " beurk ! " de dégoût des autres filles de Serpentard et les " aaahh !! " ravis des Gryffondor, une grenouille toute verte, encore toute mouillée, et toute glissante. Mira Katapan eut un frisson de dégoût, et Rogue fusilla du regard Sirius, qui riait si fort qu'il en pleurait.
C'était un bon début. Mais ce n'était qu'un début.
Très vite, il s'avéra que la spécialité de Lily était les Enchantements. Et James, Sirius – et Remus, qui sur les farces avait aussi son mot à dire – ne furent pas longs pour s'en apercevoir. Un soir de fin septembre, alors que les Gryffondor étaient rassemblés dans leur salle commune avant d'aller se coucher, les quatre garçons – James, Remus, Sirius et Peter – restèrent un moment avant de monter dans leur dortoir tandis que Sirius grattait un petit air en sourdine sur sa guitare, sous le regard admiratif de Peter qui aurait bien voulu savoir en faire autant, James et Remus s'approchèrent de Lily, qui marmonnait tout bas la formule du Sortilège de Lévitation pour se le mettre en bouche :
_ Win-gar-dium Leviosa… non, minute – c'est Win-gar-dium Levi-o-sa… Nom d'un vampire, je vais jamais y arriver si je n'arrive même pas à prononcer correctement…
_ Lily ?
_ Mm ?
Lily leva la tête de son livre et vit James et Remus qui se tenaient devant elle, souriant d'une manière presque angélique. Elle fronça les sourcils :
_ Vous voulez quoi, exactement ?
_ On a besoin de tes lumières, chère Lily, fit Remus en s'inclinant galamment.
_ Oui, on voudrait apprendre quelque chose de toi, renchérit James.
Lily les regarda tour à tour, l'air surpris :
_ Vous voulez rire ? Les deux garçons les plus brillants de Gryffondor veulent " apprendre quelque chose " d'une petite fille de Moldus comme moi ? Vous devez vraiment être dans le pétrin.
_ En fait, rectifia Remus, sans prêter attention à Sirius qui s'était mis à siffloter d'un air machiavélique dans leur dos, on voudrait savoir si…
_ …Si tu voulais nous aider pour…
_ …Jouer un tour à Rogue.
_ Exactement.
_ C'est ça.
Lily ferma son livre, posa ses mains sur la table et les regarda bien en face.
_ Alors, est-ce que ça veut dire que messieurs en auraient assez de lancer des Bombabouses dans les couloirs, de faire éclater des chaudrons ou des mettre des grenouilles dans le cou des filles ?
Elle jeta un coup d'œil à Sirius en disant cela. Puis elle revint sur les deux autres, et un sourire vint se nicher sur ses lèvres :
_ Ca fait toujours plaisir de savoir qu'on a besoin de soi.
_ Alors, c'est d'accord ?
_ C'est d'accord, à condition que monsieur Je-Me-Cache-Dans-Le-Coin-Là-bas-Mais-Je-Rigole-Sous-Cape vienne aussi me demander mon aide.
En une seconde, Sirius avait posé sa guitare avec précaution, en deux secondes il avait traversé la pièce à grands pas, et en trois secondes il était aux pieds de Lily, braillant :
_ Oh, je vous en prie, tendre damoiselle ! Aidez-nous, car notre détresse est grande – nous avons besoin d'une muse pour nous inspirer !
Lily réprima un fou rire, et répondit d'une voix étranglée :
_ Je suis maintenant entièrement d'accord.
_ On commence demain ?
_ Pourquoi demain ? On peut le faire tout de suite !
Remus ouvrit des yeux ronds James et Sirius se regardèrent, le même sourire malin sur les lèvres.
_ Lily, chère, très chère Lily, nous ne nous serions jamais douté que…
_ Que vous étiez les seuls à avoir le monopole des blagues ? Je ne passe peut-être pas tout mon temps à espionner les Serpentard, mais j'ai une ou deux idées sur la question.
_ Qu'est-ce qu'on fait ?
_ On peut attendre que tout le monde soit couché et on va vers la bibliothèque.
_ Hein ? Tu peux répéter ?
_ Je connais un livre qui parlerait de Sortilèges de tous les jours, très facile à utiliser mais redoutables si on sait s'y prendre. Et il est caché quelque part par là.
_ Qui t'en a parlé ?
_ C'est Mondingus.
_ Fletcher ? Le traître ! Il avait promis de nous dire son secret…
_ Vous ne savez pas vous y prendre, c'est tout.
_ Comment tu t'y es prise, toi ?
Lily eut un sourire rayonnant :
_ Je lui ai promis de toucher deux mots pour lui à ta sœur, Sirius.
_ Quoi ? Tu veux dire que ma sœur… qu'il a un ticket avec ma sœur ?
Sirius avait l'air à la fois scandalisé et dégoûté.
_ Pourquoi tu fais cette tête-là, Sirius ? demanda Remus avec un sourire en coin.
_ Mais c'est ma sœur…C'est Véga… elle est préfète… et de penser qu'elle – beurk ! Moi j'étais pas sérieux quand je la taquinais là-dessus… elle se fait vraiment draguer ? Et par le Grand Mondingus Fletcher, en plus ?
_ Il n'est pas si grand que ça, il a deux ans de moins qu'elle.
_ Mais quand même… le pauvre diable, je le plains… être amoureux de ma sœur…
Lily regarda attentivement Sirius, la tête penchée sur le côté, l'air comiquement mélancolique :
_ Tu sais, Sirius, je comprend exactement ce que tu ressens. Bon, à onze heures ici, ça vous va ?
_ A onze heures, ça va.
_ A tout à l'heure !
Une fois remontés dans leur dortoir, Sirius rangea sa guitare dans son étui avec précautions. James se coucha sur le dos dans son lit et Remus prit un livre qu'il avait dans sa valise. Tous trois se demandaient comment ils allaient faire pour ne pas éveiller les soupçons de Peter – il serait le seul à rester dans le dortoir, et même s'il n'était pas vraiment du genre à tout remarquer autour de lui, cela pourrait sembler louche à n'importe qui.
L'heure fixée se rapprochait dangereusement, et les trois garçons commençaient à s'inquiéter, quand Peter se tourna vers eux, un mélange de peur et de détermination peint sur son visage rond :
_ Je vous ai entendu tout à l'heure.
Remus posa son livre, Sirius son étui à guitare et James s'assit dans son lit :
_ Quoi ?
_ Avec Lily. Vous allez avoir des sacrés problèmes si Adams vous attrape. Et en plus, Sirius, ta sœur est préfète, si elle t'attrape toi elle est capable de t'envoyer une Beuglante.
_ Une quoi ?
_ Une engueulade par lettre que tu reçois le matin, devant tout le monde.
_ Ca va, d'accord. Et alors, où tu veux en venir ?
Les yeux de Peter s'allumèrent :
_ Laissez-moi venir avec vous.
_ Pourquoi, Peter ? fit Remus, les sourcils froncés.
_ Rogue n'a pas arrêté de m'embêter depuis le premier jour, fit Peter d'une voix suppliante. Je… j'en ai assez, je veux lui montrer que je suis autre chose que ça ! Et puis j'en ai marre qu'il me dise sans arrêt que je n'ai pas d'amis !
James, Sirius et Remus se concertèrent du regard une seconde, puis James se tourna vers Peter et lui dit :
_ C'est bon, viens, mais pas un mot, d'accord ?
_ Je serai plus muet qu'un Veracrasse, assura Peter. Sirius fit " Hm " d'un air important, bien qu'il n'aie pas la moindre idée de ce qu'était un Veracrasse.
En bas, ils retrouvèrent Lily, qui haussa les sourcils en direction de Peter mais ne dit rien. Puis ils sortirent de la salle commune après avoir glissé le mot de passe à la Grosse Dame (Méduse), et se retrouvèrent dans le couloir.
Malgré les nombreuses tentatives de farces qu'ils avaient concoctées à trois, James ne s'était jamais retrouvé en dehors de la salle commune de Gryffondor aussi tard dans la nuit. Ils pouvaient à tout moment tomber sur un professeur, sur Peeves, ou pire, sur Adams, dont ils craignaient la fâcheuse – et dangereuse – habitude de surgir dans leur dos sans crier gare. Les trois avaient déjà eu affaire à lui, mais Lily et Peter n'avaient jamais eu de retenue jusqu'ici – ils ne connaissaient pas la sueur froide qui courait dans le dos de quiconque avait la malchance de se faire prendre sur le fait par Brutus Adams. Il prenait le coupable par le col et le soulevait facilement – il devait faire au moins un mètre quatre-vingt cinq – tout en le fixant de ses yeux noirs et froids, profondément enfoncés dans ses orbites, et marmonnant dans sa mâchoire puissante comme celle d'un lion des malédictions qui feraient trembler n'importe qui.
James se demandait – et il n'était pas le seul – comment Mondingus Fletcher arrivait à ne pas avoir peur de ce type. C'était une des raisons pour lesquelles Sirius l'admirait autant. Sirius n'enviait pas Fletcher – il voulait simplement l'égaler dans le domaine qui les rassemblait tous deux. C'est pourquoi, marchant sur la pointe des pieds dans l'ombre de James, il avait les yeux étincelants, bien plus que d'habitude. Il adorait les battements presque affolés de son cœur, et le frisson qui courait dans son échine alors qu'il maraudait le long des couloirs de Poudlard. On doit avoir un don pour ça, pensa-t-il en regardant James, Remus et Lily qui avaient la même flamme vive dans les yeux.
Lily s'immobilisa, et alla vers le mur. Elle appuya sur le dessin d'un corbeau, et se retourna vers eux, les yeux brillants :
_ Normalement, le livre est dissimulé là-dedans.
Les cinq se serrèrent autour de la cachette – mais une déception sévère les attendait.
La cachette était vide.
Ou presque.
Lily, retenant une exclamation de dépit, prit le morceau de parchemin qui reposait à la place du livre attendu, et le déplia :
Chère Lily – ou qui trouvera ce papier,
Tu ne pensais tout de même pas que j'allais te donner une des clés de ma réussite comme ça, juste parce que tu m'as rendu un petit service ? Si tu veux mon livre, il faudra le chercher !
_ C'est pas vrai ! s'exclama Sirius presque à voix haute. C'est pas du jeu, le sale tricheur !
_ Chut, fit James, et il se pencha à nouveau sur l'épaule de Lily pour lire la suite.
Non, ne fais pas la tête pour ça. Allons, souris – là, c'est mieux. Bon, je vais te donner un petit indice. Il est dehors, dans une cachette –
_ Encore ? C'est pas une blague, cette fois-ci ? marmonna Peter. On peut pas aller dehors maintenant, il fait froid !
_ Chut, fit Sirius.
_ T'es gonflé de dire ça.
_ Chut !
Et tout ce que je peux te dire, c'est que c'est au pied de la tour la plus froide du château, et que le Grand Chien veille dessus. Si avec ça vous ne trouvez pas, vous êtes un cas désespéré…
Bonne chance !
P.S. : au cas où vous ne l'auriez pas remarqué, j'adore les devinettes…
_ " La tour la plus froide du château " ? gémit Peter. Et " dehors " ? On ne va pas y aller maintenant, quand même ?
_ Mais si, bien sûr !
_ Oh, non…
_ Eh, c'est toi qui as voulu venir, je te signale. Hé !
Lily lança un léger cri et lâcha le parchemin qui s'était mis à brûler. James fronça les sourcils, tandis que Sirius marmonnait des malédictions contre Fletcher d'un air admiratif. Quand le parchemin eut totalement fini de brûler, les cendres se rassemblèrent en petit tourbillon, puis disparurent brusquement.
_ Sortilège Auto-Inflammable, lâcha James d'un ton amer. Détruit un parchemin dès qu'on a fini de le lire.
_ James, fit Remus d'une voix rêveuse alors que Lily refermait la petite porte dans le mur d'un air déçu, il y a bien quatre tours principales à Poudlard, n'est-ce pas ?
_ Oui, est, ouest, nord et sud. Tu crois que c'est laquelle la plus froide ?
_ Ben, ça me paraît évident, à moi.
James, Sirius et Peter regardèrent Lily avec attention. Seul Remus sourit d'un air entendu. Elle haussa les épaules :
_ A votre avis, quel est le point cardinal où il fait le plus froid ? Le sud ?
_ La tour d'Astronomie, s'exclama James à voix basse. La tour Nord, bien sûr… On est bêtes…
Et avant que Peter eût pu ajouter un mot, ils étaient tous partis vers la sortie la plus proche.
Une fois dehors, Sirius regretta de ne pas avoir emporté sa cape. Le vent était frais, et il tremblait dans son pyjama. Néanmoins, il s'efforça de ne pas le montrer et forcit le pas pour rester à la hauteur des autres. Au moins, ils n'avaient rien à craindre d'Adams ou de Peeves tant qu'ils étaient dehors, c'était déjà un bon point.
La tour Nord était située non loin de la Forêt Interdite. Alors que les cinq aventuriers en herbe se faufilaient dans la nuit vers le pied de la tour, la Forêt devenait de plus en plus proche, menaçante et de plus en plus sombre. Tandis qu'ils arrivaient à l'endroit fixé, Peter s'immobilisa soudain :
_ Vous… vous avez entendu ça ?
_ Entendu quoi ? demanda Lily en se retournant vers lui.
_ Un bruit !
_ T'en fais pas, Peter, plaisanta Sirius. Ca doit être mon estomac. J'ai pas assez mangé, ce soir.
_ Non, c'était pas ça… souffla Peter d'une voix blanche. Je crois…
_ Tu crois que c'était quoi ? demanda James d'un ton curieux.
_ Je crois que c'était… un loup-garou.
Trois éclats de rire trouèrent la nuit.
_ Sacré Peter… je savais pas que t'avais un tel sens de l'humour, tu sais ! s'exclama Sirius, qui se tenait les côtes.
_ Allons, Peter, ne t'en fais pas, fit la voix de Remus dans le noir. On est là pour te protéger, tu le sais ?
Etait-ce juste une impression, ou James avait vraiment senti quelque chose de légèrement étrange dans cette voix rassurante ?
_ Et puis de toute façon, tu n'as rien à craindre d'un loup-garou, fit Lily sur un ton gentil mais ferme. Tout le monde sait que c'est à la pleine lune qu'ils attaquent. Et regarde autour de toi : tu vois un loup-garou, ici ?
Peter secoua la tête, peu rassuré. Sirius haussa les épaules, et fit :
_ Et puis, si tu as peur, tu peux toujours rentrer au dortoir sans nous.
_ Non, pas tout seul !
L'exclamation de Peter était un vrai cri du cœur. Puis il se reprit, l'air penaud :
_ J'ai… je suis pas rassuré, moi, et puis si je tombe tout seul sur Adams, qu'est-ce que je lui dis ?
Arrivés au pied de la tour, Lily récita la devinette à voix haute :
_ Bon, donc voilà la " tour la plus froide du château ". Mais qu'est-ce que c'est que cette histoire de " Grand Chien " ?
_ Peut-être celui de Hagrid, fit remarquer James. Véga a dit qu'il avait un énorme molosse.
_ Non, il n'y aurait pas de majuscules…
Sirius dansait d'un pied sur l'autre pour se réchauffer. Lily l'ignora et farfouilla parmi les herbes sauvages qui poussaient au pied de la tour. Puis elle poussa un petit cri de joie, et s'écarta : une grande plaque était gravée dans la pierre usée. Et il y avait des dessins…
_ Qu'est-ce que c'est que ce truc ?
_ Oh, s'exclama Remus. Ce sont les symboles des constellations. Regardez, là c'est Orion le Chasseur, là le Dragon… La Grande Ourse, la Petite Ourse…
James, Remus et Sirius – qui gesticulait toujours autant, claquant des dents – aidèrent Lily à dégager la plaque, puis reculèrent d'un pas.
_ C'est le " Grand Chien ", c'est ça ? Qu'est-ce que… Sirius, arrête de gesticuler comme ça, tu me déconcentres…
_ C'est p… pas ma f… faute si j'ai f… froid ! s'exclama l'interpellé d'une voix scandalisée, entre deux claquements de dents. James le regarda bizarrement, puis regarda Lily, puis de nouveau Sirius, et s'exclama à voix basse :
_ Lily, tu es un génie !
_ Ah bon ? fit Lily déconcertée. Ben, merci…
James avait fait un pas en avant et dégagé le symbole de la constellation du Grand Chien il appuya dessus, et la plaque s'ouvrit. Remus, Lily et Sirius se rapprochèrent, les yeux brillants.
_ J'espère que ça vaut le coup, au moins, murmura Remus, sans faire attention aux petits couinements effrayés de Peter derrière eux. James se baissa, et prit le vieux livre qui y était caché il souffla un peu la poussière, et lut : Trois Mille Deux Cents Uns Mauvais Coups en Tous Genres.
_ Je crois que ça le vaut, chuchota Sirius. Largement, même.
_ Mais… r… r…
_ Quoi, Peter ?
_ Re… regardez p… par là…
James se retourna, et dans l'obscurité Lily put le voir changer littéralement de couleur. Inquiète, elle demanda :
_ James ? Ca ne va pas ?
Sans répondre, James leva un doigt tremblant vers la forêt. Un énorme animal d'une couleur bizarre fonçait droit sur eux. Remus et Sirius se retournèrent à leur tour Remus ouvrit la bouche, sans parvenir à émettre aucun son, et Sirius, les yeux exorbités, articula dans un souffle :
_ Oh, nom d'un chien…
_ Tirons-nous d'ici ! siffla James, retrouvant l'usage de sa voix.
L'instant d'après, ils couraient tous dans la même direction – sans bien savoir laquelle, d'ailleurs – le plus vite qu'ils pouvaient, talonnés par la bête dont ils pouvaient entendre le souffle rauque derrière eux. La terreur leur donnait des ailes, et aucun d'eux ne regardait où il mettait les pieds – jusqu'à ce que James trébuche et s'écroule par terre. Sirius le rattrapa par un bras et le souleva à moitié pour le remettre sur ses jambes, mais il était trop tard : l'animal leur sauta dessus.
Remus fit volte-face et se mit à courir vers l'endroit où ses deux amis étaient tombés aussi vite qu'il courait dans la direction opposée deux secondes auparavant, suivi de Lily. La gorge serrée par l'angoisse, le cœur battant et le souffle court, il s'arrêta et essaya de percer l'obscurité du regard. Il ne voyait que la forme imprécise du gigantesque animal, sa couleur vaguement claire tranchant dans les ténèbres.
_ Lâche-moi, lâche-moi, je te dis !
Cette fois, plus de doute. C'était la voix de James. Remus s'avança d'un pas ferme vers la bête, empoigna courageusement ce qui lui semblait être la tête et tira de toute ses forces. Un gémissement aigu retentit, suivi d'un éclat de voix – une voix familière, à quelques mètres d'eux :
_ Sage, Curly ! Au pied ! Laisse-les tranquilles !
Remus et Lily, moitié soulagés et moitié déconcertés, regardèrent l'immense silhouette de Hagrid s'approcher d'eux à grands pas, une lanterne à la main. A la lueur de la lanterne, Remus vit que la bête était un grand chien aux poils jaunâtres, qui reculait en gémissant, et en lui jetant ce qui lui semblait être un regard de reproche. James se relevait sur ses coudes, et Sirius essuyait la bave de chien qui lui couvrait le visage :
_ 'Faut pas lui en vouloir, 'savez, fit Hagrid en les aidant à se relever l'un après l'autre. Il a l'air féroce comme ça, mais il ne ferait pas de mal à une mouche même si elle l'avait mordu. Il veut simplement jouer.
Les jambes de James tremblaient encore. Peter, lui, tremblait de tous ses membres, Lily frissonnait malgré la chaleur de la course, et Sirius claquait toujours des dents. Hagrid leur jeta un coup d'œil rapide, et fit avec un signe de tête :
_ Venez, vous allez attraper la mort si vous restez comme ça.
Les cinq enfants suivirent Hagrid dans sa cabane, où il les assit sur un lit massif recouvert d'un dessus de lit en patchwork tandis qu'il entreprenait de préparer du thé.
_ Je vous reconnais, vous deux, fit-il à Sirius et James, tout en tendant une tasse fumante à chacun. C'est vous qui êtes tombés dans le lac, le premier soir. Toi, tu es James Potter, et toi… toi tu dois être le fils d'Altaïr Llewellyn – tu as les yeux de ta maman. Tu t'appelles Sirius, c'est ça ?
Sirius hocha la tête. Hagrid eut un large sourire :
_ Je connaissais ta maman, tu sais. C'était une très jolie jeune fille, et elle était très gentille. Quant à toi – tu dois être Remus Lupin.
Remus eut l'air surpris.
_ Comment vous connaissez nos noms ?
_ Eh, j'étais là à la Cérémonie de Répartition, je te rappelle. Et puis le professeur Ricochet m'a parlé de toi – le seul élève qui suit le cours en Défense contre les Forces du Mal. Et même en Histoire de la Magie, à ce qu'il paraît.
Remus eut un sourire en coin. Puis Hagrid but une gorgée de thé, et se tourna vers Lily :
_ Lily Evans, tu es une enfant de Moldus, c'est ça ? Le professeur Flitwick m'a parlé de toi, il était impressionné. Pas du tout perdue apparemment ?
Lily secoua la tête :
_ Non, tout va bien. C'est génial d'être ici – on apprend tellement de choses…
Elle et James échangèrent un clin d'œil. Puis Hagrid se tourna vers Peter, qui n'avait toujours pas bu son thé, et restait assis sur le lit, un peu raide.
_ Eh ben, qu'est-ce qui se passe ? C'est pas à cause de lui, quand même ?
Il montrait Curly, qui avait posé sa tête sur les genoux de Lily qui le caressait gentiment, sans paraître remarquer qu'il lui bavait allègrement dessus.
_ Il ne va pas te manger, tu sais. C'est quoi, ton nom ?
_ Peter Pettigrow, fit Peter, un peu vexé d'être le seul dont Hagrid ne connaisse pas le nom.
Une fois les six tasses vidées, Hagrid les regarda en fronçant les sourcils :
_ Bon, maintenant, si vous me disiez ce que vous fabriquez dans le coin ? C'est très dangereux de sortir dehors, la nuit, surtout par les temps qui courent !
Les cinq se regardèrent. Ils n'avaient pas réfléchi à une excuse. Puis Remus prit la parole :
_ On n'arrivait pas à dormir, alors on est descendus dans la salle commune Lily était là, elle non plus elle ne pouvait pas dormir. Quand on l'a vue, elle révisait son Livre des Sorts et Enchantements. On a discuté un peu, puis l'un d'entre nous – je ne sais plus lequel – a voulu aller aux toilettes, alors on l'a accompagné parce que c'est facile de se perdre dans ces sacrés couloirs. C'est là que Peeves nous a remarqué, et il a jugé amusant de nous faire passer une porte bizarre qui donnait droit sur dehors. On a atterri au pied de la tour Nord, et c'est là qu'on est tombés sur Curly. On a eu peur, et on a couru sans réfléchir.
Remus avait tout sorti d'une traite, sans réfléchir ni respirer quand il eut fini, les quatre autres le regardèrent d'un air légèrement admiratif.
_ Hm, fit Hagrid d'un ton dubitatif, d'accord, disons que c'est oublié pour cette fois. Mais faites attention, à l'avenir – ça aurait pu être n'importe quoi sauf Curly qui vous saute dessus, et je ne serai pas toujours là pour veiller sur des imprudents qui sortent à des heures indues. Le thé était bon ?
Cinq hochements de tête plus tard, Hagrid se leva, et dit :
_ Bon, je vous ramène à votre salle commune. J'imagine que vous ne tenez pas tellement à expliquer tout ça à Adams ?
Ils tombèrent sur le concierge, cependant, alors qu'ils marchaient sur la pointe des pieds le long des couloirs. Hagrid expliqua l'histoire à Adams, qui, à en juger par son expression réjouie, voyait déjà les cinq élèves pendus par les pieds dans un cachot. Mais Hagrid fit les gros yeux, et Adams, malgré la lueur venimeuse qui sourdait dans son propre regard, n'insista pas. De l'avantage de mesurer trois mètres de haut.
Hagrid leur souhaita bonne nuit à la porte de la salle commune la Grosse Dame fut assez surprise mais les laissa passer après qu'ils aient dit le mot de passe ce fut avec joie qu'ils retrouvèrent la petite salle ronde et douillette, et s'effondrèrent dans les fauteuils moelleux.
_ Tout de même, lâcha Sirius dans un souffle, tout ce bazar pour un bouquin… Je vais tuer ce type.
Peter émit un petit bruit d'approbation. Il était encore secoué.
_ En plus, je vous parie qu'on l'a perdu quand on courait, soupira James. Tout ce travail pour rien…
Il s'interrompit en voyant les yeux verts, immenses et étincelants, de Lily elle souriait largement, malgré la fatigue peinte sur son visage. Lentement, elle sortit quelque chose de sa cape : c'était les Trois Mille Deux Cents Uns Mauvais Coups en Tous Genres. Trois visages s'illuminèrent littéralement.
_ Je vous avais pas dit que Lily était un génie ? s'exclama James d'une voix qui ne cachait pas son enthousiasme.
_ Ouais !!
Il aurait été difficile de dire lequel des garçons était le plus heureux. Lily rougit jusqu'à la racine de ses cheveux de flamme sombre.
*~*~*
