Titre : Harry Potter et le Retourneur de Siècles

Auteur : Vi (via Ccilia)

Disclaimer : puisqu'il faut en passer par-là...les personnages n'appartiennent qu'à JKR, comme chacun le sait, mais n'empêche que ça fait du bien de s'en servir parce que s'il avait fallu les créer nous-même... !

Résumé : Harry est en 6ème année (impossible à comprendre d'ailleurs si vous ne lisez pas d'abord "Harry Potter et la chouette rousse" (5ème année), car ses pouvoirs et les évènements ont évolué dans le premier texte et vont largement lui servir dans celui-ci). Harry a passé une sorte d'accord avec Voldemort, mais bien sûr, celui-ci ne le respectera pas longtemps. Il retourne donc dans le passé car c'est (d'après Dumbledore) la seule solution pour changer le cours des évènements. Le hic, c'est qu'il se retrouve dans la vie qui aurait dû être la sienne, et là...grosses surprises à découvrir sur le nouveau Poudlard auquel il est bien obligé de s'adapter. Seulement les choses ne se passent pas mieux et il retourne à son époque où l'Ordre du Phénix et l'Ordre des Ténèbres seront dans l'obligation de s'affronter. Vous voulez savoir qui gagne ? Alors bonne lecture...

Mais avant, une petite pensée pour :

Lily-la-Tigresse
: merci pour ta rewiew que je prends comme un encouragement à continuer. Pour l'instant pas d'autre fic en vue (avant la sortie du tome 5 en tous cas), mais après peut-être...et sur d'autres sites...en attendant, bonne lecture pour celle-ci, et merci encore.

Ccilia (qui m'a gentiment proposé de mettre mes 2 textes sur ce site pour vous les faire partager) : et à qui j'adresse un GRAND merci tout particulier, car sans elle, je n'aurais jamais eu l'inspiration pour me lancer à mon tour dans la rédaction.

Petite précision : le rôle que je donne aux personnages et les évènements qui se passent dans les deux textes n'engagent que moi et ne sont pas nécessairement une "suite logique" aux bouquins de JKR. J'ai juste utilisé certains faits, ou modifié certains traits de caractères des persos, pour les besoins de l'histoire, alors ne hurlez pas si vous y trouvez des invraisemblances !

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Chapitre 1 - Une visite inopinée

Voilà déjà un mois et demi que Harry Potter, jeune sorcier de seize ans, était revenu à Privet Drive, une rue semblable à tant d'autres dans la banlieue de Londres où il vivait, depuis près de quinze ans, chez son oncle et sa tante qui ne le supportaient pas.

Leur attitude à son égard n'avait été améliorée ces derniers temps que par le fait que Harry les menaçait régulièrement d'utiliser contre eux quelques-uns des sortilèges qu'il avait appris à l'école de sorcellerie qu'il fréquentait depuis maintenant cinq ans.

Harry s'apprêtait à commencer sa sixième année au collège de Poudlard, le seul endroit où il s'était vraiment senti chez lui depuis toutes ces années. Et il attendait, avec impatience, le 1er septembre qui fixait la rentrée qui lui permettrait enfin de quitter cette maison.

Les mains plaquées sur ses reins, il montait l'escalier qui menait à sa chambre en soupirant bruyamment. Une grimace de douleur déformait son visage à chacun des mouvements qu'il faisait pour en gravir les marches. Harry, qui avait dû tailler plusieurs arbustes le matin même et la totalité des haies qui entourait le jardin, avait passé l'après-midi à ranger le bois que son oncle s'était fait livrer pour préparer l'hiver.

La tante Pétunia avait fini par l'appeler pour le dîner, attendant patiemment que le camion du livreur ait tourné le coin de la rue pour indiquer à Harry qu'il pouvait en rester là pour le moment et qu'il rangerait le reste le lendemain.

Le livreur avait eu un froncement de sourcils en apercevant le jeune adolescent, un peu maigre et pâle, qui était sorti sur le perron à la demande d'un homme bedonnant, à la moustache impressionnante, et qui avait grogné à Harry qu'il comptait sur lui pour que tout soit rangé dans la journée.

- Manque pas d'air celui-là, avait bougonné le livreur à Harry lorsque l'oncle Vernon était retourné à l'intérieur de la maison. Ça lui f'rait pas d'mal de s'remuer un peu, si tu vois c'que j'veux dire mon garçon !

Harry avait marmonné une vague excuse pour calmer le livreur qui avait déposé son chargement dans l'allée, en silence.

Harry entra dans sa chambre et, les mains toujours sur les reins, poussa la porte du pied qui se referma doucement derrière lui. Il avança vers son lit, pivota sur lui-même, et se laissa tomber sur le dos, les bras en croix, soulagé de pouvoir se reposer enfin.

Hedwige, sa chouette au plumage blanc comme neige, eut un hululement chaleureux en regardant son maître, les yeux grands ouverts, qui fixait le plafond. Harry tourna la tête vers le bureau où il avait déposé la cage du rapace lorsqu'il était revenu de Poudlard quelques semaines plus tôt.

- Plus que quinze jours Hedwige, dit-il à la chouette qui le regardait les yeux mi-clos. Heureusement que j'ai pu passer de bons moments avec Sirius cet été, ça aide à supporter le reste…

Harry repensa aux sorties qu'il avait pu faire avec Sirius, son parrain : les longues discussions qu'ils avaient eues ensemble les promenades dans les rues de Londres et les interminables soirées d'été passées dans le jardin de Mrs Figg où il avait rit aux anecdotes que Sirius lui avait racontées sur les années qu'il avait passées à Poudlard, et plus tard, avec ses parents. Pour ne pas être reconnu, Sirius, qui avait dû changer d'identité et se faisait appeler John Figg pour ne pas éveiller les soupçons, s'était laissé pousser la barbe et portait des lunettes de soleil le plus souvent possible. Plus récemment, ils avaient même été faire un tour sur le Chemin de Traverse où personne n'avait fait attention à eux. Fred et George, dont la boutique ne désemplissait pas, avaient été ravis d'avoir des nouvelles de Harry qui était reparti de la petite échoppe les poches pleines des inventions des jumeaux qu'il avait hâte de tester sur son cousin. Mais aujourd'hui, Sirius lui avait dit qu'il avait quelque chose d'important à faire et l'adolescent était donc retourné à ses corvées.

Harry se décida enfin à se relever. Il attrapa son pyjama sur une chaise et sortit de sa chambre pour aller à la salle de bain de l'étage. Après avoir pris une douche bien chaude, qui avait soulagé ses muscles endoloris, il regagna sa chambre et se glissa dans son lit où il s'endormit aussitôt.

Harry se réveilla en sursaut. Il avait l'impression de n'avoir dormi que quelques heures. Avait-il fait un cauchemar ? Non, il fouilla son esprit pour essayer de comprendre ce qui l'avait tiré de son sommeil, mais se sentait encore si fatigué qu'il était sûr d'avoir dormi profondément. Puis soudain, il comprit. La clarté de la lune baignait la pièce de son voile argenté et Harry distingua une silhouette massive penchée sur son lit.

- Aaaahhhh ! s'écria-t-il en se redressant d'un bond, cherchant maladroitement ses lunettes sur la table de chevet sans quitter la silhouette des yeux.

- Oh…n'exagérons rien ! dit alors une voix douce. Je ne suis pas si effrayant que ça tout de même !

L'homme se pencha et alluma la lampe près du lit, tandis que Harry posait enfin ses lunettes sur le bout de son nez.

- Vous ! s'étonna-t-il en reconnaissant son visiteur.

- Je suis désolé de t'avoir fait peur Harry, dit Albus Dumbledore en s'asseyant sur le bord du lit.

- Qu'est ce que…comment se fait-il…? Il est arrivé quelque chose à Sirius ? demanda-t-il enfin.

- Calme-toi Harry, calme-toi. En effet, il se produit des choses terrifiantes en ce moment mais Sirius va bien rassure-toi.

- Des…des choses terrifiantes ! balbutia Harry. C'est en rapport avec Voldemort ?

Dumbledore se balança d'avant en arrière en soupirant d'un air las. Visiblement, il ne savait pas par où commencer.

- Une fois de plus, le Seigneur des Ténèbres a décidé de laisser libre court à sa colère, j'en ai bien peur, reprit-il d'un ton grave. Il semblerait qu'il soit parvenu à réunir beaucoup plus d'adeptes qu'on ne l'avait pensé. Il faut dire qu'avec Cornelius Fudge au ministère de la Magie, les gens n'ont retrouvé qu'une confiance relative, et bon nombre d'entre eux sont si terrifiés qu'ils ont préféré le rejoindre plutôt que de se résigner à une mort certaine. Sans même essayer de combattre, Harry… Quoi qu'il en soit, Voldemort est, en ce moment même, en train de mettre le pays à feu et à sang. Il a réparti ses partisans en plusieurs groupes de façon à pouvoir agir aux quatre coins de l'Angleterre en même temps. De telle sorte que nous ne puissions pas intervenir pour l'arrêter car il a pris soin de choisir judicieusement ses premières victimes et les morts se comptent déjà par centaines dans nos rangs et parmi les sorciers qui essayent, avec courage, de lui résister. Ceux qui restent ne peuvent qu'aider ceux qui le souhaitent à rejoindre Poudlard où Voldemort ne pourra rien faire.

Harry était livide de stupéfaction à l'annonce des faits du professeur dont les yeux semblaient éteints derrière les lunettes en demi-lune. Il devait être en train de rêver ! Oui, ça ne pouvait être que ça. Harry allait se réveiller en sueur, comme d'habitude, et il serait rassuré en entendant les ronflements de son cousin Dudley dans la pièce voisine.

Mais ça ne collait pas, songea-t-il. Maintenant qu'il avait les yeux bien ouverts, il ressentait peu à peu la douleur au front qui lui indiquait que Voldemort devait éprouver une haine profonde en cet instant, ou qu'il participait à la tuerie qui se déroulait, là, dehors, où tout semblait pourtant si calme.

- Mais…et les Aurors ? demanda enfin Harry d'une voix blanche. Les géants et…Hagrid ?

- Les Aurors ont pratiquement tous péris Harry, répondit Dumbledore. A ma connaissance, il n'en reste que trois qui font ce qu'ils peuvent en ce moment. Quant à Hagrid, je ne sais pas où il est. Et j'ai laissé le professeur McGonagall aux prises avec deux Mangemorts pour pouvoir te rejoindre, mais je ne me fais pas trop de souci pour elle…pour l'instant, ajouta-t-il, le regard perdu sur le bureau de Harry où étaient étalés ses livres scolaires. Les professeurs Vectra et Flitwick ont été chargés d'aller chercher le plus d'enfants possible pour les amener à Poudlard, et là encore, la tâche n'est pas facile car les Mangemorts ont reçu pour consigne de détruire toutes les familles de sorciers dont les ancêtres ne comptent pas de sang-pur depuis au moins trois générations.

- Hermione…, murmura Harry, abasourdi.

- La maison des Granger était déjà détruite à leur arrivée, murmura Dumbledore dans un souffle. Mais ils sont restés introuvables…

Harry plaqua ses mains sur son visage. Il les retira presque aussitôt et Dumbledore y découvrit un mélange de colère et de haine.

- Ron ? demanda Harry d'une voix dure.

- Les Weasley non plus n'ont pas été épargnés, avoua le professeur.

- Il doit bien y avoir quelque chose à faire ! s'emporta Harry avec rage. Ne me dites pas que vous n'avez rien prévu et que nous allons devoir subir la colère de Voldemort jusqu'à ce qu'il règne enfin sur le monde ! Je peux peut-être aller lui parler, il m'a promis que nous pourrions nous rencontrer quelles que soient les circonstances, l'année dernière ! Il est peut-être cruel et sans pitié, mais il est loyal…j'en suis sûr !

- Doucement mon garçon et écoute-moi, reprit Dumbledore en posant la main sur le bras de Harry. C'est vrai, mais je ne crois pas que ce soit une bonne idée, je pense qu'il est trop tard pour ça. Cela dit, il y a effectivement quelque chose que nous pouvons tenter, mais tu dois savoir que cette ultime solution peut avoir des effets aussi néfastes que ce qui est en train de se produire aujourd'hui. Cependant, c'est peut-être la seule chance que nous ayons…

- Qu'est-ce qui pourrait être pire selon vous ! l'interrompit Harry. Tous ces morts…et mes parents qui se sont…, mais Harry ne put continuer.

- Avec Sirius, poursuivit calmement Dumbledore. Nous avons réussi à mettre au point le moyen de changer le cours des choses. Mais cela pourrait se révéler dangereux et nous ne sommes assurés d'aucun résultat.

Il se pencha de côté et plongea la main dans une poche de sa robe de sorcier. Il en sortit un objet étrange que Harry n'avait jamais vu. Une petite sphère transparente, dans laquelle évoluait doucement une brume blanchâtre, semblait flotter à l'intérieur d'une grille de bronze entrelacée, de la forme d'un oeuf. Harry fonça les sourcils en découvrant l'objet que Dumbledore tenait du bout des doigts.

- Regarde bien Harry, lui dit le vieil homme en lui tendant l'objet.

Harry prit délicatement la petite cage de fer et, en l'observant attentivement, s'aperçut que des chiffres étaient gravés tout au long des segments que formait la grille. La sphère, quant à elle, ressemblait étrangement à un Rappeltout.

- C'est en quelque sorte un Retourneur de Temps amélioré, reprit Dumbledore en regardant Harry qui examinait consciencieusement les chiffres qu'il venait de découvrir. Un peu comme celui dont tu t'es servi lorsque tu étais en troisième année. A la différence que celui-ci permet de remonter les années et non les heures.

Harry, qui retournait l'objet dans tous les sens, arrêta son geste et fixa les yeux bienveillants du professeur. Il commençait à entrevoir les intentions de Dumbledore.

- Harry, je suis désolé d'avoir à t'infliger une telle épreuve mais c'est notre seule chance… Avec Sirius, nous avons pensé que tu pourrais retourner dans le passé, à l'époque où tes parents vivaient encore, pour essayer d'en changer certains faits. Mais nous ne pouvons pas t'aider, ni te conseiller car ce sont tes propres choix qui feront que tu pourras réussir ou échouer dans ta démarche. Tu ne dois subir aucune influence, c'est très important. Il serait un peu long de t'expliquer pourquoi maintenant, mais je te demande de me faire confiance. Bien sûr, tu peux y réfléchir et si tu ne veux pas…

- Nous n'avons pas le choix professeur, constata Harry. J'irai…s'il le faut, ajouta-t-il dans un souffle. Comment ça marche ?

- Eh bien, comme tu peux le voir, la grille est découpée en trois parties mobiles et lorsque tu formes une ligne complète avec un chiffre unique, il s'inscrit à l'intérieur de la sphère. Tu peux ainsi choisir le millième, le centième, le dixième et l'unité de l'année que tu auras choisie. Tu devras alors réciter l'incantation que j'ai pris soins d'inscrire sur ce parchemin, précisa-t-il en sortant un morceau de papier d'une autre poche. En te concentrant sur un être ou un lieu de ton choix, tu y seras transporté instantanément et tu pourras agir comme si tu avais toujours fait partie de cette époque. Tu resteras un adolescent de seize ans, mais tu dois savoir Harry, que c'est un aller sans retour. Ce type de Retourneur de Temps n'existait pas avant aujourd'hui et il devrait disparaître au moment même où tu apparaîtras à ton tour. Cela dit, si tu ne parviens pas à modifier les évènements, nous pensons, avec Sirius, qu'il te sera possible d'agir quand même puisque Voldemort n'a pas pu te tuer lorsque tu avais un an. Tant que le Harry du passé sera en vie, tu le resteras aussi. Et tu sais à présent que tu auras quatorze ans pour intervenir… Suis-je bien clair ?

Non. Tout se bousculait dans la tête de Harry, mais après tout il n'avait pas le choix, il verrait bien sur place.

- Je ne peux pas rester plus longtemps, indiqua Dumbledore en se levant. Réfléchis Harry, mais le temps presse, je pense que d'ici quelques jours nous ne serons plus très nombreux à résister. Je te conseille l'automne 1981, et n'oublie pas d'emporter ta baguette…

Le vieil homme se dirigea vers la porte et sortit sur le palier. Il se retourna et regarda un instant l'adolescent qui le regardait aussi.

- Bonne chance Harry, dit-il doucement avant de refermer la porte derrière lui.

Chapitre 2 - Godric's Hollow

Harry reporta son attention sur la petite sphère engrillagée. Il allait revoir ses parents... Mais que pourrait-il faire une fois là-bas ? Harry aurait bien voulu disposer de plus de temps pour y réfléchir, mais il lui sembla percevoir le bruit sourd d'une explosion lointaine. Etait-il possible que les Mangemorts soient déjà là ? Il sursauta et sans réfléchir, se rua hors de son lit, s'habilla rapidement et se dirigea vers son armoire dans laquelle il avait rangé sa valise.

Hedwige s'agitait dans sa cage, comprenant sans doute qu'il se passait quelque chose de grave. Harry regarda le rapace et se leva d'un bond. Il alla ouvrir la cage et prit sa chouette sur son bras avant d'aller la déposer sur le rebord de la fenêtre.

- Sauve-toi Hedwige ! dit-il précipitamment. Je ne peux pas t'emmener, va-t-en !

Mais la chouette refusait de s'envoler, et regardait son maître qui s'était à nouveau précipité sur sa valise d'où il sortit sa baguette magique qu'il rangea dans sa poche. Il attrapa également à la hâte son album photo et arracha celle de la première page, où il se trouvait dans les bras de ses parents, en pensant qu'elle pourrait peut-être lui être utile si les choses tournaient mal.

Puis Harry se jeta sur son lit et prit le Retourneur de Temps et le morceau de parchemin.

Soudain, il perçut le bruit d'une autre explosion, plus proche celle-ci. Cette fois, il n'y avait plus de doute possible : quelqu'un ou quelque chose s'approchait et détruisait tout ce qui était gênant sur son passage.

Debout au milieu de la pièce, il fit pivoter la petite cage de bronze jusqu'à former une ligne complète avec le chiffre un. Aussitôt, un chiffre vaporeux de couleur jaune, aux contours irréguliers, apparut à l'intérieur de la sphère et semblait danser au milieu de la brume blanchâtre. Puis il fit de même avec le chiffre neuf et ainsi de suite jusqu'à composer la date de 1981. La brume blanche et les chiffres se mirent à tourner à toute vitesse dans la sphère dans le sens contraire des aiguilles d'une montre. Ne sachant pas où se situait la maison de ses parents, dans laquelle il n'était jamais allé, il décida de se concentrer sur lui-même en repensant au bébé que sa mère tenait dans ses bras sur la photo de l'album que Hagrid lui avait offert.

- Tempus…retracto…incanto, murmura-t-il en tenant le parchemin d'une main tremblante.

L'effet fut immédiat, la pièce se mit à tourner tout autour de lui et il se sentit transporté au milieu d'un tourbillon de couleurs qui lui donnait presque l'impression qu'il allait s'évanouir.

Et puis soudain, il se rendit compte qu'il se tenait debout au milieu d'un vaste jardin. Effectivement, comme le lui avait dit Dumbledore, le Retourneur de Temps avait disparu. Il regarda les environs et aperçut, quelques mètres plus loin, un jeune couple avec un enfant dans les bras qui posait pour une photographie. Harry se glissa derrière l'arbre le plus proche pour ne pas être vu et observa la scène attentivement.

Sirius Black, tel que Harry ne l'avait jamais vu, tenait un petit appareil et plaisantait joyeusement avec le jeune couple qui adressait des gestes de la main en direction de l'objectif. Puis le petit groupe se dirigea lentement vers la maison et Harry les vit disparaître à l'intérieur.

Il examina les environs. Ce qu'il avait pris, au premier abord, pour un jardin était en réalité un parc aux couleurs chatoyantes. De nombreux massifs de fleurs, baignés de soleil, donnaient à l'immense maison, de style plutôt ancien, une allure gaie et accueillante. Plusieurs arbres, dont certains devaient être très vieux à en juger par leur taille, étaient répartis ça et là et offraient des coins d'ombre sous lesquels il devait être agréable de s'installer les longues journées d'été. Une allée soigneusement entretenue partait d'un large perron de marbre de blanc et rejoignait une grille en fer forgé joliment ouvragée où l'on pouvait lire les lettres J-L sur chacun des battants. Harry aperçut une énorme moto garée près de l'entrée qui lui rappelait vaguement un rêve qu'il avait fait un jour.

Il décida de s'approcher de la maison pour essayer de percevoir les bribes de la conversation qu'il entendait à peine depuis son arbre. Il avança précautionneusement sur le gazon épais et s'arrêta près d'une fenêtre entrouverte.

James Potter était assis sur un long canapé de cuir blanc qui formait un grand « L » au milieu d'un vaste salon meublé avec goût. Sa femme, Lily, était assise à ses côtés et jouait avec les mains de son fils installé sur ses genoux. Sirius Black, assis sur le retour du canapé, sirotait un grand verre de jus de citrouille, un large sourire aux lèvres.

- Tu aurais dû voir ça, James ! disait Sirius. Remus n'en revenait pas !

Les trois adultes éclatèrent d'un rire joyeux.

Harry ne pouvait en supporter davantage. Il se retourna et se laissa glisser le long du mur de la maison, le regard perdu sur le parc environnant. Assis là, part terre, il pensait à tout ce qu'il aurait pu vivre avec ses parents qui, de toute évidence, l'adorait. Il aurait tant aimé vivre dans cette maison, au milieu d'un parc luxuriant, au lieu d'avoir passé onze ans dans un placard à balais. Puis l'image de Voldemort l'envahit, il riait et riait encore, de plus en plus fort et Harry ferma les yeux pour chasser cette vision. Il avait oublié, l'espace d'un instant, la raison de sa présence et ce qu'il entendit le sortit de ses sombres pensées.

- C'est prévu pour quand ? demanda Sirius d'un ton grave.

- Peter doit venir la semaine prochaine, répondit Lily. Et personne n'est au courant…pas même Dumbledore. Il nous a juste dit comment pratiquer le sortilège.

- Très bien…, approuva Sirius. Peter est faible, James, tu le connais aussi bien que moi… Personne ne pourra croire que vous avez pu lui faire confiance.

- Je sais, concéda James. On en a déjà longuement parlé, et tu as raison, tout le monde s'attend à ce que ce soit toi qu'on choisisse et cela nous ferait courir un trop grand danger.

- Et si vous preniez Harry, suggéra Sirius pour détendre l'atmosphère. Personne ne le soupçonnerait !…et il n'est pas prêt de parler !

Harry entendit James et Lily étouffer un rire nerveux.

- Ça c'est sûr ! assura Lily. Mais personne ne sait si ce sortilège peut fonctionner sur un enfant aussi jeune et nous ne voulons pas prendre de risques.

Il y eut un long silence dans la pièce.

- Crois-moi mon vieux, dit alors James d'une voix dure. Si j'apprends un jour que Peter n'a, ne serait-ce qu'essayé de nous trahir, je te jure que je lui fais la peau moi-même.

- Si l'autre t'en laisse le temps ! fit remarquer Lily.

Un autre silence s'installa dans le salon. Quelque part dans la maison, une pendule sonna sept heures.

- Mon dieu ! Il est déjà sept heures, dit alors Sirius qui devait s'être levé précipitamment d'après les bruissements d'étoffe que Harry percevait depuis sa cachette.

Il se leva à son tour et risqua un coup d'oeil à l'intérieur de la maison. James essayait de rassurer Lily sur ce qui venait de se dire tandis qu'elle déposait son fils dans un petit parc avant de se diriger vers ce que Harry pensait être la cuisine. Elle proposa à Sirius de rester pour le dîner mais celui-ci refusa poliment et sortit de la maison suivi par James qui l'accompagna jusqu'à la moto garée dehors.

Harry s'écarta soudain de la fenêtre. Le visage grave, il réfléchissait à toute vitesse. C'est maintenant qu'il fallait agir. Il avait une idée, mais devant la détermination de ses parents, il fallait faire vite car il savait à présent qu'il n'aurait qu'une semaine pour les convaincre et Sirius, qu'ils connaissaient depuis longtemps et en qui ils avaient confiance, était déjà parvenu à leur faire choisir Peter.

Harry entendit la porte d'entrée se refermer et le grondement de la moto de son parrain qui s'éloignait dans l'allée.

Harry avait un plan. Il se souvenait des paroles de Dumbledore quelques années plus tôt, lorsqu'avec Hermione, ils avaient utilisé le Retourneur de Temps. Changer le cours des choses pouvait se révéler très dangereux et même peut-être faire commettre des actes irréparables à des personnes pourtant sensées. Aussi, il prit la décision de ne pas révéler son identité de peur que ses parents, le sachant bien en vie des années plus tard, décident de se sacrifier malgré tout plutôt que de se lancer dans l'inconnu.

Il contourna la maison et gravit les marches du perron. Il avança vers une immense porte blanche à doubles battants où il découvrit un magnifique heurtoir d'or représentant une tête de lion rugissante entourée d'un serpent d'argent. Il prit une profonde inspiration, replaça rapidement une mèche de cheveux sur son front pour cacher sa cicatrice et actionna le heurtoir d'un geste mal assuré.

La porte s'ouvrit presque aussitôt et, pour la première fois, Harry se trouva face à son père. Il ne put prononcer un mot.

- Oui ? dit celui-ci en fronçant les sourcils devant l'adolescent qui restait sans réaction devant lui.

- Mr Potter, dit Harry d'une voix qu'il maîtrisait à peine. Il faut que je vous parle à vous et à…votre femme.

- Qui êtes-vous ? demanda James qui paraissait méfiant à présent.

- James ! entendit Harry depuis la cuisine. Qui est-ce ?

Son père tourna machinalement la tête vers la cuisine et prononça quelques paroles pour rassurer sa femme. Harry en profita pour fermer les yeux et essayer de ne pas penser à la boule qui s'était formée dans sa gorge. James Potter reporta son attention sur Harry.

- Vous vous sentez bien ? demanda-t-il au garçon dont il ne connaissait toujours pas l'identité.

- Je…nous n'avons pas beaucoup de temps, Mr Potter, répondit Harry en retrouvant un peu d'assurance. Est-ce que je peux entrer ?

- Nous nous apprêtions à dîner, mais si vous n'en avez pas pour longtemps…

Harry trouvait cette remarque presque ironique. Comment résumer en quelques minutes que la prise d'une décision puisse avoir des conséquences dramatiques pour des milliers de personnes et ce, pendant des années !

James Potter s'écarta pour laisser entrer Harry qui avança jusqu'au centre de la pièce où les couleurs blanc et or dominaient. Il se trouva malgré lui à proximité du parc où le jeune Harry gazouillait joyeusement et dont il ne put détacher son regard.

- Je ne sais toujours pas qui vous êtes ? constata James qui regardait tour à tour son fils, dans son parc, et Harry d'un air soupçonneux. Venez vous asseoir, je vous en prie. Lily… ! appela-t-il soudain. Tu devrais peut-être monter Harry dans sa chambre, il n'a pas dormi beaucoup aujourd'hui.

L'excuse sonnait faux pensait Harry, mais la jeune femme ne tarda pas à sortir de la cuisine en s'essuyant les mains sur le tablier qu'elle portait. Elle s'arrêta soudain en apercevant l'adolescent toujours debout au milieu du salon, et échangea un regard rapide avec son mari. Harry crut qu'il allait fondre en larmes.

- Que…qui êtes-vous ? demanda la jeune femme avec stupeur, comme si elle avait devant elle quelqu'un qu'elle semblait reconnaître.

- John Figg, mentit Harry pour calmer la situation.

Lily Potter s'avança vers le parc et prit son fils dans ses bras avant de s'engager sur l'escalier qui menait à l'étage.

- Mr Figg…, dit alors James en désignant un des fauteuils qui faisait face au canapé.

Harry regarda à nouveau son père et consentit enfin à s'asseoir.

- Qu'avez-vous de si important à nous dire ? demanda James, curieux de connaître l'objet de la visite de cet adolescent qu'il trouvait plutôt bizarre.

- Je suis désolé Mr Potter, commença Harry. Je ne voulais pas vous mettre mal à l'aise…ou vous inquiéter. C'est plutôt étrange pour moi de me trouver ici en ce moment, mais se serait trop long à expliquer et un peu difficile à comprendre.

Lily redescendait l'escalier en enlevant son tablier de cuisine. Elle le posa sur un buffet au bas des marches et vint s'asseoir à côté de son mari, l'air intrigué.

- Nous vous écoutons, dit alors son père plus impatient que jamais.

Pour ne pas perdre de temps, Harry décida d'aller droit au but.

- Je sais que vous vous sentez menacés et que vous êtes sur le point de renforcer la protection qui vous entoure, commença-t-il.

Lily posa une main sur le bras de son mari qui se redressa légèrement, prêt à réagir à la moindre menace.

- Mais vous allez prendre une décision qui aura des conséquences que vous ne serez pas en mesure de maîtriser, indiqua Harry qui ne voulait pas dévoiler la mort prochaine de ses parents.

- Vous…vous êtes sorcier ? hésita son père presque surpris.

- Oui, répondit Harry. Mais je dois vous mettre en garde. Queudver…euh…je veux dire Peter Pettigrow…

Mais il n'eut pas le temps de terminer sa phrase. Lily étouffa un cri tandis que James s'était levé d'un bond et avait, avant même que Harry puisse s'en rendre compte, sorti sa baguette magique qu'il pointait sur lui d'un air menaçant.

- Qui êtes-vous ? s'emporta James. Et que voulez-vous ? Si vous êtes venu ici pour… , mais il s'interrompit en voyant le regard imperturbable que lui jetait l'adolescent dont il émanait une telle puissance en cet instant.

- Ces yeux…, murmura James dans un souffle en fronçant les sourcils.

- Calmez-vous Mr Potter, reprit Harry qui savait qu'il n'aurait jamais le temps de sortir sa baguette si son père décidait de se servir de la sienne contre lui. Je vous assure que je ne suis pas votre ennemi et je vous demanderai de bien vouloir m'écouter jusqu'au bout. J'ai aussi une baguette magique, Mr Potter, et si vous le souhaitez, je peux la poser sur la table pour vous prouver que je ne suis pas venu ici avec de mauvaises intentions. Ou même vous la donner…

Lily tendit la main vers son mari et l'attrapa par la manche pour l'inciter à s'asseoir. Ce qu'il fit à contrecoeur.

- Nous nous sommes déjà rencontrés ? demanda James qui ne pouvait détacher les yeux de ce visage.

- Non, répondit Harry d'un ton ferme. Je vous assure que c'est impossible. Bien, reprit-il au bout d'un moment en regardant son père qui semblait enfin résigné. Vous vous apprêtez à désigner votre ami, Peter Pettigrow, souligna Harry d'un air entendu. Comme Gardien de votre secret en utilisant un sortilège très ancien. Mais si vous le faîtes, Voldemort vous retrouvera beaucoup plus rapidement que vous ne pouvez l'imaginer.

- Volde…, comment osez-vous prononcer son nom ? demanda Lily dans un murmure.

Décidément, Harry se trouvait vraiment idiot. Maintenant qu'il avait surmonté l'émotion de sa première rencontre avec ses parents, il se sentait réellement maladroit dans ses propos. Cependant, il avait une idée pour rattraper la situation.

- Un vieil homme, d'une sagesse infinie, m'a dit un jour que la peur d'un nom ne fait qu'accroître la peur de la chose elle-même, dit Harry d'un ton calme. Albus Dumbledore est un homme plein de bon sens qui, s'il était au courant de vos intentions à l'heure qu'il est, vous conseillerait, tout comme je suis en train de le faire, de ne pas accorder votre confiance à Peter Pettigrow. Je ne peux malheureusement pas vous conseiller quelqu'un d'autre, précisa Harry. Car je ne me sens pas le droit d'influencer radicalement vos décisions. Mais je peux au moins essayer de vous convaincre de ne pas commettre cette erreur.

- Vous connaissez Dumbledore ? s'étonna son père. Quel âge avez-vous ? Etes-vous élèves à Poudlard ?

- Pas exactement, répondit Harry qui sentait qu'il ne pourrait pas maîtriser la situation très longtemps si ses parents le poussaient à leur parler de lui.

Il n'avait déjà pas eu beaucoup de temps pour se préparer à retourner dans le passé, il en avait encore moins pour s'inventer la vie d'un adolescent de seize ans en quelques minutes.

- Et pourquoi nous vous ferions confiance, Mr Figg ? demanda James, perplexe. Mr Figg ? s'étonna-t-il soudain. Auriez-vous de la famille du côté de Londres ?

- Non, mentit Harry. Je viens du Nord de l'Angleterre. Pour en revenir à votre question, je peux juste vous dire qu'il n'est pas donné à tout le monde d'être informé à l'avance des conséquences de ses actes…et vous devriez considérer cela comme une chance, Mr Potter.

- Que se passera-t-il si nous choisissons Peter ? demanda Lily.

- Je ne peux malheureusement pas vous répondre. Mais je vous en conjure, vous devez me promettre de ne pas le faire.

- C'est un peu trop facile, jeune homme ! s'énerva James à nouveau. Vous débarquez ici, avec tous vos mystères, et…

- Si vous ne le faites pas pour vous-même, l'interrompit Harry d'un ton ferme. Faîtes-le pour votre fils !

Lily et James étaient livides. Ils échangèrent un regard où se mêlaient la surprise et l'inquiétude.

- Seriez-vous en train de nous dire que la vie de notre fils est en danger si nous choisissons Peter ? demanda Lily avec angoisse.

Harry hésita. Il ne savait pas lui-même ce qu'il serait devenu si Dumbledore n'était pas venu l'avertir…

- Non, ce n'est pas ce que j'ai voulu dire, mais tout n'est qu'une question de temps…, répondit-il d'une voix à peine audible.

Harry ne savait plus où il en était. Il regrettait déjà la tournure que prenait la conversation et il se demandait s'il ne valait pas mieux sortir la photographie qu'il avait emportée et rassurer ses parents. Cependant, il parvint à se ressaisir et décida d'attendre un peu avant d'en arriver à cette extrémité.

- Donnez-moi votre parole, reprit-il d'un ton calme. De cette façon, je suis sûr que vous tiendrez votre promesse.

- Est-ce que nous pouvons au moins réfléchir ? demanda James qui semblait être un peu plus détendu.

- J'aimerais pouvoir vous dire que vous en avez le temps, répondit Harry. Mais ce n'est pas le cas.

- Accordez-nous au moins quelques minutes. Ma femme et moi allons nous rendre dans une pièce voisine. Il y a certains points dont nous devons discuter afin d'y voir plus clair.

Harry approuva d'un signe de tête et le jeune couple se leva et sortit du salon. Harry se pencha en avant et, les coudes sur les genoux, plaqua les mains sur son visage. C'était une telle épreuve pour lui de devoir persuader ces gens qu'il n'avait jamais vus et qui pourtant étaient si proches.

Il revoyait le visage de sa mère lorsqu'elle était sortie de la cuisine et avait ressenti, elle aussi, cette étrange sensation qui avait bouleversé Harry au point de lui nouer l'estomac. Il revoyait aussi le regard méfiant de son père quand Harry s'était attardé sur le petit garçon qu'il était à un an et qui jouait tranquillement dans son parc, sans comprendre toute l'importance de la situation. A cet instant, James Potter aurait pu tuer n'importe qui s'il avait cru son fils en danger. Harry en avait la certitude. C'était donc cela l'amour d'un père pour son enfant ?

Il se redressa en voyant ses parents qui revenaient dans le salon et retournèrent s'asseoir aux places qu'ils occupaient quelques minutes plus tôt. Tous les deux regardaient Harry d'un air grave.

- Nous savons que vous nous cachez beaucoup de choses, commença son père en fixant Harry d'un regard perçant. Mais il faut croire que vous avez vos raisons... Par contre, vous nous avez menti sur plusieurs points. Il se trouve que, dans la famille, nous avons en quelque sorte un don pour déceler le mensonge sous quelque forme qu'il soit.

- J'avais oublié ce détail, j'aurais dû y penser plus tôt, avoua Harry qui se souvenait de la conversation qu'il avait eue avec Dumbledore l'année dernière.

Le vieil homme lui avait alors longuement parlé de ses ancêtres, ce qui lui avait permis d'établir certaines relations entre les pouvoirs de Voldemort et les siens, et donc, ceux de ses parents.

- Vous semblez bien nous connaître, fit remarquer Lily d'un ton presque soupçonneux. Et pourtant vous affirmez que nous n'avons jamais eu l'occasion de nous rencontrer auparavant.

Harry ne répondit pas. Il n'avait pas menti sur ce point… Quelque chose lui échappait. Il baissa les yeux sur la table de salon et regarda, d'un air absent, les objets qui s'y trouvaient. Et soudain, il comprit. La dernière fois qu'il les avait vus, Lily et James Potter étaient sortis de la baguette magique de Voldemort et l'avaient aidé à s'enfuir. S'il avait pu s'attendre à ce que ce soit ses propres parents qui lui remémorent ce souvenir douloureux… !

Harry se sentit pâlir tout à coup et regarda à nouveau le jeune couple qui semblait gêné à présent. Il était en proie à une lutte intérieure épouvantable pour refouler les images qui se dessinaient peu à peu dans sa tête, ce n'était pas le moment de revivre ce qu'il avait subi un an plus tôt !

- Tout ce que je peux vous dire, murmura Harry qui fut lui-même surpris de pouvoir prononcer un mot. C'est que vous pouvez me faire confiance.

- C'est vrai, admit son père. Et vous semblez bien connaître Albus Dumbledore qui nous a effectivement proposé d'être le Gardien de notre secret parce qu'il pense que nous devons nous méfier de l'un de nos proches. Seulement il n'a pas été en mesure de nous donner le nom de celui que nous devons redouter, apparemment vous semblez en savoir plus que lui... Malheureusement, nous manquons de temps pour lui demander ce qu'il pense de vous.

- Il ne servirait à rien de le faire aujourd'hui, Mr Potter, indiqua Harry. Si vous souhaitez vraiment lui parler de moi, dîtes-lui simplement que…qu'il n'aime pas les dragées surprises de Bertie Crochue parce qu'il en a mangé une, un jour, au goût de poubelle. Ce n'est pas le genre d'anecdote que l'on raconte à un ennemi…

Son père, quelque peu intrigué, jeta un bref coup d'oeil à sa femme.

- Quoi qu'il en soit, reprit James en regardant Harry à nouveau. Nous avons décidé de suivre votre conseil et d'accepter vos recommandations. Mais vous comprendrez que nous ne pouvons pas vous dévoiler l'identité de la personne que nous avons choisie.

- Bien sûr, Mr Potter, assura Harry qui n'en revenait pas. Je ne vous demande rien.

A l'étage, le jeune Harry commençait à pleurer. Lily se leva et indiqua à son mari qu'il avait faim.

- Je vais vous laisser, dit alors poliment Harry en se levant à son tour.

James, un peu gêné, se leva lui aussi. Visiblement, il aurait bien voulu en savoir plus sur ce jeune garçon mais la méfiance qu'il avait éprouvée tout au long de l'entretien prit le dessus et il raccompagna Harry jusqu'à la porte d'entrée.

- Je ne sais pas ce que l'avenir nous réserve Mr Figg, dit-il le regard pénétrant en tendant une main à Harry. Mais quelque chose me dit que je peux quand même vous remercier.

Harry regarda la main de son père un long moment. Il aurait tant voulu que James Potter le prenne dans ses bras en cet instant. Mais Harry se résigna et lui serra la main avant de s'engager sur le perron. Il ne put contenir ses larmes plus longtemps et James, qui n'avait rien vu, referma la porte derrière lui. Harry avait du mal à croire ce qu'il venait d'entendre…il avait réussi…

Il n'eut pas l'occasion de s'attarder d'avantage sur les dernières paroles de son père. Ne sachant où aller, Harry s'arrêta un instant avant de descendre les marches et aussitôt, l'image du parc qui l'entourait se mit à tournoyer sur elle-même, dans le sens des aiguilles d'une montre, tout comme l'avait fait sa chambre à Privet Drive. Harry fut à nouveau entraîné dans un tourbillon de couleurs.

Chapitre 3 - A bord du Poudlard Express

La course folle de Harry, au milieu du tourbillon, s'arrêta enfin. Toujours submergé par ce qu'il venait de vivre, il n'essaya pas de retenir ses larmes.

Il se trouvait à présent dans une chambre qu'il ne connaissait pas. La vaste pièce était baignée de soleil et la fenêtre grande ouverte laissait entrer la chaleur voluptueuse de ce 1er septembre.

Soudain, Harry entendit un hululement derrière lui. Il se retourna et vit une chouette, au plumage blanc comme neige, posée sur un perchoir d'or, qui l'observait de ses yeux couleur ambre.

- Hedwige ? s'étonna-t-il en s'avançant vers la chouette.

Le rapace émit un autre hululement. Harry caressa l'animal avant de s'intéresser à nouveau à ce qui l'entourait.

Là encore, les meubles blancs dominaient, tout comme le salon qu'il venait de quitter. Seuls les nombreux accessoires d'or contrastaient avec l'intense clarté que dégageait la pièce. Harry aperçut, sur l'un des murs, un miroir ovale cerné d'un entrelacement de rotin blanc vers lequel il avança lentement. Il découvrit alors le visage, aux yeux rougis par les larmes, d'un adolescent brun, les cheveux en bataille, qui le regardait d'un air ébahi. Un détail cependant ne lui avait pas échappé : le reflet du miroir ne portait pas de cicatrice au front. Harry ne sut s'il devait se réjouir de cette vision. Cette cicatrice avait toujours fait partie de sa vie, mais elle était aussi si lourde de conséquences… Pourtant, Harry avait l'impression d'avoir perdu un peu de lui-même en découvrant ce nouveau visage.

- Dépêche-toi Harry, dit alors le miroir. Tu es encore en retard !

Harry, qui avait sursauté, recula lentement en fronçant les sourcils sans accorder plus d'attention au miroir car une foule de questions se bousculait déjà dans sa tête. Etait-ce parce qu'il avait réussi à modifier le passé qu'il se trouvait dans cette autre réalité ?

Soudain, il sursauta à nouveau. Des images surgirent comme un flash dans son esprit. James Potter et son fils, qui semblait âgé de 8 ou 9 ans, riaient aux éclats en jouant au base-ball, sous un soleil radieux, dans le parc qui entourait la maison de ses parents.

Les images disparurent aussi vite qu'elles étaient apparues et Harry commençait à comprendre. En suivant son conseil, ses parents avaient pu rester en vie. Voldemort ne s'était jamais introduit dans cette maison pour lui arracher sa famille et perdre ses pouvoirs. Harry n'avait jamais vécu à Privet Drive chez son oncle et sa tante. Il n'avait pas non plus affronté le Seigneur des Ténèbres au milieu d'un cimetière… Mais où était Voldemort à présent ? Il fut interrompu dans ses pensées par la voix de sa mère qui raisonnait au bas de l'escalier.

- Harry mon chéri, tu es prêt ? Le train va bientôt partir !

- Je te l'avais bien dit, dit alors le miroir sur un air de reproche.

Le train ! Quel train ? pensait Harry en jetant des regards affolés autour de lui. Il regarda sa montre. Elle indiquait 10 h 00. Harry n'avait pris qu'un seul train dans sa vie : le Poudlard Express qui partait de la gare de King's Cross à Londres, à 11 h 00.

Lily Potter ouvrit la porte de la chambre et entra dans la pièce.

- Harry, il faut partir mon chéri, s'impatienta sa mère.

Il se dirigea machinalement vers l'une des armoires qui occupait tout un pan du mur et ouvrit une des portes au hasard, comme s'il cherchait quelque chose.

- Ton père a déjà descendu ta valise, précisa Lily d'un air surpris. Par contre, n'oublie pas Hedwige, tu sais qu'elle a horreur de ça !

La chouette, qui semblait avoir compris, s'envola et entra dans une cage posée sur une étagère que Harry n'avait même pas remarquée. Il avança vers la cage, la prit, et suivit sa mère qui s'engageait dans l'escalier. Harry se trouva à nouveau dans le salon blanc et or qu'il connaissait déjà. Il suivit sa mère sur le perron et la porte de referma derrière eux.

Son père les attendait au volant d'une immense voiture blanche et Harry s'engouffra à l'intérieur sans se poser de questions. Après avoir roulé un bon moment en pleine campagne, ils arrivèrent enfin à Londres. Tout comme les voitures du ministère de la Magie, que Harry avait eu l'occasion d'utiliser un jour, celle-ci se faufilait partout avec une aisance surprenante. Harry aurait même juré avoir vu ce feu tricolore, qui venait de passer au rouge, changer de couleur instantanément pour revenir au vert. Un peu plus loin, alors qu'ils arrivaient derrière une file de voitures bloquées par le camion d'un livreur, Harry fut stupéfait en constatant que son père n'avait même pas ralenti, et en regardant plus attentivement autour de lui pour voir où était passé l'embouteillage, s'aperçut qu'ils avaient carrément changé de rue. Dans celle-ci, les boutiques et les passants étaient plus rares et ils purent continuer leur chemin sans rencontrer d'embûches.

Ils furent rapidement arrivés à la gare de King's Cross et James arrêta la voiture sur le parking.

- Tu es bien silencieux mon garçon, fit-il remarquer tandis qu'il sortait la valise de Harry du coffre de la voiture.

- Oh…je ne suis pas très réveillé, papa ! répondit Harry d'un ton qu'il voulait dégagé.

Ils ne tardèrent pas à arriver dans le hall de la gare et, après avoir déposé la valise de Harry et la cage d'Hedwige sur un chariot, franchirent la barrière qui menait à la voie 9 3/4 où les attendait le Poudlard Express.

Harry reconnut plusieurs de ses camarades parmi la foule des élèves qui se hâtaient de monter dans les wagons. Ses parents l'accompagnèrent jusqu'au milieu du train où son père l'aida à monter sa valise. Lily prit Harry dans ses bras et l'embrassa tendrement avant de lui donner la cage d'Hedwige.

James lui ébouriffa les cheveux d'un geste de la main en précisant qu'il allait leur manquer jusqu'au prochaines vacances. Harry, qui avait fait de son mieux pour paraître naturel aux yeux de ses parents, alla s'asseoir dans un compartiment vide pour essayer d'éclaircir ce qu'il venait de vivre.

Le Poudlard Express émit un sifflement sonore et s'ébranla dans un panache de vapeur tandis que les parents de Harry, toujours sur le quai, lui adressaient des gestes d'adieu auxquels il répondit à son tour, un large sourire aux lèvres. Il les vit cependant échanger des regards inquiets en s'éloignant sur le quai.

Il n'eut pas l'occasion de profiter longtemps de ces quelques instants de solitude. La porte du compartiment s'ouvrit et un adolescent aux cheveux roux et à la mine enjouée, fit son apparition.

- Harry, tu es là ! constata le garçon en refermant la porte derrière lui.

- Ron ! s'exclama Harry avant de réaliser qu'il ne s'agissait peut-être pas du Ron Weasley qu'il avait l'habitude de fréquenter.

Le garçon s'installa en face de lui et, après quelques minutes de conversation, Harry se rendit compte que le Ron qu'il avait devant lui ne différait en rien de celui qu'il avait connu auparavant.

La porte du compartiment s'ouvrit à nouveau et Harry aperçut alors une jeune fille dont la présence suffit, à elle seule, à le rassurer un peu. Hermione Granger et Ginny, la sœur de Ron, vinrent s'asseoir elles aussi à côté des deux garçons.

Harry commençait à se sentir un peu mieux. Pourquoi n'avait-il pas pensé à Hermione plut tôt ! Il savait à présent qu'il pourrait parler à quelqu'un si les dernières heures, et celles à venir, venaient à le submerger.

Tout comme pour Ron, Hermione était égale à elle-même, si ce n'est qu'elle semblait un peu moins proche des deux garçons. Harry en comprit la raison lorsque celle-ci annonça qu'elle devait s'absenter pour aller saluer d'autres élèves dans d'autres compartiments. Ron lui indiqua alors qu'il aimait bien cette fille mais qu'elle était un peu barbante avec tous ses bouquins. Harry avait eu un sourire amusé à cette remarque.

Puis, Ron lui avait conseillé de se changer en voyant, d'un regard par la fenêtre, qu'ils étaient sur le point d'arriver. Harry ouvrit sa valise avec inquiétude, ne sachant pas ce qu'il allait découvrir à l'intérieur. Il fut soulagé en apercevant une robe de sorcier, brodée de l'écusson de Gryffondor, soigneusement pliée sur une pile de vêtements qu'il n'avait jamais vus. Il sortit la robe et fouilla discrètement le contenu de sa valise dans laquelle il trouva sa baguette magique. Il constata avec soulagement que c'était bien la même que celle qu'il utilisait d'habitude. Par contre, il eut beau chercher, il ne vit pas la Carte du Maraudeur, et encore moins la cape d'invisibilité de son père, ni le Scrutoscope que Ron lui avait offert. En revanche, il s'attarda sur une petite pierre d'un marron plutôt clair, aux reflets gris, suspendue à une chaînette d'or, dont il ne connaissait pas l'utilité. Après avoir remis en place les quelques livres scolaires qu'il avait sortis, il referma rapidement sa valise et enfila sa robe.

Le train s'arrêta enfin, et les élèves descendirent des wagons en traînant leurs bagages derrière eux. Ils se mirent en rang et avancèrent en silence sur le quai humide de la pluie qui s'était abattue sur la région tout au long de la journée.

Harry fut submergé d'une vague de bonheur en apercevant Hagrid qui intimait aux élèves de première année de le suivre.

- Bonjour Hagrid ! lança Harry lorsque le géant passa à sa hauteur.

- Hein… ? Ah oui, bonjour, répondit-il d'un air distrait en le regardant à peine.

Harry était abasourdi, mais Ron qui l'attrapait par la manche, le tira de son étonnement et les élèves rejoignirent les diligences sans chevaux qui les attendaient au bout du quai.

Les contours de Poudlard se dessinaient au loin et Harry fut surpris de voir deux silhouettes encapuchonnées de chaque côté du portail en fer forgé qui donnait accès au parc de l'école. Il pencha la tête au dehors et vit les deux silhouettes refermer les grilles sur les dernières diligences qui pénétraient dans le parc.


Chapitre 4 - Un bien curieux banquet

Les diligences déposèrent les élèves devant le château qui s'empressèrent de prendre place, dans un silence inhabituel, de chaque côté des longues tables de la Grande Salle qui avait conservé l'apparence que Harry lui connaissait. Les professeurs, assis à la table du fond, et les élèves, semblaient attendre quelque chose.

- Le directeur est en retard, fit remarquer Ron, assis à côté de Harry. Déjà qu'on ne le voit pas souvent…

Les conversations s'installèrent peu à peu et Harry profita de cette attente pour jeter un coup d'oeil autour de lui. Effectivement, la chaise centrale était vide mais de chaque côté, il reconnut, au premier abord, la plupart des professeurs qui dispensaient habituellement leurs cours au château. Puis, Harry fut surpris d'apercevoir un homme grand et mince, presque maigre même, avec un teint si pâle qu'il semblait être malade. Ses cheveux gris et clairsemés, qui descendaient jusqu'après ses épaules, accentuaient le creux de son visage à tel point qu'on aurait dit un mort vivant. Un peu plus loin, une vieille sorcière aux longs cheveux blancs et épais, discutait avec le professeur Flitwick. La vieille femme, entièrement vêtue de gris, avait un visage dur et parcheminé de rides au milieu duquel trônait un nez crochu. Ses ongles, longs et courbés, semblaient acérés comme des lames de couteau. Harry vit qu'il lui manquait plusieurs dents et son œil gauche avait l'air immobile en permanence dans son orbite. Cette femme était tout simplement effrayante et lui rappelait une vieille harpie qu'il avait vue un jour à Pré-au-lard.

Harry continua son tour de table pour essayer de savoir quel cours pouvait bien enseigner la vieille femme. Il dut alors se retenir de pousser un cri en reconnaissant le sorcier assis à la droite du professeur Bibine. L'homme au teint pâle, le visage parsemé de tâches de rousseurs, avait une houppe de cheveux blonds qui descendait sur son front. Barty Croupton discutait, en cet instant, avec le professeur McGonagall qui ne semblait pas surprise de la présence de cet homme assis à ses côtés. Mais bientôt, un autre détail attira son attention : Severus Rogue n'était pas dans la salle. Harry ne voyait pourtant aucune autre chaise inoccupée.

Soudain, les élèves sursautèrent et les conversations cessèrent immédiatement. Les portes de la Grande Salle venaient de s'ouvrir à la volée et un homme grand et mince, vêtu d'une longue robe noire, avançait d'un pas vif vers la table des professeurs. Harry n'eut pas le temps d'apercevoir son visage car tous les élèves s'étaient levés d'un bond, excepté lui qui ne comprenait rien à la réaction de ses camarades.

- Lève-toi ! lui murmura Ron entre ses dents. Tu veux passer ta première semaine aux cachots ou quoi !

Harry, qui ne voyait pas de quoi Ron pouvait bien lui parler, obéit et ce qu'il vit lui coupa le souffle. Le sorcier qui venait d'arriver à leur hauteur avait un visage blanc et froid. Ses yeux rouges, au regard glacé, toisaient les élèves d'un air méprisant. Harry dut poser les mains sur la table pour ne pas retomber sur sa chaise. Lord Voldemort alla s'asseoir à la place centrale de la table des professeurs. Un long serpent, qui ondulait sur le sol, suivit son maître et se lova à ses pieds.

- Qu'on n'en finisse ! lança-t-il de sa voix aiguë en agitant la main devant lui en signe d'exaspération.

Ce n'est qu'à cet instant que Harry découvrit un petit tabouret sur lequel avait été déposé le Choixpeau Magique.

Le professeur McGonagall se leva et rejoignit les élèves de première année qui étaient restés debout en attendant la cérémonie de la Répartition. Elle leur expliqua la marche à suivre et, un à un, les nouveaux prirent place aux différentes tables que le Choixpeau leur avait indiquées.

Il n'y eut pas de discours et Voldemort se contenta de frapper dans ses mains pour faire apparaître les assiettes d'or, les carafes et les plats qui composeraient le repas de ce soir. Leur contenu n'avait rien à voir avec ce que l'on servait d'ordinaire à Poudlard, mais les ragoûts, les rôtis, les gratins et les desserts étaient suffisamment copieux pour satisfaire l'appétit des élèves.

Les conversations reprirent peu à peu et Harry remarqua que les élèves, qui discutaient entre eux, n'accordaient aucune attention à la table des professeurs, comme si tout leur paraissait normal.

Il jeta un coup d'oeil aux autres tables. Tous les élèves qu'il connaissait étaient présents mais il y en avait d'autres aussi, qu'il n'avait jamais vus.

Malefoy était assis entre Crabbe et Goyle et n'eut aucune réaction particulière lorsque son regard croisa celui de Harry. Il en fut de même pour Hagrid et Harry fut profondément choqué en comprenant que le géant ne lui accordait pas plus d'attention qu'à n'importe lequel de ses camarades. Cho Chang lui adressa un sourire quand Harry s'intéressa à la table des Serdaigle. Colin Crivey, quant à lui, chuchotait avec son frère en regardant Malefoy d'un air épaté.

Harry essayait, sans éveiller les soupçons, de se mêler aux conversations qui l'entouraient et il comprit rapidement que ses camarades étaient les mêmes que ceux qu'il avait connus dans son autre réalité.

Quelques élèves commençaient à s'agiter et Harry remarqua que la plupart des assiettes étaient vides.

- Comment vont-ils nous faire sortir d'ici, se demanda-t-il en appréhendant déjà la discipline qui devait être de rigueur avec Voldemort comme directeur. En rang et deux par deux ?

A chacune des quatre tables, il vit alors plusieurs adolescents se lever, dont Hermione chez les Gryffondor, et indiquer à leurs condisciples qu'ils pouvaient rejoindre leurs dortoirs.

- Les préfets ont parlé ! constata Ron, ce qui répondit à la question que Harry venait de se poser.

A sa grande surprise, les élèves sortirent en désordre et le bruit de leurs conversations raisonnait sur les murs du château.

Les premiers Gryffondor arrivés devant le portrait de la grosse dame attendaient patiemment l'arrivée d'un préfet pour connaître le mot de passe. Harry vit Hermione se frayer un chemin parmi la foule et l'entendit prononcer sang-de…crapaud. On l'a échappée belle songea-t-il en réalisant au même instant qu'Hermione, de toute évidence, suivait ses cours à Poudlard. Avec Voldemort comme directeur, comment cela pouvait-il être possible ? Il ne réfléchit pas plus longtemps à la question et s'engouffra, avec les autres, dans la salle commune où brûlait un feu accueillant. Les élèves montèrent directement dans leurs dortoirs où Harry, là aussi, partageait la même chambre que Ron, Dean, Seamus et Neville.

Harry était allongé dans son lit, les yeux grands ouverts. Les ronflements de Neville et le silence qui régnait dans la pièce lui indiquaient que ses camarades s'étaient tous endormis. Mais lui repensait à tout ce qu'il venait de vivre et commençait à se demander si, avec Dumbledore, ils avaient fait le bon choix. Peut-être aurait-il mieux valu qu'il parle à Voldemort ? Ou peut-être même aurait-il dû l'affronter encore une fois ? Non, Harry savait au fond de lui-même que Dumbledore avait raison, ça aurait été une folie. En parlant de Dumbledore, Harry se demanda soudain où pouvait bien être le vieil homme. Pas à Poudlard, c'était évident !

Il eut une idée tout à coup. Il n'y avait aucune raison pour que son voyage dans le temps ait modifié, en quoi que ce soit, ses pouvoirs. Il décida donc d'essayer de se servir de son don d'ubiquité et se concentra sur le vieux sorcier jusqu'à en visualiser son visage.

Harry se retrouva instantanément dans un vaste bureau qu'il examina attentivement. Des meubles d'un autre âge encombraient la pièce et des étagères, déformées par le poids des livres, occupaient presque la totalité des murs. Un feu vif crépitait dans une cheminée ancienne près de l'unique fenêtre, fermée par un rideau, à travers laquelle on devinait l'heure avancée de la nuit.

Harry entendit une douce plainte et se retourna vivement. Il aperçut Fumseck, le phénix, sur son perchoir mais il savait que l'oiseau ne pouvait pas le voir. Il vit alors, au fond de la pièce, un vaste bureau recouvert de piles de livres et d'objets bizarres. Albus Dumbledore était assis là, et rédigeait un long texte qui représentait déjà plusieurs rouleaux de parchemins dispersés ça et là.

Le vieil homme s'arrêta d'écrire et releva la tête un instant, comme s'il avait pu percevoir une présence à ses côtés. Il jeta un regard vide autour de lui, puis reporta son attention sur son travail.

Harry s'avança lentement vers le bureau et écarquilla les yeux en lisant l'inscription qui figurait, en lettres d'or, sur une petite plaque disposée sur le bord du bureau à l'attention des visiteurs.

Albus Dumbledore

Ministre de la Magie

Harry n'en croyait pas ses yeux. Il eut un mouvement de recule et, par peur de perdre sa concentration, préféra retourner à Poudlard. Il se releva d'un bond dans son lit et passa les mains sur son visage pour s'assurer qu'il ne rêvait pas. Albus Dumbledore, ministre de… Au moins, Harry était soulagé de savoir le vieil homme bien en vie, mais constata, une fois de plus, qu'il n'était pas au bout de ses surprises. Il ne dormit pratiquement pas cette nuit-là.

Chapitre 5 - Nouvelle vie à Poudlard

Le lendemain, les élèves descendirent dans la Grande Salle pour le petit déjeuner et Harry vit avec soulagement que le directeur était déjà installé à la table des professeurs. Au moins il n'aurait pas à se lever cette fois…

Les élèves allèrent s'asseoir aux tables de leurs maisons où les préfets distribuaient déjà les emplois du temps. Ron attrapa les deux feuilles que lui tendait Hermione et en donna une à Harry. Comme d'habitude, il commenta les différentes matières qui s'étalaient sous ses yeux et Harry, qui avait posé son parchemin à côté de son assiette, commença à manger.

- Bon ben, c'est comme d'habitude, dit Ron un peu déçu. Ah tiens ! ajouta-t-il après un instant. Le professeur de Soins aux créatures Magiques s'appelle Adémar Prooffield. C'est vrai que Brûlopot avait dit qu'il partirait à la retraite l'année dernière… Adémar, tu parles d'un nom ! Adémar au quart de tour ! lança-t-il en posant sa feuille sur la table.

Tous les Gryffondor à proximité éclatèrent de rire, même Harry, qui ne put s'empêcher toutefois de jeter un regard inquiet vers la table des professeurs pour voir leur réaction à cette explosion de joie. Personne ne s'intéressait à eux.

- Il n'y a pas que ça qui change, fit remarquer Parvati. Maintenant qu'on est en sixième année, on a un peu plus d'initiation à la Magie noire.

Harry en avala de travers. Toussant tout ce qu'il savait pour essayer de retrouver son souffle, il attrapa sa feuille et en commença la lecture. Parmi les cours habituels, Harry lut que trois heures par semaine étaient consacrées à cette matière.

- Bien sûr ! murmura-t-il. J'aurais dû m'en douter.

- Quoi ? demanda Ron, la bouche pleine.

- Rien, rien, répondit Harry d'un air distrait.

Il s'aperçut que le premier cours de Magie noire n'avait lieu que le lendemain, ce qui lui laisserait le temps de jeter un coup d'oeil à son livre pour ne pas éveiller les soupçons.

Il en profita pour lire le nom de chaque professeur qui figurait en face de la discipline qu'ils enseignaient. Cela lui éviterait d'avoir à poser des questions que ses camarades trouveraient immanquablement idiotes et pourraient même lui causer de nombreux ennuis.

En lisant les noms, il vit celui de Bartemius Croupton en face des cours de Défense contre les forces du Mal et celui de Devana Harper en face de ceux de Potion, ce devait être la vieille sorcière que Harry avait vue pour la première fois au banquet de la veille.

A cet instant, Lavande Brown étouffa un cri et se mit à pâlir tout à coup en regardant la table des professeurs avec appréhension.

- Oh, non, gémit-elle dans un souffle. Cette sale bête ne va pas commencer… Je déteste le voir se balader partout !

Tous les élèves de sixième année tournèrent la tête vers le fond de la salle et Harry vit le serpent de Voldemort se tortiller sous la table.

- Ne t'en fais pas, Lavande, la rassura Hermione. Nagini va passer la plus grande partie de l'année dans le bureau de son maître. Ne fait pas attention à lui et…

Elle se tut en apercevant Dean et Seamus qui agitaient les mains devant le visage de Lavande en émettant des sifflements menaçants.

- Oh, c'est vraiment malin ça, les gars ! se moqua Hermione avec une grimace agacée.

Harry se garda bien d'intervenir et regarda le serpent se diriger vers les Poufsouffle.

Puis, une multitude de hiboux et de chouettes s'engouffrèrent dans la Grande Salle dans des bruissements d'ailes. Un grand duc déposa devant Malefoy l'habituel colis de friandises qu'il s'empressa d'ouvrir sous les regards envieux de ses camarades. Une chouette hulotte apporta à Hermione un exemplaire de La Gazette du sorcier, tandis qu'un autre lâcha un paquet devant Neville et Hedwige tendit fièrement la patte à Harry où était attachée une lettre. Il détacha le parchemin et donna quelques morceaux de gâteau à la chouette qui s'envola pour rejoindre la volière.

C'était un mot de ses parents qui lui rappelaient leur amour pour lui et lui donnaient des nouvelles de gens qu'il ne connaissait pas. A la fin de la lettre cependant, un paragraphe retint toute son attention. Son père lui indiquait qu'ils avaient remarqué son changement de comportement et qu'ils devraient lui parler, lorsque Harry irait pour les vacances de Noël, d'un certain jeune homme qui était venu leur rendre visite lorsqu'il avait un an. Mais il recommandait prudemment à Harry de n'en parler à personne, pas même par hibou. Ils avaient donc compris ! Harry rangea discrètement le parchemin dans sa poche.

Neville sortit un Rappeltout de son paquet et fixait l'objet d'un air anxieux.

- Tiens ! Neville a encore oublié quelque chose ! fit remarquer Seamus.

- Oui, mais ce truc ne m'aide pas beaucoup, dit Neville en tournant la petite boule dans tous les sens. Et la fumée ne change même pas de couleur !

- C'est sans doute que, pour une fois, tu as juste oublié ton Rappeltout, suggéra Parvati d'un air amusé.

- Heureusement que ta mère est là pour réfléchir à ta place ! lança Dean, ironique.

Harry sursauta. Sa mère… ? Bien sûr, pensa-t-il. Les parents de Neville n'avaient aucune raison de ne pas être là eux aussi. Harry regarda son ami avec compassion. Enfin une bonne nouvelle (en dehors du fait que Dumbledore faisait aussi partie de ce monde bien sûr).

Le petit déjeuner se termina dans la joie et la bonne humeur. Les Gryffondor de sixième année se dirigèrent vers la salle de classe du professeur Croupton pour un cours de Défense contre les forces du Mal que Harry appréhendait déjà.

- Je me demande ce qu'on va bien pouvoir étudier cette année ? demanda-t-il à Ron.

- Qu'est-ce que ça peut faire, répondit celui-ci alors qu'ils arrivaient devant la salle. Le prof t'adore de toute façon, alors je ne vois pas pourquoi tu t'inquiètes !

Ron avait raison. Pendant tout le cours, Barty Croupton, qui avait choisi Harry pour mettre son cours en pratique, n'avait cessé de lui adresser des compliments. Soulagé, il était sorti de la salle le cœur un peu plus léger et se dirigeait, avec ses camarades, vers la tour Nord du professeur Trelawney. Hermione partit de son côté pour un cours d'études des Runes.

Ils arrivèrent sous la trappe que le professeur ouvrit pour les accueillir et s'installèrent sur les poufs moelleux disposés autour de tables basses.

- Bonjour mes chéris ! lança Sibylle Trelawney lorsque tous les élèves se furent installés.

Harry fut surpris de ne pas entendre Ron lancer ses habituelles remarques ironiques.

- Cette année, continua le professeur. Nous explorerons les mystères de la divination en commençant par l'Aéromancie à laquelle cette tour se prête tout particulièrement. Je précise, pour ceux d'entre vous qui ne le sauraient pas, que l'Aéromancie est l'art de prédire l'avenir au moyen des conditions atmosphériques telles que le tonnerre, la foudre, le sens et la force des vents mais aussi du soleil et de la lune. Nous étudierons donc la théorie de cette méthode pendant le premier trimestre puis, tout au long de l'année en fonction du temps qu'il fera, de façon à pouvoir rencontrer tous les cas de figure possibles.

Lavande et Parvati jetèrent un coup d'oeil par la fenêtre et chuchotaient des paroles que Harry ne put percevoir distinctement.

- Puis, nous nous pencherons sur l'art délicat de l'interprétation des viscères de crapaud, de chauves-souris et de rat.

Quoi ! Harry avait dû mal entendre ! Il regarda les autres élèves et, à sa grande surprise, personne ne paraissait troublé par ce que venait de dire le professeur.

- Nous terminerons enfin par la ciromancie. Etude de la cire chaude immédiatement refroidie dans l'eau froide, mon garçon ! indiqua-t-elle à Neville qui la regardait avec des yeux ronds.

Mais après tout, songea Harry, c'était peut-être le seul à être préoccupé par le fait qu'ils devraient disséquer des animaux cette année pour percer les mystères de l'avenir…

Le cours se termina enfin et les élèves se rendirent dans la Grande Salle pour le déjeuner. Harry s'aperçut que le directeur était absent cette fois.

Les deux premières semaines s'écoulèrent rapidement et Harry n'avait pas tardé à se rendre compte qu'il avait de sérieuses lacunes en Magie noire et qu'il devait absolument rattraper son retard sur ses camarades sous peine de s'attirer des ennuis. Il décida de se servir de son don d'ubiquité pour se rendre tous les soirs dans la réserve de la bibliothèque et y étudier les livres scolaires des cinq premières années qu'il n'avait pas faites.

La fin de la troisième semaine avait mis tout le château en effervescence car tous attendaient avec impatience le premier match de Quidditch de la saison, qui ici commençait le 1er octobre, et qui verrait s'opposer les équipes de Poufsouffle et de Serpentard.

Harry, dont le Quidditch était complètement sorti de la tête, songea soudain qu'il n'avait participé à aucun entraînement depuis la rentrée. Avec un match tous les quinze jours, il devra peut-être s'y mettre pendant la prochaine quinzaine, pensa-t-il.

La veille du match, Harry se rendit à la bibliothèque pour son habituel rattrapage des cours de Magie noire. Il cherchait dans les rayonnages un livre dont il était fait mention à la fin du manuel scolaire des première année et qui lui permettrait de mieux comprendre ce qu'il venait de lire, quand son attention fut soudain attirée par un énorme livre noir au titre évocateur, Talismans et amulettes : ceux dont vous ne devez pas vous passer.

Il repensa alors à la pierre marron, aux reflets gris, qu'il avait laissée dans sa valise. Il attrapa l'épais volume dont les reliefs de la couverture représentaient toutes sortes d'amulettes et de gris-gris que Harry ne connaissait pas. Lorsqu'il feuilleta les pages du gros livre, il comprit pourquoi le titre indiquait que les talismans étaient indispensables, car en voyant de quoi certains d'entre eux protégeaient, Harry en eut la chair de poule. Puis il arriva à la partie centrale où les objets magiques étaient de formes et de vertus un peu plus conventionnelles. Il trouva enfin ce qu'il cherchait.

Une pierre marron et l'autre grise, étaient représentées sur une photographie. Chacune des deux pierres semblait beaucoup plus grosse que celle que Harry possédait, mais étaient bien semblables, cela ne faisait aucun doute. Harry entreprit de lire le texte qui accompagnait la photographie.

La Pierre du Crapaud

Excellent choix si vous souhaitez faire l'acquisition d'un tel joyaux.

La Pierre du Crapaud, de couleur grise ou marron, et parfois même les deux

lorsqu'elles sont très puissantes, a la particularité de ne pas scintiller aux rayons du soleil.

Mais ces objets magiques changent de couleur en présence d'un poison.

Elle protégera également très efficacement votre maison

et procurera courage et force à ceux qui devront livrer bataille.

Ses pouvoirs curatifs sauront vous étonner en cas de morsure ou de piqûre,

mais si vous n'avez que faire de ces quelques vertus,

 portez-la sur vous et elle vous portera bonheur, tout simplement.

Harry referma le livre et le remit à sa place. Pour l'instant, il n'était menacé d'aucun danger et il décida donc de laisser sa pierre dans sa valise.

Il était déjà tard et Harry décida d'en rester là et de rejoindre son dortoir où il pourrait dormir enfin. Il rangea les livres qu'il avait utilisés et attrapa ses affaires. Il se concentra sur son lit et, après avoir regagné son corps, posa ses affaires sur le sol et s'endormit profondément.

Le lendemain matin, Harry s'éveilla un peu désorienté. Il avait encore eu un de ces flashs qui lui faisait revivre ce nouveau passé dont il ne savait rien.

Il était âgé de 2 ou 3 ans à peine et était assis sur les genoux de sa mère sur le canapé du salon. Plusieurs personnes étaient réunies ce jour-là et discutaient joyeusement autour d'une petite table basse où une assiette de gâteaux trônait au milieu de verres remplis de boissons aux couleurs variées.

Le jeune Harry tendait vainement la main vers un de ces délicieux gâteaux qu'il convoitait depuis plusieurs minutes et, solidement maintenu par les mains de sa mère, qui lui caressait les cheveux de temps en temps, il se contorsionnait dans tous les sens pour parvenir à ses fins. Soudain, tous les adultes présents dans le salon se turent et observaient le phénomène étrange qui se déroulait sous leurs yeux. Un gâteau s'élevait dans les airs et se dirigeait vers le petit garçon qui savourait sa victoire. Lily et James, voyant que personne ne les écoutait plus, portèrent leur attention sur la table où le gâteau succulent continuait sa lente progression vers le petit garçon qui triomphait déjà.

- Ah non ! Petit coquin, s'amusa Lily en voyant le visage rayonnant de son fils. Tu en as déjà eu deux et pas plus tard qu'il y a cinq minutes. Ça suffit !

Tout le monde éclata d'un grand rire, ce qui fit perdre sa concentration au jeune Harry qui regarda, d'un air déçu, le gâteau tomber sur le sol.

- Eh bien, ça promet pour la suite ! fit remarquer Remus en ramassant le gâteau. Qu'est-ce que ça va être quand Monsieur aura sa propre baguette !

- Oh, oh ! on n'en est pas encore là ! intervint James en reculant son verre que Harry regardait avec envie.

L'adolescent s'assit sur son lit et passa ses mains dans ses cheveux avant de se rendre compte du silence qui régnait dans la pièce. Il aperçut les rayons du soleil à travers les rideaux de son baldaquin et les écarta vivement avant de bondir hors de son lit. Il regarda son réveil et marmonna contre lui-même en constatant qu'il était déjà tard.

Il dévala l'escalier qui menait à la salle commune et vit les derniers élèves qui s'apprêtaient à sortir. Ron et Hermione se retournèrent et aperçurent Harry encore en pyjama.

- Ben alors ! Qu'est-ce que tu attends ? s'étonna Ron en écarquillant les yeux. Le match Serpendard/Gryffondor va bientôt commercer. On croyait que tu étais déjà descendu !

- Ser…Serpentard/Gryffondor ? balbutia Harry sans comprendre. Je croyais qu'ils devaient jouer contre les Poufsouffle !

- Il y a eu un petit changement, expliqua Ron. Le capitaine de l'équipe s'est fait mordre à la jambe hier en cours de Soins aux créatures Magiques. Donc c'est Gryffondor qui a été désigné pour jouer le match d'aujourd'hui. Il paraît que Prooffield était dans tous ses états !

- Tu nous rejoins dans les tribunes comme d'habitude ? demanda Hermione qui maintenait le tableau de la grosse dame ouvert.

- Dans les quoi…Où ça ? s'étrangla Harry.

- Dans les tribunes ! Tu sais, les fosses qui délimitent les contours du terrain et où on a le nez en l'air pour pouvoir suivre les matchs ! précisa Hermione d'un air amusé en voyant la tête de Harry.

- Aller viens, dit Ron en attrapant Hermione par la manche, un sourire moqueur sur le visage. Tu vois bien qu'il n'est pas réveillé ! Habille-toi mon vieux et rejoins-nous là-bas !

Harry était figé sur la dernière marche de l'escalier et regardait sortir ses amis d'un air absent. Il ne faisait pas partie de l'équipe, ça ne faisait aucun doute. Mais alors qui était l'attrapeur de Gryffondor ? L'espace d'un instant il songea à Neville. Et comment n'avait-il pas pu s'apercevoir avant qu'il n'avait pas de balai ? Ça ne veut rien dire, pensa-t-il pour se rassurer. Peut-être que tous les élèves jouaient avec ceux de l'école après tout…

Il remonta rapidement dans son dortoir et s'habilla en vitesse. Il rejoignit Ron et Hermione dans les tribunes et constata avec bonheur que Neville ne faisait pas partie de l'équipe. Par contre, comme venait de l'indiquer Mandy Brocklehurst au micro, Drago Malefoy était l'attrapeur de Serpentard et Harry ne put s'empêcher de ressentir une pointe de jalousie.

Le match était passionnant. Les buts se succédaient dans les camps des deux équipes et tous les joueurs évoluaient avec grâce sur des Nimbus 2000. Au grand étonnement de Harry, les Serpentard jouaient correctement et aucun Gryffondor ne dû subir les représailles de leurs adversaires tel que Harry en avait l'habitude dans l'autre Poudlard.

Ce fut l'attrapeur de Gryffondor qui se saisit du Vif d'or le premier, faisant ainsi gagner son équipe par 190 à 80. Les joueurs redescendirent sur le terrain et tous les élèves de l'école vinrent féliciter chaleureusement les vainqueurs. Harry suivit Ron et Hermione sur le stade et, à sa grande stupeur, vit Voldemort s'avancer lui aussi vers les Gryffondor et les féliciter. Puis il adressa des paroles d'encouragement aux Serpentard pour leur prochain match. Pour Harry, c'était un véritable cauchemar et il se dirigea vers le château, sans un mot, en compagnie des autres élèves.

Le jour suivant, les élèves profitèrent de leur dimanche pour se délecter des derniers rayons du soleil de ce mois d'octobre, et passèrent la plus grande partie de la journée à se promener dans le parc.

Certains, réunis en groupes, étaient assis dans l'herbe et se racontaient des légendes sur la Forêt Interdite. D'autres s'étaient tout simplement endormis et d'autres encore jouaient aux cartes ou lisaient dans leur coin. Harry, Ron et Hermione discutaient de choses et d'autres en laissant s'écouler les heures.

Dean, qui descendait les marches du perron, vint les rejoindre vers la fin de l'après-midi.

- Salut ! lança-t-il aux trois adolescents. Ron, ça te dis de me laisser prendre ma revanche aux échecs ?

- Pourquoi pas, répondit-il en regardant sa montre. Il nous reste une bonne heure avant le dîner. Juste le temps qu'il me faudra pour te battre une fois de plus !

- C'est ce qu'on va voir ! affirma Dean en lançant un regard complice à Harry et Hermione.

Tous les deux se dirigèrent vers le château en plaisantant joyeusement.

Harry regarda Hermione un instant, réfléchissant à la meilleure façon de formuler la question qu'il brûlait d'envie de lui poser depuis plusieurs semaines.

- Hermione, commença-t-il au bout d'un moment. Je me demandais…enfin, je crois que tes parents sont dentistes, non ?

Elle le regarda d'un air surpris en jetant des coups d'oeil affolés aux alentours.

- Harry, murmura-t-elle, livide. Comment tu as su… ? Personne ne doit savoir… Tu te rends compte, je pourrais me faire renvoyer !

- Rassure-toi, s'empressa d'intervenir Harry. Je n'ai pas l'intention de dire quoi que ce soit. Je me demandais simplement comment une sorcière issue de parents Moldus pouvait suivre des études à Poudlard…

- Eh bien justement, répondit-elle à voix basse. J'ai dû raconter des histoires pour pouvoir venir ici. Le ministère de la Magie a réussi à faire accepter les élèves dont au moins un parent est sorcier et les miens pourraient avoir de graves ennuis si quelqu'un venait à découvrir que ce n'est pas le cas pour eux. Harry, garde ça pour toi, et ne me reparle plus jamais de mes parents, ajouta-t-elle en se levant et en s'éloignant vers le château d'un pas vif.

Harry resta bouche bée devant la réaction de son amie. Après tout, il n'avait pas besoin de savoir et il s'en voulait déjà, pensant qu'il avait peut-être mis Hermione en colère. Il décida d'en rester là et de ne plus jamais revenir sur cet incident.

Il s'allongea sur le sol en attendant l'heure du dîner. Les bras repliés sous la tête, il mâchonnait un brin d'herbe en regardant le ciel, et resta ainsi à repenser à tout ce qu'il avait vécu jusqu'alors.

Chapitre 6 - La surprise d'Halloween

Le lendemain, les cours avaient repris et les élèves attendaient l'arrivée du professeur Harper dans le couloir des cachots. Harry, Ron et Hermione (qui ne semblait pas en vouloir à Harry pour la conversation qu'ils avaient eue la veille), étaient adossés au mur et écoutaient Malefoy, entouré d'un groupe de Serpentard et de Gryffondor, reparler du match de Quidditch qui avait eu lieu le samedi précédent.

- J'aimerais bien faire partie de l'équipe de Gryffondor, dit Harry d'un air envieux en regardant Malefoy.

- Mouais, approuva Ron d'un air rêveur. Peut-être qu'un jour ils auront besoin de nouveaux remplaçants, on pourra tenter notre chance…

- Qu'est-ce que j'entends Potter ? intervint Drago en s'avançant vers eux avec un sourire narquois. Toi, sur un balai ? Il aurait fallu, pour ça, que tu sortes un peu du lot quand on a eu nos premiers cours de Vol. Tu te débrouilles bien c'est vrai, mais de là à faire partie d'une équipe… ! Remarque, ça nous arrangerait si c'était le cas, on aurait sûrement la victoire assurée à chacune de nos rencontres avec Gryffondor !

Plusieurs élèves eurent des rires moqueurs à cette remarque et Harry dut lutter de toutes ses forces pour ne pas se jeter sur Malefoy.

Ils furent interrompus par l'arrivée du professeur qui ouvrit la porte du cachot et leur indiqua d'entrer. Pendant tout le cours, Harry ne put s'empêcher de lancer des regards haineux vers Malefoy, assis quelques tables plus loin, devant lui.

La cloche sonna enfin et les élèves rangèrent, dans leurs sacs, les ingrédients dont ils s'étaient servis.

- Messieurs et Mesdemoiselles ! interpella Madame Harper en tapotant son bureau avec un os, qui ressemblait à un tibia de bœuf, pour attirer l'attention des élèves. A partir de maintenant, n'oubliez pas d'apprendre la liste des ingrédients supplémentaires indiqués au bas de chaque page de votre livre. Ils vous seront utiles pour préparer vos cours de Magie noire…

Harry releva la tête et regarda le professeur avec des yeux ronds. Les ingrédients qui… Il reprit son livre, qu'il avait déjà rangé dans son sac, et l'ouvrit à une page choisie au hasard. Un petit encart figurait au bas de la page et il découvrit une liste accompagnée d'un texte court qui indiquait les effets produits en ajoutant les ingrédients mentionnés à côté. Il eut un frisson en lisant les effets secondaires que la potion provoquerait en suivant ces instructions. Il referma son livre d'un coup sec et le rangea à nouveau dans son sac. Personne n'avait remarqué sa surprise.

Plusieurs jours s'étaient écoulés et Harry repensait au flash qu'il avait eu dans la nuit. Ces souvenirs revenaient de plus en plus souvent à présent et il commençait à entrevoir, avec plus de précisions, la vie qu'il avait menée depuis toutes ces années.

Cette fois, il se trouvait dans le parc qui entourait la maison de ses parents où des tables avaient été placées, bout à bout, de façon à n'en former qu'une seule. Le soleil brillait haut dans le ciel et les convives, installés de chaque côté de la longue table, recouverte de nappes blanches, riaient joyeusement en partageant un festin. Harry devait être âgé de 12 ou 13 ans et plaisantait avec les personnes assises à ses côtés.

Il n'avait pas eu l'occasion de s'attarder sur ce rêve de toute la journée tant les cours avaient occupé son esprit. C'est pourquoi, le soir même, Harry qui sortait d'un cours de Sortilèges à la fin duquel le professeur l'avait retenu pour le féliciter sur son dernier devoir, s'accorda quelques minutes pour y repenser en se dirigeant vers la Grande Salle pour rejoindre les autres.

Il ne vit pas Drago Malefoy, qui remontait des cachots, encadré de Crabbe et de Goyle, et qui s'arrêta à sa hauteur en le regardant d'un air hautin.

- Alors quoi, Potter ! lança Malefoy, visiblement vexé. Tu ne peux pas répondre quand on te parle !

- Quoi…je…Qu'est-ce que tu veux Malefoy ? balbutia Harry, décontenancé.

Drago s'avança lentement vers lui d'un air suspicieux.

- Tu es vraiment bizarre ces derniers temps, Potter, fit-il remarquer en plissant les yeux. Peut-être que je devrais en parler au directeur ? Excuse-toi pour m'avoir ignoré, ajouta-t-il sur un air de défi.

Crabbe et Goyle commençaient à rouler des épaules en sentant arriver l'affrontement, et Harry réfléchit à toute vitesse pour essayer de sauver la situation. Il n'était pas question qu'il s'excuse.

- Tu ne crois pas que le directeur n'a rien de mieux à faire, Malefoy ? se risqua Harry en observant la réaction de Drago.

- Tu sembles oublier à qui tu parles, Potter ! siffla Drago entre ses dents. Tu n'es pas sans savoir que mon père est un grand ami du directeur…

Ah tiens, je l'avais oublié celui-la, pensa Harry qui ne voyait pas comment s'en sortir. Par chance, Argus Rusard déboucha au bout du couloir, Miss Teigne sur les talons, et vint se placer au milieu du petit groupe.

- Qu'est-ce qui se passe ici ? demanda-t-il en passant de l'un à l'autre d'un air interrogateur. Vous devriez rejoindre vos camarades pour le dîner. Qu'est-ce vous croyez…qu'on va faire plusieurs services pour les retardataires !

Harry et Malefoy se dévisagèrent un instant et Harry décida de partir le premier. Il ne devait pas rater l'occasion de profiter de la présence de Rusard pour en rester là et la menace du directeur était un trop gros risque à courir pour lui. Il partit d'un pas vif vers la Grande Salle du château.

Pendant plusieurs jours, Harry avait soigneusement évité de croiser Malefoy et avait parlé de l'altercation qu'il avait eue avec lui à Ron et à Hermione. Ron lui avait dit qu'il avait vraiment été idiot d'agir ainsi contre Malefoy qui avait toujours bénéficié d'une certaine popularité, tant parmi les élèves que parmi les professeurs, et qu'à l'avenir, il devrait se montrer plus discret s'il ne voulait pas avoir d'ennuis. Hermione, quant à elle, l'avait rassuré en faisant remarquer que Malefoy était trop bête pour se souvenir très longtemps de cet incident et qu'il ne devait pas y prêter attention. Mais Harry n'était pas convaincu, cela faisait déjà deux fois qu'il attirait l'attention sur lui et il savait que Malefoy était capable de mettre sa menace à exécution.

Le 31 octobre arriva enfin et Harry ne remarqua pas l'agitation particulière qui caractérisait l'approche d'Halloween. Il doit bien y avoir au moins un banquet ? pensa-t-il. La journée lui avait parue étrangement normale et même Ron et Hermione n'avaient fait aucune allusion à ce sujet.

Finalement, ce ne fut qu'en fin d'après-midi que les élèves étaient devenus un peu plus enthousiastes et Harry attendait avec impatience de voir ce qu'allait lui réserver la soirée.

Ils venaient d'assister aux derniers cours de la journée et tous retournèrent bruyamment dans leurs salles communes où ils firent tout de même leurs devoirs avec le plus grand sérieux. Puis, deux heures plus tard, les Gryffondor descendirent enfin pour le dîner.

Harry eut un choc en entrant dans la Grande Salle mais il n'eut pas le temps de rester figé sur place. Il fut entraîné malgré lui à l'intérieur par le flot d'élèves qui s'engouffraient derrière lui.

De hautes tentures noires, maintenues par des cordons d'un vert intense, s'ouvraient sur les douze cheminées où crépitaient doucement des feux. Les tables des quatre Maisons, recouvertes de nappes noires et de chandeliers répartis ça et là, offraient déjà des plats aux mets variés que tous les élèves détaillaient avec envie en allant s'asseoir à leurs places. Une unique citrouille, de la taille d'une voiture, flottait dans les airs en tournant lentement sur elle-même au milieu de la Grande Salle. La lueur des chandelles dissimulées à l'intérieur projetait sur les murs des ombres aux volutes inquiétantes. Le plafond était entièrement recouvert d'un épais amas de toiles d'araignées blanchâtres, comme un ciel nuageux, dont certains filaments descendaient presque jusqu'au sol en plusieurs endroits. Les élèves, qui paraissaient méfiants, furent obligés d'en écarter quelques-uns pour rejoindre leurs tables.

Ron, le nez en l'air, scrutait le plafond avec une expression de terreur incontrôlable sur le visage.

- Ne me dis pas qu'il y a des araignées là-dedans ? s'inquiéta Harry en voyant quelque chose onduler à l'intérieur, juste au-dessus de leurs têtes.

- Sais pas ! souffla Ron d'une voix étranglée. D'après Charlie, c'est pas la première fois qu'ils font ce coup-là, mais d'habitude, elles ne sortent pas…

Harry émit un son indescriptible en avalant sa salive et s'installa avec les autres Gryffondor de sixième année qui plaisantaient joyeusement en se lançant à la figure des lambeaux de toile qu'ils avaient déchirés.

Harry jeta un coup d'oeil à la table des professeurs où, exceptionnellement, Argus Rusard et Sibylle Trelawney avaient pris place. Voldemort, encadré de quatre Gobelins, discutait avec Barty Croupton, assis un peu plus loin. Devana Harper et le professeur Flitwick riaient bruyamment à une remarque d'Adémar Prooffield et Hagrid s'entretenait avec sérieux avec le professeur Sinistra. Le professeur McGonagall se leva et, après avoir demandé le silence, indiqua aux élèves qu'ils pouvaient se servir.

- Bon, on a le temps de manger tranquillement avant qu'ils n'arrivent pour le dessert, annonça Seamus en se servant une bonne part de ragoût, imité par ses camarades.

Harry, incrédule, n'essaya pas d'en savoir plus et se jeta sur le premier plat qu'il avait devant les yeux.

Tout au long du repas, dont les mets étaient des plus savoureux, les élèves avaient plaisanté bruyamment sous les regards indifférents des professeurs qui discutaient dans leur coin. Harry avait même passé un moment agréable à rire avec ses camarades. Seul Ron était toujours un peu tendu et jetait de temps en temps des regards inquiets en direction du plafond.

Les plats, pratiquement vides, disparurent enfin pour laisser place à une montagne de desserts plus appétissants les uns que les autres. Les élèves s'agitèrent alors en regardant tout autour d'eux, comme s'ils attendaient quelque chose. Puis, soudain, une dizaine de fantômes firent leur apparition en traversant les murs et même le plancher.

Harry reconnut parmi eux le Moine Gras qui appartenait à la Maison Poufsouffle dans son autre réalité. Un chevalier tout en armure, dont le front était transpercé d'une flèche, que Harry avait eu l'occasion de voir à l'anniversaire de mort auquel il avait assisté lors de sa deuxième année d'études. Le chevalier poursuivait la Veuve pleureuse du Kent qu'il essayait de convaincre de s'amuser un peu pour une fois. Il vit aussi la Dame Grise de Serdaigle. Le Baron Sanglant de Serpentard. Peeves, qui survolait les tables à vive allure et essayait d'attraper les élèves par les cheveux. Nick-Quasi-Sans-Tête, qui vint saluer les Gryffondor en offrant une reconstitution de sa décapitation bâclée qui fit son petit effet.

Les élèves dégustèrent leurs desserts en discutant allègrement avec les fantômes qui se présentaient à leurs tables. Jusqu'au moment où Peeves décida de s'approcher du plafond, en observant les élèves d'un air sournois, et donna des coups de pieds et de poings dans l'épais matelas de toiles d'araignées où l'on voyait déjà s'accélérer les ondulations des créatures qui avaient l'air de ne pas apprécier du tout toute cette agitation.

Tous les élèves regardaient le petit fantôme avec des visages affolés et quelques filles lancèrent des petits cris de panique en plaquant les mains sur leurs bouches.

Ron attrapa quelques friandises à la hâte et indiqua à Harry qu'il valait mieux ne pas traîner dans les parages. Plusieurs élèves sortaient déjà et les professeurs les regardaient s'enfuir avec des visages amusés.

Harry, qui savait à quel point Ron détestait les araignées, le suivit sans un mot et la plupart des Gryffondor continuèrent à faire la fête dans leur salle commune jusqu'à une heure avancée de la nuit.

Chapitre 7 - Les cachots

Pendant une bonne partie du mois de novembre, les élèves n'avaient fait qu'évoquer la soirée d'Halloween qui avait été largement appréciée par la plupart d'entre eux. Harry n'avait aucune idée d'où étaient passés les fantômes, qui n'avaient l'autorisation de venir au château qu'à cette occasion, et se garda bien d'essayer d'en savoir davantage. Depuis ce jour, l'ambiance à Poudlard s'en était trouvée améliorée et les élèves avaient conservé une certaine joie de vivre que Harry n'avait pas ressentie chez eux depuis la rentrée.

Harry se sentait un peu plus à l'aise dans ce nouvel environnement et, depuis quelques temps lorsqu'il rencontrait un problème, il avait l'impression d'entendre une petite voix dans sa tête qui lui indiquait ce qu'il devait faire. Harry avait fini par comprendre à qui appartenait cette voix qui lui avait si souvent été d'un grand secours.

Vers la fin du mois de novembre, le professeur McGonagall, qui devait se rendre à Londres, avait annulé le cours de Métamorphose et Harry avait décidé d'aller étudier dans le calme qu'offrait la bibliothèque à cette heure, alors que les autres Gryffondor étaient retournés dans la salle commune en attendant l'heure du déjeuner.

L'esprit contrarié par les horreurs qu'il venait de lire, Harry arpentait les couloirs sombres du château, pour rejoindre la Grande Salle, et il fut rapidement replongé dans ce drôle de Poudlard qui allait lui réserver beaucoup d'autres surprises.

Au détour d'un couloir, il heurta soudain une masse noire qu'il ne tarda pas à identifier comme étant un des Mangemorts de Voldemort. L'homme, qui s'était retrouvé assis par terre sous la violence du choc, se releva rapidement en grognant des jurons et épousseta sa longue robe noire avec des gestes agacés. Harry aperçut, sur le sol, un minuscule flacon qui ne contenait sans doute pas plus d'une cuillère à soupe d'un liquide transparent, et qui s'était brisé dans la chute du Mangemort. L'homme rejeta son capuchon en arrière et fixait Harry d'un regard assassin.

Harry fut glacé d'effroi. Il reconnut sans peine le visage de Severus Rogue dont les yeux projetaient, à cet instant, toute la haine dont il était capable à son encontre.

- Qu'avez-vous fait petit idiot ! tonna Rogue en regardant le verre brisé en mille morceaux à ses pieds.

- Euh…dé…désolé Monsieur, s'excusa Harry. Je…, il s'interrompit devant l'expression étrange de Rogue.

- Vous m'adressez vos excuses jeune homme, dit-il lentement en sondant Harry. Mais vos yeux…expriment une telle froideur ! ajouta-t-il dans un souffle en fronçant les sourcils. Aurions-nous déjà eu l'occasion de nous rencontrer quelque part ?

Harry ne sut quoi répondre. Apparemment les hostilités étaient ouvertes aussi dans cette réalité, et Harry décida de ne pas cacher l'aversion qu'il avait pour cet homme.

- Je ne pense pas Monsieur, répondit-il enfin d'une voix ferme.

Rogue, à l'évidence, n'en semblait pas si sûr, mais il reporta son attention sur le flacon.

- Savez-vous ce que représente ceci ? demanda-t-il avec colère.

Etait-ce le cumul de tout ce qu'il avait vécu jusqu'alors qui poussa Harry à se venger de Rogue ? Il n'en savait rien, mais il regarda le Mangemort dans les yeux et s'entendit lui répondre.

- Serait-ce le peu de grandeur que vous soyez parvenu à distiller, Monsieur ?

- Quoi… ? répondit Rogue qui ne comprenait pas.

- Rien…enfin, je veux dire…, non Monsieur, répliqua Harry pour sauver la situation.

Par chance le Mangemort n'essaya pas d'en comprendre davantage et fit disparaître les restes du flacon d'un geste de la main.

- Vous me paierez votre insolence jeune homme, faites-moi confiance ! lança-t-il en repartant à grands pas d'où il était venu.

Harry regrettait déjà ses paroles et son attitude. Si ce Rogue était aussi terrible que celui auquel il était habitué, il n'osait pas imaginer ce qu'il ne manquerait pas de se produire à cause de son comportement. Il repartit inquiet vers la Grande Salle où il se força à manger quelque chose.

Les cours de l'après-midi avaient repris et Harry n'avait toujours pas reçu de punition. Que se passerait-il s'il était convoqué chez le directeur ?

- Pourquoi je n'ai pas pensé à ça plus tôt ! songea-t-il. Quel idiot !

A présent, il arrivait à peine à se concentrer sur son devoir d'Histoire de la Magie tant il était préoccupé. Il sursauta en entendant les coups frappés à la porte de la salle de classe.

Argus Rusard entra dans la pièce et s'avança vers le bureau du professeur à qui il murmura quelque chose. Mr Binns approuva d'un signe de tête et regarda Harry qui était livide de peur.

- Mr Potter, appela Binns d'un ton indifférent. Vous recevez la sanction d'une semaine de cachot pour avoir manqué de respect à l'un des Mangemorts du Seigneur des Ténèbres. Voulez-vous suivre Mr Rusard, je vous prie ?

- Qu'est-ce que t'as fait ? murmura Ron interloqué. En plus c'est pas de chance ! Il n'y a personne là-bas en ce moment, tu ne pourras même pas discuter avec tes voisins de cellule par le soupirail.

Harry ne répondit rien. Il se leva, en laissant ses affaires sur la table, et sortit comme le lui avait demandé le professeur. Il suivit le concierge de l'école qui apparemment ne prenait pas le chemin du bureau de Voldemort.

- Le directeur veut me voir ? demanda-t-il inquiet.

- Vous voir ? s'étonna Rusard. Vous croyez que le directeur n'a que ça à faire ! Je vous conduis immédiatement dans le cachot n° 5, Mr Potter. Et que cela vous serve de leçon ! Au fait, ajouta-t-il, donnez-moi votre baguette, elle vous sera rendue lorsque vous sortirez.

Harry fut soulagé et il donna sa baguette magique à Rusard sans broncher. Il préférait passer un mois dans ses fichus cachots plutôt que d'avoir à rencontrer Voldemort en personne (sauf s'il avait fallu le combattre bien sûr).

Rusard referma la porte du cachot sur Harry sans rien ajouter. Harry alla s'asseoir au fond de la pièce et prit sa tête entre ses mains.

- Il faut que tu te calmes mon vieux ! se dit-il à lui-même.

Il n'avait jamais eu l'occasion d'être enfermé dans un cachot depuis son arrivée, mais d'après ce que lui avaient dit ses camarades, ce n'était pas si terrible. La nourriture était à peu près la même que celle qui était servie dans la Grande Salle, à la différence qu'il n'y avait que deux repas par jour, et il suffisait de rester là, et d'attendre.

Harry jeta un coup d'oeil autour de lui. Il n'y avait pas grand chose à voir. Comme pour les cachots qui servaient de salles de classe, les murs et le sol étaient en pierre. La seule source de lumière provenait d'une longue fenêtre située si haut qu'elle ne permettait pas de voir dehors. Un lit, recouvert d'une simple couverture, était placé le long d'un mur et constituait l'unique pièce ajoutée à cet endroit lugubre. Une vieille cheminée, qui ne semblait pas avoir servi depuis des années, renvoyait un léger courant d'air dans la pièce.

- Incendio, se risqua Harry à voix haute.

Mais rien ne se produisit. Il se leva et alla s'envelopper dans la couverture, puis s'installa sur le lit, le dos appuyé au mur, et resta ainsi à réfléchir pendant des heures.

Rusard vint ouvrir la partie basse de la porte par laquelle il glissa un plateau pour le repas du soir. Harry le mangea rapidement et retourna s'allonger sur le lit où il s'endormit presque aussitôt.

Harry avait dormi tard et le soleil semblait déjà haut dans le ciel d'après l'inclinaison des rayons qui filtraient par la longue fenêtre. Il aperçut le plateau du petit déjeuner que Rusard lui avait apporté. Il s'empressa d'en avaler le contenu, sachant qu'il n'y en aurait pas d'autre avant le soir, et retourna s'asseoir sur le lit, emmitouflé dans sa couverture.

Soudain, il entendit des petits claquements secs portés sur la vitre de la fenêtre. Il se mit sur la pointe des pieds sur son lit et aperçut Hedwige sur le rebord. Apparemment elle ne portait pas de lettre et était simplement venue voir son maître, comme pour lui tenir compagnie. Harry la rassura en lui disant que tout allait bien et lui parla un moment avant de s'asseoir à nouveau sur le lit. La chouette resta ainsi plusieurs heures avant de retourner à la volière.

Harry, roulé en boule, somnolait quand il lui sembla percevoir des éclats de voix provenant de la cellule d'à côté. Comment était-ce possible ? Ron ne lui avait-il pas dit qu'il n'y avait personne en ce moment dans les cachots ?

Il se leva et étudia consciencieusement le mur de pierre. Il découvrit, au ras du sol, une plaque de fer trouée de petits motifs qui séparait les deux salles. Il se mit à plat ventre et observa l'intérieur de la cellule voisine. Il ne distingua rien de particulier quand soudain, il entendit la voix d'un homme murmurer des mots sans suite. La voix marmonnait au-dessus de sa tête et Harry comprit que le soupirail, par lequel il regardait, devait se trouver sous le lit de son voisin de cachot. Hormis les chuchotements, tout était calme aux alentours.

- Il y a quelqu'un ? se risqua Harry en regardant en l'air.

L'homme se tut et ne répondit pas.

- Monsieur, vous allez bien ? demanda-t-il au bout d'un moment.

L'homme recommença à marmonner des incohérences et Harry parvint à percevoir les mots : arrêter…, trop tard…, agir…, ministère.

- Qui me parle ? demanda soudain l'homme d'une voix faible.

- Vous m'entendez ? demanda Harry, reprenant espoir.

- Oui, répondit l'homme avec difficulté. Mais laissez-moi tranquille, j'en ai déjà trop dit.

- De quoi parlez-vous ? s'étonna Harry. Je voulais juste savoir si vous alliez bien, vous avez l'air…

Harry s'interrompit subitement. Il se souvenait avoir déjà entendu ce genre de propos décousus. Lors de sa quatrième année, dans l'autre Poudlard, Harry avait retrouvé Barty Croupton à la lisière de la Forêt Interdite. Soumis au sortilège de l'Imperium, Mr Croupton avait parlé à un arbre qu'il prenait pour Percy Weasley, pourtant sa conversation avait été entrecoupée de paroles sensées.

- Monsieur, reprit Harry. Pourquoi êtes-vous ici ?

- Ils m'ont coincé, les charognes ! grommela l'homme d'une voix rauque. Voldemort et…

Mais l'homme recommença à délirer. Harry en profita pour réfléchir à toute vitesse. Même dans ce monde, les gens n'appelaient pas Voldemort par son nom (ceux extérieurs au château en tous cas). Pourtant, cet homme ne pouvait pas être un professeur. Harry comprit tout à coup. Il repensa à Rogue et son flacon cassé. Etait-il possible que Voldemort se serve des cachots de l'école pour enfermer ses opposants ? Pour les soumettre au sortilège de l'Imperium et leur arracher des informations en se servant du Veritaserum ? Si c'était le cas, Voldemort préparait donc quelque chose, mais quoi ?

- Ça se tient, murmura Harry pour lui-même.

Pour en avoir le cœur net, il fallait qu'il connaisse l'identité de cet homme.

- Monsieur ? appela à nouveau Harry.

- J'entends des voix, s'inquiéta l'homme. Oh, ma tête me…

- Qui êtes-vous ? l'interrompit Harry.

- Moi ? Mon…Mondingus, répondit-il, hésitant. Mondingus Fletcher…oui, c'est ça…je crois…

Harry qui commençait à s'ankyloser, décida d'en rester là. Effectivement, il avait déjà entendu ce nom. Dumbledore l'avait mentionné lorsqu'il avait demandé à Sirius de prévenir les anciens après les terribles évènements de sa quatrième année. Donc c'était bien cela, Voldemort avait réussi à capturer un personnage important et préparait quelque chose. Il se releva et, pendant de longues minutes, retourna dans sa tête toutes les informations qu'il venait d'apprendre en faisant les cent pas dans la pièce.

Il fut interrompu dans la soirée par le plateau du soir. Harry mangea tranquillement, ses idées commençaient à être plus claires et il entrevoyait déjà une solution.

Harry élabora son plan pendant deux jours. Il avait étudié toutes les possibilités et, chaque fois, il en arrivait à la même conclusion : il fallait faire quelque chose. Mais à présent, Harry savait comment il allait procéder. De plus, ce cachot était l'endroit idéal pour ne pas être dérangé.

Harry, qui n'avait pas beaucoup dormi cette nuit-là, attendit le plateau du matin et retourna s'allonger sur son lit. Il se concentra de toutes ses forces sur Albus Dumbledore, le ministre de la Magie.

Le vieil homme était, une fois encore, installé derrière son bureau et Harry n'attendit pas plus longtemps. Il se retourna et se concentra sur la porte d'entrée pour se retrouver de l'autre côté. Il apparut sur une sorte de palier à côté d'un bureau inoccupé. Soudain, une vieille femme un peu ronde, aux cheveux grisonnants, surgit de la pièce voisine, une pile de dossiers dans les mains. Elle s'arrêta en apercevant Harry.

- Vous désirez quelque chose, Monsieur ? demanda-t-elle poliment.

- Euh… je voudrais voir le ministre, annonça Harry pris au dépourvu.

- Mon cher, reprit la vielle femme en fronçant les sourcils. Le ministre ne reçoit que sur rendez-vous ! Et à ma connaissance…

- C'est très important, assura Harry, et je ne peux pas attendre.

- Jeune homme, il le faudra pourtant ! lança-t-elle avec indignation. On ne se permet pas de…

La porte du bureau s'ouvrit alors, et Albus Dumbledore vint se placer sur le seuil.

- Que se passe-t-il, Elina ? demanda-t-il d'une voix douce.

Harry eut un pincement au cœur en voyant le vieil homme. Il aurait tellement voulu lui exprimer son soulagement de le revoir enfin. Mais cet Albus Dumbledore-là ne le connaissait pas, et il ne fallait pas brûler les étapes. Après tout, Harry n'était même pas sûr qu'il accepterait de le recevoir et en cet instant, il fixait l'adolescent d'un regard encore plus pénétrant qu'à l'ordinaire par-dessus ses lunettes, presque méfiant même.

- Monsieur le ministre, expliqua la vieille femme. Ce jeune homme se permet de s'introduire dans un ministère, comme ça ! Sans rendez-vous ! Et il s'imagine que…

- Calmez-vous Elina, l'interrompit Dumbledore. Peut-être pourrions-nous lui demander ce qu'il veut ? Nous aviserons ensuite…, ajouta-t-il sans quitter Harry des yeux.

- Il faut que je vous parle, Monsieur, dit alors Harry. Je n'ai pas beaucoup de temps, et ça risque d'être un peu long, mais c'est indispensable.

Dumbledore ne bougea pas d'un pouce, il semblait sonder Harry qui se sentait plutôt mal à l'aise à présent.

- Elina, s'il vous plait, reprit Dumbledore en regardant enfin la vieille femme qui paraissait encore plus indignée en comprenant ce qui allait suivre. Je vais recevoir ce garçon et je voudrais qu'on ne me dérange pas, je vous prie.

Dumbledore recula et invita Harry à entrer. Il referma la porte derrière lui et alla s'asseoir derrière son bureau. Harry ne put s'empêcher de s'approcher du phénix posé sur son perchoir et Dumbledore l'observa attentivement. Harry sourit à l'oiseau qui lui était si familier et le caressa avec douceur.

- Il s'appelle Fumseck ? demanda-t-il en tournant la tête vers Dumbledore.

- En effet, répondit celui-ci avec une lueur de surprise mêlée de méfiance dans les yeux.

Harry s'avança vers le bureau et s'installa sur la chaise que lui indiquait le vieil homme.

- Ce sont des détecteurs d'ennemis ? demanda Harry d'un air entendu en voyant tout un tas d'objets étranges, dispersés sur le bureau, qui réagissaient à peine.

- C'est exact, acquiesça Dumbledore qui compris ce que Harry voulait dire.

- Je m'appelle Harry Potter, annonça-t-il. Ce nom ne vous dit peut-être rien, mais nous avons déjà eu l'occasion de nous rencontrer.

Une lueur étrange passa dans les yeux du vieil homme.

- Je connais très bien vos parents, dit alors Dumbledore. Et leur fils, Harry, également. Aussi, j'attends quelques explications de votre part pour clarifier la situation.

Harry prit une profonde inspiration et raconta son histoire. Pour être le plus clair possible, il commença par expliquer qu'il avait été élevé par son oncle et sa tante, à la suite de la mort de ses parents qu'il croyait disparus dans un accident de voiture, jusqu'à l'âge de ses 11 ans.

Il décrivit longuement les cinq années qu'il avait vécues dans l'autre Poudlard en essayant de contenir la douleur que les évènements les plus tragiques réveillaient en lui. Il replaça également les personnes dans le rôle qu'ils tenaient dans la vie qui avait été la sienne. Dumbledore l'écoutait sans rien dire et paraissait tour à tour impressionné et compatissant.

Après plusieurs heures, que Dumbledore avait interrompues parfois pour permettre à Harry de prendre une tasse de thé et se reposer un peu, il en vint enfin à l'été qui précédait sa sixième année et où l'autre Dumbledore lui avait remis le Retourneur de Temps pour essayer de modifier le cours des évènements.

Harry décrivit alors sa nouvelle vie depuis qu'il avait surgi dans cette autre réalité et lui exposa ses inquiétudes sur le bien-fondé de ses actes.

Dumbledore se redressa dans son fauteuil et soupira avec lassitude.

- Je vois que tu as traversé des épreuves que beaucoup n'auraient pas supporté, Harry, constata le vieil homme qui le tutoyait à présent, comprenant à quel point ils avaient été proches l'un de l'autre dans l'histoire qu'il venait d'entendre. Il se trouve en effet que, pour nous, Lord Voldemort n'a jamais disparu. Cela est dû au fait qu'il n'a jamais découvert que tes parents descendent directement de Godric Gryffondor et de Salazar Serpentard. Et je peux t'assurer que très peu de gens sont au courant, sans quoi, il n'aurait pas hésité à être et à agir tel que celui que tu as connu. Bien sûr, certains lui attribuent des actes délictueux, mais personne n'a jamais réussi à apporter la moindre preuve sur son implication directe. Si cela avait été le cas, nous l'aurions arrêté sans attendre évidemment, mais jusqu'à présent, il s'est toujours contenté de diriger Poudlard sans avoir nuit exagérément à qui que ce soit.

Fumseck vint se poser sur le bord du bureau et Harry, qui souriait pour la première fois depuis des heures, caressa l'animal qui laissa échapper une douce plainte.

- Je comprends à présent comment tu as su que mon phénix s'appelle Fumseck, reprit Dumbledore avec un sourire amusé. Je dois dire que j'étais un peu surpris tout à l'heure, j'ai tout de suite compris que tu n'étais pas le Harry que je connais.

- Il m'a rafistolé tellement de fois, laissa échappé Harry dans un soupire. Tout comme vous, il a toujours été là pour moi quand j'ai eu besoin d'aide.

- Ce qui m'amène à te demander ce que tu attends de moi, Harry ?

- Je voudrais que vous mettiez au point un autre Retourneur de Temps, répondit-il en regardant à nouveau Dumbledore d'un air grave. Pas pour retourner à l'époque où j'avais un an, mais plutôt pour empêcher Voldemort de rompre sa promesse, et de pouvoir agir avant qu'il ne tue tous ces gens.

- Cela ne représente que très peu de temps, fit remarquer Dumbledore.

- Je sais, admit Harry. Mais tout comme lui, je sais toujours comment retrouver mes ennemis. Et je vous assure qu'il n'en restera pas un.

- Je veux bien te croire, assura Dumbledore qui souriait en haussant les sourcils. Je suis sûr que l'autre Dumbledore t'aidera du mieux qu'il peut, ajouta-t-il avec une lueur malicieuse dans les yeux. Mais ce ne sera pas facile. Je veux dire que le Retourneur de Temps est un objet magique d'une grande complexité, et il ne me sera peut-être pas possible d'en créer un à nouveau.

- Je vous fais confiance, dit simplement Harry qui jeta un coup d'oeil à sa montre. Oh, je ferais bien de partir ! s'exclama-t-il en se levant. Je suis sensé être enfermé dans un cachot en ce moment et si le concierge de l'école décide de me réveiller en venant chercher le plateau du matin, je vais avoir de sérieux ennuis !

- Ce qui explique comment tu es arrivé jusqu'ici, comprit Dumbledore qui ne parut pas surpris. On ne peut pas transplaner non plus dans ce Poudlard et, de toute façon, tu es un peu jeune pour ça… C'est un don merveilleux, Harry, mais aussi tellement dangereux…, ajouta-t-il le regard pétillant.

- Je sais, dit Harry songeur. L'autre Dumbledore va avoir une sacrée surprise en l'apprenant, je ne lui ai jamais dit que j'en étais capable.

- Je suis très honoré, s'émut Dumbledore.

Harry devint livide tout à coup.

- En parlant des cachots, dit-il soudain. Connaissez-vous quelqu'un du nom de Mondingus Fletcher ?

- Oui, confirma Dumbledore, son visage exprimant à nouveau l'inquiétude.

- Cet homme est enfermé dans un cachot à Poudlard, indiqua Harry. Je crois même pouvoir affirmer qu'il est soumis au sortilège de l'Imperium et que des Mangemorts l'ont obligé à parler en utilisant du Veritaserum.

Dumbledore paraissait abattu à l'annonce de cette information.

- Dans ce cas, répondit-il d'une voix blanche. Je compte sur toi pour réussir dans ton entreprise, Harry. Sinon, j'ai bien peur que nous subissions la colère du Seigneur des Ténèbres à notre tour.

- Alors finalement, ici aussi les gens vont…, dit Harry qui, devant la gravité du vieil homme, eut soudain confirmation que, là encore, Voldemort avait des projets terrifiants.

Harry et Dumbledore se regardèrent comme jamais ils ne l'avaient fait auparavant.

- Reprenons-nous, dit alors Dumbledore. Tu peux disparaître ici si tu veux. Je m'arrangerai avec Elina…, ajouta-t-il le regard entendu, un léger sourire aux lèvres. Je te tiens au courant pour le Retourneur…, dit-il en baissant la voix.

Harry rendit son sourire au vieil homme, puis il ferma les yeux et se concentra sur son cachot.

Rusard n'était pas encore venu récupérer son plateau et Harry, qui reprenait espoir après ce qu'il venait d'entendre, entreprit de se dégourdir les jambes à travers la pièce. Il aperçut Hedwige qui était à nouveau sur le rebord de la fenêtre et, à cette vision, il se sentit si fort qu'il en était presque content d'être ainsi enfermé.

Chapitre 8 - Le Retourneur de Siècles

Quelques jours plus tard, à l'heure du déjeuner, Rusard vint libérer Harry de son cachot en l'informant qu'il pourrait rejoindre ses camarades dans la Grande Salle après être passé dans son bureau pour récupérer sa baguette.

Presque tous les élèves étaient déjà installés et Ron, le voyant arriver, lui montra la chaise vide à côte de lui.

- Eh ben dis donc ! observa-t-il étonné. On dirait que tu reviens de vacances avec une mine aussi réjouie ! Ça fait un bail que je n'ai pas mis les pieds aux cachots, mais à moi, ça m'a pas fait cet effet-là la dernière fois !

Harry aurait bien voulu lui donner une explication, mais c'était trop dangereux et, de toute façon si son plan fonctionnait, il aurait l'occasion de tout raconter à Ron en temps voulu.

Hermione, beaucoup plus terre à terre, releva la tête en tenant une pile de feuille qu'elle venait de sortir de son sac et la posa devant Harry.

- Tiens, Harry, lança-t-elle en replaçant une mèche de cheveux qui lui tombait devant les yeux. Pour que tu ne prennes pas de retard, j'ai fait un résumé de tous les cours que tu as ratés.

- Hermione, soupira Ron, exaspéré. Tu ne peux pas le laisser tranquille, on verra ça plus tard !

- Oh, oh, s'interposa Harry en sentant venir une dispute. Vous n'allez pas commencer tous les deux !

Ce fut sans effet, et les deux adolescents se chamaillaient déjà mais Harry les écoutait à peine. Il regardait Voldemort qui venait d'arriver et se dirigeait vers le fond de la salle avec nonchalance, son horrible reptile sur les talons.

Comme toujours, depuis qu'il était ici, Harry ressentit le sentiment indéfinissable qu'éveillait en lui la présence du Seigneur des Ténèbres lorsqu'il se trouvait dans la même pièce. Harry n'aurait su dire s'il éprouvait de la haine, de la colère ou tout simplement la peur d'être découvert. Quoi qu'il en soit, il se sentait toujours aussi nerveux qu'au premier jour de son arrivée lorsqu'il apercevait son ennemi.

- Maître, appela soudain le serpent qui ralentit sa progression en balançant doucement la tête de droite à gauche comme s'il percevait quelque chose d'insolite. Je sssens…sssccc'est étrange…

Voldemort s'arrêta et baissa les yeux vers le serpent qui ondulait toujours. Harry sentit les battements de son cœur s'accélérer dans sa poitrine. Il comprenait parfaitement les paroles du reptile, qui s'était arrêté à sa hauteur, et osait à peine respirer.

- Qu'est-ce qu'il y a, Nagini ? demanda Voldemort. Quelque chose ne va pas ?

- Je ne sssuis pas sssûr, Maître, siffla-t-il en goûtant l'atmosphère de sa langue fourchue.

A présent les élèves à proximité regardaient l'homme et la bête converser dans une langue inconnue pour eux. Certains avaient une expression d'étrange fascination sur le visage, d'autres semblaient terrifiés au contraire. Ron et Hermione ne se disputaient plus et essayaient de cacher leur nervosité.

Harry s'obligea à prendre de longues inspirations. S'il parvenait à se détendre, peut-être réussirait-il à faire perdre sa concentration au serpent ?

- Alors, s'impatienta Voldemort. Vas-tu te décider enfin à me dire ce qu'il y a ?

Par chance, Nagini tourna la tête vers la table des Serpentard et s'éloigna de quelques mètres avant de revenir sur ses pas et tourner sur lui-même. Il semblait avoir perdu la piste. Voldemort n'attendit pas plus longtemps et reprit son chemin pour aller s'asseoir à sa place. Le serpent se résigna et suivit son maître en humant les alentours.

- Je déteste quand ils font ça, murmura Ron. Ça file la chair de poule…

Pour cacher son malaise, Harry prit les feuilles qu'Hermione avait rédigées pour lui et les rangea dans sa poche. Les autres élèves reportèrent leur attention sur leurs assiettes et les conversations reprirent peu à peu. Seul Harry avait pu mesurer toute la gravité de la situation.

Harry n'eut pas longtemps à attendre avant d'avoir des nouvelles du ministre de la Magie. Deux jours plus tard, les Gryffondor de sixième année sortaient d'un cours de Botanique où, à la grande surprise de Harry, le professeur Chourave s'était contentée de leur faire étudier des plantes médicinales aux vertus apaisantes. La semaine précédente ils avaient manipulé des mandragores d'âge adulte et une fois de plus, Harry avait dû refouler les images terrifiantes du rituel qui avait permis à Voldemort de retrouver son corps.

Les élèves se dirigeaient vers le château pour se rendre à la tour Nord et croisèrent le professeur McGonagall qui traversait le hall d'entrée.

- Mr Potter, s'il vous plait ! interpella le professeur en levant la main.

Harry, Ron et Hermione s'arrêtèrent devant elle.

- Suivez-moi, je vous prie, indiqua-t-elle à l'attention de Harry. J'ai besoin de vous voir un instant.

Ron et Hermione eurent l'air surpris et indiquèrent à Harry qu'ils se retrouveraient plus tard. Hermione alla à son cours d'Arithmancie et Ron rattrapa les autres Gryffondor pour un cours de Divination.

Harry suivit le professeur qui ne tarda pas à le rassurer.

- Le ministre de la Magie souhaite vous voir, précisa-t-elle en marchant d'un pas vif, Harry à ses côtés. C'est bien la première fois qu'un élève…enfin bref, ajouta-t-elle d'un air résigné. Le directeur a reçu un hibou ce matin. Il n'est pas là en ce moment, mais il a donné son accord et a mis un Portoloin à votre disposition pour vous permettre d'aller à ce rendez-vous. Je vous conduis dans mon bureau, il n'est pas question que les autres élèves vous voient sortir du château, ça évitera les questions…

Harry, qui n'en revenait pas, acquiesça poliment. Qu'avait bien pu inventer Dumbledore pour permettre à un élève de s'absenter en plein milieu des cours sans éveiller la curiosité du directeur ? Après tout peu importe, pensa-t-il, au moins il n'aurait pas à rencontrer Voldemort.

Ils arrivèrent devant le bureau du professeur et entrèrent à l'intérieur. La pièce était tout aussi accueillante que celle dans laquelle Harry avait eu l'occasion de se rendre dans l'autre Poudlard, si ce n'est qu'il vit quelques étagères supplémentaires sur lesquelles étaient rangés des livres sur les métamorphoses peu communes. Harry renonça à s'attarder plus longtemps sur les titres évocateurs.

Le professeur regarda sa montre et prit un petit objet sur son bureau. Elle revint vers Harry et posa un vieux bigoudi racorni sur une table près de l'entrée. Harry ne put s'empêcher de sourire en apercevant l'objet. Elle sortit sa baguette magique et la pointa sur le bigoudi en prononçant une formule.

- Tenez, dit-elle. Il vous suffit de prendre ceci, le ministre vous attend. Le directeur vous laisse une heure. Pour revenir au collège, vous n'aurez qu'à toucher cet objet à nouveau et vous vous retrouverez directement dans mon bureau. Allez-y Potter.

Harry regarda le vieux bigoudi un instant et prit une profonde inspiration pour se préparer à ressentir les effets désagréables que produisaient toujours les Portoloins sur lui.

Cette fois encore, il n'échappa pas à la terrible sensation que quelque chose le tirait par le ventre. Il filait à vive allure au milieu d'un tourbillon de couleurs et un sifflement aigu lui raisonnait aux oreilles.

Puis, tout s'arrêta enfin. Il se retrouva, debout mais chancelant, devant la vieille femme aux cheveux grisonnants qui le regardait d'un air réprobateur.

- Le ministre vous attend, indiqua-t-elle en se levant. Vous pouvez laisser ça ici, proposa-t-elle en désignant le Portoloin d'un geste du menton.

Harry ne se fit pas prier et posa le bigoudi sur le coin du bureau. Elle ouvrit la porte située derrière elle et annonça Harry. Dumbledore lui répondit quelque chose et elle s'écarta, à contrecoeur, pour permettre à l'adolescent d'entrer.

- Assieds-toi, Harry, l'invita le vieil homme en désignant une chaise. Vous pouvez nous laisser, Elina, dit-il à la vieille femme qui referma la porte.

Harry s'assit et salua le ministre.

- J'ai de bonnes nouvelles pour toi, commença Dumbledore en ouvrant un tiroir de son bureau. Grâce aux indications que tu m'as fournies, j'ai réussi à créer un nouveau Retourneur…de Siècles, devrais-je dire !

Il posa une petite sphère transparente, entourée d'une cage de cuivre, sur son bureau. Un sourire rassurant illuminait son visage. Mais Harry, qui savait ce que l'utilisation du Retourneur allait signifier pour lui, regardait l'objet d'un air grave.

- C'est du bricolage, je te l'accorde, avoua le vieil homme. Mais cela devrait marcher… Très ingénieux d'ailleurs, il s'agit d'un Rappeltout et d'une sphère de calcul arithmantique. Il te suffira de te concentrer sur un évènement de ton autre passé pour basculer d'une réalité à l'autre… Tu es toujours aussi déterminé ? demanda Dumbledore en voyant Harry qui gardait son sérieux. Tu sais pourtant que si tu te sers de ceci, tu vas à nouveau perdre des êtres chers, Harry…

Harry hésita. Il ne pouvait détacher les yeux de la petite sphère où une brume blanchâtre tournoyait doucement.

- Je n'ai pas le choix, répondit-il en reportant son attention sur le visage compatissant de Dumbledore. Nous n'avons pas le choix, précisa-t-il dans un souffle.

- C'est vrai, admit le vieil homme. Et je suis très impressionné par ton courage. Cependant, je voudrais que tu remettes cette lettre au Dumbledore que tu connais, dit-il en prenant une enveloppe parmi les parchemins qui encombraient le bureau. Je suis sûr qu'il saura faire ce qu'il faut, indiqua Dumbledore, une lueur étrange dans les yeux. Mais je crois que c'est à lui de t'expliquer certaines choses.

Harry regarda le visage bienveillant du vieil homme mais ne posa pas de questions. Il prenait de plus en plus conscience de la responsabilité qu'il allait être le seul à devoir assumer.

- Je vous promets de faire de mon mieux, professeur, dit-il au bout d'un moment. Euh…je veux dire Monsieur le ministre, rectifia Harry.

- Oh, tu peux m'appeler professeur si tu le souhaite. Après tout, je l'étais avant que Lord Voldemort ne dirige Poudlard. J'enseignais la métamorphose.

Harry pensa soudain à quelque chose.

- Et vous aussi vous pouvez prendre l'apparence d'un animal ? demanda-t-il en fronçant les sourcils.

- Le professeur Dumbledore ne t'en a jamais parlé, Harry ?

- Non…

- Dans ce cas, tu comprendras sans doute que je ne peux pas répondre à ta question, répondit le vieil homme avec douceur.

- Bien sûr, s'excusa Harry. Je suis désolé… Je n'aurais pas dû…

Dumbledore lui adressa un sourire chaleureux et se leva. Harry en fit autant. Il prit l'enveloppe et le Retourneur de Temps et les rangea dans l'une des poches de sa robe de sorcier. Dumbledore l'accompagna jusqu'à la porte et se tourna vers Harry avant de l'ouvrir.

- Je crois qu'au nom de tous les sorciers de ce monde, qui n'auront pas eu la chance de te connaître, Harry… Je peux te remercier chaleureusement et te souhaiter bonne chance.

La voix de Dumbledore tremblait légèrement et il le regardait d'une façon si intense que Harry en était presque gêné.

- Merci, répondit-il simplement.

Ils sortirent sur le palier. Harry salua la vieille femme assise à son bureau et reprit le Portoloin pour retourner à Poudlard.

Chapitre 9 - La décision

Harry arriva dans le bureau du professeur McGonagall qui corrigeait des devoirs, assise derrière son bureau. Elle sursauta à l'apparition soudaine du garçon. Elle regarda sa montre et reporta son attention sur Harry, debout au milieu de la pièce.

- Tout s'est bien passé ? demanda-t-elle en le regardant par dessus ses lunettes.

- Oui, professeur, assura celui-ci.

- Dans ce cas, Mr Potter, vous pouvez attendre votre prochain cours pour rejoindre vos camarades. A moins que vous ne préfériez assister à la dernière heure de Divination du professeur Trelawney ? suggéra-t-elle le plus sérieusement du monde.

- Euh, non, hésita Harry. Je vais aller dans la salle commune en attendant les autres.

- C'est bien ce qu'il me semblait, dit-elle d'un air amusé qui surpris Harry un instant.

Il lui rendit son sourire et regagna la tour de Gryffondor où il dissimula soigneusement la lettre et le Retourneur de Temps dans sa valise qu'il ferma à l'aide d'un sortilège.

Ron et Hermione l'avaient regardé arriver d'un air inquiet lorsque Harry les avait rejoint pour le cours d'Astronomie du professeur Sinistra. Mais Harry les avaient rassuré et avait promis qu'il leur parlerait plus tard (ce qui n'était pas faux).

Tout au long du dîner, ce soir-là, Harry qui était plutôt tendu, ne se mêla pas beaucoup aux conversations enjouées de ses camarades. Il lui fallait prendre la décision de choisir le meilleur moment pour agir et, ne sachant pas où Voldemort en était dans ses projets, il lui parut évident que le plus tôt serait le mieux.

Il observa longuement la foule rassemblée dans la Grande Salle et fut conforté dans son idée par le regard que lui lança Malefoy qui discutait avec Crabbe et Goyle. Harry avait osé défier un des élèves les plus apprécié de l'école, mais aussi le plus dangereux pour lui, et il était évident que Malefoy lui en voulait toujours et que des représailles étaient plus qu'imminentes.

Il s'attarda un instant sur Neville qui paraissait si heureux dans cette réalité et c'était presque plus difficile pour Harry de savoir ce qu'allait devoir vivre son ami que de reperdre lui-même, une fois encore, ses propres parents.

Bien sûr, Harry avait été heureux de les revoir, mais la vie qui lui revenait peu à peu en mémoire, n'était pas la sienne et il avait l'impression de faire partie d'un film dans lequel il n'avait aucun rôle à jouer.

Il repensa alors à la lettre que lui avaient envoyée ses parents. En voyant grandir Harry, ils devaient savoir depuis un bon moment qui était le garçon qui leur avait rendu visite et les avait supplié de ne pas prendre Peter Pettigrow comme Gardien de leur secret. Mais ils avaient dû attendre que les deux destins se rejoignent pour lui en parler, et Harry prenait conscience qu'il n'aurait jamais avec eux la conversation dont son père lui avait parlé dans la lettre car ça aurait été une folie d'attendre jusqu'aux vacances de Noël.

Il aperçut également le visage blafard du Seigneur des Ténèbres qui avait daigné assister au repas de ce soir et qui ne lui portait aucune attention particulière dans ce monde. Mais Voldemort en voulait toujours plus et, depuis que Harry avait appris qu'il ne se contenterait plus de diriger une école, il savait bien qu'il ne pouvait pas laisser tous ces gens perdre des êtres chers sans réagir. Sans parler de Nagini qu'il ne parviendrait pas à tenir à distance très longtemps. Aussi, pour toutes ces raisons, Harry décida de partir le soir même.

Il attendit que les premiers élèves se lèvent, sous les ordres des préfets, et monta avec ses camarades dans la salle commune de Gryffondor. Il passa un moment à discuter au coin du feu avec ses amis, et alla se coucher dans son dortoir. Il profita de ce moment de solitude pour ouvrir sa valise et en sortit l'enveloppe que le ministre de la Magie lui avait remise. Il prit aussi la Pierre du Crapaud de ses parents, le Retourneur de Temps, qu'il garda à la main, et vérifia que sa baguette magique était toujours dans sa poche. Il s'allongea sur son lit à baldaquin, dont il tira les rideaux, et attendit.

Ron, Dean, Seamus et Neville ne tardèrent pas à monter à leur tour et Harry attendit plus d'une heure pour être sûr que ses camarades se soient endormis.

Il s'assit sur son lit et fit pivoter la petite grille autour de la sphère transparente pour composer l'année qui le renverrait dans son autre Poudlard.

Tout comme la première fois, les chiffres jaunes, inscrits dans la sphère, tournèrent sur eux-mêmes dans le sens contraire des aiguilles d'une montre.

- Tempus…retracto…incanto, récita-t-il dans un murmure.

Harry, qui y avait longuement réfléchi, se concentra sur le banquet de la fin de sa cinquième année d'études où rien n'avait encore commencé.

Il fut à nouveau projeté dans un tourbillon de couleurs et, après un instant, arriva enfin dans le hall désert du château. Il avança vers les portes de la Grande Salle où fusaient les rires des élèves et entendit Albus Dumbledore annoncer le résultat de la coupe des Quatre Maisons. Il décida d'aller attendre la sortie du directeur dans le placard du hall de peur d'être surpris par Rusard ou l'un des fantômes de l'école. Il ouvrit la porte du placard et s'installa à l'intérieur en éclairant les lieux à l'aide de sa baguette magique.

Puis soudain, il se souvint que les Serpentard n'étaient restés que quelques instants dans la Grande Salle à l'annonce du résultat du vainqueur. Ensuite, les élèves étaient sortis les uns après les autres pour rejoindre leurs salles communes. Le hall n'allait pas tarder à grouiller de monde, et ce, jusqu'à près de deux heures du matin alors que Dumbledore était parti bien avant cette heure. Quelle serait la réaction des élèves s'ils voyaient un deuxième Harry suivre le vieil homme alors que tous savaient pertinemment que les Gryffondor étaient sortis les derniers ? Il ne pouvait pas non plus rester là toute la nuit !

Affolé, Harry chercha dans sa tête le meilleur endroit pour attendre Dumbledore et décida de se rapprocher de son bureau. Il attrapa sa baguette magique d'un geste brusque et risqua un coup d'oeil au dehors : le hall était toujours désert.

Il sortit précipitamment du placard et referma la porte derrière lui, le coeur battant. Il gravit, du plus vite qu'il pût, les marches du grand escalier de marbre et, arrivé en haut, entendit les portes de la Grande Salle s'ouvrir. Heureusement, les Serpentard devaient descendre vers les cachots pour rejoindre leur salle commune et Harry les vit passer au-dessous de lui en grommelant des paroles de colère contre les Gryffondor qui, cette année encore, avaient gagné la Coupe.

Il n'attendit pas plus longtemps et monta doucement jusqu'au deuxième étage pour ne pas faire raisonner le bruit de ses pas. Il arriva devant la gargouille de pierre et chercha des yeux un endroit sûr. Il aperçut une porte un peu plus loin et décida d'aller voir. Prudemment, il actionna la poignée et poussa la porte qui s'ouvrit sur une pièce sombre. Il alluma sa baguette et avança lentement. Elle était vide, poussiéreuse et dépourvue de meubles. Il referma la porte derrière lui et se laissa glisser le long du mur où il ferma les yeux, soulagé d'avoir réussi. Il regarda sa montre, qui indiquait 10 h 30, et attendit à nouveau, ne sachant plus à quelle heure était sorti le directeur.

Près d'une heure plus tard, Harry se releva en entrouvrit la porte. Par chance, elle s'ouvrait du bon côté et il pouvait surveiller la totalité du couloir depuis sa cachette. Il resta encore de longues minutes à attendre Dumbledore.

Puis enfin, Harry, qui avait reporté son attention sur la pièce, entendit des bruits de pas et des bruissements d'étoffe. Il se leva d'un bond et éteignit sa baguette. Le professeur était à présent devant la gargouille et prononçait le mot de passe qui la fit pivoter. Harry se rua dehors et eut juste le temps d'emboîter le pas du vieil homme avant que la gargouille ne se referme derrière lui.

Dumbledore se retourna brusquement.

- Professeur ! haleta Harry sous le coup de l'émotion. Il faut absolument que je vous parle.

- Harry ? s'étonna Dumbledore en fronçant les sourcils. Je te croyais dans la Grande Salle avec tes camarades. Tu…tu as quelque chose de changé, on dirait que…

- C'est bien moi, professeur, lui assura Harry. Mais justement, c'est un peu long à expliquer et il faut que je vous parle au plus vite.

- Très bien. Détends-toi et suis-moi, indiqua calmement Dumbledore en posant le pied sur la première marche de l'escalier qui tourna sur lui-même.

Harry le suivit. Dumbledore ouvrit la porte de son bureau et tous les deux s'installèrent à l'intérieur.

Tout comme il l'avait fait avec l'autre Dumbledore, Harry entreprit de raconter, avec le plus de précisions possible, les événements passés. Il commença son récit depuis la nuit où Dumbledore lui avait apporté le Retourneur de Temps et informé des agissements de Voldemort. Il décrivit la conversation qu'il avait eue avec ses parents et l'influence de leur nouvelle décision sur la vie du monde de la sorcellerie et celle de Poudlard (sans toutefois s'attarder sur le fait qu'il avait suivi l'équivalent de près de trois années de Magie noire). Le fait que, malgré un passé modifié, Voldemort élaborait, une fois encore, des plans pour renforcer sa suprématie, et en arriva à ce soir, où Harry était revenu.

Penché sur son bureau, les mains jointes, le vieil homme le regardait d'un air abattu.

- Mon dieu…est-ce possible…, murmura-t-il dans un souffle. Harry, reprit-il en se redressant. Je suis désolé de ce que tu viens de vivre, si je m'attendais à…

- Je ne regrette rien, professeur, affirma Harry. Vous aviez raison, nous n'avions pas le choix. Mais maintenant, c'est comme si nous avions une deuxième chance et nous ne devons pas la laisser passer. Je sais que ça ne représente pas beaucoup de temps et…

- Oh, tu as fait de ton mieux, Harry, assura Dumbledore en se calant dans son fauteuil. Tu ne pouvais pas faire autrement et, en choisissant de revenir aujourd'hui, cela ne pouvait pas mieux tomber. Ainsi, tu auras conservé le pacte que tu passé avec Voldemort il y a quelques semaines, et tu n'auras pas à t'en vouloir de ne pas avoir essayé d'arranger les choses. De plus, l'année scolaire est terminée et les élèves vont partir dès demain, ce qui nous laisse le temps d'établir une stratégie sans être dérangés. Cependant, ajouta-t-il d'un ton grave. Tant que vos deux destins ne sont pas réunis, comme cela s'est produit sur le perron de la maison de tes parents, tu dois rester dans l'ombre, Harry. Je vais te mettre en lieu sûr.

- Attendez, dit soudain Harry. J'ai une lettre à vous remettre de la part du ministre de…enfin, de la part de vous-même, rectifia-t-il en tendant la lettre que lui avait remis l'autre Dumbledore.

Dumbledore ouvrit l'enveloppe et déroula le parchemin. A mesure qu'il avançait dans sa lecture, ses yeux semblaient s'éteindre derrière les lunettes en demi-lune, et il reposa le parchemin d'un geste las.

- C'est bien ce que je pensais, murmura-t-il pour lui-même. Comme je te le disais, Harry, reprit-il avec gravité. Il va falloir que tu restes caché et nous devrons agir vite de notre côté. Suis-moi.

Dumbledore se leva et s'assura que la voie était libre avant de sortir de son bureau, Harry sur les talons. Au lieu de repartir vers l'escalier principal, ils continuèrent à longer le couloir et s'arrêtèrent devant une petite porte située à son extrémité. Dumbledore s'engagea dans un escalier de pierre aux marches usées si étroit que Harry ne pouvait pas marcher à ses côtés. Ils arrivèrent alors dans un autre couloir dans lequel Harry n'avait jamais pénétré. Cette partie du château paraissait très ancienne et les tentures, aux couleurs défraîchies, dégageaient une humidité à l'odeur désagréable.

Ils montèrent ainsi plusieurs escaliers et parcoururent de nombreux corridors avant de s'arrêter enfin. Dumbledore ouvrit une dernière porte et fit signe à Harry d'entrer. Il alluma les quelques torches fixées au mur à l'aide de sa baguette magique et Harry découvrit une vaste chambre claire et calme qui devait se situer en hauteur d'après le paysage sombre qui s'étendait à perte de vue par la fenêtre. Une autre porte, au fond de la pièce, semblait donner sur une salle de bain. C'était une chambre meublée modestement mais accueillante à la lueur chaleureuse des torches.

- Tu vas devoir rester ici quelques temps, Harry, dit Dumbledore d'une voix douce. Je vais mettre un elfe de maison à ta disposition pour t'apporter tes repas. Il sera ravi de cette mission, j'en suis sûr, assura-t-il avec un sourire malicieux. Si tu as besoin de quoi que ce soit, tu pourras faire appel à lui en toute confiance. Il te suffira d'agiter la petite cloche que tu vois là, sur la table de chevet. Et il saura aussi où me trouver en cas de besoin. En attendant, tu comprendras qu'il ne serait pas prudent de t'aventurer dans le château, mais ce ne sera pas long…je l'espère, ajouta-t-il d'une voix faible.

Harry approuva d'un signe de tête et remercia le professeur qui sortit en refermant la porte derrière lui.

Chapitre 10 - L'Ordre du Phénix

Cela faisait deux jours que Harry était revenu chez son oncle et sa tante et il attendait Sirius, son parrain, avec qui il devait dîner ce soir-là chez Mrs Figg, sa voisine. Sirius n'arrivait pas et Harry, qui avait repris ses corvées quotidiennes, se reposait dans le salon en compagnie des Dursley qui lui adressaient des regards en coin de temps en temps.

- La manie qu'on les sorciers d'arriver en retard ! grogna l'oncle Vernon en regardant sa montre. Ce John Figg n'échappe pas à la règle, à ce que je vois ! Et tâche ne de pas faire de bruit ce soir en rentrant ! Hum…ou cette nuit…, ajouta-t-il en regardant Harry comme s'il avait été un voyou.

Mais Harry n'écoutait qu'à moitié. Il repensait aux rêves étranges qu'il avait fait depuis deux jours. Ces rêves n'avaient rien à voir avec ceux qu'il faisait d'habitude. Ils ressemblaient plutôt à des flashs qui lui racontait une autre vie, dans d'autres lieux et ils lui étaient même apparus en pleine journée. Jusqu'à ce matin où, tout en arrosant les massifs de fleurs de la tante Pétunia, il avait assisté à une drôle de conversation avec le professeur Dumbledore dont il ne se rappelait pas exactement les termes.

La sonnette de la porte raisonna enfin dans le couloir de l'entrée et il s'empressa d'aller ouvrir. Sirius se tenait sur le seuil mais son visage avait une expression étrange et Harry s'en inquiéta.

- Salut, Harry, dit Sirius en entrant dans la maison. Bonjour ! lança-t-il distraitement à l'attention des Dursley qui les observaient au bout du couloir. On va devoir remettre notre dîner à plus tard, Harry. Il faut que tu viennes avec moi.

- Mais…

- Ne t'inquiètes pas, il n'y a rien de grave et personne n'est en danger, seulement il faut faire vite. Dumbledore veut te voir immédiatement, mais il ne m'a pas expliqué très en détail les raisons de cet empressement.

- J'en ai bien une petite idée, avoua Harry qui repensait à ses flashs. Seulement il va falloir qu'il m'explique à moi aussi.

- Très bien, reprit Sirius avec impatience. Dans ce cas, on va y aller tout de suite.

Il sortit un vieux briquet de la poche de son jean.

- Tu as ta baguette magique, Harry ? demanda Sirius.

- Elle est dans ma chambre, je vais la chercher, indiqua Harry qui se dirigeait déjà vers l'escalier.

Il redescendit quelques instants plus tard.

- Où sont passés les Dursley ? s'étonna Harry en constatant qu'ils n'étaient plus sur le seuil du salon.

- J'ai expliqué à ton oncle que je ne savais pas à quelle heure je te ramènerais, et il est retourné dans le salon en bougonnant. Tu as des clés à prendre, ou autre chose ? demanda soudain Sirius en regardant autour de lui.

- Tu te moques de moi ! répondit Harry avec un sourire hésitant, ne sachant si Sirius plaisantait ou pas.

Sirius, qui s'était accroupi, leva la tête vers Harry et eut un sourire désolé en prenant conscience de l'absurdité de sa question. Il posa le briquet par terre et prit la baguette que lui tendait Harry.

- Excuse-moi mon vieux. C'est toujours un peu difficile pour moi, même si ça fait deux ans maintenant que je suis sorti de… Bon, ceci est un Portoloin, expliqua Sirius qui parut à nouveau tourmenté. Il nous conduira directement à Poudlard.

Il marmonna une formule en pointant la baguette sur le briquet.

- Tiens, ta clé, plaisanta-t-il en rendant sa baguette à Harry qui la rangea dans sa poche et s'accroupit à son tour. Tu es prêt ? A trois : un…deux…trois.

Harry et Sirius touchèrent le briquet en même temps et il furent aspirés dans un tourbillon qui dura trop longtemps au goût de Harry. Puis, ils arrivèrent enfin dans le hall du château.

Harry n'était jamais venu à Poudlard en dehors des périodes scolaires et les murs de pierre, sur lesquels ne raisonnaient plus les rires des élèves, avaient quelque chose d'angoissant.

Ils montèrent en silence jusqu'au bureau du directeur et la gargouille de pierre pivota à l'annonce du mot de passe que Sirius prononça. Il frappa à la lourde porte de chêne massif qu'Albus Dumbledore ouvrit presque aussitôt.

- Merci Sirius, dit-il en reconnaissant ses visiteurs. Entrez et asseyez-vous, je vous prie.

Dumbledore alla s'asseoir derrière son bureau, où les attendaient du thé et des gâteaux, et les regarda avec gravité.

- Harry, commença-t-il dans un soupire. Je crois ne pas me tromper en supposant que tu as dû ressentir des choses étranges depuis quelques jours.

- En effet, professeur, répondit-il. Mais je dois dire que je n'y comprends pas grand chose.

- C'est pourquoi nous allons commencer par-là, indiqua Dumbledore en lançant un bref coup d'oeil à Sirius qui regardait ses propres mains d'un air songeur.

Dumbledore commença son récit à partir de la nuit du mois d'août où il avait apporté le Retourneur de Temps à Harry. Puis, il décrivit la rencontre avec ses parents et le début de la sixième année qu'il avait passée dans l'autre Poudlard en lui précisant que tous ces évènements lui reviendraient peu à peu en mémoire, comme cela était déjà le cas depuis deux jours. Harry comprit alors pourquoi il avait eu ces flashs ces derniers temps et écouta le professeur sans l'interrompre.

- Ce qui m'amène à t'expliquer, Harry, ce que nous devons faire à présent, annonça Dumbledore une fois son récit achevé. Et tu vas avoir un grand rôle à jouer dans notre réussite. Mais avant, il faut que je te parle le l'Ordre du Phénix.

- L'Ordre du Phénix… ? répéta Harry sans comprendre.

Dumbledore se leva et se mit à faire les cent pas dans la pièce. L'air soucieux, les deux mains jointes dans son dos, il regardait le sol comme s'il réfléchissait au meilleur moyen d'aborder un sujet complexe.

- L'Ordre du Phénix est né il y a de nombreux siècles, dit-il au bout d'un moment. Il est composé de plusieurs descendants des quatre grands Sorciers qui ont fondé Poudlard. Pour être exact, trois descendants pour chacun d'entre eux. Ainsi, l'Ordre comptait trois descendants de Salazar Serpentard, de Rowena Serdaigle, d'Helga Poufsouffle et de Godric Gryffondor. Ce qui lui a permis d'acquérir une telle puissance qu'aucun mage noir n'aurait pu prendre le pouvoir face à cette union de douze puissants sorciers. C'était le cas en 1945, et nous avons pu anéantir le mage Grindelwald qui, tout comme Lord Voldemort, avait pour ambition de régner sur le monde. On m'en a attribué les mérites car j'étais le plus ancien membre, mais aussi le plus âgé et donc, le plus puissant. Mais sans les onze autres, Harry, Grindelwald serait sans doute parvenu à ses fins… Quelques années plus tard, l'un des nôtres est décédé de sa belle mort, et l'Ordre s'en est donc trouvé affaibli. Il nous fallait attendre qu'un autre héritier soit en âge de nous rejoindre. Tom Jedusor, qui a appris l'existence de cet Ordre et qui s'adonnait déjà à la magie noire, a décidé de profiter de cette faiblesse pour tenter sa chance et il a commencé à rassembler des adeptes pour former sa propre branche de l'Ordre des Ténèbres qui a vu son apogée durer plusieurs années puisque nous ne pouvions rien faire. Bien sûr, il avait conscience que d'autres descendants continuaient de naître mais il pensait avoir plus de temps avant de devoir s'en inquiéter. Cependant, toutes ses années de souffrance ont joué en notre faveur car, comme je te l'ai appris l'année dernière, où plutôt devrais-je dire confirmé, rectifia-t-il avec un sourire amusé. Tes parents auraient pu faire partie de notre Ordre et il était alors possible de le recréer à nouveau. Cela devenait même indispensable face à la cruauté du Seigneur des Ténèbres...

Il regarda Sirius d'une bien curieuse façon avant de poursuivre.

- C'est ton père qui a été choisi pour cela car ta mère pensait être enceinte à ce moment-là et il était évident que, pour cette raison, elle ne pouvait pas nous rejoindre. Cela dit, nous prenions de gros risques en choisissant James, car c'est un descendant de Gryffondor qu'il fallait remplacer, mais devant la détermination de Voldemort, nous n'avions pas le choix et nous étions prêts à prendre ce risque. Lord Voldemort a appris que l'Ordre s'était formé à nouveau et il a entrepris de rechercher les douze sorciers qui le composaient avec pour projet de les tuer, bien sûr. Ainsi, il aurait eu la voie libre pour accomplir le destin qu'il s'était choisi. Mais Lord Voldemort a toujours été prudent et il a décidé, pour assurer sa propre protection, d'accéder à l'immortalité avant de nous livrer bataille. Avec l'aide de certains de ses partisans, il a fini par y parvenir et s'est alors lancé à la poursuite de ses ennemis. Il a su que ton père allait faire partie de l'Ordre du Phénix, il a donc essayé de le retrouver en se servant d'un proche des Potter qui serait assez faible pour être manipulé lorsqu'il a compris qu'il devrait d'abord lever la protection à laquelle il s'était heurtée pour retrouver ta famille. C'était judicieux de sa part car ton père étant le plus jeune des douze, était aussi le moins puissant. Il a donc mis au point le plan diabolique dont tu connais la suite, Harry.

Harry approuva d'un signe de tête.

- Ce que n'avait pas prévu le Seigneur des Ténèbres, c'est que que ta mère aussi aurait pu intégrer cette union, c'est donc pour cela qu'il s'est introduit chez tes parents avec l'intention de tuer uniquement ton père, mais aussi toi puisque James avait eu le temps d'avoir un fils. Il ne savait pas non plus que le Sortilège de la Mort qu'il a prononcé contre toi allait se retourner contre lui car ta mère, par prudence, avait pris la précaution d'assurer ta protection, comme tu le sais. Cela n'explique pas tout, bien sûr, car nous avons tous été surpris par le fait qu'un simple sortilège, même ancien, soit venu à bout d'un mage noir aussi puissant que Lord Voldemort. Nous ne saurons peut-être jamais ce qui s'est réellement produit ce soir-là…, ajouta-t-il, pensif, en retournant s'asseoir derrière son bureau. Quoi qu'il en soit, avec le retour de Voldemort et les projets qu'on lui connaît aujourd'hui, il est à nouveau indispensable de recréer l'Ordre du Phénix au plus vite et c'est pour cela que j'ai réuni tous les anciens il y a deux jours. Nous nous sommes mis d'accord pour te proposer de nous rejoindre, Harry. Bien sûr, nous comprendrions très bien que tu refuses car tu as à peine seize ans et il te reste encore beaucoup à apprendre. Cependant, nous pensons qu'avec l'héritier de deux grands Sorciers, l'Ordre sera plus puissant qu'il ne l'a jamais été. Toutefois, je me dois de te préciser que nous avons peut-être une autre solution, mais cela n'a jamais été tenté et nous prendrions des risques considérables. Aussi, je te demande de réfléchir…, il nous reste quelques jours pour cela.

- Quelle est l'autre solution ? demanda Harry d'une voix rauque.

Sirius et Dumbledore échangèrent un regard étrange que Harry ne savait pas comment interpréter.

- Je ne peux pas te répondre aujourd'hui, Harry, déplora Dumbledore avec compassion. Tu viens déjà d'entendre des choses qui vont occuper ton esprit un bon moment. Et tu as maintenant un choix à faire dont la décision ne peut être prise que par toi seul, c'est très important.

Harry dévisageait le professeur avec une telle intensité qu'il lui sembla que le vieil homme en était presque gêné. Sirius, quant à lui, évitait soigneusement de le regarder depuis leur arrivée.

- Quand voulez-vous avoir ma réponse ? demanda Harry d'une voie dure.

- Au plus tard dans quatre jours, indiqua Sirius qui s'efforçait de cacher son émotion. Tu pourras me faire part de ta décision puisque je vais rester chez Mrs Figg jusque-là. Tu pourras aussi me rendre visite si tu as des questions, Harry. N'hésite pas.

Soudain, Harry pensa à quelque chose.

- Toi aussi tu fais partie de l'Ordre ?

- Gryffondor, répondit simplement Sirius dans un souffle.

Un silence s'installa dans la pièce.

- Il faut quand même que je te propose quelque chose, dit soudain Dumbledore qui venait de se souvenir des paroles de l'autre Harry. Nous ne voulons pas te faire courir de risques inutiles, aussi, j'ai pensé que tu pourrais peut-être te servir de ton don d'ubiquité si tu décides de nous rejoindre.

Harry le regarda avec des yeux ronds.

- Ah, j'oubliais, reprit le vieil homme devant l'air ébahi de Harry. Tu le découvriras au fil des souvenirs que tu vas retrouver peu à peu. Tu m'as déjà parlé de ce don que tu possèdes. Mais attention, Harry, seuls Sirius et moi sommes au courant et nous avons pensé que personne d'autre ne devait savoir. Au cas où il nous arriverait quelque chose, il vaut mieux que peu de gens soient informés de l'étendue de tes pouvoirs...tu pourrais avoir à t'en servir pour te défendre…

- Très bien, professeur, concéda Harry. Je n'en parlerai pas non plus. Mais si je décide de vous rejoindre, il n'est pas question que je m'en serve, affirma-t-il avec détermination.

- C'est bien ce que je pensais, soupira Dumbledore. Nous n'allons pas te retenir plus longtemps. Il est déjà tard et je veux que tu réfléchisses dans le plus grand calme. Sirius, s'il vous plait, voudriez-vous raccompagner Harry ?

- Bien sûr, répondit celui-ci en se levant.

Harry le suivit. Dumbledore les raccompagna jusqu'au hall d'entrée et les salua avant de les voir disparaître en se servant à nouveau du briquet.

Harry et Sirius arrivèrent devant le 4, Privet Drive plongé dans la pénombre à cette heure avancée de la nuit.

- Tu veux venir manger un morceau ? proposa Sirius.

- Je ne sais pas, répondit Harry en se massant le ventre à cause des effets du Portoloin. Tu n'as pas peur qu'on réveille Mrs Figg ?

- Elle est sourde comme un pot ! lança Sirius en haussant les sourcils. Non, je plaisante, Harry. Mais ça ne la réveillera pas, sa chambre est au premier. Alors… ?

- Mouais, consentit l'adolescent avec un grand sourire.

Ils passèrent un moment agréable à parler de tout autre chose que ce qui venait de se dire dans le bureau de Dumbledore, et Harry finit par regagner sa chambre chez les Dursley en veillant à ne pas faire de bruit comme l'avait exigé l'oncle Vernon.

Chapitre 11 - Les Mangemorts

Harry avait quatre jours pour prendre une décision et curieusement, l'oncle Vernon, la tante Pétunia et l'horrible Dudley s'étaient donnés le mot pour le laisser tranquille.

Harry était sûr que Sirius n'était pas étranger à cette soudaine indifférence, où peut-être même Dumbledore en personne… Quoi qu'il en soit, Harry leur en était reconnaissant et ne sortait de sa chambre que pour assister aux repas ou aller faire un tour dans le jardin quand le temps s'y prêtait.

Tout ce qu'il avait entendu, dans le bureau de Dumbledore, avait soulevé de nombreuses questions dans sa tête, mais il essayait de se concentrer uniquement sur la décision qu'il devait prendre et pour cela, il lui fallait une bonne partie de ses journées et même, depuis ce jour, de ses nuits. A cela venaient également s'ajouter les souvenirs dont Dumbledore lui avait parlé et Harry avait parfois l'impression que sa tête allait exploser.

Sirius était venu lui rendre visite la veille et Harry l'avait vu arriver avec bonheur. Ils s'étaient contentés de faire un tour dans le quartier et, pour ne pas l'influencer, Sirius et lui n'avaient parlé que de choses anodines et Harry avait apprécié ces quelques heures de répit.

Le lendemain cependant, les questions étaient revenues à la charge et le poids de la décision qu'il devait prendre, ce soir-là, empêchait à Harry, qui était allongé dans son lit, de dormir une fois de plus.

Il se demandait ce que pouvait bien faire Voldemort en ce moment et la douleur qu'il avait ressentie au front ces derniers jours, lui indiquait que ce n'était pas des activités ordinaires.

Pour en avoir le cœur net, il décida d'aller voir. Peut-être parviendrait-il aussi à surprendre des informations qui pourraient être utiles à l'Ordre du Phénix… ?

Il se leva et s'habilla rapidement en prenant soin de mettre sa baguette magique dans sa poche, et retourna s'allonger sur son lit. Il se concentra sur le visage de l'homme qu'il devrait peut-être affronter dans quelques jours.

Il fut parcouru d'un frisson lorsqu'il arriva sur le seuil d'une salle immense, aux murs sales, que seules quelques torches éclairaient ça et là sans parvenir à réchauffer l'atmosphère. Une longue table, d'un noir brillant, occupait toute la pièce et les fenêtres étaient obstruées par de hautes tentures noires sur lesquelles on distinguait nettement le vert vif de la Marque des Ténèbres.

La table était bordée d'une enfilade impressionnante de silhouettes encapuchonnées qui écoutaient un homme, assis à son extrémité, avec la plus grande attention.

D'où il était, Harry ne pouvait pas voir grand chose car la pièce était tout en longueur et la porte donnait sur le fond de la salle. Curieusement, les conversations des hommes assis à l'intérieur lui semblaient lointaines et il ne parvenait pas a saisir la totalité de leurs propos. Aussi, il décida d'avancer pour s'approcher des Mangemorts dont-il pourrait peut-être reconnaître les visages et percevoir plus nettement le discours.

Prudemment, il entra dans la pièce et à peine avait-il fait deux mètres, qu'il se heurta à une sorte de champ de force invisible qui le renvoya, les quatre fers en l'air, d'où il était venu. Pris de panique, Harry, qui avait eu l'impression de recevoir une décharge électrique, recula sans même prendre la peine de se relever. Il s'arrêta dans un recoin de l'entrée et attendit, le coeur battant, pour savoir si quelqu'un l'avait vu. Les sorciers réunis dans la salle ne semblaient pas avoir interrompu leur conversation, d'après ce que Harry pouvait entendre, et il se détendit enfin, soulagé de constater que personne ne s'était rendu compte de sa présence. Il ne put cependant maintenir sa concentration plus longtemps, tant ses membres étaient douloureux, et sentit qu'il était à nouveau visible depuis quelques instants. Il entendit alors un bourdonnement qui le fit sursauter.

Il regarda autour de lui pour connaître l'origine de ce bruit et aperçut, sur le sol, un scarabée qui agitait ses antennes avec frénésie. Il vit se métamorphoser, sous ses yeux, le scarabée qui reprit instantanément l'apparence de Rita Skeeter. Elle posa un doigt sur sa bouche pour indiquer à Harry de se taire et l'attrapa par le bras pour l'entraîner un peu plus loin.

- Harry ! Mais que fais-tu ici ? chuchota Rita d'un air affolé.

- Je pourrais vous retourner la question, il me semble, répondit Harry en époussetant ses vêtements.

- Mon travail bien sûr ! dit-elle avec une sorte d'indignation amusée en s'assurant tout de même que personne ne venait. Mais toi ! Tu te rends compte… si tu étais découvert !

- Qu'est-ce que vous croyez, s'impatienta Harry, agacé. Je ne suis pas venu ici en jouant de la trompette, je ne suis pas idiot !

- Je sais bien, Harry, reprit Rita d'un ton plus calme. Mais c'est quand même de la folie !

- Vous aussi vous prenez des risques, fit remarquer Harry. Et je croyais que vous ne deviez pas travailler pendant un an si ma mémoire est bonne !

- Oh, je n'ai pas rompu le pacte que j'ai passé avec Miss Granger, si c'est ce que tu veux dire. D'ailleurs, tu as pu constater par toi-même que je n'ai rien écris pendant tout ce temps. Cette petite idiote pourrait m'attirer de sacrés ennuis si elle révélait mon secret. Je crois qu'elle ne s'en rend même pas compte… Quand je pense qu'ils m'ont remplacée par cet idiot de Peuviff ! ajouta-t-elle comme pour se parler à elle-même. Journaliste je suis, et journaliste je resterai, Harry. Figure-toi que c'est beaucoup plus intéressant de se trouver sur le terrain en permanence, plutôt que d'aller faire le guignol dans un bureau ! C'est pour ça que j'ai décidé de ne pas reprendre la rédaction pour l'instant, malgré le fait que je pourrais le faire maintenant que le délai est passé... Je me contente de transmettre des informations au journal, et crois-moi Harry, j'en ai appris beaucoup ces derniers temps…

- Ah oui ? s'étonna celui-ci en fronçant les sourcils avec colère. Et vous comptiez attendre combien de temps avant d'informer les seules personnes qui puissent agir ?

- Oh, je comptais aller voir Dumbledore rassure-toi ! se défendit-elle avec vigueur.

Harry, qui connaissait la suite des évènements, décida de ne pas insister. Rita avait l'air sincère, mais il était évident qu'elle aurait agi trop tard. A moins que ce soit elle qui ait réussi à donner l'alerte, ce qui avait permis à Dumbledore et à Sirius de fabriquer le Retourneur de Temps… ? Il ne réfléchit pas plus longtemps sur le sujet.

- Qu'est-ce qui s'est passé tout à l'heure ? J'en ai pris un sacré coup ! demanda-t-il en se massant les bras.

- Je sais, mais je ne pouvais pas intervenir, tu n'es devenu visible qu'après être sorti de la salle. Dis donc, ça ferait un sacré scoop ça ! plaisanta-t-elle avec enthousiasme.

- Je ne vous le conseille pas, menaça Harry d'une voix sifflante.

- Je plaisantais, Harry, assura-t-elle avec un sourire entendu. Je sais bien que ça te mettrait en grand danger. Pour répondre à ta question, ils utilisent un maléfice de Dématérialisation pour assurer la confidentialité de leurs petites réunions. Et crois-moi, Harry, si tu étais venu ici en chair et en os, tu serais parti en fumée en produisant des étincelles qui ne seraient pas passées inaperçu. On peut dire que tu as eu de la chance ! Mais que diable es-tu venu faire ici ?

- Je voulais savoir où en était Voldemort, et quand j'ai vu que tous les Mangemorts étaient réunis, je n'ai pas pu résister à la curiosité d'essayer d'aller voir leurs visages.

Rita le regarda un instant, comme si elle hésitait à lui confier certaines informations. Puis elle sortit précipitamment un petit flacon de sa poche.

- Tu crois que tu peux te rendre invisible à nouveau ? demanda-t-elle en maintenant le flacon dans sa main.

- Oui, ça va mieux maintenant, répondit Harry qui ne voyait pas où elle voulait en venir et était même un peu inquiet de la voir aussi à l'aise dans un endroit pareil.

- Très bien, reprit-elle en lui montrant le flacon. Ceci est une potion d'Invisibilité. Si tu veux, je bois cette potion et toi tu deviens invisible. On retourne là-bas, juste sur le seuil de la porte, bien sûr, s'empressa-t-elle de préciser. Et je fais les présentations. Qu'est-ce que tu en dis ?

Harry réfléchit un instant, se demandant s'il pouvait vraiment faire confiance à Rita qui semblait s'amuser follement de cette situation imprévue.

- D'accord, décida-t-il enfin. Après tout ce serait bête de ne pas en profiter, pensa-t-il.

Rita ôta le petit bouchon de liège du flacon et en avala la totalité, elle disparut aussitôt. Puis Harry se sentit attrapé par la manche et ils retournèrent à proximité de la porte. Rita s'arrêta enfin.

- Vas-y maintenant, Harry, indiqua-t-elle à voix basse.

Harry se concentra et devint invisible à son tour. Ils se placèrent alors dans l'encadrement de la porte.

- Bon, commença Rita dans un murmure. Je ne te présente pas le grand chef ! Mais à sa droite, c'est Lucius Malefoy, accompagné de Madame, bien sûr.

Harry regarda l'endroit où devait se trouver Rita avec surprise.

- Ne me regarde pas avec cet air là, Harry, supposa-t-elle en sentant l'adolescent frémir à ses côtés. La visite guidée n'est pas terminée, et la suite risque de te surprendre encore plus, si j'en crois ce que j'ai vu il y a un peu plus d'un an… Bon, je continue. A la droite de Madame Malefoy, c'est Walden Macnair suivi de son fidèle ami, le vieux Nott. Ensuite il y a plusieurs personnes que je ne connais pas, mais les deux carrures là-bas, c'est Crabbe et Goyle, suivis de Perks. Après, il y a une autre série que je n'identifie pas encore avec certitude. Et en face, c'est Avery, et juste après, Ludo Verpey.

- Quoi ! s'exclama Harry en s'efforçant de ne pas parler trop fort.

- Enfin quoi, Harry, fais donc un peu marcher tes méninges ! J'ai essayé de te prévenir aux Trois Balais. Tu crois vraiment que le fait de transmettre des informations à son insu puisse faire dresser les cheveux sur la tête de qui que ce soit ! Je l'ai vu à l'œuvre, figure-toi. Et il n'était pas moins déterminé que les autres lorsqu'ils s'amusaient avec… Enfin bref, tu sais mieux que quiconque que j'étais bien placée pour les voir !

Harry avala sa salive en regardant l'espace vide du côté de Rita d'un air ébahi. Il repensait à la première fois qu'il avait rencontré Ludo Verpey. Harry s'en souvenait comme si c'était hier, c'était à la Coupe du Monde de Quidditch. Lorsque Mr Weasley lui avait présenté Harry, Ludo Verpey avait eu un instant d'hésitation en entendant son nom et il avait lentement lever les yeux vers la cicatrice en forme d'éclair qu'il portait sur le front. Et à bien y réfléchir, Verpey ne l'avait même pas salué comme l'avaient pourtant fait si souvent des gens que Harry n'avait jamais vus. Pour un personnage aussi grandiloquent, c'était plutôt curieux en effet, pensa Harry. Et Winky n'avait-elle pas dit que Mr Verpey était un mauvais sorcier…un très mauvais sorcier ? Il se souvint aussi de Drago Malefoy qu'ils avaient rencontré seul, en s'éloignant du camp. Où était donc sa mère à ce moment-là ?

Il fut sorti de sa réflexion par Rita qui le secouait par le bras.

- Ça va Harry ? On peut continuer ?

- Oui, oui, assura-t-il en regardant à nouveau les Mangemorts assis dans la salle.

- Bon. Après Verpey, il y a Moroz et Funestar ainsi qu'Augustus Rookwood, qui dirige le département des Mystères. Je peux te dire que le ministère grouille de ses vermines, Harry. Mais je ne te donne que les noms dont je suis sûre pour l'instant. Et puis juste à côté, c'est Moon, et là, Flint. Et on en arrive à Mrs Finnigan qui se rendait souvent en Albanie à une époque, et même après…

Harry eut un autre sursaut mais parvint à se contenir cette fois.

- Voilà, reprit Rita. Pour l'instant, c'est à peu près tout. Je ne peux pas t'en dire plus, Harry. Parce que je veux être sûre de moi. Quoi que tu aies pu en penser, à une certaine époque, je suis aussi une bonne journaliste, tu sais. Il y a pourtant un autre nom que je pourrais avancer, mais comme il s'agit de quelqu'un que tu connais, je préfère attendre. Oh, rassure-toi ! ajouta-t-elle en sentant que Harry s'apprêtait à dire quelque chose. Je ne suis pas idiote. Pour l'instant cette personne ne représente aucun danger pour toi, donc, on va attendre un peu.

Harry s'abstint de dire quoi que ce soit. Après tout, il en avait appris ce soir plus qu'il n'avait pu l'espérer et il lui restait encore une décision importante à prendre. A présent, il savait ce qu'il allait dire à Dumbledore.

Rita lui indiqua que la potion ne ferait plus effet très longtemps et l'entraîna à l'écart à nouveau. Elle lui confia qu'elle allait rester encore un peu pour voir où ils en étaient et Harry décida de retourner dans sa chambre.

Il se concentra sur Privet Drive où il se releva en sursaut dans son lit et, après avoir retrouvé ses esprits, alla respirer l'air frais à la fenêtre pour se remettre de ce qu'il venait d'apprendre. Il retourna se coucher après quelques minutes et s'endormit enfin.

Chapitre 12 - Le secret de Godric Gryffondor

Le lendemain matin, Harry se réveilla un peu tendu car c'était aujourd'hui que Sirius devait venir le voir pour avoir sa réponse. Toute la journée, Harry n'avait fait que tourner en rond sous les regards inquiets des Dursley qui n'osaient plus lui adresser la parole depuis près de quatre jours. Duldley marquait même un temps d'arrêt à chaque coin de porte, avant d'entrer dans une pièce, de peur de se trouver nez à nez avec son cousin. Qu'avait bien pu lui raconter la tante Pétunia ?

Sirius arriva en fin d'après-midi et ne parvenait pas, lui non plus, à cacher sa nervosité. Resté dans l'entrée, il écoutait, le teint livide, Harry lui annoncer qu'il acceptait de les aider. Il alla prévenir les Dursley, qui s'étaient réfugiés dans le salon devant la télévision qu'ils regardaient à peine, qu'il ramènerait Harry dans la soirée, sans plus de précision. Il rejoignit Harry devant la porte et sortit à nouveau le vieux briquet qui les conduirait à Poudlard.

Comme la dernière fois, ils arrivèrent dans le hall du château et Sirius indiqua à Harry que Dumbledore souhait lui parler avant de rencontrer les autres membres de l'Ordre du Phénix.

Ils montèrent les étages, dans le silence pesant du château, jusqu'au bureau du directeur qui les attendait.

- Entrez, je vous prie, les invita le vieil homme. Assieds-toi, Harry. Sirius, voudriez-vous aller prévenir les autres que nous arrivons dans un instant ?

Sirius approuva d'un signe de tête et ressortit du bureau. Dumbledore alla s'asseoir dans son fauteuil et regarda Harry avec un visage bienveillant.

- Je savais que tu accepterais, Harry, affirma-t-il au bout d'un moment. Mais il faut que je t'informe de certains faits avant de rejoindre les autres. Tu vas rencontrer quelqu'un, ce soir, que tu ne t'attends sûrement pas à voir puisque cet homme est sensé être mort.

Harry ouvrit des yeux ronds et osait à peine respirer.

- Barty Croupton va assister à notre petite réunion, avoua Dumbledore avec douceur. Je veux parler de Barty Croupton père, bien sûr, précisa-t-il en voyant Harry froncer les sourcils.

- Mais…comment est-ce possible ? s'étonna Harry. Je croyais qu'aucun sortilège ne pouvait faire revivre les morts !

- Aucun sortilège, Harry. Mais vois-tu, son fils a métamorphosé son père avant d'utiliser un sortilège d'os unique pour faire disparaître son corps. Lorsque Barty Croupton a indiqué où il l'avait enterré, je me suis empressé d'aller le chercher avant de rejoindre Cornelius Fudge qui était en fait déjà à l'infirmerie lorsque je suis revenu au château. Et tu connais la suite, Harry… Avec une potion très ancienne, que nous avons mise au point l'année dernière, le professeur Rogue et moi, nous sommes parvenus à lui rendre la vie. Nous avons dû garder le secret car cette potion appartient à la magie noire traditionnelle, elle n'est d'ailleurs pas très différente que celle dont Voldemort s'est servi pour renaître lui-même, et si le ministère de la Magie venait à apprendre que nous l'avons utilisée… Enfin bref, comme tu as pu l'apprendre, lors de ta quatrième année, Mr Croupton s'est toujours battu avec vigueur contre les adeptes de magie noire et il faisait partie de l'Ordre du Phénix depuis plusieurs années. Sa présence était donc indispensable ce soir pour que nous soyons à nouveau au complet.

Harry ne sut quoi répondre, il regardait d'un air absent le bureau encombré du directeur.

- Bien. Si tu es prêt, Harry, nous pourrions peut-être y aller ?

Harry approuva sans un mot et se leva.

Avec Dumbledore, ils parcoururent plusieurs couloirs et montèrent de nombreux escaliers pour arriver enfin devant une imposante porte de chêne d'une hauteur impressionnante, sur laquelle étaient sculptés des griffons sur chacun des battants.

Dumbledore ouvrit la lourde porte et Harry découvrit une longue salle magnifique. Les murs étaient recouverts de velours rouge imprimé de volutes d'un jaune éclatant. Douze hautes fenêtres, réparties de chaque côté de la pièce, étaient encadrées de tentures rouges bordées d'or maintenues par de longs cordons dorés, et laissaient apparaître les premières lueurs de la nuit au dehors.

Des bougeoirs d'or étaient fixés aux murs, entre chacune des fenêtres, et éclairaient la pièce d'une lumière agréable. Trois cheminées de chaque côté, où crépitait un feu, dégageaient une chaleur accueillante. Le plafond, situé à plusieurs mètres de hauteur, était composé d'une multitude d'arcades aux voûtes sculptées de fleurs et de créatures légendaires au milieu desquelles étaient peintes des scènes de chasse.

Harry, tout en avançant aux côtés de Dumbledore, reporta son attention sur le centre de la pièce où les attendaient les membres de l'Ordre du Phénix. Les sorciers, aux visages inquiets, étaient assis de chaque côté d'une longue table de bois rouge, strié de veinures harmonieuses, dont le vernis étincelant reflétait la lueur des chandelles et les fresques du plafond.

De chaque côté de la table, Harry aperçut une longue enfilade de chaises d'or à hauts dossiers, surmontés de pommeaux, dont l'assise était recouverte du même velours rouge à motifs jaunes que la tapisserie.

Dumbledore, qui salua les sorciers, imité par Harry, lui indiqua de prendre place à sa droite et s'installa lui-même à l'extrémité de la table.

Harry regarda une à une les personnes qui formaient cette étrange assemblée. A sa droite, le professeur McGonagall, vêtue de sa longue robe de velours vert, tripotait nerveusement son chapeau qu'elle avait déposé devant elle. A ses côtés, un homme vêtu d'une robe bleu foncé, refermait un livre minuscule qu'il rangea dans sa poche. Un peu plus loin, Remus Lupin, vêtu d'une robe grise un peu usée, regardait d'un air songeur ses mains qu'il avait croisées sur la table. En face de deux autres sorciers, Sibylle Trelawney, vêtue d'une vaporeuse robe rouge et or, jouait du bout des doigts avec la multitude de colliers qu'elle portait autour du cou. L'attention de Harry fut alors détournée par Sirius, à côté de Mr Croupton, qui lui souriait. Barty Croupton un peu nerveux, assis en face de Harry, attendait patiemment que la réunion commence.

- Harry, voici la salle de réception de Godric Gryffondor, annonça Dumbledore. Elle n'apparaît que lorsque nous en avons besoin. En fait, chacun des quatre Poudlard s'est réservé une petite particularité à l'intérieur du château. Tu connais déjà la Chambre des Secrets de Salazar Serpentard, ajouta-t-il d'un air entendu.

- C'est nettement moins coquet, vous pouvez me croire ! plaisanta Harry, en gardant tout de même son sérieux, pour détendre l'atmosphère.

Plusieurs sorciers eurent l'air surpris, d'autres, des visages amusés. Seuls Dumbledore et Sirius eurent un large sourire.

- Bien. Nous allons pouvoir commencer, poursuivit Dumbledore. Tout d'abord, je tiens à remercier chacun d'entre vous d'avoir bien voulu être présent autour de cette table ce soir. La tâche qui nous attend ne va pas être facile à mener à bien et je n'ai pas besoin de vous rappeler à quel point il était important de former à nouveau l'Ordre du Phénix. Cet Ordre, grâce à la présence de Harry, va atteindre une puissance qu'il n'a jamais connue à ce jour…

- Et pour quelle raison, je vous prie ? s'étonna Mr Croupton en regardant Harry avec surprise.

- Mon cher Barty, répondit Dumbledore en le fixant d'un air grave, presque froid. Ai-je besoin de vous rappeler que la clause n° 1467 des écrits de l'Ordre précise que chacun d'entre nous doit, pour sa propre sécurité et pour celle des autres, conserver pour lui seul les raisons de son appartenance à notre union ainsi que l'étendue de ses pouvoirs ?

- Non, non…, bien sûr, s'excusa Mr Croupton en rougissant légèrement.

Dumbledore se redressa sur sa chaise et regarda à nouveau l'assemblée.

- La première chose, et la plus importante, reprit-il. A été de choisir la date de notre intervention de façon à ce qu'elle nous soit favorable. Harry, dit-il en se tournant vers lui. Tu n'as pas suivi les cours d'Arithmancie enseignés à Poudlard, je vais donc devoir d'expliquer certaines choses. Les chiffres ont une grande importance sur l'influence des destins. Il nous faut donc toujours prendre nos décisions et accomplir nos actes en fonction de règles bien précises. Ainsi, cet Ordre est composé de douze membres, trois pour chacun de ses quatre fondateurs. Le chiffre trois représente la complétude, la notion de tout, et forme à lui seul le trio passé-présent-avenir ou encore, âme-corps-esprit. Mais aussi le début, le milieu et la fin. Il nous faut donc choisir la date du 14, annonça-t-il à l'attention de tous. Je vais te montrer, Harry.

Il sortit sa baguette magique de sa poche et dessina dans les airs.

1 + 4 + 7 = 12                1 + 2 = 3

- Tu vois, Harry. Cela nous ramène au chiffre 12, qui est celui de la neutralité entre le bien et le mal, mais aussi au chiffre 3.

Les chiffres disparurent d'eux-mêmes, comme des volutes de fumée.

- D'autres dates auraient pu convenir, indiqua Dumbledore à l'ensemble des sorciers. Mais nous sommes pressés par le temps. Plusieurs d'entre vous savent à quel point il nous faut agir vite. C'est pourquoi je propose que la date du 14 soit adoptée dès maintenant.

Des murmures d'approbation parcoururent l'assemblée.

- Dans ce cas, nous pouvons donc aborder les différentes éventualités qui risquent de s'opposer à nous et nous préparer au mieux à…

Soudain, Harry plaqua sa main droite sur son front en étouffant un cri. Une douleur fulgurante le brûlait atrocement et il dut se tenir à la table de son autre main pour supporter la douleur. Tous les visages étaient tournés vers lui.

- Harry…, murmura Dumbledore avec inquiétude.

Harry, les yeux fermés, leva la main gauche vers le vieil homme pour lui indiquer d'attendre. La respiration saccadée, il essaya de savoir ce que faisait Voldemort en cet instant.

Le Seigneur des Ténèbres, entouré de quelques Mangemorts, semblait très en colère et pointait sa baguette sur une imposante silhouette agenouillée sur le sol. Il infligea le sortilège Doloris à l'homme qui tremblait à ses pieds. Puis l'image disparut et Harry retrouva peu à peu son calme. Dumbledore le regarda d'un air interrogateur.

- Quelque chose ne va pas, Harry ? demanda-t-il d'une voix douce. Est-ce que cela devrait nous faire envisager de modifier nos projets ?

- Rien d'important, assura Harry.

- Extraordinaire ! s'extasia Sibylle Trelawney dans un murmure. Comment faites-vous ça ?

Harry lui adressa un regard noir.

- Il faut croire que c'est là toute la profondeur du véritable art divinatoire, ma chère ! lança le professeur McGonagall, agacée, en regardant Harry avec inquiétude.

Le professeur Trelawney, visiblement vexée, n'ajouta pas un mot et porta un intérêt soudain à ses nombreux bracelets.

Les douze membres de l'Ordre du Phénix poursuivirent leur conversation durant encore plusieurs heures, établissant ainsi toutes les stratégies dont Voldemort pourrait user pour contrer leur projet. Ils évaluèrent ensuite tous les risques dont ils devaient se protéger.

La nuit était déjà bien avancée lorsque le professeur Dumbledore demanda si quelqu'un avait quelque chose à ajouter ou souhaitait poser des questions.

- Euh…professeur ? demanda Harry. J'ai compris ce soir que l'Ordre avait une grande puissance, mais serons-nous assez de douze devant Voldemort ? Il doit avoir plus d'une cinquantaine de Mangemorts aujourd'hui et…

- Non, Harry, répondit calmement Dumbledore en souriant. Il est bien évident que nous ne ferions pas le poids, mais d'autres sorciers vont nous rejoindre. Il est important, toutefois, que l'Ordre se place en première ligne et reste bien groupé car alors, nous bénéficierons de toute notre force et offrirons une protection efficace aux sorciers qui se seront joints à nous.

Harry acquiesça en silence pour indiquer qu'il avait compris.

- Bien, reprit Dumbledore. Si personne n'y voit d'objection, nous pourrions peut-être en rester là ?

Personne n'avait rien à ajouter et tous se levèrent et se dirigèrent vers la porte en échangeant leurs impressions.

Au fur et à mesure que les sorciers avançaient vers la sortie, les chandelles fixées aux murs s'éteignirent d'elles-mêmes, en commençant par celles du fond, sous le regard émerveillé de Harry qui jeta un dernier coup d'oeil à la salle somptueuse. Les chandelles les plus proches de la porte s'éteignirent à leur tour et Dumbledore, qui fut le dernier à sortir, referma la lourde porte de chêne qui disparut, elle aussi, pour laisser place à un mur de pierres ordinaire.

- Les mystères de Poudlard…, constata Dumbledore avec un hochement de tête amusé à l'attention de Harry.

Harry lui rendit son sourire et suivit le directeur jusqu'au hall du château où l'attendait Sirius.

- Encore un petit tour en briquet ? plaisanta celui-ci en le voyant arriver.

- Il va bien falloir ! admit Harry en soupirant.

Dumbledore les salua chaleureusement et leur donna rendez-vous à la date du 14. Les yeux pétillants par-dessus ses lunettes, il avait ajouté en regardant Sirius que, d'ici là, la vie valait la peine d'être vécue et Sirius avait adressé un signe de tête complice au vieil homme avant de sourire à Harry.

Ils arrivèrent à Privet Drive et, cette fois, Harry refusa poliment l'invitation à dîner de Sirius. Il se sentait épuisé et tout se bousculait à nouveau dans sa tête. Il préférait rentrer et s'enfoncer sous les couvertures de son lit.

Malgré la fatigue, il resta éveillé encore un long moment et pensait à Hermione. Pourquoi n'avait-il pas essayé d'en savoir un peu plus lorsqu'elle lui avait dit que l'Arithmancie était une matière passionnante ? Le sommeil reprit finalement ses droits et Harry finit par s'endormir sans parvenir à se trouver une bonne excuse pour répondre à sa question.

Chapitre 13 - La colère des Ordres

Dès le lendemain, Harry se rendit compte que Sirius avait déjà établi un programme chargé pour lui changer les idées. Il soupçonnait même son parrain d'avoir passé la nuit entière à élaborer son plan. Quoi qu'il en soit, ils passèrent les jours suivants ensemble et Harry songea alors qu'il n'avait jamais été aussi heureux. Même s'il avait eu, à plusieurs reprises, l'impression d'avoir déjà vécu certains de ces bons moments, qui lui revenaient en mémoire depuis maintenant plus d'une semaine, il lui était tout de même agréable de les revivre encore et il aurait voulu qu'ils ne s'arrêtent jamais.

Les Dursley, trop contents de se voir enfin débarrassés de ce neveu encombrant, avaient indiqué à Sirius qu'il n'était pas nécessaire qu'il rentre tous les soirs et, qu'en fait, il pouvait même ne pas revenir du tout. Ils avaient quand même suggéré que ce serait bien que Harry reste dans les parages et s'étaient empressés de comptabiliser les chambres vides dont devait disposer Mrs Figg. Mais Sirius s'était montré intraitable et avait argumenté que, puisque Harry était pratiquement absent toute la journée et à la plupart des repas, ils pouvaient au moins l'accueillir pour la nuit.

Dudley, quant à lui, n'avait pas su tirer son épingle du jeu et s'était vu, durant toute une journée, apprendre les rudiments du fonctionnement d'une tondeuse à gazon. Même la tante Pétunia n'avait rien pu faire devant la détermination de son mari qui avait hurlé qu'il n'était pas question qu'il s'en charge lui-même. Dudley eut beau se rouler par terre, menacer de cesser de s'alimenter et même de refuser à tout jamais de retourner à Smelting, il avait fini par accepter son sort et avait si bien tondu la pelouse, ce jour-là, qu'il en avait même fait disparaître de nombreux bégonias, à la plus grande fureur de sa mère.

Harry, qui en avait assez d'entendre les rugissements de sa tante contre son cousin, décida d'aller voir Sirius qui, d'après les coups de marteau qu'il percevait depuis la fenêtre de sa chambre, devait être en train de réparer quelque chose dans le garage de Mrs Figg.

Il dévala l'escalier en annonçant à son oncle, à quatre pattes dans le placard de l'entrée, qu'il allait chez la voisine jusqu'à l'heure du dîner. L'oncle Vernon se cogna la tête en voulant se relever et Harry n'essaya pas de comprendre le sens des paroles qu'il grognait déjà.

La porte du garage était ouverte et Harry vit son parrain s'acharner sur un vieux grille pain.

- Si tu cherches à en faire un cendrier, je peux peut-être t'aider, plaisanta Harry en voyant la taille du marteau qu'il tenait à la main.

- Ah, salut Harry, répondit distraitement Sirius qui paraissait préoccupé. Non, ce truc ne remarchera jamais de toute façon. Je lui en achèterai un autre.

Ils étaient debout face à face et Harry voyait bien que quelque chose n'allait pas.

- Qu'est-ce qu'il y a ? demanda Harry en retrouvant son sérieux.

Sirius, qui ne pouvait soutenir le regard de Harry plus longtemps, se retourna et regarda le grille pain d'un air absent.

- Bon d'accord, lâcha-t-il enfin en jetant le marteau sur le plan de travail devant lui. Viens t'asseoir.

Ils s'installèrent sur une pile de cageots remplis de vieux bouquins.

- Je ne sais pas si c'est le bon moment pour te parler de ça, mais je ne sais même pas s'il y en aura un meilleur qu'un autre de toute façon. Il faut que tu saches Harry, enfin… Bon, voilà que je ne sais pas par où commencer, dit-il en regardant ses mains qu'il tripotait nerveusement.

Il soupira profondément.

- Il y a seize ans, quand tes parents ont décidé de se servir du sortilège de Fidelitas, c'est moi qui devais être le Gardien de leur secret. Ton père a longuement insisté, il m'a presque supplié même, pour que j'accepte et quand il a vu que j'étais un peu réticent, il n'a pas compris. Ça m'a fait mal, très mal de le voir dans cet état parce que c'était vraiment le meilleur ami que j'ai jamais eu et j'avais l'impression de le laisser tomber, et même de le trahir d'une certaine manière. Seulement, comme tu le sais maintenant, je faisais déjà partie de l'Ordre du Phénix à cette époque et Remus aussi. Lily et James ne le savaient pas parce que nous devions garder notre appartenance à cet Ordre secrète et Dumbledore voulait qu'ils renforcent leur protection avant de leur proposer de nous rejoindre. Seuls les membres se connaissent entre eux et si aujourd'hui on est obligé de faire une entorse au règlement, comme tu l'as appris lors de la réunion, c'est parce que Voldemort a rassemblé beaucoup trop d'adeptes pour qu'on se pointe là-bas à douze. Enfin bref, Dumbledore a demandé à me voir après avoir parlé de ce sortilège à tes parents. Il m'a dit qu'il était sûr que James voudrait que ce soit moi qui leur serve de gardien. Seulement ça posait un problème parce que si j'avais accepté et que Voldemort ait réussi à me capturer, il aurait essayer d'annuler le sortilège, sans y parvenir bien sûr, mais il aurait pu découvrir aussi que j'appartenais à l'Ordre et ça aurait été facile de me faire trahir les onze autres, Harry. Voldemort et sa bande usaient de procédés dont tu n'as pas idée pour faire parler leurs victimes, et tu sais aujourd'hui que, sans cette union, cette vermine aurait pu faire n'importe quoi sans personne pour jamais l'arrêter. Dumbledore m'a alors conseillé un coup de bluff. Il devait faire courir le bruit que c'était bien moi que tes parents avaient choisi et de mon côté, je devais les convaincre de choisir quelqu'un que personne n'aurait soupçonné et informer Dumbledore de mon choix une fois le sortilège pratiqué. J'ai donc choisi Peter, et au cas où je me fasse prendre, je devais essayer de gagner du temps et donner Peter à Voldemort pour ne pas prendre de risques. Dumbledore, en voyant que j'avais disparu, aurait été chercher Peter et tes parents pour les mettre en lieu sûr. Quant à moi, je devais faire croire à Voldemort que j'étais prêt à le rejoindre, pour rester en vie bien sûr, et j'aurais pu m'enfuir après ou l'espionner pour le compte de Dumbledore si j'avais réussi à gagner sa confiance. Ton père ne m'en aurait pas voulu d'avoir lâché le morceau, il aurait compris, mais sacrifier l'Ordre, ça on ne pouvait pas se le permettre.

- Ça aurait pu marcher, reconnut Harry en regardant le sol d'un air songeur.

- Ouais, mais on a jamais pensé que Peter puisse être de l'autre côté, on s'est fait avoir à notre propre piège, et tout s'est passé si vite après que je n'ai même pas eu le temps de prévenir Dumbledore que c'est Peter que j'avais choisi. Ça fait des jours que je retourne tout ça dans ma tête, et je me dis que j'aurais mieux fait d'écouter ma conscience à l'époque et ne pas laisser tomber un ami…un frère, ajouta-t-il d'une voix tremblante.

- Tu n'as rien à te reprocher, admit Harry. Dumbledore avait raison, préserver l'Ordre était une priorité.

Pour la première fois depuis près d'une demi-heure, Sirius consentit à regarder Harry dans les yeux.

- Tu es vraiment un drôle de petit bonhomme, Harry, murmura Sirius dont la voix tremblait toujours. Tes parents sont morts à cause de moi et toi, tu restes fataliste devant la vérité.

- Il n'y a rien d'héroïque là-dedans, fit remarquer Harry. Vous étiez tous au courant des risques que vous preniez. Et je n'ai pas connu mes parents, c'est donc plus facile de ne pas les regretter…

Ils restèrent un instant l'un contre l'autre sans se parler. Sirius se décida à réagir le premier.

- Bon, soupira-t-il en posant les mains sur ses genoux. J'ai vidé mon sac maintenant, et je ne veux pas que tu penses à tout ça pour l'instant, Harry. Si Dumbledore apprenait que je t'en ai parlé dans un moment pareil… Dans deux jours, il va falloir être prêt. Tu devrais rentrer. Si tu veux qu'on en reparle plus tard…je serai là, ajouta-t-il en regardant Harry comme si c'était son fils.

Ils se levèrent ensemble et Sirius enlaça Harry dans une puissante étreinte. Les larmes aux yeux, il lâcha l'adolescent et lui ébouriffa les cheveux d'un geste affectueux. Harry lui adressa un léger sourire et retourna chez les Dursley où la tante Pétunia semblait s'être enfin calmée. Harry assista au dîner sans prononcer un mot. Il monta dans sa chambre et s'allongea sur son lit.

La date du 14 arriva enfin et Sirius vint chercher Harry pour l'emmener à Poudlard. Ils arrivèrent dans le hall du collège où, cette fois, régnait une certaine agitation.

Apparemment, une vingtaine de personnes étaient réunies dans la Grande Salle et d'autres discutaient dans le hall. Harry reconnut plusieurs sorciers autour de lui.

Mr Weasley vint à sa rencontre et le salua chaleureusement. Un peu nerveux, il lui avait raconté que Molly avait été dans tous ses états lorsqu'elle avait appris ce qu'ils s'apprêtaient à faire. D'autres personnes, que Harry avait déjà vues à la Coupe du Monde de Quidditch, vinrent les saluer eux aussi. Le professeur Rogue, un peu plus loin, l'avait regardé un instant mais s'était abstenu de s'approcher davantage. L'adolescent aurait été bien incapable de déceler les pensées du professeur lorsqu'il avait croisé son regard. Quelques-uns des membres de l'Ordre du Phénix étaient là également.

Dumbledore, attiré par le petit groupe qui s'était rapidement formé autour d'eux, vint au devant de Harry et l'entraîna à l'écart.

- Je dois partir, Harry, pour localiser Voldemort, commença le professeur. Mais avant, je dois te remettre quelque chose.

Il sortit de sa poche une petite pierre blanche et rugueuse, aux reflets gris scintillants, montée sur une chaînette d'argent, qu'il tendit à Harry.

- Ceci est une Pierre de Lune, poursuivit Dumbledore. Elle te permettra de me rejoindre lorsque j'aurai repéré Voldemort. Toutes les personnes ici présentes en possèdent une également et lorsque la pierre brillera d'une lumière intense, il te suffira de te concentrer sur moi, en la serrant dans ta main, et vous apparaîtrez tous à mes côtés. Cela risque d'être un peu long, Harry, c'est pourquoi tout a été prévu dans la Grande Salle si tu veux manger quelque chose en attendant. Je dois y aller maintenant, ajouta-t-il en posant une main sur l'épaule de Harry. Tu as des questions ? Tu ne veux toujours pas de rendre là-bas au moyen du don que tu possèdes ? demanda-t-il en baissant la voix.

- Non. On en a déjà discuté, professeur, répondit Harry.

- Bien. Alors à tout à l'heure, indiqua Dumbledore, une lueur de fierté dans les yeux.

Il traversa le hall du château et sortit sur le perron en refermant la porte derrière lui. Sirius avança vers Harry et l'entraîna dans la Grande Salle où ils saluèrent encore d'autres sorciers.

Des groupes se formaient ça et là et se défaisaient au fur et à mesure que les gens apercevaient des connaissances. Harry discutait avec quelques-uns des employés du ministère de la Magie que Mr Weasley lui avait présentés, de loin, lors de la Coupe du Monde de Quidditch, tandis que Sirius avait rejoint un autre groupe et s'entretenait avec Rogue.

Mr Weasley fit son entrée dans la salle et se dirigea vers Sirius, à quelques mètres de l'entrée.

- Est-ce que vous savez où est Harry en ce moment ? demanda-t-il en le cherchant des yeux.

Sirius jeta un regard circulaire parmi la foule et indiqua à Mr Weasley qu'il discutait un peu plus loin.

- Ah, merci ! dit Mr Weasley en avançant vers Harry qu'il poussa dans un coin de la pièce. J'ai quelque chose pour toi, lui confia-t-il à voix basse en sortant un parchemin de sa poche. Je n'ai pas pu te le remettre avant, tu étais pris d'assaut ! fit-il remarquer en lui adressant un clin d'œil malicieux.

Harry prit le parchemin d'un air intrigué en regardant Mr Weasley qui s'éloignait déjà. Sirius, et plusieurs personnes alentour, observaient Harry du coin de l'oeil qui commençait la lecture de sa lettre avec sérieux. C'était une lettre de Ron qui l'informait qu'il était au courant des projets de l'Ordre du Phénix et lui rappelait son amitié en lui souhaitant bonne chance. Il ajoutait aussi qu'à ce sujet, il en aurait une bonne à lui raconter. Même Hermione avait écrit quelque chose et lui recommandait d'être prudent. Harry aurait pu en avoir les larmes aux yeux s'il n'avait pas découvert, au bas du parchemin, un petit encouragement que Fred et George avaient rédigé avec tout le savoir-faire dont étaient capables les jumeaux. Harry eut un sourire ému, sous le regard soulagé de ses observateurs, et rangea le parchemin dans sa poche.

Sirius s'avança vers lui et s'assura que tout allait bien mais ils furent interrompus par Mondingus Fletcher qui agitait les bras dans tous les sens en marmonnant des paroles agacées.

- Ah ! La sale bête ! pesta Mr Fletcher. Ce scarabée pourrait regarder où il vole ! Il a failli m'atterrir en pleine figure ! tonna-t-il en agitant son chapeau avec rage pour essayer d'intercepter le gros insecte.

- Non ! hurla Harry qui comprit tout à coup et se précipita vers Mondingus à grandes enjambées. Je vais le remettre dehors, s'empressa d'expliquer Harry en attrapant le scarabée au vol, alors que toute la salle avait les yeux rivés sur lui d'un air interloqué.

Il sortit de la pièce en maintenant l'insecte au creux de ses mains et alla s'isoler dans le couloir qui menait aux cuisines. Il posa le scarabée sur le sol qui prit instantanément l'apparence de Rita Skeeter.

- Ah ! Se sacré Mondingus a bien failli m'avoir ! lança Rita, folle de rage en redressant son chignon de travers. On n'a pas idée aussi de porter un chapeau aussi gros qu'une soupière !

- Rita, qu'est-ce que vous êtes venue faire ici ? demanda Harry qui s'énervait aussi. Ça grouille de sorciers dans le coin, vous voulez vous faire repérer ou quoi !

- C'est ce que je vois ! s'indigna-t-elle. Seulement avant de m'engouffrer par la fenêtre, je ne le savais pas, figure-toi ! Bon, ajouta-t-elle en se calmant enfin. Il se trouve que, par une sorte de hasard, j'ai eu vent de vos projets et je suis venue avertir Dumbledore que Tu-Sais-Qui a rassemblé ses partisans dans une espèce de clairière et qu'ils sont en train de s'entraîner à préparer leur future attaque, alors il va falloir être prudents parce que vous allez débarquer quand ils seront en pleine action et…

- Par une sorte de…, vous ne manquez pas d'air ! fit remarquer Harry en devinant que Rita les avait espionnés eux aussi. De toute façon Dumbledore n'est pas là, objecta Harry. Il est parti en reconnaissance et nous devons le rejoindre d'une minute à l'autre.

- Dans ce cas, vous êtes prévenus ! répliqua Rita. Oh, c'est pas tout ça, dit-elle en regardant sa montre. Mais il faut que j'y aille !

Elle se transforma à nouveau, avant même que Harry ait pu ajouter quoi que ce soit, et s'envola vers la Grande Salle pour ressortir du château.

Harry, le teint livide, retourna dans la Grande Salle où était à présent réunis tous les sorciers qui le regardaient entrer en chuchotant avec inquiétude. Le professeur McGonagall se rua sur Harry qui n'eut pas le temps de lui parler car, au même moment, toutes les Pierres de Lune, que les sorciers portaient autour du cou par-dessus leurs vêtements, s'illuminèrent en même temps. Un silence de plomb s'installa parmi la foule et le professeur McGonagall indiqua à Harry, d'une voix tremblante, qu'il était temps d'y aller et lui rappela qu'il devait se concentrer sur Dumbledore de toutes ses forces en tenant la pierre dans sa main. Harry serra la pierre très fort et se concentra du mieux qu'il pût.

Les onze membres de l'Ordre du Phénix, et une trentaine de sorciers, arrivèrent au milieu d'une clairière entourée d'une forêt à la végétation dense. Un hibou vola au-dessus d'eux pour rejoindre le couvert des arbres. Les rayons du soleil, que filtraient quelques nuages, illuminaient les lieux où tout était étrangement calme.

Aucun chant d'oiseau ne troubla le silence qui s'installa lorsque Lord Voldemort, entouré d'une cinquantaine de Mangemorts, se retourna et s'aperçut de la présence des sorciers placés en arc de cercle devant lui que Harry, en son centre, devançait de quelques pas. Albus Dumbledore arriva derrière eux et rejoignit le cercle.

Le Seigneur des Ténèbres fut tout d'abord surpris, puis tourna la tête vers ses Mangemorts avec un rire forcé. Il avança lentement, tout en gardant ses distances, pour venir faire face aux sorciers qui le regardaient sans bouger.

- Tiens donc, dit-il de sa voix aiguë en souriant toujours. Voyez-vous ça, l'Ordre du Phénix dans toute sa splendeur… !

Quelques rires coururent ça et là dans les rangs des Mangemorts. Voldemort s'attarda un instant sur Harry qui soutenait le regard rougeoyant du Seigneur des Ténèbres.

- Un gamin de seize ans, reprit-il lentement, et quelques vieux croûtons, voilà qui devrait m'impressionner je suppose !

Des rires raisonnèrent à nouveau parmi les Mangemorts.

- Nous n'étions pas si nombreux la dernière fois qu'on s'est vu, fit remarquer Harry d'une voix dure.

Le sourire s'effaça du visage de Voldemort qui regardait Harry avec défi.

- Oui ! Mais tu n'as pas réussi à empêcher mon retour pour autant, répondit-il d'une voix sifflante en hochant doucement la tête.

- La terreur que j'ai vue dans tes yeux, ce jour-là, a suffit à renforcer ma détermination, Tom, lança froidement Harry qui restait imperturbable malgré la douleur qui lui traversait le front.

Voldemort fut profondément offensé à cette remarque et ses Mangemorts commençaient à s'agiter. Certains avaient déjà les mains dans leurs poches, prêts à sortir leurs baguettes.

- Mais aujourd'hui, rien ne pourra m'arrêter, assura Voldemort à l'attention de tous. Pas même quelques sorciers puissants qui osent venir me défier jusqu'ici.

N'y tenant plus, un des Mangemorts sortit sa baguette et la dirigea vers Harry. Mais l'adolescent fut plus rapide.

- Expelliarmus ! s'écria-t-il en pointant sa baguette sur le Mangemort qui fut projeté dans les airs et retomba un peu plus loin, inanimé.

Voldemort tourna la tête vers l'homme qui gisait sur le sol. Puis reporta son attention sur Harry qu'il regarda d'un air faussement impressionné.

- Avec un seul, c'est facile, Harry, fit-il remarquer avec un sourire cruel. Mais si l'on considère que nous sommes un peu plus de cinquante contre une trentaine et des poussières…

- L'année dernière j'ai eu quelques cours annulés qui m'ont permis de m'entraîner. Tu veux voir, Tom ?

Cette fois, ce fut parmi les membres de l'Ordre du Phénix qu'il y eut quelques mouvements. Les professeurs parurent surpris à cette remarque. Sauf Albus Dumbledore qui regardait Harry avec une lueur de fierté dans les yeux. Mais il remarqua aussi la tension grandissante qui montait dans le camp adverse.

- Ne t'occupe pas des Mangemorts, Harry, l'Ordre le fera, lui glissa Dumbledore à l'oreille.

Tout se passa alors en un éclair. Voldemort sortit sa baguette magique de sa poche, tandis que Harry brandissait la sienne.

- Avada Kedavra ! hurla Voldemort.

Alors que Harry s'écria, Inversio ! Un éclair de lumière verte s'échappa de la baguette du Seigneur des Ténèbres, tandis qu'un intense filet de lumière blanche jaillit de celle de Harry. Les deux rayons aveuglants s'entrechoquèrent enfin et les deux baguettes émirent un cri assourdissant. Ils résistèrent un instant l'un contre l'autre et, de part et d'autre des deux camps, personne n'osait bouger et tous contemplaient la scène avec des visages ébahis. On aurait dit qu'une tempête s'était levée tout à coup, et les deux sorciers, dont il émanait une puissance phénoménale, étaient pris dans tourbillon de vent.

Peu à peu l'éclair blanc gagna du terrain sur le vert et Voldemort, bien décidé à ne pas s'en laisser compter cette fois, resserra un peu plus la main sur sa baguette qui vibrait déjà avec une plus grande intensité que celle de Harry. Puis, l'éclair blanc repoussa le vert avec une rapidité surprenante vers celui qui l'avait envoyé.

Ce qui suivit alors laissa tout le monde sans voix. L'éclair blanc toucha enfin la baguette de Voldemort et celui-ci fut enveloppé d'un halo lumineux d'un vert intense qui ne dura qu'une fraction de seconde et laissa place à une brume grisâtre, qui s'éleva à quelques mètres du sol, au milieu de laquelle se dessinait clairement le visage, tordu par la douleur, du Seigneur des Ténèbres. Sa baguette magique tomba à terre et, impuissant, il ne put que contempler ce qui se déroulait sous ses yeux luisants de colère.

Les Mangemorts, tout comme les membres de l'Ordre du Phénix, aidés des sorciers restés en arrière, brandirent leurs baguettes les uns contre les autres et une avalanche d'éclairs de couleurs différentes fusaient de toute part. Les sortilèges des membres de l'Ordre dégageaient une telle énergie que Harry en était stupéfait.

Toujours au premier rang, il se sentit violemment attiré vers l'arrière. Une main puissante l'avait attrapé par le col de son pull et Severus Rogue le projeta sur le sol. Harry se retrouva allongé sur le dos, sa baguette lui échappa des mains et tomba un peu plus loin. Il ne voyait rien de la scène, protégé par le mur que formaient les membres de l'Ordre du Phénix devant lui et qui ripostaient avec vigueur aux attaques des Mangemorts. Mais un sortilège, qu'il parvint à esquiver, faillit l'atteindre et lui brûla le bras en déchirant sa manche.

Harry aperçut deux sorciers qui avaient lévité mais ils retombèrent rapidement sous l'effet des sortilèges qu'ils s'étaient lancés. Voldemort, qui survolait le champ de bataille, vociférait des ordres recouverts par le vacarme que produisait l'affrontement.

Harry fut horrifié de constater que plusieurs sorciers, et quelques-uns des membres de l'Ordre du Phénix, étaient allongés par terre et il était évident que plusieurs d'entre eux étaient morts, tandis que d'autres gisaient sur le sol en gémissant de douleur. Il vit qu'il en était de même dans le camp des Mangemorts dont certains commençaient à transplaner pour s'enfuir. Il fallait agir. Sans réfléchir, il se releva d'un bond et ramassa sa baguette.

- Poussez-vous ! hurla-t-il. Mais poussez-vous donc !

Dumbledore se retourna et lui demanda de ne pas bouger, tandis que Rogue, la baguette à la main, plongea à plat ventre pour échapper à un sortilège. Un Mangemort s'avançait vers lui et Harry se jeta aux côtés du professeur et lui plaqua le poignet au sol. Il brandit sa baguette en direction des quelques Mangemorts qu'il restait.

- Stupéfix numéralis, s'écria-t-il.

L'éclair engendré par le sortilège atteignit le Mangemort le plus proche, puis ricocha à une vitesse impressionnante sur la dizaine de partisans du Seigneur des Ténèbres qui n'avaient pas encore transplané. Ils se figèrent les uns après les autres, et tout était fini.

Harry roula sur le côté et resta assis par terre, la tête entre les mains. La douleur de sa cicatrice ne l'avait pas quittée et avait même redoublé d'intensité depuis quelques minutes. Il en comprit la raison en relevant la tête, tout comme le faisaient déjà les membres de l'Ordre depuis quelques instants.

Lord Voldemort, qui ondulait dans les airs, regardait Harry avec colère. Une lueur féroce illuminait ses yeux rouges et, le cou tendu vers le ciel, il émit un long hurlement de rage avant de s'enfuir vers les profondeurs de la forêt environnante.

Des sorciers se relevèrent lentement, certains en évaluant leurs blessures, mais tous restèrent silencieux, abasourdis par ce qu'ils venaient de subir.

- Professeur, dit alors l'adolescent en regardant Dumbledore, tandis que Rogue se relevait lui aussi et regardait Harry de travers. Qu'est-ce que ça veut dire… ? Comment se fait-il que…

- Ah, Harry, soupira le vieil homme. Je crois qu'il n'y a qu'une seule explication : Lord Voldemort a dû parvenir à retrouver l'immortalité, je le crains. J'aurais dû m'en douter…, il n'aurait jamais pris le risque de mettre son plan à exécution si cela n'avait pas été le cas…

Dumbledore pointa sa baguette sur les Mangemorts toujours immobilisés et les ligota solidement de la tête aux pieds. Puis il donna des instructions pour qu'ils soient ramenés à Poudlard et enfermés dans les cachots en attendant l'arrivée de Cornelius Fudge qu'il informerait dès son retour. Il se dirigea vers les membres de l'Ordre et les sorciers toujours étendus sur le sol, et prodigua quelques soins pour calmer leurs blessures.

Il se releva enfin, et avança vers Harry qui frottait doucement sa cicatrice et constatait les dégâts.

- Il ne sert à rien de rester ici plus longtemps, Harry, dit-il d'une voix douce. Nous allons retourner au château.

- J'ai toujours votre pierre, professeur, fit remarquer Harry en enlevant la chaîne qu'il portait autour du cou.

Dumbledore le regarda un instant avec une expression étrange.

- Après ce que tu viens de faire, Harry. Je suis sûr que tu sauras parfaitement transplaner…sans même avoir appris, ajouta-t-il le regard malicieux. Concentre-toi sur mon bureau, cela devrait suffire…

Harry regarda la pierre blanche qu'il tenait au creux de sa main, et la tendit au vieil homme en lui rendant son sourire.

Chapitre 14 - La scellée des destins

Harry se concentra de toutes ses forces sur le bureau du directeur et une douce plainte, semblable au chant du phénix, lui indiqua qu'il avait réussi.

Il ouvrit les yeux et vit Fumseck, sur son perchoir, qui le regardait de ses yeux bienveillants. Albus Dumbledore était là, lui aussi, ainsi que la plupart des membres de l'Ordre et des sorciers qui les attendaient. Dumbledore s'assura auprès d'eux que les Mangemorts étaient bien conduits aux cachots, comme il l'avait demandé, et que les blessés étaient acheminés sans problèmes à l'infirmerie. Plusieurs approuvèrent d'un signe de tête.

- Assieds-toi, Harry, l'invita Dumbledore qui s'installa derrière son bureau. Severus, s'il vous plait, voudriez-vous avoir l'obligeance d'aller à l'infirmerie et demander à Mme Pomfresh ce qu'il faut pour le bras de Harry ?

Le professeur Rogue acquiesça et sortit de la pièce.

- Ça va, Harry ? demanda simplement Dumbledore.

- Oui, professeur, répondit l'adolescent qui paraissait préoccupé.

- Une fois de plus, reprit Dumbledore. Tu as fais preuve d'un grand courage et d'une grande force et je suis fier de toi. Tu as usé d'actes de haute magie que bon nombre d'entre nous seraient bien incapables d'accomplir. L'usage de l'Inversion des Sortilèges suppose que celui qui l'emploi soit assuré d'avoir plus de puissance que son adversaire, sans quoi, il ne peut avoir aucun effet… Quant à stupéfixer une dizaine de personnes…, ajouta-t-il impressionné.

- Ce qui n'a pas suffit à éviter la perte de plusieurs d'entre nous, fit remarquer Harry avec amertume.

- Personne ne doit s'en vouloir pour cela, lui assura Dumbledore. Nous savions que c'était inévitable et nous y étions préparés, Harry.

Severus Rogue entra à nouveau dans la pièce. Il tenait à la main un petit pot contenant une pâte orange qu'il donna à Harry et alla s'appuyer contre une table, les bras croisés, près du bureau du directeur.

- Tu parais bien soucieux, Harry, remarqua Dumbledore. Tu penses encore à ces…

- Non, professeur, assura l'adolescent qui fronçait les sourcils en regardant le sol. C'est autre chose.

Dumbledore n'insista pas et le regarda un instant, une étrange lueur dans les yeux.

Soudain, la porte du bureau s'ouvrit à la volée. Hagrid entra en s'excusant de ne pas avoir frappé et s'arrêta devant Harry.

- Nom d'une citrouille ! lança-t-il en reprenant son souffle. Je n'arrivais pas à y croire. Il y a des gens là dehors qui disent que Vous-Savez-Qui a encore disparu !

- C'est vrai, Hagrid, c'est vrai, confirma Dumbledore qui souriait devant l'attitude du géant.

- C'est encore à toi qu'on doit toute cette agitation qui rend les gens euphoriques dans toute la région ? demanda-t-il en se tournant à nouveau vers Harry.

- A nous ! rectifia l'adolescent avec un léger sourire.

- Oh, bon sang, tu t'es encore blessé à ce que je vois ! constata Hagrid en regardant Harry qui badigeonnait son bras.

- Ce n'est rien, assura-t-il. Madame Pomfresh fait des miracles.

- Encore heureux ! Mais à ce rythme-là, tu vas finir par avoir testé toute la quincaillerie que cette femme cache dans ses placards ! fit-il remarquer d'un air entendu.

- Ben, ça…j'avais pas encore essayé, indiqua Harry en regardant son bras.

- Ah bon ! plaisanta le géant d'un ton bourru. Je crois pourtant me souvenir, qu'un jour, un gros vilain dragon…

Il s'interrompit en voyant le sourire s'élargir sur le visage de Harry.

- Oh, c'était rien, affirma Harry. Ce n'était qu'une égratignure et Madame Pomfresh a pu arranger ça avec un coup de baguette magique.

- Je sais bien mon bonhomme. Je voulais juste te voir sourire un peu, dit-t-il en lui ébouriffant les cheveux. Bon…, je ne vais pas vous déranger plus longtemps, indiqua le géant un peu gêné en voyant que tout le monde l'observait. Est-ce que tu voudrais bien venir prendre une tasse de thé dans ma cabane…avant de repartir ?

Harry approuva d'un signe de tête et Hagrid sortit en s'excusant de son intrusion auprès des quelques personnes présentes dans le bureau.

- Bien, reprit Dumbledore une fois que Hagrid eut refermé la porte derrière lui. Il est certain que nous pouvons nous réjouir de ce qui s'est passé aujourd'hui…, même si cela nous ramène au point de départ, constata-t-il en soupirant. Cependant, il ne faut pas négliger le fait que plusieurs Mangemorts ont réussi à s'enfuir et que, cette fois, ils pourraient mettre un peu plus d'ardeur à essayer d'aider leur maître.

- Je peux les retrouver, assura Harry avec détermination. Je peux même les ra…

Il se tut en voyant l'expression étrange qu'affichait le visage de Rogue. Harry comprit alors que le professeur ne s'était jamais douté que c'était lui qui avait été le chercher l'année dernière, lorsqu'il avait disparu. Harry s'en voulait déjà, il ne voulait surtout pas que Rogue puisse penser qu'il avait une dette envers lui.

Dumbledore, dont le regard pénétrant passait de l'un à l'autre, décida d'intervenir.

- Non, Harry. Je crois que tu en as bien assez fait comme ça, et je ne me sens pas le droit de t'en demander davantage.

- Professeur, plusieurs d'entre eux vont essayer de s'en prendre à vous tous et à moi, j'en suis sûr, indiqua judicieusement Harry. Et il n'est pas question que je reste là, à attendre qu'ils nous tombent dessus. Vous savez que je ne risque rien !

Dumbledore semblait réfléchir tandis que les autres sorciers les regardaient sans comprendre.

- De toute façon, tu ne pourras pas t'en empêcher, n'est-ce pas, Harry ?

Harry haussa les sourcils avec un hochement de tête entendu.

- Dans ce cas, céda Dumbledore. Je ferai appel à toi en temps voulu. Mais promets-moi de ne rien tenter tout seul.

- Je vous le promets, professeur, affirma Harry avec sincérité.

- Très bien. Je crois que tu peux rejoindre Hagrid qui doit t'attendre avec impatience, proposa Dumbledore, le regard malicieux. Et je t'attends de pied ferme pour ta sixième année le 1er septembre…

Harry se leva et salua les autres sorciers en se dirigeant vers la porte.

- Harry ! l'interpella Dumbledore.

L'adolescent se retourna.

- Tu feras attention de ne pas te blesser cette fois…, recommanda-t-il en souriant.

Harry, qui ne voulait surtout pas voir la tête de Rogue à cette remarque, adressa un bref sourire à Dumbledore et sortit pour se rendre chez Hagrid.

Le château était désert et Harry repensait aux étranges images qui étaient apparues dans sa tête, plus nettement encore qu'elles ne l'avaient jamais été, lorsqu'il était arrivé dans le bureau de Dumbledore et qui l'avaient préoccupé jusqu'à l'arrivée de Hagrid. A présent qu'il était seul et parcourait les couloirs silencieux du château, elles revenaient plus nombreuses, comme une deuxième vie qui se mélangeait à la sienne. Il revoyait très nettement Dumbledore, penché sur son lit, qui prononçait des paroles graves et lui souhaitait bonne chance. Ses parents, assis sur un canapé de cuir blanc, qui paraissaient soucieux. Une simple feuille de papier, le lendemain de la rentrée, qui avait fait battre son cœur à tout rompre dans la poitrine. Dumbledore à nouveau, derrière un bureau qu'il n'avait jamais vu. Une vieille sorcière aux longs cheveux blancs, qui recommandait aux élèves de ne pas oublier la liste complémentaire des ingrédients qui leurs seraient utiles pour préparer le prochain cours de… Non c'était impossible. Jamais à Poudlard on avait enseigné la Magie noire ! Il revit alors la longue table des professeurs où figurait toute une palette de sorciers dignes de faire partie de la petite boutique des horreurs, et les Mangemorts qui gardaient l'accès au parc de l'école.

Il fut sorti de ses pensées par la porte de la cabane de Hagrid qu'il venait de heurter violemment. Le géant vint lui ouvrir, un large sourire illuminait son visage, et Harry chassa définitivement toutes ces images venues d'un autre monde qu'il oublia sans difficulté grâce au bon moment qu'il passa près du géant. Pour l'instant…

Albus Dumbledore poussa la porte de son bureau et se laissa descendre sur l'escalier en colimaçon qui donnait sur un long couloir de pierre. Il marchait seul, dans le silence de l'école, monta plusieurs escaliers et longea d'autres corridors qui le menaient dans une partie isolée du château.

Il s'arrêta devant une porte, dissimulée derrière une haute tenture rouge et or, et entra dans une vaste chambre que les derniers rayons du soleil éclairaient légèrement. Il constata que la pièce était vide, mais n'en fut nullement surpris et, après un rapide coup d'oeil autour de lui, aperçut un morceau de parchemin posé sur un bureau qui occupait un coin de la pièce. Il se dirigea vers le bureau et prit le parchemin qui lui était adressé.

Cher professeur Dumbledore

Je n'ai pas pu m'empêcher d'assister

aux évènements qui se sont déroulés dans une certaine clairière.

Rassurez-vous, je suis resté bien sagement allongé sur mon lit

pendant tout ce temps pour ne pas interférer sur un destin qui, j'en suis sûr,

ne me fera pas regretter les êtres chers que je vais devoir perdre une deuxième fois.

Si vous trouvez cette lettre, cela voudra dire que mon destin a enfin pu rejoindre

 celui du Harry que vous connaissez, et que je continuerai d'exister à travers lui

puisque nous aurons fusionné, comme il l'a fait avec moi dans ma propre réalité.

Je l'ai guidé du mieux que j'ai pu à travers la vie qui a été la mienne et,

 à cet instant, je l'entends qui m'appelle.

Aussi, je vais devoir abandonner cette plume, qui tremble déjà entre mes doigts,

et laisser s'accomplir la scellée des destins qui permettra à Harry de comprendre enfin

les évènements de ces deux derniers mois.

Le Dumbledore que je connais a remercié Harry avant qu'il ne rejoigne votre monde

et je ressens le besoin d'en faire autant, avec vous, aujourd'hui.

Je vous adresse donc mes remerciements les plus sincères.

Harry Potter

Une larme coula sur la joue du vieil homme qui alla s'asseoir sur le rebord du lit. Il resta ainsi de longues heures, un morceau de parchemin à la main, à méditer sur les curieuses façons qu'avait la vie parfois, de bouleverser l'esprit des gens et de leur infliger des épreuves qui, aussi dures soient-elles, devaient être vécues pour assurer à tous un avenir meilleur.

A des centaines de kilomètres de là, un jeune adolescent, allongé sur son lit, repensait aux drôles de vacances qu'il venait de passer et ne put retenir les larmes qui inondaient ses joues. Il jouait du bout des doigts avec une petite pierre marron, aux reflets gris, qu'il avait trouvée dans sa poche et était sûr que, d'ici peu, il découvrirait comment elle était arrivée là.

Un hululement rassurant raisonna dans la pièce et, aux premières lueurs du jour, le jeune garçon s'abandonna enfin à un profond sommeil.

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Alors, comment vous avez trouvé cette fic ? Moi je l'ai adoré !

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