Chapitre 16 : L'empereur
Severus avait quitté la pièce sitôt le nom de son grand-père cité. Hermione le rattrapa rapidement et, lui tenant la main pour qu'il cesse sa fuite, elle lui dit doucement :
- Calme-toi voyons, on ne te demande pas de mettre le portrait de ton grand-père en valeur dans le hall d'entrée ! Il est juste question de le raccrocher au mur pour qu'il puisse se déplacer de cadre en…
- Pour qu'il puisse avoir accès à tout le manoir en gros ! la coupa t-il.
- Oui, confirma la lionne avec calme. Tu sais très bien qu'il refusera de te répondre si tu ne mets pas fin à la punition que tu lui as infligée.
- À t'entendre, je suis un vil tortionnaire ! Je te rappelle que je l'ai décroché du mur pour qu'il cesse d'insulter tout le monde, comme le fait la mère de Sirius derrière son ridicule rideau au square ! Je l'ai fait pour ne plus avoir à supporter les brimades et les réflexions racistes de la part du portrait d'un type, antipathique et virulent, qui a toujours valorisé sa réputation plutôt que son bon sens ! Un enfoiré qui a rejeté sa propre fille et a essayé de faire tuer son gendre sans la moindre hésitation ! Un…
Missy arriva, coupant le sorcier dans sa tirade coléreuse, du moins pour un court instant car il reprit de plus belle en pointant Cornaline du doigt, avant même qu'elle ne dise mot :
- Je refuse de répondre au chantage à venir ! Que ce soit le tien ou encore pire, celui d'un portrait qui va passer plus de temps à insulter mon père et ma femme plutôt que de répondre à nos questions !
Cela ne plût clairement pas à la femme en question, faisant fi des autres qui arrivaient derrière elle pour s'assurer qu'aucun séisme ne se produise, elle se dirigea d'un pas assuré vers le Lord énervé. Sans rien dire dans un premier temps, elle se contenta de poser une main autoritaire sur l'épaule gauche du sorcier avant de dire avec force :
- Schweigstdu !
Aussitôt, Severus se tût mais surtout, son regard changea, passant de la colère à un état presque végétatif alors qu'elle reprit sur le même ton :
- Beruhigedich und setze dich hin !
Là, Severus se dirigea vers une chaise de la salle de jeu et s'assit sans rien dire, sous les regards médusés des autres. Hermione comprit sans mal ce que la mafieuse avait fait et protesta donc :
- Hey, réveille le tout de suite ! Ça ne va pas de lui faire ça ?
- Je vais le faire, mais il doit se calmer, expliqua Missy. Et toi aussi je te prie !
- Il va s'apaiser de lui-même, s'insurgea la lionne, et puis je croyais que tu ne pouvais pas l'hypnotiser !
- J'ai dit qu'il était différent des autres, c'est tout ce que j'avais dit et c'est vrai. Severus est mentalement trop fort pour que je l'hypnotise totalement, je ne peux pas le faire danser ou lui demander de faire un striptease devant tout le monde, pas comme Christian par exemple. En revanche, il est très réceptif au toucher et à l'allemand, ce qui m'a toujours permis de le calmer et de lui faire cesser ses crises de nerfs
- Réceptif au toucher et à l'allemand ? répéta Hermione en haussant un sourcil circonspect. C'est ridicule, il ne parle même pas un mot d'allemand je te signale !
- Il avait quelques bases au départ, mais je suppose que son cerveau a retenu, quelque part dans son inconscient, que l'Allemand était mauvais pour lui, expliqua Missy en haussant les épaules.
- Il a apparemment aussi retenu que se faire toucher était néfaste, quelle brillante idée de l'hypnotiser sans jamais le lui dire ! ironisa Hermione. Maintenant, fais-le revenir, Cornaline, et ne t'avise pas de lui refaire ce coup là !
- Oh ça va, range tes griffes la Gryffondor, répondit Missy qui appuya de nouveau sur l'épaule de Severus qui reprit doucement ses esprits.
Il semblait légèrement perplexe mais, c'était indéniable, il était surtout plus calme. Le sorcier regarda Hermione, tout en restant assis :
- Heu… qu'est-ce que je disais déjà ?
- Tu parlais de ton grand-père, se contenta de dire Missy.
- Ha… ha oui, c'est vrai !
Severus passa sa main sur son visage, l'air las, et reprit avec un ton posé :
- Je disais donc que je ne voulais pas le remettre au mur. Sérieusement, pourquoi je ferais ça alors qu'il va nous faire vivre un calvaire et dires des choses que je ne veux plus entendre ? Je sais d'avance qu'il va être odieux, en particulier envers les moldus et sur… enfin…
- Les sang-de-bourbe, termina la lionne qui s'approcha de son sorcier.
Elle repoussa légèrement Cornaline, toujours énervée contre elle, pour s'accroupir devant son fiancé et lui tenir les mains alors qu'il détournait le regard après avoir entendu l'insulte :
- Je me fiche bien de ce qu'il dira de moi ou de mes parents. Ce n'est pas lui que j'aime, je n'ai pas besoin de son approbation pour vivre ma vie. En revanche, nous avons besoin de lui, pour avoir des pistes à creuser, et surtout…
- Surtout quoi ? demanda-t-il en l'observant de nouveau, étonné face à l'hésitation de sa compagne.
- Ta grand-mère a besoin de lui, dit-elle finalement. D'après toi, pourquoi en est-elle venue a faire planer cette idée dans notre conversation ?
Severus ne répondit rien mais Eileen intervint doucement :
- Il est vrai que père a toujours été très vindicatif dans ses propos Severus, et dans ses actes parfois, mais tu sais pertinemment que leur mariage n'était pas seulement une union de convenance…
- L'amour rend aveugle, maugréa Severus. Il ne faut pas oublier qu'on parle d'un sorcier qui prônait la suprématie de son sang au point de vouloir exterminer papa !
- Tu as bien voulu le tuer toi au… aïe ! fit remarquer Sirius avant de se prendre un coup de coude de la part de sa femme.
- Je ne t'en tiens pas rigueur, j'ai moi aussi fait des erreurs, dit cette fois Tobias en regardant son fils pâlir plus que d'ordinaire. D'ailleurs, si nous avons réussi à nous pardonner l'un et l'autre, peut-être devrions-nous envisager de faire de même avec Julius…
- Tu te rends bien compte qu'il s'agit d'un portrait et que son idéologie ne pourra jamais changer ? questionna Severus avec mauvaise foi. Une peinture est un instant figé dans le temps, un simple souvenir de la personne ou du lieu représenté.
- Oui, mais un portrait reste apte à changer de comportement, surtout si sa survie en dépend.
Hermione sursauta en entendant la voix sarcastique de son compagnon, derrière elle cette-fois, puis elle comprit qu'il s'agissait bien évidemment de son portrait à lui. Elle observa le jeune Lord qui se tenait nonchalamment sur le muret d'un des paysages présents dans la salle.
- Et puis, entre nous, je me demande si ma façon de penser n'a pas changé aussi, du moins sur certains sujets, au fil du temps et des souvenirs que tu partages avec moi Severus. Après tout, c'est quand la dernière fois que quelqu'un s'est penché sur nous pour nous étudier, nous les portraits ?
- La dernière étude publiée date de 1825, elle faisait état des… désolée, c'était une question rhétorique n'est-ce pas ?
Cléo rougit légèrement alors que Severus, le vrai, souffla d'amusement par le nez tout en secouant la tête d'exaspération. Il se redressa alors en tirant Hermione pour qu'elle en fasse autant :
- Bien, vu que vous vous êtes tous ligués contre moi, je vais aller le clouer au mur, mais c'est surtout pour tous vous faires taire une bonne fois pour toutes !
- Je n'ai rien dit, fit remarquer Edward qui était resté simple spectateur depuis le début.
- Pour une fois, ironisa le portrait du Lord.
- Si par contre, il commence à faire du foin, je le remets au sol, ou bien dans la cheminée !
Sans lâcher sa main, il commença à se diriger hors de la pièce. Hermione le suivit donc, surprise et contrainte :
- Tu es sûr que tu veux que je monte avec toi ?
- Je pensais que tu te fichais de ce qu'il pourrait te dire ? se moqua Severus alors qu'ils montaient les escaliers.
- Ce n'est pas parce que je m'en fiche que je suis pressée de l'entendre vociférer des insultes, fit remarquer la lionne en se stoppant.
- Justement, c'est important que tu sois avec moi. Fais moi confiance s'il te plaît.
- J'ai confiance Severus…
Inspirant pour se donner contenance, elle reprit la montée avec son sorcier. Elle ne savait pas ce qu'il avait en tête, ni même pourquoi c'était important qu'elle soit avec lui, mais elle le suivit. Il ne lui aurait pas demandé si cela n'avait pas été pour une bonne raison après tout. Tous deux se dirigèrent donc vers la porte menant au grenier et, une fois ouverte, la vue des escaliers en bois, abruptes et poussiéreux, lui donna des frissons. Nonobstant cette sensation étrange, elle regarda en hauteur vers la pièce sombre et à l'ambiance lugubre :
- Pourquoi les greniers sont toujours aussi flippants ? demanda-t-elle avec exaspération.
- Parce qu'ils sont remplis de tout ce que l'on veut oublier…
Bien que le ton employé montrait que Severus lui-même n'était pas rassuré, il sourit à sa compagne et déposa un baiser sur son front :
- Mais entre nous, je ne vois pas ce qu'un grenier peut avoir de plus effrayant qu'un chien à trois têtes, qu'un basilic, qu'un prisonnier en fuite, qu…
- Oui, j'ai compris, soupira Hermione faussement irritée.
Retrouvant un sourire franc, elle prit même l'initiative de monter la première car après tout, Severus avait raison, elle avait déjà vécu des aventures bien plus terribles que de juste entrer dans un grenier pour mettre au mur le portrait d'un sorcier acariâtre. Arrivée en haut, elle s'apprêta à s'étonner, de vive voix, sur la grandeur du grenier quand elle crut faire un arrêt cardiaque :
- Bouh !
- Pu…naise ! Severus tu es pire qu'un gamin ! l'houspilla-t-elle.
- C'était trop tentant, avoua-t-il en souriant.
- Concentrons-nous sur ce qu'on est venu faire plutôt ! grogna-t-elle alors qu'elle s'en voulait d'être tombée dans le piège. Où est-ce qu'il en est exactement ?
- Tout au fond là bas.
Avec son doigt, Severus pointa une minuscule source de lumière naturelle au loin, provenant d'une petite fenêtre ronde. Malgré des chandeliers magiques qui s'éclairaient à leur approche, les lieux restaient sombres et Hermione se demanda si son sorcier ne lui avait pas demandé de venir seulement pour ne pas avoir à être seul ici. Beaucoup d'objets, tous aussi divers et variés que ce que l'on pouvait trouver dans la salle sur demande de Poudlard, étaient déposés là. Une accumulation qui s'était sûrement étalée sur plusieurs années. Tout était néanmoins très ordonné et s'il n'y avait pas eu la poussière qui s'étaient accumulée avec le temps, la jeune femme aurait pu penser que le grenier était habité.
- Palsambleu ! s'exclama Hermione en sursautant.
- Quoi ? Je n'ai rien fait cette fois ! se défendit le sorcier.
- Non, non, pas toi, dit-elle avant de rire. J'ai cru qu'il y avait quelqu'un mais ce n'était qu'un mannequin !
- Tu as une imagination débordante, se moqua Severus.
- En même temps, qui est-ce qui m'a fait regarder une série où dans le premier épisode, il y a des mannequins en plastique qui prennent vie à cause d'extraterrestres ?
- Ne critique pas…
- Par Serpentard lui-même, n'est-ce pas suffisant de me laisser pour mort à même le sol ? Non, il faut que tu pousses la torture jusqu'à venir ici, avec je ne sais qui, pour rompre le silence salvateur des lieux avec des inepties !
Cette fois, bien que la lionne aurait eu une bonne excuse pour sursauter, elle se contenta de porter le regard vers ce qu'elle avait pris pour un miroir à pied, adossé contre une armoire, face à la fameuse petite fenêtre. Ainsi donc le portrait du grand-père à Severus était là, plus grand qu'elle ne l'avait imaginé, ce dernier étant de taille humaine contrairement au buste du nouveau Lord Prince.
- Si j'avais su que les blablateries seraient une torture pour toi Julius, crois bien que je serais venu moi-même plus souvent pour discuter, ironisa le sorcier.
- Comme si les discussions et la socialisation n'étaient pas, pour toi, pire encore que la mort !
- Cela dépend juste de l'interlocuteur que j'aie en face, crois bien que ma future épouse est suffisamment intéressante pour me donner l'envie de parler pendant des heures !
- Ta future quoi ? répéta le portrait en retenant un rire. Aurais-je fini par être banni suffisamment longtemps pour que la peinture qui forme mes esgourdes ne s'écaille ? A moins que ce ne soit toi qui aies fini par perdre la tête ?
- J'ai bien peur que ce ne soit la seconde de tes hypothèses qui s'avère juste, s'amusa-t-il en regardant sa fiancée avec tendresse. L'amour peut visiblement changer les hommes.
- Et rendre les femmes aveugles ! se moqua Julius.
- Vous dites cela par expérience je suppose, répliqua cette fois Hermione.
Severus retint un souffle moqueur qui ne passa pas inaperçu aux yeux de la lionne. Julius quant à lui demeura silencieux, permettant alors à la jeune femme de trouver la force de se diriger jusqu'à lui. Se mettant face au portrait, elle rencontra pour la première fois celui qui était, d'après son roi, le pire tyran qu'ait connu la famille Prince. Sa surprise fut de taille quand elle se trouva nez à nez avec un homme au trait familier. Bien qu'entièrement blanc, les cheveux longs du portrait n'étaient pas sans rappeler ceux de son petit-fils à l'époque où il était élève, tout comme le regard noir qu'il avait. Bien que moins grand que Severus, Julius avait une prestance égale et tout en se tenant droit comme un manche, portant la tenue réglementaire des Lord Prince au fil des générations, il toisa la lionne avec dédain et assurance.
- Et à qui ais-je l'honneur mademoiselle ? Je suppose, qu'au vu de votre éducation qui vous autorise à m'adresser la parole sans que je ne l'eusse fait de prime abord, que vous n'êtes pas d'une famille comme…
- Comme la vôtre ? Non, il est vrai, assura la jeune femme qui ne perdit pas contenance. Je suis Hermione Granger, je…
- Pourquoi diantre ne suis-je pas surpris que tu te sois, de nouveau, entiché d'une… fille du peuple secondaire ?
- C'est une façon bien polie pour parler des sang-de-bourbe, s'amusa Hermione. Moi qui avais entendu parler de votre franc parler monsieur Prince, j'avoue être déçue.
Le regard de Severus lança probablement autant d'étincelles que celui du portrait, bien que ce ne fussent pas pour les mêmes raisons. Hermione savait que son sorcier détestait ce terme, mais elle considérait avoir le droit de l'employer si c'était pour parler d'elle-même.
- Je ne tiens pas vraiment à finir en cendres, répondit Julius en sifflant entre ses dents serrées. Je ne tomberais pas dans ce piège ridicule pour me pousser à dire l'un des mots « interdits » par le traître qui m'a enfermé ici !
- Le traître, comme tu dis, ce n'est pas moi ! intervint Severus qui se positionna enfin aux côtés de sa fiancée. Du moins, je ne le suis plus depuis longtemps, contrairement à toi. Tu as fait honte à ton propre nom par tes erreurs, tes choix regrettables et tes échecs.
- Je n'ai jamais échoué en rien, répliqua Julius en redressant le menton.
- Tu n'as même pas réussi à tuer Tobias, alors même qu'il n'a aucun pouvoir magique !
Julius serra le point et conserva la tête haute, comme pour tenter de paraître intouchable face aux accusations de son successeur.
- Quand on ne sait pas, on se tait ! grogna le portrait. Si tu es venu ici pour trouver une excuse pour me brûler, alors fais le sans tergiverser. Je partirais la tête haute, quelques soient les insultes que tu profères à mon égard et sache que…
- S'il n'y a que ça pour te faire plai…
- Nous ne sommes pas là pour brûler ou insulter qui se soit, intervint Hermione qui attrapa la main de Severus avant qu'il ne prenne sa baguette. Nous sommes là car nous avons besoin de vous Monsieur Prince !
Elle aurait pu lancer elle-même un sortilège de flamme que le visage de Julius n'aurait pas été différent. À croire que de se voir demander un service par une née moldue était plus douloureux que de mourir. Après un instant de silence pesant, Severus soupira :
- Je t'avais dis que c'était une mauvaise idée, viens ma reine ! dit-il en la tirant légèrement par la main.
L'espace d'un court instant, le regard du portrait passa de l'offense à une triste surprise. Cela ne dura qu'une seconde à peine, mais ce fut suffisant pour que la lionne le remarque, elle qui savait lire le regard de son sorcier depuis si longtemps. C'était troublant de retrouver les mêmes expressions sur le visage d'un autre, quand bien même ce fut son grand-père. Julius inspira et marmonna finalement :
- Quelle est donc cette requête que tu as à me formuler ? demanda-t-il sans regarder son petit fils.
- Parce que ça t'intéresse maintenant ?
- Si tu as une chose à me demander, c'est que je vais pouvoir en réclamer une aussi, à mon tour ! fit-il remarquer avant de reporter son regard vers Hermione puis son petit fils. Alors essayons de nous mettre d'accord, pour une fois, ne crois-tu pas cela possible ?
- Severus, mon roi, s'il te plaît, fais un petit effort ! lui demanda Hermione en voyant son sorcier prêt à partir.
Il resserra la main de sa lionne et se remit face à son grand-père avec un volonté de fer :
- J'ai besoin de savoir ce que tu sais des familles « nobles » qui pourraient avoir un lien avec des ours !
- Plusieurs familles ont des ursidés sur leurs blasons, d'autres les avaient comme tapis ou ornements de chambre, il faudrait être plus précis Severus.
- Un sorcier ou une sorcière qui sait prendre la forme d'un ours nous suit, depuis des mois, et a même fini par attaquer votre petit fils, expliqua Hermione. Aujourd'hui, nous craignons qu'il ait un lien avec celui qui veut aussi du mal à notre fils !
Julius regarda Hermione, l'air choqué :
- Votre fils ? Un enfant hors mariage ? Palsambleu mais dans quelle époque vivez-vous ?!
- Au 21eme siècle Monsieur Prince, répondit-elle simplement.
- Un siècle de débauche alors, maugréa-t-il avant de demander en croisant les bras devant lui. Au moins ta mère a eu la décence de se marier avant de t'avoir !
Le vieillard, l'air toujours refrogné, ajouta néanmoins dans un quasi murmure :
- Et… mon arrière petit fils… est-il…
- Oui, c'est un sorcier, répondit Severus en levant les yeux au ciel.
- Aussi puissant que son père, fit remarquer Hermione en souriant à son fiancé.
- Et aussi intelligent et courageux que sa mère, ajouta-t-il.
- Et tout aussi en danger que vous apparemment ? termina Julius qui semblait d'un coup un peu plus concerné, ce qui étonna Hermione. Et pourquoi pensez-vous que cet ours vienne d'une famille noble et pas du… bas peuple ? Qui pourrait en vouloir à un jeune sorcier venant, en partie, de la grande famille Prince ?
- Parce que, intervint Hermione avant que Severus ne dise un « tu vois que je ne suis pas le seul à penser que cette piste est ridicule », celui qui nous en veut a déjà fait appel à la manipulation et autres ruses pour recevoir de l'aide de la part de grande famille, comme les Lestrange et Turner !
À l'entente de ces noms, Julius ravala difficilement un air de dégoût :
- Peu de gens sont capables de manipuler l'une ou l'autre de ces familles et vous dîtes qu'il a réussi à avoir les deux ?
- Tout à fait, affirma Hermione.
- Bellatrix a essayé de me tuer et de détruire le manoir et le tout en étant aidé et financé par Marc Turner, expliqua Severus.
- Le fameux jour du grabuge, c'était Lestrange et Turner ? s'étonna Julius. Mais quels enfants de sal…
- Les insultes ne seront pas nécessaires, le coupa Hermione qui se vit attribuer deux regards circonspects. Nous voulons juste savoir si vous avez des connaissances sur les familles qui pourraient avoir un lien avec un animagus ours qui aurait un intérêt, tout particulier, pour nous vouloir du mal !
- Il y en à plusieurs oui, dit-il sans hésiter en la regardant droit dans les yeux. La liste pourrait même être longue vu que vous êtes… ce que vous êtes !
- Il ne reste plus tant que ça de familles avec ta vision des choses, dit Severus en soupirant.
- Ça, je ne saurais le dire, vu que je suis enfermé ici depuis presque quoi… vingt ans ?
- 24 plutôt, corrigea Hermione.
- Alors hormis vous faire une liste de ceux auxquels nous pensons, il vous faudra investiguer de vous-même pour savoir si l'une de ses familles restent une potentielle menace.
- « Nous » ? s'étonna Hermione.
- Oui, dit-il en reprenant une posture hautaine. Je ne ferais rien sans ma condition : je veux pouvoir revoir Marie-Madeleine et je ne ferais aucune liste sans elle !
Certes, la finalité revenait au même et Julius demandait bel et bien à être remis au mur en échange d'un service, mais Hermione ne s'était pas attendue à l'entendre le formuler ainsi. Severus, lui, semblait s'y être attendu et, après avoir fait mine d'hésiter, il accorda la requête du portrait. Pour la première fois en un quart de siècle, Julius fut donc remis au mur. À peine ceci fait, ce dernière quitta son cadre, prétextant qu'il devait rapidement se mettre au travail.
Une fois de nouveau seule avec son sorcier, Hermione eut l'impression désagréable que Severus savait pertinemment que tout allait se passer exactement comme ce fut le cas. Il la regarda alors et haussa les épaules :
- Quoi, j'ai fait quelque chose de mal ma reine ?
- Non… mais pourquoi ais-je l'impression que tu m'as utilisée à mon encontre ?
- Peut-être parce que tu es parano sur les bords ma chérie ! Ou bien parce que tu as en partie raison, qui sait ?
- Retire ce sourire moqueur de tes lèvres sale serpentard et explique moi plutôt ! menaça Hermione qui ne put s'empêcher de le trouver craquant.
Il s'approcha d'elle et la prit dans ses bras, délicatement, pour la serrer contre lui tout en expliquant doucement :
- Premièrement, si j'étais monté seul, je lui aurais mis le feu sans attendre… deuxièmement, je préférais qu'il s'offusque de mon choix sans personne autour pour en attester. Quitte à ce qu'il te manque de respect, je ne voulais pas que ce soit devant les autres…
Severus caressa la joue de sa compagne avant d'ajouter :
- Et pour finir, je voulais juste vérifier quelque chose…
- Quoi donc ? s'étonna-t-elle en restant contre lui.
- Tu m'as fait comprendre que ma grand-mère avait besoin de lui… je voulais donc être sûr que M'ma ne se fasse pas de fausses idées en voulant absolument que je le remette au mur pour elle.
Hermione regarda son homme, droit dans les yeux, et y vit tant d'amour et d'attachement qu'elle aurait pu fondre pour lui, si ce n'était déjà fait :
- Tu avais peur que ton grand-père blesse ta grand-mère ?
- Elle m'a toujours assurée qu'il l'avait aimée autant qu'elle l'avait aimé elle-même, mais je l'ai jamais cru.
- Jusqu'à maintenant ? demanda la lionne.
- Disons que je m'octroie le droit d'avoir un doute concernant mon erreur. Mais comprends bien une chose, si jamais il dépasse les bornes, je le foutrais au feu une bonne fois pour toute, quoi que toi ou même m'ma en dise !
- C'est toi le Lord de la famille, s'amusa Hermione qui embrassa son sorcier en sachant pertinemment qu'il n'en ferait rien.
…
- Tu penses qu'ils en ont encore pour longtemps ? se plaignait Severus environ toutes les cinq minutes.
- Tu sais que tu es pire que ton fils en voiture ? soupira Hermione qui lui lança un regard noir. Sérieusement, il existe combien de familles nobles et de blasons dans le monde sorcier ? Tes grands-parents tentent de nous fournir la liste le plus exhaustive possible, ça ne doit pas être évident à faire, surtout de mémoire !
- Justement, vu que leurs chances de se souvenir de tout est faible et vu qu'on n'est pas certain qu'il s'agissait d'un sorcier de la haute, je ne comprends pas pourquoi on attend tellement d'eux !
- Ton pessimisme est affligeant, soupira Missy. Tu ne pourrais pas essayer d'être plus optimiste pour une fois ? D'autant qu'à force d'attente, plus j'y réfléchis et plus je me dis que la théorie de ta grand-mère tient la route.
- Tu réfléchis toi ? Est-ce donc ça l'odeur de brûlé que… aïe !
- Merci Hermione, acquiesça la rousse alors qu'elle venait de donner un coup de coude à son fiancé.
- Franchement Severus, je pense aussi que cette idée est loin d'être stupide, intervint Black doucement. Après tout, j'ai souvenir de tout l'argent que ça nous a coûté en matériaux et en ressources, et même en temps, pour réussir à se transformer… ce n'est pas donné à tout le monde, d'où la rareté du nombre d'animagus.
- Petigrew n'était pas riche pour un sou, fit remarquer Severus.
- Oui, et c'est pour ça que c'est James qui avait payé pour lui grâce à son argent de poche.
- Vu le prix si élevé, ça devait s'approcher d'un SMIC plutôt que d'argent de poche, maugréa-t-il.
- Certes, mais du coup tu vois bien que c'est loin d'être une mauvaise idée. Ça et le fait que celui qui vous traque à visiblement un immense talent pour se faire bien entourer par des gens de la haute société…
- Et puis, un ours, ce n'est pas un animal anodin, rajouta Cléo. Rares sont les animagi à être aussi gros et donc aussi puissants. Je ne dis pas que les sang-pur sont plus forts, Hermione en est l'exemple par excellence mais…
- Mais la puissance magique est en général un peu plus importante chez des sorciers de leur trempe, termina la susnommée en haussant les épaules de dépit face à cette réalité. Je ne le prends pas mal Cléo, je suis hélas bien au fait avec les statistiques.
La lionne tourna la tête vers son conjoint qui se levait finalement :
- Bien, je vais voir où ils en sont !
Levant les yeux au ciel face à son impatience, Hermione décida de suivre Severus. Il ne manquait plus qu'il braque le seul tableau à même de les aider. Se dirigeant donc avec lui jusqu'au salon d'hiver, ils purent entendre des rires joyeux qui les surpris tous les deux. Restant discrets, ils tendirent une oreille curieuse :
- … comme ça qu'il est revenu de l'hôpital, avec une bosse sur la tête ! expliquait la voix enjouée de M'ma.
- Preuve s'il en fallait qu'il s'agît bien d'un Prince, commenta Julius en riant. Je n'aurais pas supporté une telle vision moi-même, la société d'aujourd'hui à des traditions bien étranges. Mais dites-moi plutôt ma reine, comment diantre l'ont-ils nommé ?
- Comme votre père, répondit-elle avec fierté.
- Hum… je suppose que je devrais m'en réjouir…
- Voyons mon empereur, n'arborez donc pas cette mine si morose je vous prie. Certes, vous aviez des désaccords avec votre père, mais je ne suis pas sans savoir toute l'affection que vous lui portiez.
- Des désaccords… comme vous dites cela, je pourrais presque croire que nous étions proches lui et moi.
- C'était le cas jusqu'à...
- Jusqu'à ce qu'il trahisse ma mère ! coupa le portrait avec vigueur.
Hermione entendit Severus soupirer d'agacement et la seconde suivante, il était déjà dans le salon d'hiver à s'énerver :
- Premièrement, ce genre de « choses » ne se décide pas ! Deuxièmement Julius, ta mère était morte depuis quelques temps déjà quand il a décidé qu'il avait le droit d'être heureux, à sa façon !
- Morte ou non, je ne lui demandais pas grand-chose, juste de respecter aussi bien sa femme que la nature elle-même !
- La « nature » ? ironisa-t-il. Qui est réellement contre nature entre un homme qui a tout fait pour sa famille, même s'oublier lui et son bonheur, et un homme qui a rejeté sa fille pour son propre intérêt ?
- Severus, mon grand, ne t'énerve pas je t'en conjure, lui demanda sa grand-mère avec douceur. N'oublie pas que nous ne sommes pas nés à la même époque que toi et donc que les mœurs étaient différentes.
- Albus était votre contemporain et il a choisi une voix bien différente de celle de ton mari, fit remarquer le Lord des lieux.
- Et à quel prix au final ? se moqua Julius. Ah oui, il est encore en vie et jouit d'une notoriété qui le dépasse, mais est-il tant que ça meilleur homme que moi ? Ses démons l'ont poussé lui aussi à commettre des actes que tu décris comme abjects Severus ! Ne l'oublie pas, toi qui as trahi la confiance des tiens, à bien des égards.
- Aucun de vous ne vaut mieux l'un que l'autre à bien y réfléchir, conclut Hermione qui fit stopper l'échange qui devenait bien trop houleux. Avec tout le respect que je vous dois Monsieur Prince, vous avez dénigré une bien trop grande partie de la population au profit de celle que vous avez toujours côtoyée. Quant à toi Severus tu as toi-même, à plusieurs reprises, dénigré ces mêmes personnes, sans compter que tous les deux vous avez voulu tuer Tobias.
- On remet vraiment encore ça sur le tapis ? maugréèrent les deux Prince d'une même voix.
- Mais, ajouta-t-elle avec humilité sans faire attention aux ronchons, j'ai moi-même fait de nombreuses erreurs, en voulant à tout prix imposer ma propre soi-disant supériorité sur mes pairs, là où j'aurais tout simplement dû me surpasser pour être une meilleure personne que je n'étais la veille !
Un léger silence s'abattit dans la pièce avant qu'Hermione ne reprenne, à la suite du sourire bienveillant du portrait de Mme Prince :
- Maintenant que nous sommes fixés sur le fait que l'être humain est faillible à bien des égards, est-ce qu'il ne serait trop vous demander, Monsieur Prince, si votre liste a avancé.
- Hum, grommela ce dernier, je pense avoir fait le tour de la question en effet…
- Alors pourquoi diable ne pas nous en avoir informé avant ? grogna Severus.
- Penses-tu réellement que je sois pressé à ce point de retourner croupir dans le grenier ?
- Qui a dit que vous y retourneriez ? demanda Hermione.
Le portrait ouvrit de grands yeux circonspects qui n'étaient pas sans rappeler, une fois encore, ceux de son petit-fils. Ce dernier, bien que silencieux, espérait toujours pouvoir jouer au pyromane avec le portrait de son grand-père. Pourtant il se contenta de croiser les bras devant lui, sachant pertinemment que c'était sa lionne qui aurait le dernier mot concernant les suites à donner :
- Si vous consentez à ne pas m'insulter, ni moi, ni ma famille, ni même Tobias et j'en passe, je ne vois pas d'inconvénients à vous laisser au mur. Je suis certaine que Severus et M'ma seront de mon avis. Votre châtiment a probablement suffisamment duré non ?
Julius ne répondit rien et se contenta de regarder Severus qui, lui, leva les yeux au ciel avant de marmonner, sans prendre la peine de regarder ni le portrait ni sa compagne :
- Je n'ai pas envie de remonter au grenier de toute manière !
- Bien, alors je consens à garder le fond de mes pensées pour moi, sur certains points uniquem… maugréa Julius qui fut stoppé dans son élan par sa femme. Oui, c'est bon, j'y consens.
- Parfait, intervint cette fois Missy qui entra dans la pièce comme une fleur ou plutôt comme une mauvaise herbe qu'on n'attendait pas, ne reste plus qu'à nous dicter les noms.
En silence et après avoir récupéré de quoi mettre cette liste sur papier, Hermione s'assit face à la table basse du salon d'hiver et commença sa prise de note :
- La liste ne sera pas longue en elle-même mais vu que je ne suis plus très au clair sur les mariages et autre rapprochement de familles, vous aurez sûrement un travail de recherches à faire pour peaufiner tout ça. Bien, il y à donc la famille Abbot...
- Oh nous les connaissons et je doute que la famille d'Hannah nous veuille du mal ! dit Hermione en écrivant tout de même le nom.
- Quoi que Londubat pourrait vouloir se venger de ses années d'études, ironisa Severus.
- Les Leroy, continua Julius comme s'il n'avait rien entendu.
- C'est une famille française non ? interrogea Severus. Je ne les ai jamais côtoyés.
- Peut-être que tu as côtoyé une pièce rapportée de cette famille, dit Missy en haussant les épaules alors que la lionne notait une fois de plus le nom cité.
- Les McKinnon, dit Julius en bâillant.
- Oh…
- Que se passe-t-il Severus ? demanda la lionne.
- C'était une famille très proche de Lily. Quand Marlène a été tuée… je ne l'ai jamais vu autant effondré…
- Tu penses qu'un membre de cette famille pourrait, commença Hermione qui fut stoppée par Cornaline.
- Laissez tomber, jamais aucun membre de cette famille n'aiderait mon frère, aussi manipulateur soit-il. C'est mon oncle qui a tué cette pauvre fille et d'ailleurs, je crains fort qu'elle n'eut été la dernière représentante de sa lignée.
- Ton oncle ? s'étonna Hermione.
- Oui, je vous en ai parlé. C'est celui qui nous a aidé après la mort de mes parents. Lui aussi était un homme charmant, ironisa-t-elle, mais sa place au ministère m'a été utile plus d'une fois hélas, je le déplore. Enfin, là n'est pas la question.
- Les Madison, reprit Julius qui se lassait encore plus de la situation.
- Ça ne me dit rien, avoua Severus qui eut pour réponse un regard désobligeant de son grand-père, qui se garda néanmoins de toutes réflexions orales sur son manque d'éducation généalogique.
- Les Meyka, dit-il simplement en ajoutant face au silence ambiant, les Scharfeklaue.
Cette fois Hermione ne nota pas et regarda le portrait puis Severus qui, de son côté, se tourna aussi vers sa lionne. D'une même voix, ils s'exclamèrent :
- Ton/mon ancienne apprenti !
OoOoOoOoOoOoOoO
Commentaire de Maze :
J'ai beaucoup apprécié la discussion avec le portait de Julius !
Le dénouement approche !
