CHAPITRE 9
Le Poudlard Express allait arriver à six heures pile du soir; vingt minutes pour aller jusqu'au château, alors il devait être prêt à monter à la Grande Salle dans cinq minutes. Le dernier jour des vacances avait passé dans une attente fiévreuse --- pas que Severus se soucie tant de ses camarades, mais il éclatait du désir de dire à Lucius et à Clarissa tout ce qu'il avait découvert. Quatre minutes … il mit ses robes et quitta le dortoir. A bien y réfléchir, il pouvait aussi bien attendre à l'extérieur, dans le couloir, où il entendrait la rumeur des élèves inondant le Hall d'entrée. Comme cela il pourrait monter les escaliers en flânant et faire une apparition calculément nonchalante parmi eux, feignant de ne pas être impatient, son visage en masque impassible. Il serait imprudent d'exposer ses émotions, non seulement parce que cela pourrait réveiller des soupçons parmi les autres, mais surtout parce qu'il était toujours imprudent de montrer trop clairement ses émotions. Particulièrement devant Lucius, qui avait une manière très étrange de découvrir les points faibles des gens --- et les émotions comptaient certainement comme tels --- et de les utiliser pour cible de flèches astucieusement empoisonnées. Bien que découvrir cette faiblesse particulière eut été si facile que cela l'eut rendu une tâche presque trop indigne de Malfoy, il frapperait sans doute tout de même. Avec lui, c'était plus une question d'instinct--- comme un chat poursuivrait une souris en caoutchouc aussi aisément qu'une de chair et de sang, simplement parce qu'il ne pouvait pas résister à la forte envie de chasser ce qui était petit et bougeait.
S'appuyant contre le mur en pierre à mi-chemin du haut de l'escalier, Severus entraîna son visage à prendre une expression d'indifférence, faisant rester son battement de coeur à une vitesse normale par sa volonté. Finalement, quand le silence fut déjà devenu si oppressant qu'il pensait ne pas pouvoir le supporter plus longtemps, ce dernier fut rompu par des pas lourds : cela devait être Hagrid traversant le Hall d'entrée pour ouvrir la porte principale. Les pas firent une pause. Il y eut deux secondes de silence, puis un grincement. La voix de Hagrid, les mots déjà incompréhensibles sous le bruit des conversations et des cris des étudiants. Le chaos de centaines de voix, depuis le baryton le plus profond au soprano le plus aigu, causant, riant, puis un cri perçant, répercuté par de plus en plus de voix. "Peeves, arrête!" "Ouch!" "Peeves, non!" "Que quelqu'un arrête cet Esprit Frappeur!"
Plus de cris perçants et de désordre, puis, coupant à travers, la voix tranchante de Lestrange, aboyant "Congelatio!" Et puis le silence.
Un gloussement féminin; une voix, définitivement celle de Lucius. "Très bien visé, Professeur!" D'autres faisant chorus, plus de rire, la voix de Lestrange de nouveau, autoritaire comme toujours "Merci pour vos compliments, mais circulez maintenant ! Allez, dans la Grande Salle!"
Severus choisit ce moment pour continuer, de telle sorte qu'il arriva dans le Hall d'entrée quand la plupart des élèves étaient déjà rentrés dans la Grande Salle. Lestrange était toujours debout là, bras croisés, examinant le cortège. Regardant vers le haut, Severus vit Peeves l'Esprit Frappeur, gelé en plein mouvement, souriant avec malveillance, sa main droite tenant une boule de neige dégoulinante qui fondait dans la chaleur du hall. Sur le sol, il y avait plusieurs flaques et les cheveux de Lestrange semblaient soupçonneusement humides. Le fantôme aurait dû savoir qu'il ne fallait pas frapper l'enseignant irascible sur la tête avec une boule de neige en présence de tous ses élèves. Severus salua le professeur, reçut un bref signe de tête en réponse et se dépêcha de rejoindre les autres élèves pour le dîner.
Son moral coula quand il remarqua que les places à gauche et à droite de Lucius étaient déjà prises. Il devrait donc attendre jusqu'à ce qu'ils retournent à leur Salle commune. Déçu, mais essayant de se convaincre qu'après tant de jours à attendre, une heure de plus ne valait pas la peine d'être mentionnée, il s'assit entre Sibylle et Cedric Nott. Ce dernier reconnut sa présence avec un grognement puis concentra ensuite de nouveau son attention sur le plat devant lui --- il était si surchargé que son contenu vacillait dangereusement à chaque attaque puissante de la fourchette de Nott. Toute conversation était hors de question à la fois à cause du manque flagrant d'intérêt de Cedric pour quelque chose d'autre que la nourriture ou la violence physique et à cause de son incapacité à se concentrer sur plus d'une chose à la fois, ce qui à l'instant était manger.
Donc Severus se tourna vers Sibylle, dont les yeux agrandis étaient déjà posés sur lui. Cela le rendait légèrement inconfortable. Son embarras grandit quand elle saisit la main qu'il venait d'allonger pour prendre un petit pain et scruta sa paume attentivement.
"Honnêtement, Sibylle," dit-il, "la seule chose que tu vas lire là est que je mourrai probablement de faim à moins que tu ne lâches ma main immédiatement."
Sans prêter attention à ses mots, elle murmura "Tu es à un tournant de ta vie, Severus."
Il tira sa main de sa poigne un peu plus hâtivement qu'il ne l'avait voulu et dit d'un ton rogue "Exactement. Car je vais commettre mon premier meurtre dans dix secondes. Pourquoi ne peux-tu pas simplement manger et me laisser en paix ?" Voyant son regard blessé, il ajouta "Ou avoir une conversation civilisée, simplement pour changer ? Parle-moi simplement de tes vacances."
"Oh," répondit-elle de son ton enroué habituel, "c'était merveilleux. Je suis allé en Roumanie avec mes parents-"
"Que diable faisais-tu en Roumanie ?" lui demanda Tabitha, qui avait écouté de l'autre côté de la table. "Ou bien as-tu un intérêt morbide pour les Vampires ?"
"Bien sûr que non," répondit Sibylle avec indignation, "Nous étions dans une tribu de gitans et ils m'ont appris des choses très étonnantes au sujet des boules de cristal."
Tabitha et Severus se regardèrent, sourirent et roulèrent des yeux. "Maintenant ça c'est une grande surprise," fit remarquer Tabitha. Severus renifla et se resservit de purée. "Mais au moins nous recevrons un tas de points de la part de Coleridge. Elle sera heureuse à en perdre la tête."
Cassandra Coleridge était leur professeur de Divination, et elle avait adopté Sibylle comme fille spirituelle. Les points de maison se déversaient abondamment sur eux depuis que Sibylle avait choisi Divination l'année dernière. À cause de sa prédilection, Coleridge fermait aussi les yeux sur les commentaires manifestement peu flatteurs de Nott et Reynolds, qui avaient aussi choisi divination, même si c'était pour des raisons différentes : Nott parce qu'il était trop stupide pour même comprendre le nom d'Arithmancie, sans parler du sujet et Mathilda parce qu'elle avait aussi peur du Professeur Vector que des créatures magiques. L'étude des Moldus n'était pas une option pour les Serpentards, donc ils avaient tous les deux atterri dans la classe de Coleridge avec Sibylle.
"C'est un peu gros, venant de quelqu'un qui nous ramène des points de maison tout le temps et pour des raisons beaucoup moins évidentes. Ou, pour être exact, pour des raisons évidentes, seulement elles ne sont pas vraiment liées au sujet," répondit Sibylle d'une manière significative.
Tandis que les filles se regardaient fixement, Severus leva subrepticement les yeux vers la Grande Table. Les yeux de Lestrange étaient posés sur Tabitha. Parmi les quatrième-années de Serpentard, il était connaissance commune que leur Chef de Maison avait plus qu'un simple faible pour cette fille. Ce fait était non seulement accepté, mais accueilli chaleureusement, et tous attendaient le quinzième anniversaire de Tabitha, quand elle atteindrait finalement l'âge de consentement, pour que Lestrange puisse la traîner dans son lit. Elle l'enroberait autour de son petit doigt en un rien de temps et ils s'attendaient à ce que les bénéfices pour le reste d'entre eux soient considérables. Malheureusement, elle venait d'avoir quatorze ans début octobre, donc ils devaient attendre dix mois de plus.
Severus se demanda brièvement si Dumbledore, apparemment omniscient, connaissait les intentions de son Maître de Potions quant à une de ses élèves. Probablement pas, pensa-t-il, autrement il aurait certainement fait partir la fille de l'école --- elle pourrait avoir été transférée à Beauxbatons ou Durmstrang. Le Directeur pouvait avoir des vues libérales, mais aller aussi loin que de permettre qu'un membre de son corps enseignant tombe amoureux d'une étudiante --- et une étudiante très consentante à cela, car Tabitha ne se donnait pas même la peine de cacher ses intentions fermes de devenir Mme. Lestrange aussitôt qu'elle recevrait un diplôme --- ne serait pas libéral, ce serait idiot. D'autre part, les filles qui n'avaient pas le béguin pour Lestrange pouvaient être comptées sur les doigts d'une seule main. Le fait que les sentiments d'une fille pour lui étaient non seulement plus qu'une infatuation, mais étaient aussi réciprocités, était caché en pleine vue, pour ainsi dire.
Leur Chef de Maison avait été Attrapeur seulement jusqu'à sa cinquième année, parce qu'à ce moment-là il était littéralement devenu trop grand pour cette position et l'avait échangée contre celle de batteur. Il était sportif, de taille moyenne, beau à la manière d'une statue grecque, blond et aux yeux bleus. Pas étonnant que pratiquement toutes les étudiantes bavent devant lui. Même Madame Bibine, leur nouvelle instructrice de vol, avait les yeux qui brillaient quand le Directeur de Serpentard usait de son charme. Et il avait été assez intelligent pour ne pas accorder ses regards ardents à Tabitha seule. A l'instant, par exemple, il faisait à Bibine un sourire brillant qui la fit rougir. Tabitha, qui l'avait vu aussi, mordait de colère sa lèvre inférieure.
La nourriture sur son assiette était devenue froide, remarqua Severus. Il s'était complètement laissé emporter par ses réflexions. Mais à présent, tout le monde avait fini son repas et les premiers élèves se levaient déjà pour quitter la table. Il attrapa l'oeil de Lucius et, d'un minuscule geste de la tête, lui fit signe qu'ils devaient se retrouver dans la salle commune plus tard. Malfoy répondit par un signe de tête imperceptible et se pencha vers Clarissa pour chuchoter quelque chose à son oreille. Elle écouta, inclina la tête et lança à Severus un regard oblique. Puis elle retourna à sa conversation avec Tabitha, comme si rien n'était arrivé.
~~~~ * ~~~~
Trois heures et un charme assourdissement plus tard, tous les trois étaient assis dans un coin de la Salle commune maintenant presque vide.
"Bien," dit Lucius, du ton le plus indifférent qu'il put trouver, "Qu'as-tu découvert ? Ou n'as-tu rien réussi du tout ? J'espère au moins que tu as terminé le projet."
Severus ne voyait que trop bien à travers son indifférence affectée. Malfoy brûlait de curiosité. Il devrait souffrir un peu plus longtemps, cependant "Le projet ?" répondit-il, "Oh, oui certainement, je l'ai terminé. Tout est dans mon coffre. Vous ne le croiriez pas, mais c'était très intéressant. Savez-vous que le père de Stuart-"
"Severus!"
La voix de Malfoy sonnait avec un ton un peu trop dangereux pour que prolonger la torture semble être une décision sage. Roulant ses yeux et soupirant d'un air théâtral, Severus dit. "Très bien, alors. Vous n'êtes pas intéressés, cela au moins est clair. Parlons de Voldemort donc."
Quand il eut fini, Clarissa le regardait fixement de ses yeux grands ouverts et la bouche de Lucius était devenue une ligne blanche et mince. "Le dernier descendant de Salazar Serpentard lui-même!" murmura-t-il. "Maintenant ça c'est un renseignement. Je suppose," dit-il à Severus, "qu'il serait inutile de te demander exactement comment tu l'as découvert ?"
Severus sourit seulement d'un air satisfait.
"Bâtard!" marmonna Lucius, mais cela sonnait plutôt comme un compliment réticent que comme une injure. "Mais j'ai aussi quelques choses intéressantes à vous raconter. Voldemort semble avoir de grands projets. Mon père ne me l'a pas explicitement dit ainsi, mais ses allusions étaient assez claires. Une fraternité est en formation; ils acceptent, ou plutôt Voldemort accepte seulement les meilleurs des meilleurs. Et en termes de naissance et de capacités. Aucun Sang-de-Bourbe, aucun demi-sang."
"Et que serait le but de cette…fraternité ?" demanda Clarissa en retenant son souffle.
"De libérer le monde sorcier des éléments indignes une fois pour toutes. D'éliminer la vermine avec le sang gâté. De rétablir une société où chaque individu serait libre de décider quelle sorte de magie il préfère pratiquer, sans restrictions de la part d'un gouvernement qui a seulement peur de perdre son pouvoir."
"Lucius," dit lentement Severus, "je pense que je sais quand j'entends les paroles de ton père. Considérant le fait que, comme tu l'as dit auparavant, il ne te l'a pas dit explicitement, mais considérant aussi le fait que cela a l'air assez explicite --- tu écoutais aux portes, n'est-ce pas ?"
Lucius fronça les sourcils. "Bien sûr que j'écoutais aux portes. Il est impossible d'obtenir d'informations importantes autrement. Alors, qu'en dites-vous ? Ca a l'air grandiose, n'est-ce pas ?"
Clarissa acquiesça de la tête et Severus observa "Mais je ne pense pas qu'ils accepteraient encore qui que ce soit d'entre nous. Nous sommes encore trop jeunes, je suppose. Et de leur point de vue, je peux même le comprendre. Les sorciers de notre âge ne sont pas censés savoir exactement ce qu'ils veulent.---. Donc ton père fait déjà partie de la fraternité ?" demanda-t-il à Lucius.
"Oui, au moins lui et…et bien, je peux vous le dire, je suppose. Les pères de Stuart et Heather semblent aussi être membres et, euh, et … oh, vous ne pouvez pas deviner la troisième personne que j'ai vue!" Les yeux de Malfoy brillaient.
"Homme ou femme ?" demanda Clarissa.
"Homme."
"Lucius, Lucius! Alors tu as aussi jeté un coup d'oeil par le trou de la serrure! Je pensais que tu faisais seulement cela avec les toilettes des filles ?" Clarissa eut une respiration de surprise et Severus continua, ignorant le regard indigné de Lucius "Donc je suppose que nous connaissons la personne en question ? Oui ? Hmmm. Dumbledore ?---Je plaisantais, Malfoy," ajouta-t-il un ton exaspéré, voyant que l'autre garçon saisissait sa baguette. "Je n'en ai pas la moindre idée. Dis-nous!"
"Lestrange!", dit Lucius triomphalement, savourant l'effet de son obus.
"Vraiment ? Lestrange ? En es-tu sûr ?" haleta Clarissa.
"Je l'ai vu, Rosier!" cracha Lucius, "Bien sûr que j'en suis sûr. Ils ont dit," et il baissa la voix "que leurs premières actions auraient lieu très bientôt. Je me suis abonné à la Gazette du Sorcier, donc nous ne manquerons rien."
"Qu'est-ce qui te rend si sûr qu'il y aura quelque chose d'écrit dans la Gazette du Sorcier ?" demanda Severus.
"Et bien, je suppose que s'ils projettent vraiment de nettoyer systématiquement le monde sorcier de cette racaille, ils ne leur demanderont pas simplement poliment de quitter le pays, n'est-ce pas ? Ils devront leur donner au moins une bonne peur. Donc il doit nécessairement y avoir quelque chose dans la presse. Cela ne restera pas un secret trop longtemps ---Voldemort veut sûrement que cela soit su, pour faire un exemple de ceux qui pensent que ce n'est pas sérieux."
Quelque temps, tous trois restèrent assis en silence, pesant les nouvelles.
"En parlant de secrets," dit Severus, "j'ai presque oublié de vous dire quelque chose. Ce n'est pas aussi sensationnel que l'histoire de Lucius, mais je pense que vous serez intéressés."
~~~~ * ~~~~
Severus était couché dans son lit, regardant fixement le ciel de lit. Il ne pouvait pas dormir. Les autres sommeillaient déjà tranquillement, à en juger par leur respiration égale qui était interrompue, de temps en temps, par un ronflement semblable à un grognement venant du lit de Nott. Mais il avait beau essayer, Severus ne pouvait pas dormir. Il était inquiet. ' Voldemort accepte seulement les meilleurs des meilleurs '. Il savait exactement ce que ces mots signifiaient d'habitude : les plus influents, les plus riches, les plus impitoyables. Maintenant il était sûr de pouvoir leur en donner pour leur argent concernant la cruauté, mais si vous deviez aussi avoir de l'argent et une haute position dans la société ? Alors il allait être exclu. De nouveau. Les hommes que Lucius avait vus et entendus au Manoir Malfoy remplissaient certainement ces critères. Sans doute, leurs enfants --- ses camarades de classe --- seraient accueillis dans le rang avec des bras ouverts, une fois qu'ils seraient assez vieux, probablement après avoir reçu leur diplôme. Et lui ? Est-ce que l'intelligence et la volonté de fer de réussir étaient assez pour devenir membre de la fraternité ? Voldemort se souviendrait-il même de lui ?
Il s'était tourné et retourné depuis ce qui devait avoir été des heures et les draps étaient tout chauds et chiffonnés. S'il y avait quelque chose qui le rendait vraiment inconfortable, c'était d'être couché dans des draps chauds et chiffonnés. Soupirant, il se leva, prit sa baguette, jeta un sort de rafraîchissement et un sort de lissage sur son lit et puis y regrimpa. Oui c'était beaucoup mieux. Peut-être pourrait-il même prendre quelques heures de … Il s'endormit au moment où sa joue toucha le linge maintenant frais.
Leur première leçon du jour suivant était double potions avec les Gryffondors. Comme ils devaient être deux par table, Severus en partagea une avec Lucius à la grande satisfaction de ce dernier, parce que s'il laissait simplement travailler Severus et pour une fois ne faisait que ce qu'on lui disait de faire, ils gagnaient des tas de points --- et Clarissa dût à contrecoeur accepter Mathilda comme partenaire. Mathilda la Douce. C'était l'épithète peu flatteur que lui avaient accordé ses camarades de maison avant la fin des deux premières semaines d'école. Mathilda la calme, la modeste, la discrète, qui faisait soupirer Lestrange d'exaspération devant une présence si étrangère dans sa maison. Pendant les quelques trois premiers mois, Sibylle leur avait dit de son ton le plus mystérieux que ' Mathilda allait leur donner à tous une leçon ', mais quatre ans plus tard, il n'y avait pas encore eu de leçon. Donc elle était considérée avec une légère intolérance, la douceur de celle-ci venant surtout du fait que ses parents possédaient la plus grande société de construction magique de Grande-Bretagne --- celle-ci employait plus de trois mille gobelins et elfes --- et pouvait ainsi être classée dans la catégorie de ' riche et influente '.
Clarissa n'était pas la seule Serpentard à clairement être déçue par son partenaire de travail---Cedric Nott avait été mis avec Sibylle, qui continuait à murmurer des prédictions de mort dans sa barbe. Pas étonnant, car quiconque avait la malchance d'être contraint à travailler à la même table que Nott voyait sa durée de vie finalement réduite à la durée de la classe de potions. Mais Lestrange était inflexible. Il savait exactement lesquels de ses élèves étaient très demandés comme partenaires et lesquels d'entre eux finiraient toujours à un établi solitaire avec un chaudron leur éclatant au visage, si on donnait aux élèves la liberté de choisir. En fait, avec ses plans de leçon, il décidait aussi toujours des couples de travail, selon la difficulté et le danger potentiel du mélange qu'ils apprendraient à préparer. Bien sûr, il faisait cela seulement pour ses Serpentards, car il s'en souciait ; les membres des autres maisons pouvaient se sauter à la gorge l'un de l'autre pendant toute la leçon. Cela lui donnait seulement la possibilité de leur enlever des points et de renforcer sa réputation de sévérité.
Lucius et Severus en étaient venus à cette conclusion il y a longtemps, en observant soigneusement le changement complexe de paires de travail --- et en prenant des notes. Comme ils étaient assis ensemble, la probabilité était que la potion que Lestrange aborderait aujourd'hui allait être assez facile. Autrement Severus aurait terminé au côté de Nott et Lucius aurait eu la tâche fatigante d'essayer d'empêcher Heather Avery de faire de son pire.
Un regard du côté Gryffondor étaya leur théorie. Personne n'aurait jamais mis Peter Pettigrow et Frank Londubat à la même table s'il y avait eu même un risque infinitésimal d'explosion, pas même Lestrange. Non seulement les deux garçons se détestaient profondément, ils étaient aussi extrêmement maladroits.
"Le vieux St Jean va s'amuser aujourd'hui,"murmura Lucius à l'oreille de Severus. "Regarde, Londubat et Pettigrow se lancent déjà des regards haineux."
Severus pouffa de rire. "Dommage pour Pettigrow que Londubat soit seulement maladroit en Potions. Te rappelles-tu quand ils se sont battus en duel l'année dernière après les derniers examens? Je n'ai jamais vu personne mieux esquiver de sorts que Londubat."
"Silence s'il vous plaît," dit brusquement Lestrange, leur jetant un regard réprobateur---une conversation à voix basse comme la leur aurait coûté cinq points à Gryffondor. Il expliqua alors la tâche d'aujourd'hui, un onguent de guérison simple pour les morsures de loup-garou. Quand il écrivit les ingrédients et les étapes principales de travail sur le tableau, Severus et Lucius échangèrent un sourire connaisseur. Maintenant il était clair pourquoi ils partageaient une table aujourd'hui --- les ingrédients devaient être mélangés à froid, et être complétés par du saindoux bouillant à la toute fin. À moins que les idiots ne se brûlent avec le liquide chaud, rien de sérieux ne pouvait arriver.
"Vous pouvez aller chercher les ingrédients dont vous avez besoin dans le placard maintenant," Severus entendit la voix de l'enseignant tandis qu'il était occupé à copier le dernier mot écrit sur le tableau. Bien sûr il connaissait la recette par coeur, mais il ne voulait pas poser---Lestrange n'aurait pas apprécié le moins du monde que l'un de ses élèves rende évident le fait qu'il n'avait pas vraiment besoin d'apprendre quelque chose qui était au programme. "M. Lupin, j'ai oublié de vous dire que votre Chef de Maison voulait vous parler. Vous pouvez quitter la leçon, mais assurez-vous de copier les notes de vos amis ensuite."
Faisant la queue derrière les autres, attendant leur tour pour prendre les composants nécessaires à l'onguent, Lucius chuchota "Tout juste de retour de vacances et devant déjà aller voir McGonagall ? Et sans les autres ? Je peux difficilement croire que Lupin ait réussi à faire tant d'espiègleries tout seul!"
"Peut-être qu'il a fait de la magie pendant les vacances et que le Ministère en a informé McGonagall," répondit Severus en chuchotant.
"Alors peut-être qu'il se fera renvoy-oyer," chanta Lucius dans son souffle et tous les deux rirent sous cape.
Quand ils furent retournés à leur table et pendant qu'il ordonnaient proprement les ingrédients dans l'ordre dans lequel ils devaient être utilisés, Lucius poussa Severus du coude. "Tu sais ce qui est étrange ?" siffla-t-il, ignorant délibérément le regard fâché de Severus, parce qu'il lui avait fait renverser la poudre d'argent partout sur sa moitié de table, "Les autres ne semblent pas excessivement préoccupés par-"
"M. Malfoy, je crois que je vous ai déjà demandé d'observer le silence pendant mes classes. J'enlève deux points à Serpentard."
"Désolé, professeur," dit Lucius et il réussit même à avoir l'air décemment soumis, "Cela n'arrivera plus." Il prit le pilon et le mortier et commença à broyer des racines de Yakatuma séchées, lançant un regard oblique à Severus qui hocha la tête, lui signalant ainsi qu'il avait compris et avait fait la même observation.
C'était vrai, pensa Severus, tout en faisant très attention à son travail --- se couper les doigts avec le couteau tranchant comme un rasoir utilisé pour faire des tranches minces comme du papier de peau d'Ecrasgrenouille n'était pas une expérience plaisante --- les autres Gryffondors, particulièrement Potter, Black et Pettigrow, ne semblaient pas le moins du monde contrariés. Ce qui signifiait que Lupin n'avait probablement fait rien qui puisse leur faire craindre son expulsion ou du moins une punition grave. Mais si l'infraction n'était pas grave, pourquoi Lupin devait-il répondre immédiatement à la sommation de McGonagall ?
Comme il ne voulait pas risquer une autre remontrance de Lestrange, qui était actuellement debout à la table à leur gauche ---celle de Stuart et Tabitha, dont il feignait d'examiner le travail, couvrant doucement sa main de la sienne, apparemment pour lui montrer bonne manière de tenir le mortier---Severus poussa légèrement du coude le haut du bras de Lucius et, du bout de son couteau, écrivit le mot "prétexte" sur la table. Lucius sourit fit un geste d'abord vers leur gauche, puis vers leur droite avec sa tête, demandant silencieusement si Severus voulait dire la manoeuvre assez transparente de Lestrange ou la commission pour laquelle Lupin avait été envoyé. Severus réussit à peine à couvrir son reniflement d'une toux et indiqua les Gryffondors. Les yeux de Lucius se rétrécirent et, après quelques secondes, il hocha la tête.
Après cela, ils retournèrent tranquillement à leur travail. Lupin ne revint pas de tout le reste de la leçon et tout se passa plutôt sans à-coup. Comme Severus l'avait prévu, Pettigrow se brûla promptement la main avec le saindoux bouillant et fut par conséquent grondé et envoyé à l'infirmerie. Black se retourna pour regarder Londubat d'un air menaçant, ce dernier haussa juste les épaules et souleva ses bras, l'air plus exaspéré qu'innocent--- signe sûr que Pettigrow avait réussi l'incident tout seul, sans 'aide' de Frank.
Tout était nettoyé quand la cloche sonna et Severus réunissait juste ses affaires, quand tout à coup Lestrange fut debout à côté de lui. "M. Rogue, un mot dans mon bureau, s'il vous plaît. M. Malfoy, vous direz à qui que ce soit qui ait votre classe ensuite que M. Rogue va avoir dix minutes de retard."
"Ce serait Professeur McGonagall, Monsieur," dit Lucius, levant un sourcil.
Lestrange lui donna un mince sourire. "Je comprends. Dites-le lui de toute façon, mais je vais écrire un mot à M. Rogue, par simple précaution."
Lucius sourit et s'en alla nonchalamment, tandis que Severus suivait l'enseignant dans le bureau adjacent. Il était un peu nerveux, parce qu'il n'avait rien fait de travers et ignorait donc complètement la raison de cette conversation. Lestrange n'avait pas semblé fâché, cependant
"Asseyez-vous, M. Rogue." Lestrange le regardait attentivement mais Severus n'évita pas ses yeux. C'était toujours un bon exercice, pensa-t-il. "On m'a demandé de vous transmettre les salutations de Lord Voldemort."
Severus fut immédiatement hypnotisé. "V-vraiment ? Merci, monsieur Quand … quand l'avez-vous vu ?"
"Peu de temps après Noël au Manoir Malfoy. Il a parlé de vous avec beaucoup de considération-" Severus rougit férocement "-et m'a demandé de vous transmettre ses respects. Il semble avoir une très haute opinion de vous --- quelque chose que je comprends complètement --- et m'a dit de prendre spécialement soin de vous."
Severus avala convulsivement. "Spécial… qu'entendait-il exactement par là, monsieur ?"
Lestrange sourit. "Il veut que je vous donne une tutelle supplémentaire en Potions, car il semble penser que vous avez un plus qu'un talent moyen pour ce sujet, et mon avis ne diffère certainement pas . Maintenant nous devons convenir d'un horaire qui nous convienne à tous les deux. Mercredi soir vous conviendrait-il ?"
"O-oui, bien sûr. Les mercredis après dîner, monsieur ?"
"Oui, tous les mercredis à huit heures. Deux heures, je dirais, au début. Si nous avons besoin de plus de temps, nous pourrons changer les horaires en conséquence."
Severus inclina la tête, incapable d'empêcher le large sourire sur son visage. "Oui, monsieur Merci, monsieur Quand vous reverrez Lord Voldemort, pourrez-vous lui dire s'il vous plaît que … que je suis très reconnaissant ?"
"Bien sûr, M. Rogue. Allez maintenant, voici votre note pour le Professeur McGonagall."
L'esprit bourdonnant et avec le sentiment qu'il marchait sur quelque chose de très doux et rebondissant, Severus quitta le bureau, rassembla ses livres et son chaudron et alla à sa leçon suivante. Tout ce temps, son cerveau refusait obstinément de penser autre chose que "Il se souvient de moi! Lord Voldemort se souvient de moi!"
