IV. L'entraînement.

A

près avoir bien mangé, Sirius s'en alla au volant de sa belle voiture qui disparut aussitôt. Harry étant seul, il put commencer le livre de sortilège.

Après trois heures de lecture, Harry comprit qu'il valait mieux commencer par améliorer un sortilège connu, que d'en créer un nouveau. Il savait également comment s'y prendre. Il suffisait de répéter plusieurs fois le sortilège tout en gardant en tête l'effet désiré. Il fallait également rajouter un mot spécifique à la formule du sort pour en modifier l'effet. Par exemple, pour l'appliquer sur soi-même, on devait prononcer « ateme », ou sur quelqu'un en particulier, on devait prononcer « ate… plus le nom de la personne ». Cela semblait plus facile à dire qu'à faire, puisque pour lancer un sort, il fallait déjà penser à plusieurs choses à la fois.

Comme l'avait suggéré Sirius, Harry se lança dans la perfection de son patronus qui lui permettait déjà d'empêcher les détraqueurs de l'approcher et les faisait fuir.

C'est déjà pas mal, pensa Harry. Cependant je ne peux pas me déplacer aisément puisqu'une fois créé, mon patronus avance directement vers des détraqueurs. Ce qu'il me faudrait c'est quelque chose qui me permette de me déplacer parmi eux sans qu'ils aient le moindre effet sur moi. Et il faudrait également que je puisse maîtriser cette protection assez longtemps.

Harry pensa alors à un bouclier. L'idéal étant une protection totale, l'image d'une bulle l'entourant se fixa à son esprit.

Ca va être du travail en perspective, pensa-t-il.

Il se concentra. Il pensa au bonheur qu'il avait eu la veille, sans perdre de vue son objectif. Lorsqu'il eut correctement l'image en tête, il prononça la formule :

_Ateme spero patronum.

Une forme argentée sortit de la baguette de Harry et l'enveloppa aussitôt. Il avait réussi du premier coup ! Cependant la bulle paraissait très fragile et à peine eut-il le temps de le constater qu'elle disparut aussitôt. Harry s'affala sur le sol. Il était essoufflé comme s'il avait couru un marathon.

D'accord, pensa-t-il, il me faut travailler mon endurance et ma volonté. Ma bulle doit être plus solide et ne doit surtout pas pomper toute mon énergie, sinon je risque d'avoir de mauvaises surprises le jour où j'en aurai besoin.

Il se traîna jusqu'à un fauteuil où il se reposa.

_Winky ? appela-t-il. 

Aussitôt l'elfe apparut.

_Oui monsieur ? Elle semblait heureuse et Harry s'en réjouit. Oh ! Monsieur est tout pâle, s'exclama-t-elle. Monsieur n'est pas bien ?

_Si, je vais bien, souffla Harry, est-ce que tu peux me trouver un gros morceau de chocolat ?

_Tout de suite monsieur. Une minute plus tard elle arriva avec un morceau de chocolat aussi gros qu'un caillou.

_Merci Winky.

Harry croqua et se sentit tout de suite mieux après cette première bouchée.

_Je peux encore faire quelque chose pour vous monsieur ?

_Non merci Winky, c'est parfait.

_Je vais préparer le déjeuner alors. Monsieur Black va bientôt rentrer.

Harry regarda l'heure à la pendule et constata que ça faisait cinq heures qu'il travaillait. Il prit sa montre de mage et ne vit qu'un cadran blanc. Il pensa alors à Sirius et quelques mots s'affichèrent. « En chemin », put lire Harry. Décidément, cette montre était bien pratique.

Dix minutes plus tard, Sirius rentrait et fut accueilli par Harry.

_Ca va ? demanda Sirius d'un ton inquiet.

_Oui, ne t'en fais pas, je vais beaucoup mieux. J'ai réussi à créer une bulle protectrice à partir du patronus mais elle était trop fragile et elle m'a pris toutes mes forces.

_C'est normal. Néanmoins, tu as réussi du premier coup, ce qui confirme qu'Albus et moi-même avions raison de placer en toi notre confiance.

Harry ne put s'empêcher de rougir devant un tel compliment.

_Bon, passons à table et reprends des forces, car cet après-midi, c'est avec moi que tu travailles.

Pendant le déjeuner, Sirius expliqua à Harry que les animagi reflétaient la véritable personnalité des sorciers qui les possédaient.

_Tu vois, ton père représentait la sagesse et la résistance, Pettigrow représentait la bassesse et la traîtrise, et je représente la fidélité.

_A ton avis, si j'y arrive, je me transformerais en quel animal ?

_Mmm, Albus et moi-même avons notre petite idée, mais elle doit être confirmée. Donc je ne me prononcerai pas. Cependant tu peux le deviner, en essayant d'énumérer tes qualités, ou tes défauts.

_Euh… Je sais pas. Je ne peux pas me juger moi-même.

_Et bien, ça en fait déjà une, répliqua Sirius en riant. Tu es modeste mais je ne pense pas que cela ait une grande incidence sur la métamorphose. Non, sans rire, on peut dire que tu es courageux, tu l'as démontré plusieurs fois. Tu es honnête, intelligent et tu peux faire preuve de sacrifice.

Harry était rouge piment et ne savais pas où regarder.

_Merci, finit-il par dire maladroitement.

_Ne sois pas gêné Harry, répondit Sirius. Je n'ai fait que tirer des conclusions à partir de ce que tu as déjà vécu. Je peux aussi dire que tu es souvent inconscient et tête-brûlée. Mais bon, les défauts contribuent également à la transformation. Nous verrons bien ce que cela donnera lorsque tu auras achevé ton entraînement.

_Ca risque de prendre beaucoup de temps.

_N'en sois pas si certain. Tu es doué. Tu as quand même réussi à modifier le patronus en quelques heures de travail, ce qui est beaucoup mieux que ce que j'espérais.

_Mais ce n'est pas illégal d'essayer de devenir animagus ? demanda Harry pour changer de conversation.

_Si, bien sûr. Mais vu les circonstances, nous n'avons pas le choix. Tu as bien vu comment Fudge refuse de voir la vérité à propos de Voldemort, alors va lui faire comprendre qu'il est important que tu deviennes un animagus.

_Mais pourquoi est-ce si important, Sirius ? Je ne comprends pas ce que cela apporte.

_C'est très difficile de devenir un animagus Harry, mais une fois que c'est fait le sorcier devient plus puissant. A ton avis pourquoi les métamorphoses sont si réglementées par le ministère ?

_Tu crois que Voldemort est un animagus ? demanda Harry.

_Je ne sais pas. Je ne pense pas, sinon il l'aurait déjà montré. Mais tu as raison de t'interroger. Mais assez discuté, si tu as fini de manger, on va commencer l'entraînement.

_C'est parti.

Harry avait du mal à cacher l'excitation qu'il éprouvait.

Ils allèrent dans le salon et s'y installèrent confortablement, alors que de son côté, Winky avait déjà débarrassé la table et fait la vaisselle en un tour de main.

_L'entraînement est très simple à comprendre mais très difficile à réaliser. Il suffit de se concentrer vers une idée fixe : devenir un animal, pendant qu'une autre personne prononce plusieurs formules. Tout est affaire de concentration. Une fois la totalité des formules prononcées, la transformation est possible. Il s'agit alors d'être disponible, en phase avec son animal, et c'est ça qui peut prendre du temps. C'est très difficile au début parce qu'on ne sait pas quel animal nous est rattaché. Regarde.

Sirius ferma les yeux et se transforma immédiatement en un gros chien noir, puis il se métamorphosa à nouveau en homme.

_Maintenant, je vais rester près de toi pendant que tu te concentres et je vais prononcer les formules. Ne fais pas attention à ce que je dis, essaye de vider ton cerveau tout en faisant remonter des sentiments primaires, comme le courage, la force, etc… Pense à être un animal.

_Je vais essayer, répondit Harry, qui ne voyait absolument pas comment il allait y arriver.

Harry se concentra et Sirius commença à lire des formules dans un livre très vieux. Il vida son cerveau et s'imagina des animaux, aussi différents soient-ils. Il pensait à la traîtrise du rat, à la fidélité du chien, à la robustesse du cerf, à l'agilité du chat, à l'image des animagi qu'il connaissait. Puis il pensa aux qualités que Sirius lui avait décrites. Il pensa à l'honnêteté, au sacrifice, à la force, au courage, à l'intelligence, mais aussi à son impétuosité qui constituait, il le savait, son principal défaut. Puis tout à coup, il y eût une image très nette qui s'afficha : celle d'un lion qui rugissait.

Il ouvrit les yeux juste au moment où son parrain terminait les formules.

_Alors ? demanda ce dernier. Ca va ? Ca fait quatre heures que je parle et que tu médites.

_Quatre heures ! s'exclama Harry. J'ai l'impression que ça fait cinq minutes.

_C'est normal, ça se passe comme il faut. Normalement, à la fin de la dernière formule tu dois avoir perçu une image d'un animal. Est-ce que c'est le cas ?

_Oui, j'ai eu l'image d'un lion qui rugissait. Ca veut dire que c'est l'animal qui m'est rattaché ?

_C'est ça. Un lion dis-tu ? Décidément, c'est intéressant. Dumbledore a toujours raison. Je me demande comment il fait. Bon, peu importe, se reprit- il alors qu'il commençait à parler tout seul. Nous allons nous arrêter pour aujourd'hui. Tu as accompli la première étape du processus de métamorphose, la seconde est beaucoup plus longue et demande plus d'entraînement. Tu n'as plus besoin de moi. Tu as ton animal, ce sera plus facile à partir de maintenant.

_Mais comment dois-je m'entraîner ? demanda Harry.

_Il suffit que tu recommences à te concentrer tout en pensant au lion que tu es. Cet entraînement a duré un an pour James et moi, mais tu mettras moins de temps, j'en suis convaincu. Au fur et à mesure de ton rapprochement avec l'animal jusqu'à la métamorphose, tu vas en acquérir les capacités. Ainsi, tu deviendras plus fort et tes instincts et réflexes se développeront.

Harry ne put s'empêcher de sourire.

_Et je vais rugir aussi ? dit-il en riant.

_Ne rigole pas. Il se peut que sur un moment d'énervement tu te mettes à hurler comme le lion, donc rugir. C'est pourquoi, il est très important que tu te contrôles. Il faut que personne ne sache que tu essayes d'être un animagus.

Harry imagina un rugissement devant Malefoy. Il ne put s'empêcher de rire aux éclats.

_Allons nous détendre, coupa Sirius qui avait comprit. Assez travaillé pour aujourd'hui.

Il dînèrent et rirent de bon cœur en discutant de choses futiles, puis ils allèrent se coucher. Harry s'endormit aussitôt, tant ses exercices lui avaient coûté. Il ne fit aucun cauchemar, néanmoins il se réveilla en sursaut avec un léger picotement à la cicatrice.

Inutile d'effrayer Sirius pensa-t-il, du moins pas tant que je ne connais pas la cause de ce réveil.

Le reste de ses vacances se passa à l'image de sa journée d'entraînement. Le matin, il étudiait les sortilèges et l'après-midi, il perfectionnait sa métamorphose. Sous l'œil attentif de Sirius, il faisait des progrès fulgurants. En quatre jours, il parvint à maîtriser son bouclier de patronus, sans que celui-ci ne diminue son énergie. Il en maîtrisait la durée, la taille et la puissance. Sirius était époustouflé et Harry était assez fier. Devant de tels progrès, il ne tarda pas à avoir une grande confiance en lui. Il améliora ainsi le sort d'attraction de façon à diriger l'objet vers une personne ou un lieu choisis, et il créa deux sortilèges : le sortilège de répulsion (« miroiros ») qui lui permettait de renvoyer un sortilège peu puissant vers celui qui l'avait envoyé, et le sortilège de vision (« omnivisio ») qui l'autorisait à voir la nuit ou à travers les murs.

Ce dernier sortilège me servira pendant mes escapades dans les couloirs du collège la nuit, pensa Harry.

En ce qui concerne la métamorphose en animagus, Harry sentait qu'il se rapprochait du lion. Il pût constater qu'il devenait effectivement plus agile et plus fort. Il s'aperçut avec plaisir devant son miroir, qu'il n'était plus un petit garçon maigrichon, mais un jeune homme de 15 ans déjà bien musclé. Certes l'age et ses matchs de Quidditch l'avaient endurci, mais son rapprochement avec le lion devait jouer sur sa musculature.

Je sens que les matchs de Quidditch vont prendre une autre tournure cette année, pensa-t-il.

C'est ainsi que passèrent 25 jours, Harry s'entraînant et ne faisant que ça. Il avait fait d'énormes progrès. A trois jours de la rentrée, Harry envoya un hibou à Ron et Hermione pour acheter les fournitures. Ils se donnèrent donc rendez-vous au Chaudron Baveur, le lendemain à 11 heures.