Chapitre 21: Départs

Vaisseau l'Esperanza

"Tu es sérieux?"

Charlton regardait Tchen qui se tenait droit devant lui. Le regard du jeune homme était calme mais décidé. Il fit oui de la tête.

"J'ai besoin de me retrouver seul."

"Mais, tu n'as pas besoin de nous quitter pour ça. On peut te laisser du temps, n'assiste pas aux entraînements, reste plus à l'écart, c'est tout."

Tchen fit non de la tête. "Il est impossible de rester seul dans ce vaisseau et tu le sais. Je pars, sans Nakatu II si tu préfères, mais je pars."

Il fit une révérence comme la coutume chinoise l'exigeait et s'apprêtait à sortir lorsque Charlton le rappela. "Prends-le."

Tchen se retourna et regarda Charlton quelques secondes. Il avait beaucoup vieillit depuis le début de leur aventure.

"Merci." Il reprit la direction de la porte et s'arrêta sur le cadre mais ne se retourna pas. "À présent, Charlton, je ne suis plus votre allié." Il tourna légèrement la tête pour apercevoir le fils du Docteur J. du coin de l'œil. "Mais je ne suis pas notre plus votre ennemi."

Charlton sourit doucement. "Je comprends."

Les moments qui suivirent le départ de Tchen furent très durs pour le moral de l'équipe. Mais chacun mis du sien pour ne pas perdre espoir même si tout leur semblait inutile à la fin. Aurore repris sa place normale dans le groupe. Mais elle était plus calme maintenant, moins renfermée, et plus décidée. Érick devint plus mature tout en cherchant toujours à taquiner sa cousine. Son humour détendit plus d'une fois l'atmosphère lourde qui apparaît malgré les efforts des jeunes et même Esteban finit par l'apprécier un peu. Alejandro commença tranquillement à masquer ses sentiments aux autres. Il avait compris que chacun avait ses problèmes et que lui seul pouvait vraiment s'occuper des siens. Alice fut probablement celle qui pris le départ de Tchen le plus mal. Malgré tout ce qu'elle disait, elle s'était attachée plus qu'elle ne l'aurait dû au Chinois et Isabelle la surpris plusieurs fois entrain de s'essuyer les yeux en regardant dans l'espace. Charlton devint plus directif et calculateur. Il tenta le plus possible de se détacher des jeunes comprenant maintenant qu'ils pouvaient se détacher de lui plus vite qu'il ne l'aurait cru.

Malgré tous ces changements, la situation des colonies allait de mieux en mieux et en 6 mois, les quatre jeunes restant avaient remis l'ordre dans les colonies. Des gouvernements démocratiques provisoire avaient été installés et l'Ordre avait perdue considérablement de sa force militaire. Les regards étaient maintenant tournés vers la Terre. Que feraient les jeunes pour celle-ci?

Schwarz pris l'échec des colonies très à cœur mais cela ne l'empêcha pas de blâmer l'incompétence de Forain et de Graunt. Graunt faillit plusieurs fois perdre son rôle de Alter mais heureusement pour lui Schwarz n'avait confiance en personne d'autre. Don Hoffman proposa souvent à Schwarz de prendre la place de Graunt, après tout, n'était-il pas l'ami d'enfance d'El General? Mais Schwarz connaissait Hoffman et décida de garder Graunt près lui.

Mais la situation sur Terre n'était toujours pas belle. Malgré tous les efforts de la Baronne et de son groupe obscur de résistance, les camps de concentration étaient de plus en plus nombreux et de plus en plus durs. Plusieurs mouraient de faims ou de froids et personne n'osait se révolter ne voyant pas d'espoir possible. L'information de circulait pas rapidement dans les camps et on ne savait souvent pas ce qui se passait à l'extérieur de celui-ci. Souvent, les nouvelles étaient vieilles de plusieurs mois lorsqu'elles étaient rendues faits connus de tous.

10 km au Nord de Washington

Don Holberg regardait le papier que venait de lui remettre son subalterne et jura entre ses dents. Il en fit une boule avec le papier qu'il jeta au bout de ses bras. Prenant sa belle chaise style Louis XIV, il la jeta sur le mur où elle alla se fracasser et tomber en morceaux. S'approchant de son bureau, il balaya tout ce qui s'y trouvait, document, papier, crayons, téléphone, et renversa le bureau. L'effort fournit pour tout faire cela l'avait tué et il dut s'appuyer sur le mur pour ne pas tomber. Son visage rond était tout rouge et couvert de sueur. Après avoir repris son souffle, il se tourna vers le major qui lui avait apporté le papier et le foudroya du regard.

"Pourquoi êtes-vous encore là?!"

Le jeune major tressaillît et se mit au garde à vous.

"Votre nièce est là, major, elle veut vous parler."

Holberg cracha par terre. Il s'essuya la bouche avec sa chemise et passa une main dans ses courts cheveux blonds.

"Je ne veux pas la voir."

"C'est que, Don Holberg, elle insiste."

"J'ai dit: JE NE VEUX PAS LA VOIR!"

"Mon oncle!!"

Une jeune femme dans le début de la vingtaine apparue dans la pièce posant un petit mouchoir rose sur son nez. Elle regarda avec dédain la pièce devenue un champ de bataille.

"Félicity, je ne veux pas te voir." Lâcha Holberg entre ses dents.

La jeune femme sourit angéliquement à son oncle et commença à jouer avec sa longue tresse de cheveux noirs bouclés. Ses grands cils battaient doucement dévoilant de magnifiques yeux bruns. Holberg regarda sa nièce et la trouva toujours trop hispanique à son goût. Anna-Bella, sa femme, qui était en fait la sœur du père de Félicity, était blonde aux yeux bleus. Mais Jose Castillo Jimenez avait l'air d'un vrai Espagnol, comme sa fille.

"Mais, oncle Holberg, je suis venue te voir pour t'inviter à mon anniversaire à Valence dans deux semaines. J'espère que tu pourras venir."

Holberg aurait étranglé sa nièce si elle n'avait été aussi fatiguée. Il se redressa lentement et attrapa brusquement le poignet de celle-ci qui laissa échapper un petit cri de douleur.

"Idiote! Tu ne penses qu'à tes fêtes et tes soirées! Tu sais ce que je viens d'apprendre? Hein?! On a perdu L-1 I76544! C'était notre dernière colonie! Ces maudits Gundams sont entrain de nous battre, et toi tu me parles de fête!!" Il repoussa sa nièce hors de son bureau. Elle le regarda, paniquée. "Va-t-en! Je ne veux pas te voir! Tu as compris?!"

Félicity le regarda et ravala un sanglot puis, sans un mot, repartit vers la sortie.

Holberg laissa échapper un soupir de rage et fit signe à son major de s'approcher. Le major, nerveux, fit un pas vers son supérieur.

"Ramassez la feuille et allez transmettre l'information à El General, et rappelez-lui mon attachement à notre cause."

"Oui, Don Holberg."

Mais le jeune major resta sur place et ne quitta pas Holberg des yeux. Agacé, Holberg le dévisagea.

"Vous êtes collé sur place, Major?" Demanda-t-il, énervé.

"Non, enfin, oui et bien…"

"Quoi!?"

Le jeune major ravala difficilement sa salive. "Et bien, Don Holberg, le papier disait également que le Gundam identifié comme la copie du premier Nakatu n'avait jamais pris part aux batailles. Nous pensons qu'il a quitté le groupe. Nous pensons également qu'il serait un excellent atout, s'il pouvait être des nôtres."

Holberg plissa les sourcils. Pour une fois qu'un des ses soldats avait une bonne idée.

"Et vous savez où le trouver?"

"Nous avons notre petite idée, Don Holberg."

Vaisseau l'Esperanza

Isabelle était blottie dans les bras d'Érick et pleurait abondamment. Celui-ci tentait bien que mal de la consoler mais cela semblait être une tâche impossible. De toutes façons, lui aussi était ému, mais pas pour les même raisons. Il partait. Il retournait sur la Terre. Sur la Terre, pour la première fois depuis les attentats voilà plus d'un an. Érick n'était pas capable de dire comment il se sentait. Il avait tué pour la première fois de sa vie pendant cette année. Il avait également aimé plus qu'il ne pensait possible. Il serra plus fortement le corps de la jeune femme contre le sien et enfouit son visage dans ses longs cheveux bleutés.

Aurore était assise sur le sol et avait encerclé ses genoux de ses mains. Elle avait les yeux fermé et ne bougeait pas. Comme Érick, comme Alejandro, elle se battait contre ses fantômes. Elle retournerait sur la Terre. Elle irait près du Sénat, elle irait à plein d'endroits où elle avait été avec ses parents et son frère étant plus jeune. Mais ils ne seraient jamais plus là. Et elle, serait-elle jamais la même? Elle avait vieillit, elle s'était endurcie. De la petite princesse héritière du trône du monde elle était devenue pilote de Gundam qui avait volé des vies, comme Érick, comme Esteban et comme Alejandro. Elle enfouit son visage dans ses genoux pour y cacher ses larmes.

Esteban était appuyé sur la rampe et regardait l'espace. Contrairement aux autres, son visage n'exprimait aucun sentiment. Mais Esteban, comme les autres, avait aussi changé. Il avait appris à écouter ses sentiments, à faire confiance aux gens, à être humain. Il n'aurait rien pour lui sur la Terre, il avait toujours vécu sur L-4 avant la mort de son père. Mais maintenant, il y retournait. Pas pour lui, mais pour les autres. Pour la première fois de sa vie, Esteban avait la conviction qu'il faisait la bonne chose. Son père avait-il pensé cela lorsqu'il s'était battu?

Alejandro, quant à lui, regardait le Salvacìon qu'on était entrain de ranger dans le vaisseau auxiliaire qui devait les amener sur la Terre. Le Salvacìon n'était pour lui qu'une arme, rien de plus. Il ne s'était pas attaché à son Gundam comme l'avait fait Esteban, Érick et même Aurore. Alejandro ne se battait pas contre l'Ordre, mais contre l'idée de celle-ci. L'idée est beaucoup plus dangereuse que les gens qui la défendent, car l'idée ne meure jamais sauf si les gens comprennent à quel point elle est diabolique. Tuer tout le monde ne sert à rien, car il en restera toujours qui survivront avec cette idée.

La voix de Charlton retentit dans l'intercom ce qui rappela les quatre jeunes à la réalité. Lentement, ils se redressèrent et regardèrent l'image du chef initiateur sur le vidéocom.

Charlton leur sourit puis leva la main comme un père qui laisse aller ses enfants.

"Bonne chance."

Les visages des jeunes s'illuminèrent. La troisième manche venait de commencer: La Terre.