Second chapitre ! ^^
Blueyes : je jure que j'ai fait le plus vite que je pouvais…Mais le troisième chapitre risque d'arriver dans assez longtemps. Désolée…-_-"
Ephy : Nyark, voui, bien les torturer.
Tilliana : Contente que ça te plaise ! Merci !^^
Avertissements : Angsty Trowa ; Flying Heero ; WuFei sous la douche (on arrête de baver, pliz, pensez au clavier…^^) ; EENI (Esprit Errant Non Identifié), verre suicidaire.
Chapitre 2 : le Réveil
Quelques semaines plus tard, satellite-colonie LD 420, palais divisionnaire.
Trowa fit un signe de tête à Heero qui entra dans la pièce. Tout était silencieux, et tandis que l'acrobate communiquait à WuFei la réussite de leur infiltration, Heero s'installa à l'ordinateur central.
Comme WuFei l'avait annoncé, ils avaient été assignés à cette mission directement après leur retour de vacances. Ils n'avaient même pas eu le temps de défaire leur valise avant d'être envoyés à la base Preventers de la Zone 5, sur un satellite de L2 nommé B678.
Cette histoire de disparition d'enfants sur LD 420 commençait lentement à être connue et les Preventers voulaient la régler avant que ça n'empire.
Tous ces enfants avaient un point commun : ils étaient orphelins de guerre, et sous la tutelle de l'Etat divisionnaire du satellite-colonie. De là à penser que les autorités de LD 420 étaient au courant, ou même y participaient, il n'y avait qu'un pas.
Comme avait dit Duo, les orphelins coûtent chers… Trowa et Heero avaient été envoyés pirater l'ordinateur central du satellite-colonie, au cas où.
Les fenêtres s'ouvraient avec une facilité déconcertante devant Heero. Trowa s'approcha et jeta un coup d'œil par-dessus son épaule. Lorsque Heero eut fini de scanner la totalité du disque dur, les deux jeunes hommes échangèrent un regard. Ils n'avaient pas besoin de parler pour savoir que c'était trop simple.
Une unité centrale ne s'ouvrait jamais comme ça au premier venu.
_ Programme caché ? demanda Trowa.
Heero secoua négativement la tête.
_ J'en aurais trouvé la trace. A mon avis c'est plutôt un programme parallèle qui doit se déclencher au démarrage de l'ordinateur si on a le code. Il doit y avoir un second disque dur, mais il se détruira dès que j'essaierai de l'ouvrir sans ce code. Il nous reste combien de temps avant d'être repérés ?
_ Une demi-heure.
_ Court, murmura Heero.
Il fronça un instant les sourcils pour réfléchir, puis manipula la souris quelques minutes avant de trouver l'antivirus et sa carte d'identité.
Un sourire ironique effleura un instant ses traits, et Trowa le regarda d'un air interrogateur.
_ C'est un antivirus de la Wild, Wall, ricana presque Heero. C'est moi qui l'ait créé.
_ Ah.
Après avoir vérifié le programme, Heero découvrit que Wall était apparemment en ligne avec un autre ordinateur. Or, ce n'était pas le cas, vu de l'extérieur du moins. Donc il était forcément connecté avec le second disque dur.
Un antivirus pour deux disques. Intelligent car ainsi les deux programmes semblaient ne faire qu'un. Un autre antivirus serait forcément entré en conflit avec le premier. Politique de monopole des compagnies informatiques… Mais également une faiblesse, car elle donnait un accès au second disque dur.
"On va pouvoir le chopper au démarrage de l'ordinateur, pensa Heero. Si je contamine le premier disque dur, Wall sera quand même obligé de vérifier les deux, et là je pourrais trouver un passage."
Sans un mot, il brancha son ordinateur portable à l'unité centrale et les mit en réseau.
_ Plus qu'un quart d'heure, déclara Trowa d'une voix neutre.
Calmement, Heero alluma le portable et inséra sa disquette "spéciale virus" avant de redémarrer l'autre ordinateur. A l'instant où l'écran s'allumait, Heero lui inocula via le portable l'un des derniers virus qu'il avait mis au point.
Ce dernier ne serait pas assez puissant pour lutter contre Wall dont le jeune Japonais était particulièrement fier, mais il l'occuperait assez longtemps pour qu'Heero puisse s'infiltrer dans le programme du second disque dur et copier les informations dont il avait besoin.
Wall repéra le virus. "C'est parti."
Concentré, Heero avait effacé tout ce qui était extérieur à sa mission. Trowa regarda sa montre, et un bip discret le prévint que le QG cherchait à les appeler.
_ Trowa, dit-il à voix presque basse.
_ Vous en êtes où ? demanda Duo. WuFei est en train d'organiser une équipe de récupération au cas où ça irait mal, mais je préférais qu'on n'en ai pas besoin.
_ Heero est sur l'unité centrale.
_ Y'en a encore pour longtemps ?
_ Je ne sais pas.
_ Et votre temps de sursis ?
_ Sept minutes.
_ Je vous rappelle dans deux minutes. Vous avez intérêt à avoir commencé à bouger vos fesses de là, mission accomplie ou pas.
La communication fut coupée, et Trowa se tourna vers Heero qui semblait un peu tendu. _Qu'est-ce qu'il se passe ? demanda-t-il.
_ Wall est un peu trop efficace, marmonna Heero. Il se débarrasse du virus trop vite.
_ Duo veut nous voir hors d'ici dans une minute 27.
_ Hn, hn.
Enfin, la "porte" vers le second disque dur s'ouvrit et Heero ne perdit pas de temps. Il s'y engouffra en quelques dixième de secondes avant qu'elle ne disparaisse et commença à copier le programme sur son propre ordinateur. Mais au bout de quelques secondes, il se figea.
_ Kuso ! jura-t-il. Un programme cancer ! Il est en train de bouffer celui de mon ordinateur pour s'installer à sa place !
Evidemment son antivirus Wall II, une version améliorée de Wall pas encore commercialisée, réagit immédiatement et combattit le programme cancer, empêchant les informations de s'enregistrer.
_ Trowa, Heero, vous en êtes où ? appela Duo.
_ …
_ Trowa !!
_ Il y a un problème. Impossibilité de prendre les informations.
_ Tant pis, bougez-vous !
_ Heero ?
_ J'y suis presque, rétorqua le jeune Japonais qui tapait à une vitesse quasi inhumaine.
_ Peu importe, nom de Dieu, il vous reste plus que quatre minutes pour décamper !
_ J'y suis presque, répéta Heero en insérant une nouvelle disquette, priant très fort pour que ça marche.
_ Heero, Trowa, cassez-vous de là, c'est un ORDRE ! hurla Duo.
_ Heero ? appela de nouveau Trowa qui n'avait pas l'intention de partir sans lui mais savait qu'il fallait obéir à l'ordre. Il va falloir que je t'assomme.
_ Pas besoin, répliqua le Japonais en retirant la disquette. J'ai fini.
_ Duo, on te recontacte dans deux minutes, dit Trowa en coupant la communication.
Heero débrancha son ordinateur et les deux jeunes hommes s'apprêtaient à sortir de la pièce lorsque l'alarme se déclencha. Ils se regardèrent. En théorie il aurait dû leur rester encore plus d'une minute.
_ Il semble que j'ai mal calculé, annonça Trowa paisiblement.
_ Nous ferions mieux de nous dépêcher, remarqua Heero tout aussi calme.
Ils commencèrent à courir, le cœur battant mais l'esprit clair. Les gardes n'allaient pas tarder à se réunir et à les trouver. Ils entendaient déjà les cris d'avertissements. Puis : " Ils sont là ! Autorisation de tirer à vue !"
"Et merde", pensèrent Heero et Trowa en même temps.
La course dura quelques minutes avant qu'ils n'atteignent le toit par lequel ils étaient arrivés car l'entrée principale était inaccessible.
Ils devaient redescendre le plus vite possible et rejoindre leurs Mobile Suit avant de se faire rattraper. Ils s'avançaient vers le bord du toit, lorsque :
//misère, allez dire à ma mère…//
Trowa se figea et se retourna.
// Compagnons de misère, allez dire…//
Il n'y avait personne. Mais il n'était pas fou, il entendait quelqu'un…un enfant…un enfant qui chantait…
// à ma mère qu'elle ne m' reverra plus…//
Trowa recula d'un pas. Qui chantait ? Qui était là, sur le toit ? Un rire clair éclata soudain, et entre deux hoquets, la voix ajouta : // J'suis un enfant, vous m'entendez…//
_ Trowa, qu'est-ce que tu fais ? cria Heero qui en se retournant avait réalisé que l'autre ne bougeait plus, le regard étrangement fixe.
_ Tu l'entends ? murmura Trowa.
//Qu'elle ne m'reverra plus…//
Le jeune homme aux yeux verts recula soudain, et Heero se rendit compte qu'il était très près du bord. "TROWA !!"
Mais l'autre ne l'entendit pas et recula encore. Lorsque son pied ne rencontra que du vide, la voix éclata de nouveau de son rire clair avant de terminer //J'suis un enfant perdu ! //
Heero se jeta en avant et attrapa la main de Trowa mais au lieu de le retenir, il fut entraîné dans la chute à son tour.
Soixante étages.
Ils ne survivraient jamais.
***
Quelques milliers de kilomètres plus loin, Le Caire, Egypte.
Quatre releva soudain la tête les deux mains pressées contre sa poitrine, le regard figé dans un mélange de joie et de douleur.
_ Quatre-sama ! appela Rashid, inquiet. Qu'est-ce qu'il se passe ?
_ Ce n'est rien, Rashid…Ce n'est rien…
Quatre leva la tête vers les étoiles, un sourire sur les lèvres. Là haut, il en était sûr, quelque part dans l'espace, l'un d'eux était en train de se réveiller.
***
Trowa sortit de sa transe en réalisant qu'il tombait en chute libre avec Heero accroché à lui, étrangement léger. Ils allaient s'écraser. Heero avait les yeux fermés, les sourcils froncés comme s'il réfléchissait. Ça c'était bien le genre d'Heero.
"Il faudrait ralentir la chute", pensa-t-il.
Il ne voulait pas mourir. Il pensa à Catherine, au cirque. Il pensa à Duo qui devait attendre leur appel avec inquiétude. A WuFei prêt à partir au quart de tour les sauver.
Il pensa à Quatre qu'il avait surpris presque en larmes le jour de leur départ d'Axious pour une raison que Trowa ne connaissait pas. Il s'était éclipsé sans un bruit, écœuré par sa propre lâcheté mais incapable d'aller consoler le petit blond.
Il pensa à Heero qui avait essayé de le sauver et mourrait avec lui, par sa faute.
Il ne voulait pas mourir.
Je ne veux pas mourir.
Plus tard, il fut incapable de se rappeler exactement ce qu'il s'était passé, mais une chose était sûre : le corps d'Heero s'était brusquement mis à briller d'une lueur dorée complètement surnaturelle, et leur chute fut ralentie.
Trowa crut apercevoir des plumes de lumière autour du jeune Japonais, mais il n'en aurait pas juré. Heero avait toujours les yeux fermés.
Puis d'un coup une chaleur intense envahit Trowa, il se sentit enveloppé par la lumière, et l'instant d'après, ils se retrouvaient tous les deux sur le sol, debout, sans comprendre.
Heero ouvrit les yeux et ils se regardèrent avec confusion, complètement perdus.
Un coup de feu et une grimace de douleur d'Heero les réveillèrent. Ils se mirent à courir, mais Heero boitait, et même s'il restait rapide, ça les ralentissait, sans compter qu'il risquait de perdre beaucoup de sang.
Trowa s'arrêta un quart de seconde pour soulever Heero stupéfié dans ses bras, et recommença à courir, pas du tout gêné pas le poids. Ce n'était pas la première fois qu'il le remarquait, mais à chaque fois il était sidéré par la légèreté du Japonais. Ça ne pouvait pas être normal. Il y avait sûrement du docteur J là dessous.
Trowa ne relâcha Heero que lorsqu'ils atteignirent les mobiles suit, des Taurus quatrième génération améliorés par les techniciens des Preventers.
"RDV au point 12", dit le Japonais.
Ils montèrent dans leur armure volante, et disparurent dans l'espace sans être rattrapés par quiconque.
Ils se retrouvèrent au point douze et contactèrent Duo immédiatement.
_ Trowa Barton et Heero Yui au rapport, annonça le Français calmement.
_ BANDE DE CRETINS !!! hurla Duo, l'air absolument furieux. Deux minutes, vous aviez dit !!! Et ça fait vingt minutes que c'est silence radio !! WuFei est déjà au point 4 avec toute une équipe de secours !!!
_ Ninmu kanryu, fit Heero.
Duo le regarda à travers l'écran d'un air exaspéré.
_ Vous allez me flanquer un ulcère à prendre des risques comme ça, marmonna-t-il.
_ Venant de toi, désolé de ne pas le prendre au sérieux, rétorqua Heero.
_ Eh, oh. Ici c'est moi l'chef, contra Duo avec un sourire. On réglera ça tout à l'heure quand vous me ferez votre rapport. En attendant bougez pas d'ici, WuFei va vous récupérer. Rien à signaler ?
_ Heero est blessé, dit Trowa.
_ Grave ?
_ Une balle dans la jambe, répondit Heero en haussant les épaules. Elle est ressortie.
_ Sally est arrivée il y a deux heures. Elle s'en occupera. Tant qu'on y est, Hee-chan, ce soir c'est toi qui cuisines ou je commande une pizza.
_ Je me demande ce que tu manges quand je ne suis pas là, marmonna Heero.
_ De la pizza, pourquoi ? A tout', je vous attend pour le rapport.
L'écran s'éteignit, et Trowa rétablit tout de suite la communication entre leurs deux MS. Il y eut quelques instants de silence, avant que le Français ne demande calmement :
_ Qu'est-ce qu'on fait ?
_ On n'en parle pas. Ce qui s'est passé n'a aucun rapport avec la mission.
Trowa acquiesça, soulagé.
_ Heero, est-ce que tu as entendu quelque chose, sur le toit ?
_ Non.
Heero ne demanda pas pourquoi il voulait savoir ça. Beaucoup de choses s'étaient passées pendant cette mission, beaucoup de choses qu'il valait mieux ignorer.
Quelque chose ou quelqu'un avait appelé la lumière dorée. Et pour une raison qu'Heero aurait été incapable de dire, il était sûr que c'était Trowa.
***
Un peu plus tard, B678, infirmerie 19h46.
Duo entra dans l'infirmerie, mais Heero n'était pas encore sorti de la salle d'opération. En fait la balle était restée dans la jambe, malgré ce qu'il avait dit.
Sur le bureau de Sally, des dossiers étaient posés, certains portant le nom d'Heero. Duo s'approcha, curieux. Il s'agissait pour la plupart des résultats d'un nombre impressionnants de visites médicales.
Sally entra dans la pièce et Duo la salua joyeusement. La jeune femme s'était faite transférer ici en même temps que l'équipe de WuFei le temps de l'enquête.
_ Comment va Superboy ?
_ Il est en cours de réveil. Il a beau penser qu'une anesthésie est une perte de temps, je refuse de l'opérer à vif.
Duo fit la grimace puis désigna les rapports.
_ Eh, dis-moi, Heero et toi vous entretenez une relation secrète, ou quoi ? demanda-t-il.
_ Voyons, Duo, tu penses bien que je n'oserai jamais empiéter sur ton territoire, rétorqua la jeune médecin avec un sourire malicieux.
_ Eh, oh, tu vas pas t'y mettre toi aussi, non ?
_ Uh, uh. Non, en fait je le surveille.
_ Pourquoi ? demanda Duo, soudain inquiet.
_ A cause des expérimentations que le docteur J a fait sur lui. Heero aura bientôt fini de grandir, son corps risque de faire un rejet des trucs pas normaux.
_ Du genre ?
_ Du genre son squelette. Je sais pas si tu t'es rendu compte de la légèreté d'Heero ?
_ Ben, si. Je trouvais pas ça normal, d'ailleurs. Mais y'a tellement de truc pas normaux chez lui qu'à la fin on remarque même plus…
_ Heero a les os fins comme du cristal, et solides comme du Gundamium.
Duo la regarda d'un air de doute profond, mais Sally restait parfaitement sérieuse.
_ Je vois pas comment c'est possible, fit-il.
_ Moi non plus, mais c'est comme ça. Je donnerai n'importe quoi pour savoir comment le docteur J a fait ça, mais d'un autre côté, je préfère pas. Ça pourrait être dangereux, une connaissance pareille. Sans compter qu'il faudrait transformer Heero en rat de laboratoire, et ça je m'y refuse.
_ Et à part, qu'est-ce qu'il lui a fait ?
_ Apparemment le corps d'Heero a moins besoin d'énergie que la plupart des gens, mais par contre son taux électrique est plus fort…
_ Uh ? Electrique ?
_ Tout être humain est traversé par un faible courant électrique, Duo. Celui d'Heero est bien plus élevé que la moyenne.
Duo fronça les sourcils, l'air de réfléchir, puis regarda Sally.
_ Ça pourrait expliquer certaines choses, fit-il sérieusement.
_ Comme quoi ?
_ Sa coupe de cheveux, termina-t-il avec un grand sourire.
_ Baka.
Duo se retourna vers le Heero qui venait de sortir de la salle de réanimation. Le jeune homme lui lançait un regard à moitié furieux.
_ Hee-chan ! T'es en pleine forme, je vois. WuFei, Trowa et Hilde mangent à la maison, va falloir faire les courses au passages. Et t'inquiète pas pour le rapport, Trowa me l'a fait.
_ Je peux le voir ? demanda Heero d'un ton plat.
_ Si tu veux, fit l'Américain un peu étonné.
_ Te surmène pas, Heero, intervint Sally. J'apprécierais que mes points de sutures tiennent, cette fois…
_ Hn.
_ Tu veux pas dîner avec nous, Sal' ? proposa Duo. Plus on est de fous…
_ Merci, mais j'ai encore pas mal à faire. Bonne soirée.
_ Toi aussi.
Les deux ex pilotes sortirent de l'infirmerie et firent un détour par le bureau de Duo. Heero prit le rapport et le lut avec attention.
Duo fronça les sourcils. Heero agissait comme si il n'était pas sûr de savoir ce qu'il y avait dans le rapport. Comme si…Est-ce que Trowa et Heero cachaient quelque chose ? Mais… Ils ne lui mentiraient pas, n'est-ce pas ?
_ Heero ?
_ Hn.
_ Dis-moi…Tu es sûr d'avoir toutes les infos sur ton portable ?
_ Oui. Je les décoderai demain.
_ Je pourrais rester avec toi ?
Heero leva les yeux du rapport, sincèrement confus.
_ C'est ton travail, non ?
_ Tu pourrais préférer faire ça seul…Tu as toujours préféré faire ça seul…
_ Aucune importance, répondit Heero en haussant les épaules. Fais comme tu veux.
Quoiqu'il cache, ça n'avait pas de rapport avec la mission, apparemment. Il avait dû se passer quelque chose que ni Trowa, ni Heero n'avaient envie de dévoiler.
Mais qu'est-ce que je raconte, moi ? Pourquoi est-ce qu'ils cacheraient quoique ce soit ? Et puis, on est amis, non ? C'est ridicule…
Pourtant l'idée s'était solidement ancrée en lui, et il se sentait mal à l'aise.
Heero reposa le rapport, et ils prirent la navette pour L2. Duo avait proposé à l'un des trois de venir s'installer chez lui, et ça avait paru complètement naturel que ce soit Heero, sans que le Japonais l'ait demandé. Mais pour WuFei et Trowa, ça paraissait évident. Pour Duo aussi, en quelque sorte.
L'Américain décida d'oublier cette histoire de rapport pour la soirée, et ils rentrèrent à l'appartement pour préparer le dîner en attendant les autres.
***
WuFei entra dans la salle de bain exiguë de son appartement de fonction. Il se déshabilla, pliant ses affaires avec soin et défit sa queue de cheval avant d'entrer sous la douche. Il mit le thermostat sur 40° et entreprit de se laver les cheveux.
Il ferma les yeux et fronça un peu les sourcils, pensant aux événements de la journée. D'abord la mission d'Heero et Trowa qui avait presque mal tournée, et ensuite l'attitude de Trowa lorsqu'il lui avait été demandé de faire le rapport. Il l'avait rédigé d'une manière presque hésitante, son crayon s'arrêtait souvent comme s'il avait besoin de réfléchir avant d'écrire. Or Trowa Barton n'était pas du genre à chercher des figures de style pour rendre son rapport plus joli.
Ni du genre à falsifier un rapport, d'ailleurs.
Il en parlerait avec Heero. Il devait forcément savoir ce qu'il se passait, et si WuFei lui demandait sans détour, il s'expliquerait, même si ce n'était que pour dire qu'il ne pouvait pas en parler. Si c'était le cas, WuFei l'accepterait. Heero et Trowa savaient sûrement ce qu'ils faisaient, et ils ne mettraient certainement pas la mission en danger.
WuFei se rinça les cheveux et allait fermer le robinet quand un courant d'air glacé traversa la douche avant de disparaître aussi rapidement qu'il était né. Le jeune Chinois se figea un instant, laissant l'eau brûlante réchauffer sa peau.
Qu'est-ce que c'était que ça ?
WuFei sortit de la douche. La salle de bain était une petite pièce fermée qui ne permettait aucun courant d'air. Le miroir en face était même couvert de buée à cause du manque d'aération. WuFei prit sa serviette et se sécha lentement.
Ce n'était pas la première fois que ça arrivait.
En fait, ça avait commencé un an plus tôt, peu après l'épisode Mariemaia et qu'il se soit engagé chez les Preventers. Un courant d'air froid, la sensation d'une présence dans la même pièce que lui même si elle était vide. WuFei ne s'en était pas spécialement ému, dans son clan il avait appris que les esprits parfois restaient dans le monde des Vivants et s'attachaient à une personne pour un temps court. Il l'avait accepté sans se poser de question et ne s'occupait pas de l'âme qui semblait s'être liée à lui. Ce n'était pas spécialement gênant.
Mais jamais le courant d'air n'avait été aussi violent. Ni la présence si forte. S'appliquant à ignorer quoique ce soit qui se trouvait dans la pièce avec lui, il se sécha les cheveux et sortit de la salle de bain pour s'habiller, enfilant un pantalon et une tunique blanche. Il devait se dépêcher s'il ne voulait pas être en retard. Duo ne le louperait pas si ça arrivait…
WuFei se plaça devant le miroir et entreprit de faire sa queue de cheval, tirant ses cheveux en arrière avec force. Mais ils étaient trempés et glissant, et au bout de trois essais il s'impatienta et les lâcha tous avant de les reprendre avec agacement.
Au même instant, deux mains légères comme le vent se posèrent sur les siennes, légères comme le vent mais avec une vrai force.
Il n'y avait rien dans le miroir.
Ces mains…Ces mains invisibles qui se mirent à guider les siennes, réunissant ses cheveux avec adresse, l'obligeant doucement à tirer sur l'élastique pour les attacher.
WuFei recula brusquement, et ses cheveux furent de nouveau libres. Il se regarda dans la glace, ses mèches éparses et humides, ses yeux dilatés, sa respiration soudain saccadée.
Laissant tout en place, WuFei attrapa son blouson et sortit à toute vitesse de chez lui, ne cherchant pas à savoir si l'esprit le suivait ou pas.
Il courut, courut, sans s'arrêter, ne pas réfléchir, ne pas y penser, ce n'était pas possible…Il refoula les souvenirs, refusa d'y penser et lorsqu'enfin il s'arrêta, il se rendit compte qu'il était déjà très loin de chez lui.
Quelque chose glissait sur ses joues. Quelque chose d'humide.
WuFei effaça d'un geste rageur les larmes qui lui brûlaient les yeux. "Ça suffit ! hurla-t-il. Ça suffit !!!!"
Il inspira et serra les dents. Il ne sentait pas la présence de l'esprit autour de lui. C'était déjà ça. Il espérait qu'il était parti, il espérait qu'il ne reviendrait plus jamais.
Il n'avait pas le droit de faire ça. Pas le droit.
WuFei se passa une main fatiguée dans les cheveux pour les remettre en ordre. Il les attacha sans le soin habituel avec l'élastique qui était resté autour de son poignet et sortit son téléphone portable pour appeler un taxi.
Rien ne s'était passé.
Non, rien ne s'était passé.
***
Heero envoya l'e.mail à Zechs puis éteignit l'ordinateur. A cause de la nouvelle mission, il n'avait pas eu le temps de mettre les choses au clair avec le frère de Relena. Il avait été prévenu dès son retour de Grèce. Lady Une avait accepté de garder Shad avec Mariemaia le temps de son absence. Il aurait été malheureux dans un appartement, et Heero n'était pas sûr qu'il aurait pu supporter Shad et Duo dans la même pièce.
Le chien et l'Américain s'étaient battus pendant les deux semaines du séjour chez Quatre.
Heero sortit de sa chambre, rejoignant Trowa, Hilde et Duo dans le salon.
_ Ah, te v'là. Manque plus que Wuffie et on pourra passer à table, j'ai une de ces dalles ! s'exclama Duo.
_ Alors Superboy, il paraît que t'as encore fait des merveilles ? plaisanta Hilde.
Trowa et Heero sursautèrent, presque imperceptiblement, mais Duo ne le manqua pas et se força à garder son masque, ne pas laisser percer son inquiétude. Cette fois il en était sûr, il s'était passé quelque chose durant cette mission.
_ Qu'est-ce que tu veux dire ? fit Heero, presque sur la défensive.
_ Que t'as plus de cicatrices que tout le monde réuni, tiens. T'as une liaison secrète avec Sally, ou quoi ?
_ Je lui déjà demandé, elle jure que non, assura Duo en souriant.
_ Mouais…va falloir creuser…
Quelqu'un sonna à la porte et Duo se leva. "Ça doit être WuFei."
L'Américain alla ouvrir, se retrouvant face à son ami, ses cheveux trempés, attachés à la va vite avec des mèches qui lui tombaient sur le visage. Mais surtout, il y avait quelque chose dans son regard…Quelque chose de hanté, de lointain.
Duo préféra garder le silence, mais il commençait presque à avoir peur.
Trois ex pilotes de Gundam perturbés, ça avait de quoi terrifier n'importe qui.
***
Le Caire, Egypte.
Quatre allait s'allonger lorsque le téléphone sonna. Il décrocha, un peu fatigué. La journée avait été plutôt fatiguante, entre les réunions pour la Winner Corp. et les autres qui semblaient avoir tous choisi la même journée pour se réveiller…
_ Quatre Winner à l'appareil, fit-il.
_ C'est moi, petit chou.
_ M'appelle pas comme ça…Qu'est-ce qu'il se passe ?
_ Encore un autre, n'est-ce pas ? Qui est-ce ?
_ WuFei, répondit Quatre. Mais ça faisait longtemps qu'il était réveillé. Un an au moins. C'est juste que la Source a commencé à nous appeler. Alors le pouvoir augmente.
_ Est-ce que tu sais pourquoi Elle nous appelle ?
_ Non…Je suppose que nous le saurons plus tard, quand nous serons tous ensemble.
_ Il en manque beaucoup ?
_ Juste un…L'Esprit-Gardien.
_ Je croyais qu'il ne faisait qu'un avec la Source…?
_ Normalement, c'est le cas…Mais cette fois ils sont séparés.
_ Eh, ça veut dire que…
_ Que la Source se dissimule volontairement, oui. Ne me demande pas comment elle le fait, je n'en sais rien. Je croyais que c'était impossible sans la protection de l'Esprit-Gardien. Et de ton côté, comment ça se passe ?
_Ça va…Un peu difficile au début, mais ils finissent par accepter le pouvoir. Ils veulent connaître l'identité de la Source…
_ Non, continue à la garder secrète. Tu sais ce qu'il risque d'arriver. Même s'ils ne le veulent pas, inconsciemment, il y a un risque qu'ils s'en prennent à Elle.
_ Je sais. Allez, bonne nuit, petit chou.
_ Bonne nuit, Dorothy.
***
L2.
La soirée se déroula sans incidents notables. Lorsque WuFei était parti, assez tôt, Hilde avait regardé Duo d'un air interrogateur tout en débarrassant la table. Trowa et Heero étaient dans la cuisine à ranger le lave-vaisselle.
_ Je peux savoir ce qu'ils ont tous ? demanda-t-elle. Superboy et la Carpe sont encore plus glauques que d'habitude, et Wuffie met au moins dix secondes avant de réagir à ce que je dis.
Duo haussa les épaules, n'ayant aucune réponse à donner. Mais si demain soir, ça n'était pas réglé, il coincerait Heero quelque part pour savoir ce qu'il se passait.
Dans la cuisine, Trowa et Heero rangeaient en silence, le seul bruit étant le choc de la vaisselle.
Ça et l'enfant qui chantait.
J'me souviens, ma mère m'aimait,
Et je suis aux galères,
J'me souviens ma mère disait,
Mais j'ai pas cru ma mère…
Trowa s'appliquait à l'ignorer, à lui tourner le dos. L'enfant cette fois était plus qu'une voix, il était une forme assis sur la table en bois au milieu de la cuisine, un vague brouillard fantomatique.
Ne traîne pas dans les ruisseaux,
T' bats pas comme un sauvage,
T'amuse pas comme les oiseaux,
Elle me disait d'être sage..
Les gestes de Trowa ralentirent, ses mains se mirent à trembler. Heero n'était pas aveugle. Il avait senti quasiment immédiatement que quelque chose n'allait pas. Et la lumière était tellement agitée au fond de lui, elle voulait sortir.
Elle cherchait à atteindre Trowa.
Le Français prit un verre pour le ranger.
J'ai pas tué, j'ai pas volé
J'voulais courir la chance
J'ai pas tué, j'ai pas volé,
J'voulais qu'chaque jour soit dimanche…
Cette chanson…Il la connaissait, il savait…Elle…elle venait de lui, du fond de lui, comme un…comme un souvenir.
L'enfant se mit à rire, et ce rire, il le connaissait aussi, même si il ne l'avait pas entendu depuis des années. Depuis tant d'années.
Ce rire…ce rire, c'était le sien.
Trowa lâcha le verre et il explosa sur le sol.
La voix de l'enfant s'éteignit immédiatement, s'achevant sur une phrase qui sembla déchirer Trowa de l'intérieur.
Je m'souviens ma mère pleurait…
_ Dis-moi que tu l'as entendu, murmura Trowa.
Heero ne répondit pas, et Duo se précipita dans la cuisine pour savoir ce qu'il se passait, découvrant Heero immobile, Trowa les poings serrés, le dos tourné, les épaules tendues. Duo regarda Heero, puis les débris par terre.
_ J'ai cassé un verre, dit le Japonais en haussant les épaules.
Trowa leva la tête brusquement et le fixa. Duo serra les dents. Heero lui avait menti. C'était Trowa qui avait cassé le verre.
Ça n'était pas dramatique.
Et pourtant Heero couvrait Trowa comme si cet incident était d'une importance vitale.
Mais surtout, il lui avait menti.
Duo pouvait accepter beaucoup de choses dans le comportement souvent asocial d'Heero. Mais pas qu'il lui mente.
_ Très bien, dit-il, et sa voix était froide.
Il sortit. Heero détourna les yeux. Duo savait qu'il avait menti. "Est-ce que je deviens fou ?" demanda doucement Trowa, sans tristesse, juste une question posée pour savoir.
Heero ramassa les débris du verre en silence, les jeta à la poubelle avant de se tourner vers Trowa, impassible.
_ Rentre te coucher, dit-il d'une voix sans timbre.
Et Trowa hocha la tête, parce qu'il n'y avait rien d'autre à faire. Mais avant de sortir de la cuisine, il se tourna vers Heero. "Si ça continue, dit-il, je devrais laisser tomber."
Heero ne répondit pas et le Français partit.
L'ex pilote de Wing resta dans la cuisine à ranger en silence, pensant à ce qu'il s'était passé ce jour-là. Les événements étaient liés à la lumière. Trowa semblait y être particulièrement sensible. Mais pourquoi ça n'était pas arrivé avant ?
Lorsqu'il revint dans le salon, Duo était seul, Hilde était partie. Il y eut un silence froid, puis, comme Heero n'avait apparemment pas l'intention de s'expliquer, Duo annonça d'une voix impersonnelle qu'il allait se coucher. Heero resta dans l'obscurité du salon quelques minutes avant de rentrer dans sa chambre. Il ne réalisa qu'une fois complètement dans le noir que la lumière était tout autour de lui, encore pâle, mais prête à jaillir.
Fatigué, Heero ne chercha pas à la retenir, et son corps devint éblouissant comme une étoile, tandis que dans son dos semblait se former des ailes de lumière transparentes.
***
WuFei entra en hésitant dans le studio. Il avait traîné dehors le plus longtemps possible. L'esprit ne l'avait pas suivi lorsqu'il était sorti en courant. WuFei espérait qu'il était parti, mais en réalité il avait dû rester dans sa chambre.
Le Chinois prit une inspiration et en ouvrit la porte. Oui. Il était là. Sa présence était forte, si forte, plus forte même qu'elle ne l'avait été lorsqu'il s'était enfui. WuFei entra dans la salle de bain pour se changer.
L'esprit ne le suivit pas.
WuFei défit sa queue de cheval, se passa de l'eau sur la figure et se regarda dans le miroir avant de mettre ses lunettes. Il eut un petit sourire vacillant entre l'amertume et la nostalgie. Il ressemblait tellement à ce garçon qu'il avait été, apprenant par cœur dans la bibliothèque de la maison les règles du clan, les règles de son comportement, ses devoirs sans ses droits.
Il revint dans sa chambre, et s'assit sur le lit, face à la grande glace de l'armoire. Il sentit l'esprit revenir près de lui, presque timidement, et il frissonna parce que ça ne lui ressemblait pas. Il se fixa dans la glace, et attendit.
Alors, lentement comme un brouillard qui se lève, une forme apparut derrière lui, assise, les mains presque posée sur ses épaules. Un visage se dessina lentement, de plus en plus précis, et les mais sur ses épaules devinrent presque solides.
WuFei serra les dents, presque sur le point de trembler, mais il garda le regard fixé sur le visage dans le miroir, les traits fins qui apparaissaient avec lenteur, la bouche dessinée avec un tel soin qu'on aurait cru celle d'une poupée, les cheveux noirs, les yeux comme deux pierres d'onyx brillantes, vifs comme du feu.
WuFei tendit la main vers le miroir et fit le geste de la poser sur la joue pâle. Ses lèvres prononcèrent un nom en silence.
Un nom qu'il n'avait jamais plus voulu prononcer. "Meiran…"
TBC…
