Chapitre 4
Je veux juste une dernière danse
Avant l'ombre et l'indifférence
Un vertige puis le silence
Je veux juste une dernière danse
Perdue dans son jeu de scène et ses pensées, Regina ne s'aperçoit de sa présence que trop tard pour y échapper. Dans une envolée de blancheur, de nacre et d'or, sa princesse l'enlève. Elle ne peut refuser la main tendue, le sourire radieux, le corps contre le sien. Emma veut au moins une danse avec elle, pour montrer à tous qu'elles sont amies désormais. Amies ? Elles ne l'ont jamais été. Elles ont été ennemies, collègues, mères à part égale, compagnes de route, amantes mais pas amies. Son corps contre le sien, poison et remède. Elle sent le froid se retirer, la chaleur rayonner du nœud dans ses entrailles. En traître trop bien dressé, il obéit à sa maîtresse et le désir lui retire toute volonté propre. Seules les années de danse inculquée de force jusqu'au plus profond de ses muscles par sa mère lui permettent de continuer à tourbillonner sans rater un seul pas. Elle ne sent plus la douleur, ne voit pas ce qui l'entoure, ceux qui les entourent. Son monde se réduit à nouveau à un seul être.
Les mains d'Emma sur elle, son odeur qui l'enveloppe, ses cheveux qui la caressent. Elle s'étrangle sur un gémissement qui ne peut, ne doit pas franchir ses lèvres. La main d'Emma sur sa taille l'effleure doucement, oh, si lentement, que seule elle doit en avoir conscience. Sa peau s'éveille en toile d'araignée autour de cette caresse. Son autre main serre la sienne un peu plus fort et entremêle leurs doigts. Elle ravive le souvenir de leurs mains qui s'ancrent avant de basculer. Sa bouche se rapproche de son cou. Insuffisamment pour qu'on y voit un geste trop intime mais assez pour que son souffle la caresse et allume un feu qui l'enveloppe toute entière en un battement de cil. La main sur sa taille l'attire un peu plus, leurs bassins se rejoignent. Regina s'oublie, un gémissement arraché par la lame familière du plaisir qui fouille sa chair et le flot brulant qui inonde son intimité. Emma rit et, à chaque froissement de sa robe contre son ventre, ses entrailles frémissent, elles se tendent par vagues de plus en plus proches. Quand, enfin, elle se penche vers elle pour lui murmurer à l'oreille de venir une dernière fois pour elle, elle ne peut retenir son corps. Son prénom lui échappe en un murmure étranglé et ses yeux se ferment une seconde pendant qu'elle lui offre ce qu'elle réclame.
La musique s'achève. Dans une révérence, Emma lui embrasse la main et la raccompagne à sa place. Nul n'y voit autre chose qu'un jeu quand elle sait que ses jambes auraient cédé si elle leur avait demandé de faire leur office. Le rideau tombe, son rôle est fini, une larme unique glisse solitaire sur sa joue et son sel se perd aux coins du sourire parfait qu'elle offre à leur public.
