(Introduction) Arrangement


Il avait remarqué que le vieil homme avait fini. Il sentait son regard. Mais il ne souhaitait pas lui donner le plaisir de lui montrer qu'il avait repéré. Il était étudié. Tant mieux dans un certain sens. Il fallait bien laisser le vieux fou faire s'il voulait protéger Lily.

Alors il lisait, en attendant que le directeur l'engage à faire à nouveau attention à lui. Il avait été invité dans ce bureau. Donc il s'était mis à son aise. La vision de ses souvenirs pouvait prendre beaucoup de temps.

Ne serait-ce que le combat à la sortie de leurs études prenait près de vingt minutes. Il avait laissé au vieil homme de quoi s'occuper. Il ne savait pas ce qu'il fallait pour que le sorcier le croie. Mais il avait besoin de cette confiance. Il avait besoin de protéger Lily.

Rien d'autre n'importait, même sa propre dignité. Il était prêt à se mettre nu devant l'un de ceux qu'il aimait le moins pour aider son amie, même si elle avait rompu cette amitié. Après tout, c'était tout de même sa faute à l'origine.

Il se cachait encore derrière son bouclier cependant. Il venait de montrer une partie de sa vie à l'homme. Il ne comptait pas encore lui montrer tous les sentiments qui l'assaillaient sur le moment. Il lui avait déjà permis sur la colline.

Il s'était calmé. Il s'accrochait à ce peu d'espoir que le vieux fou le croit. La lecture aidait. Un vieux livre trouvé dans le bureau que les directeurs se passaient de génération en génération. Le livre était en parfait état, semblait même récent.

Mais Severus était bon en enchantement. Il était bon pour beaucoup de choses. Ce livre, comme beaucoup de choses dans ce bureau, avait des sortilèges de protection. Le temps et la poussière ne devaient pas endommager ces choses.

Lorsque le directeur émergea, il l'ignora. Royalement. Il voulait plus que tout aider Lily. Mais il avait aussi de fort ressentiment envers le vieil homme. Cet homme était celui qui avait permis aux Maraudeurs de le martyriser si longtemps.

Finalement, c'était la faute de cet homme s'il avait rejoint la cause du Seigneur des Ténèbres. Pendant un instant, il se demanda si le vieux sorcier l'avait fait exprès. Mais il refoula cette idée, c'était ridicule. Ça l'était, non ?

« Severus,… nous avons à parler. »

Lorsque Severus accorda son attention au directeur, celui-ci était déjà assis dans son grand fauteuil. Severus l'observa. Il se rappela que dans la grande salle de réfection, le directeur était dans un trône. Le Seigneur des Ténèbres était-il vraiment le seul et le plus grand mégalomane ?

Severus ne savait pas comment Dumbledore était arrivé dans ses postes et conditions. Il savait juste que le sorcier avait déjà battu le célèbre Grindelwald. Mais était-il besoin d'être dans le camp mauvais pour être imbu de pouvoir ? Et combattre pour la lumière signifiait-il être un homme bon ?

Assurément non. Severus n'en était pas un. Et pour Lily, il était prêt à changer de camps et à se battre jusqu'au bout pour ce qu'elle jugeait comme bon. Quoi qu'ait fait Dumbledore pour avoir ses distinctions, cela ne sentait pas bon du point de vue du jeune sorcier.

Il prit le ton le plus froid et glissant qu'il pouvait. « Êtes-vous convaincu ? »

« Ne prends pas ce ton avec moi, mon garçon. Tu restes un mangemort et un criminel. Je pourrais te jeter à Azkaban pour tes actes. Il suffirait de soulever ta manche, et de montrer la fin de ton souvenir du combat contre les Maraudeurs. Celui où tu emploies l'endoloris. »

Severus grimaça au ton dur de Dumbledore. Plus particulièrement à l'évocation de l'utilisation de cet impardonnable. Il jugeait que Sirius l'avait mérité finalement. Mais il avait sali sa propre magie en le lançant. Sirius ne valait pas la peine qu'il se salisse finalement.

« Que vais-je faire de toi mon garçon, peux-tu me le dire ? » Dumbledore se prenait la tête dans les mains.

« Ce qu'il faudra. Tout ce qu'il faudra pour que Lily soit en sécurité. »

« Voldemort sait-il pour ton retournement ? »

« Non, je vous l'ai dit. Il ne sait rien de notre rencontre. Et il a accepté de l'épargner, mais elle le refusera. Elle s'interposera, et il la tuera. »

« As-tu une proposition ? »

« C'est à moi que vous demandez ? À moi ? Alors que vous êtes le supposé chef de la lumière, le plus grand sorcier de son temps. Mais votre temps est révolu, n'est-ce-pas. »

« Cela suffit ! Vous êtes dans les confidences du Seigneur des Ténèbres. Vous savez mieux que quiconque ce qu'il prévoit. Ou comment il agirait. Vous n'êtes pas idiot. Je suis certain que vous pouvez être utile si vous cessez de demander et que vous agissez. »

Severus lança un de ses regards les plus noirs, renfrogné. « S'il est si utile que je le connaisse, que je sache ses plans, que je sois dans ses soi-disant confidences… autant le rester. »

« Tu viens demander mon aide, et lorsque je songe à te l'accorder, tu oses te retourner ? » tonna le vieux et puissant sorcier.

Severus renifla son dédain. « Non. Non, je ne le fais pas. Je ferais tout, jusqu'au bout pour protéger Lily. Mais si le Seigneur des Ténèbres me prend pour un traître, finalement j'aurai moins d'utilité. Vous l'avez dit, je suis un mangemort. C'est un avantage et un désavantage. Vous n'avez jamais été aussi près du Seigneur des Ténèbres. Je peux vous fournir les informations dont vous avez besoin. Mais je dois rester auprès de lui pour cela. Je peux être vos yeux et vos oreilles au plus proche du Seigneur des Ténèbres. Je peux vous apporter tout ce que vous voudrez. Mais il faut protéger Lily. »

Dumbledore réfléchit pendant un moment. L'occasion était belle. La proposition inespérée. Mais les risques inconsidérés.

« Voldemort se vante d'être le plus grand legilimens de notre époque. Capable de rivaliser avec moi. Il saura que vous n'êtes plus avec lui. Alors vous mourrez. »

Severus ricana. « Oh, non, il n'en saura rien. Vous n'êtes pas aveugle, Dumbledore. »

« L'occlumancie ? Croix-tu pouvoir le berner avec ce tour ? »

Severus ne prit pas la peine de s'offusquer au terme employé. Il se contenta de regarder le directeur dans les yeux. « Capable de rivaliser avec vous ? Dites-moi, Albus, que voyez-vous en moi. Que voyez-vous, maintenant. »

Dumbledore soupira. Rien. Un mur. Severus était capable de lui bloquer ses pensées. « Il se méfiera. S'il ne peut rien percevoir, il saura qu'il y a un problème, il ne supportera pas que vous lui cachiez des choses. Et il vous prendra pour un ennemi dangereux s'il s'aperçoit que vous pouvez rivaliser avec lui sur ce domaine, qui représente l'une de ses forces, et un de ses moyens d'inspirer la peur parmi ses plus fidèles disciples. »

« Bien. Alors je peux peut-être faire plus. L'occlumancie ne se contente pas d'instaurer le calme, la sérénité et une protection contre les émotions, les pensées ou les souvenirs. Si besoin est, je peux les modifier. »

« Te crois-tu si puissant mon garçon ? »

« Ai-je même le choix, Albus ? »

Le regard de Severus était cinglant. Il avait déjà pris parti. S'il ne parvenait pas à cacher ou maquiller les choses, même si Dumbledore lui refusait finalement sa confiance, il était déjà perdu du côté de Voldemort. La seule autre option était la fuite, et de se cacher. Ce qui évoquait encore plus profondément la trahison.

« Non, vous ne l'avez pas. » déclara le directeur d'un ton dur. « Vous n'aviez plus aucun choix à partir du moment où vous êtes allé vers lui, et où vous avez accepté la marque. »

« Si vous le prenez comme ça, sachez que je n'avais déjà plus le choix. » ricana le jeune sorcier.

Dumbledore haussa un sourcil, souhaitait une explication. Severus lui refusa. « Qu'importe. » déclara-t-il en détournant le regard du vieil homme. Et tout legilimens qu'il fut, l'homme ne put rien obtenir.

À vrai dire il n'essaya même pas réellement. Avec le niveau d'occlumencie du jeune homme, tout ce qu'il obtiendrait serait de se mettre à dos son meilleur nouvel atout.

« Bien. Dans ce cas, les possibilités sont faibles. »

« Vous n'avez pas dit si vous me faisiez confiance. Ou si vous me croyez. » coupa Severus. Il avait besoin d'une réponse, maintenant.

Dumbledore soupira. « Je n'ai pas encore rencontré de repentant aussi sincère que toi. Et ceux qui n'ont pas connu cet enfer ne peuvent pas vraiment être aussi sincères non plus. Je m'en remettrais à toi. Oui, je pense que je te fais confiance. À y réfléchir, au vu de la situation, de la manière dont chacun est venu vers moi, tu es peut-être celui qui mérite le plus ma confiance. Je te crois, Severus Snape. »

Le jeune sorcier parut choqué et surpris par la déclaration. Il n'aurait jamais espéré ou pensé autant. Malgré ses boucliers montés à bloc, son expression fut visible. Le choc était réel.

Non seulement le fou le croyait, mais il le prenait pour en quelque sorte le plus fidèle de ses suivants ? Alors qu'il ne lui avait même pas promis sa fidélité ? Ne lui avait même pas vraiment dit qu'il le rejoignait ?

Dumbledore attendit un petit temps que le jeune diplômé se ressaisisse. Ce qui ne prit pas beaucoup de temps, finalement. « Maintenant que ceci est éclairé. Je t'apporte la protection, et je te veux près de moi. Si tu joues au rôle d'espion auprès de Voldemort, il te faudra une couverture solide pour qu'il ne soupçonne rien sur ta présence régulière à mes côtés. Je reviens sur mon idée de rafraîchir les méthodes d'enseignement de potion. »

« Honnêtement, vieil homme, je ne suis pas qualifié pour ça. Me voyez-vous vraiment enseigner ? »

« Je sais que tu seras capable de permettre aux élèves d'apprendre un minimum de chose. Je soupçonne aussi ton tempérament et ta patience limitée pour ce que tu qualifierais de jeunes idiots. Mais cela ne permettra que plus de maintenir ta couverture. Voldemort ne s'attend certainement pas qu'un de ses mangemorts soit un gentil enseignant tout doux. »

Le directeur se pencha vers le jeune sorcier. « Soyons clairs, Severus, tu passes aisément pour un mage sombre. Il ne semblerait pas possible de te faire passer pour un homme bon, surtout pas facile, alors si tu dois rester près de Voldemort, ce n'est certainement pas le but. Je te fais aussi confiance pour être capable de discipliner une classe, de les effrayer et laisser voir ta noirceur sans leur faire le moindre mal. Parce que tu es un homme bon. Tu as fait des erreurs, tu as eu une vie qui t'a poussé à faire des mauvaises choses pour te protéger et te réconforter. Mais au fond, tu es un homme de bien. »

Il s'adossa dans son fauteuil, avec un grand sourire, prêt à rire. « Avec une quantité de défaut assez époustouflante, il faut bien l'avouer ! » Il regarda sereinement le futur enseignant. « Mais tu as une chose précieuse qui fait défaut à Voldemort. Tu as un cœur. Pas un cœur qui bat, mais un cœur qui aime. Soyons honnêtes. Ta vie est telle que s'il n'y avait pas eu de Seigneur des Ténèbres, tu aurais pu le devenir toi-même. Mais cet amour que tu as te ramènera finalement toujours vers la lumière. Cette seule qualité suffit à me faire dire que tu es bon. »

« Vieux fou ! Si c'était si simple. Tu cherches juste le meilleur chez les gens. Oublier 40 défauts pour 1 seule qualité n'est pas rationnel ! Comment peut-on être à un poste aussi important que le tien et être aussi naïf. »

« Tu vois, tu es déjà prêt à m'aider et à palier à mes erreurs. J'ai la conviction que nous ferons une merveilleuse équipe, Severus. »

« Nous verrons cela Albus. »

« Alors c'est décidé ! Je parlerais à Slugorn de sa retraite et de sa succession. Tu sais, il admirait vraiment ton talent quand tu étais étudiant. Il était juste très peiné que tu sois si solitaire, froid et il faut bien le dire, asocial et antipathique. »

« Je vais devoir parler de cela au Seigneur des Ténèbres. »

« Je suppose que tu ne cesseras pas de l'appeler ainsi. »

« Cela sonne mieux que tous ses autres surnoms. Et si je dois jouer le rôle d'espion à ses côtés, il vaut mieux que je garde l'habitude de présenter un profond respect pour lui. Mais non, si je suis proche des élèves, je ne pousserai jamais quelqu'un vers lui. Et je ne prononcerais ce nom que le moins possible. »

« Je vais aussi devoir te présenter à l'Ordre du Phénix. »

Severus blêmit. Ce qui vu sa pâleur originelle était un exploit. « Cela pourrait… mettre en danger ma condition. Avant de prendre la moindre décision à ce sujet, laissez-moi voir ce que je peux faire auprès du Seigneur des Ténèbres. Moins je lui cacherais de choses, mieux ce sera. »

Dumbledore fronça les sourcils, mais avant qu'il n'ait le temps de faire un commentaire, le jeune sorcier le devança. « Tu as placé ta confiance en moi Albus. Maintenant, tu dois l'accepter. »

Il ne comptait pas en dire davantage. Si l'homme lui faisait vraiment tant confiance, il devait accepter de le laisser gérer lui-même le Seigneur des Ténèbres. L'homme l'avait dit lui-même : nul ne connaissait mieux le sorcier noir que Severus dans le camp de la lumière.

« Je vais encore devoir apprendre quel est le plan du Seigneur des Ténèbres vis-à-vis des deux familles. Mais vous pouvez déjà les avertir. »

Il marqua une pause, ferma les yeux et respira. Il plongea ensuite son regard obsidienne dans les yeux clairs et pétillant du directeur.

« Cela dit, vous ne devez parler de moi à personne. Ne pas mentionner comment vous avez découvert les plans du Seigneur des Ténèbres ou quoi que ce soit qui pourrait me dévoiler. Pas un mot à quiconque. Même à Lily. »

Dumbledore acquiesça. « Vous avez un Seigneur à contacter, et moi deux couples nouvellement parents quoi pourrait entrer en deuil. »

A ces mots, les deux sorciers se séparèrent.