Le passé est gage d'avenir

Les mains plongées dans son carton, Candice triait ses CD et DVD en souriant. Comme elle s'en doutait, faire le tri était bien difficile, et chacun d'entre eux lui rappelait un souvenir. Elle frottait la poussière d'un CD de Bashung lorsque sa sonnette retentit. Perplexe, elle fronça les sourcils et alla ouvrir.

« LAURENT ?! cria-t-elle d'étonnement.

- Surprise ! s'exclama-t-il fièrement.

- Comment ça surprise ? répliqua-t-elle en l'observant entrer avec ses bagages. Et c'est quoi tout ça là ?

- Bah je reviens tout droit de Buenos Aires et comme c'est difficile pour Emma de se déplacer avec la petite bah je me suis dit que j'allais directement venir ici. Ça te dérange pas ?

- Mais tu aurais pu prévenir quand même non ? s'énerva-t-elle.

- Mais non… Après y aurait pas eu l'effet de surprise !

- Et tu comptes rester combien de temps là ? osa-t-elle demander avec inquiétude.

- Oh pas longtemps… Une petite semaine quoi, ou un peu moins.

- QUOI ? s'époumona-t-elle.

- Bah faut bien que je profite de ma petite-fille non ! Je vois pas pourquoi tu aurais le privilège de la voir tous les jours hein !

- Oh le cinéma… Comme si t'en étais privé ! répliqua-t-elle d'un ton las en levant les yeux au ciel.

- Puis de toute façon… Personne m'attend à Marseille… lâcha-t-il avec tristesse.

- Comment ça ?

- Je suis tout seul Candice… Elles partent toute ! Je te jure je commence à croire que j'ai un problème… Mais au moins c'est bien ! Ça me permet de te comprendre dans ta solitude…

- Hein ? répliqua-t-elle complètement abasourdie.

- PAPA ! s'écria la jeune brune avant de l'enlacer.

- Comment ça va ma chérie ?

- Bien ! Je pensais pas que tu viendrais !

- Eh bah si ! Alors, elle est où ta petite merveille ? »

Stoïque, Candice observa Laurent entrer dans le salon bras dessus-bras dessous avec sa fille. Elle ferma les yeux en concomitance avec la porte et souffla un grand coup. « Souffle Candice… Souffle… » répéta-t-elle en souriant faussement pour s'en convaincre alors qu'elle l'entendait clamer haut et fort la beauté du bébé.

. . . . .

Éreinté par cette longue journée où il avait enchaîné les rendez-vous, Antoine débarqua chez sa compagne soulagé d'enfin pouvoir profiter d'un moment de calme. Le commissaire ne rêvait que d'une chose : une soirée légère où tendresse et bonne humeur se mêlaient. Rêveur, il inséra les clés dans la serrure de la porte d'entrée avant d'entendre des rires depuis la terrasse. Perplexe, il retira les clés et se dirigea vers ces bruits joyeux.

« Bonsoir… lâcha-t-il froidement face au tableau qu'il voyait devant lui.

- Ah ! s'étonna Laurent assis autour de la terrasse. Tu viens voir Candice au moins ? CANDICE ! l'appela-t-il en criant devant la mine outrée d'Antoine. T'as de la visite.

- Hein ? demanda-t-elle en sortant par la baie vitrée. AH ! C'est toi !T'es déjà rentré ? demanda-t-elle en déposant un furtif baiser sur ses lèvres.

- Ouais… Mon rendez-vous m'a décommandé.

Laurent recracha la gorgée qu'il venait d'avaler.

- Attendez mais… vous êtes ensemble ? VOUS ?

- Oui… répliqua Candice d'un ton las. Ça pose un problème ?

- Ah du tout ! Mais tu m'avais pas dit !

- Parce qu'en plus tu crois que je vais t'appeler pour t'annoncer la nouvelle ! plaisanta-t-elle. »

Antoine s'exila, encaissant la présence de Laurent qu'il ne connaissait qu'à travers les paroles de Candice. Il se débarrassa de son dossier et de sa veste avant d'approcher la bouteille de whisky. Il l'attrapa et vida les quelques gouttes qu'il restait dans son verre.

« Putain… maugréa-t-il. Candice ? Y a plus de whisky ?

- Ah ! Ouais c'est moi ! clama Laurent en entrant dans le salon. Je me suis permis de t'en emprunter un peu… Ça te gêne pas ?

- Non non ! C'est pas grave… Fais comme chez toi ! lâcha-t-il faussement sympathique. De toute façon c'est déjà fait… laissa-t-il sortir tout bas.

- C'est le bordel quand même chez toi… constata Laurent face à des tas de cartons qui jonchaient le sol.

- Les joies du déménagement…

- Vous partez quand ?

- Je pars le mois prochain, annonça Candice.

- Mais et…

- Je la rejoins plus tard, termina Antoine sans aucune amabilité.

- Oui… On pouvait pas faire autrement…

- Donc relation à distance c'est ça ? Aïe… Non c'est vrai c'est complexe ce genre de situation… Après c'est soit ça passe, soit ça casse hein…

- Bon écoute Laurent, c'est pas parce que ta vie sentimentale est pourrie que tu dois venir gâcher la mienne…

- Mais t'énerve pas ! Je relève juste quelque chose de bien réel ! Eh c'est pas moi qui le dit hein… C'est les sondages.

- Oui enfin… Les sondages, si on regarde bien, disent également que les relations à distance sont favorables pour la libido, hein chérie ? lança Antoine avec amusement, exprès pour le rembarrer. »

Le bec cloué Laurent n'osa pas répondre et se dirigea vers le salon où sa fille et Sacha discutaient. Il s'incrusta dans leur conversation alors que Candice s'approchait doucement d'Antoine qui souriait fièrement.

« Alors comme ça… la distance renforce la libido… ? demanda-t-elle malicieusement en enlaçant sa taille.

- Ouais… répondit-il durement en fixant le salon d'un regard noir. Il est en train de dire que nous deux ça tiendra pas et tu t'en fous…

- Mais non… Puis tu sais très bien qu'il dit ça juste pour te faire râler…

- Eh bah c'est con parce que ça marche pas du tout !

- Ah oui ? osa-t-elle peu convaincue. Allez chéri… arrête de bouder…

- Mouais…

- Sinon… Si tu continues je te laisse dormir avec lui…

- Hein ?

- Il paraît que la distance renforce la libido non ?

- Non mais… Comment ça dormir ? Il reste pas juste pour dîner ?

- Ah… commença Candice avec gêne. Je suis désolée… J'ai pas eu le temps de te prévenir… et en fait… Il va rester là quelques jours… finit-elle par avouer.

- Quelques jours ? répéta-t-il avec énervement.

- Oui… Il voulait profiter de la petite… Emma était contente… J'ai pas osé dire non…

- Super… lâcha-t-il avec amertume.

- Mais t'inquiète pas hein, il m'a promis de se faire discret !

Antoine rigola doucement.

- Je doute un peu quand même… rétorqua-t-il en l'entendant raconter des anecdotes sur Emma en parlant fort. »

Loin de passer sa soirée de rêve, Antoine faisait bonne figure face à cet homme qui se croyait tout permis. En fin de soirée, Candice installa Laurent dans la chambre de Jules et redescendit dans le salon devenu désert. Elle appela son compagnon à travers la maison et l'entendit répondre depuis la chambre. Elle comprit qu'il était parti se coucher, éteignit les lumières et le rejoignit. La commandante s'installa dans le lit à ses côtés alors qu'il lisait ses mails sur son téléphone et le fixa. Vu sa mine renfrognée, aucun doute, Antoine était contrarié et elle en connaissait la raison. Amusée, elle pinça ses lèvres et s'approcha de lui en douceur. Le commissaire ne bronchait pas et sentit sa compagne lui caresser le torse.

« Candice… protesta-t-il alors qu'elle devenait de plus en plus entreprenante.

- Quoi ? ronchonna-t-elle entre deux-trois baisers.

- Pas ce soir… J'ai un mal de tête énorme à cause de ton ex là… expliqua-t-il en délaissant son téléphone. Non mais sérieux…. Il a un melon… J'ai jamais vu ça !

- T'as raison oui… lâcha-t-elle sans l'écouter, visiblement plus concentrée sur un autre sujet.

- Non j'suis désolé… Savoir qu'il est juste au-dessus ça me bloque ! déclara-t-il en la repoussant gentiment.

- Roooooh… T'es chiant… pesta-t-elle en se remettant à sa place.

- Oui bah excuse-moi… ronchonna-t-il à nouveau.

- Même pas un petit câlin ? tenta-t-elle en se rapprochant à nouveau.

Antoine rigola avant de la voir encercler son torse de son bras.

- Pourquoi t'as accepté qu'il vienne aussi ? demanda-t-il d'un ton boudeur.

- Ça faisait plaisir à Emma… Puis il est là que pour quelques jours… Ça va…

- Non ça va pas non…

- Je te demande juste de faire un petit effort… demanda-t-elle en relevant la tête pour le regarder.

- Ça te plairait moi si je proposais à Jennifer de rester une semaine à la maison ?

- Bah oui… rétorqua-t-elle sans conviction.

Antoine éclata de rire.

- Tu mens…

- Non, je mens pas… le contredit-elle d'une moue enfantine.

- Si… répliqua-t-il en l'embrassant.

- Non… J'te jure… insista-t-elle en répondant à ses baisers »

Finalement, la commandante se contenta d'un câlin accompagné de quelques baisers. Presque allongé sur elle, Candice éclata de rire alors que son compagnon lui susurrait des mots doux à l'oreille. Elle s'apprêtait à lui répondre lorsqu'un coup se fit entendre à la porte. Immédiatement Antoine se releva et la fixa, pas certain d'avoir vraiment entendu le bruit.

« Candice ? entendirent-ils depuis l'extérieur de la chambre.

- Putain… grommela Antoine en se laissant tomber sur son côté de lit.

La blonde se leva en ronchonnant, enfila son peignoir et ouvrit la porte.

- Qu'est-ce qu'il y a ?

- Bah je voulais aller me doucher mais j'ai oublié de prendre une serviette de bain… Je vous dérange peut-être ? demanda-t-il malicieusement en tentant de guetter à l'intérieur de la chambre.

- T'es pas sérieux ? s'emporta-t-elle.

- Bah si… Je…

- Mais je te les ai montrés tout à l'heure ! Dans le placard de… la salle de bain ! expliqua-t-elle en s'énervant.

- Aaaaah oui ! C'est vrai… J'avais zappé… Bon, merci quand même ! Bonne nuit !

Candice referma la porte et se tourna vers Antoine qui boudait.

- Ça va pas être comme ça tous les jours quand même ? demanda-t-il inquiet. »