CHAPITRE 16

Quatre jours avaient passé et les Aurors ne montraient aucune intention de quitter Poudlard bientôt. Black se comportait comme si l'école lui appartenait, vantant les compétences d'Aurors de ses parents et clamant qu'ils allaient exterminer la vermine --- et les trois autres se bronzaient au soleil de sa gloire. Bien que la présence des Aurors fut dans l'intérêt de tout le monde --- sauf pour ces quelques-uns qui dissimulaient soigneusement leurs vrais sentiments --- c'était un facteur dérangeant. Les professeurs étaient irrités à cause des interruptions constantes de leurs leçons. De plus ils étaient soumis à de longs interrogatoires comme les élèves, ce qui signifiait que leur charge de travail déjà considérable était aggravée par cet ennui continu.

Les élèves, qui étaient habitués à être contrôlés, mais jamais d'une façon excessivement stricte ou manifeste, avaient l'impression d'être constamment observés par des yeux suspicieux --- ce qui, en fait, était vrai. Cela menait à une diminution considérable du niveau sonore et à une stabilité surprenante, du nombre de points de maison en tout cas, mais le calme et l'ordre résultant étaient plutôt ceux d'un sépulcre. Les première année, particulièrement ceux appartenant à la Maison Serpentard, étaient hystériques à la fin de la semaine, car les méthodes d'interrogation de Maugrey ne s'adoucissaient apparemment pas beaucoup avec l'âge diminuant de ses victimes.

Observer le Directeur de Serpentard tandis qu'il enseignait aux élèves de sa propre maison semblait être le passe-temps favori de Maugrey et ainsi les Potions devinrent rapidement l'un des sujets les plus abhorrés parmi et les Gryffondors et les Serpentards, car ils étaient toujours ensemble pour ces classes. Severus admirait Lestrange de plus en plus, parce qu'avec toute la tension sous laquelle il devait être, sa manière d'enseigner et de traiter les élèves n'avait pas changé d'un iota. Sous les yeux noirs vigilants de l'Auror, rôdant entre les établis comme un faucon qui se serait à contre-coeur décidé à endosser le plumage resplendissant d'une colombe pour rendre les moineaux moins suspicieux quant à sa présence, Lestrange continuait à déduire des points de la maison des Gryffondors là où ses propres élèves étaient modérément avertis, jetait des remarques caustiques à Pettigrow et Londubat et effleurait les mains de Tabitha chaque fois que l'occasion se présentait.

Vendredi après-midi, tandis qu'ils préparaient un antidote particulièrement compliqué qui pourrait neutraliser toute une gamme de poisons, Severus--- il avait été mis avec Nott--- vit les yeux de Lestrange errer vers la table où Pettigrow travaillait avec Linda Farnon, puis vers Maugrey qui se déplaçait alors vers eux. Le visage de l'enseignant était éclairé d'un sourire malveillant. Un regard oblique aux deux Gryffondors, qui murmuraient une discussion, probablement sur la bonne manière de préparer ou d'ajouter un ingrédient, lui dit qu'ils étaient sur le point de gâter leur travail et pas simplement de le gâter, mais de le gâter royalement. Si Pettigrow ajoutait les morceaux de Fougère Quirdrake avant et non après les queues de Dugbog broyées, le chaudron allait éclater … Non seulement sur Pettigrow et Farnon, mais très certainement aussi sur Maugrey.

L'argument entre les deux élèves s'était terminé---Lestrange s'était dirigé pendant ce temps là tranquillement vers Lucius et Heather --- et c'était Pettigrow qui avait gagné. Comme en mouvement lent, Severus le vit saisir le petit bol contenant la Fougère Quirdrake de la main gauche, le lever, prendre une cuillère de porcelaine de sa droite, incliner le bol pour pouvoir verser l'ingrédient dans le chaudron … Severus laissa intentionnellement tomber son couteau et plongea sous la table pour le chercher. Au cliquetis de la lame de métal sur le dallage fit écho une explosion mugissante.

Il n'avait pas été nécessaire de se baisser pour se protéger, car la plupart du liquide avait éclaboussé Farnon, Pettigrow et Maugrey, le mur à leur droite et Potter et Lupin qui avaient été placé à leur gauche et ainsi entre leur table et celle de Severus. La potion avait viré au profond rouge au lieu du tournesol jaune correct qu'il aurait dû être et Maugrey avait un peu l'air d'un chef italien qui aurait renversé de la sauce à spaghettis partout sur ses vêtements de travail. Ou, pensa Severus, d'un animal sacrificiel qui venait d'être tué. Il préférait la deuxième comparaison, mais n'avait pas le temps d'y accorder plus de pensées, car le chaudron de Potter et Lupin avait évidemment reçu sa part du mélange défectueux et bullait maintenant sinistrement. Traînant Nott avec lui, Severus s'éloigna à la hâte de leur table, les deux Gryffondors firent de même et Severus attendait déjà une autre explosion, quand un Sort de gel jeté par Lestrange bloqua le processus juste à temps.

"Quelqu'un est-il blessé ?" résonna la voix fraîche de Lestrange dans la salle de classe silencieuse.

Le point d'ébullition de la potion était très bas, seulement environ cinquante degrés, si bien que personne n'avait subi de blessures. Elle était légèrement acide, mais pas assez pour faire des dégâts sérieux aux yeux ou à la peau et donc tout le monde secoua la tête.

Maugrey était si furieux que ses lèvres s'étaient métamorphosées en une mince ligne blanche. Heureusement, Lestrange avait résisté à la tentation de laisser arriver la deuxième explosion, pensa Severus, ou bien l'Auror lui aurait probablement jeté un mauvais sort. Dans l'état actuel des choses, il ne pouvait rien faire d'autre que quitter la salle de classe et changer ses robes et c'est ce qu'il fit, tandis que Lestrange ôtait quarante points à Gryffondor avec délectation, dix par personne pour Potter, Lupin, Pettigrow et Farnon. Après coup, il enleva dix autres points, parce que Black et Jennifer Lyddell, qui occupaient la table derrière Potter et Lupin, n'avaient rien fait pour empêcher la deuxième explosion. Ils n'élevèrent pas même une objection, bien qu'il soit assez évident que le dangereux bouillonnement avait été caché à leurs yeux par les corps et les robes de Potter et de Lupin. Mais Lestrange était d'une humeur si vindicative qu'il était de beaucoup préférable de simplement accepter la déduction sans discussion, car autrement la situation pourrait s'empirer.

C'était le seul dérapage que Lestrange s'était permis et cela avait l'air si innocent que pas même quelqu'un comme Maugrey ne pouvait lever quelque accusation que ce soit.

Les Aurors, que tout le monde s'était attendu à voir quitter Poudlard vendredi au plus tard, restèrent aussi le week-end. Heureusement, il n'y avait pas de match de Quidditch samedi, parce que la présence étrangère, à laquelle personne ne s'était habitué car elle était bien trop menaçante et semblait aussi avoir un effet de soumission sur les parfaits innocents, aurait diminué considérablement l'amusement .

En fait, personne ne montra grand intérêt à passer le week-end ailleurs que dans la Salle commune, car les Aurors devaient demander la permission au Directeur de Poudlard pour y entrer et il était ainsi moins probable de les rencontrer là qu'ailleurs dans le château ou à l'extérieur sur les terrains de l'école.

Dimanche matin, Severus se réveilla parce que quelqu'un tirait avec insistance son épaule gauche. Il se retourna et regarda dans les yeux gris de Lucius, ce qui le fit rougir un peu, car il avait fait un rêve sur la mère du garçon que Lucius n'aurait certainement pas approuvé.

"Qu'est-ce qu'il y a ?" demanda Severus, frottant ses yeux et bâillant. "Ne me dis pas que Maugrey est là dans la Salle commune pour un autre interrogatoire. J'en ai déjà eu deux, donc je préférerais m'enfermer dans la salle de bains pour le reste de la journée."

Lucius sourit. "Ne me le dis pas! Ce type m'a presque cassé le poignet quand je lui ai poliment demandé de ne pas dire du mal de mon père. Je me demande si Dumbledore sait …"

Severus s'appuya sur son coude gauche et vit qu'Owen sortait de son lit et pêchait ses pantoufles pieds-nus. "Plus à gauche!" dit-il, élevant un peu sa voix, "Encore … encore…oui, tu y es." Owen lui fit un signe de tête, se leva et vint les rejoindre. Lui et Lucius s'assirent sur le bord du lit de Severus.

"Je t'ai copié, Rogue," dit Lucius, "Et j'ai mis un sort de sommeil sur ces deux là-" il montra les lits de Wilkes et de Nott "-et j'ai insonorisé la porte. Nous n'avons pas pu parler en privé depuis presque une semaine maintenant et cela commence à me taper sur les nerfs."

Severus s'assit --- il sentait un malaise atavique d'être couché là quand les autres étaient assis ---tirant soigneusement les couvertures autour de lui car il n'était pas sûr que son rêve vivant de la femme en partieVelane n'avait pas laissé de traces sur les draps. "Vous savez," dit-il d'un air songeur, regardant de l'un à l'autre, "je ne croirais pas ce bâtard de Maugrey incapable d'avoir installé quelques dispositifs d'écoute ici et dans la Salle commune, tandis que nous étions en classe. Donc je suggérerais que nous soyons prudents, même si Stuart et Cédric dorment profondément."

"Penses-tu vraiment que le Directeur permettrait une telle chose ?"dit Owen, déconcerté.

Lucius remua la tête. "Je ne sais pas. Mais considérant le fait qu'ils ne semblent pas avoir trouvé un seul indice, je dirais qu'ils sont tous assez désespérés maintenant."

"Quelle jolie fête au petit-matin," dit une voix rauque venant de la direction de la porte, "Cela vous ennuie-t-il si je me joins à vous ?"

"Baron!" s'exclama Severus, "Bonjour Monsieur! Non, cela ne nous ennuie pas le moins du monde. En plus du fait que votre présence est la très bienvenue, il se pourrait aussi que vous nous donniez quelque information utile."

Le Baron hocha la tête avec condescendance et flotta près d'eux, au grand malaise de Malfoy et McNair, qui tirèrent leurs robes de chambre tout près d'eux. Severus lui posa la question à propos des dispositifs d'écoute.

"Non, non," dit le fantôme, "ils n'ont rien fait de tel. Bien que, si je puisse le dire, M. Maugrey aurait certainement voulu passer à une telle mesure, car non seulement lui, mais tout les Aurors n'ont pas l'ombre d'un résultat, malgré toutes leurs interrogations."

"Maintenant ça c'est intéressant," dit Lucius avec un sourire. "Dites-nous, Baron, comment va notre Directeur de Maison ? Il ne doit pas avoir passé des temps faciles."

Le Baron lui fit un sourire mince, reconnaissant. "Le professeur Lestrange va bien," répondit-il, "Bien que j'ose dire que la situation actuelle, si elle continue beaucoup plus longtemps, lui fera subir une dépression nerveuse."

"Étiez-vous présent quand Maugrey l'a interrogé ?" demanda Owen.

"Oh oui, j'y étais," dit le fantôme d'un air mécontent.

"Et est-ce que Maugrey …je veux dire, a-t-il traité Lestrange aussi mal que nous ?"

"Pire," répondit le fantôme, son visage devenant quelques nuances plus sombre si bien qu'il était maintenant de la couleur du granit. "Vous savez probablement que le Directeur --- Et j'apprécie vraiment sa fermeté à cet égard --- n'a pas permis l'utilisation de Veritaserum durant n'importe lequel des interrogatoires-"

"Mais pourquoi ?" dit Severus à brûle-pourpoint, "Désolé de vous interrompre, Baron, mais aussi heureux que je sois qu'il ne l'ait pas fait, quelle était sa raison pour ne pas le permettre ?"

"Oui," dit le spectre, lui donnant un regard aigu, "je suppose que vous en êtes heureux, vous tous -" et il fit passer son regard pénétrant sur tous "-mais vous devez savoir que le Directeur de Poudlard, bien qu'il soit en excellents termes avec le Ministère, n'était pas du tout heureux de la tournure que les événements ont pris." Les trois garçons écoutaient en retenant leur souffle. " Vous voyez, "continua le Baron," Professeur Dumbledore n'a jamais pensé que qui que ce soit dans cette école soit directement impliqué dans ce qui est arrivé à Mlle Trelawney. Bien sûr, il était de son devoir d'informer le Ministère et peut-être s'attendait-il à ce qu'ils envoient un Auror pour effectuer quelque enquête, mais je vous assure que ce n'a jamais été son intention de faire …occuper son école par six d'entre eux. Poudlard a toujours été une institution indépendante et le Directeur est très certainement la dernière personne à désirer quelque changement que ce soit à cette condition particulière. En outre, "continua le fantôme," il ne sait que trop bien combien le Ministère est désespéré, car ils n'ont pas encore été capables d'identifier les criminels responsables des deux crimes qui ont causé un tel tumulte. Le proverbe qui dit ' des temps désespérés exigent des mesures désespérées' prend une signification assez désagréable quand le Ministère est impliqué. Les Aurors ne sont pas soumis à un contrôle très strict, donc personne, pas même le Directeur, ne peut assurer d'une façon satisfaisante que ce que ses professeurs ou élèves disent sous l'influence du sérum de vérité sera traité de manière confidentielle. "

"Est-ce qu'ils manquent vraiment à ce point d'indices ?" demanda Severus, essayant d'avoir l'air simplement curieux.

"Oh, oui. Du moins c'était ce que les Aurors essayaient d'utiliser comme argument pour utiliser du Veritaserum. Mais Dumbledore est resté inflexible, leur disant qu'ils devraient lui en donner d'abord, avant qu'ils ne puissent le faire avec qui que ce soit d'autre."

"O Combien Gryffondor, mais ô combien brillant," murmura Lucius.

"En effet, M. Malfoy, mais avoir un Directeur qui a non seulement été un Gryffondor, mais, dans une très grande mesure, est dépourvu des préjugés habituels concernant notre maison est beaucoup dans notre intérêt. Armando Dippet, puisse son âme trouver la paix, n'aurait jamais résisté au Ministère de cette façon."

"Je sais," dit Lucius "Mon père m'a raconté plus d'une histoire sur Dippet."

Le spectre hocha la tête. "Oui, il n'était pas exactement ce que l'on pourrait appeler une personnalité forte. Comme je l'ai dit, le Directeur était parfaitement prêt à faire utiliser le sérum de vérité sur lui-même --- ou du moins, c'était ce que les Aurors pensaient --- mais personne ayant tous ses esprits ne rêverait jamais de faire une telle chose. Ce qui était," dit-il, riant sous cape "exactement l'argument des Blacks. Mais Dumbledore a osé leur expliquer où exactement était la différence entre le lui administrer à lui et de l'administrer à quiconque d'autre dans cette école, sans tenir compte de leur affiliation de maison. Pas que j'approuve généralement cette sorte des vues égalitaires, mais dans ce cas particulier, elles nous ont servi."

Les trois garçons acquiescèrent. "Et donc Maugrey se défoule sur nous," murmura Lucius.

"Exactement, M. Malfoy. Sur vous et sur votre Directeur de Maison. Et d'une façon très douteuse, si je peux le dire. Non seulement il a soumis certains des plus vieux élèves à des méthodes d'interrogatoire qui, du moins à mon avis, étaient dangereusement près de la torture-"

"Vous pouvez répéter cela," murmura Severus.

"En effet. Mais il a aussi utilisé le Sortilège d'Endoloris-"

"Quoi ?" S'exclamèrent tous trois à l'unisson.

"Vous m'avez bien entendu. Il a utilisé le Sortilège d'Endoloris sur le Professeur Lestrange, même si seulement pendant quelques secondes."

"Qu'est-ce que Lestrange a fait ?" demanda Severus.

"Hurlé," répondit le Baron sèchement.

"Euh … ce n'était pas ce que je voulais dire, Baron. Ce que je voulais dire était : est-il allé voir Dumbledore ?"

"Bien sûr qu'il l'a fait. Et il y a eu une querelle terrible entre le Directeur et M. Maugrey. Ils peuvent être de vieux amis, mais vous savez comment le Directeur protège avec acharnement ceux qui ont été confiés à sa responsabilité."

"Est-ce que les autres sont aussi impitoyables que Maugrey ?" demanda McNair.

"Non, parce qu'ils ne doivent pas prouver que, bien qu'ils aient été dans une prétendument mauvaise maison, ils se sont avérés être du côté du Bien. Bien que," dit le Baron d'un air songeur, "Mme. Figg seconde M. Maugrey de peu. Mais alors, Serdaigle est une Maison assez ambigue.---maintenant, messieurs, à moins que vous n'ayez d'autres questions urgentes, je vais prendre mon congé."

"Pourriez-vous dire au Professeur Lestrange, la prochaine fois que vous le verrez en privé, que-" Severus pesa soigneusement ses mots "-qu'il n'a pas à s'inquiéter à notre sujet ?"

"Je le ferai très certainement," répondit le Baron gravement, il inclina la tête vers chacun d'entre eux et flotta à travers le mur suivant.

"Endoloris!" murmura Lucius, "quel bâtard!"

"Oui," acquiesça Owen, "Et si vous me le demandez, nous avons de la chance qu'il ne l'ait pas essayé sur nous aussi. Écoute, Lucius, ne pourrais-tu pas suggérer quelque entraînement de Quidditch à Clarissa ? Severus et moi pourrions nous risquer à venir regarder et Clarissa peut emmener Heather avec elle. Comme cela nous aurions un petit moment pour discuter de choses en bas sur le terrain de Quidditch."

"Bien," dit Lucius, "Bougeons nous, alors. Mais d'abord je dois réveiller ces deux dormeurs."

~~~~ * ~~~~

Ils avaient effectué leur petite manoeuvre avec succès et étaient maintenant dans la descente vers le terrain de Quidditch, tous portant leurs balais.

"C'est inutile à moins que vous, Heather et Severus ne puissez aussi voler,"avait expliqué Lucius et les autres avaient été d'accord, même si à contre-cœur--- particulièrement Severus. "Car s'ils nous voient assis là au lieu d'être en vol, ils deviendront suspicieux et si deux volent et les autres regardent, nous pouvons aussi bien rester là où nous sommes."

"Ouais, mais nous ne pouvons pas parler en volant," essaya Severus de raisonner, "Et si vous vous attendez à ce que j'esquive des Cognards, je ---"

"Bien sûr que nous n'utiliserons pas de Cognards, Rogue, espèce d'idiot," gronda Lucius, "Nous nous entraînerons seulement avec le Souafle tu peux faire cela, n'est-ce pas ?"

Severus grogna. "Mais tout de même," insista-t-il, "Il y a le problème de la communication. Que veux-tu faire ? Crier ?"

Lucius roula des yeux. "Bien sûr que non. Mais tu n'es pas le seul qui peut trouver des petits sorts utiles de temps en temps. Jamais entendu parler de Exaudio ?" Se sentant mortifié, Severus secoua la tête négativement. "C'est ce que je pensais. Ne me fixe pas comme ça, Sev. L'important c'est que quelqu'un l'ait trouvé, pas qui l'a fait." Et il continua à expliquer comment le sortilège marchait.

Ainsi, avant qu'ils n'aient commencé leur soi-disant entraînement, ils se glissèrent tous dans le vestiaire, enlevèrent leurs robes et jetèrent Exaudio. Chacun d'entre eux devait l'exécuter sur tous les autres, pour que tous les cinq soient capables d'entendre ce que les autres disaient, même si c'était chuchoté. Alors, ils quittèrent l'espace clos, pour arriver directement sur la pelouse ovale du terrain, enfourchèrent leurs balais et décollèrent.

C'était une sensation très étrange et une à laquelle vous deviez vous habituer, pensa Severus, que d'entendre les voix des autres comme s'ils étaient assis à l'intérieur de son oreille. Ils devaient être disciplinés cependant, car ils ne pouvaient parler que un par un. Autrement, les mots devenaient inintelligibles.

Quand eurent résolu ce problème, Owen dit. "Bien, les filles, dites-nous comment ce vieux chien enragé vous a traitées."

Heather et Clarissa firent un compte-rendu méticuleux comment leurs interrogatoires s'étaient passés.

"N'a-t-il pas mentionné Voldemort à l'une d'entre vous ?"demanda Severus, tombant presque de son balai, parce qu'il n'était pas trop adroit à attraper le Souafle en gardant son équilibre.

Clarissa et Heather répondirent négativement. "Étrange", dit Lucius, "ce vieux bâtard pense-t-il que Lord Voldemort n'acceptera pas de femmes dans la fraternité ? Il est un Serpentard, il doit savoir que nous traitons les femmes comme nos égales. À la différence de ces matchos de Gryffondor," ajouta-t-il.

"Vrai," dit Clarissa, "mais je ne nierai pas que cette fois, je suis heureuse de ne pas avoir été traitée comme une égale. Autrement Maugrey aurait pu nous battre aussi. Mais qu'a-t-il dit à propos de Voldemort ?"

"À moi," dit Owen, "il n'a pas vraiment dit quoi que ce soit à son sujet. Maugrey l'a simplement mentionné, je pense que ses mots étaient quelque chose comme ' À moins que tu ne me dises la vérité, je vais te faire expulser avant que tu ne puisses dire Voldemort. ' Quelque chose comme ça."

Severus sourit. "Pas très imaginatif, je dirais. J'aurais attendu mieux d'un Auror. Il a fait la même chose avec moi."

"Moi aussi," dit Lucius. "Je n'y ai pas même réagi. J'ai pensé que c'était mieux."

"Je lui ai demandé si c'était meilleur que le Vieux d'Ogden," dit Owen et tout le monde rit.

"J'ai feint de croire que c'était un dispositif de torture," fit remarquer Severus, provoquant ainsi une nouvelle vague d'hilarité. Alors il leur parla du retourneur de temps et de sa théorie sur comment Voldemort et les autres auraient pu mettre leur plan en action.

"Oui," dit Heather, "cela à l'air très plausible. Mais ne peuvent-ils pas détecter le Sortilège de Mémoire ?"

"Bien sûr qu'ils le peuvent, stupide," répondit McNair, "Et alors ? L' important est qu'ils n'essayent pas de le rompre, ce qu'ils ne feraient jamais, puisque c'est trop dangereux. Elle finirait presque certainement à Sainte Mangouste s'ils essayaient de le défaire."

"Mais alors il semble que la lettre qu'elle ait reçue n'ait pas été un faux après tout," dit Heather d'un air songeur, "Car si elle n'était pas restée avec ses parents, ils l'auraient déjà découvert."

"C'est ce qui continue à me perturber," acquiesça Severus, "Comment ont-ils fait en sorte que ses parents la rappellent à la maison pendant les vacances ?"

Lucius poussa un soupir théâtral. "Si tu utilisais ton cerveau pour penser, juste pour changer, tu aurais moins de questions à te perturber, Rogue. C'est facile, vraiment : Comment fais-tu faire à quelqu'un ce que tu veux qu'il fasse ?"

"Vous pensez qu'ils ont recouru au-"

"Bien sûr qu'ils ont utilisé le sortilège d'Imperius. Ou peux-tu penser à autre chose d'aussi simple et efficace ?"

Ils avaient été à l'extérieur depuis environ deux heures quand Clarissa attira leur attention sur une silhouette noire émergeant de l'entrée de château et commençant à marcher en direction du terrain de Quidditch.

"Et bien, au moins cela ne peut pas être Maugrey," observa Owen, "Car il n'abandonnerait jamais son impressionnant uniforme blanc. Bien que je doive dire qu'il avait l'air super quand Pettigrow l'a trempé avec l'antidote gâté."

"Ne ferions-nous pas mieux d'enlever le sort Exaudio ?" aventura Severus.

Tout le monde fut d'accord et donc ils tirèrent leurs baguettes et, volant devant l'un l'autre, jetèrent Finite Incantatem, jusqu'à ce que tous les liens soient brisés.

Après quelques minutes, ils furent capables de discerner que la silhouette noire n'était personne d'autre que leur Directeur de Maison, portant un balai. Était-ce une bonne idée, pensa Severus --- après tout, le but de mettre en scène une quasi-querelle entre les cinq d'entre eux pendant le petit déjeuner avait été de rendre leur sortie de groupe aussi inaperçue que possible. Mais si Lestrange allait les rejoindre maintenant …

"Bonjour, tout le monde!" appela Lestrange, quand il les eut rejoints un peu plus tard. "Vous serez heureux d'entendre que votre présence au château est exigée immédiatement. M. Maugrey m'a envoyé ici pour aller vous chercher, car il y aura une autre tournée d'interrogatoires."

"Dimanche!" s'exclama Clarissa, "Ces enculés ne peuvent-ils pas nous laisser en paix, juste cette fois ?"

"Même si j'aurais pu formuler cela d'une manière moins offensive, Mlle Rosier, le sens sous-jacent aurait été le même. Venez maintenant, vous tous, de peur que M. Maugrey ne nous appelle par Accio!"

~~~~ * ~~~~

Lundi, même la maîtrise de soi imperturbable de McGonagall était allée au caniveau. Elle était irritable et rabrouait tout le monde, y compris --- comme Severus l'entendit d'un groupe de Gryffondors passant --- de sa propre maison. Si les points de maison avaient été stables pendant une semaine entière parce que les élèves étaient trop soumis pour faire autre chose que respirer et prendre des notes pendant les cours, ils semblèrent être sujets à une sorte de glissement de terrain à partir de lundi matin. La patience de tous les enseignants s'amincissait et on dit même de Flitwick qu'il avait ôté dix points à un sixième année de Poufsouffle pour une infraction somme toute mineure. Donc ce fut avec des sentiments mitigés que le groupe de Serpentard entra dans la salle de Métamorphose lundi après-midi. McGonagall les attendait déjà. Lucius poussa Severus du coude et fit un geste vers la main droite du professeur, dont les doigts battaient un rythme irrégulier sur le bureau, ce que McGonagall ne faisait jamais à moins d'être vraiment irritée.

Non seulement les quatrième année, mais tous les Serpentards, jusqu'au plus jeune première année, avaient eu depuis le petit déjeuner, aux classes du matin et au déjeuner des visages pâles et des cercles sombres sous leurs yeux, car Maugrey les avait gardés dans la salle commune pour plus de douze heures---des sandwichs avaient été apportés pour le déjeuner et le dîner --- les appelant un à un au dortoir des filles de première-année qu'il utilisait pour ses fins, leur permettant d'aller aux toilettes seulement avec sa permission et en compagnie d'un préfet. Il avait posé les mêmes questions à maintes reprises et si les réponses différaient ne serait-ce que par un seul mot, il les accusait de mentir. À dix heures, les petits étaient devenus fatigués, mais l'Auror n'avait pas permis de conjurer de matelas ou de couvertures, et donc ils s'étaient accommodés sur des lits de fortune faits de chaises et couverts de robes. Les plus vieux élèves étaient donc restés assis sur le sol, nerveux et tremblant sans leurs robes, jusqu'à minuit bien passé. De là il était compréhensible que personne ne soit trop enthousiaste à la perspective de double Métamorphose avec une McGonagall fortement irritable.

La leçon ne se passa pas trop bien. La tâche d'aujourd'hui était de transformer un écureuil en un bouquet de pâquerettes et de nouveau en écureuil, ce qui aurait été un travail exigeant même en temps normal. Severus avait senti un mal de tête aigu venir déjà pendant le déjeuner et maintenant il s'était développé en une migraine totale. Tandis que McGonagall arpentait la salle de classe, délimitant la partie théorique de la tâche, ils étaient sensés prendre des notes, ce qu'il fit avec obéissance, de même que les autres. Après dix minutes d'écriture continue cependant, les lettres commençaient à nager devant ses yeux et la douleur devenait insupportable. Severus reposa sa plume, ayant l'intention de fermer les yeux un instant et, pour rendre l'obscurité aussi complète que possible, les couvrit de ses mains. Malheureusement, c'était exactement le moment où McGonagall choisit pour regarder dans sa direction.

"M. Rogue! Si ce que je dis vous ennuie au point de vous endormir, vous pouvez aussi bien quitter cette salle de classe!"

Sa voix n'était pas excessivement perçante, mais dans sa condition, il avait l'impression que quelqu'un coupait dans son cerveau avec un couteau incandescent. Rassemblant toute sa force de volonté, il souleva la tête et ouvrit les yeux. "Désolé, Professeur," dit-il, "Mais j'ai ce mal de tête épouvantable-"

"Je ne suis pas intéressé par votre santé, M. Rogue et vous prêterez attention durant mes cours, merci!"

Une vague de nausée le balaya et il réussit à peine à retenir la forte envie de vomir partout sur la table. La pensée de ce que McGonagall aurait dû dire, s'il n'avait pas été capable de résister, le fit sourire malgré lui. C'était la goutte d'eau pour l'enseignant. "J'enlève dix points à Serpentard pour manque de respect!" cria-t-elle, lui faisant regretter de ne pas pouvoir couvrir ses oreilles, mais cela aurait augmenté sa fureur encore plus. "Et vous irez voir votre Directeur de Maison pour une retenue."

"Bien sûr," répliqua Severus, "À moins qu'il ne soit actuellement en train d'être torturé par M. Maugrey."

Lucius le regarda la bouche ouverte--- pas même lui n'aurait osé dire une telle chose quand il était clair que rester silencieux jusqu'à ce que la tempête ne retombe était la stratégie la plus sage.

McGonagall devint blanche comme un linge et s'avança à grands pas vers lui. "Vous irez voir le Directeur immédiatement!" siffla-t-elle, "Et, juste pour éviter que vous lui racontiez un de vos petits mensonges, vous lui donnerez un petit mot."

Elle s'assit à son bureau et commença à griffonner furieusement sur un morceau de parchemin.

"Est-ce que tu es fou ?" dit Lucius.

"Migraine!" répondit Severus et Lucius hocha la tête, roulant ses yeux.

Quand elle eut fini, McGonagall fit signe à Severus de venir chercher le mot. Il se leva de son siège, titubant légèrement, alla à son bureau et prit le mot. L'enseignant le regarda avec des yeux rétrécis---à l' évidence elle remarquait qu'il y avait quelque chose de plus à son insubordination qu'un simple désir de méchanceté.

"M. Rogue," dit-elle d'une voix basse, "est-ce que vous êtes malade ?"

"J'ai quelque chose comme la mère de toutes les migraines," répondit-il faiblement.

McGonagall prit ses lunettes, les replia et les mit dans une poche de ses robes. "Je vois," dit-elle avec un ton plus clément, "la déduction de dix points et la retenue restent valables, M. Rogue, mais au lieu d'aller voir le Directeur, vous irez voir Madame Pomfresh chercher quelque chose pour votre mal de tête. Et ne revenez pas ici à moins que vous ne vous sentiez assez bien."

Severus la remercia faiblement et quitta la salle de classe, marchant très soigneusement, parce que la dernière chose qu'il voulait était de soumettre son cerveau à des vibrations inutiles ou à des chocs.

Quand l'infirmière le vit entrer à l'Infirmerie, elle secoua la tête avec désapprobation et saisit la fiole contenant la Potion Antidolorificus. "Migraine de nouveau, Severus ?" demanda-t-elle.

"J'ai peur que oui, Madame Pomfresh. La pire depuis longtemps. Je suppose que c'est l'effet combiné du stress et du temps."

La sorcière le regarda avec curiosité tandis qu'il avalait deux pleines cuillères du liquide. "Stress? Quel stress, Severus ? Les examens sont à des années lumières … Viens, allonge-toi un instant."

Il s'allongea sur l'un des lits et ferma les yeux, sentant l'infirmière s'asseoir sur le bord du lit. "Quel stress ?" répéta-t-elle, mettant une main fraîche sur son front.

"Vous n'avez pas entendu parler des méthodes d'interrogatoire assez draconiennes de M. Maugrey hier ?"

Madame Pomfresh n'avait pas entendu parler du marathon investigateur de l'Auror et donc Severus le lui raconta en quelques mots.

"C'est une atrocité!" dit-elle. "On ne devrait pas lui permettre de faire cela à de simples enfants. Je sais que des choses étranges se passent, mais après tout, c'est Poudlard et pas Azkaban."

Severus acquiesça de tout coeur et s'assoupit ensuite. Quand Madame Pomfresh le réveilla, il était presque l'heure de dîner et il partit à la hâte vers la Grande Salle. Comme toujours après ses attaques de migraine, il se sentait un peu chancelant, mais essentiellement bien, à cause de la simple absence de douleur. Il était à peu près à au coin du couloir, se demandant ce qu'il allait manger, espérant que les elfes avaient préparé de la purée, qu'il aimait, quand il entendit la voix de Lupin appeler le Directeur. Severus s'arrêta et, juste pour être en sécurité, s'avança dans l'ombre de la statue de Bangolf Ressemble Chauve-souris dont le manteau, drapé sur ses bras allongés comme les ailes d'une chauve-souris, offrait une excellente protection.

"Oui, M. Lupin ?" fit la voix de Dumbledore.

"Directeur, désolé de vous déranger, je sais que vous en avez assez sur vos épaules, mais je suis si inquiet …" Lupin semblait l'être extrêmement , car il avait fait sortir les mots si rapidement qu'ils étaient presque inintelligibles.

"Calmez-vous, M. Lupin, calmez-vous. Maintenant, quel est le problème ?"

"C'est les Aurors, Monsieur et … et la prochaine pleine lune est dans moins d'une semaine, alors je suis inquiet … et s'ils ne partent pas à temps ? Ils sont partout, vous savez cela mieux que moi et imaginez simplement s'ils m'attrapent ou même Madame Pomfresh sur le chemin du retour, vous auriez beaucoup d'ennuis et je serai certainement expulsé-"

"M. Lupin, à moins que des branchies ne vous aient poussées et qu'ainsi vous puissiez respirer en parlant, je vous conseillerais de respirer maintenant. Bien. Maintenant, restez simplement calme et ne vous tourmentez pas. Les Aurors partiront demain et personne ne découvrira votre secret. Et même si c'est le cas --- soyez sûr que vous ne seriez jamais expulsé."

"Monsieur, je … je ne veux pas vous causer de quelconque problème, alors si vous préférez que je parte-"

"Non, M. Lupin. Vous resterez ici parce que votre place est ici. Maintenant allons dîner."

Ecoutant l'écho des pas de Dumbledore et de Lupin s'affaiblir, Severus avait des difficultés à contrôler sa propre respiration. La pleine lune … comment pouvait-il avoir été si aveugle ?