Chapitre 26 : Le point de départ

Budapest

Entrer dans le Sénat n'avait pas été une affaire difficile. Les jeunes avaient tout simplement passé par le même chemin qu'ils étaient sortis. Cette partie fut particulièrement pénible pour Aurore. Elle se rappelait son frère. Aoki qui était mort pour qu'Érick et elle puissent vivre. Mais ce n'était pas le temps de pleurer, pas encore.

L'édifice était plus que gardé. Il y avait des gardes partout et avancer s'annonçait difficile. Après avoir assommé deux gardes, les jeunes se rassemblèrent dans un bureau d'un simple fonctionnaire. S'était le meilleur endroit pour se cacher.

Aurore rajusta les fusils qui pendaient au bout des courroies qu'elle portait et les autres en firent autant. Esteban vérifia ses chargeurs.

" Je vais en avoir assez pour un bon bout. Alors, nous faisons comme prévu? "

" C'est très bien pour moi. " Répondit Érick en levant le pouce.

" D'acc. " Ajouta Alejandro en replaçant son 9mm dans sa poche. " Faites attention. " Dit-il en se tournant vers Érick et Aurore.

" Ne t'en fais pas pour nous. " Lui répondit Aurore. " On va être prudent et Schwarz sera jugé. "

La veille, les jeunes s'étaient mis d'accord qu'ils n'allaient pas tuer Schwarz. Il y avait eu assez de morts et n'ajouteraient pas celle du traître. Il serait jugé selon les lois et serait condamné selon elles également. Érick et Alejandro avaient comme rôle d'aller reprendre le contrôle des salles des communications pour transmettre ce qui allait se passer dans la salle principale à travers toutes les chaînes du monde. Ils voulaient que tous voient et comprennent que les jeunes n'étaient pas seulement des vengeurs mais bien plus. Ils voulaient la paix avant tout. La transmission serait peut-être interprétée comme du show-business mais ils s'en moquaient. Ils savaient que ce n'étaient pas cela que la majorité comprendrait. N'avaient-ils pas accepté Treize malgré tous les meurtres et les hypocrisies qu'il avait commis. Car au fond, il était bon et les gens le savaient.

Les jeunes se regardèrent une dernière fois. Peut-être ne se reverraient-ils jamais et ils le savaient. Mais ils réussiraient, du moins, il le fallait.

Alejandro et Esteban disparurent dans le corridor par la gauche alors qu'Aurore et Érick se dirigeaient dans la gueule du loup. La salle principale serait probablement la plus surveillée et ils le savaient.

Ils y avaient encore plus de gardes qu'Aurore et Érick avaient prévu. Ils arrivèrent au troisième niveau avec difficultés. Les gardes étaient bien entraînés et efficaces. Ils étaient la sécurité privée de Schwarz et ça paraissait. L'escalier était sombre. Le courant avait été coupé par les gardes à ce niveau pour rendre la progression des jeunes plus difficile. Il fallait pourtant les descendre pour atteindre le deuxième où était la salle où siégeaient les sénateurs.

" À ton avis, il y a en combien? " Aurore s'était laissée tomber contre le mur de la cage d'escalier. Elle recharge son fusil et l'arma. Ils venaient d'échapper de justesse à une grenada lancée par un soldat et ils avaient de nombreuses coupures aux visages et aux bras. Érick arracha un bout de son chandail et banda sa main qui était blessée.

" Je sais pas, dix, peut-être. "

" Et à ton avis, on va descendre comment? " Demanda Aurore. Elle s'était redressée et regardait en bas. Il faisait tellement sombre qu'elle ne pouvait voir mais des coups de fusil la fit reculer contre le mur.

" On descend pas par-là. " Répondit Érick en se planquant contre le mur. " Par-là, c'est du suicide. Ils nous attendaient c'est clair. Je ne pensais pas qu'ils connaissaient cet escalier. "

" Alors, on passera par où? On doit être en bas dans 4 minutes. Esteban et Alejandro devraient être dans la salle des communications d'ici là. "

Érick ne répondit pas. Il se gratta le nez pour enlever une goutte de sang séché. Puis, ses yeux s'agrandirent et il sortit de la cage d'escalier.
" Érick! " Cria tout bas Aurore.

" Suis-moi " Répondit-il en courant dans le couloir qu'ils venaient de traverser en tuant plusieurs gardes.

Aurore ne le questionna pas et se mit à courir derrière lui. Elle comprit ce qu'il voulait faire, lorsqu'elle vit où il se dirigeait. Elle sortit une paire de pinces qu'elle avait dans sa poche et se jeta sur la porte d'ascenseur pour l'ouvrir.

Les ascenseurs avaient été bloqués au sous-sol. Aurore et Érick s'agrippèrent aux cordes et se laissèrent glisser jusqu'à l'étage plus bas. Les fils étaient couverts de graisse et ils durent s'essuyer sur leurs vêtements pour en enlever le plus possible. Sa mère aurait été traumatisée, pensa Aurore. Mais sa mère était morte et elle ne dirait plus rien. Avec la même pince, elle ouvrit la porte et ils se retrouvèrent au deuxième étage non loin des gardes qui les surveillaient encore dans la cage d'ascenseurs. Ils étaient plus de 20. Ils n'auraient jamais réussi à les passer. Heureusement, les gardes n'avaient pas entendu les petits bruits qu'avaient faits les portes de l'ascenseur et les jeunes puirent se faufiler jusqu'à la porte de la salle principale. Il y avait cinq gardes qui la bloquaient. Les jeunes les abattirent avant que les gardes puissent réagir et les portes se retrouvèrent libres. Se regardant une dernière fois, Érick et Aurore poussèrent les portes et entrèrent dans le sénat.

La salle des communications, contrairement à la salle du sénat, se trouvait au cinquième étage. La salle était extrêmement bien gardée. Il avait été facile pour les jeunes de s'y rendre mais y pénétrer était toute autre chose. La salle était bien protégée et les gardes très nombreux. Alejandro suggéra d'envoyer une grenade mais Esteban lui expliqua que ça risquerait trop d'endommager le matériel et qu'ils en avaient besoin. Ils restèrent planqués pendant un bon moment, entendant les bruits des balles siffler au-dessus de leurs têtes.

Alejandro se retourna vers le couloir de gauche.

" Il y a des gardes qui arrivent. Si on ne fait pas de quoi maintenant. Ils vont nous encercler. "

" Si t'as une idée, be my guest. " Répondit Esteban en changeant son chargeur et en ripostant un peu pour tenir les gardes occupés.

" On se rend. "

" T'es fou! " Riposta Esteban.

" Non, écoute. " Alejandro enleva tous ses fusils et les déposa sur le sol et en cacha un dans sa veste. " Je vais faire une diversion pour les occuper. Ensuite, tu viendras finir le travail. On sait jamais, ils vont peut-être vouloir changer de camp. "

Esteban fit une moue. " Je n'y compterais pas trop. Vas-y, et ne parle pas trop. On doit avoir agit avant que le nouveau troupeau arrive. "

" D'acc. "

Alejandro cria par-dessus les coups de feu qu'il se rendait. Il leva les mains en signe de redissions puis se redressa. Les coups cessèrent et il se mit à avancer vers la porte de la salle. Deux gardes sortirent la tête dans le cadre de porte et pointèrent leurs fusils sur lui.

" Dis à ton ami de se rendre aussi. Nous savons que vous êtes deux. "

" Il s'en vient. " Répondit Alejandro. " Il dépose ses armes. "

Les gardes semblaient nerveux et très jeunes, constata Alejandro. C'était vraiment dommage. Il continua d'avancer.

" Ne fais pas un pas de plus. " Cria le jeune garde. " Ou nous allons tirer. "

Alejandro s'immobilisa. " Les gars, vous savez que vous n'avez plus d'espoir. Abandonnez votre poste. " Les deux jeunes gardes semblèrent hésiter pendant quelques instants.

" Qui nous dit que tu ne joues pas avec nous? " Demanda le plus vieux des deux. À l'intérieur de la salle, le silence s'était fait. Les paroles d'Alejandro semblaient les avoir tous touchés.

" Si vous nous aidez, maintenant, vous serez libres et votre aide sera honorée. Vous savez que Schwarz à tord et qu'il n'est qu'un monstre. Joignez-vous à nous. "

Malgré la simplicité des paroles d'Alejandro, les jeunes semblèrent y être très sensibles. Ils étaient si jeunes, si jeunes, pensa Alejandro. Ils ne devaient pas être vraiment plus vieux que lui. Si seulement ils pouvaient réaliser qu'ils avaient tord. Le plus jeune des deux gardes à la porte baissa son arme.

" Moi je veux vous joindre. " Il regarda dans la salle et Alejandro pu voir qu'il semblait tenir tête aux regards de ses compatriotes.

Puis Alejandro entendit des pas derrière lui et se retourna brusquement. Il ne vit qu'un fusil et il sut que ce n'était pas celui d'Esteban. Mais le jeune garde se trompa. Croyant avoir été dupé, il se mit à tirer partout dans le couloir. Alejandro plongea en sortant son fusil et se planqua derrière un coin. Mais le garde ne le tirait pas sur lui. Ses yeux étaient remplis de larmes et il tirait dans le couloir sur Esteban. Mais ce n'était pas Esteban. C'était le groupe de soldats qu'Alejandro avait entendu venir. Le jeune garde vola par arrière sous le coup d'une balle qu'il reçut droit au cœur, puis les gardes se jetèrent sur la résistance dans la salle et pendant plus de deux minutes, Alejandro entendit des coups de fusils, des cris de douleurs, de surprise et de désespoir. Lorsque le bruit cessa enfin, Alejandro se leva, rejoint par Esteban ils regardèrent quelques secondes.

" Ce n'est pas moi, je te jure. " Dis Esteban, les yeux remplis d'horreur.

" Je sais. " Répondit simplement Alejandro.

Ils pénétrèrent dans la salle pour assister au massacre. Il y avait près de 25 corps étendus partout sur les sols. Les soldats s'étaient entretués croyant tuer l'ennemi. Alejandro reconnu le visage du jeune soldat qui l'avait cru. Il avait changé d'avis, pensa-t-il. Des larmes de fureur coulèrent sur sa joue. Il se retourna brusquement vers Esteban.

" Allez, il faut les tasser et remettre les communications en route, Aurore et Érick vont arriver dans la salle. "

Esteban ne répondit pas et commença déplacer les corps.

" Vous. " Cracha Schwarz entre ses dents. Les yeux d'un gris d'acier se posèrent sur Aurore et Érick. " J'aurais dû vous tuer moi-même bien avant. "

Aurore et Érick avaient leurs armes pointées sur le Général de l'Ordre. La salle était remplie de gardes mais ils savaient tous que s'ils faisaient quoi que ce soit, Aurore et Érick abattraient le Général. Et contrairement à eux, ils n'avaient pas peur de mourir pour leur cause.

Les jeunes regardèrent l'homme qui avait tué leurs parents. Aurore s'avança vers Schwarz et baisa son fusil. Érick, par contre, le gardait toujours en joue.

Dans les haut-parleurs, Aurore pu entendre une voix lui parler. C'était Esteban.

" Tu peux y aller Aurore, tu es en direct avec la Terre et les colonies. On vient vous rejoindre."

Schwarz et Gruant se regardèrent et Aurore pu voir la surprise dans leurs regards.

" Adolf Schwarz, au nom de ma mère, Relena Peacecraft Yuy, Reine du monde, je vous somme de vous rendre. " Elle se tourna gracieusement vers les Dons toujours vivants. " Même chose pour vous, Alter, et vous Don Holberg, Don Hoffman et Don Forain. Rendez-vous. "

Forain serra les poings mais ne dit rien. Schwarz se mit à rire alors que le visage d'Holberg se couvrait de fureur. " C'est toi, petite garce, qui a monté ma propre nièce contre moi! Son oncle! " Il se serait jeté sur elle si Gruant ne l'avait pas retenu.

" Votre nièce a choisi son camp elle-même Holberg. C'est le dégoût de votre personne qui l'a aidé à choisir. " Aurore était tranchante.

Holberg se libéra de Gruant et s'arrêta lorsque Érick sortit un deuxième fusil qu'il pointa sur lui.

" Ne bougez pas Holberg ou je vous abats comme un chien. Et croyez-moi, ça me fera plaisir. " Érick avait les mâchoires tendues et Aurore pouvait dire qu'il se retenait d'abattre cette ordure sur place. Elle leva la main pour calmer la situation. Malgré eux, les Dons se détendirent.

" Vous n'avez pas d'autre espoir et vous le savez. Dans quelques minutes, des alliés des pilotes entreront dans la salle et vous mettront sous arrêts. Le mieux, c'est d'abandonner. Vous avez fait assez de morts et de mal à tous. "

Aurore était étrangement calme. Peut-être était-ce son père qu'elle sentait en elle, ou sa mère, elle ne savait pas réellement. Mais mourir, en cet instant ne lui importait guère, tant que justice était fait.

Schwarz la regarda quelques instants puis se remit à rire. " N'avez-vous jamais compris, Aurore Peacecraft Yuy, que je ne perds jamais. " Un mauvais sourire apparu sur son visage.

Encore une fois, Aurore vit la scène suivante au ralentit. Elle le vit lever un fusil vers elle puis presser sur la détente. Elle sentit qu'on la poussait. Elle entendit une autre détonation puis vit Schwarz tomber sur le sol. Elle sentit un poids s'abattre sur elle puis sentit du sang chaud sur elle. Des bruits dans le corridor, des cris, puis tout s'éclaira et elle sombra dans la lumière.