Allégeance
Disclaimer : Voici une petite série de One Shots sur mon personnage favori. Le premier contient des références à Destiny et Origin.
Bonne lecture !
Plier le genou n'a jamais été une de ses habitudes, devant personne, sauf les dieux, naturellement.
Mais cette fois, sa raison première n'est pas d'en profiter pour donner libre cours à ses ambitions, son désir de revanche, non plutôt pour payer une dette.
Il n'y a pas que les Lannister qui payent toujours leurs dettes, citation qu'il avait lu dans un livre en anglais. Ce qu'il avait fait au sanctuaire de Poséidon ne sera pas suffisant, il en a parfaitement conscience.
Quand il s'est réveillé sur la plage qui bordait le Cap Sounion, Kanon avait eu la désagréable impression de vivre « l'éternel retour » que cite Nietzsche dans ses écrits les livres ont longtemps été sa seule compagnie pendant ces années de solitude et d'attente.
Il n'était pas dupe : si il était encore en vie, ce n'était pas à cause d'un geste de miséricorde divine, certainement pas ! Avoir manipulé les dieux, et même se permettre de les blesser restait rarement impuni. Même si cette sale gamine l'avait largement mérité avec son chantage et en lui révélant la vérité.
Devoir rester vivant et n'avoir que ses yeux pour pleurer sur son échec monumental, condamner à errer comme un chien enragé qu'on traquerait. Et comble de malchance, de ne pas avoir pu prouver de quoi on était réellement capable à celui qu'on voulait enfin égaler, surpasser et ne plus être considéré comme un second choix.
C'était une option qui le rebutait considérablement, mais là ! Avait il le choix ?
Plus d'armure, plus d'endroit ou revenir, Sorrente ou les chevaliers d'or se feraient un plaisir de l'exécuter pour ses crimes commis. Sauf que jamais au grand jamais, Kanon n'avait permis à quiconque d'autre que lui de diriger sa vie.
Peut être qu'avec un peu de chance, ils pourraient enfin s'affronter et se demander des comptes…
Dans le monde des ténèbres.
Quelle ironie ! Avoir tout fait pour se distinguer de l'imbécile qui lui servait de grand frère pour finalement choisir le suicide comme option lui aussi. Jusqu'à ce que mouvement inquiétant de cosmos se fasse sentir, tout comme ce pieu invisible qui s'enfonça dans son cœur en même temps.
Saga, misérable ! Non content d'être un imbécile que ça amuse de mourir, tu oses en plus vendre ton âme à Hadès en échange d'une seconde vie ? Alors que tu t'es permis de m'enfermer au Cap Sounion quand je t'avais dit la vérité et suggéré de tuer Athéna il y a de cela treize ans ?
Dans ce cas, observe Saga ! Observe la seconde différence entre nous que tu n'as jamais été capable de voir !
Ce qui se passe apporte finalement plus d'opportunités inespérées : non seulement la possibilité de lui montrer de quoi il est capable lui est offerte sur un plateau d'argent, mais aussi de redevenir enfin celui qu'il avait rêvé d'être, un chevalier d'or. De donner la preuve qu'il n'est pas fait du même bois que son frère, et qu'il ne baissera pas si facilement les bras, même si il aura tout le monde à dos, encore une fois.
Et éventuellement de recouvrir une protection, si le courroux de Poséidon se déchaînait sur lui.
Revenir au Sanctuaire sans que personne ne s'en aperçoive est un véritable jeu d'enfant. Ses escapades d'enfant, lui sont toujours aussi utiles qu'autrefois. Après une marche d'un bon pas, il y est : dans le palais du grand pope, après la douzième maison.
Un hurlement déchire la nuit, un nom retentit longuement prononcé avec tant de désespoir.
Pour une fois, Athéna paraît presque humaine, comme si elle se souciait d'un ami de longue date et non la divinité redescendue sur terre pour combattre Arès Éris ou toutes autres dieux menaçant cette planète. Juste à cet instant, elle lui inspire un tout petit peu de sympathie.
Agenouillé devant elle, il prend la parole.
- Athéna, vous vous êtes réveillée ?
- Ah… Ses yeux se posent sur lui, elle le reconnaît immédiatement et redoute de revoir ce même drame qui s'était déroulé sous ses yeux, il y a peu.
Elle avait presque eu l'impression que la scène se rejouait sous ses yeux à peu de choses près alors que le sanctuaire sous marin tombé en ruines. En secret, elle espérait que jamais pareille chose ne se reproduise, ce sacrifice l'avait laissé dans une profonde tristesse.
- Tu… Tu es… Tout lui est revenu à l'esprit en une fraction de seconde en dépit de son état d'épuisement.
Que fais tu ici ? Elle a du mal à le comprendre : il lui a bien dit avoir manipulé les dieux, qu'il était donc normal qu'il le reçoive de plein fouet. Kanon avait avoué ouvertement qu'elle lui avait sauvé plusieurs fois la vie, dans sa cellule de pierre au Cap Sounion, que c'était la moindre des choses.
Il avait enfin fini par ouvrir les yeux, admis ses erreurs et avait quand même essayé d'y faire face au lieu de la laisser impuissante et sacrifier Seiya et les autres.
C'était donc impossible de ne pas lui accorder son pardon, de ne pas faire en sorte qu'il meure sous ses yeux. Hors de question ! Trop de chevaliers avaient donné leur vie pour elle et à chaque fois c'était une douleur insupportable.
Elle ne savait pas précisément qui serait son ennemi, jusqu'à ce qu'elle fasse ce rêve, mais elle ne resterait plus à se terrer et à laisser les chevaliers d'or lui servir de bouclier. Elle avait éventuellement une idée de la façon dont elle pourrait s'y prendre pour affronter Hadès mais elle était risquée, très risquée.
- Je suis venu payer la dette que j'ai envers vous, Athéna. Vous m'avez accordé votre pardon, alors que je ne le méritais pas après tout ce que j'ai fait…
- Ne sois pas stupide. Si le mal était dans ton cœur pendant tout ce temps, le bien l'était aussi, tu l'as seulement oublié, tout comme tu as oublié le fait que personne ne peut vivre éternellement seul sans amour.
- Quoi qu'il en soit, nous devons nous attendre à affronter les spectres d'Hadès. Même si j'ai refusé toutes ces années de l'être, je suis pourtant un chevalier à votre service. Après ce que vous avez fait pour moi, il m'est impossible de rester les bras croisés et n'être qu'un simple serviteur.
- Veux tu dire que tu as fait ton choix, Kanon ? Sa voix douce et calme devient cette fois plus autoritaire. Il était sous les ordres de Poséidon il n'y a pas si longtemps, malgré son repentir, qui ne dit pas qu'il serait capable de duplicité ?
C'est une éventualité qu'elle ne peut pas se permettre d'écarter, depuis qu'elle a ressenti ces cosmos familiers, devenus aussi noirs et épais que les ténèbres des Enfers.
Évidemment… Le pardon est seulement accordé et non acquis, vous ne me l'avez donné que parce que je risquais de mourir, et que dans peu de temps vous auriez besoin de toutes les forces disponibles pour affronter ce nouvel ennemi.
Vous doutez sans doute encore de moi, et je le comprends parfaitement. Mais pourquoi m'avoir sauvé plusieurs fois alors que j'errais entre la vie et la mort avec pour seul désir de vous abattre, de prendre ma revanche ?
Aviez vous deviné ce que j'éprouvais secrètement, comme c'est le cas maintenant ?
Kanon garda les yeux baissés sur le sol, aussi bien par respect que par envie de ne pas croiser ce regard si pénétrant qui mettaient à nu ses sentiments, ses rêves. Mais l'impertinence n'était plus une possibilité, il n'était pas non plus complètement stupide pour jouer à nouveau au plus malin.
La seule et meilleure carte qu'il avait, c'était celle de la sincérité.
- Oui, sans la moindre hésitation.
- Me jures tu fidélité respect et obéissance ? Toute trace de douceur s'était évaporée, ne restait plus qu'une demande autoritaire prononcée d'un ton faussement aimable.
- Je vous le jure, et je n'hésiterai pas l'ombre d'une seule seconde à traverser les Enfers ou à donner ma vie pour mettre hors d'état de nuire les plus dangereux serviteurs d'Hadès.
Au loin une aura s'échappait, un tintement particulier résonnait. Pas celui destiné à se communiquer une présence mutuelle, mais plutôt une reconnaissance. L'armure qui l'estimait digne de confiance, devant faire ses preuves, qui n'avait été qu'une simple récompense lors d'un duel absurde et injuste. - Alors relève toi. Fais ce que tu as à faire, chevalier, je sais que tu en es capable, que tu trouveras en toi même la volonté pour mener à bien tes objectifs.
A cet instant elle s'approcha de lui, et prit sa main dont les coupures cicatrisaient difficilement à cause de l'eau de mer, des bandes serrées et tâchées de boue.
Un seul choc, un coup bien placé et c'était l'hémorragie assurée prometteuse d'une longue agonie.
L'homme qui était en face d'elle était bien marqué par les épreuves : sa tunique élimée, mangée par le sel, teintée de sang coagulé, son visage pâle, la faible lueur dans son regard de jade sa longue chevelure emmêlée. Un invisible manteau jeté sur la souffrance accumulée durant tant de longues années, pour ne pas s'attarder sur la douleur qu'elle procurait.
- Kanon, murmura elle tristement et de façon si basse que personne d'autres qu'eux ne pouvaient les entendre. Cette guerre sera sans doute la dernière mais aussi la plus sanglante, la plus meurtrière de toutes. Tous ceux qui jusqu'à présent ont survécu à ces épreuves cruelles risqueront sans le moindre doute de les voir s'arrêter, mais pas comme ils l'espéraient.
J'aurais tant aimé qu'encore une fois, tous et peu importe votre rang soyez dans l'obligation de vous sacrifier pour moi et pour tous ces innocents qui vivent sur cette planète.
Mais cette fois, je vous accompagnerai moi aussi dans la mort, quoi qu'il arrive je sais qu'une autre génération reprendra le flambeau, poursuivra ce rêve de paix et d'équilibre. Même si nous ne serons plus de ce monde, laissons leur la voie ouverte, les humains malgré leurs nombreux défauts en sont quand même capables.
Comment pouvait elle encore éprouver si naturellement tant d'amour tant de confiance ? Était ce vraiment cela la marque d'une déesse ? Qu'elle soit capable de lui tendre la main sans la moindre rancune et d'accepter ses erreurs ?
Comme l'avait fait son frère pendant de longues années, jusqu'à ce que tout vole en éclats ? Par bonheur les mouvements de cosmos coupèrent court à cet instant. Un peu plus et il risquerait de flancher, trop touché par cette démonstration de bonté imméritée.
Il était révolu le temps des serments, ce moment d'allégeance. Tout comme c'était révolu ces moments de doute, à présent seuls les actes compteraient.
Peu importe le mépris, la haine l'absence de confiance auxquelles il aurait droit. De toutes façons ce n'était qu'un petit sursis, Kanon le savait parfaitement, mais ça suffirait peut être pour accomplir les objectifs qu'il s'était fixé.
Il savait comment accueillir ces renégats.
Le moment est venu, observe Saga. Vois de tes propres yeux ce dont j'ai été capable pendant toutes ces années. Qui de nous a finalement appris de ses erreurs, tu trouveras la réponse dans notre affrontement.
Fin
