(Introduction) Le jour fatidique


Severus avait travaillé depuis le début de l'année avec son ancien professeur. Il ne faisait aucun doute qu'il était meilleur que l'homme pour préparer les potions, et c'était déjà le cas lorsqu'il était encore étudiant.

Mais il n'était pas aussi doué que lui pour être aimable avec les élèves. Slughorn déplorait la rudesse du professeur Snape. C'était devenu un homme froid et dure. Le plus jeune enseignant de l'histoire de Poudlard était un prodige, mais pas un être social.

Snape avait établi des règles pour ses élèves. Déjà, aucune baguette ne serait tolérée dans son cours. Du moins, tant que la potion ne l'imposait pas. Et il ne tolérerait pas une utilisation autre que pour ce que la potion demandait.

Il leur faisait ouvrir les manuels aux pages des potions, mais leur faisait apparaître au tableau des recettes assez différentes. Slughorn avait commencé à passer plus de temps à détailler le tableau qu'à surveiller les élèves.

Snape savait que la préparation des potions était dangereuse lorsqu'elle était mal faite, alors il imposait une discipline rude durant ses cours. Finalement, Slughorn l'avait comparé au professeur McGonagall. En moins aimable, bien sûr.

Snape se fichait des remarques de son ancien professeur vis-à-vis de ses capacités sociales. L'homme devait déjà savoir qu'il n'était pas doué pour ça.

Slughorn avait présenté Snape à ses Serpentards et leur avait dit que ce serait dorénavant lui qui veillerait sur eux. Les plus âgés l'avaient connu comme étudiant. Le voir maintenant comme enseignant leur paraissait étrange. Et ils le craignaient.

Snape avait en effet revêtu son masque le plus noir et austère. Il ne tolérerait pas le moindre écart de discipline. Il n'enlèverait pas de points aux Serpentard, pour leur permettre de gagner la coupe des quatre maisons.

Mais afin de s'assurer que ses protégés ne se feraient pas prendre de points de la part des autres professeurs, il était prêt à employer toutes les techniques dissuasives. La règle de base était « ne vous faites pas prendre. ».

Si les élèves se faisaient punir par un autre professeur, Snape doublerait leur temps de punition avec lui. Il n'enlèverait pas de points, mais transformerait chaque point perdu en punition supplémentaire.

Si Snape était celui qui les surprenait à faire quelque chose de mal, il n'épargnerait pas ses élèves. Ils seraient en fait plus sévèrement punis qu'il ne punissait ceux des autres maisons, à défaut de leur enlever les points.

Mais contrairement aux élèves des autres maisons, il n'exposerait pas leur punition devant tout le monde. Il leur donnerait en privé, et conserverait à la fois la dignité de ses élèves, et à la fois son rôle de professeur injuste et favorisant.

Les Serpentard ne devraient jamais parler de leurs punitions en public, et ne devaient jamais s'en plaindre. Il faisait confiance à leur fierté pour qu'ils acceptent cette règle facilement.

Ses punitions favorites étaient de donner des lignes à faire, de les faire nettoyer ou ranger les salles et les instruments de potions, leur donner des devoirs et dissertations supplémentaires, voire leur faire faire quelques potions, et gare à celui qui ne réussirait pas à les faire correctement.

Il s'assurerait que ses élèves de Serpentard soient bons dans toutes les matières, et certaines punitions pouvaient se transformer en cours de diverses matières que Snape appréciait, mais pas nécessairement en tutorat agréable. Cela restait une punition. Utile certes, mais punition.

Snape pouvait en public soutenir les moqueries des Serpentard envers les autres Maison, mais en privé il sévissait pour ce mauvais comportement. De la même manière, il ne tolérait pas la moindre dispute au sein de la Maison.

Tous les Serpentards devaient être soudés. Si l'un d'entre eux avait un problème, c'était le rôle de tous les autres de faire front ensemble. Les problèmes individuels entre deux Serpentards devaient rester au sein de la salle commune, à l'abri des regards, et ne devaient pas paraître à l'extérieur.

Dans la salle commune, les différentes années étaient chargées d'aider les autres pour les différents devoirs. Interdiction de faire à la place d'un autre, mais explications et entraides bienvenues et même demandées.

Les tensions entre deux Serpentard ne devaient pas en venir aux mains, et si Snape surprenait une utilisation de baguette hostile, les sanctions seraient très désagréables.

Ainsi, il s'efforçait de faire paraître la Maison de Serpentard comme forte et solidaire, douée dans toutes les matières, et capable de se défendre contre tout intimidateur des autres Maison. Les Serpentards ne devaient montrer aucune faiblesse, aucun défaut, et ils ne devaient pas se faire prendre s'ils faisaient des choses mal.

La ruse était à l'honneur, plus encore que l'ambition finalement. Pour monter au plus haut, il faut être ensemble, et non seul. Et il fallait être capable d'user de toute la ruse disponible.

Dumbledore le laissa choisir lui-même les préfets de sa maison. Il était peut-être nouveau en tant que professeur, mais peu de temps avant, il avait pu connaître les plus âgés comme camarades. Donc il était capable de savoir qui pouvait être préfet selon son jugement.

Il choisit des élèves doués, attentifs et rusés. Capables d'imposer le respect, et possédant suffisamment d'ambition, mais pas une destructrice.

Lorsque vinrent les premières vacances, Severus se rendit enfin compte qu'il n'avait pas eu beaucoup de temps en dehors de son nouveau travail, et qu'il était fatigué. Slughorn, tant qu'il était là, avait décidé de faire lui-même les potions pour l'infirmerie pour laisser encore un peu de liberté au nouvel enseignant qui devait déjà commencer par s'imposer à ses élèves.

Le jour du départ du train, Severus respira enfin. Certains élèves de Serpentard étaient restés pour les vacances, mais Slughorn assura qu'il s'occuperait d'eux. Pour sa dernière année, il voulait profiter de la compagnie de ses élèves le plus possible.

Slughorn avait toujours été d'une sociabilité maladive qui révulsait légèrement Severus. Mais pour une fois, le jeune professeur ne s'en plaignait pas. Il était content, car il ne subissait pas la chose, et que cela lui permettait même d'en être épargné.

Severus retourna dans ses quartiers et s'installa dans un fauteuil. Il souffla enfin. Mais ce fut d'une courte durée. Aussitôt, il sentit la douleur sur son bras. Le Seigneur des Ténèbres l'appelait.

Il n'avait pas à s'en plaindre, il avait été laissé tranquille pendant son temps d'enseignement. Il ne prit pas la peine de songer à ignorer l'appel. Il devait tout faire pour protéger Lily. Le Seigneur des Ténèbres n'avait toujours pas attaqué.

Lily avait été bien cachée avec sa famille. Mais Severus craignait toujours pour sa vie. Tant que le Seigneur des Ténèbres serait là, elle risquerait quelque chose. Le jeune enseignant se présenta à son maître.

Mais Voldemort ne lui parla pas d'attaquer la famille. Il ne l'évoqua même pas. Au lieu de cela, il le chargea d'une mission qui devrait l'occuper pendant toutes les vacances. Severus ne pouvait pas s'y soustraire, mais il était méfiant. Cependant, il avait comme le sentiment que le Seigneur des Ténèbres serait attentif s'il lui prenait l'idée de prévenir Dumbledore.

Il partit donc à sa mission sans aucun mot au directeur. Mais il avait bien l'intention de ne pas être aussi lent que ce à quoi Voldemort s'attendait. Il avait le sentiment que son Seigneur cherchait juste à l'écarter. Ce qui signifiait qu'il prévoyait d'agir.

Mais comment avait-il pu trouver les Potter ? Severus savait où ils étaient, mais ne l'avait jamais laissé paraître. Seul le gardien du secret pouvait donner l'information. Et Sirius Black ne trahirait jamais son meilleur ami, et ne risquerait pas la vie de son filleul.

Après avoir écarté son serviteur, Voldemort mit en place son plan, avec l'aide de sa fidèle Bellatrix Lestrange. Oh, le gardien du secret avait bien parlé. Mais ce n'était pas Sirius Black. Et ils avaient trouvé où se cachaient les Longbottom aussi.

Il ne restait plus qu'à attendre la date fatidique. Une date symbolique. La nuit d'Halloween.

Ce soir-là, chacune des maisons voyait s'approcher une silhouette noire.

Severus se précipita vers la maison des Potter. Les protections étaient brisées. Il entendait les cris à l'intérieur. Ils étaient vivants, mais ils étaient attaqués et torturés. Que se passait-il ?

Il entra dans la demeure, et monta à l'étage avec hâte. Il voyait James se tordre de douleur devant la chambre. Lorsqu'il se présenta dans l'entrée de la pièce, il comprit alors.

C'était Bellatrix Lestrange qui était là. Le Seigneur des Ténèbres tenait sa promesse, il ne tuait pas Lily. Mais il avait envoyé cette folle à sa place. Bellatrix était comme un animal cruel, qui joue avec sa proie avant de la tuer.

Depuis plusieurs heures, elle devait torturer le couple, sans rien faire à l'enfant, avec ses endoloris. Severus ne prit pas la peine d'attendre qu'elle le remarque. Elle torturait Lily sous ses yeux. Il désarma la sorcière avec aisance, grâce à un simple Expelliarmus.

Bellatrix se retourna. Elle montra sa surprise, puis sa colère, sa haine, et sa peur.

« Toi ! Que fais-tu là ! »

« Écarte-toi d'elle ! »

« Quoi, de cette Sang-de-Bourbe ? ! C'est pour ça que tu m'attaques ! Tu te retournes contre ton Seigneur ! »

D'un coup de baguette, il projeta la sorcière contre le mur.

« Je t'ai dit de t'écarter Bella ! »

La folie se voyait dans le regard de la sorcière.

« Notre Seigneur ne pardonnera jamais ta trahison. Tu mourras, et elle aussi ! Je m'en assurerais ! »

« Non, tu n'y feras rien, Bella. »

Il fit plonger la sorcière dans l'inconscience, puis lui murmura, même si elle ne pouvait pas l'entendre.

« Estime-toi heureuse que je me contente de t'envoyer à Azhkaban. J'aurais pu te torturer comme tu l'as fait pour eux, ou te tuer pour t'empêcher de nuire. Tu es folle Bella. Complètement folle. »

Ses phrases n'étaient qu'un souffle doux et pourtant sombre. Il détourna le regard de la sorcière, et s'approcha de Lily. Elle le regardait. Et ce regard était émerveillé. Puis elle sombra dans l'inconscience alors qu'il se pencha sur elle.

Le demi-géant était arrivé avec précipitation. Ils avaient repéré que les protections étaient brisées, et Dumbledore ne pouvait pas se déplacer. Il trouva la porte ouverte. Il entra à l'intérieur, et vit James Potter étendu au sol en haut des escaliers.

Il monta les marches quatre à quatre. Ce qu'il vit dans la chambre le sidéra.

Dos tourné à lui, se tenait la cape noire et sombre du maître de potion. Contre un meuble, gisait une belle femme aux cheveux noirs et aux vêtements gothiques. Le maître des potions était penché sur une belle rousse, Lily. Dans son berceau, le bébé observait la scène de ses beaux yeux verts, calme.

« Professeur Snape ? ! » s'étonna le grand barbu en retrouvant sa parole.

Le professeur se releva et se tourna vers lui.

« Hagrid, envoyé d'Albus. Ils sont vivants. »

« Tu… que fais-tu là ? »

« Ça ne se voit pas ? » fit-il avec un sourire narquois.

Rubeus Hagrid sortit son parapluie et le pointa vers la poitrine de l'enseignant.

« Tu es un envoyé de celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom. »

« Vraiment, Hagrid, pour un ancien Gryffondor, vous manquez de courage. Ils ont besoin de soins. Mais ce n'est pas le moment. Tu vois, l'enfant va bien. Elle n'y a pas touché. »

« C'est Lestrange ? Ta complice évidement. Que lui est-il arrivé ? » Hagrid restait menaçant.

« S'il vous plaît, Hagrid, baissez votre baguette. Vous n'êtes même pas supposé devoir en posséder une. Si vous m'attaquez avec, vous finirez encore plus probablement que moi à Azhkaban. Nous n'avons pas le temps pour les querelles. Vous devez aller voir les Longbottom. »

« Pourquoi ? Pour que vous puissiez savoir où ils se trouvent ? »

« Les plus improbables à trouver étaient les Potter ! Et ils ont été découverts. Alors les Longbottom ne sont pas en sécurité. Si le Seigneur des Ténèbres n'a envoyé que Bellatrix ici, c'est que finalement il a choisi de rendre visite aux Longottom. Et je doute qu'il ne l'ait pas fait en même temps que Bella était ici. »

Hagrid sembla considérer la situation. Il hésitait à laisser le jeune Serpentard ici. Il pouvait très bien finir le travail et était probablement un mangemort aussi. Mais la situation était étrange.

« Pour l'amour de Merlin, Hagrid ! Partez chez les Longbottom pendant que je prends soin des Potter. Je m'occupe d'envoyer un message à Albus, vous ne pouvez pas perdre plus de temps. Vous n'avez pas le choix, vous devez me faire confiance. Le temps est incroyablement précieux. Si je voulais les tuer, j'aurais déjà pu le faire, et ce n'est pas votre parapluie qui m'empêcherait de vous attaquer. »

Le demi-géant décida d'obéir. La situation autour du jeune maître de potion était étrange. Le gardien des clefs de Poudlard savait qu'il y avait quelque chose qui ne tournait pas nette autour du recrutement du nouvel enseignant.

Pourquoi durant l'été, Dumbledore avait soudainement choisi de changer de professeur, pour en amener un si jeune, qui n'avait jamais montré de qualité pédagogique.