Chapitre 4
Nous étions jeudi donc l'avant-dernier jour du plan pâtisserie. Le muffin de mercredi avait probablement été mangé puisqu'il n'était plus dans le casier quand j'ai déposé la boîte en carton contenant les cookies que j'avais fait pour aujourd'hui. Je me sentais moins enthousiaste que d'habitude, je mis ça sur le dos des anxiolytiques que je prenais depuis mardi soir. Honnêtement, je me sentais bizarre depuis que je les prenais, comme si mon cerveau était dans le brouillard. Je m'inquiétais qu'il soit même devenu un nuage. Ce qui expliquerait pourquoi j'avais tant de mal à me concentrer en classe.
À la fin des cours, Bella et moi venions de nous installer dans mon SUV, elle me racontait comment elle avait obtenu son oignon d'or. En vérité, c'était aussi celui d'Edward mais il lui avait laissé, en gage d'amour. Un mouvement du coin de l'œil attira mon attention, face à nous et je me crispai. Là, au bord du parking, devant moi, il y avait un serpent immense qui venait de sortir de la terre. Il ondulait en montrant ses crocs à mon encontre, claquant ses mâchoires l'une contre l'autre dans un grognement effroyable. Ses écailles noires luisaient faisant jouer la lumière dessus chaque fois qu'il bougeait.
« Jamie ?
Je restai figée, les yeux écarquillés, les mains serrées sur le volant. Oh mon dieu ! Oh mon dieu ! Oh mon dieu !
« Jamie ?! S'affola Bella à mes côtés.
Je sentis mon cœur s'affoler contre ma cage thoracique, Bella était effrayée également, m'appelant pour que je fasse quelque-chose, n'importe quoi. Foncer dedans ou fuir ? Foncer ? Fuir ? Je me décidai et espérai que c'était la bonne option, fuir me paraissait inutile, le serpent était haut et hostile, il cherchait à nous avaler, la voiture avec. Ça n'était rien pour lui, il venait d'avaler le poteau électrique. Il fallait que je fonce dedans. Je tournai la clé pour démarrer et me préparai à baisser le levier de la boîte automatique pour ensuite appuyer sur l'accélérateur de toutes mes forces mais ma portière s'ouvrit en même temps que Bella hurla un ''non''. On m'agrippa et me fit sortir de la voiture avec une facilité déconcertante. J'étais maintenant debout face à Edward, je tournai la tête pour regarder où en était le serpent, il semblait toujours furieux. J'insultai l'inconscience d'Edward de nous mettre devant un pareil danger mais compris ce qu'il faisait : il me livrait au serpent pour ne plus risquer que je sabote sa relation avec Bella mais je ne voulais pas mourir.
« Jamie, regarde-moi, m'ordonna-t-il.
J'ignorai ses paroles parce qu'il fallait que je surveille les gestes erratiques du serpent.
« Jasper ! Appela-t-il.
Je fus prise dans une sorte de calme et me détournai du serpent pour caler mon regard dans celui d'Edward. Mon cœur menaçait de rompre tellement il battait fort dans ma cage thoracique. Pourquoi devrais-je être calme ? Oh mon dieu.
« Le serpent essaye de me contrôler.
« Mon dieu, quel serpent ? Entendis-je Bella dire.
Elle était sortie et venait de nous rejoindre.
« Il n'y a pas de serpent, Jamie, m'assura Edward.
« Je vais chercher du sucre ou quelque-chose.
Je fronçai les sourcils, regardai de nouveau et si, il était bien là, s'agitant furieusement, essayant de sortir de son trou de terre pour venir s'abattre sur moi. Je regardai Edward et pris le temps de me dire qu'il était plus attirant que le serpent.
« Mais si !
« Non, il n'y en a pas.
« Qu'est-ce qu'il y a avec ton cerveau ? M'effarai-je.
J'essayai de tourner la tête vers le serpent mais Edward m'en empêcha, mettant ses deux mains autour de ma tête, les paumes collées à mes joues. Et elles étaient glacées. Je cessai alors de m'agiter sur place.
« Regarde-moi, m'invectiva-t-il.
Je relevai mon regard pour le bloquer dans le sien. Sa peau n'était pas seulement glacée, elle était un peu dure, pas tout à fait comme de la pierre mais presque, elle n'était pas aussi souple qu'elle aurait dû l'être.
« Tout va bien, me dit-il. C'est fini, plus de serpent.
Je m'étais calmée, étrangement rapidement. Il me tenait toujours la tête mais décida finalement de les retirer, je tournai la tête vers le serpent et vit qu'en effet, il n'était plus là. Il avait même remis le lampadaire en place. Mais comment ? Edward l'avait-il vaincu ? Mais il n'avait pas bougé de devant moi. Il devait se déplacer extrêmement vite pour que je ne pus pas m'en rendre compte. Je regardais Edward à nouveau, consciente que je me sentais toujours très calme comparé à ce que j'aurais dû ressentir, ce n'était pas du fait du serpent alors ?
« Tu m'as sauvée, réalisai-je.
Il fronça les sourcils.
« Non, je n'ai rien fait.
« Si mais tu vas trop vite pour que je l'aie vu.
J'écarquillai les yeux devant l'évidence qui se tenait devant moi. Edward se crispa au moment même où je réalisai qu'il n'était pas humain. La peau blafarde, les yeux dorés, la peau dure presque comme de la pierre mais un minimum souple pour bouger, la vitesse irréelle. Et toute sa famille était la même chose que lui. Je savais ce qu'il était.
« Tu es une statue.
Il resta figé un moment, telle la statue qu'il était, avec un air interdit, puis il sembla s'interroger comme si j'étais une énigme à moi toute seule. Bella était arrivée entre temps et me tendit un paquet d'M&M's.
« Mange ça.
J'ouvris le paquet tandis que Bella se tourna vers Edward.
« Merci, je ne sais pas ce qu'il se serait produit si tu n'avais pas été là.
Je croquai les deux M&M's que j'avais mis dans ma bouche, tout en contemplant la beauté d'Edward. C'était la première fois qu'il se tenait aussi proche de moi et je pus voir à quel point sa peau était parfaite. Il avait dû être taillé sur le modèle d'un mannequin super beau.
« Ce n'est rien, assura Edward.
Il répondait à Bella mais me regardait moi, je me dis que ça serait sympa, un câlin avec Edward. J'étais toujours victime de son attraction, visiblement.
« Tu en veux ? Lui proposai-je.
Il sourit enfin mais refusa poliment. Je fronçai les sourcils. Il ne mangeait pas beaucoup, je supposai que les statues n'avaient pas autant besoin de se nourrir que nous, voire, n'en avaient pas besoin du tout.
« Vos parents aussi sont des statues ? Lui demandai-je.
« Jamie, râla Bella.
« Nous ne sommes pas des statues, Jamie. Nous bougeons.
Il secoua la main qu'il venait de lever pour montrer qu'il bougeait.
« Ouais parce que vous voulez rester proches des humains.
Il me regarda avec une certaine intensité, ensuite. Je supposai que j'avais découvert son secret.
« C'est pourquoi tu ne veux pas des M&M's.
« Je suis allergique aux arachides, rétorqua-t-il.
J'écarquillai les yeux.
« Oh non, soufflai-je.
Le cupcake et le muffin avaient des cacahuètes. J'avais pensé à ne pas faire de gâteau à la fraise mais je n'avais pas pensé qu'il pouvait avoir d'autres allergies.
« Tu n'as pas mangé les gâteaux, hein ?
Il sourit grandement.
« Non, je ne savais pas ce qu'ils contenaient, je ne pouvais pas prendre le risque mais c'était une charmante attention.
Rassurée je me détendis puis me figeai.
« C'était pas moi, réfutai-je. C'était... quelqu'un d'autre.
Je ne pouvais pas dire que c'était Bella, il aurait pensé qu'elle essayait de le tuer. Oh bon sang, j'avais essayé de le tuer, je ne pouvais pas aller contre ma nature de méchante.
« On doit y aller, annonçai-je.
Il fallait fuir avant qu'il comprenne mon plan machiavélique.
« Je vais conduire, décida Bella.
Je supposai que c'était une bonne idée. Je courus presque de l'autre côté de la voiture dont le moteur tournait toujours et m'installai sur le siège passager. Bella ouvrit la porte et se tourna vers Edward.
« Merci encore, on se rejoint toujours chez moi ?
« Je te suis, confirma-t-il.
Voilà qui était intéressant. Bella monta et claqua la portière, elle attendit qu'Edward monte dans la sienne avant de nous faire avancer.
« Tu l'as invité pour la nuit ? M'enquis-je.
« Non, on a un travail de littérature à faire ensemble.
C'était pas encore gagné mais ça avançait. Edward nous suivait de près et il se gara quasiment en même temps que nous. Nous nous rejoignîmes à mi-chemin afin de rentrer ensemble. Ce fut là que je me rendis compte que ma fuite n'avait absolument pas marché parce qu'Edward était toujours là. Charlie regardait le base-ball à la télé, toujours dans sa tenue de shérif.
« Ça a été... commença-t-il.
« Papa, le coupa Bella. Il s'est passé quelque-chose.
Charlie, qui ne prenait pas les choses à la légère quand on lui disait que quelque-chose s'était passé, se leva rapidement pour nous rejoindre.
« Jamie a eu une hallucination, on aurait pu avoir un accident, elle a parlé d'un serpent qui voulait la contrôler.
« Je l'emmène à l'hôpital.
Il ne prenait vraiment pas ça à la légère.
« Mr Swan ? L'interpella Edward.
Charlie se tourna vers lui.
« Mh, bonjour, qui es-tu ?
« Edward Cullen, je suis dans certains cours de Bella. Mon père, Carlisle Cullen travaille comme médecin à l'hôpital, ils ne sont pas au courant puisque l'établissement n'a pas de service dédié mais Carlisle a une spécialisation en psychiatrie, vous devriez demandé après lui.
Ce fut ainsi que mon père et moi nous trouvâmes sur nos chaises devant Carlisle Cullen, le père du gars que j'avais essayé de tuer. Carlisle avait lui aussi les yeux dorés et la peau blafarde, essentiels à sa condition de statue, ses cheveux blond platine étaient coiffés en arrière par du gel. Il était lui aussi d'une beauté à couper le souffle mais je n'étais pas attirée par les Carlisle Cullen. Fort heureusement.
« Voilà, commença Charlie. Votre fils, Edward, m'a dit que vous aviez une spécialisation en psychiatrie et c'est pourquoi je vous ai demandé pour voir Jamie.
« Oh, tu es au lycée avec Edward ? Me demanda Dr Cullen.
« Oui, docteur.
« Tu peux m'appeler Carlisle, donc qu'est-ce qui ne va pas ?
« Nous étions déjà venu mardi dernier, expliqua mon père. Le docteur... Gerandy, je crois, lui a prescrit des anxiolytiques en attendant que j'obtienne un rendez-vous à l'hôpital de Port-Angeles avec un psychiatre. Je ne sais pas si c'est lié aux médicaments ou si son état s'aggrave mais elle a eu une hallucination, tout à l'heure. Comme elle allait conduire, elle aurait pu avoir un accident avec sa sœur.
« La conduite est à éviter sous anxiolytiques, ça entraîne des somnolences, dévoila Carlisle avec douceur, et ça peut effectivement provoquer des hallucinations. Qu'est-ce qui a décidé le docteur Gerandy de lui donner des anxiolytiques ? Et vous savez de quel trouble elle souffre ?
Mon père lui répéta ce qu'il avait déjà dit à l'autre médecin.
« Je vois, vous pourriez sortir afin que je m'entretienne avec elle ?
Charlie hocha la tête et s'en alla. Quand il eut refermé la porte, Carlisle se racla la gorge pour que je le regarde lui plutôt que la porte. Je me redressai donc pour lui faire face de nouveau.
« Souhaites-tu me parler de quelque-chose ? Me demanda-t-il d'une voix douce.
Se pouvait-il qu'il sache ? Il ne pouvait pas le savoir ? Si ? J'avalai ma salive, je décidai de jouer la carte de l'honnêteté, espérant recevoir sa clémence, en retour.
« J'ai essayé de tuer votre fils.
Il fut surpris. Merde, il ne savait pas. Il resta un moment silencieux.
« C'est regrettable, lâcha-t-il sans colère. Comment t'y es-tu prise ?
« J'ai fait des gâteaux que j'ai glissé dans son casier, j'avais mis des cacahuètes. Et tout à l'heure, je lui ai proposé des M&M's.
« Quand as-tu su qu'il était allergique aux arachides ?
« Après qu'il aie refusé les M&M's, avouai-je. Heureusement qu'il n'a pas mangé les gâteaux.
« Tu n'as donc pas essayé de le tuer puisque tu ne le savais pas.
Ça avait du sens.
« Mais je savais qu'il était allergique aux fraises donc j'aurais dû... demander.
« Ne t'en fais pas, Edward sait qu'il ne peut pas manger quelque-chose dont il ne connaît pas les ingrédients.
« Donc il ne pensera pas que la personne a voulu le tuer ?
« La personne étant toi, me signala-t-il. Non, il ne pensera pas cela.
« Rassurant, déjà qu'il me déteste.
Carlisle fronça les sourcils.
« Edward peut être un peu replié sur lui-même, tu sais, je ne pense pas qu'il te déteste. S'il pouvait se trouver au milieu de nul part sans personne à des kilomètres, il le ferait. Et puis, tu lui as fait des gâteaux, comment te détester ?
« Il ne sait pas que c'est moi, il était supposé croire que c'était Bella mais j'ai dû lui dire que c'était quelqu'un d'autre à cause de... des arachides.
« Pourquoi lui fais-tu des gâteaux et vouloir lui faire croire qu'ils viennent de Bella ?
« Pour les aider.
« Les aider ?
« À tomber amoureux.
« Bella, il s'agit bien d'Isabella Swan, n'est-ce pas ? Qui est de ta famille, ta sœur ?
Je hochai la tête. Il sourit comme s'il connaissait déjà l'histoire de ma sœur.
« Tu ne peux pas forcer deux personnes à tomber amoureux, Jamie.
Je lui lançai un regard consterné.
« Je ne les force pas, ils sont déjà en train de tomber amoureux, je les aide un peu... en essayant de ne pas jouer mon vrai rôle.
« Ton vrai rôle ?
« La méchante de l'histoire.
Carlisle tiqua.
« Pourquoi serais-tu la méchante de l'histoire ?
« Au départ, je ne devais être que le personnage secondaire mais quand j'ai vu Edward, j'ai compris que je serai la méchante, celle qui sabotera leur relation.
« Pourquoi ?
« Bah... Je ne suis pas attirée par les hommes ni par les femmes mais Edward, oui. J'en ai déduis que j'étais attirée par les Edward Cullen.
« Je vois, souffla-t-il. J'aimerai qu'on revienne sur cette histoire de rôle, d'histoire et de personnages.
« Oui ?
« Penses-tu être en train de vivre dans un film ?
« Un livre, vu que Bella est le personnage principal, elle aime lire, pas la télé.
« Je vois. Écoute, je te propose un autre rendez-vous dans lequel on pourra parler plus amplement. Si tu veux bien ?
« D'accord.
Voilà pour ce quatrième chapitre. Vous a-t-il plu ?
Je voulais préciser que l'hallucination de Jamie était vraiment dû aux anxiolytiques qu'elle prenait, au cas où.
A très vite pour la suite,
des bisous.
