Disclaimer : C'est avec un peu de lassitude que je déclare que presque rien ici ne m'appartient. Les personnages des quatre tomes de Harry Potter sont à J. K. Rowling, le reste est à moi.

Le procès de Peter Pettigrow

Verdict

Les pleurs de Peter durèrent un moment. Il semblait qu'on entendait plus qu'eux dans le tribunal. Faraday regardait l'accusé. Il savait qu'il ne pouvait plus rien faire pour lui. Il aurait pu espérer avoir une réduction de peine, mais il avait plaidé coupable. Il ne faisait aucun doute que Peter irait à Azkaban pour le reste de sa vie. Personne ne semblait avoir envie d'interrompre les pleurs de Peter, et un observateur avisé aurait sans doute aperçu quelques larmes dissimulées dans l'assemblée. Il y avait celles de sa mère, bien entendu, mais quelques autres personnes éprouvaient également de la compassion pour l'accusé. L'ambiance était donc sinistre, et les jurés paraissaient mal à l'aise, à l'idée probablement de devoir juger cet homme qui semblait être à peine de sorti de l'enfance. Toujours Peter avait vécu dans la dépendance d'autres Sorciers. Il n'avait en quelques sortes jamais cessé de rêver sa vie. Lorsqu'il tuait, il n'avait aucun remord pace qu'il ne se rendait pas compte qu'il était responsable de ses actes. La prison, la mort, tout ça était pour lui des histoires de grands, qui ne le concernaient aucunement.

-La Cour va à présent se retirer pour réfléchir à la sentence de l'accusé, dit Faraday d'une voix forte.

Les jurés se levèrent après un temps. La plupart regardaient Peter. En ordre et en silence, ils quittèrent le Grand Tribunal par la porte d'entrée. Le Juge restait sur son Trône, mais il savait que les jurés allaient à présent se concerter dans une petite pièce, à une table ronde de marbre rouge. Peter restait immobile sur le Siège du condamné. Il regardait Harry. Ses pensées convergeaient souvent vers lui depuis quelques temps. Il n'avait demandé aucun pardon de sa part, mais il savait que ses yeux le trahissaient. Il avait beaucoup aimé Harry, dès la première fois qu'il l'avait vu, à Godric's Hollow, dans les bras de son père. Ils avaient joué ensemble avec un hochet. L'objet fascinait Harry lorsque Peter le tenait en main, et ses yeux verts semblaient refuser de ciller, de peur de le perdre des yeux. Le hochet n'avait pourtant rien d'extraordinaire, absolument aucune propriété magique, d'une couleur rose banale, l'enfant ne le quittait pas des yeux. Généralement, les bébés n'ont pas directement leurs iris de leur couleur définitive. Mais Harry avait à sa naissance les mêmes yeux vert étranges qu'il regardait maintenant. Les mêmes yeux que sa mère. Un sentiment étrange traversa l'esprit de Peter : la dérision. Tout cela n'avait en fait qu'une importance minime. Il n'aurait pas eu un impact semblable s'il était resté du côté des gentils. Si peu doué, si nul en métamorphose, aucun talent, vraiment rien d'intéressant, Peter se disait qu'il aurait été d'une inutilité navrante. Le seul avantage de cette situation - là il sourit par pure ironie - était qu'il était à peu près sûr de laisser son nom dans pas mal de livres.

Sirius regardait aussi Peter. Non, ce rat ne méritait réellement aucun pardon. Il refusait de laisser la moindre parcelle de son esprit envisager cette possibilité. Il s'interdisait tout autre sentiment que la haine aveugle et la rancune. Sirius n'était pas un mauvais homme, Peter aurait eu droit au pardon dans un autre cas, mais Sirius avait décidément trop d'horreurs à reprocher à Peter pour l'envisager. « Après un long laps de temps, s'autorisa-t-il à penser, quand lui aussi aura connu les Détraqueurs, quand il m'aura remboursé les douze années qu'il me doit, on pourra peut-être, je dis bien peut-être reconsidérer la question. Il faudra là encore tenir compte de sa trahison, et pour cela aussi il lui faudra payer. Mais chaque chose en son temps. Noires pensées pour un chien noir. » Il sourit. Il ne croyait pas le moins du monde les inepties qu'avait proféré Peter au sujet de sa prétendue 'rédemption', qu'il ait cessé d'être un faible. Peter était un faible dans le sang.

Remus ne pardonnait pas non plus à Peter, mais il lassait son esprit vaquer librement à des suppositions : Peter aurait-il réellement cessé d'être un faible ? Le choixpeau avait-il finalement réussi son choix ? Envisagerais- je un jour de lui pardonner cette faiblesse, qui a engendré tant de mal et de souffrances ? On avait toujours attribué à Remus comme principale qualité d'être compréhensif. Mais pouvait-il décemment comprendre la traîtrise et les meurtres de son ancien ami ? Remus était un loup-garou. Et Peter avait également finalement accepté qu'il dorme dans son dortoir. Peut- être Remus devrait-il imiter Peter, et accepter de le pardonner, en échange ? Mais ce n'était pas équivalent. Il avait été redevable envers Peter un temps, mais tout avait été annulé quand il avait découvert que Peter était le traître. L'esprit de Remus semblait scindé en deux parties d'avis contraire - la bête et l'homme, pensa Remus avec amertume.

Harry hésitait. Pardonner Peter ? Etait-il fou ? Il avait tué ses parents, tué Cédric, il. Et pourtant, Harry devait avouer qu'il était bien tenté de pardonner Peter. Il regarda le directeur qui était assis à côté de lui. Il se promit intérieurement de discuter de ce sujet avec Albus. Il était assez sûr de la validité des pensées du vieux directeur, et les conseils de ce- dernier, bien que donné avec peu de prodigalité, étaient toujours utiles. Mais Harry désirait également se forger une opinion personnelle. Cependant, il était toujours indécis. Que diraient ses parents ? Quel serait leur avis ? Il pouvait difficilement le leur demander, et par la faute de Peter. Cette histoire de faiblesse naturelle de Peter ne lui plaisait pas trop : devait-on lui pardonner ses crimes sous ce prétexte ? Tant de questions sans réponses. Il en parlerait à Ron et à Hermione.

Albus Dumbledore, quant à lui, avait déjà pardonné à Peter. Il pratiquait depuis longtemps avec plus ou moins de succès la 'deuxième chance'. Son expérience, associée à un bonté naturelle, lui incitait à placer une nouvelle fois sa confiance en Peter. Mais il ne pouvait rien faire, aucun espoir de ce côté là. Il lui écrirait pour lui dire qu'il le pardonnait. Mais Peter apprécierait-il son pardon ? Il espérait bien qu'il n'imaginerait pas un sentiment de condescendance chez lui. Au fond, le directeur n'était même pas sûr que Peter désirait réellement l'absolution. Il était sincère lorsqu'il disait qu'il pensait qu'il ne le méritait pas. Peter pensait peut-être devoir porter son fardeau seul, et jusqu'à la fin de ses jours et il ne voulait pas s'en soustraire. C'était une forme de courage.

Les jurés n'étaient pas restés longtemps dans la petite salle, en effet la décision ne nécessitait pas beaucoup de palabres. Ils s'étonnèrent en entrant de voir le Grand Tribunal entièrement silencieux. Peter avait arrêté de pleurer, et pas le moindre Sorcier ne semblait avoir osé élever la voix. Seul le Ministre de la Magie avait provoqué un petit bruit en tentant, avec succès cette fois, d'attacher correctement sa cape. Un parchemin roulé fut remit à Faraday par Séverus Rogue. Le Juge des Grandes Instances attendit que les jurés ses soient installés avant de le déplier. Il lut le parchemin pour lui-même. Aucune surprise n'apparut dans ses yeux. Finalement, il se leva :

-Moi, Septimus Faraday, Juge des Grandes Instances des Tribunaux du Département de la Justice Magique de Grande Bretagne, vais prononcer le verdict de l'accusé, Peter Firmin Pettigrow.

Il y eut un instant de tension immense dans la Salle. Le public, bien que conscient du contenu probable de la sentence, retenait son souffle.

-Rappelons brièvement les différents chefs d'accusations de l'accusé : 13 meurtres sans préméditation, une trahison au conséquences mortelles, tortures, et enfin un crime contre le monde de la Sorcellerie, qui a permit le retour du Seigneur des Ténèbres.

Un lourd silence tomba sur le tribunal.

-Les jurés ont cependant cité, comme circonstances atténuantes, une évidente faiblesse morale, qui induisit une irresponsabilité partielle de l'accusé, ainsi que la malchance de vivre à une époque qui est aujourd'hui heureusement révolue.

La plupart des jurés ne regardaient pas Peter.

-Le verdict est le suivant. Au vu des chefs d'accusations non négligeables qui pèsent contre lui, et à cause de la faiblesse des circonstances atténuantes précédemment citées, la Cour se voit dans l'obligation de prononcer la sentence de l'incarcération à vie. Peter Firmin Pettigrow sera emprisonné dans une cellule de la prison d'Azkaban et ses biens éventuels seront confisqués au profit des familles des victimes de ses crimes. L'accusé va également sous les yeux de la Cour être défait du Grand Ordre de Merlin, dont il avait été décoré par erreur d'une première classe.

Albus Dumbledore se leva. Il avait l'air triste. En tant que Commandeur du Grand Ordre de Merlin, c'était à lui qu'incombait la tâche de dégrader Peter. On apporta dans la pièce, sur un coussinet rouge, une petite figurine en or massif. Il s'agissait d'une épée enfoncée dans un enclume où le nom de l'accusé était gravé. Dumbledore prit la parole :

-Autrefois Excalibur, l'épée que Merlin lui-même enfonça dans l'enclume, vous tenait pour membre de l'Ordre. Ce fut une erreur. C'est sans aucun plaisir que je me vois dans l'obligation de détruire ce symbole de bravoure.

Il saisit sa baguette magique, et prononça une incantation. Un fulguration éblouissante jaillit de sa baguette, et vint percuter l'emblème. Quand les yeux du public furent à nouveau aptes à voir après cette aveuglante lumière, il ne restait qu'une fine poudre dorée du blason de Merlin. Peter ne pleura pas, cette fois. L'acte était consommé. Le dernier acte d'une pièce de théâtre classique, de celle où le héros meurt à la fin auprès de celle qu'il n'a jamais cessé d'aimer. Dans ce cas le 'héros' ne meurt pas, ni n'aime une quelconque belle inconnue, mais aux visages de ceux qui ont assisté au procès, on croirait vraiment que c'était le cas. Dumbledore regagna sa place. Peter fut emmené, sans aucune résistance de sa part. Faraday le suivit du regard. Seul Peter aurait pu affirmer qu'on y voyait effectivement cette lueur de compassion. Il semblait avoir oublié le procès, et continua à fixer la porte de sortie après que Peter fut parti. Un petit homme dut venir toussoter à son oreille pour le lui rappeler. Septimus Faraday, du haut du Trône de décision, annonça la fermeture du procès par ces mots :

-Ce qui devait être fait l'a été. La séance est levée.

Et l'assemblée quitta les gradins avec ordre et méthode. Peu de mots furent échangés. Les plaignants sortirent en dernier de la Salle. Et Harry eut un dernier regard pour le Grand Tribunal. Il frissonna en voyant le soupirail lugubre, et il vit le ciel gris à travers ses barreaux d'acier.