Chapitre 14: Frustrations, incompréhensions et incertitudes

Prague

Schwarz n'avait pas encore parlé. Il regardait longuement les Dons qui étaient tous assis à la table de réunion. Il se tourna puis se rendit près de la fenêtre. La vue sur les jardins étaient superbe. Cependant, il n'était pas du tout en état d'apprécier ce genre de beauté en ce moment. Il avait été attaqué. Lui, Adolf Schwar. On avait attaqué sa base. Et qui l'avait fait? Oh, c'était bien simple. Les enfants de ces bâtards de pilotes! Ils l'avaient humilié! Tous sur Terre savaient se qui s'était passé sur L-3. Ils voyaient un espoir alors qu'ils devraient se soumettre aveuglément à lui. Ils pouvaient toujours rêver. Il avait l'intention de les ramener à l'ordre. L'ordre... l'Ordre. Son organisation. Il n'avait pas souffert pendant toutes ces années pour voir ses rêves s'effondre. Il allait s'assurer que tout fonctionnerait comme il l'entendait.

Il se retourna vers les Dons qui n'osaient parler. Seul Don Appert ne semblait pas dérangé par tout cela et continuait à s'empiffrer. La tension était palpable dans la pièce et Schwarz aimait ça. Il avait toujours aimé qu'on le craigne. Pour lui, il n'existait pas d'autre manière de se faire respecter. La peur était la seule vraie façon de s'assurer de la loyauté d'une personne. Schwarz s'avança lentement vers la table et arrêta son regard sur Don Forain. Il remarqua que le front de celui-ci était perlé de gouttes de sueur. Il eu un mauvais sourire en coin puis tourna son regard vers son Alter. Gruant le regardait droit dans les yeux sans cilié. Schwarz n'aima pas particulièrement ça. Il détestait lorsqu'on ne baissait pas les yeux devant lui. Il s'avança plus près de Gruant et brusquement frappa la table de ses poings, Gruant sursauta. Schwarz se sentit mieux puis alla prendre sa place au bout de la table. Il s'assit lentement puis pris un document qui se trouvait devant lui et se mit à le feuilleter. Le son que faisait les feuilles que l'on tournait était facilement audible. Le seul autre bruit qui se faisait entendre était celui de Don Appert toujours pas inquiété par ce qui se passait. Schwarz se décida finalement à parler. On devait se faire attendre, mais pas trop.

"Messieurs, avez-vous vu le dossier qui se trouve sur la table?"

Aucun des Dons n'osa répondre sachant très bien que la question n'était pas en fait une vraie question.

Schwarz continua comme si les Dons lui avait répondu. "Et bien oui, moi aussi je l'ai lu. Voyez-vous ça," Il prit le document et montra un chiffre en bas d'une page. "Pouvez-vous lire pour moi ce chiffre, Don Huston."

Don Huston ajusta ses lunettes de lecture. "100."

El General déposa le document sur la table et croisa ses bras sur celui-ci. "100. 100 quoi? vous me direz. Ah mais! Demandez à ce cher Don Forain. Il vous dira." Il regarda Don Forain. "Répondez."

"Mobile suits. 100 mobiles suits détruits."

"Et combien de machines ont tués mes nouveaux mobile suits, Don Forain?"

"Trois." Forain avala sa salive difficilement. Il sentait la tempête venir.

"Trois!" Schwarz se leva et Forain se dit qu'elle venait d'arriver. "Trois misérables Gundams on détruits mes merveilleuses créations! Alter!"

Gruant sursauta. "Oui, El General."

"Vous serez en charge des colonies, je ne veux plus rien savoir de lui." Il pointa Forain qui se senti tout petit dans ses souliers. "Vous vous occuperez de l'Antarctique, mon cher Forain. L'Espace semble vraiment trop vaste pour vous."

Il se tourna vers les autres Dons. "Les rapports, et vite!"

Don Appert lâcha une fois pour toute sa nourriture pour expliquer à El General que la situation sur Terre n'était pas aussi belle qu'il pouvait le croire. Les gens commençaient à se révolter et ils avaient de plus en plus de difficulté à garder l'ordre. Cette Baronne, dont ils n'avaient toujours pas trouvé l'identité, causait de grave problème partout à travers le monde. Les gens lui étaient loyales et préféraient la torture et la mort plutôt que de la trahir. Schwarz ne sembla pas apprécier recevoir cette information mais il tenta de ne pas le montrer. Il n'allait pas perdre son rêve! Appert continua en lui disant que les camps de concentration fonctionnaient très bien et que les mobiles suits qu'on y construisaient étaient excellents. Don Hoffman, tout en replaçant ses beaux cheveux blonds, ajouta que au Caire la situation était excellente et qu'ils n'avaient pas encore vu d'actions causées par cette supposée Baronne. Il renchérit en disant que les camps de concentration étaient merveilleusement efficaces eux aussi. Don Holberg expliqua qu'il n'avait toujours pas trouvé les responsables de l'attentat contre lui mais que cela ne saurait durer. Schwarz lui fit remarquer qu'il en serait mieux, s'il comptait rester en vie. Don Huston dit à peu près les même choses que Don Hoffman, cela sembla plaire à Schwarz.

Schwarz se leva et regarda à nouveau ses Dons. "Messieurs, vous êtes les hauts commandants de notre Ordre. Je me fie donc sur vous pour tout ramener à l'ordre. N'ayez pas peur de tout utiliser. Combien avons nous déjà de personnes qui nous sont loyales?"

"Près de trois millions, El Général." Répondit Don Appert.

"Excellent. Sur une population de 9 milliards dont 95% ne savent pas se battre, il ne devrait pas y avoir de gros problèmes. Don Holberg, occupez-vous de cette Baronne. Je ne veux plus rien entendre sur elle."

"Oui, El General."

"Partez, maintenant, j'ai besoin de penser seul."

Un à un, les Dons quittèrent la salle et Schwarz se retrouva seul. Il se leva lentement et regarda à travers la fenêtre. Il vit une jeune fille qui s'occupait à planter des fleurs. Elle se tourna vers lui et s'aperçu qu'il la regardait. Mal à l'aise, la jeune fille échappa son pot sur le pavé. Schwarz fronça les sourcils. Il détestait les gens qui faisaient constamment des gaffes. Il pensa à Don Forain, il avait bien fait de s'en débarrasser en Antarctique. Gruant saurait redresser la situation, du moins, il était mieux de le faire... dans son propre intérêt.

~*~

Vaisseau l'Esperanza

Elle sentit sa tête qui la faisait souffrir. Jamais elle n'aurait cru qu'on pouvait ressentir tant de douleur. Elle voulu se toucher le front mais ses bras ne voulaient pas bouger. Elle prit panique. Pouvait-elle bouger ses bras? Elle tenta de lever son bras gauche... sans succès, son bras droit....sans succès. Non! Elle ne pouvait pas être paralysée. Elle se décida à essayer de bouger seulement les doigts. Oui... oui! Elle les sentit bouger tous les cinq de sa main droite.

"Venez-voir! Elle a bougé ses doigts!"

Aurore sentit plusieurs présences près d'elle. Cette voix, elle la connaissait. Qui avait parlé? Elle tenta d'ouvrir les yeux mais sans succès, comme pour ses bras. Elle n'abandonna pas. Elle se ressaya à nouveau et cette fois elle vit des ombres bouger à sa gauche.

"Elle se réveille! Vite!" Cette voix.... elle la connaissait! Alejandro, c'était lui. Elle réussi à clarifier l'image devant elle. C'était bien lui. Il était penché sur elle et la regardait, un énorme sourire en travers du visage.

"Enfin! Tu nous as fait eu de ses peurs!"

Elle essaya de parler, sa voix était très faible. "Ale....Alejandro, c'est toi?" Elle sentit qu'on lui prenait la main.

"Oui, c'est moi." Il tourna la tête. "Venez, elle est réveillée!"

Le visage d'Alejandro fut remplacé par celui d'Érick. Il l'embrassa sur le front. "Aurie! Si tu savais comme tu nous as fait peur!"

Aurore sourit doucement. Elle ne comprenait pas trop ce qui se passait, tout était si flou dans sa mémoire. "Que s'est-il passé Érick... je suis un peu perdue."

Érick sourit et commença à lui raconter comment sa première mission avait mal finie. Il n'oublia pas de mentionner qu'Esteban était celui qui avait tiré du le hangar. Aurore fronça les sourcils. Elle se souvenait de plus en plus. Érick fut rapidement remplacé par Isabelle qui lui raconta comment ils avaient réagit lorsqu'ils l'avaient vue dans cet état. Combien de temps avait-elle été inconsciente? Deux semaines. Deux semaines! Elle soupira et s'excusa de les avoir inquiété. Charlton et Tchen vinrent la voir également. Le seul qui n'était pas là, s'était Esteban. Aurore n'était pas surprise. Érick devait lui en vouloir pour ce qui été arrivé. Esteban préférait l'éviter tout simplement. Après quelques temps, ils la laissèrent se reposer et elle retomba dans un sommeil profond.

~*~

Vaisseau l'Esperanza

Combien de temps avait-il passé là? Il ne s'en souvenait pas. Alice lui avait dit qu'elle s'était réveillée aujourd'hui. Il n'avait pas osé venir la voir pendant le jour. Il risquait de tomber sur Érick. Il ne lui pardonnait pas l'accident. Alejandro avait bien tenté de lui expliquer qu'Esteban n'avait que rempli sa mission, qu'il ne savait pas que le hangar servait en fait de poudrière et non au ravitaillement comme ils l'avaient tous crus. C'était Charlton qui avait calmé Érick. Esteban avait même été surpris à quel point il avait pris sa défense. Il se souvenait de la fureur qu'exprimait le visage d'Érick. Il ne comprenait pas qu'il était lui aussi inquiet et qu'il s'en voulait plus que tout. Si seulement il avait attendu! Il serra le poing puis frappa la porte de la chambre. Il jura. Bravo. Maintenant, elle allait se réveiller. Il regarda le visage endormi. Doucement, il vit les paupières se lever et chercher dans la pièce ce qui l'avait dérangée. Lentement, les yeux rencontrèrent les siens et par l'expression du visage, il vit à quel point elle était surprise de le voir là.

Il baissa le tête et s'avança vers elle. Elle tenta de se relever mais sans succès, elle semblait épuisée. Il s'arrêta près du lit et la regarda sans parler pendant un moment. Elle le regardait en retour. Elle semblait aussi mal à l'aise que lui. Il vit un semblant de sourire apparaître sur son visage.

"Je ne savais pas que tu étais somnambule."

"Je ne suis pas somnambule."

Le sourire disparu et Esteban jura intérieurement. Elle avait tenté de briser la glace entre les deux et lui ne faisait rien pour l'aider. Il regarda maladroitement les appareils attachés à Aurore. Il devait dire quelque chose.

"Esteban." Il retourna son attention sur elle. Elle semblait perplexe. "Que fais-tu ici?"

Il la regarda un moment puis répondit: "Je ne sais pas… vraiment…"

Elle sourit à nouveau et pour la première fois il réalisa comment ce sourire lui avait manqué. "Il est 3 heures du matin, si tu es venu pour me demander de m'entraîner avec toi… " Le ton de la voix était à la blague et Esteban sourit également.

Pendant un moment, ils gardèrent le silence. L'atmosphère n'était plus aussi lourde et Esteban se sentait un peu plus détendu.

Brusquement, il fit quelque chose qu'il n'aurait jamais cru être capable de faire. Il s'assit la main d'Aurore entre les siennes et la serra fortement. La jeune fille ne dit rien et ne fit rien mais son regard était posé sur sa main. Elle ne semblait pas trop comprendre se qui se passait. Esteban sentait son cœur battre dans sa poitrine. Il serra la main encore plus fort.

"Aurore, je suis désolé."

Il lâcha la main aussi rapidement qu'il l'avait prise et se dirigea vers la porte sans rien ajouter.

Elle ne dit rien, elle ne tenta pas de le retenir.

Ce fut la dernière fois qu'Esteban vint la voir durant la nuit. Pendant les 6 semaines que durèrent sa convalescence, Aurore se demanda s'il allait revenir. Il ne revint pas.

~*~

Vaisseau l'Esperanza

Tchen regarda par la fenêtre de sa chambre le vide de l'espace. En fait, comme lui avait expliqué Charlton, ce vide n'était pas vraiment du vide. Des milliards de particules le remplissaient mais on ne les voyait pas. Charlton leur avait parlé des quarks, des particules et de leurs antiparticules, des neutrinos et tout ce tralala. Il avait trouvé le sujet plutôt intéressant et avait demandé à Charlton s'il pouvait lui prêter quelques livres. Charlton avait semblé surpris puis avait sourit. Il lui avait répondu: "Qualis Pater, talis filius." Tchan l'avait dévisagé et Charlton s'était éclaté de rire. "Tu demanderas à Aurore ce que ça veut dire." Tchen l'avait regardé pendant un moment puis l'avait remercié avant de quitter le poste de commandement. Il ne comprenait pas comme pensait Charlton. Parfois, il était tellement sérieux et à d'autres moments, on aurait dit un enfant. Soulevant les épaules en signe d'incompréhension, il était allé voir Aurore pour lui demander de lui traduire ce qu'avait dit Charlton. "Tel père, tel fils. C'est du latin." Tchen n'avait rien répondu et puis était retourné s'entraîner. Pendant les semaines qui avaient suivi, Charlton leur avait appris l'esprit de rébellion qui était entrain de naître sur les colonies. Tchen n'avait pas vraiment réagit, pour lui, ce qui comptait, c'était que ce salaud de Schwarz soit puni.

Il feuilleta le livre rapidement à nouveau. Il ne se décidait pas à le commencer. La dernière fois qu'il avait lu un livre pour le plaisir c'était… il ne s'en souvenait plus. Ça faisait trop longtemps. Il déposa son livre sur ses jambes et s'étendit plus confortement sur son lit sans quitter le ciel des yeux. Voilà 8 semaines que les autres étaient revenus de leur mission. Trois semaines après leur retour il avait été envoyé avec Érick et Alejandro pour une deuxième mission sur L-2R4577 pour détruire une petite usine de production que gérait L'Ordre. La mission s'était bien passée et au retour il avait même été surpris de voir Aurore et Esteban qui les attendaient dans les hangars. Il était passé près d'eux sans vraiment leur adressé la parole. Il ne se sentait pas très bien ici. À vrai dire, il avait l'impression d'être celui qui est toujours à part. Charlton lui avait pourtant déjà dit en confidence qu'il trouvait que l'atmosphère s'améliorait. Il devait faire allusion à Érick et Esteban qui n'essayait plus de s'entretuer à chaque fois qu'ils se voyaient. Aurore avait sûrement eu un rôle à jouer là-dedans. En tout cas, elle ne lui avait rien dit à lui. On ne lui disait jamais rien à lui. Pas que ça lui dérange vraiment. Il n'avait pas le goût de faire partie de cette petite guerre entre les deux coqs. Il était ici pour venger son père, pas pour se faire des amis. Tel père, tel fils avait dit Charlton. C'était vrai. Son père n'avait jamais été très sociable, même pas avec sa mère. Il était comme lui, c'est tout. Il se redressa et déposa le livre sur la commode. Il n'avait pas envie de lire cette nuit. Il pensa au travail qu'ils avaient accompli jusqu'à maintenant. Ils étaient devenus des pilotes. Des pilotes. Il se rappela la sensation qu'il avait eu lorsqu'il avait frappé son premier Mobile suit avec son sabre. À vrai dire, il n'avait pas beaucoup aimé. Sans le vouloir, il avait complètement détruit le suit et au même moment une vive envie de vomir lui était venue. Heureusement, ça s'était vite dissipé et il avait pu continuer à se battre. C'était donc ça tuer des gens… Il comprenait pourquoi son père ne lui en parlait pas et ne s'en ventait pas. La seule différence c'était que son père se battait pour les autres alors que lui se battait pour se venger. Il trouva que la vengeance avait un goût amer. Pourrait-il continuer comme ça tout le temps?

Il décida finalement qu'il avait envie de lire et pris le livre à côté de lui. Ça lui changerait les idées.

Il commença à lire la préface. Ce livre est dédié à ceux que j'aime. Mes enfants et ma femme. Que d'originalité! Pensa-t-il. Que ceux qui lisent ce livre transmettent leur savoir car ce n'est que lorsque que le savoir se véhicule qu'il devient vraiment utile. Il eut envie de fermer le livre. Non mais vraiment, c'était trop. La petite phrase classique. Je n'ai pas fait ce livre pour moi, malgré ce que plusieurs ont pensé et malgré ce que moi-même j'ai pensé pendant longtemps. Je connais tout ce qui est dans ce livre, si je l'ai écrit, c'est pour que d'autres puissent jouir d'une nouvelle connaissance. Tchen laissa tomber le livre et regarda devant lui. C'est pour que les autres puissent jouir d'une nouvelle connaissance… d'une nouvelle vie…Classique, pensa Tchen, mais vrai. L'auteur avait écrit son livre pour les autres, son père s'était battu pour les autres et lui… lui… il se battait pour lui-même. Il serra le livre contre lui. Il imagina l'auteur qui écrivait: J'ai écrit ce livre pour montrer que j'étais le meilleur et le plus fort…Non! Il ne réalisa même pas qu'il avait crié. Non. Il n'était pas comme ça. Non… il ne l'était pas…