UN SI LONG CHEMIN
CHAPITRE I
FEVRIER 2000 VOL QANTAS QF 011 A DESTINATION DE LOS ANGELES
L'avion a décollé depuis une heure, et il ne m'a toujours pas parlé. Je n'aurais pas dû m'asseoir près de lui, mais c'est la force de l'habitude. Le solitaire qui brille à ma main droite attire les rayons du soleil. Je ne sais pas à quoi il pense, mais comme d'habitude, il s'est effacé pour me laisser m'asseoir près du hublot. Oh, je sais bien que ce n'est pas que par galanterie, être près du couloir lui permet d'étendre ses longues jambes.
Bon, si tu ne veux pas parler, tans pis pour toi, Rabb, je ne vais pas me mettre martel en tête.
Je regarde l'océan sous l'avion, il fait encore beau ici, encore vingt heures avant de retrouver le froid et la neige de Washington. Il n'y a qu'une semaine que je suis partie, mais j'ai l'impression que toute ma vie a changé. Et pourtant, elle n'a changé que depuis hier. Ce ferry, le port de Sydney, Mic qui dans ses mails me parlait de la Croix du sud, de la mer si chaude, de la brise tiède sur la plage. C'était si loin, il était parti, je n'allais probablement jamais le revoir, alors pourquoi ne pas laisser un homme me dire que je ne lui suis pas indifférente. Je n'ai fait de mal à personne. Enfin, je n'avais fait de mal à personne, mais j'en suis moins sûre maintenant. Le regard d'Harm quand l'amiral a demandé si les félicitations étaient de rigueur m'a fait mal. Je ne comprends rien, il ne veut pas de moi, mais il ne veut pas me voir avec Mic ? Que m'est il arrivé ? L'eau défile toujours sous l'avion, et peu à peu je glisse dans le sommeil, la tête contre le hublot.
Elle dort.
Sa main droite est posée sur sa cuisse, et le diamant brille comme pour me narguer. Et brusquement, le bleu sur ma pommette me lance à nouveau, je sens les coups de Mic, mais maintenant c'est avec une bague qu'il me frappe. Pourquoi est elle venue à Sydney ? Un sous officier aurait dû accompagner la dépouille du marin australien, je suis sûre que c'est elle qui a insisté pour venir. Pourquoi ? Je ne lui ai même pas demandé, j'avais peur de sa réponse. Vieille habitude d'avocat, ne pas poser de questions si on ne connaît pas la réponse. C'est ça Rabb, dis n'importe quoi, personne ne t'écoute, si tu crois que moi je vais te croire.
Que s'est il vraiment passé ? Elle était si belle sur ce ferry, avec ce corsage vert. Je n'aurais jamais dû accepter de diner avec elle sans Bud, pour commencer. Qu'elle me le demande sur la plage, alors qu'elle était seins nus près de Mic, c'était insupportable. A quoi jouait-elle ? Jouait- elle ? Je ne comprends plus ce qui nous arrive. Pendant toute notre conversation sur le ferry, j'ai cru que j'allais me réveiller, je ne savais plus comment faire, comment lui dire qu'elle compte tellement pour moi, mais que pour l'instant, je veux reprendre le contrôle de ma vie et retrouver notre amitié, la confiance que nous avions l'un en l'autre avant mon départ. Je croyais qu'elle avait compris, son sourire à la fin de notre conversation en était la preuve, non. Et puis elle n'a plus posé de questions, et quand nous sommes arrivés à Luna Park, elle m'a aidé à comprendre que Kevin Lee me mentait, elle n'a pas eu l'air sur la défensive, c'était Mac, comme d'habitude. Et pendant tout le reste du procès, j'ai eu l'impression qu'elle était avec moi, qu'elle me soutenait. Pourquoi est elle allée diner avec Brumby ? Que lui a t'il dit ? Pourquoi prendrait elle la bague d'un homme alors qu'elle vient quelques jours plus tôt de parler d'éternité à un autre ? Décidémment, je ne comprends rien aux femmes.
L'amiral est assis seul deux rangs devant nous, et Bud est là bas devant, avec Kevin Lee et un Marine de l'ambassade. Le ronronnement de l'avion nous isole, j'ai l'impression d'être seul avec Sarah, comme pendant tous ces voyages que nous avons faits ensemble. Elle bouge dans son sommeil, et sa tête glisse sur mon épaule. Comme j'aime ces retours en avion, quand la tension de l'enquête est retombée, nos conversations et nos plaisanteries, cette sorte d'intimité, nous deux seuls, Sarah et moi. C'est drôle, quand nous sommes ensemble dans ces avions, elle est toujours Sarah pour moi, jamais Mac. Bien sûr, je ne vais pas lui dire..... surtout maintenant.
Maintenant.... Est ce qu'elle va l'épouser ? C'est quoi, un solitaire de cette taille en cadeau d'amitié ? Elle veut faire croire ça à qui ? Une femme n'accepte pas une bague pareille d'un ami, non ? Il faut que je lui demande ..... Que je lui demande quoi ? Si elle va l'épouser ? Brillante idée, Rabb, et après, tu diras quoi ? Non, Sarah, ne faites pas ça.. Réfléchis, bon sang, tu es avocat, tu sais faire parler les gens, tu devrais réussir à savoir ce qu'elle pense sans prendre de risque.
Je lui ai dit « Pas encore » et elle n'a pas insisté. Pourquoi a t'elle accepté ce cadeau ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pou....
Le mouvement de l'avion, pris dans de légères turbulences, me réveille. Mais je ne veux pas ouvrir les yeux. Je rêvais .... la nuit, le ciel étoilé, un bateau qui passe sous un pont, une voix si chaude, si sensuelle, qui me dit « Non, Sarah, je ne veux plus attendre. », des lèvres qui prennent les miennes, et ma tête enfin posée sur son épaule, son odeur, son souffle chaud contre ma nuque..Non, je ne vais pas me réveiller, pas maintenant, jamais.
« Mac, réveillez vous, vous dormez depuis trop longtemps, il faut bouger..Mac »
Je sursaute, non, je n'ai pas dormi la tête sur son épaule..Non...Où est l'amiral ? Ah oui, là devant. Je lève les yeux vers Harm, pas vraiment certaine de ce que je vais trouver, je ne me souviens pas m'être jamais réveillée la tête sur son épaule avant. Juste cette fois ci en plus. Il a un sourire doux, mais triste, il n'a pas l'air fâché. Peut être que je viens juste de poser la tête sur son épaule. Peut être qu'il s'en fiche. Sûrement, il n'en a rien à faire..
« Désolée, Harm, je crois que j'étais un peu fatiguée . »
« C'est sûr, vous n'avez pas dû dormir beaucoup la nuit dernière. »
« Pardon ? »
« Vous voulez boire quelque chose, je vais appeler l'hôtesse .. »
« Harm, qu'est ce que vous avez dit ? »
« Que je vais appeler l'hôtesse, pourquoi ? »
« Arrêtez votre petit jeu, je ne suis pas idiote. Qu'est ce que vous avez dit au sujet de la nuit dernière ? »
« Ecoutez Mac, je crois que ce n'est pas mon problème, et je ne pense pas que cet avion soit l'endroit pour avoir ce genre de discussion. »
« Ah oui ? Ce sont les avions, ou les bateaux , ou les moyens de transport, ou juste les conversations un peu personnelles qui vous font peur, Capitaine ? »
« Mac, ça suffit. Vous voulez du café ? »
Il appuie sur le bouton pour appeler l'hôtesse, son regard me fuit. Je ferais sûrement mieux de me taire, mais cette fois ci, j'ai besoin de savoir.
« Harm, je crois qu'il faut qu'on parle. »
« Ah bon, et de quoi ? »
« De l'avenir, de vous, de moi. »
« De Brumby ? »
« C'est ça qui vous dérange, Brumby ? »
« Et pourquoi ça me dérangerait ? Vous allez à la plage avec cet abruti, vous bronzez seins nus devant lui, le lendemain vous me draguez, et quelques jours après, vous vous roulez dans son lit...Je ne vois pas pourquoi ça me dérangerait... »
« Harm, pourquoi dites vous cela ? »
« Parce que c'est ce que j'ai vu. »
« Vous m'avez vue seins nus, vous m'avez vue dans le lit de Brumby ? Et je vous ai dragué ? Capitaine, vous me connaissez bien mal... »
« Je croyais que je vous connaissais, mais je pense que comme pour le reste, je me suis trompé, Colonel. Bon vol. »
Il se lève et s'approche de l'amiral. Le siège à côté de l'amiral est vide , et je le vois s'asseoir. Je crois finalement que parler n'était pas une bonne idée, ou peut être mon approche n'était elle pas la bonne. Je baisse les yeux sur ma main, la bague est là, bien réelle, un homme m'aime, assez pour me demander de l'épouser, assez pour me dire qu'il trouvera un moyen de surmonter les obstacles qui nous séparent. Et si la solution était aussi simple ?
FEVRIER 2000 21H30 HEURE LOCALE AEROPORT INTERNATIONAL DE DULLES -
Nous avons franchi la douane, les Marines viennent de récupérer Kevin Lee pour l'emmener en cellule en attendant le procès pour désertion. Je suis le seul à avoir laissé ma voiture à l'aéroport, je vais les ramener, de toute façon, ce n'est pas un grand détour.
« Si vous voulez, je peux vous déposer chez vous, ma Lexus est au parking, amiral. »
« Merci, Capitaine. Et bien, allons y »
Il fait toujours aussi froid à Washington, il y a de la neige sur le sol des forêts que nous traversons. Premier arrêt, McLean, l'amiral récupère ses bagages et nous salue d'un « Bonne nuit, demain rapport à 0800 dans mon bureau, nous avons perdu assez de temps comme ça. » Heureusement que j'ai un peu dormi dans l'avion.
Nous roulons dans le silence jusqu'à Rosslyn, d'habitude c'est Bud qui fait la conversation, et je sais qu'il doit être heureux de retrouver sa femme et son fils, mais en même temps paniqué à l'idée de l'accueil qu'Harriet va lui réserver. Il n'a pourtant rien fait de mal, c'était une remarque presque innocente, mais je crois que j'ai renoncé à comprendre les femmes.
Nous sortons de la voie express, et j'arrête la voiture devant l'immeuble de Bud.
« Bon courage, Bud »
Je me retourne vers Mac et lui sourit, nous avons parlé en même temps. Elle me rend son sourire, ses yeux pétillent .
Nous sommes seuls dans la voiture maintenant. Je m'engage sur le Arlington Memorial Bridge, comme tous les soirs, le Lincoln Memorial devant nous est illuminé, nous sommes à Washington, nous sommes revenus chez nous, sur notre continent, et notre conversation sur le ferry me revient en mémoire. Il faut qu'on parle, je ne veux pas de ces malentendus entre nous, je ne veux pas perdre mon amie la plus chère.
« Mac.. »
« Harm. »
Nous nous sourions à nouveau, nous avons encore parlé ensemble, c'est bon signe, non ? Je tourne à gauche vers Georgetown, et lui dit de commencer.
« Harm, il faut qu'on parle, je ne veux pas que vous soyez en colère après moi. »
« Je ne suis pas en colère, Mac, seulement .... je ne m'attendais pas à ce qui s'est passé, ne vous inquiétez pas, je vais m'y habituer. »
Elle me regarde d'un air perplexe, et se tait.
Courageux, mais pas téméraire, Rabb, laisse là continuer si elle le veut, je crois que tu viens encore de dire une connerie.
Nous roulons en silence à travers les rues vides de Georgetown, il fait si froid que les gens ne trainent pas dans les rues ce soir. Enfin nous arrivons devant chez Mac, je sors de la voiture pour sortir ses bagages et l'accompagner à sa porte. Peut être va t'elle parler, me dire .. Non, elle avance sans me regarder, les yeux baissés. Je vais franchir le seuil avec elle quand elle lève brusquement les yeux.
« Je ne crains rien, Harm, il est tard, rentrez chez vous. »
Pas un sourire, pas un mot gentil, rien.
Je ne peux pas la laisser me quitter comme ça, je sens que je perds le contrôle de la situation.
« Mac, vous allez bien ? Il faudrait qu'on parle .. »
« Harm, vous avez raison, moi aussi je vais m'y habituer, ne vous inquiétez pas, tout ira bien. »
Et elle entre dans le hall de l'immeuble, je reste là, perplexe, jusqu'à ce que le froid me pousse à retourner vers ma voiture.
Demain, je lui parlerai.
Demain.
CHAPITRE I
FEVRIER 2000 VOL QANTAS QF 011 A DESTINATION DE LOS ANGELES
L'avion a décollé depuis une heure, et il ne m'a toujours pas parlé. Je n'aurais pas dû m'asseoir près de lui, mais c'est la force de l'habitude. Le solitaire qui brille à ma main droite attire les rayons du soleil. Je ne sais pas à quoi il pense, mais comme d'habitude, il s'est effacé pour me laisser m'asseoir près du hublot. Oh, je sais bien que ce n'est pas que par galanterie, être près du couloir lui permet d'étendre ses longues jambes.
Bon, si tu ne veux pas parler, tans pis pour toi, Rabb, je ne vais pas me mettre martel en tête.
Je regarde l'océan sous l'avion, il fait encore beau ici, encore vingt heures avant de retrouver le froid et la neige de Washington. Il n'y a qu'une semaine que je suis partie, mais j'ai l'impression que toute ma vie a changé. Et pourtant, elle n'a changé que depuis hier. Ce ferry, le port de Sydney, Mic qui dans ses mails me parlait de la Croix du sud, de la mer si chaude, de la brise tiède sur la plage. C'était si loin, il était parti, je n'allais probablement jamais le revoir, alors pourquoi ne pas laisser un homme me dire que je ne lui suis pas indifférente. Je n'ai fait de mal à personne. Enfin, je n'avais fait de mal à personne, mais j'en suis moins sûre maintenant. Le regard d'Harm quand l'amiral a demandé si les félicitations étaient de rigueur m'a fait mal. Je ne comprends rien, il ne veut pas de moi, mais il ne veut pas me voir avec Mic ? Que m'est il arrivé ? L'eau défile toujours sous l'avion, et peu à peu je glisse dans le sommeil, la tête contre le hublot.
Elle dort.
Sa main droite est posée sur sa cuisse, et le diamant brille comme pour me narguer. Et brusquement, le bleu sur ma pommette me lance à nouveau, je sens les coups de Mic, mais maintenant c'est avec une bague qu'il me frappe. Pourquoi est elle venue à Sydney ? Un sous officier aurait dû accompagner la dépouille du marin australien, je suis sûre que c'est elle qui a insisté pour venir. Pourquoi ? Je ne lui ai même pas demandé, j'avais peur de sa réponse. Vieille habitude d'avocat, ne pas poser de questions si on ne connaît pas la réponse. C'est ça Rabb, dis n'importe quoi, personne ne t'écoute, si tu crois que moi je vais te croire.
Que s'est il vraiment passé ? Elle était si belle sur ce ferry, avec ce corsage vert. Je n'aurais jamais dû accepter de diner avec elle sans Bud, pour commencer. Qu'elle me le demande sur la plage, alors qu'elle était seins nus près de Mic, c'était insupportable. A quoi jouait-elle ? Jouait- elle ? Je ne comprends plus ce qui nous arrive. Pendant toute notre conversation sur le ferry, j'ai cru que j'allais me réveiller, je ne savais plus comment faire, comment lui dire qu'elle compte tellement pour moi, mais que pour l'instant, je veux reprendre le contrôle de ma vie et retrouver notre amitié, la confiance que nous avions l'un en l'autre avant mon départ. Je croyais qu'elle avait compris, son sourire à la fin de notre conversation en était la preuve, non. Et puis elle n'a plus posé de questions, et quand nous sommes arrivés à Luna Park, elle m'a aidé à comprendre que Kevin Lee me mentait, elle n'a pas eu l'air sur la défensive, c'était Mac, comme d'habitude. Et pendant tout le reste du procès, j'ai eu l'impression qu'elle était avec moi, qu'elle me soutenait. Pourquoi est elle allée diner avec Brumby ? Que lui a t'il dit ? Pourquoi prendrait elle la bague d'un homme alors qu'elle vient quelques jours plus tôt de parler d'éternité à un autre ? Décidémment, je ne comprends rien aux femmes.
L'amiral est assis seul deux rangs devant nous, et Bud est là bas devant, avec Kevin Lee et un Marine de l'ambassade. Le ronronnement de l'avion nous isole, j'ai l'impression d'être seul avec Sarah, comme pendant tous ces voyages que nous avons faits ensemble. Elle bouge dans son sommeil, et sa tête glisse sur mon épaule. Comme j'aime ces retours en avion, quand la tension de l'enquête est retombée, nos conversations et nos plaisanteries, cette sorte d'intimité, nous deux seuls, Sarah et moi. C'est drôle, quand nous sommes ensemble dans ces avions, elle est toujours Sarah pour moi, jamais Mac. Bien sûr, je ne vais pas lui dire..... surtout maintenant.
Maintenant.... Est ce qu'elle va l'épouser ? C'est quoi, un solitaire de cette taille en cadeau d'amitié ? Elle veut faire croire ça à qui ? Une femme n'accepte pas une bague pareille d'un ami, non ? Il faut que je lui demande ..... Que je lui demande quoi ? Si elle va l'épouser ? Brillante idée, Rabb, et après, tu diras quoi ? Non, Sarah, ne faites pas ça.. Réfléchis, bon sang, tu es avocat, tu sais faire parler les gens, tu devrais réussir à savoir ce qu'elle pense sans prendre de risque.
Je lui ai dit « Pas encore » et elle n'a pas insisté. Pourquoi a t'elle accepté ce cadeau ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pou....
Le mouvement de l'avion, pris dans de légères turbulences, me réveille. Mais je ne veux pas ouvrir les yeux. Je rêvais .... la nuit, le ciel étoilé, un bateau qui passe sous un pont, une voix si chaude, si sensuelle, qui me dit « Non, Sarah, je ne veux plus attendre. », des lèvres qui prennent les miennes, et ma tête enfin posée sur son épaule, son odeur, son souffle chaud contre ma nuque..Non, je ne vais pas me réveiller, pas maintenant, jamais.
« Mac, réveillez vous, vous dormez depuis trop longtemps, il faut bouger..Mac »
Je sursaute, non, je n'ai pas dormi la tête sur son épaule..Non...Où est l'amiral ? Ah oui, là devant. Je lève les yeux vers Harm, pas vraiment certaine de ce que je vais trouver, je ne me souviens pas m'être jamais réveillée la tête sur son épaule avant. Juste cette fois ci en plus. Il a un sourire doux, mais triste, il n'a pas l'air fâché. Peut être que je viens juste de poser la tête sur son épaule. Peut être qu'il s'en fiche. Sûrement, il n'en a rien à faire..
« Désolée, Harm, je crois que j'étais un peu fatiguée . »
« C'est sûr, vous n'avez pas dû dormir beaucoup la nuit dernière. »
« Pardon ? »
« Vous voulez boire quelque chose, je vais appeler l'hôtesse .. »
« Harm, qu'est ce que vous avez dit ? »
« Que je vais appeler l'hôtesse, pourquoi ? »
« Arrêtez votre petit jeu, je ne suis pas idiote. Qu'est ce que vous avez dit au sujet de la nuit dernière ? »
« Ecoutez Mac, je crois que ce n'est pas mon problème, et je ne pense pas que cet avion soit l'endroit pour avoir ce genre de discussion. »
« Ah oui ? Ce sont les avions, ou les bateaux , ou les moyens de transport, ou juste les conversations un peu personnelles qui vous font peur, Capitaine ? »
« Mac, ça suffit. Vous voulez du café ? »
Il appuie sur le bouton pour appeler l'hôtesse, son regard me fuit. Je ferais sûrement mieux de me taire, mais cette fois ci, j'ai besoin de savoir.
« Harm, je crois qu'il faut qu'on parle. »
« Ah bon, et de quoi ? »
« De l'avenir, de vous, de moi. »
« De Brumby ? »
« C'est ça qui vous dérange, Brumby ? »
« Et pourquoi ça me dérangerait ? Vous allez à la plage avec cet abruti, vous bronzez seins nus devant lui, le lendemain vous me draguez, et quelques jours après, vous vous roulez dans son lit...Je ne vois pas pourquoi ça me dérangerait... »
« Harm, pourquoi dites vous cela ? »
« Parce que c'est ce que j'ai vu. »
« Vous m'avez vue seins nus, vous m'avez vue dans le lit de Brumby ? Et je vous ai dragué ? Capitaine, vous me connaissez bien mal... »
« Je croyais que je vous connaissais, mais je pense que comme pour le reste, je me suis trompé, Colonel. Bon vol. »
Il se lève et s'approche de l'amiral. Le siège à côté de l'amiral est vide , et je le vois s'asseoir. Je crois finalement que parler n'était pas une bonne idée, ou peut être mon approche n'était elle pas la bonne. Je baisse les yeux sur ma main, la bague est là, bien réelle, un homme m'aime, assez pour me demander de l'épouser, assez pour me dire qu'il trouvera un moyen de surmonter les obstacles qui nous séparent. Et si la solution était aussi simple ?
FEVRIER 2000 21H30 HEURE LOCALE AEROPORT INTERNATIONAL DE DULLES -
Nous avons franchi la douane, les Marines viennent de récupérer Kevin Lee pour l'emmener en cellule en attendant le procès pour désertion. Je suis le seul à avoir laissé ma voiture à l'aéroport, je vais les ramener, de toute façon, ce n'est pas un grand détour.
« Si vous voulez, je peux vous déposer chez vous, ma Lexus est au parking, amiral. »
« Merci, Capitaine. Et bien, allons y »
Il fait toujours aussi froid à Washington, il y a de la neige sur le sol des forêts que nous traversons. Premier arrêt, McLean, l'amiral récupère ses bagages et nous salue d'un « Bonne nuit, demain rapport à 0800 dans mon bureau, nous avons perdu assez de temps comme ça. » Heureusement que j'ai un peu dormi dans l'avion.
Nous roulons dans le silence jusqu'à Rosslyn, d'habitude c'est Bud qui fait la conversation, et je sais qu'il doit être heureux de retrouver sa femme et son fils, mais en même temps paniqué à l'idée de l'accueil qu'Harriet va lui réserver. Il n'a pourtant rien fait de mal, c'était une remarque presque innocente, mais je crois que j'ai renoncé à comprendre les femmes.
Nous sortons de la voie express, et j'arrête la voiture devant l'immeuble de Bud.
« Bon courage, Bud »
Je me retourne vers Mac et lui sourit, nous avons parlé en même temps. Elle me rend son sourire, ses yeux pétillent .
Nous sommes seuls dans la voiture maintenant. Je m'engage sur le Arlington Memorial Bridge, comme tous les soirs, le Lincoln Memorial devant nous est illuminé, nous sommes à Washington, nous sommes revenus chez nous, sur notre continent, et notre conversation sur le ferry me revient en mémoire. Il faut qu'on parle, je ne veux pas de ces malentendus entre nous, je ne veux pas perdre mon amie la plus chère.
« Mac.. »
« Harm. »
Nous nous sourions à nouveau, nous avons encore parlé ensemble, c'est bon signe, non ? Je tourne à gauche vers Georgetown, et lui dit de commencer.
« Harm, il faut qu'on parle, je ne veux pas que vous soyez en colère après moi. »
« Je ne suis pas en colère, Mac, seulement .... je ne m'attendais pas à ce qui s'est passé, ne vous inquiétez pas, je vais m'y habituer. »
Elle me regarde d'un air perplexe, et se tait.
Courageux, mais pas téméraire, Rabb, laisse là continuer si elle le veut, je crois que tu viens encore de dire une connerie.
Nous roulons en silence à travers les rues vides de Georgetown, il fait si froid que les gens ne trainent pas dans les rues ce soir. Enfin nous arrivons devant chez Mac, je sors de la voiture pour sortir ses bagages et l'accompagner à sa porte. Peut être va t'elle parler, me dire .. Non, elle avance sans me regarder, les yeux baissés. Je vais franchir le seuil avec elle quand elle lève brusquement les yeux.
« Je ne crains rien, Harm, il est tard, rentrez chez vous. »
Pas un sourire, pas un mot gentil, rien.
Je ne peux pas la laisser me quitter comme ça, je sens que je perds le contrôle de la situation.
« Mac, vous allez bien ? Il faudrait qu'on parle .. »
« Harm, vous avez raison, moi aussi je vais m'y habituer, ne vous inquiétez pas, tout ira bien. »
Et elle entre dans le hall de l'immeuble, je reste là, perplexe, jusqu'à ce que le froid me pousse à retourner vers ma voiture.
Demain, je lui parlerai.
Demain.
