Emma arriva chez elle après une longue journée d'école et constata, sans étonnement, que la maison était vide. Sa mère devait encore être coincée à la mairie. Heureusement pour elle, Rex vint l'accueillir dès qu'elle eut franchi la porte d'entrée, il lui sauta dessus et lui léchouilla le visage.
« Oui ! Oui ! Moi aussi je suis contente de te voir ! » Rigola-t-elle en se débattant.
Elle attrapa l'animal et le posa correctement sur ses cuisses pour lui offrir les caresses qu'il attendait tant. Ils restèrent dans cette position pendant quelques minutes avant de se diriger, tous les deux, vers la cuisine. La petite blonde attrapa de quoi faire son goûter et n'oublia pas son ami à qui elle donna une petite friandise. Verre de lait froid en main, elle s'installa sur l'une des chaises autour de la table dans la salle à manger puis elle sortit ses affaires de son sac à dos.
Elle commença tout d'abord par prendre le contrôle que le professeur leur avait rendu dans la matinée et, tout en grignotant, elle chercha à comprendre ses erreurs pour ne pas les répéter. Elle relu attentivement la leçon qu'elle n'avait pas totalement saisie et, grâce à la correction de l'exercice qu'elle avait intégralement ratée, elle comprit enfin ce qu'elle avait raté.
Sortant son agenda, elle feuilleta les pages et constata qu'elle n'avait absolument aucun devoir à faire ce qui lui fit pousser un profond soupir. Elle n'aimait pas tant que ça faire des devoirs mais, au moins, ils avaient le don de l'occuper lorsqu'elle était seule à la maison.
Tout en caressant distraitement Rex d'une main, elle sortit son livre de mathématique pour effectuer des exercices supplémentaires et ainsi, appliquer la leçon qu'elle avait enfin pleinement comprise. Tout en suivant la méthode, elle trouva les énoncés bien moins compliqués à comprendre et, en un rien de temps, elle eut terminé tout ceux présent sur la page. Elle le glissa dans son cahier et se nota dans l'agenda de donner la feuille au professeur remplaçant pour qu'il puisse la corriger mais surtout, pour qu'il puisse constater son amélioration.
« Qu'est-ce qu'on va bien pouvoir faire maintenant ? » Soupira-t-elle en regardant son chien.
Elle sortit alors sa trousse de crayon de couleur et se mit à dessiner sur la première page de ses cahiers. L'année scolaire n'avait commencé que depuis un petit mois et pourtant son professeur n'avait cessé de leur demandé de créer de belle page de garde – selon lui, plus celle-ci serait belle et plus les élèves auraient envie de travailler.
La petite fille n'avait pas vraiment compris le rapport mais elle s'était tout de même pliée à ses exigences. Feutre en main, elle fit en sorte d'embellir la page blanche même si elle savait déjà que ça n'aurait aucun véritable impacte sur sa volonté d'apprendre.
Les minutes passèrent et, mine de rien, elle termina. Les jambes balançant tranquillement dans le vide, la tête posée dans le creux de sa main, elle jeta un coup d'œil à sa montre et soupira en constatant que sa mère n'était pas encore prête de rentrer.
Emma détestait être seule, surtout dans cette si grande maison. Le silence qui planait dans les pièces vides avaient le don de la mettre profondément mal à l'aise. Elle n'aimait pas du tout être au manoir sans la brune, elle se sentait toute petite face au vide qui y régnait, elle se sentait étrangement triste.
Regina lui avait déjà proposée d'engager une baby-sitter pour qu'elle ait une adulte à ses côtés en cas de problème mais la blonde avait fermement refusée. Elle était bien trop grande pour avoir besoin d'une nounou et, si jamais elle avait un soucis, elle connaissait le numéro de la mairie ou de sa mère sur le bout des doigts.
La brune travaillait beaucoup, beaucoup trop parfois mais la fillette ne lui en voulait pas. S'occuper d'une ville n'était pas une tâche facile, tout le monde ne pouvait pas y arriver avec autant de succès. Elle comprenait parfaitement les sacrifices qu'elle devait faire pour ne pas manquer à sa mission de mairesse mais, le fait est que, parfois, elle se sentait particulièrement seule.
Cette solitude résultait principalement de son incapacité à se faire des amis. Elle s'entendait parfaitement bien avec chacun de ses camarades de classe depuis qu'elle avait l'âge d'aller à l'école mais aucun d'entre eux ne méritait le privilège d'être appelé ami. La plupart était sympathique avec elle seulement parce qu'ils craignaient sa mère, d'autre parce qu'ils voulaient bien se faire voir par sa mère. En aucun cas, ils ne cherchaient à s'entendre avec elle seulement parce qu'elle était gentille, parce qu'elle était une bonne élève ou parce qu'ils aimaient passer la récréation en sa compagnie.
Ils l'approchaient tous avec des arrières pensées, trop souvent poussés par leurs propres parents. Elle voyait très bien que certains n'avaient aucune envie de lui parler et pourtant, ils le faisaient quand même, de peur qu'elle n'aille se plaindre de leur comportement à la mairesse de StoryBrooke. Le résultat était simple mais blessant, une fois que l'école était terminée, elle n'avait personne avec qui discuter.
Elle n'avait personne avec qui partager son goûter, personne avec qui aller jouer au parc. Elle ne pouvait pas aller chez ses camarades de classe pour faire ses devoirs ou s'amuser en attendant que sa mère ait fini sa journée de travail. Elle n'avait personne avec qui discuter durant le trajet, personne à côté de qui s'asseoir dans le bus, personne pour prendre ses devoirs lorsqu'elle avait le malheur d'être malade. Elle rentrait seule, dans cette maison beaucoup trop grande pour une enfant de tout juste neuf ans.
Heureusement pour elle, elle n'était plus toute seule. Maintenant, elle avait Rex. Depuis deux ans, la petite boule de poil était dans sa vie et elle devait avouer qu'elle en était profondément heureuse. Le poids dans son cœur, lorsqu'elle luttait seule face à ce silence assourdissant, n'était plus aussi pesant.
Malgré tout, il lui arrivait parfois d'être triste en se disant qu'elle n'avait aucun ami. Elle n'était jamais invitée aux anniversaires et, en retour, elle n'avait personne à inviter. Souvent, elle le fêtait seule, avec sa mère, puis elle soufflait une bougie au Granny's parce que Granny et Ruby étaient bien les deux seules en ville à ne jamais oublier son anniversaire. Elle n'invitait jamais personne à la maison et elle n'était jamais invitée non plus, elle entendait ses camarades parler de leurs nombreuses soirées pyjamas et elle se demandait sincèrement ce qu'il y avait de si amusant.
Elle ne le saurait jamais puisqu'elle n'avait pas d'ami, personne avec qui regarder la télévision jusqu'à très tard tout en grignotant des cochonneries pour le plus grand damne de leurs mères. Elle ne pouvait rien y faire, elle devait simplement s'habituer à la solitude. Avec le temps, le vide ne la rendrait même plus triste.
« Et si on allait faire une balade ? Qu'est-ce que tu en dis Rex ? » Lança-t-elle soudainement en se tapotant sur les joues.
La réaction du chien ne tarda pas, il bondit sur ses pattes et se précipita vers la porte d'entrée où il se mit à aboyer. Son comportement aussi enjoué lui arracha un éclat de rire et, tout en balayant la larme qui venait de quitter son œil, elle le regarda en se disant ô combien elle avait de la chance de l'avoir. Elle n'avait peut-être pas d'ami mais aucun élève de sa classe n'avait un camarade de jeu tel que Rex et, rien que pour ça, elle savait qu'elle était la plus chanceuse de tous.
Empoignant un stylo, elle retira une feuille de son classeur et écrivit dessus : Rex et moi, on est sorti pour se promener en ville, on sera de retour dans une petite heure ! Elle déposa son verre à présent vide dans l'évier et mit le morceau de papier sur le meuble à l'entrée, bien en évidence, pour que sa mère le voit immédiatement si jamais elle venait à rentrer avant eux.
Sautant dans ses chaussures et remettant son manteau – elle n'avait aucune envie de se faire gronder – elle quitta la maison avec la boule de poile blanche qui se mit à sauter partout. Elle ne prit pas la laisse pour la simple et bonne raison que Rex était – malgré son jeune âge – parfaitement éduqué. Il savait très bien qu'il n'avait pas à s'éloigner – sauf s'il en avait reçu l'autorisation – il ne s'approchait pas des autres chiens et il se laissait tranquillement caresser dès que la blonde en avait donné l'accord. Il savait très bien se tenir alors, plutôt que de le mettre en laisse, elle le laissait pleinement profiter tout en étant sur ses gardes – un problème était si vite arrivé même si StoryBrooke était étonnement une ville bien calme.
Marchant tranquillement l'un à côté de l'autre, ils profitèrent de l'air frais. Ils traversèrent lentement la ville jusqu'à la petite plage où Rex, après avoir reçu le signal d'Emma, partit en courant pour se défouler un petit peu. Tout en riant, elle lui courut après afin de ne pas le laisser trop s'éloigner. Les habitants – qui passaient par là au même moment – la regardèrent de haut, comme à leur habitude.
Cela ne l'empêcha pas de s'amuser avec son chien qui se roula dans le sable, s'en mettant ainsi partout dans le pelage. Ils jouèrent tous les deux pendant plusieurs minutes avant de s'arrêter, essoufflés. Le soleil tapait bien fort dans le ciel – lui qui avait pourtant joué à cache-cache avec les nuages toute la journée – alors, plus tranquillement cette fois-ci, la blonde les entraina vers le magasin pour acheter quelque chose à boire.
« Tu ne bouges pas d'ici Rex ! » Annonça-t-elle en lui montrant le trottoir devant la petite boutique.
Entrant dans l'épicerie, elle se dirigea tout d'abord vers les frigo dans le but d'y prendre une bouteille d'eau fraiche mais, avant même d'y arriver, son regard fut attiré par le présentoir. Elle succomba à sa curiosité en voyant une frimousse blonde qu'elle ne connaissait que trop bien, elle s'empara du magazine et commença à le feuilleter jusqu'à tomber sur les pages dédiées à Naruto Uzumaki et son fils.
« Qu'est-ce que tu lis ? » Lança soudainement une voix dans son dos.
Elle tourna sur elle-même pour tomber nez à nez avec une jeune fille dont les ondulations de ses cheveux blonds encadraient parfaitement son visage. Elle était légèrement plus grande, un peu plus de dix centimètres, ce qui l'obligea à lever la tête.
« Boruto contre Momoshiki Ōtsutsuki. » Dit-elle en lui montrant l'homme à la peau pâle et aux cornes sur le crâne.
« Je m'appelle Ava, on s'est déjà croisée à l'école. Tu es avec le professeur remplaçant, c'est ça ? »
« Bon, on y va ? » Fit un autre enfant, brun, en entrant dans son champs de vision.
« Lui, c'est mon frère, Nicholas. »
« Salut. » Fit-il avec un léger signe de la main.
« Salut. » Répéta Emma en lui adressant un sourire.
« Tu viens ? On s'en va. »
« Tu veux venir avec nous ? » Proposa Ava.
« Euh... Oui, d'accord. »
La jeune Mills était assez étonnée que des élèves de son école viennent lui adresser la parole alors qu'aucun professeur ne les regardait mais elle était aussi heureuse, sans doute allait-elle se faire ses premiers amis aujourd'hui ? Elle reposa le magazine à sa place et se dirigea tout naturellement vers la porte de sortie derrière laquelle Rex l'attendait toujours aussi calmement. Alors que Nicholas ouvrait ladite porte, le vendeur se précipita sur eux et les empêcha de sortir.
« Vous croyez que vous allez vous en aller comme ça ? Vide-moi tes poches. » Ordonna Tom Clark en éternuant dans son mouchoir.
« Quoi ? » Fit la blonde, les sourcils froncés, alors qu'il la pointait du doigt.
« Tu crois que je ne t'ai pas vu ? Tu essaies de me voler. Vide-moi tes poches. »
« Mais je n'ai rien pris du tout. » Assura-t-elle.
Soupirant, le propriétaire de l'épicerie l'agrippa par le bras pour la forcer à s'approcher et, sans lui laisser le temps de dire quoi que ce soit, il plongea sa main dans l'une des poches du manteau. Quelle ne fut pas la surprise de la fillette lorsqu'il en sortit, en plus de son petit porte-monnaie, plusieurs sucreries.
« Et ça alors ? Tu oses mentir en plus ? »
« C'est pour ça que tu es venu me parler alors... Pour que ton frère mette des trucs dans mes poches ? » Souffla-t-elle doucement en direction d'Ava qui fixait, honteusement, le sol.
« Emma, je suis très déçu. Quant à vous deux, vous vous prenez pour qui ? »
L'homme attrapa la petite blonde par l'épaule dans le but de l'entrainer un peu plus loin mais Rex se précipita dans le magasin et déposa ses crocs autour de son poignet. Il ne mordit pas, il n'en avait pas reçu l'ordre, seulement il serra tout doucement sa mâchoire pour le forcer à lâcher la prise qu'il avait sur l'enfant.
Reculant d'un pas pour s'éloigner du vendeur, elle s'accroupit au sol et demanda à son chien d'arrêter avant que l'un des deux soit blessé. Celui-ci lui obéit immédiatement mais vint tout de même se poster à ses côtés pour la protéger.
Comprenant qu'il risquait de goûter à la gueule de l'animal si jamais il venait à nouveau à poser la main sur la fille de la mairesse, il lui demanda simplement d'avancer devant puis il entraina le frère et la sœur à la suite. Emma tenta d'expliquer la situation, elle lui montra même qu'elle avait suffisamment d'argent de poche pour acheter le tout mais il ne l'écouta pas, il les força à s'asseoir et téléphona à leurs parents.
Regina ne tarda pas à débarquer au magasin, elle ouvrit la porte à la volée, faisant ainsi tinter le carillon qui annonça sa présence. Les trois enfants bondirent sur leurs pieds et elle lorgna, d'un regard des plus noirs, les deux enfants qu'elle n'avait encore jamais vus à StoryBrooke.
« Je suis désolé Madame le maire mais j'ai pris votre fille en train de me voler. » Annonça Tom Clark.
« Tu volais ? » Questionna-t-elle, de manière rhétorique, en direction de la blonde qui hocha négativement la tête.
« Je vous assure, regardez par vous-même. »
S'approchant du comptoir, elle jeta un furtif coup d'œil à toutes les friandises qui avaient, soi-disant, étaient volées par son enfant. Elle attrapa l'une des barres en chocolat et le coin de ses lèvres fut étiré par un léger sourire sarcastique.
« Ma fille ne mange pas ce genre de friandise et elle n'est pas assez bête pour voler alors que son argent de poche pour la semaine suffit amplement à acheter tout ça. Ce sont eux les voleurs, c'est évident. Allez, on s'en va. » Dit-elle simplement en glissant sa main dans le dos de sa fille pour l'entrainer jusqu'à l'extérieur.
« Maman... » Souffla la blonde qui traina des pieds.
« Qu'est-ce qu'il y a mon bébé ? » Répondit la brune en lui ouvrant la portière.
« Est-ce qu'on pourrait au moins les ramener chez eux ? » Questionna l'enfant en penchant doucement sa tête sur le côté.
« Pourquoi est-ce qu'on ferait ça ? »
« Parce qu'on ne peut pas laisser des enfants seuls dans la rue alors que la nuit va bientôt tomber. Qui sait ce qui pourrait leur arriver ? »
Regina la regarda attentivement et soupira. Pourquoi tenait-elle à les aider alors qu'elle venait tout juste d'être accusée de vol par leur faute ? Parfois, elle avait vraiment du mal à comprendre pourquoi sa petite tête blonde était si gentille avec tout le monde.
Elle retourna alors dans l'épicerie et constata que Tom Clark râlait tout en ayant le téléphone collé à l'oreille. Elle racla alors la gorge et lui demanda où se trouvait les parents des deux voleurs, l'homme lui expliqua alors qu'il tentait de les appeler mais que le numéro était hors service. Avaient-ils eu le culot de donner un faux numéro après avoir été pris la main dans le sac ?
Se tournant vers eux, les mains sur les hanches, elle leur ordonna de s'expliquer. Ava, qui était beaucoup moins sereine que lorsqu'elle était allée à la rencontre d'Emma, lui fit savoir que leurs parents n'avaient pas de quoi payer la facture et que, par conséquence, leur ligne téléphonique avait été coupée par l'opérateur. Jetant un coup d'œil aux divers articles qui se trouvaient sur le comptoir, elle prit conscience qu'ils avaient mis des cochonnerie dans les poches de sa fille mais qu'ils avaient, aussi, mit dans leur sac tout un tas d'article de première nécessité.
« Vous vouliez les aider ? » Marmonna-t-elle sans même s'en rendre compte.
« S'il vous plait... S'il vous plait, ne nous envoyez pas en prison... ça n'arrangera pas les affaires de nos parents »
En temps normal, la brune serait simplement rentrée chez elle sans porter le moindre intérêt aux deux enfants mais aujourd'hui, alors qu'elle tenait cette boite de mouchoir dans sa main, elle ne put empêcher son cœur de se serrer face à leur tristesse. Elle soupira et regarda en direction de sa voiture. Qu'allait bien pouvoir dire ou penser sa fille si elle revenait sans les avoir aidés ? Non pas que l'envie de leur tendre la main soit très présente, après tout, leur situation aussi précaire avait été causée par la malédiction, mais elle se tourna vers l'homme pour acheter le tout – et bien plus encore.
Les faisant monter dans la Mercedes, elle suivit leurs indications et conduisit jusqu'à la maison dans laquelle ils disaient habiter. Regina connaissait absolument tous les habitants de cette maudite ville et pourtant, à cet instant précis, elle fut incapable de dire qui possédait cette maison. Détachant sa ceinture, elle voulut les accompagner jusqu'à la porte pour rencontrer leurs parents mais elle fut arrêtée net par les deux enfants.
« S'il vous plait ! Attendez... Si nos parents vous voient, ils vont avoir tellement honte. » Fit Ava, la mine inquiète.
« D'accord, allez-y. » Souffla-t-elle.
Ils quittèrent la voiture et se précipitèrent vers la porte d'entrée de cette maison, ils restèrent sur la dernière marche et leur offrirent un signe de la main. S'assurant qu'elle avait fait ce qu'il fallait, la mairesse de la ville redémarra pour rentrer chez elle mais ce fut sans compter sur Rex qui se mit soudainement à aboyer en direction des deux enfants.
« Oui, oui, je sais. Calme-toi. Moi aussi j'ai compris, ils ont menti. » Soupira Emma en le prenant dans ses bras.
