Notes :

Cette histoire est terminée au niveau de son écriture. Ainsi elle sera mise à jour régulièrement.

Les chapitres seront inégaux. Il y aura donc des courts et des -très- longs. Je ne sais pas combien il y aura encore de chapitres en totalité puisque je n'ai pas découpé l'histoire en morceaux. Mais sur une histoire de 259 pages, comptez sur plus d'une trentaine.

L'histoire se découpe en deux grosses parties, l'enquête puis ce qui en découle et se concentre plus sur les relations entre les personnages de Goren et Eames.

Il y a un léger crossover avec L&O : SVU par l'apparition de Benson et Munch. Cette histoire est à situer durant la saison 6, avant l'épisode 15 « Brother's Keeper ».

Cette fanfiction est uniquement faite dans un but récréatif. Je ne tire aucun profit de l'utilisation de l'univers de Criminal Intent et Special Victim Unit.

Bonne lecture !


REFUGE

Prologue

« Dépêche-toi de rejoindre Nanny ! » entendit la fillette alors que la grosse main poilue de Bill la poussait sans ménagement dans les escaliers. Elle se rattrapa aux barreaux de la rampe, lui évitant de justesse de dévaler les marches. Elle réprima un sanglot, terrorisée de la punition qui s'abattrait sur elle si jamais elle venait à crier ou à pleurer. Nanny aimait toujours la pincer et la gifler pour lui demander d'arrêter avant de la traîner dans cette grande pièce aux murs blancs sales. Elle l'enchaînait pour ne pas qu'elle bouge et la laissait toute seule dans le noir pour lui éviter de l'entendre chouiner. La petite fille essayait de s'endormir le plus rapidement possible, roulée en boule sur le sol, pour s'échapper aux monstres qui la prenaient dans leurs bras pour lui faire du mal. Mais bien souvent, ils la poursuivaient détruisant les rares rêves qu'elle faisait, fragments de souvenirs d'un temps plus heureux d'odeurs de bois, de tendres sourires et de mains douces et chaudes qui prenaient les siennes.

Sentant l'impatience de Bill et ne souhaitant surtout pas le mettre en colère, la fillette se redressa hâtivement en grimaçant. Tout son corps lui était douloureux. Un monsieur l'avait choisi tout à l'heure. Sachant ce qu'il voulait faire d'elle, l'enfant avait voulu se débattre pour l'en empêcher. Bill s'était alors fâché et l'avait giflé pour la faire obéir avant de la monter à l'étage lui-même en la traînant derrière lui. Enfermée dans la chambre avec le monsieur, elle n'avait plus rien ressenti dès le premier coup ou de ce qu'il pouvait bien faire d'elle, attendant juste qu'il finisse par la laisser tranquille, un air satisfait sur le visage.

Sous l'œil menaçant de Bill, la fillette descendit prudemment les marches, sa main glissant sur la rampe. Elle sursauta lorsqu'elle entendit un bruit sourd dans la maison. Elle se retourna. Bill avait disparu. Posant enfin le pied dans le vestibule, elle y trouva Teddy, toujours aussi silencieux, qui lui indiquait de son doigt le salon. Nanny était roulée en boule sur le canapé, le téléphone coincé entre l'épaule et l'oreille. Tellement accaparée par sa conversation, elle ne s'était pas encore rendue-compte de la présence de l'enfant. Debout, près du canapé, la fillette se tortilla les mains ne sachant pas quoi faire. Devait-elle attendre ou lui faire remarquer sa présence ? De toute façon, cela se finirait de la même manière. Furieuse d'être dérangée, Nanny lui tirerait les cheveux, la pincerait puis, avec un sourire malsain, appuierait sur toutes les parties douloureuses de son corps pour lui faire un peu plus de mal. Mais la fillette était épuisée. Elle voulait juste aller dormir.

Alors que la fillette s'apprêtait à tirer le bras de Nanny pour attirer son attention, elle suspendit son geste en entendant du bruit dans le vestibule. Puis elle sentit un courant d'air s'engouffrer sous son vêtement qui la fit frissonner. Curieuse et guettant le moindre mouvement autour d'elle, l'enfant retourna sur la pointe des pieds dans l'entrée. Teddy était parti mais la porte d'entrée était désormais légèrement entrouverte. L'enfant trouva cela étrange. Bill et Nanny fermaient toujours les accès avec beaucoup de soins, gardant les clefs sur eux. Sous le vent, la porte faisait des va-et-vient, claquant doucement contre l'encadrement. La petite fille se tourna vers le salon où Nanny était toujours au téléphone, puis vers l'escalier. Il n'y avait personne pour la surveiller. Sa bouche se tordit pour former une grimace, pâle copie d'un sourire. Cela faisait tellement longtemps qu'elle n'avait pas été dehors pour jouer. Elle s'approcha de la porte, se hissa sur la pointe des pieds pour attraper la poignée, et la tira de quelques centimètres, juste de quoi pour se glisser à l'extérieur. Elle s'arrêta, ferma les yeux un instant, attendant qu'on l'attrape. Il n'arriva rien alors elle referma la porte sans faire trop de bruit.

Une fois dehors, un vent glacial enveloppa aussitôt la petite fille. Il lui ébouriffa ses cheveux bruns et souleva les bords du maigre vêtement qu'elle portait, exposant sa peau aux morsures féroces du froid de l'hiver. Pourtant, elle en oublia la désagréable sensation, fascinée de voir que tout était blanc autour d'elle. Un sourire timide fleurit sur ses lèvres lorsqu'elle tendit la main pour tenter de capturer entre ses doigts un flocon de neige. Émerveillée par le spectacle de cette pluie de neige, l'enfant descendit les quelques marches du perron et se retrouva sur le trottoir. Elle se mit à tourner sur elle-même, cherchant à attraper tous les flocons à portée de ses deux mains, incapable d'exprimer le rire qui lui chatouillait la gorge après tant de brimades subies pour qu'elle reste silencieuse.

Après plusieurs tours, une sensation de vertige s'empara de la fillette. Elle s'arrêta et se retrouva face à la maison de laquelle elle venait de sortir. L'habitation était construite en briques rouges. Un étrange arbre grimpait le long de la porte et ses multitudes branches nues couvraient toute la façade. L'enfant se figea d'effroi. La magie de l'instant venait d'être balayée par l'horreur de sa situation. Elle ne pouvait pas rester là, sinon Bill et Nanny sauraient qu'elle leur aura désobéi. Ils la puniraient. Ils lui feraient encore du mal. Elle ne le voulait plus.

Avant même que le cerveau de la petite fille réagisse à la situation, son instinct de conservation prit le dessus. Ses jambes commencèrent à se mouver d'elles-mêmes avec un seul but : échapper à Nanny et Bill. La fillette se mit à courir. Aussi vite que le lui permettaient ses maigres forces. Elle ne verrait plus tous ces hommes avec lesquelles elle ne voulait plus jouer. Ils lui faisaient si mal. Alors, elle courait. Sa gorge était sèche, brûlante. Elle avait peur. Elle était triste mais aussi en colère.

- Hey gamine ! Qu'est-ce que tu fais toute seule dans la rue de ce temps ?

La panique gagna l'enfant lorsque devant elle surgit brusquement un homme.

- Mais qu'est-ce que l'on t'a fait ? Déplora l'homme choqué en l'observant.

Terrifiée qu'on puisse la ramener à Bill et Nanny, la petite fille réussit pourtant à s'échapper de cette main qui essayait de l'attraper et hurla à plein poumon. Son cri rauque lui brûla la gorge. L'homme essaya de l'attirer à lui. L'enfant mordit la main qui pour elle voulait gifler son visage. Il la lâcha en poussant un juron. Elle reprit sa course effrénée sans chercher à savoir si l'homme était à sa poursuite. L'enfant courut, puisant en elle une force insoupçonnée pour mettre le plus de distance entre elle et tous ceux qui lui voulaient du mal. Pourtant à bout de souffle, elle dut ralentir avant de trébucher. Elle s'affala contre le bitume. La couche de neige n'étant pas encore assez épaisse pour amortir sa chute, elle s'égratigna les genoux et les mains. Elle se releva péniblement et grimaça, étouffant un cri de douleur. Elle regarda tout autour d'elle, il n'y avait personne. Le menton secoué par des sanglots, la fillette se sentit perdue et terrifiée. Elle ne reconnaissait rien autour d'elle. Désormais mouillée par sa chute, elle resserra les bras autour d'elle, le froid s'insinuant partout en elle.

Soudainement, un claquement sonore la poussa à se cacher derrière une poubelle. Effrayée, elle resta prostrée, sursautant lorsque le bruit se répéta à-nouveau. Lorsqu'elle comprit que ce n'était pas des voix, elle releva la tête pour en chercher l'origine. De l'autre côté de la route, une porte en bois d'un grand bâtiment en pierre claquait sous l'effet du vent. Elle y trouverait peut-être une cachette. Un endroit où les monstres ne viendraient pas la trouver. Un lieu où elle pourrait se reposer. Elle était si fatiguée.

La petite fille chercha des yeux le bonhomme vert. Sa maman lui disait toujours de ne pas traverser lorsqu'il était rouge. Elle réprima un sanglot. Elle s'était efforcée d'oublier son papa et sa maman. Car si elle pensait à eux, elle pleurait. Bill et Nanny alors la frappaient jusqu'à ce qu'elle cesse de le faire. De toute façon, elle n'avait plus de maison. Elle n'avait plus rien. Elle essuya ses joues, trouva le bonhomme vert et traversa la route. La neige se faisait une complice passive de la fugue en dissimulant les empreintes de pieds que laissait la petite fille derrière elle.

L'enfant grimpa les trois marches en pierre péniblement et pénétra le bâtiment dont la porte s'était ouverte sous l'effet du vent. Ses yeux allant de droite à gauche comme si elle cherchait quelque chose qu'elle redoutait de trouver, elle avança prudemment entre les chaises. Ses jambes tremblaient par l'effort à fournir. D'un coup, elle s'effondra devant la grande table de marbre où des cierges brûlaient. Un sanglot qu'elle ne put retenir monta dans sa gorge. Elle se mit à pleurer sur le sol, percluse de douleurs, envahie par la tristesse et la colère. Elle hoquetait si fort qu'elle ne pouvait plus reprendre sa respiration, ses pleurs trouvant leur écho lugubre sous la voûte.

Soudainement l'enfant se figea lorsqu'elle entendit un grincement, arrêtant net sa crise. Une pointe d'angoisse raccourcit son souffle. Paniquée, elle regarda tout autour d'elle, trébucha avant de pouvoir se relever afin de se précipiter vers la première porte qu'elle trouva. Elle tourna la poignée mais celle-ci lui résista. Son cœur se mit à tambouriner plus vite. Ses doigts transis par le froid et la peur secouèrent la poignée. En entendant des voix cette fois-ci, la fillette s'acharna un peu plus rudement, une terreur totale dans les yeux. Est-ce que Nanny et Bill l'avaient retrouvée ? Elle s'engouffra dans la pièce lorsque la porte céda enfin sous ses assauts. Elle se précipita dans la première cachette qu'elle trouva. Elle se recroquevilla contre le mur, tremblante. Puis elle attendit. Attendit ces voix et ces mains méchantes qui la ramèneraient pour la punir de s'être sauvée. A moins que Bill lui fasse mal jusqu'à ce qu'elle disparaisse. Depuis qu'il l'avait ramené avec lui dans sa camionnette, l'un d'eux avait disparu. Bill les avait menacés, elle et tous les autres, de faire pareil, de ne jamais les faire revenir, s'ils ne leur obéissaient pas.

L'enfant attendit pendant longtemps, puis vaincue par l'épuisement, elle se laissa sombrer dans l'inconscience. Elle se réveilla en sursaut et hurla en sentant une présence près d'elle qui voulait la toucher. Elle entendit une voix qu'elle ne reconnaissait pas glapir un « Oh ! Mon Dieu !». Éprouvée et brisée, elle attendit encore qu'on la tire de sa cachette par les cheveux et qu'on la batte. La fillette en avait assez. Et même si rien n'arriva, elle resta repliée sur elle-même, incapable de bouger, transie par le froid, la peur, la soif et la faim.

La fillette demeura un très long moment ainsi. Et puis, il arriva. Le refuge.