28

Rika Ichijouji, comme à son habitude, est en route pour l'hôpital ou repose son fils après une tranquille journée de travail. Il commence à faire froid et Rika est bien contente d'avoir pensé à mettre son foulard et ses gants. Entrant dans l'hôpital, la mère de Ken s'assombrie. Le froid veut aussi dire que l'automne avance, que le temps avance et que la vie de son fils est comptée. Combien de fois a-t-elle eu la même discussion avec son mari à ce sujet? Elle s'était juré qu'elle ne changerait jamais d'avis, qu'elle ne laisserait personne débrancher la seule chose qui retient son fils en vie. Finalement, Tsuyoshi, son propre mari avait réussit à la convaincre. Et maintenant, Rika se sentait affreusement dégoûtée par sa propre faiblesse. Impossible de revenir en arrière, l'argent qu'elle et Tsu convoitaient tellement autrefois est bientôt complètement dépensé en frais d'hôpital.

Arrivé à la chambre de Ken, Rika s'installe à son chevet et caresse doucement la main de son plus jeune enfant tout en lui racontant sa journée. Rika avait lu, il y a longtemps, un article sur les gens plongés dans le coma et l'idée que son fils pouvait peut-être l'entendre lui avait plue. Tout de suite après la lecture de cet article, Rika avait commencé à parler constamment à son fils, lui disant des milliers de fois combien est était désolée d'avoir pris ses enfants pour de véritables banques ambulantes. Chaque jour, Rika parle à son fils et espère secrètement qu'il va se réveiller et lui répondre.

Il ne le fait jamais, mais aujourd'hui, à son insu, Ken écoute religieusement. Il est appuyé sur le mur du fond, caché dans l'ombre. Cela fait neuf mois que le Kaiser n'est pas entré dans la chambre ou repose son corps. Neuf mois à essayer de convaincre le Grand du ciel de le réveiller pendant qu'il est encore en vie, neuf mois de frustration. Mais maintenant, tout ça n'a plus d'importance. Le Kaiser s'avance jusqu'à sa mère et pose ses mains sur les épaules de la femme. Rika, qui se sentait affreusement coupable depuis l'accident, ressent tout à coup un grand soulagement. Comme si un poids avait été enlevé de sur son dos. Elle soupire et ferme les yeux. Il y a quelqu'un qui veille sur elle, elle le sent. « Tout ira bien Ken-chan, tout ira bien… » murmure-t-elle.

***

« Ken. Ça faisait longtemps que je ne t'avais pas vu dans cette pièce. dit Osamu qui est apparu aussi silencieusement que son frère. Rika, sans savoir que ses enfants discutent tout près d'elle continue à parler doucement.

- Je n'avais aucune raison d'y être. Tant qu'il y avait une chance que je retourne dans le monde des vivants, je refusais de me voir dans cet état. répond Ken.

- Et maintenant tu abandonnes? Je te trouve étrangement calme maintenant que Daisuke est reparti. Vous avez discuté de tout ça avant qu'il parte?

- Honnêtement Osamu, ce n'est pas de tes affaires. Je ne viens peut-être pas souvent ici, mais je ne suis pas aussi naïf pour penser que je vais rester dans cet hôpital encore bien longtemps. Tu sais, grâce à Daisuke, j'ai découvert que je me conduisais vraiment en égoïste. Alors que je me plaignais constamment de mon sort et que je demandais sans cesse au Grand du ciel de me ramener dans le monde des humains, je n'ai jamais pensé une seule minute que je choisissais nos parents plutôt que toi. Je suis désolé.

- Cette idée ne m'était jamais venue à l'esprit. Ken, tu as le don pour tout te mettre sur le dos. Tu es sûr que tu n'es pas un peu masochiste? le taquine Osamu.

- Enfin, ça n'a plus aucune importance maintenant, je serai probablement un ange moi aussi…

- Et c'est mal? Si je ne me trompe pas, tu désirais retourner dans le monde des vivants, mais s'Il t'avait fait ange, tu n'aurais pas détesté non plus. Être vivant n'était qu'une préférence. Tout pour échapper à cet état d'entre-deux. J'ai l'impression que ta perception a changée.

- Je ne vois pas ce que tu veux dire… répond Ken en se détournant, lâchant les épaules de sa mère par la même occasion.

- Je crois que tu sais parfaitement ce que je dis. Ken, il n'y rien de mal à vouloir retourner dans le monde des vivants. Même si ce n'est pas pour retrouver papa et mama. dit Osamu dont les yeux se sont encore plus adoucis. (si c'est possible)

- Pourquoi es-tu venu, Osamu?

- Tu changes de sujet? Bon, très bien. Le Grand du ciel t'a convoqué. C'est important. Tu dois te rendre au paradis le plus vite possible.

- Ok. dit le Kaiser qui s'apprête à se téléporter.

- Je t'aime Ken.

- Je t'aime aussi. » dit ce dernier avant de disparaître.

Osamu reste le regard dans le vide un bon moment après le départ de son frère. Il est heureux de la discussion qu'il a eut. Content que Ken lui ai demandé pardon. Son jeune frère a beaucoup grandit ces derniers temps. Osamu s'approche du lit, de l'autre côté de sa mère. Il observe la femme au visage fatiguée et sourit. Il se penche vers son frère, l'observe et lui frôle la joue de sa main d'ange. Après réflexion, Osamu embrasse son frère sur le front, puis recule vers le mur du fond. Il regarde sa famille, Tsuyoshi Ichijouji maintenant aussi dans la pièce dans laquelle il est entré sans faire aucun bruit et sourit. Il les aime tellement. Avant de disparaître complètement, Osamu regarde la tête endormie de son frère et murmure : « Tu va me manquer Ken… beaucoup. »

Bon, j'imagine que ça aussi c'est évident à deviner… plus que deux chapitres!!!