Le cœur en automne
Avertissements : 5x1 (merci qui ?^^) ; angst ; POV Heero
Cadeau à tous les supporters du WuFei/Heero dans Perle ! Et spécialement Lyxeria qui le voulait tellement !
Explication du titre : J'avais pas de titre(les titres, mon cauchemar !). Et puis en cours de jap, la prof nous explique que le kanji du mot "mélancolie" signifie littéralement : cœur en automne. Ma copine Aurélia me fait alors : "Ben tu l'as, ton titre !"
Donc, tout le crédit en revient à elle…lol
***
La côte est très découpé, les rochers sombres. Les vagues se brisent sur les récifs avec violence. Duo m'a dit qu'autrefois les vaisseaux heurtaient la falaise et coulaient ici.
Etrange qu'un lieu de mort soit l'endroit où je me retrouve.
Tout ce qui m'est proche à un rapport avec la mort. Mon nom est celui d'un homme assassiné. Mon meilleur ami se surnomme Shinigami.
L'homme avec qui je partage ma vie est amoureux d'une femme morte depuis plus de six ans.
J'ai mis du temps avant d'admettre que WuFei ne m'aime pas vraiment. Ce n'est pas par moi qu'il est attiré. C'est par la force qu'il croit trouver chez moi. Alors quand il découvrira que cette force n'est qu'un leurre, tout sera fini.
Je préfère arrêter là, ça fera moins mal.
Je peux à la limite accepter qu'il m'aime par illusion, mais pas qu'il me trompe avec une morte.
Je ne partage pas.
Je ne supporte plus que toutes ses vacances se passent sur L5 à regretter la mort de Meiran.
Vous savez ce qu'on peut ressentir, à vivre avec quelqu'un qui regrette la mort de celle que vous avez remplacée ?
C'est nier votre propre importance. C'est vous dire, " toi comme un autre", c'est vous hurler au visage que si elle n'était pas morte, vous n'existeriez même pas pour lui. C'est savoir que si elle réapparaissait sur le pas de la porte, vous seriez seul avant d'avoir compris ce qu'il s'est passé.
C'est attendre qu'un coup de téléphone vous annonce qu'il s'est suicidé sur sa tombe.
J'en ai assez.
J'aimerai être pour une fois autre chose qu'un objet pratique qu'on utilise à sa guise. Je veux être quelqu'un à part entière.
Alors cette fois, lorsqu'il est parti, j'ai moi aussi pris des vacances, sans vraiment lui dire, j'ai juste laissé un mot pour quand il reviendra. Je n'ai emmené ni mon téléphone, ni mon ordinateur. Je suis allé voir Duo. Il a emménagé en France, au bord de la mer.
WuFei n'aime pas quand je vais seul chez lui. Il ne le dit pas, mais je le sens.
Ça fait rire Duo. "Tu vois, Hee-chan, le problème de Wuffie, c'est qu'il croit que je veux te foutre dans mon lit. Alors il balise quand il peut pas s'assure que je reste sage. Chuis flatté qu'il me considère comme un adversaire digne de lui, mais sérieux, qu'est-ce qu'il peut être cruche, quand il s'y met…"
Duo ne m'a rien demandé quand je suis arrivé. Il m'a accueilli naturellement et les quelques jours passés avec lui m'ont fait du bien, m'ont calmé. Hier soir seulement, il a fini par demander :
_ Tu as l'intention de quitter WuFei ?
De cette manière qu'il a de poser une question sérieuse, brutalement, après avoir raconté n'importe quoi pendant un quart d'heure.
_ Je ne sais pas.
_ Tu devrais pas. Je veux pas te dire quoi faire mais tu devrais pas. Laisse-lui une chance de piger qu'il se plante.
Je n'ai rien dit. Je ne sais pas quoi en penser.
WuFei et moi, à cause de notre nature, sommes condamnés à évoluer dans une relation faite de non-dit et de concessions silencieuses.
Nous avons commencés à sortir tous les deux parce que c'était une continuation logique du temps que nous passions ensemble, que ce soit en temps que Preventers, ou pour faire de l'escrime. Notre relation est simplement devenue physique à un moment ou à un autre, je ne saurais même pas dire pourquoi, ni comment.
C'est arrivé, c'est tout.
Rien n'a changé pour le reste.
Lorsque WuFei m'a demandé d'emménager avec lui, c'était une simple question pratique.
Les autres nous voient comme deux amoureux. Ce mot me semble tellement peu approprié, car je ne les entend ni dans sa bouche, ni dans la mienne. Pourtant c'est moi qui ait décidé que c'était de l'amour. Pour ce que j'en sais, ça y ressemble.
J'aime sa présence. J'ai envie de lui. J'ai mal à cause de lui. J'ai parfois envie de pleurer à cause lui. Je ne l'ai jamais fait. Je n'ai jamais pleuré de ma vie. Mais ça faisait longtemps que je n'en avais pas eu envie.
Comme maintenant.
Alors, moi, je l'aime. J'en ai conclu que lui aussi.
Raison ou tord, ce qui est sûr c'est que l'incertitude ne me réussit pas.
Meiran non plus.
C'est peut-être le vent, je ne l'ai pas entendu s'approcher. J'ai presque sursauté lorsque ses bras se sont glissés autour de mon cou et que ses mains ont cherché les miennes pour entrelacer mes doigts glacés par le froid dans les siens encore chauds.
Il m'a tiré contre lui et je n'ai rien dit, je n'ai pas voulu bouger. Ses gestes tendres sont rares. Les miens encore plus : je n'ose pas de peur de paraître faible à ses yeux.
Il est rentré tôt. Je me demande si Duo ne m'a pas trahi.
_ Tu me manquais, dit-il comme pour répondre à ma question silencieuse, et cette phrase entière me crispe, parce qu'il n'a jamais effleuré à voix haute notre relation, ni parlé de sentiments.
Alors pourquoi maintenant ?
Ses bras me serrent un peu plus et il nous déplace de côté comme pour me protéger du vent qui me frappait le visage. Je me demande s'il faut que je m'en vexe. Est-ce un geste sans arrière-pensée, ou bien la marque qu'il ne nous considère déjà plus égaux ? Comment savoir ce qu'il pense, ce qu'il attend moi ?
Je laisse passer pour cette fois. Ses tendresses rares m'ont fait découvrir combien j'en avais besoin. Combien j'aimerai qu'il m'en offre plus. C'est de sa faute. Avant je ne savais pas ce que c'était, je n'en avais pas besoin.
On ne peut désirer ce qu'on ne connaît pas.
C'est lui qui me rend faible.
_ Est-ce que je t'ai déçu ? me demande-t-il soudain.
_ Non.
Je me suis déçu tout seul. C'est moi qui avait des attentes sans lendemains.
' Tu me déçois '. Je déteste cette phrase. C'est se permettre de juger, de rabaisser. Qui a le droit de décider de ce qu'aurait dû faire un autre ?
Une déception est purement personnelle.
_ J'ai échoué en tant qu'époux, continue-t-il à voix presque basse. Je me suis haï pour ça, et j'ai juré de ne plus rater quoique ce soit.
Il fat une pause, comme s'il attendait que je dise quelque chose, mais cette confession inattendue m'a pris par surprise. Que répondre ? Qu'attend-il de moi ?
_ Est-ce que je suis aussi en train d'échouer en tant qu'amoureux ?
Il a commencé à pleuvoir, ou peut-être que ce sont les embruns. La pluie est toujours salée au bord de la mer. Un sourire aux lèvres, je crois, j'ai enfoui mon visage au creux de son cou, mes joues et mon nez glacés contre la chaleur de sa peau protégé du vent.
"Non."
Non, plus maintenant.
OWARI
