XVII. Triste cérémonie.
Dans la tour Gryffondor, la chambre était calme. Les rayons du soleil déjà haut dans le ciel, éclairaient largement la pièce. On pouvait y voir danser les grains de poussière.
Les lits à baldaquins étaient alignés. Un seul avait encore les rideaux tirés. A l'intérieur, Harry était allongé, les yeux grands ouverts. Il n'aurait pas pu dire depuis combien de temps il était là. Il fixait le haut de son lit, alors que les évènements récents se bousculaient dans sa tête.
La veille au soir, McGonagall lui avait demandé de l'accompagner jusqu'à la bibliothèque. Là, il avait découvert le corps de Cho Chang, sa petite amie depuis quelques semaines. Le choc fut tel pour le jeune sorcier qu'il ne se souvenait plus de grand chose ; comme si sa mémoire tenait à conserver en tête cet événement tragique. Harry avait serré le corps de Cho contre le sien en hurlant de douleur.
Au bout d'un certain temps, Dumbledore l'avait emmené dans son bureau. Harry n'avait pas voulu partir, mais la poigne du directeur avait été pressante. La conversation qui s'ensuivit avait été longue, mais seuls quelques paroles lui restaient en mémoire.
_Je suis profondément désolé, lui avait dit le directeur. Je suis moi-même très attristé par la mort de Mademoiselle Chang.
Harry se souvint l'avoir regardé droit dans les yeux à ce moment-là. Dumbledore avait l'air d'un vieillard qui a vu trop d'horreurs dans sa vie et ses yeux gris semblaient refléter sa propre tristesse.
_Ses parents ont été tués il y a quinze ans, avait reprit le directeur. Tout comme toi, elle était orpheline dés son plus jeune age et j'avais accepté de devenir son tuteur légal.
Sur le moment, Harry n'avait pas vraiment entendu les paroles de Dumbledore, mais maintenant qu'il se les remémorait, il en mesurait toute l'ampleur. Le vieux sorcier venait de perdre une personne qu'il considérait comme sa propre fille, et il avait essayé de le consoler.
Les yeux d'Harry se mouillèrent à nouveau. Dumbledore devait ressentir une peine bien supérieure à la sienne, et pourtant il en avait fait abstraction pour lui parler.
Il ignorait comment il était parvenu jusqu'à son dortoir, mais Harry se souvint de l'étreinte chaleureuse d'Hermione et de Ron qui avaient été informés. Il s'était allongé et avait sombré dans le sommeil quelques heures plus tard. Ses cauchemars avaient été violents et à son réveil, des images de Cho s'étaient imposées à son esprit, provoquant de nouvelles larmes : sa silhouette, son visage, son sourire, ses yeux et… son corps étendu sur le sol de la bibliothèque sous la lourde cape de Dumbledore.
Il avait entendu ses amis sortir de la chambre, mais il n'avait pas bougé. Il n'avait pas eu le courage d'affronter le regard compatissant de tous les élèves, une fois qu'ils auraient été informés. Harry était resté là, dans son lit, abattu.
Deux jours passèrent ainsi. Harry ne sortait pas de sa chambre et évitait ses amis. Ces derniers n'osaient d'ailleurs pas le déranger. Lorsqu'il avait eu faim, il avait enfilé sa cape d'invisibilité pour se rendre à la cuisine où Dobby lui avait réservé un accueil triomphal.
_Bonjour Harry Potter ! avait-il hurlé en voyant apparaître le jeune sorcier.
Harry s'était efforcé de sourire.
_Bonjour Dobby. Est-ce qu'il est possible d'avoir de quoi manger un peu.
_Bien sûr Monsieur !
Et sur ces quelques mots, les elfes avaient apporté différents plats. Harry s'était installé dans un coin pour manger silencieusement.
Au bout d'un petit moment, Dobby s'était avancé vers Harry. Il portait toujours son cache-théière comme un chapeau, mais il avait des chaussettes différentes, dont les couleurs juraient avec le pull que Ron lui avait cédé le noël précédent.
_Vous savez Monsieur, avait dit doucement l'elfe de maison, des malheurs arrivent tous les jours mais la vie continue.
Harry l'avait regardé tristement.
_J'espère seulement qu'Harry Potter retrouvera la joie de vivre qu'il avait.
Il s'était éloigné sans qu'Harry puisse lui répondre. Le jeune sorcier avait regagné sa chambre sous sa cape d'invisibilité.
A présent, sur son lit, il pensait au paroles si vraies de Dobby. Il ne pouvait pas continuer à se laisser aller ainsi. Il fallait qu'il se ressaisisse.
Peu à peu, la tristesse qui l'avait coupé du monde ces deux derniers jours, laissait place à la résignation. Ce qui était arrivé ne pouvait pas être changé. Un seul sentiment ne variait pas : la haine. Harry haïssait celui qui avait lâchement assassiné Cho, et il se promit de la venger. C'est cet esprit de vengeance qui l'aiderait à tenir. La volonté du jeune sorcier était scellée et ses yeux étaient à présent aussi secs que la pierre.
Harry se leva et s'habilla. Le soleil était en train de se coucher et la pénombre gagnait la chambre. Le sorcier passa devant son miroir et constata un changement sur son visage. Son regard était sérieux et sévère. La peine et la colère devaient y être pour beaucoup, la mort de Cho avait laissé sa marque sur lui. Une marque indélébile. Harry avait perdu son innocence.
Sans savoir pourquoi, il voulut se transformer en lion. Il ferma les yeux et se concentra. Rien ne se produisit. Il réessaya. En vain. Vexé et énervé, il détourna son regard du miroir et descendit vers la Salle Commune. Là, Hermione et Ron se tenaient silencieusement devant la cheminée. Ils se retournèrent au bruit des pas de leur ami.
_Bonjour, fit Harry.
_Comment vas-tu ? demanda maladroitement Ron.
_Je vais mieux. Merci.
Les trois amis restèrent muets pendant quelques minutes.
_Tu as changé, finit par dire Hermione.
Son ton était direct et elle avait l'air inquiet. Harry savait qu'il ne pourrait pas cacher ses sentiments à ses amis.
_Je veux me venger, leur répondit-il sur le même ton qu'Hermione. Ma haine est trop importante pour que je la garde.
Ses deux amis le regardèrent. Ils semblaient choqués.
_Je ne sais pas ce que je ressens, tenta d'expliquer Harry. Je suis toujours malheureux, mais je ne veux pas que ce crime reste impuni. Paradoxalement, je me sens très calme et j'ai l'impression que ma colère ne se manifestera que lorsque j'aurai trouvé le responsable. Je suis serein.
Il regarda Hermione et Ron et esquissa un sourire disant qu'il était toujours le même, mais que personne ne pourrait, le moment venu, l'empêcher de se venger.
_Tu me fais penser à… ,dit Ron.
Il était hésitant.
_A Dumbledore, continua Hermione.
A ces mots, Harry sourit, confirmant les pensées de ses deux amis. Sa vraie force semblait dévoilée. Sa sérénité et son calme laissaient soupçonner une détermination et une puissance immenses.
_Quel jour sommes-nous ? demanda Harry qui ne voulait surtout pas s'éterniser sur cette conversation.
Il avait perdu toute notion de temps depuis la tragédie d'Halloween.
_On est lundi, répondit Ron. Hermione a pris les cours pour toi.
Cette dernière lui tendit un paquet de parchemins soigneusement enroulés d'une ficelle.
_Merci, répondit Harry. Vous pensez à tout.
Ses amis lui sourirent. Après quelques minutes, ils se dirigèrent vers la Grande Salle. Mais avant d'entrer, Hermione arrêta Harry.
_Toute l'école a été mise au courant de… la mort de Cho.
Son ton ne cachait pas sa tristesse. Cette mort l'affectait beaucoup.
_Et Dumbledore a ordonné le deuil jusqu'à l'enterrement qui aura lieu après- demain. Il nous a expliqué qu'elle était orpheline.
_Bien, dit Harry. Allons-y.
Les murs de la salle étaient couverts de drapeaux blancs. Harry en déduisit que ça devait être la couleur du deuil dans le monde des sorciers.
A leur entrée, tous les élèves tournèrent les yeux vers Harry. La majorité d'entre eux étaient compatissants et avaient encore les yeux rougis d'avoir trop pleuré, mais presque tous les Serpentards affichaient une passivité absolue. Harry présentait une sérénité bien connue de tous les habitués de Poudlard. Les élèves lui sentaient une aura particulière et certains se sentaient rassurés après son passage. La ressemblance avec Dumbledore, ou plutôt avec son charisme, était flagrante pour tous.
Dans le silence général, Hermione, Ron et Harry s'installèrent à leur table. Après quelques minutes de murmures et de chuchotements, les discussions reprirent entre les élèves. Harry, quant à lui, ne disait rien. Devant les regards inquiets de ses deux amis, il mangeait en silence. Ce ne fut qu'à la fin du repas qu'il redressa la tête pour sourire à ses amis.
_Vous êtes-vous entraînés ces derniers jours ? demanda-t-il.
Hermione et Ron étaient ravis de pouvoir enfin engager une conversation.
_Nous avons travaillé toute la journée de dimanche, répondit fièrement Ron.
_Mais nous ne sommes parvenus encore à aucun résultat, ajouta Hermione, manifestement mécontente.
Harry la regarda en souriant.
_C'est normal que vous mettiez un certain temps pour y arriver, lui dit-il. Vous avez des cours qui vous empêchent de travailler, alors que moi j'ai pu m'entraîner tous les jours pendant un mois.
Hermione semblait rassurée.
En regardant autour de lui, Harry constata que la majorité des personnes présentes le regardait d'un air compatissant. Certains fondaient en larme à sa vue, d'autres se contentaient de lui sourire d'une manière encourageante ou tristement. Face à cela, Harry baissait les yeux, ne sachant pas comment réagir à cette sympathie.
La fin de la soirée arriva bien vite et bientôt chacun se retrouva au lit, cherchant le sommeil du mieux qu'il pouvait.
Le lendemain, Harry était en cours de Défense Contre les Forces du Mal lorsque McGonagall entra dans la salle.
_Excusez-moi Professeur Black. Puis-je vous emprunter Monsieur Potter pendant quelques minutes s'il vous plaît.
Sirius lui sourit tristement.
_Bien entendu Professeur.
Harry se leva et accompagna la directrice des Gryffondors. Elle avait regagné son air sévère et sérieux, mais lorsque Harry la fixa, ce fut un regard compatissant qui lui fut rendu.
_Comment allez-vous Harry? demanda-t-elle.
Son ton était monocorde et Harry se rendit compte que la mort de Cho avait affecté beaucoup plus de personnes qu'il ne l'avait cru.
Il lui sourit de son mieux après lui avoir dit qu'il allait à peu près bien.
Après avoir déambulé ensemble pendant quelques minutes à travers les couloirs de Poudlard, McGonagall s'arrêta devant une gargouille et regarda le jeune sorcier.
_Vous avez changé, lui dit-elle très directement, à la grande stupéfaction d'Harry.
Son professeur de Métamorphoses n'affichait pas souvent ses sentiments et ses impressions.
_Je sais Professeur, lui répondit-il. On me l'a déjà dit. Hermione et Ron m'ont dit que je ressemblais à…
Harry hésita. Il ne savait pas s'il devait dire cela à McGonagall. Elle pourrait prendre cela pour de la vanité. Mais la franchise que la directrice des Gryffondors avait affichée quelques minutes auparavant décida Harry.
_Mes amis m'ont dit que je ressemblais au Professeur Dumbledore, continua-t- il en regardant McGonagall dans les yeux.
Subitement, il se mit à penser à Cho et à son meurtrier. Instantanément, sa colère et sa volonté de vengeance refirent surface, attisant un brasier secret au plus profond de son âme. McGonagall le regarda et vit cette flamme dans ses yeux, cette flamme qu'elle avait déjà vue dans les yeux de Dumbledore lorsque celui manifestait une colère profonde.
Les colères de Dumbledore, aussi rares soient-elles, étaient concentrées. Dans ces cas-là, le vieux sorcier se contrôlait parfaitement et ses paroles étaient chargées d'une volonté inflexible.
_Vos amis ont raison, dit-elle simplement à Harry.
Ce dernier sourit machinalement. Venant de la part de ses amis, cette comparaison à Dumbledore lui faisait plaisir, mais venant de McGonagall, il prenait cela pour une grande marque de respect.
_Rabougri ! dit-elle pincée en s'adressant à la gargouille d'un air entendu. Elle n'était pas du genre à apprécier l'usage de tels mots de passe.
La statue pivota, libérant un passage qui menait au bureau du directeur.
_Ah ! Bonjour Harry ! Je t'en prie, assieds-toi.
Harry s'exécuta et observa cette pièce qui le fascinait tant, alors que Dumbledore échangeait quelques mots avec McGonagall.
Ce lieu si spécial n'avait pas changé. Les anciens directeurs du collège dormaient toujours dans leur cadre. Sur une étagère, à côté du tabouret où trônait le choixpeau magique, Harry reconnut sans mal la pensine de Dumbledore ainsi que l'épée de Godric Gryffondor. C'est cette épée qui lui avait permis de tuer le basilic dans la Chambre des Secrets, trois ans auparavant.
L'épée de mon ancêtre, pensa-t-il.
C'est à ce moment-là que Fumseck, le phœnix du directeur, se posa sur ses genoux.
_Bonjour Fumseck, lui dit doucement Harry. Comment vas-tu ?
Le magnifique oiseau rouge et or répondit par un son plaintif qui déchira le cœur d'Harry. La note libérée par le volatile était si pure, que tous les souvenirs qu'il refoulait depuis deux ou trois jours s'imposèrent à son esprit. Ses yeux se mouillèrent.
_On ne peut rien te cacher à toi, murmura-t-il au phœnix en lui caressant la tête.
Il s'essuya avec sa manche.
_Alors Harry ? demanda Dumbledore alors que McGonagall quittait la pièce. Comment te sens-tu ?
_Je vais mieux Professeur, merci.
Dumbledore le regarda en lui souriant chaleureusement.
_En es-tu si sûr ?
Harry savait qu'il essayait de le percer à jour, mais le jeune sorcier soutint son regard.
_Manifestement, oui, ajouta Dumbledore. Qu'as-tu l'intention de faire ? lui demanda-t-il le plus sérieusement du monde.
Le visage de Cho ne le quittait pas.
_Je veux la venger, répondit simplement Harry.
_Tu veux la venger ou te venger ?
Le regard de Dumbledore était perçant.
_Pour moi, cela ne fait aucune différence, avoua Harry.
Un long silence s'instaura entre les deux sorciers. Dans le calme absolu, le temps s'était arrêté et un long dialogue muet semblait s'échanger.
_Tu ne m'as pas habitué à autant de franchise, finit par dire le directeur.
Harry sourit.
_Je sais Professeur. Mais tout le monde me dit que j'ai changé.
_C'est ce que je constate. Tu sembles plus résigné et surtout plus… hargneux.
Harry ne dit rien. Ce n'est pas vraiment ainsi que ses amis l'avaient décrit. Mais peu lui importait en fin de compte. Une foule de questions se bousculait dans son cerveau, et c'est le mot "pourquoi ?" qui revenait le plus souvent. Ce n'est plus au corps étendu de Cho qu'il pensait, mais aux nombreuses ballades qu'ils avaient faites ensemble, à leurs baisers, à son sourire.
Une larme coula sur sa joue et s'écrasa sur le sol.
_Pourquoi ? Pourquoi est-elle morte ?
Dumbledore s'assombrit. De nombreuses rides apparurent sur son front.
_Je l'ignore Harry. Elle était là au mauvais moment. Madame Pince m'a dit qu'elle était partie plus tôt de la bibliothèque, à cause du banquet d'Halloween. Cho a dû être enfermée sans s'en rendre compte.
Harry ravala sa douleur et se mit à réfléchir. Le meurtrier devait chercher quelque chose.
_Des livres ont-ils disparu ? demanda-t-il.
_Non Harry. De nombreux ouvrages de la réserve étaient sur le sol, mais aucun ne manquait.
_Ce n'est pas logique, dit le jeune sorcier pour lui-même.
_Ecoute Harry, je souhaite au moins autant que toi retrouver cet assassin. Tu connais les liens qui m'unissaient à Cho. Je veux aussi qu'on sache qu'on ne peut pas tuer un élève dans mon école et s'en sortir impunément.
Harry vit dans les yeux de Dumbledore cette volonté qui forçait son admiration. Le sorcier semblait dissimuler une colère et une tristesse infinies.
_Mais malgré cette tragédie, je refuse que la panique s'empare des élèves.
Harry semblait réaliser ce que venait de dire le directeur.
_Vous voulez dire que personne ne sait que c'est un élève qui a tué Cho ? demanda-t-il presque choqué.
_Mais pourquoi en es-tu si sûr ? Nous ne savons pas de quoi elle est morte, et si c'est d'un Avada Kedrava, peu d'élèves sont capables de lancer un tel sortilège.
_Malefoy sait parfaitement le faire, rétorqua Harry.
Il était hors de lui, mais peu à peu face au silence de son mentor, il se rendit compte que sa haine l'avait aveuglé.
_Cela ne prouve strictement rien, répondit Dumbledore. Ce que je veux te faire comprendre Harry, c'est que tu ne dois pas te laisser emporter par ta colère. On ne construit rien sur un sentiment de haine ou une volonté de vengeance. Et puis même si je suis d'accord avec tes soupçons, nous n'avons aucune preuve.
Harry comprenait.
_Je vais t'autoriser à faire une enquête Harry, lui dit le directeur. Mais je veux que tu analyses chaque élément et non que tu partes d'un a priori. Je veux donc que tu oublies toutes tes rancœurs et que tu chasses ton amertume.
Harry n'en revenait pas. Il était autorisé à faire une enquête sur les circonstances de la mort de Cho.
_Merci Professeur. C'est exactement l'autorisation dont j'avais besoin.
Depuis la nuit d'Halloween, c'était la première fois que Harry se sentait libéré d'un grand poids. Sa haine, sa colère et son désir de vengeance s'étaient effacés. Il ferma les yeux et sourit devant un directeur satisfait. Le jeune sorcier rouvrit les yeux et regarda son maître. Son visage semblait lavé et ses yeux pétillaient à nouveau.
_Je vais avoir besoin d'un laisser passer pour travailler dans la réserve de la bibliothèque, dit-il.
_J'y ai pensé, répondit Dumbledore. Madame Pince est avertie et tu pourras t'y rendre aussi souvent que nécessaire. En revanche, ta discrétion doit être absolue.
Harry lui sourit. C'était un sourire sincère et chaleureux. Il se leva.
_Merci Professeur. J'ai l'impression de revenir de loin. Je crois que je m'étais éloigné de moi-même. C'est sûrement à cause de cela que je ne parvenais plus à me métamorphoser.
_Un animagus doit être fidèle à lui-même s'il veut pouvoir se transformer. Au fait, je ne crois pas t'avoir déjà vu en lion. Cela te dérange-t-il d'essayer à nouveau devant moi ?
_Absolument pas Professeur.
Il ferma les yeux et se concentra. Aussitôt, il se mit à quatre pattes. Il rouvrit les yeux et constata à la mine mi-amusée mi-admirative de Dumbledore qu'il avait réussi. Il se retransforma en homme et sourit à son directeur.
_Merci encore, dit-il avant de partir. Vous m'avez été d'un grand secours.
C'est le cœur soulagé qu'il rejoignit la salle de cours de Défense Contre les Forces du Mal. Il s'assit au fond de la classe, et affronta le regard étonné de Sirius et de ses amis. Il se sentait bien. Il était toujours malheureux, mais il était débarrassé de sa haine destructrice. Son but n'était plus la vengeance, mais la découverte de l'assassin. Après…
Après, on verra, pensa-t-il.
Il se sentait vraiment serein à présent. C'est plongé dans ses pensées, qu'il se surprit à considérer une phrase de Dumbledore.
_Ainsi, l'héritage ne se légue pas par le sang, mais par le caractère, avait-il dit en parlant de l'héritier de Gryffondor.
Et si Dumbledore était cet héritier ? Après tout, Harry s'était toujours senti en phase avec lui et si l'héritage se faisait par le caractère, l'hypothèse était loin d'être invraisemblable.
Ce fut Ron qui le tira de sa réflexion.
_Harry ? Est-ce que ça va ?
_Hm ? Oh ! Oui Ron. Ca va très bien.
Harry regarda autour de lui et constata qu'Hermione aidait les autres élèves à faire un patronus. Sirius s'approcha de lui.
_Comment vas-tu ? demanda-t-il gravement alors que Ron se dirigeait vers un groupe en difficulté.
_J'ai eu un gros passage à vide, mais à présent je vais beaucoup mieux. Merci.
Il sourit à son parrain et ce dernier s'en trouva rassuré.
_Pendant un petit moment, Dumbledore et moi avons craint que ta peine t'entraîne vers une haine aveugle.
_Ce fut le cas, répondit Harry. Et c'est grâce à Dumbledore que je ne suis pas allé plus loin dans ma folie. J'aurais sans doute commis des erreurs irréparables.
Sirius le regarda. Quelques années plus tôt, c'était lui qui avait été pris d'une rage meurtrière. Le meurtre des parents d'Harry l'avait tellement désespéré qu'il avait essayé d'assassiner le responsable, Peter Pettigrow.
_C'est bien que tu ailles mieux, lui dit simplement Sirius.
Harry lui sourit d'un air entendu. Il savait à quoi avait pensé son parrain. Il se leva.
_Je vais aider les autres élèves, lui dit-il.
_Je vais bientôt être inutile si vous continuez à me seconder comme ça, répondit Sirius en riant.
La journée poursuivit son cours. Cette nuit-là, les élèves se couchèrent tôt car l'enterrement de Cho était prévu le lendemain.
A son réveil, Harry trouva un uniforme blanc au pied de son lit, sans doute laissé par les elfes de maison. Il constata que chacun était dans le même cas. Il s'habilla donc et se dirigea vers la Grande Salle ornée des couleurs du deuil pour sa dernière journée. Un moldu aurait pensé qu'il y avait un mariage dans la journée pour que chacun s'habille ainsi. Mais dans le monde des sorciers, le blanc était la couleur du deuil, de la tristesse mais aussi du respect, et on pouvait considérer les enterrements comme un dernier hommage à la personne décédée.
A son arrivée dans la Grande Salle, Harry s'aperçut avec étonnement qu'il n'était pas le premier élève à s'être levé. En effet, la majorité des élèves de Serdaigle était présente. Cho avait été une excellente camarade pour chacun d'eux et de nombreuses personnes pleuraient. Harry s'assit sans les regarder. Il mangea sans appétit alors que ses souvenirs l'envahissaient et il ne put réprimer de nouvelles larmes.
Les élèves entraient peu à peu, mais le silence était total. Même les Serpentards ne disaient rien devant les visages attristés. On n'entendait que le bruit des couverts sur les assiettes d'or. Au bout de quelques instants lourds, Dumbledore se leva. Il portait une grande robe blanche, assortie d'une cape de la même couleur. Son visage était triste et il semblait avoir perdu son énergie. A cet instant, le directeur de Poudlard semblait plus faible que n'importe qui.
_Que ceux qui désirent assister à l'enterrement m'attendent devant l'entrée du château. Les autres peuvent rejoindre leur Salle Commune.
Tous les élèves se levèrent et ceux qui n'avaient pas voulu assister à la cérémonie n'osèrent pas s'en aller. Toujours dans le silence le plus total, chacun se dirigea vers les immenses portes de l'école. Les différentes maisons se mélangèrent. Aujourd'hui, il n'y avait plus de distinction, ni même de rivalité. Les professeurs se mêlaient aux élèves et les Serpentards se tenaient près des Gryffondors. Il n'y avait plus que la tristesse et le deuil.
Habituellement, la tradition voulait que la famille du décédé dirige le cercueil de verre grâce à un sortilège de lévitation. Là, ce fut Dumbledore qui mena le cortège jusqu'aux jardins de Poudlard, où un cimetière était caché derrière de gigantesques haies fleuries. Le vieux sorcier murmura quelques formules connues seulement de lui, et un passage se libéra.
Contrairement aux cimetières moldus qu'Harry avait pu voir dans sa jeunesse, les tombes n'étaient pas représentées par des croix, mais par des monolithes blancs où étaient incrustés les baguettes du sorcier enterré. L'intérieur du cimetière de Poudlard devait avoir subi de nombreux sortilèges car le cortège entier put y entrer, alors que personne n'avait jamais soupçonné un tel espace dans les jardins.
Lorsqu'il fut entré, Harry constata que les tombes étaient organisées autour de quatre monolithes d'une taille plus importante. Lorsque les élèves passèrent devant ces grandes stèles verticales, chacun put lire les noms des fondateurs de Poudlard. Contrairement aux tombes individuelles, Harry remarqua l'absence de toute baguette magique incrustée. Ce détail apparemment insignifiant pour la majorité des élèves n'échappa pourtant pas à un autre qu'Harry.
Le cortège s'arrêta devant un emplacement vide. La tombe de Cho était prête à recevoir son corps. A travers le cercueil de verre, Harry pouvait voir le visage paisible qu'avait gardé la jeune sorcière. Ses mains se rejoignaient sur son ventre et on pouvait avoir l'impression qu'elle allait se réveiller d'un moment à l'autre. Malgré son absence de vie, le corps de la jeune fille avait conservé toute sa beauté.
Après avoir placé le cercueil dans la tombe, Dumbledore se retourna vers les élèves et les professeurs.
_Cho Chang fut orpheline à l'age d'un an, j'ai accepté alors de devenir son tuteur. Aujourd'hui, en plus de perdre une élève, je perds une personne que je considérais comme ma propre fille. Je l'ai vue grandir pendant quinze ans, et pendant quinze ans, je me suis enrichi de sa présence. Pour certains, elle était une élève exemplaire, pour d'autres une amie hors du commun. Pour tous ceux-là, sa compagnie était réconfortante et son sourire réchauffait les cœurs.
A ces mots, Harry sentit le sien se serrer. Il entendait de nombreuses personnes pleurer et crut voir une larme couler sur la joue de Dumbledore. Il fit une pause de quelques secondes durant lesquelles chacun eut l'impression d'être dévisagé par le vieux sorcier.
_Les circonstances de sa mort restent à ce jour mystérieuses, mais je jure qu'elles ne seront pas impunies.
La tristesse l'avait quitté. Il redevint, sous les yeux de tous, le puissant sorcier qu'il était. Sa force et sa volonté semblaient irradier de son corps.
Dumbledore se tourna vers la tombe et prononça quelques formules. Progressivement, alors que le monolithe blanc sortait du sol, la tombe se combla de terre, ensevelissant le cercueil de Cho pour l'éternité. La baguette magique de la jeune fille trouva son dernier emplacement.
A cet instant, l'équipe de Quidditch de Serdaigle décolla, pour offrir à son attrapeuse un hommage digne de son talent, marquant ainsi le ciel de son regret. Après leur atterrissage, des milliers de hiboux s'envolèrent en même temps. De nombreuses plumes dansaient dans les airs, jouant avec le vent, avant de se poser sur la nouvelle tombe du cimetière. Quelques élèves se recueillirent en silence, tandis que d'autres déposaient des fleurs au pied de la grande stèle. Certains avaient même confectionné quelques présents en souvenir de la jolie brune. Mais peu à peu, les élèves et les professeurs rentraient vers le château.
Sous une pluie naissante, Harry se tint un moment seul devant le monolithe.
_C'est bizarre de ne plus te voir tous les jours, commença-t-il. Tu sais, j'ai failli faire des bêtises en ton nom mais Dumbledore m'a remis dans le droit chemin. Il m'a permis d'enquêter sur ta mort. Sois tranquille, Cho, repose-toi maintenant. Je trouverai ton assassin, je te le promets.
Harry se tut quelques instants. La pluie commençait à battre fortement.
_Tu me manques, murmura-t-il dans un sanglot. Tu ne peux pas savoir à quel point tu me manques.
Il toucha le monolithe du plat de la main. Il était fait d'une matière qu'Harry ne connaissait pas et n'était pas froid comme la pierre.
Harry s'essuya le visage et tenta un sourire.
_Il est possible que je vienne te voir de temps en temps. J'imagine que Dumbledore ne me refusera pas cette faveur. Adieu mon cœur.
_Orchideus, ajouta-t-il après avoir sorti sa baguette.
Un superbe bouquet de fleurs apparut alors. Ce sort, c'est Ollivander qui le lui avait montré l'année précédente après avoir vérifié la baguette de Fleur Delacourt.
Harry déposa le bouquet près du monolithe.
_A bientôt.
Il se dirigea alors vers le sombre édifice qu'était devenu Poudlard dans cette froide fin d'Automne.
Dans la tour Gryffondor, la chambre était calme. Les rayons du soleil déjà haut dans le ciel, éclairaient largement la pièce. On pouvait y voir danser les grains de poussière.
Les lits à baldaquins étaient alignés. Un seul avait encore les rideaux tirés. A l'intérieur, Harry était allongé, les yeux grands ouverts. Il n'aurait pas pu dire depuis combien de temps il était là. Il fixait le haut de son lit, alors que les évènements récents se bousculaient dans sa tête.
La veille au soir, McGonagall lui avait demandé de l'accompagner jusqu'à la bibliothèque. Là, il avait découvert le corps de Cho Chang, sa petite amie depuis quelques semaines. Le choc fut tel pour le jeune sorcier qu'il ne se souvenait plus de grand chose ; comme si sa mémoire tenait à conserver en tête cet événement tragique. Harry avait serré le corps de Cho contre le sien en hurlant de douleur.
Au bout d'un certain temps, Dumbledore l'avait emmené dans son bureau. Harry n'avait pas voulu partir, mais la poigne du directeur avait été pressante. La conversation qui s'ensuivit avait été longue, mais seuls quelques paroles lui restaient en mémoire.
_Je suis profondément désolé, lui avait dit le directeur. Je suis moi-même très attristé par la mort de Mademoiselle Chang.
Harry se souvint l'avoir regardé droit dans les yeux à ce moment-là. Dumbledore avait l'air d'un vieillard qui a vu trop d'horreurs dans sa vie et ses yeux gris semblaient refléter sa propre tristesse.
_Ses parents ont été tués il y a quinze ans, avait reprit le directeur. Tout comme toi, elle était orpheline dés son plus jeune age et j'avais accepté de devenir son tuteur légal.
Sur le moment, Harry n'avait pas vraiment entendu les paroles de Dumbledore, mais maintenant qu'il se les remémorait, il en mesurait toute l'ampleur. Le vieux sorcier venait de perdre une personne qu'il considérait comme sa propre fille, et il avait essayé de le consoler.
Les yeux d'Harry se mouillèrent à nouveau. Dumbledore devait ressentir une peine bien supérieure à la sienne, et pourtant il en avait fait abstraction pour lui parler.
Il ignorait comment il était parvenu jusqu'à son dortoir, mais Harry se souvint de l'étreinte chaleureuse d'Hermione et de Ron qui avaient été informés. Il s'était allongé et avait sombré dans le sommeil quelques heures plus tard. Ses cauchemars avaient été violents et à son réveil, des images de Cho s'étaient imposées à son esprit, provoquant de nouvelles larmes : sa silhouette, son visage, son sourire, ses yeux et… son corps étendu sur le sol de la bibliothèque sous la lourde cape de Dumbledore.
Il avait entendu ses amis sortir de la chambre, mais il n'avait pas bougé. Il n'avait pas eu le courage d'affronter le regard compatissant de tous les élèves, une fois qu'ils auraient été informés. Harry était resté là, dans son lit, abattu.
Deux jours passèrent ainsi. Harry ne sortait pas de sa chambre et évitait ses amis. Ces derniers n'osaient d'ailleurs pas le déranger. Lorsqu'il avait eu faim, il avait enfilé sa cape d'invisibilité pour se rendre à la cuisine où Dobby lui avait réservé un accueil triomphal.
_Bonjour Harry Potter ! avait-il hurlé en voyant apparaître le jeune sorcier.
Harry s'était efforcé de sourire.
_Bonjour Dobby. Est-ce qu'il est possible d'avoir de quoi manger un peu.
_Bien sûr Monsieur !
Et sur ces quelques mots, les elfes avaient apporté différents plats. Harry s'était installé dans un coin pour manger silencieusement.
Au bout d'un petit moment, Dobby s'était avancé vers Harry. Il portait toujours son cache-théière comme un chapeau, mais il avait des chaussettes différentes, dont les couleurs juraient avec le pull que Ron lui avait cédé le noël précédent.
_Vous savez Monsieur, avait dit doucement l'elfe de maison, des malheurs arrivent tous les jours mais la vie continue.
Harry l'avait regardé tristement.
_J'espère seulement qu'Harry Potter retrouvera la joie de vivre qu'il avait.
Il s'était éloigné sans qu'Harry puisse lui répondre. Le jeune sorcier avait regagné sa chambre sous sa cape d'invisibilité.
A présent, sur son lit, il pensait au paroles si vraies de Dobby. Il ne pouvait pas continuer à se laisser aller ainsi. Il fallait qu'il se ressaisisse.
Peu à peu, la tristesse qui l'avait coupé du monde ces deux derniers jours, laissait place à la résignation. Ce qui était arrivé ne pouvait pas être changé. Un seul sentiment ne variait pas : la haine. Harry haïssait celui qui avait lâchement assassiné Cho, et il se promit de la venger. C'est cet esprit de vengeance qui l'aiderait à tenir. La volonté du jeune sorcier était scellée et ses yeux étaient à présent aussi secs que la pierre.
Harry se leva et s'habilla. Le soleil était en train de se coucher et la pénombre gagnait la chambre. Le sorcier passa devant son miroir et constata un changement sur son visage. Son regard était sérieux et sévère. La peine et la colère devaient y être pour beaucoup, la mort de Cho avait laissé sa marque sur lui. Une marque indélébile. Harry avait perdu son innocence.
Sans savoir pourquoi, il voulut se transformer en lion. Il ferma les yeux et se concentra. Rien ne se produisit. Il réessaya. En vain. Vexé et énervé, il détourna son regard du miroir et descendit vers la Salle Commune. Là, Hermione et Ron se tenaient silencieusement devant la cheminée. Ils se retournèrent au bruit des pas de leur ami.
_Bonjour, fit Harry.
_Comment vas-tu ? demanda maladroitement Ron.
_Je vais mieux. Merci.
Les trois amis restèrent muets pendant quelques minutes.
_Tu as changé, finit par dire Hermione.
Son ton était direct et elle avait l'air inquiet. Harry savait qu'il ne pourrait pas cacher ses sentiments à ses amis.
_Je veux me venger, leur répondit-il sur le même ton qu'Hermione. Ma haine est trop importante pour que je la garde.
Ses deux amis le regardèrent. Ils semblaient choqués.
_Je ne sais pas ce que je ressens, tenta d'expliquer Harry. Je suis toujours malheureux, mais je ne veux pas que ce crime reste impuni. Paradoxalement, je me sens très calme et j'ai l'impression que ma colère ne se manifestera que lorsque j'aurai trouvé le responsable. Je suis serein.
Il regarda Hermione et Ron et esquissa un sourire disant qu'il était toujours le même, mais que personne ne pourrait, le moment venu, l'empêcher de se venger.
_Tu me fais penser à… ,dit Ron.
Il était hésitant.
_A Dumbledore, continua Hermione.
A ces mots, Harry sourit, confirmant les pensées de ses deux amis. Sa vraie force semblait dévoilée. Sa sérénité et son calme laissaient soupçonner une détermination et une puissance immenses.
_Quel jour sommes-nous ? demanda Harry qui ne voulait surtout pas s'éterniser sur cette conversation.
Il avait perdu toute notion de temps depuis la tragédie d'Halloween.
_On est lundi, répondit Ron. Hermione a pris les cours pour toi.
Cette dernière lui tendit un paquet de parchemins soigneusement enroulés d'une ficelle.
_Merci, répondit Harry. Vous pensez à tout.
Ses amis lui sourirent. Après quelques minutes, ils se dirigèrent vers la Grande Salle. Mais avant d'entrer, Hermione arrêta Harry.
_Toute l'école a été mise au courant de… la mort de Cho.
Son ton ne cachait pas sa tristesse. Cette mort l'affectait beaucoup.
_Et Dumbledore a ordonné le deuil jusqu'à l'enterrement qui aura lieu après- demain. Il nous a expliqué qu'elle était orpheline.
_Bien, dit Harry. Allons-y.
Les murs de la salle étaient couverts de drapeaux blancs. Harry en déduisit que ça devait être la couleur du deuil dans le monde des sorciers.
A leur entrée, tous les élèves tournèrent les yeux vers Harry. La majorité d'entre eux étaient compatissants et avaient encore les yeux rougis d'avoir trop pleuré, mais presque tous les Serpentards affichaient une passivité absolue. Harry présentait une sérénité bien connue de tous les habitués de Poudlard. Les élèves lui sentaient une aura particulière et certains se sentaient rassurés après son passage. La ressemblance avec Dumbledore, ou plutôt avec son charisme, était flagrante pour tous.
Dans le silence général, Hermione, Ron et Harry s'installèrent à leur table. Après quelques minutes de murmures et de chuchotements, les discussions reprirent entre les élèves. Harry, quant à lui, ne disait rien. Devant les regards inquiets de ses deux amis, il mangeait en silence. Ce ne fut qu'à la fin du repas qu'il redressa la tête pour sourire à ses amis.
_Vous êtes-vous entraînés ces derniers jours ? demanda-t-il.
Hermione et Ron étaient ravis de pouvoir enfin engager une conversation.
_Nous avons travaillé toute la journée de dimanche, répondit fièrement Ron.
_Mais nous ne sommes parvenus encore à aucun résultat, ajouta Hermione, manifestement mécontente.
Harry la regarda en souriant.
_C'est normal que vous mettiez un certain temps pour y arriver, lui dit-il. Vous avez des cours qui vous empêchent de travailler, alors que moi j'ai pu m'entraîner tous les jours pendant un mois.
Hermione semblait rassurée.
En regardant autour de lui, Harry constata que la majorité des personnes présentes le regardait d'un air compatissant. Certains fondaient en larme à sa vue, d'autres se contentaient de lui sourire d'une manière encourageante ou tristement. Face à cela, Harry baissait les yeux, ne sachant pas comment réagir à cette sympathie.
La fin de la soirée arriva bien vite et bientôt chacun se retrouva au lit, cherchant le sommeil du mieux qu'il pouvait.
Le lendemain, Harry était en cours de Défense Contre les Forces du Mal lorsque McGonagall entra dans la salle.
_Excusez-moi Professeur Black. Puis-je vous emprunter Monsieur Potter pendant quelques minutes s'il vous plaît.
Sirius lui sourit tristement.
_Bien entendu Professeur.
Harry se leva et accompagna la directrice des Gryffondors. Elle avait regagné son air sévère et sérieux, mais lorsque Harry la fixa, ce fut un regard compatissant qui lui fut rendu.
_Comment allez-vous Harry? demanda-t-elle.
Son ton était monocorde et Harry se rendit compte que la mort de Cho avait affecté beaucoup plus de personnes qu'il ne l'avait cru.
Il lui sourit de son mieux après lui avoir dit qu'il allait à peu près bien.
Après avoir déambulé ensemble pendant quelques minutes à travers les couloirs de Poudlard, McGonagall s'arrêta devant une gargouille et regarda le jeune sorcier.
_Vous avez changé, lui dit-elle très directement, à la grande stupéfaction d'Harry.
Son professeur de Métamorphoses n'affichait pas souvent ses sentiments et ses impressions.
_Je sais Professeur, lui répondit-il. On me l'a déjà dit. Hermione et Ron m'ont dit que je ressemblais à…
Harry hésita. Il ne savait pas s'il devait dire cela à McGonagall. Elle pourrait prendre cela pour de la vanité. Mais la franchise que la directrice des Gryffondors avait affichée quelques minutes auparavant décida Harry.
_Mes amis m'ont dit que je ressemblais au Professeur Dumbledore, continua-t- il en regardant McGonagall dans les yeux.
Subitement, il se mit à penser à Cho et à son meurtrier. Instantanément, sa colère et sa volonté de vengeance refirent surface, attisant un brasier secret au plus profond de son âme. McGonagall le regarda et vit cette flamme dans ses yeux, cette flamme qu'elle avait déjà vue dans les yeux de Dumbledore lorsque celui manifestait une colère profonde.
Les colères de Dumbledore, aussi rares soient-elles, étaient concentrées. Dans ces cas-là, le vieux sorcier se contrôlait parfaitement et ses paroles étaient chargées d'une volonté inflexible.
_Vos amis ont raison, dit-elle simplement à Harry.
Ce dernier sourit machinalement. Venant de la part de ses amis, cette comparaison à Dumbledore lui faisait plaisir, mais venant de McGonagall, il prenait cela pour une grande marque de respect.
_Rabougri ! dit-elle pincée en s'adressant à la gargouille d'un air entendu. Elle n'était pas du genre à apprécier l'usage de tels mots de passe.
La statue pivota, libérant un passage qui menait au bureau du directeur.
_Ah ! Bonjour Harry ! Je t'en prie, assieds-toi.
Harry s'exécuta et observa cette pièce qui le fascinait tant, alors que Dumbledore échangeait quelques mots avec McGonagall.
Ce lieu si spécial n'avait pas changé. Les anciens directeurs du collège dormaient toujours dans leur cadre. Sur une étagère, à côté du tabouret où trônait le choixpeau magique, Harry reconnut sans mal la pensine de Dumbledore ainsi que l'épée de Godric Gryffondor. C'est cette épée qui lui avait permis de tuer le basilic dans la Chambre des Secrets, trois ans auparavant.
L'épée de mon ancêtre, pensa-t-il.
C'est à ce moment-là que Fumseck, le phœnix du directeur, se posa sur ses genoux.
_Bonjour Fumseck, lui dit doucement Harry. Comment vas-tu ?
Le magnifique oiseau rouge et or répondit par un son plaintif qui déchira le cœur d'Harry. La note libérée par le volatile était si pure, que tous les souvenirs qu'il refoulait depuis deux ou trois jours s'imposèrent à son esprit. Ses yeux se mouillèrent.
_On ne peut rien te cacher à toi, murmura-t-il au phœnix en lui caressant la tête.
Il s'essuya avec sa manche.
_Alors Harry ? demanda Dumbledore alors que McGonagall quittait la pièce. Comment te sens-tu ?
_Je vais mieux Professeur, merci.
Dumbledore le regarda en lui souriant chaleureusement.
_En es-tu si sûr ?
Harry savait qu'il essayait de le percer à jour, mais le jeune sorcier soutint son regard.
_Manifestement, oui, ajouta Dumbledore. Qu'as-tu l'intention de faire ? lui demanda-t-il le plus sérieusement du monde.
Le visage de Cho ne le quittait pas.
_Je veux la venger, répondit simplement Harry.
_Tu veux la venger ou te venger ?
Le regard de Dumbledore était perçant.
_Pour moi, cela ne fait aucune différence, avoua Harry.
Un long silence s'instaura entre les deux sorciers. Dans le calme absolu, le temps s'était arrêté et un long dialogue muet semblait s'échanger.
_Tu ne m'as pas habitué à autant de franchise, finit par dire le directeur.
Harry sourit.
_Je sais Professeur. Mais tout le monde me dit que j'ai changé.
_C'est ce que je constate. Tu sembles plus résigné et surtout plus… hargneux.
Harry ne dit rien. Ce n'est pas vraiment ainsi que ses amis l'avaient décrit. Mais peu lui importait en fin de compte. Une foule de questions se bousculait dans son cerveau, et c'est le mot "pourquoi ?" qui revenait le plus souvent. Ce n'est plus au corps étendu de Cho qu'il pensait, mais aux nombreuses ballades qu'ils avaient faites ensemble, à leurs baisers, à son sourire.
Une larme coula sur sa joue et s'écrasa sur le sol.
_Pourquoi ? Pourquoi est-elle morte ?
Dumbledore s'assombrit. De nombreuses rides apparurent sur son front.
_Je l'ignore Harry. Elle était là au mauvais moment. Madame Pince m'a dit qu'elle était partie plus tôt de la bibliothèque, à cause du banquet d'Halloween. Cho a dû être enfermée sans s'en rendre compte.
Harry ravala sa douleur et se mit à réfléchir. Le meurtrier devait chercher quelque chose.
_Des livres ont-ils disparu ? demanda-t-il.
_Non Harry. De nombreux ouvrages de la réserve étaient sur le sol, mais aucun ne manquait.
_Ce n'est pas logique, dit le jeune sorcier pour lui-même.
_Ecoute Harry, je souhaite au moins autant que toi retrouver cet assassin. Tu connais les liens qui m'unissaient à Cho. Je veux aussi qu'on sache qu'on ne peut pas tuer un élève dans mon école et s'en sortir impunément.
Harry vit dans les yeux de Dumbledore cette volonté qui forçait son admiration. Le sorcier semblait dissimuler une colère et une tristesse infinies.
_Mais malgré cette tragédie, je refuse que la panique s'empare des élèves.
Harry semblait réaliser ce que venait de dire le directeur.
_Vous voulez dire que personne ne sait que c'est un élève qui a tué Cho ? demanda-t-il presque choqué.
_Mais pourquoi en es-tu si sûr ? Nous ne savons pas de quoi elle est morte, et si c'est d'un Avada Kedrava, peu d'élèves sont capables de lancer un tel sortilège.
_Malefoy sait parfaitement le faire, rétorqua Harry.
Il était hors de lui, mais peu à peu face au silence de son mentor, il se rendit compte que sa haine l'avait aveuglé.
_Cela ne prouve strictement rien, répondit Dumbledore. Ce que je veux te faire comprendre Harry, c'est que tu ne dois pas te laisser emporter par ta colère. On ne construit rien sur un sentiment de haine ou une volonté de vengeance. Et puis même si je suis d'accord avec tes soupçons, nous n'avons aucune preuve.
Harry comprenait.
_Je vais t'autoriser à faire une enquête Harry, lui dit le directeur. Mais je veux que tu analyses chaque élément et non que tu partes d'un a priori. Je veux donc que tu oublies toutes tes rancœurs et que tu chasses ton amertume.
Harry n'en revenait pas. Il était autorisé à faire une enquête sur les circonstances de la mort de Cho.
_Merci Professeur. C'est exactement l'autorisation dont j'avais besoin.
Depuis la nuit d'Halloween, c'était la première fois que Harry se sentait libéré d'un grand poids. Sa haine, sa colère et son désir de vengeance s'étaient effacés. Il ferma les yeux et sourit devant un directeur satisfait. Le jeune sorcier rouvrit les yeux et regarda son maître. Son visage semblait lavé et ses yeux pétillaient à nouveau.
_Je vais avoir besoin d'un laisser passer pour travailler dans la réserve de la bibliothèque, dit-il.
_J'y ai pensé, répondit Dumbledore. Madame Pince est avertie et tu pourras t'y rendre aussi souvent que nécessaire. En revanche, ta discrétion doit être absolue.
Harry lui sourit. C'était un sourire sincère et chaleureux. Il se leva.
_Merci Professeur. J'ai l'impression de revenir de loin. Je crois que je m'étais éloigné de moi-même. C'est sûrement à cause de cela que je ne parvenais plus à me métamorphoser.
_Un animagus doit être fidèle à lui-même s'il veut pouvoir se transformer. Au fait, je ne crois pas t'avoir déjà vu en lion. Cela te dérange-t-il d'essayer à nouveau devant moi ?
_Absolument pas Professeur.
Il ferma les yeux et se concentra. Aussitôt, il se mit à quatre pattes. Il rouvrit les yeux et constata à la mine mi-amusée mi-admirative de Dumbledore qu'il avait réussi. Il se retransforma en homme et sourit à son directeur.
_Merci encore, dit-il avant de partir. Vous m'avez été d'un grand secours.
C'est le cœur soulagé qu'il rejoignit la salle de cours de Défense Contre les Forces du Mal. Il s'assit au fond de la classe, et affronta le regard étonné de Sirius et de ses amis. Il se sentait bien. Il était toujours malheureux, mais il était débarrassé de sa haine destructrice. Son but n'était plus la vengeance, mais la découverte de l'assassin. Après…
Après, on verra, pensa-t-il.
Il se sentait vraiment serein à présent. C'est plongé dans ses pensées, qu'il se surprit à considérer une phrase de Dumbledore.
_Ainsi, l'héritage ne se légue pas par le sang, mais par le caractère, avait-il dit en parlant de l'héritier de Gryffondor.
Et si Dumbledore était cet héritier ? Après tout, Harry s'était toujours senti en phase avec lui et si l'héritage se faisait par le caractère, l'hypothèse était loin d'être invraisemblable.
Ce fut Ron qui le tira de sa réflexion.
_Harry ? Est-ce que ça va ?
_Hm ? Oh ! Oui Ron. Ca va très bien.
Harry regarda autour de lui et constata qu'Hermione aidait les autres élèves à faire un patronus. Sirius s'approcha de lui.
_Comment vas-tu ? demanda-t-il gravement alors que Ron se dirigeait vers un groupe en difficulté.
_J'ai eu un gros passage à vide, mais à présent je vais beaucoup mieux. Merci.
Il sourit à son parrain et ce dernier s'en trouva rassuré.
_Pendant un petit moment, Dumbledore et moi avons craint que ta peine t'entraîne vers une haine aveugle.
_Ce fut le cas, répondit Harry. Et c'est grâce à Dumbledore que je ne suis pas allé plus loin dans ma folie. J'aurais sans doute commis des erreurs irréparables.
Sirius le regarda. Quelques années plus tôt, c'était lui qui avait été pris d'une rage meurtrière. Le meurtre des parents d'Harry l'avait tellement désespéré qu'il avait essayé d'assassiner le responsable, Peter Pettigrow.
_C'est bien que tu ailles mieux, lui dit simplement Sirius.
Harry lui sourit d'un air entendu. Il savait à quoi avait pensé son parrain. Il se leva.
_Je vais aider les autres élèves, lui dit-il.
_Je vais bientôt être inutile si vous continuez à me seconder comme ça, répondit Sirius en riant.
La journée poursuivit son cours. Cette nuit-là, les élèves se couchèrent tôt car l'enterrement de Cho était prévu le lendemain.
A son réveil, Harry trouva un uniforme blanc au pied de son lit, sans doute laissé par les elfes de maison. Il constata que chacun était dans le même cas. Il s'habilla donc et se dirigea vers la Grande Salle ornée des couleurs du deuil pour sa dernière journée. Un moldu aurait pensé qu'il y avait un mariage dans la journée pour que chacun s'habille ainsi. Mais dans le monde des sorciers, le blanc était la couleur du deuil, de la tristesse mais aussi du respect, et on pouvait considérer les enterrements comme un dernier hommage à la personne décédée.
A son arrivée dans la Grande Salle, Harry s'aperçut avec étonnement qu'il n'était pas le premier élève à s'être levé. En effet, la majorité des élèves de Serdaigle était présente. Cho avait été une excellente camarade pour chacun d'eux et de nombreuses personnes pleuraient. Harry s'assit sans les regarder. Il mangea sans appétit alors que ses souvenirs l'envahissaient et il ne put réprimer de nouvelles larmes.
Les élèves entraient peu à peu, mais le silence était total. Même les Serpentards ne disaient rien devant les visages attristés. On n'entendait que le bruit des couverts sur les assiettes d'or. Au bout de quelques instants lourds, Dumbledore se leva. Il portait une grande robe blanche, assortie d'une cape de la même couleur. Son visage était triste et il semblait avoir perdu son énergie. A cet instant, le directeur de Poudlard semblait plus faible que n'importe qui.
_Que ceux qui désirent assister à l'enterrement m'attendent devant l'entrée du château. Les autres peuvent rejoindre leur Salle Commune.
Tous les élèves se levèrent et ceux qui n'avaient pas voulu assister à la cérémonie n'osèrent pas s'en aller. Toujours dans le silence le plus total, chacun se dirigea vers les immenses portes de l'école. Les différentes maisons se mélangèrent. Aujourd'hui, il n'y avait plus de distinction, ni même de rivalité. Les professeurs se mêlaient aux élèves et les Serpentards se tenaient près des Gryffondors. Il n'y avait plus que la tristesse et le deuil.
Habituellement, la tradition voulait que la famille du décédé dirige le cercueil de verre grâce à un sortilège de lévitation. Là, ce fut Dumbledore qui mena le cortège jusqu'aux jardins de Poudlard, où un cimetière était caché derrière de gigantesques haies fleuries. Le vieux sorcier murmura quelques formules connues seulement de lui, et un passage se libéra.
Contrairement aux cimetières moldus qu'Harry avait pu voir dans sa jeunesse, les tombes n'étaient pas représentées par des croix, mais par des monolithes blancs où étaient incrustés les baguettes du sorcier enterré. L'intérieur du cimetière de Poudlard devait avoir subi de nombreux sortilèges car le cortège entier put y entrer, alors que personne n'avait jamais soupçonné un tel espace dans les jardins.
Lorsqu'il fut entré, Harry constata que les tombes étaient organisées autour de quatre monolithes d'une taille plus importante. Lorsque les élèves passèrent devant ces grandes stèles verticales, chacun put lire les noms des fondateurs de Poudlard. Contrairement aux tombes individuelles, Harry remarqua l'absence de toute baguette magique incrustée. Ce détail apparemment insignifiant pour la majorité des élèves n'échappa pourtant pas à un autre qu'Harry.
Le cortège s'arrêta devant un emplacement vide. La tombe de Cho était prête à recevoir son corps. A travers le cercueil de verre, Harry pouvait voir le visage paisible qu'avait gardé la jeune sorcière. Ses mains se rejoignaient sur son ventre et on pouvait avoir l'impression qu'elle allait se réveiller d'un moment à l'autre. Malgré son absence de vie, le corps de la jeune fille avait conservé toute sa beauté.
Après avoir placé le cercueil dans la tombe, Dumbledore se retourna vers les élèves et les professeurs.
_Cho Chang fut orpheline à l'age d'un an, j'ai accepté alors de devenir son tuteur. Aujourd'hui, en plus de perdre une élève, je perds une personne que je considérais comme ma propre fille. Je l'ai vue grandir pendant quinze ans, et pendant quinze ans, je me suis enrichi de sa présence. Pour certains, elle était une élève exemplaire, pour d'autres une amie hors du commun. Pour tous ceux-là, sa compagnie était réconfortante et son sourire réchauffait les cœurs.
A ces mots, Harry sentit le sien se serrer. Il entendait de nombreuses personnes pleurer et crut voir une larme couler sur la joue de Dumbledore. Il fit une pause de quelques secondes durant lesquelles chacun eut l'impression d'être dévisagé par le vieux sorcier.
_Les circonstances de sa mort restent à ce jour mystérieuses, mais je jure qu'elles ne seront pas impunies.
La tristesse l'avait quitté. Il redevint, sous les yeux de tous, le puissant sorcier qu'il était. Sa force et sa volonté semblaient irradier de son corps.
Dumbledore se tourna vers la tombe et prononça quelques formules. Progressivement, alors que le monolithe blanc sortait du sol, la tombe se combla de terre, ensevelissant le cercueil de Cho pour l'éternité. La baguette magique de la jeune fille trouva son dernier emplacement.
A cet instant, l'équipe de Quidditch de Serdaigle décolla, pour offrir à son attrapeuse un hommage digne de son talent, marquant ainsi le ciel de son regret. Après leur atterrissage, des milliers de hiboux s'envolèrent en même temps. De nombreuses plumes dansaient dans les airs, jouant avec le vent, avant de se poser sur la nouvelle tombe du cimetière. Quelques élèves se recueillirent en silence, tandis que d'autres déposaient des fleurs au pied de la grande stèle. Certains avaient même confectionné quelques présents en souvenir de la jolie brune. Mais peu à peu, les élèves et les professeurs rentraient vers le château.
Sous une pluie naissante, Harry se tint un moment seul devant le monolithe.
_C'est bizarre de ne plus te voir tous les jours, commença-t-il. Tu sais, j'ai failli faire des bêtises en ton nom mais Dumbledore m'a remis dans le droit chemin. Il m'a permis d'enquêter sur ta mort. Sois tranquille, Cho, repose-toi maintenant. Je trouverai ton assassin, je te le promets.
Harry se tut quelques instants. La pluie commençait à battre fortement.
_Tu me manques, murmura-t-il dans un sanglot. Tu ne peux pas savoir à quel point tu me manques.
Il toucha le monolithe du plat de la main. Il était fait d'une matière qu'Harry ne connaissait pas et n'était pas froid comme la pierre.
Harry s'essuya le visage et tenta un sourire.
_Il est possible que je vienne te voir de temps en temps. J'imagine que Dumbledore ne me refusera pas cette faveur. Adieu mon cœur.
_Orchideus, ajouta-t-il après avoir sorti sa baguette.
Un superbe bouquet de fleurs apparut alors. Ce sort, c'est Ollivander qui le lui avait montré l'année précédente après avoir vérifié la baguette de Fleur Delacourt.
Harry déposa le bouquet près du monolithe.
_A bientôt.
Il se dirigea alors vers le sombre édifice qu'était devenu Poudlard dans cette froide fin d'Automne.
