Bonne lecture

L.

"Parfois, nous créons nos propres déchirements"

Violet Evergarden


Les jours suivants s'écoulèrent sans information particulière. Hermione et moi continuions d'échanger des lettres. Elle était revenue un autre week-end avant une nouvelle sortie à Pré-au-Lard des élèves.

Ce jour-là, ce n'était pas Tonks mais Ginny qui me mit en garde.

-Kid, Hermione fait ce qu'elle veut mais ne t'avise pas de la blesser.

-On m'a déjà fait la leçon, Miss Weasley. Je ne prévois pas de blesser Hermione. Il me semblait avoir déjà éclairci ce point avec Miss Tonks. Il serait bon que vous mettiez vos informations en communs à ce sujet.

-Je ne plaisante pas.

-Moi non plus.

-Je l'espère. Hermione est mon amie et elle compte beaucoup pour moi. Elle t'aime. Tu le sais ?

-Oui.

-Et toi ?

-Ginny, laisse-la tranquille, intervint Hermione qui venait tout juste d'arriver. S'il te plaît, ne l'embête pas. Elle n'a pas à répondre à cette question. Kid, excuse-là, elle est…

-protectrice ? Proposai-je.

-Oui, rit Hermione. Oui, elle aussi.

-Allons boire quelque chose.

Nous sommes allées dans le bar de Rosmerta qui nous salua. C'était la seule qui nous soutenait apparemment. Tonks m'avait régulièrement suivie et je la saluais quand je la voyais. Ça ne lui plaisait pas du tout. Mais Hermione prenait ainsi mon parti.

-Alors, les amoureuses, qu'est-ce que je vous sers aujourd'hui ?

Nous nous baladions dans Pré-au-Lard, c'était une très bonne manière de garder un œil sur les habitudes des habitants et surtout des aurors et leurs mouvements. Je savais comment ils se plaçaient, comment ils échangeaient, ce qu'ils surveillaient. Hermione était d'ailleurs l'un des objets de surveillance.

-Hé, Granger !

La voix hautaine nous fit nous détourner de notre route. Je n'avais pas besoin de regarder pour savoir qui parlait ainsi : seul un Malefoy le ferait. Père et fils étaient tout aussi pathétiques, se complaisant dans un faux sentiment de grandeur alors qu'aucun n'avait accompli quoi que ce soit. Lucius n'était que l'image du pouvoir de la famille développé par son grand-père et Drago buvait les paroles de son géniteur et continuait cette mascarade puérile.

Je sentis la main d'Hermione serrer davantage la mienne.

-Alors, il ne te suffisait pas d'être une sang-de-bourbe, il fallait que tu sois lesbienne en plus de ça ! Tu es encore pire que ce que je ne croyais.

Crabbe et Goyle junior ricanaient à ces paroles. Savaient-ils au moins se servir d'une baguette ? Mon maître avait du souci à se faire si ceux-là représentaient la nouvelle génération de mangemorts. Hermione semblait vouloir partir mais je ne bougeais pas. Je sentais sa colère irradiée mais les paroles de Drago cachaient autre chose. Il m'avait lancé un regard.

-Jusqu'à quel point vas-tu te rabaisser, sang-de-bourbe ? Tu es une monstruosité. C'est écoeurant.

Il ne put rien ajouter d'autre. Hermione avait sorti sa baguette et lui avait jeté un sort qui l'avait projeté. Crabbe et Goyle tentèrent leur chance mais avant qu'Hermione ne fasse quoi que ce soit je m'étais occupée des deux. Drago se releva et je me dirigeai vers lui, menaçante. Il blanchit soudainement. Ma baguette était pointée contre son cou.

-J'ai presque fini, me chuchota-t-il.

-Je me fiche de savoir si tu as presque fini, le maître veut que ce soit terminé. Remplis ta mission. Je me chargerai de ton sort dans le cas contraire, tu le sais bien.

Je le fis taire d'un regard en sentant Hermione s'approcher.

-Kid, c'est bon laisse-le. Il a eu ce qu'il méritait. S'il te plaît, ajouta-t-elle en posant une main sur mon bras qui tenait la baguette et en voyant que je ne réagissais pas.

Je lâchais l'héritier Malefoy qui s'enfuit en courant. Il ne tuerait jamais Dumbledore. Il était si pâle et si maigre qu'il tenait à peine debout. A quoi jouait-il ? Il était censé l'avoir déjà réparée. Il fallait qu'on soit coordonnés pour la suite du plan.

Je me tournai vers Hermione qui me regardait étrangement. Je tendis la main vers son visage que je frôlais.

-Tu vas bien, Hermione ?

-Tu es rapide. Vraiment rapide.

-Je travaille dans la sécurité, c'est une qualité recherchée. Selon certains, j'aurais pu être attrapeur au quidditch.

-Et puissante.

-C'est un problème ? J'ai de bonnes aptitudes. Tout comme toi. Je devrais être impressionnée mais d'une certaine manière ça ne m'étonne pas. Tu pourrais devenir une sorcière redoutable.

-Je ne veux pas être redoutée. Je veux aider, pas être crainte.

-C'est ce qui te rend incroyable.

Je l'embrassais. Parce que je devais détourner cette conversation. Parce que je pensais ce que j'avais dit. Parce que je le voulais. Elle répondit à mon baiser de manière pressante. Quelque chose la dérangeait. J'avais étudié ses réactions tout au long de nos interactions. Je la lisais plus facilement bien que beaucoup de choses me restaient encore difficile à interpréter. Je m'écartai.

-Ce qu'il a dit…

-Etait du pur Drago Malefoy. Hautain et insultant. As-tu compris ce qu'il a dit ?

Elle faisait ça, me demander si je comprenais, régulièrement. Elle prenait en compte ma personne. Elle ne voulait pas me mettre à part. Elle devançait mes questions.

-Il te considère comme un monstre parce que tu es avec moi.

-Oui, mais Kid, ce n'est pas vrai.

-Oui, Hermione.

-Est-ce que tu comprends ?

Je la regardais et pour la première fois, je compris réellement ce qu'elle disait.

-Tu as réagi comme ça, pour moi ? Il t'insultait pas moi.

-Si je suis un monstre pour aimer une femme alors il te considère de même. Je peux supporter qu'il m'insulte, il en a fait son divertissement depuis notre première année, mais je ne supporterai pas qu'on te manque de respect.

Une émotion intense me submergea et me coupa le souffle. Je me sentis si triste soudainement. Elle, la sang-de-bourbe, prenait ma défense, voulait me protéger. Je voulus m'éloigner d'elle parce que je ne savais pas quoi faire avec ces nouveaux éléments, je ne savais pas comment gérer ce type d'émotion. Mais elle me retint et me prit dans ses bras. Je me débattis d'abord puis me laissai faire.

-Je t'aime, Kid.

Je la serrai plus fort.

Le soir, j'envoyai une lettre à Bellatrix. Je lui parlais des menaces de l'entourage d'Hermione, non pas que ça m'inquiétait, j'en viendrais à bout facilement s'il le fallait, du soutien de Rosmerta.

Elle arriva dans mon salon sans prévenir comme la dernière fois. Et comme la dernière fois, elle m'embrassa sans prévenir. Elle m'emmena dans ma chambre. Elle me déshabilla et me mit sur le lit. Elle me rejoignit rapidement. Je parcourus son corps. Elle m'avait tant manqué. J'embrassai son cou puis descendit vers sa clavicule. Ma langue dessinait son os. Elle gémit. Je léchai l'un de ses tétons. Elle haleta. Je suçai son clitoris. Elle cria.

-Tu es à moi, Kid.

-Oui, Bellatrix.

-Prouve-le.

Et c'est ce que je fis. Je couvris son corps d'attention. Ma frustration à l'égard de mes sentiments pour Hermione s'exprima ce soir-là. Avec Bellatrix tout était normal. Tout était censé être ainsi. On se désirait et le maître avait accepté cette relation. Il n'était pas question d'amour. J'étais son arme et il avait prêté son arme à sa fidèle. J'appartenais à Bellatrix.

Mais Hermione ? J'étais censée me rapprocher d'elle, gagner sa confiance. C'était allé plus loin. Je n'étais pas censée vouloir la voir, vouloir l'embrasser et elle n'était pas censée me dire ces mots incompréhensibles : « je t'aime ».

-Mon amour, tu fais si bien dans ta mission. Notre maître est très content des dernières informations. Mais tu sais que tout cela prendra bientôt fin.

-Oui, Bella.

-Tu ne verras plus la sang-de-bourbe sauf pour la tuer.

-Oui, Bella.

-Es-tu prête à le faire ?

-Oui, Bella.

-Es-tu sûre ? Je crois que tu t'es attachée à elle.

-Est-ce que j'ai raté ma mission ?

-Ma si naïve Kid, c'est bien plus que cela. Tu réponds aux attentes du maître, c'est tout ce qu'on attend de toi.

-Et toi ? Qu'attends-tu de moi ?

-Ce que tu me donnes quand on est ensemble. Kid, ce que tu me donnes c'est plus réel que tout ce que j'ai pu avoir jusqu'à présent. Tu es à moi, Kid.

-Je ne peux pas aimer.

-Il vaudrait mieux que tu ne le puisses pas. L'amour est une souffrance inutile, Kid.

-Est-ce que tu en as déjà souffert ?

-Oui, mon amour, j'en souffre. Mais pas ce soir.

Je l'embrassais de nouveau. Je voulais être à elle, me donner à elle, la prendre à nouveau. Oublier. Je ne voulais pas penser à Hermione. Je ne voulais pas penser à ce que j'avais ressenti tout à l'heure.

-Tu es à moi, Kid.

Oui, Bella. Je suis à toi. Toute à toi. Je me le répétais. C'était vrai, à bien des égards.

-Je veux revenir.

-Bientôt, Kid. Encore un peu de patience.

-Si Drago échoue ?

-Est-ce que tu t'inquiètes pour mon neveu ?

-Non.

Ma réponse ne sembla pas l'étonner et elle sourit.

-Bien. Tu feras ce que tu dois faire tout comme Drago doit faire ce qu'il a à faire. Drago n'échouera pas. Il parviendra à nous faire entrer dans le château. Quant à Dumbledore… Il aura tout ce qu'il faudra à ce moment.

-Si je dois le tuer…

-Alors tu le tueras. Les ordres de notre Seigneur sont à respecter, n'est-ce pas ?

-Je fais ce que mon maître ordonne.

-Alors qu'est-ce qui te dérange ?

-Toi. C'est le fils de ta sœur.

Le silence s'abattit soudainement. Elle me regarda. Je me demandai si j'avais regardé Hermione de la même manière peu avant. Elle se pencha vers moi.

-On fait ce qu'on doit faire, c'est tout, Kid.

-Je ferai ce que mon maître m'ordonnera de faire. Je me demandais ce que cela te ferait si je tuais Drago.

-L'honneur avant les sentiments. Toujours, Kid. N'oublie jamais ça, mon amour. Ne te pose aucune question. Fais ce que l'on te demande. Et surtout ne te fais pas de souci pour moi.

Me disait-elle cela en sachant par avance ce qui allait arriver ? Ou était-ce sa manière de s'inquiéter pour ma sécurité ? Elle me faisait passer en première à sa manière.

Bellatrix m'embrassa une dernière fois me rappelant que la fin approchait et partit en me laissant seule dans cette maison et ce vide qui m'apparaissait oppressant pour la première fois. Rien de tout cela n'aurait dû arriver, certaines choses m'avaient échappées parce que je n'avais été préparé à rien du véritable monde. Je changeais sans m'en être aperçue et Bellatrix et Hermione se superposaient de plus en plus. Il fallait que Drago finisse rapidement sa mission.

J'allais trahir Hermione et c'était pour le mieux.

J'allais blesser Hermione et c'était pour le mieux.

J'allais me battre contre Hermione et c'était pour le mieux.

Cette nuit-là, je ne pus dormir. Cette nuit-là, je compris que j'avais dépassé les limites, que mes sentiments étaient plus forts que ce qu'ils ne devraient être, que je voulais juste que Bellatrix me ramène auprès de mon maître et qu'il me guide à nouveau.