Chapitre 3
Merry posa son sac au pied de l'arbre et s'assit, épuisé. Cela faisait cinq jours que Pippin et lui étaient partis à la recherche de leur ami Sylvebarbe dans la forêt de Fangorn, mais ils n'avaient trouvé aucune trace de l'Ent. Les Hobbits commençaient à se décourager et décidèrent que s'ils ne trouvaient pas leur ami avant la fin de la semaine, ils rentreraient chez eux, dans la Comté. Pippin se laissa tomber à côté de Merry en soupirant.
- Tu crois que Sylvebarbe est parti ?
- Où serait-il parti, voyons ? C'est ici, chez lui.
- Et s'il était à Isengard ?
Merry parut réfléchir un instant.
- Tu as peut-être raison. Mais, je n'ai pas la force d'aller jusque là-bas !
- Moi non plus.
- La nuit tombe. Nous ferions mieux de préparer notre campement.
Ils s'installèrent autour d'un petit feu et mangèrent en silence. Puis, il se couchèrent et s'endormirent presque immédiatement. Le lendemain matin, ils furent réveillés par un grondement sourd qui semblait provenir du plus profond de la Terre. Les Hobbits se levèrent en sursaut et rassemblèrent leurs affaires pour être prêts à partir. Alors qu'ils allaient se cacher derrière un buisson, ils virent apparaître une grande silhouette qu'ils reconnurent immédiatement :
- Sylvebarbe !
L'Ent s'approcha de ses amis et se pencha vers eux. Sa voix caverneuse retentit dans la forêt :
- Mes amis Hobbits !
L'Homme-Arbre tendit ses longs bras feuillus et souleva de terre Merry et Pippin pour les installer sur une de ses plus hautes branches. Puis, il se remit en route.
- Cela fait plusieurs jours que nous vous cherchons ! S'exclama Merry. Où étiez-vous donc passé ?
- Je rendais visite à mes amis à Isengard. Ils ont bien travaillé. Les ravages de Saroumane ne sont presque plus visible.
- Tant mieux ! Lança Pippin en jetant un regard à son ami qui voulait dire « Tu vois que j'avais raison ! ».
Merry haussa les épaules et demanda à l'Ent :
- Et, où allons-nous, maintenant ?
- Je ne sais pas. J'avance.
Les Hobbits sourirent et se laissèrent bercer par le pas lent de leur ami.
Plusieurs heures passèrent et l'Ent s'arrêta pour permettre aux Hobbits de manger. Alors qu'ils allaient repartir, un hurlement glaça le sang des Semi-Hommes et la sève de l'Ent. Celui-ci remonta en vitesse ses amis en sécurité sur ses hautes branches et essaya de repérer d'où venait le bruit.
- Qu'est-ce que c'était ? Demanda Pippin, inquiet.
- Des Wargs, répondit Sylvebarbe.
- Que font-ils ici ?
- Je ne sais pas, mais ce n'est pas bon signe…
Au même moment, un groupe de bêtes féroces sortit des buissons et se précipita vers l'Ent. Les Wargs entourèrent leur proie en grognant. Ils levèrent leurs têtes hideuses vers les Hobbits, retroussant leurs babines, montrant leurs crocs. Puis, ils se jetèrent sur lui tous en même temps. Sylvebarbe n'eut aucun mal à en écraser deux avec ses grandes racines, mais trois autres réussirent à l'atteindre et lui arrachèrent de grands lambeaux d'écorce. L'Ent poussa un hurlement de douleur qui fit se dresser les cheveux des Hobbits sur leurs têtes. Il écrasa encore deux Wargs avant que les quelques restants comprennent qu'ils n'avaient aucune chance contre l'Ent et s'enfuient. Lorsqu'ils furent certains que tout danger était écarté, les Hobbits se laissèrent glisser au sol.
- Vous allez bien ? Interrogea Merry à l'attention de l'Ent.
- Ca me brûle.
- Y'a t'il quelque chose que l'on puisse faire ? Demanda Pippin.
- Non. Je guérirai seul, mais ça va prendre du temps. Seul un mage pourrait soulager ma douleur.
Les deux Hobbits se regardèrent et eurent la même pensée.
- Et si nous allions chercher Gandalf ? Il pourrait vous soigner.
- Vous feriez ça pour moi ?
- Bien sûr ! S'exclama Merry avec enthousiasme. Pippin, tu viens ?
Comme son ami ne répondait pas, Merry se tourna vers lui.
- Pip…
Il s'interrompit, subjugué par la vision merveilleuse qui s'offrait à lui. Une belle jeune femme, rousse, vêtue d'une tenue de cavalier Elfe, mais assurément d'apparence humaine, s'avançait vers eux. Son visage reflétait une grande sagesse qui rappela aux Hobbits la belle Elfe Galadriel. La femme s'avança et posa doucement une main sur le tronc de Sylvebarbe qui en frémit de joie.
- Mon ami, je vais vous aider.
- Merci, Dame Célia.
La jeune femme ouvrit sa cape et les Hobbits purent voir qu'elle portait une petite besace en cuir dont elle sortit des herbes rouges. Elle frotta ses mains avec la plante, puis les appliqua doucement sur les blessures de l'Ent. Une lumière bleue enveloppa la jeune femme et l'Homme-Arbre pendant quelques secondes, puis disparut. Les Hobbits eurent alors la surprise de voir que l'écorce de l'Ent était reformée et qu'il n'en restait plus aucune trace. La femme se tourna vers eux en souriant :
- Je suppose que vous êtes Messires Merriadoc Brandebourg et Peregrin Touque ?
- Co… comment… articula difficilement Merry.
- Je suis une amie de Gandalf le Blanc. Il m'a envoyé à votre rencontre.
- Il y a un problème ? Interrogea Pippin.
- Aucun, tout au contraire. Je vous amène une bonne nouvelle. Messire Gimli va bientôt être père et il vous invite à la fête qu'il compte donner à cette occasion.
- Super ! S'exclamèrent les deux Hobbits en chœur.
La jeune femme se retourna vers Sylvebarbe et demanda :
- Comptez-vous vous joindre à nous ?
- Je ne peux quitter ma forêt. Donnez mes salutations et mes félicitations à votre ami.
Merry attrapa Pippin par le bras et lui murmura quelque chose à l'oreille.
- Qu'y a t'il ? Demanda l'Ent, curieux.
- Ca nous ennuie de repartir si vite après vous avoir retrouvé. Alors, on se disait qu'on pourrait peut-être revenir vous voir lorsque la fête serait terminée.
- J'en serais ravi ! S'exclama Sylvebarbe d'une joie enjouée.
- Alors, c'est d'accord !
Les Hobbits prirent leurs sacs, saluèrent leur ami et suivirent Dame Célia qui se dirigeait vers l'orée des bois.
Une fois sortis de la forêt, Pippin interrogea la jeune femme :
- Nous partons à pied ?
- Non, rassurez-vous.
Elle siffla et deux chevaux apparurent au loin, s'approchant rapidement. Ils s'arrêtèrent au pieds des trois compagnons et la jeune femme aida les Hobbits à grimper sur une des montures avant de prendre place sur l'autre. Les chevaux se mirent en route sur un sifflement de Dame Célia et ils purent ainsi parcourir plusieurs lieues avant la tombée de la nuit. Lorsque la lune apparut dans le ciel, Dame Célia donna ordre aux chevaux de s'arrêter et les voyageurs s'installèrent pour la nuit. Les Hobbits s'endormirent rapidement après avoir mangé et la jeune femme s'installa pour faire le guet, n'ayant presque pas besoin de sommeil. Au milieu de la nuit, Merry s'éveilla en sursaut. Il se tourna vers Pippin qui dormait toujours et se leva sans bruit. Il fit quelques pas, n'arrivant pas à savoir ce qui l'avait réveillé. Alors qu'il allait retourner se coucher, une voix douce lui souffla :
- Vous avez du mal à trouver le sommeil ?
Il sourit à la jeune femme qui le regardait, assise contre un arbre. Il se laissa tomber à côté d'elle en soupirant :
- Je ne sais pas ce qui m'arrive. Cela fait plusieurs nuits que j'ai un sommeil agité et que je me réveille sans raison.
- Votre cœur est troublé. Vous enviez le bonheur de vos amis.
- Comment savez-vous tout cela ?
- Je vous l'ai dit, je suis une amie de Gandalf. Il m'a raconté la guérison de Frodon et le reste. N'y a t'il pas une personne qui vous est chère ?
- Si… murmura t'il, levant le regard vers la forme endormie un peu plus loin.
- Pourquoi ne lui parlez-vous pas de vos sentiments ?
- Il ne comprendrait pas.
- En êtes-vous certain ?
Merry baissa les yeux et soupira.
- Je ne suis pas prêt à lui parler de ça. Peut-être plus tard.
- Ecoutez votre cœur, c'est le meilleur conseil que je peux vous donner.
- Merci. Je vais essayer de dormir encore un peu.
Il se leva et rejoignit Pippin qui dormait toujours comme un loir. La jeune femme les regarda avec tendresse. Pourquoi faut-il qu'ils aient tous autant de mal à avouer leurs sentiments ?
